Carnets sur sol

   Écoutes (et nouveautés) | INDEX (très partiel) | Agenda concerts & comptes-rendus | Playlists & Podcasts | Instantanés (Diaire sur sol)


Résultats de votre recherche de mathias vidal.

lundi 1 août 2022

Les meilleures nouveautés de la mi-2022




Estimés lecteurs,

Je m'apprête à prendre pour quelques jours congé de vous : je suis obligé, afin d'éviter la publicité pharmaceutique des automates russes et l'expression de l'absence de vie d'un troll récurrent ici, de ne pas publier les commentaires tout de suite, mais ils seront  lus avec attention et joie (et obtiendront évidemment une réponse) dès mon retour.

Pour les plus enragés / désœuvrés, je laisse ici un point d'étape sur les écoutes discographiques de l'année déjà pour plus de moitié écoulée. Cela permettra aussi de retrouver les références dans le moteur de recherche du site, plutôt que de devoir jongler avec un hébergeur extérieur (dont personne ne peut prévoir, au demeurant, la persistance).

Avec la sélection « rechercher dans la page », vous pouvez grâce à l'étiquetage retrouver les 79 écoutes du Cycle Ukraine, ainsi que toutes les nouveautés discographiques écoutées (il y en a 215). Vous pouvez aussi copier-coller les cœurs pour retrouver spécifiquement les disques à trois cœurs (le mien est large, il y a 176 disques concernés) ou à deux (319…).

Pour vous mettre en appétit, quelques disques ressentis à ♥♥♥, dont vous retrouverez les commentaires ci-après.



A. Nouveautés

2022_nouveautes.jpg

→ Cardoso, Messes par Simon Lloyd
→ Aumann, Musique de chambre par Letzbor
→ Campra, Le Destin du Nouveau Siècle par Bismuth
→ Schumann Quatuor piano-cordes en ut mineur par le Dvořák Piano Quartet
→ Offenbach, Le Voyage dans la Lune par Dumoussaud
→ Massenet, Mélodies orchestrales par Niquet
→ Saint-Saëns, Phryné par Niquet
→ Fauchard, Œuvres pour orgue, par Fiedhelm Flamme
→ Taneïev, chambre par Spectrum Concerts Berlin
→ Perosi, Trio à cordes n°2 par Roma Tre Orchestra
→ Marinuzzi, Palla de' Mozzi, Grazioli
→ Louis Andriessen, Smit, Pijper et piano à quatre mains du XXe néerlandais par les Jussen
→ Vladigerov, Orchestral Works 3 par Vladigerov
→ Alberga, Concertos pour violon par Swensen
→ Solos de violoncelle par Thibaut Reznicek




B. Nouvelles versions

2022_nouveautes.jpg


→ Haydn, Symphonies par le Basel Kammerorchester
→ Voříšek & Mozart 38 par Blomstedt
→ Beethoven, Symphonies par Le Concert des Nations
→ Schubert, Winterreise par Benjamin Appl
→ Ireland et Liszt, sonates par Tom Hicks
→ Brahms, Concerto pour violon par Degand & Rhorer
→ d'Indy, Chansons & Danses par le Polyphonia Ensemble Berlin
→ Debussy, Pelléas & Mélisande par Les Siècles
→ Sibelius, Symphonie n°7 par Nicholas Collon
→ « Mirages » par Roderick Williams



C. Découvertes personnelles

2022_nouveautes.jpg


→ Rode, Concertos pour violon par Friedemann Eichhorn
→ Dupuy, Ungdom og Galskab par Schønwandt
→ Röntgen, Concerto pour violon en la mineur par Ragin Wenk-Wolf
→ Alfvén par Alfvén
→ Kienzl, Quatuors (et trio) par le Thomas Christian Ensemble
→ Kienzl, Der Evangelimann & Der Kuhreigen
→ R. Strauss, Alpensinfonie par Shipway
→ Ornstein, Sonates par Janice Weber
→ Wirén, Quatuors par le Wirén SQ
→ Maria Bach, musique de chambre par Hülshoff & Triendl (et aussi le disque CPO)
→ Eben, Job par Titterington
→ Alberga, Quatuors



D. Doudous increvables

2022_nouveautes.jpg


→ Grétry, Raoul BB
→ Stenhammar, quatuors par les Gotland SQ, Fresk SQ et Copenhagen SQ
→ Nielsen, Saul og David par Neeme Järvi
→ Verdi, Il Trovatore par Muti 2000
→ Pejačević, Quatuor avec piano et Quintette par Triendl & Sine Nomine SQ
→ Saint-Saëns, Symphonie n°3 par Paul Paray



Cliquez ici pour ouvrir tous les commentaires sur les disques.

Suite de la notule.

jeudi 20 janvier 2022

Circé de DESMAREST – Que s'est-il passé lorsque, musicien, on rate son concert ?


versailles_opera_royal_photo_2.jpg
(Photos de l'Opéra Royal de Versailles prises par mes soins le soir du drame.)

Inspiré de faits réels (et récents).

Pour une fois, Carnets sur sol va mettre du sel sur les plaies : je vous mène au cœur de l'expérience d'un concert qui part dans le décor. À quoi ça ressemble du côté du spectateur ?  Qu'est-ce qui peut causer la catastrophe du côté des interprètes ?

Vous le verrez, sous les apprêts d'une anecdote censée vous divertir, il y a de quoi prendre conscience, pour les mélomanes, de la façon dont se construit l'exécution musicale, de ce qui se passe en amont du concert, des conditions pratiques de l'exercice de la musique, des dangers de ce glorieux état, de l'épaisseur de la glace sur laquelle dansent tous ces funambules de l'instant.




Tout commence par un petit récit. Je vous raconte l'aventure, que vous avez peut-être déjà pu découvrir grâce à ma glorieuse présence sur les réseaux de l'instant, puis nous entrerons dans les conjectures, les indiscrétions, les bruits de couloir… et surtout une petite porte d'entrée sur ce qui peut causer un tel accident industriel, et le danger qui est le pain quotidien – invisible aux yeux du spectateur – de ces métiers où tout se joue en un moment, sur des réflexes très précis.



#ConcertSurSol #66

Quelle expérience étrange !

Circé de Desmarest (1694) sur un livret de Madame de Saintonge, que j'espérais depuis près de 20 ans (et reportée deux fois à Versailles)… se révèle un décalque LULLYste un peu paresseux, et joué dans des conditions… inhabituelles.

♠ Je vous raconte ?



[[]]
Seul extrait disponible au disque, l'air d'Astérie qui ouvre l'acte II, ici par Véronique Gens, Les Surprises, Simon Bestion de Camboulas (dans son récital Alpha « Passion »).
(Superbe interprétation d'ailleurs, et récital qui contient la plus extraordinaire scène d'invocation de Médée qui soit !)





Avant la représentation

Projet des Nouveaux Caractères (l'ensemble de Sébastien d'Hérin) remettant au théâtre pour la première fois cette tragédie en musique, et incluant une restitution organologique (effectif et instruments des 24 Violons du Roy).

→ Reporté début 2020.

→ Reporté début 2021.

→ Donné ce 11 janvier 2022, un soir seulement, juste après les annulations des représentations de Georges Dandin dans ce même théâtre, trois jours auparavant.

Un petit miracle.

Laurent Brunner, directeur de Château de Versailles Spectacles, grimpe sur le proscenium et annonce : « Véronique Gens a tout donné pendant ces cinq jours d'enregistrement, mais à présent elle est souffrante et donnera seulement la réplique ».

(Finalement elle chanta très bien – mais à petit volume. Rien à avoir avec ce jour où, chantant la dernière réplique de Béatrix mourant, elle s'évanouit complètement sur scène, manquant de se fendre le crâne dans la fosse – soignez toujours vos relations avec la mezzo du pupitre d'à côté, ce peut vous sauver, sans exagération, la vie.)

L.B. poursuit : « J'ai eu la délicieuse surprise de découvrir que le synopsis du programme est faux, rien à voir avec l'œuvre à laquelle vous assisterez. Il vous raconte les amours de Circé avec le Tibre, rien à voir, c'est bien l'histoire avec Ulysse, tirée de L'Odyssée, dont parle l'opéra de ce soir. »

[Ce fut un soir, ce fut un matin. Pôle Emploi était riche d'un nouvel adhérent.]

J'ajoute, moi, que tous les chanteurs ne sont pas crédités dans le programme de salle (notamment des rôles courts mais capitaux comme Vénus) : ainsi ladite Vénus, excellente chanteuse issue du chœur, que j'espère réentendre plus en longueur, n'est pas mentionnée. Romain Bockler, qui chante Polite, l'amant du couple secondaire, se voit même attribué le rôle de Phaebetor (divinité des mauvais rêves) qui n'intervient que dans le Sommeil (chanté par Arnaud Richard)… C'était la pagaille au service documentation & communication, manifestement. (Mais par les temps qui courent, on sait bien que tout doit être bouclé sans que les personnes compétentes ne soient nécessairement disponibles.)



L'œuvre

Assister à la résurrection de témoignages sonores enfouis est toujours un privilège, on ne le répètera jamais assez. Même lorsqu'on ne les trouve finalement pas extraordinaires : on a le luxe de se faire un avis, l'expérience est formidable en soi.

Circé appartient à cette veine : beaucoup de quasi-plagiats de LULLY (exacte même écriture en beaucoup d'instances), comme les scènes de jalousie dont l'harmonie et les procédés rythmiques sont empruntés littéralement à Armide (ils viennent très précisément de l'Ouverture, d' « Enfin il est en ma puissance », du postlude du V), comme le Sommeil qui est un pur décdalque d'Atys, comme l'acte IV de torture dont le dispositif doit manifestement au IV de Thésée

Le livret de Madame de Saintonge, pourtant tout à fait réussi dans Didon, présente de réels défauts. Sa structure n'est pas très claire (beaucoup d'actions à cheval sur des actes), mais elle présente surtout des incohérences : Vénus annonce qu'Ulysse va aimer Circé, ce qui n'arrive pas ; Circé prépare un piège pour faire souffrir Ulysse et son amante à l'acte IV, mais à l'acte V les voilà libres sans plus d'explication (le piège n'a pas fonctionné, tout simplement). Ces annonces non suivies d'effet sont contraires à la grammaire dramatique la plus intuitive, tout de même, surtout que le reste du livret est, en particulier dans son vocabulaire et sa syntaxe, extrêmement conventionnel.

Et contrairement à Didon qui sublimait les emprunts LULLYstes (par ailleurs réussis dans ce cas, comme la Chaconne !) par une inspiration de première farine (et de pâté de foie supérieur), Circé donne davantage à entendre le Desmarest de la pastorale Vénus & Adonis : lisse, dénervé, très homogène, peu saillant en prosodie et mélodie.

Plutôt une déception, donc. Avec tout de même quelques très beaux moments :

✓ le chœur à fugato « Fais durer ses plaisirs » à la fin du II (d'un genre typique de la génération d'après LULLY, cf. les chants d'hyménée du I de Callirhoé de Destouches ou le Prologue de Pirame & Thisbé de Francœur & Rebel) ;

✓ l'air en chaconne des craintes d'Astérie au début de l'acte II (dans la lignée délicieuse du duo d'amour de Roland ou de l'air d'entrée de Callirhoé) ;

✓ le trio du Sommeil (le prélude est fade, mais le trio vocal splendide, beaucoup plus riche qu'Atys) ;

✓ la mort d'Elphénor, récitatif assez nu et plutôt saisissant (racontée en réalité à l'acte suivant, comme celle d'Athamas dans Philomèle) ;

✓ la petite chaconne d'accompagnement du duo amoureux Éolie-Ulysse, délicieuse ;

✓ et la grande scène finale de Circé, ébouriffante – où pour le coup la musique, tout en s'inspirant clairement du caractère d'Armide, est vraiment typique de Desmarest, et use des procédés plus libres de la nouvelle génération, avec une ligne de chant originale et très expressive. Un grand moment.



L'interprétation

De ce côté-là, c'était plus… étrange.

J'ai bien sûr beaucoup aimé Cécile Achille (Éolie, aimée d'Ulysse) – que je suis depuis le CNSM, belle voix bien faite et vraiment investie dans l'expression (expression qu'on voyait passer sur son visage, la façon d'émettre les sons avec sa bouche traduisait de façon étonnamment éloquente les émotions !) – et surtout Vénus (la voix la mieux projetée, une choriste non créditée), Véronique Gens (Circé) remarquablement timbrée, même si le volume sonore est beaucoup plus faible que d'ordinaire (de la méforme de grand luxe, j'ai entendu bien pire !).

Il faut s'habituer aux manières très XIXe de Nicolas Courjal (Elphénor) : couverture en [eu], rubato, allègements en soufflets… mais la présence vocale est tellement extraordinaire…
Dans sa mort et son apparition spectrale, le grave est tellement riche, soyeux et généreux qu'il donne l'impression de s'accompagner lui-même !

Caroline Mutel (Astérie) a énormément mûri et progressé (diction beaucoup plus incisive, timbre moins flottant, plus mordant) – peut-être est-ce aussi la tessiture beaucoup plus basse, qui flatte bien mieux ses qualités. En tout cas je n'avais jamais adoré ses aigus très flous, et ici, sans les aigus (le rôle doit culminer au sol4, et à un diapason de près d'un ton plus bas que le nôtre !), ce qu'elle faisait était véritablement remarquable. (Une nouvelle carrière de mezzo à creuser dans les années à venir ?)

Mathias Vidal (Ulysse), à l'inverse, paraît en général plus engoncé dans les rôles LULLYstes vraiment graves pour son profil de ténor élancé. Il a au demeurant tous les graves nécessaires (presque barytonnant), mais à cela s'ajoutent ses manières emportées, qui font merveille dans la tragédie post-gluckiste ou dans les opéras du XIXe s., mais qui sonnent un peu hachées et pas toujours pleinement aristocratiques dans les opéras du XVIIe.



L'exécution

Et c'est à présent que tout devient totalement lunaire.

L'orchestre ne parvenait pas à jouer ensemble ni à suivre les chanteurs !  À de multiples moments, ce n'était tout simplement pas la bonne partie qu'ils jouaient en même temps. Le chef cherchait bien évidemment à rattraper les choses mais ses gestes restaient sans effet, les musiciens et les chanteurs le regardaient perdus, sans en tirer l'aide espérée. On voyait dans les entrées les pupitres, konzertmeister inclus, le regarder, se tendre, tenter d'entrer au bon moment… et rater. C'est arrivé assez souvent, en particulier dans le Prologue et les actes I & V.

Ce n'était pas tout le temps non plus, le reste était en place ; et ce sont de très bons professionnels, ça ne ressemblait pas à du Schönberg. Mais chez des professionnels de ce niveau, je n'avais jamais vu un tel effondrement collectif.

Remarque semi-ingénue d'un camarade à l'entracte : « c'est une audace propre à Desmarest, autant de liberté dans la prosodie par rapport à l'accompagnement musical, c'était bien voulu ? ».

Cela se manifestait initialement par des décalages et des faux départs inhabituellement nombreux et audibles, et une façon, pour les chanteurs, de ne pas exactement respecter les valeurs écrites, de chanter un peu comme l'on parle, dans une globalité qui a son point d'arrivée et son point de départ, mais avec un détail rythme assez flou (des pointés qui ne sont pas exactement des 3/4 de valeur, des doubles croches qui traînent un peu, etc.). Rien  de très spectaculaire pour l'auditeur, on reconnaissait bien ce qu'on entendait.

Cependant la pagaille a tellement gagné en intensité à l'acte V que l'orchestre a dû s'interrompre au début d'une danse : ils ne jouaient pas du tout la même danse ou le même système dans la danse. Et ils ne l'ont pas fait sourire aux lèvres et en s'adressant au public comme cela advient quelquefois : « ah, ah, ça arrive, on s'est fait avoir, allez on reprend ».

Non, ils étaient abattus.

Et Gens, l'une des chanteuses les plus capées (et captées) depuis que l'on enregistre ce répertoire, totalement perdue dans son final de bravoure, le sommet de l'opéra, commence en même tmeps qu'une ritournelle (dix mesures en avance donc !) ; pourtant le violon est écrit sur sa partition, même si c'est une réduction, confusion très inhabituelle !
Elle aussi regardait le chef sans rien y comprendre. Et lui faisait des signes, qui n'étaient toujours pas compris, et faisaient plutôt rater davantage lorsqu'ils étaient suivis, créant un surcroît de flottement.

À ce moment (à cinq minutes de la fin), on a senti qu'ils lâchaient tous prise. Fatigue aidant, plus rien ne passait. Pour les ponctuations des récitatifs de cette grande scène finale, aucun accord n'était au bon endroit. Les musiciens ont essayé d'abord d'attendre les fins de phrase de la chanteuse, créant des blancs assez audibles, puis tous ont fini, résignés, par jouer au fil de l'eau, sans trop compter les temps : elle chante, ensuite on joue, etc. Véronique Gens, elle, a fini par chanter à mi-voix la fin de sa tirade, comme n'osant pas déclamer tout fort une ligne vocale erronée.

Malaise.



Problème

Soyons honnête : pour le spectateur, les décalages, ça se limite le plus souvent à frimer avec les copains en relevant telle erreur pour voir entre nous si on a une bonne oreille, comme un jeu des sept erreurs en comparant avec le disque (ou, pour les plus sérieux, la partition). C'est très bien, mais quelques fausses entrées, il ne faut pas pousser, ça ne gâche pas un spectacle, loin s'en faut.
Et on ne va surtout pas leur en tenir rigueur pour un inédit monté en temps de covid.

Ici, le problème réside dans le fait que ce n'était pas une erreur ponctuelle, ni même trop fréquente : on sentait que les musiciens (et même les chanteurs, par moment), marchaient sur des œufs.

Or, il s'agissait d'une œuvre que le public découvrait, et dont le livret n'était ni très clair (et le programme de salle était faux…), ni très palpitant (ses enjeux et coups de théâtre étant comme désamorcés par ses propres contradictions), écrit dans une langue assez prévisible et plate.
Musicalement aussi, beaucoup d'emprunts à LULLY, sans que cela ne dynamise véritablement la composition, qui recèle manifestement peu de fulgurances.

Et joué ainsi prudemment, avec les musiciens absorbés par les temps à compter et les entrées à réussir, le rubato des chanteurs à comprendre (manifestement, ils étaient décontenancés par la liberté de phrasés à certains moments, comme s'ils ne s'étaient pas concertés), l'œuvre ne pouvait bénéficier du coup de pouce nécessaire à prendre réellement vie. Vrai également pour les chanteurs, un travail de précision sur la prosodie aurait permis de faire claquer certaines répliques.
C'est là que ce situait la difficulté, plutôt que sur le détail de ce qui n'était pas en place et qui, honnêtement, n'aura gâché la vie (ni même la soirée) de personne.



Les Nouveaux Caractères

Je m'empresse de préciser qu'il ne s'agissait pas d'une erreur de casting. Les Nouveaux Caractères sont un ensemble de premier plan. Il suffit d'entendre ces extaits étourdissants de Grétry ou bien au disque, les couleurs formidables dans Les Surprises de l'Amour (Rameau), ou en la mise en valeur de l'écriture très violonistique de l'orchestre de Scylla & Glaucus – le compositeur Leclair était précisément virtuose du violon, et cet aspect très bien mis en valeur.

[[]]

Château de Versailles Spectacles n'a pas embauché n'importe qui au doigt mouillé.

On ne peut par ailleurs pas leur en vouloir : d'abord, il s'agit d'un inédit, et s'ils ne s'y étaient pas attelés courageusement (sachant qu'on a toujours moins de public et de couverture presse lorsqu'on fait un Desmarest plutôt qu'un Atys ou un Platée…), on ne l'aurait jamais entendu – et j'aurais en ce qui me concerne continué de regretter qu'on nous prive de ce probable bijou.

De surcroît, contrairement à beaucoup d'autres arts, la musique est un art de l'instant : on peut retoucher calmement un texte, une œuvre picturale ou plastique, une installation, une pellicule, même retravailler à froid une mise en scène… Mais pour la musique, il y a toujours un moment où il faut se frotter à l'instant. Et la chose est encore plus technique que la récitation d'un texte comme au théâtre, la précision requise doit se dérouler à des valeurs de temps inférieures à la seconde.
C'est pourquoi il est très difficile, à mon sens, de juger sévèrement des musiciens qui se trompent : ce n'est pas nécessairement qu'ils n'ont pas travaillé. On peut rater quelque chose dans une demi-seconde, une attention qui se détourne, un doigt qui glisse, une erreur de perception d'un geste… Et pas de retouche possible dans un concert.

Défoncez le disque, si vous tenez absolument à être méchant ; mais pour ce qui est du concert, il est vraiment difficile d'émettre un jugement moral sur le travail des musiciens, sauf à être réellement informé d'une désinvolture attestée. (Il y a tout de même certaines attitudes qui ne trompent pas les soirs de routine, coucou l'Opéra de Paris !) Mais je n'ai pas observé ce type d'insouciance mardi soir, du tout. Plutôt de la détresse et de l'abattement.

Car pour moi le spectateur d'un soir, c'est un fait insolite. Pour eux dont c'est le métier – et un métier assez peu rassérénant ces jours-ci – rater, ce doit être plutôt dur à vivre.
J'ai eu deux confirmations, de source interne, que le chef était particulièrement tendu dans la journée précédant le concert, disant même qu'il craignait un échec le soir. Ils avaient sans nul doute à cœur de faire du mieux possible.





versailles_opera_royal_photo_2.jpg




Pourquoi ?

Je tente quelques hypothèses plausibles et cumulables, en attendant l'arrivée de renseignements complémentaires. (J'ai commencé ma petite enquête, mais je n'ai pas encore tous les éléments. Si quelqu'un d'entre vous est au courant des véritables causes, je suis très intéressé.)

Comment est-il possible, lorsque l'on est des professionnels sérieux et bien formés, de s'effondrer lors d'une représentation publique ? 
Je pose la question non pour flétrir, mais pour tâcher de comprendre les mécanismes à l'œuvre : les plus informés savent évidemment tout cela, mais pour une partie du public plus mélomane-discophile ou mélomane-spectateur peu porté sur la coulisse, il y a peut-être de petites découvertes à la clef.

Je commence par ce qui est propre à ce concert.

--

a) La nouveauté

Quand on propose une œuvre inédite, on ne peut pas prendre de raccourcis en écoutant le disque et en se disant qu'on va juste faire à l'oreille comme ça sonne, chacun écoute sa partie et reproduit un peu ce qu'il entend.
Si le temps de préparation individuelle ou de répétition collective s'avère trop court, il n'y a pas de parachute comme lorsqu'on joue Don Giovanni ou Carmen (chacun sait à peu près à quoi ça ressemble).

--

b) Les reports

Il est possible que le nombre de répétitions alloué ait été en partie entamé par les précédentes annulations. Dans le même temps, les musiciens embauchés ne sont peut-être plus tout à fait les mêmes ; les présents auront tout oublié, et les nouveaux ont tout à apprendre. Tout cela rogne potentiellement sur le planning initial.

De fait, j'ai aperçu beaucoup de nouvelles têtes, de petits jeunes jamais vus auparavant dans d'autres ensembles, ni surtout ici – en réalité, si on compare à la vidéo de Grétry susmentionnée : personne en commun.

--

c) La jeunesse

En dehors du continuo, où sévissaient quelques visages connus (parfois perdus aussi, mais beaucoup plus sûrs d'eux : les deux plus célèbres de l'orchestre, Benoît Hartouin au clavecin, Frédéric Baldassare à la basse de violon étaient clairement ceux qui tenaient la maison), les musiciens semblaient bien tendres, à peine sortis de leurs études. Dans des conditions adverses, ils avaient sans doute moins de ressources que les vieux routiers qui ont traversé toutes les surprises depuis des décennies.

--

d) La lutherie

Le projet était couplé avec une recréation d'instruments anciens avec des luthiers en lien avec le CMBV : l'idée était de restituer l'instrumentarium des 24 Violons du Roy – avec leurs dessus de violon plus petits que les violons modernes, les hautes-contre de violon un peu plus grands, les tailles de violon proches de l'alto, les énormes quintes de violon et pour finir la basse de violon (un peu plus large que le violoncelle).

C'était évidemment un enjeu supplémentaire, il faut maîtriser ces instruments nouveaux, leur tenue, leurs écarts, et ils ne sont en général pas prêtés longtemps avant les répétitions : on m'a raconté (à l'occasion d'un autre concert) que pour des vents, de facture très inhabituelle, avec de nouveaux doigtés et tout… on les livrait une semaine avant le concert !

Sur une œuvre nouvelle et avec des musiciens moins expérimentés, c'est un degré de difficulté supplémentaire. (Quand je dis qu'on ne peut pas commencer par blâmer les musiciens avant de s'informer sur les conditions réelles des répétitions : apprendre une nouvelle spécialité professionnelle en une semaine tout en travaillant sur un sujet nouveau, voilà qui calme les velléités de vitupération.)

Jusque là, à peu près tous les ensembles sont susceptibles de vivre ce genre de contrainte sans sortie de route majeure.

Mais j'ajoute une hypothèse très crédible (que je n'ai pas pu faire confirmer pour l'instant), et bien dans l'air du temps.

--

e) Covid superstar

(Je disais « la covid » bien sagement auparavant, mais j'aime trop voir l'Académie Française prophétiser la Fin de la Civilisation pour ne pas contribuer un peu à sa détresse quotidienne.)

Considérant les centaines de milliers de cas quotidiens, et l'exposition structurelle des musiciens (vie très communautaire, chanteurs et vents non masqués…), il serait étonnant qu'il n'y ait pas eu des musiciens empêchés.

Et là imaginez : des pupitres entiers manquent potentiellement à l'appel, peut-être dans des secteurs stratégiques du continuo ou des chefs de pupitre. On arrive le jour suivant, et les nouveaux débarquent sans avoir rien répété, ils découvrent même l'existence de l'œuvre (et une fois encore, pas d'enregistrement pour se mettre rapidement dans le bain, il faut lire sa partie, on n'a probablement pas trop le temps de se pencher sur celle des autres). Et cela a pu potentiellement advenir plusieurs fois pendant la semaine…

On mesure l'épuisement physique et nerveux de ceux qui voient le temps passer sans pouvoir avancer, ainsi que de ceux qui débarquent tout d'un coup. D'autant qu'il y a un disque à la clef, il ne faut pas se rater.

--

f) Les temps de répétition

Laurent Brunner, le directeur de la programmation de l'Opéra Royal, a assuré que l'ensemble répétait depuis 5 jours, et qu'il y aurait encore quelques jours pour finir l'enregistrement du disque (notamment les traditionnelles retouches du concert, je suppose). En partant du principe qu'on ne nous a pas menti (et c'est très probablement vrai, puisque le disque ne va pas s'enregistrer tout seul !), ces cinq jours n'ont pas été suffisants.

On peut bien sûr supposer que le concert a été donné trop tôt dans le processus, pour pouvoir faire ensuite les retouches (cela arrive quelquefois, mais je n'ai jamais vu de cas où ça se percevait aussi palpablement).
Ou bien soupçonner le chef d'être peu efficace en répétition, les musiciens peu préparés… Mais tout cela, à vrai dire, on n'en sait rien – et ce que j'ai entendu jusqu'ici des Nouveaux Caractères ne me laisse pas penser qu'ils sont d'aimables fumistes qui se gobergent à la subvention.

C'est le moment de lever un coin du voile sur la répétition dans ce type de configuration. Pour monter une production de ce genre, il faut des finances. Celles-ci sont allouées par l'organisateur (ou la coproduction). Et c'est lui qui fixe les coûts, voire les durées s'il héberge les répétitions en son sein.

Concrètement : Château de Versailles Spectacles contacte Les Nouveaux Caractères (ou bien Les Nouveaux Caractères soumettent leur projet, tout dépend de qui vient l'impulsion). L'organisateur demande à l'ensemble combien de jours de répétitions sont nécessaires pour monter cette tragédie en musique de type post-LULLYste. Le chef d'ensemble fait une évaluation et communique proposition. En général (me souffle une source particulièrement bien informée), les organisateurs font une contre-proposition de l'ordre de 30 à 50% de l'enveloppe souhaitée. Il faut donc être très efficace !

À charge ensuite à l'ensemble musical de décider s'il accepte ou non. Mais il faut bien vivre, et sécuriser des engagements réguliers. En général, on accepte donc, tout en sachant que ce sera serré, et qu'on ne pourra pas avoir le degré de finition dont on rêve.

Vous voyez le tableau : vous savez que vous avez moins de temps que nécessaire pour tout boucler, mais le concert et le disque vous attendent au bout du chemin. Ajoutez un effectif un peu plus jeune que de coutume, des remplacements plus nombreux pour cause de couronnement viral, et vous tenez la petite frange de désorganisation qui peut faire la différence entre le succès (quitte à ce que les musiciens soient frustrés de ne pas avoir pu aller plus loin) et l'accident industriel.

Évidemment, plus un ensemble est célèbre (et peut faire remplir sur son nom, comme Les Arts Florissants ou Les Musiciens du Louvre, voire pour l'ultra-niche de la tragédie en musique Les Talens Lyriques), plus il peut négocier un nombre de services (sessions de répétition) élevé.
Comme d'habitude, la Victoire vole au secours du succès préexistant : plus un ensemble est aguerri, plus on lui propose des conditions favorables, ce qui assoit encore davantage son prestige lorsque le concert paraît si léché – forcément, il peut recruter les meilleurs instrumentistes avec un temps de répétition supérieur !

Vous comprenez à présent pourquoi Hervé Niquet (qui certes, comme beaucoup d'entre nous, ne devait pas adorer les Prologues) coupait dans les tragédies en musique ?  Cela fait moins de sections à travailler… et permet d'optimiser le temps passé, pour faire du meilleur boulot sur le reste.
Je fais partie de ceux qui ont râlé à l'époque (avant qu'il n'aille voir vers d'autres répertoires plus à son goût / où on lui fiche davantage la paix ?), parce qu'on enregistrait pour la première (et sans doute dernière) fois un inédit, et qu'on ne le donnait pas intégralement… mais d'un point de vue strictement économique et pratique, le procédé se défend totalement.

À cela s'ajoute qu'il est régulièrement d'usage de répéter, en particulier pour optimiser la présence du chœur et des solistes – aussi pour gagner du temps – dans le désordre. Ce peut produire de très beaux résultats cohérents : les opéras enregistrés à Versailles par Les Accents de Guy van Waas, dont La Vénitienne de Dauvergne, Thésée de Gossec et surtout le mirifique Céphale & Procris de Grétry… suivaient cette logique économique.

Si jamais les musiciens venaient d'arriver ou n'avaient pas une bonne vision d'ensemble, il a pu y avoir du flottement en enchaînant des numéros qu'on n'avait jamais (ou qu'une fois, j'espère qu'il y a eu une générale !) joués en les enchaînant. Et Dieu sait qu'il y en a, des petits morceaux de caractère très distincts qui s'enchaînent dans une tragédie en musique !

--

g) Le métier de chef

C'est un sujet que j'ai déjà abordé dans la notule autour du métier de chef d'orchestre (les vrais, les faux…), et qui a manifestement eu son importance dans l'effondrement nerveux de mardi soir.

Pour les chefs d'orchestre traditionnels (formés par des cours spécialisés, virtuoses de la gestique, voyageant d'orchestre en orchestre), les chefs d'ensemble baroque, qui n'ont pas le même savoir, ne doivent pas être perçus comme de véritables chefs d'orchestre. Le chef d'ensemble connaît ses musiciens, a le temps de communiquer longuement avec eux. Il fait moins de programmes, et les produit souvent en tournées, si bien que tout a le temps de maturer en se parlant, sans avoir nécessairement de technique de direction hors norme – comme je le mentionnais dans la notule en question, il est extrêmement difficile pour un observateur extérieur (ou même intérieur) de juger de la qualité d'un chef d'orchestre, mais on peut lire de façon récurrente, et notamment de la part de musiciens d'orchestre, des critiques acerbes sur l'incompétence (au moins gestuelle) des chefs baroques reconvertis comme Minkowski, Niquet, etc.  

Pour résumer la problématique : il existe deux types de postes de chefs d'orchestre traditionnels.

a) Le directeur musical est présent tout au long de la saison et sur plusieurs années : il choisit (en accord avec la direction administrative) le programme, les solistes et autres chefs à inviter, fait travailler l'orchestre sur la durée (notamment sur l'identité sonore, les dominantes de répertoire…). Le chef d'ensemble spécialiste comme d'Hérin connaît ce travail, c'est celui qu'il mène au quotidien.

b) Chef invité est un tout autre type de statut : il travaille, l'espace d'un concert, avec un orchestre qu'il ne connaît pas forcément bien. Certains chefs invités reviennent souvent, mais ils n'ont pas la même tâche d'encadrement ni les mêmes responsabilités administratives. Il faut donc être capable, le temps de deux ou trois services, en général (un service est une session de répétition, 3h disons), d'avoir mis en place 1h30 de musique et, pour éviter le four, d'avoir transmis des souhaits esthétiques, mis en valeur détails, et quand c'est possible d'avoir bien habité l'essentiel des œuvres… Si vous vous êtes jamais demandé : « mais pourquoi l'ouverture / l'accompagnement du concerto sonne moins bien que la symphonie ? » ou « c'est incroyable, par moment le chef souligne des détails inédits, et à d'autres tout le monde semble en pilote automatique »… c'est très probablement lié à ce temps de répétition limité.

Les chefs très en vue ou les œuvres difficiles peuvent obtenir davantage de services – il y aura plus de répétitions pour Die Soldaten de B.-A. Zimmermann que pour une soirée, au hasard, Symphonie Pastorale & Triple Concerto… Mais vous voyez bien l'enjeu d'être efficace en répétition, et c'est pourquoi les musiciens d'orchestre jugent souvent assez sévèrement les chefs bavards. S'ils commencent à arrêter la musique à chaque fois qu'ils ont quelque chose à dire, on ne pourra pas faire beaucoup de travail de mise en place ni d'interprétation… Les chefs commentent donc pendant que l'orchestre joue, et surtout, ils doivent disposer d'une gestuelle suffisamment expressive pour faire comprendre le type de son ou d'articulation de phrasé qu'ils souhaitent, sans tout verbaliser mesure par mesure ! 

Et c'est spécifiquement pour ce rôle de chef invité, qui débarque quasiment le soir du concert (l'interprétation continue souvent à s'affiner pendant le concert !), et qui représente le cas de l'immense majorité des chefs – assez peu, en proportion, ont leur propre orchestre, ou alors c'est l'orchestre qu'ils ont fondé et la question de la gestique se pose beaucoup moins : ils se connaissent par cœur.

Vous voyez à présent où je veux vous mener : Sébastien d'Hérin, dont ce n'est pas la formation, n'a aucune raison, ne prétendant pas à diriger d'autres ensembles que le sien, d'avoir développé cette technique.

Mais l'autre soir, devant un orchestre profondément renouvelé, avec sans doute beaucoup de nouvelles recrues, voire d'arrivées de dernière minute pour sauver le concert… une belle technique de direction aurait peut-être pu limiter le désordre par moment. Cela lui a sans doute fait défaut ce soir-là, dans ces circonstances plutôt exceptionnelles.

Tout cela non pas pour le blâmer (qui aurait pu imaginer, il y a deux ans, l'effondrement du monde civilisé sous la pression d'armées microscopiques ?), mais pour expliquer les flottements qu'on a pu observer lorsque les musiciens cherchaient du regard les indications du chef, qui ne les donnait pas assez en avance (l'avance sur le temps, ça aide à réagir !), ou pas assez clairement, et le plantage était dans ces moments inévitable.




C'est pourquoi j'ai choisi de vous entretenir de ce concert. La tradition était déjà de toute façon d'évoquer les tragédies en musique inédites écoutées, mais j'ai profité ici des imperfections insolites pour essayer de remettre en perspective ce qui, dans un concert, paraît aller de soi mais est à surmonter à chaque production… aucun ensemble, aucun chef n'a jamais de temps illimité alloué… produire un bon résultat, beaucoup en sont capables, mais un bon résultat en un temps très court (voire insuffisant), c'est à chaque fois un défi, surtout si l'on a une haute idée de son art.

[Parce que je me souviens aussi, après une représentation de Vanessa de Barber par l'orchestre-atelier OstinatO, d'avoir pris le train auprès du pupitre de bois qui s'esclaffait d'avoir joué n'importe comment… Certains le vivent bien.]

Toutes mes pensées à Sébastien d'Hérin et aux Nouveaux Caractères : ce fut sans doute un moment difficile, et j'espère qu'il ne nuira pas à la carrière l'ensemble, qui a beaucoup à dire et à faire découvrir. Merci, avant toute chose, d'oser le répertoire inédit, moins payant, plus exigeant et… plus périlleux. Rien que pour cela, tout mon respect, et ma sincère gratitude.

Je suis prêt à retourner les entendre, surtout s'ils font Hippodamie, Philomèle ou Créüse l'Athénienne !

mardi 22 décembre 2020

Le défi 2020 des nouveautés – épisode 16, l'ultime livraison : ferne Geliebte, Lysistrata, la relève du chant, CoViD fan tutte, symphonistes japonais, Kevlar


Je suppose peu de nouveautés le jour même de Noël, et elles sont donc pour cette dernière bordée, vendredi dernier, quasiment à l'arrêt hors quelques millièmes réenregistrements beethoveniens.

Du fait de l'enfermement et du délai un peu plus long de publication, la liste est devenue un peu épaisse. J'essaie de la subdiviser mais espère qu'elle demeurera lisible (suivez le rouge pour les nouveautés, les 2 ou 3 cœurs pour les albums exceptionnels).

winterreise_nawak.jpg

Du vert au violet, mes recommandations… en ce moment remplacées par des .
♦ Vert : réussi !
♦ Bleu : jalon considérable.
♦ Violet : écoute capitale.
♦ Gris : pas convaincu. ♠
(Les disques sans indication particulière sont à mon sens de très bons disques, simplement pas nécessairement prioritaires au sein de la profusion de l'offre.)

En rouge, les nouveautés 2020 (et plus spécifiquement de l'automne).
Je laisse en noir les autres disques découverts.
En gris, les réécoutes de disques.




1. OPÉRA

nouveautés CD

OPÉRA ITALIEN


♥♥ Monteverdi – Orfeo – Boden, Pass à Amsterdam (YT)

♥♥ Monteverdi – Orfeo – Auvity, Wilder, Arts Flo, Agnew (YT)

♥♥♥ Rossi – Orfeo, acte I – Pichon
→ Tellement étonnant qu'en salle, Bridelli marque plus qu'Aspromonte !

Vivaldi – Farnace « Gelido in ogni vena » – Maggio Musicale, Sardelli (Dynamic)

♥♥ Graun – Cleopatra e Cesare (acte I) – Jacobs

Salieri – Armida (air) – Rousset (Aparté 2021)
→ En avant-première en flux… Juste deux pistes, l'Ouverture et un air. Jolie écriture dramatique. Évidemment loin du ravissement de ses opéras français… ou même de ses délicieux bouffes – mais pour du seria, on sent tout de même l'empreinte de Gluck et du goût français, ce qui est un avantage pour garantir un peu de ma patience. Exécution pleine d'ardeur des Talens Lyriques, tout de même bien hâte de découvrir cela (à défaut d'avoir entendu le concert de mai).

Mozart – Il Sogno di Scipione – Boncompagni, Fenice, Sardelli (Operavision 2020)
→ Mozart seria de jeunesse : statique et ennuyeux. Sardelli apporte un peu de tranchant à l'orchestre de la Fenice, qui reste toujours assez terne et à la peine, depuis tant d'années… (je ne l'ai jamais entendu vraiment bon, je crois)

Mozart – Le Nozze di Figaro – McLaughlin, Mattila, Gallo, Pertusi ; Mehta (Sony)
→ Tradi un peu lisse, mais duo comtal chouette.

Mozart – DG – Fuchs, Leonard, Sly, Nahuel Di Pierro ; Rhorer (YT)

♥♥ Mozart – Così – Behle, Priante, Lhote, Lyon, Montanari (YT)

Verdi – La Traviata, « Fragment » (acte III jusqu'à Addio del passato) – MusicAeterna, Currentzis
→ Tout à fait lunaire : récitatifs totalement étirés comme s'ils étaient des airs en largo, voix artificiellement réverbérées et gonflées, un délire très révélateur de sa conception purement musicale (et narcissique…) de l'opéra.
→ Ce n'est pas moche du tout, mais ça ne ressemble plus à grand'chose, en tout cas pas à un opéra de Verdi (mais j'aime assez).
→ Je ne comprends pas le quart d'heure (du moins bon passage de l'opéra, en plus). Vendu en dématérialisé ?  Teasing pour une intégrale qui prend son temps ?  Chute d'une intégrale avortée mais monétisable ? « Single long » ? Marché numérique ?

♥♥♥ Verdi – Simone Boccanegra – Homoki ; Rowley, Jorijikia, Nicholas Brownlee, Gerhaher, Fischesser ; Zürich, Luisi (Arte 2020)
→ Direction d'acteurs formidable, et l'usage de ce simple décor tournant qui nous mène de coursive en antichambre… Homoki à un sommet de maturité.
→ Orchestre mordant, N. Brownlee fabuleux. Rowley assez pharyngée mais expressive comme une actrice au temps du Code Hays.
→ Très content d'entendre chanter Verdi comme Gerhaher.

Verdi – Aida, début inédit de l'acte III – Scala, Chailly (euroradio)
→ 100 mesures coupées avant la création. Moment suspendu de prières douces aux registres étagés, très réussi, à comparer à l'ambiance du temple avant « Nume custode e vindice ». Méritait d'être entendu, et mériterait d'être systématiquement joué.
→ (en revanche, vocalement, quoique tout à fait honnête, ça laisse vraiment entendre la crise du chant verdien – alors que dans les autres répertoires, l'opéra se porte vraiment bien…)

♥♥ Verdi – Otello – Torsten Ralf & Stella Roman - Dio ti giocondi (Met, 1946)



OPÉRA FRANÇAIS

♥♥♥ Lully – Isis – Rousset

♥♥♥ Lully – Armide (acte I) – Herreweghe II (HM)

♥♥♥ Lully – Armide (actes I, III, IV & V) – Rousset (Aparté)


♥♥ Mozart – La Flûte enchantée en français – M. Vidal, Scoffoni, Lécroart, Lavoie ; Le Concert Spirituel, Niquet (France 5)
→ Très vivante version raccourcie et en français, dans une distribution française de très grand luxe.

Rossini – Le Barbier de Séville (en français) – Berton, Giraudeau, Dens, Lovano, Depraz, Betti, Pruvost ; Opéra-Comique, Gressier (EMI 1955)

♥♥ Boïeldieu – La Dame Blanche – Jestaedt, Buendia, Ratianarinaivo, Hyon, (Yannis) François, Les Siècles, Nicolas Simon (France 3)
→ Les qualités de charisme vocal de Buendia et Ratia souffrent de la retransmission (un peu proche des voix, on entend les aspérités, les micro-défauts), mais quand on les connaît, on mesure le bonheur incommensurable qu'aurait été cette série de représentations itinérantes… Voix franches (superbe découverte de Yannis François également, baryton-basse clair et avec de vrais graves riches !), chaleur des instruments d'époque… La mise en scène n'est pas passionnante, mais le bonbon est très apprécié !

♥♥ Offenbach – M. Choufleuri – Mesplé, Rosenthal (EMI)
→ Avec des citations de Nonnes qui reposez, de bouts de Verdi, thème du premier numéro du Freischütz…

♥♥ Offenbach – Ba-ta-clan – avec Corazza
→ Très bonne musique, même si d'une certaine façon sans texte !

♥♥♥ Bizet – Carmen – Angelici, Michel, Jobin, Dens ; Opéra-Comique, Cluytens (réédition The Art Of Singing 2014)
♥♥♥ Bizet – Carmen – Horne, McCracken Bernstein (DGG)



OPÉRA ALLEMAND

Mozart – Zauberflöte – Della Casa, Simoneau, Berry ; Opéra de Vienne, Szell
→ Orchestre très imprécis et hésitant, peu frémissant. Della Casa un peu surdimensionnée dans le legato. Berry alors très clair. 

♥♥♥ Wagner – Lohengrin – Bieito ; Miknevičiute, Gubanova, Alagna, Gantner, Pape, Berliner Staatsoper, Pintscher (Arte Concert)
→ Splendide orchestre et chœurs (et surpris par le lyrisme et la tension de Pintscher dont j'avais un très mauvais souvenir dans le « grand répertoire »), splendide distribution.
→ J'attendais évidemment Martin Gantner, l'une des voix les mieux projetées du marché (ça paraît nasal et étroit en captation, mais en salle, c'est une proximité et d'une expressivité miraculeuses). Telramund pas du tout noir, très clair et concentré, très convaincant dans un genre absolument pas canonique.
→ Roberto Alagna chante un allemand de grande qualité ; toutes les voyelles sont un peu trop ouvertes, mais ceci va de pair avec la clarté caractéristique de son timbre et la générosité jamais en défaut de son médium. Un régal de bout en bout, élocution limpide et splendeur vocale. Le second tableau de l'acte iII le voit se fatiguer, et les aigus deviennent vraiment blancs et métalliques, le médium un peu plus aigre. Tout le reste se montre à la fois original et très marquant.
→ La mise en scène de Bieito m'a paru laide, sans propos clair ni animation scénique, sans cohérence psychologique ni lien avec le sujet. Sans parler de son tic de faire trembler ses personnages pendant vingt minutes , récupéré de la pire idée de son Boccanegra… Dire que ce fut un si grand metteur en scène… Trop d'engagements. Trop d'empâtement.

Wagner – Götterdämmerung, Janowski I : prologue.
→ assez scolairement égrené, mais super prise de son. chanteurs valeureux mais déjà un côté « déclin ».

Schoeck – Vom Fischer un syner Fru, Op. 43 – Harnisch, Dürmüller, Shanaham , Winterthur, Venzago (Claves 2018)
Harnisch en-dessous de ses standards, Dürmüller un peu dépassé, Venzago un peu froid, version décevante d'une œuvre qui a déjà bien moins de saillances que le Schoeck habituel (son principal intérêt étant d'être composée directement sur le vieux dialecte allemand).La version Kempe-Nimsgern est à privilégier.

♥♥ Schoeck – Massimilia Doni – Edith Mathis, G. Albrecht
→ Décadentisme consonant dans le goût de Venus et Das Schloß Dürande, en plus lyrique et plus basiquement dramatique, comme mâtiné de Verdi.

Dusapin – Faustus – Nigl (extrait)



OPÉRAS D'AUTRES LANGUES

♥♥ Mozart & Minna Lindgren – Covid fan tutte – Mattila, Hakkala, Opéra de Helsinki, Salonen (Operavision 2020)
→ Così (plus Prélude de Walküre et air du Catalogue) en très condensé (1h30), sur un texte finnois inspiré de nos mésaventures pandémiques. Point de départ dramaturgique : Salonen vient diriger la Walkyrie et la situation sanitaire impose le changement de programme.
→ Tout y passe : les opinions rassurantes ou cataclysmiques, les avis contradictoires, les (inter)minables visios, la détresse de la mauvaise cuisinière, la doctrine des masques, les artistes désœuvrés… Parfois avec beaucoup d'esprit (« Bella vita militar » pour la mission papier hygiénique), par moment de façon confuse ou un peu plate (la vie des sopranos).
→ Les récitatifs sont changés en dialogues menés par « l'interface utilisateur », sorte de directrice de la communication hors sol.
→ Hakkala (Alfonso) fantastique, Mattila remarquablement sa propre caricature, avec toujours un sacré brin de voix (les poitrinés rauques en sus).
→ Globalement, un jalon de notre histoire s'est écrit – on aurait pu creuser davantage quelque chose de cohérent, avec les mêmes éléments, ménager une arche qui soit un peu moins une suite de moments dépareillés… Pour autant, le résultat est la plupart du temps très amusant, et marquera le souvenir artistique de la Grande Pandémie des années 2020 pour les archéologues du futur – du moins si notre éphémère technologie numérique n'a pas tout laissé disparaître…

Moniuszko – Halka – Paweł Passini ; Mych-Nowika, Piotr Fiebe, Golinski ; Poznan, Gabriel Chmura  (Operavision 2020)
→ Pas fabuleux vocalement (aigus blancs de la soprano et du ténor, bon baryton). Superbes scènes de ténor, mais œuvre vraiment ennuyeuse dramatiquement : Halka reste debout trahie, son comparse le lui explique longuement, et c'est l'essentiel, malgré le terrible condensé de tragédie contenu dans la pièce.
→ Musicalement peu fulgurant aussi, quoique moins gentillet que le Manoir hanté.

♥♥ Hatze – Adel i Mara – Zagreb 2009 (YT)

Britten – A Midsummer Night's Dream – M.-A. Henry, Montpellier (Operavision 2020)
→ Belle version d'une œuvre aux belles intuitions mais qui patine un peu, à mon sens, dans le formalisme de ses duos et ensembles intérieurs (livret très bavard, également).




2. MUSIQUE DE SCÈNE / BALLETS

nouveautés CD

Marais – Suites à joüer d'Alcione – Savall (Alia Vox)
→ Bien mieux que le concert. (Mais ces suites ont-elle un grand intérêt isolées?)

♥♥♥ Rameau – Hippolyte (Prélude du III) dans « Tragédiennes » #1 – Talens, Rousset

Piron
– Vasta – Almazis (Maguelone 2020)
→ Pas très séduit, ni par le texte (vraiment plat, comparé aux pièces grivoises de Grandval qui m'amusent assez), ni par les musiques (pas passionnantes, et textes assez pesants aussi).
→ Musicalement, pas séduit non plus par les timbres instrumentaux. Dommage, c'était très intriguant.
→ Il existe une lecture très vivante de la Comtesse d'Olonne de Grandval en complément d'un disque de ses cantates, je recommande plutôt cela pour se frotter à ce type de théâtre leste.

Cannabich – Electra – Hofkapelle Stuttgart, Bernius (Hänssler 2020)
→ Mélodrame dans le style classique, très réussi et ici très bien joué et dit (par Sigrun Bornträger).

Wagner – Die Meistersinger, ouverture – Vienne, Solti

Tchaikovsky –  The Tempest, Op. 18 – Orchestra of St. Luke's; Heras-Casado (HM 2016)

♥♥ Humperdinck – « Music for the Stage » : Das Wunder, Kevlar, Lysistrata…  – Opéra de Malmö, Dario Salvi (Naxos)
→ Très belle sélection de scènes d'opéras et autres œuvres dramatiques, variées, pleines de la naïveté et de l'emphase pleine de simplicité propres à Humperdinck. Extrêmement persuasif, délicieux, très bien joué. Hâte de découvrir ces œuvres intégrales désormais, une très belle ouverture vers cet univers encore chichement documenté !  (Et la générosité accessible de cette musique plairait à un vaste public, a fortiori en Allemagne dont l'imaginaire populaire est une référence récurrente…)




3. RÉCITALS VOCAUX

nouveautés CD

Haendel, Vivaldi… – « Queen of Baroque » – Cecilia Bartoli (Decca 2020)
→ Pot-pourri de différents disques. Très bons, mais autant profiter des programmes cohérents. Si jamais vous voulez comparer les orchestres et les répertoires, pourquoi pas.

Salieri, Strictly private, Heidelberg SO (Hänssler)
→ Lecture nerveuse d'airs et duos très spirituels, qui évoquent les Da Ponte mozartiens, un délice.

Rossini – « Amici e Rivali » – Brownlee, Spyres, I Virtuosi Italiani, Corrado Rovaris (Erato 2020)
→ Impressionnant Spyres en baryton et bien sûr en ténor (même si le coach d'italien devait être covidé, à en juger par certains titres). Brownlee a perdu de son insolence, mais pas de sa clarté et de son moelleux.
Superbe attelage, pour un répertoire purement glottique qui n'a pas forcément ma prédilection d'ordinaire, accompagné par un orchestre très fin (instruments d'époque ?) et discret, petit effectif, cordes sans vibrato.

Gounod, Bizet, Tchaïkovski, Puccini – « Hymnes of Love » – Dmytro Popov
→ Pas fini, ça a l'air bien. Mais la rondeur de la voix est davantage conçue pour le répertoire slave que pour l'éclat des spinti.

Massenet par ses créateurs (Malibran 2020)
→ Scindia par Jean Lasalle
→ Salomé par Emma Calvé
(ouille)





4. MUSIQUE SACRÉE

nouveautés CD

Un disque mystérieux (Aparté 2021)…
… de cantates luthériennes du Schleswig, totalement inédites – pour lesquelles je viens d'écrire une notice le nez plongé dans des interpolations vétérotestamentaires tirées de la Bible de Luther, et qui devraient paraître en fin d'année prochaine. (Avec des textes d'époque très denses, des chanteurs très éloquents et un continuo imaginatif, pour ne rien gâcher.)

Pfleger – Cantates sacrées en latin & allemand – Bremen Weser-Renaissance, Cordes) (CPO)
→ Splendide !  Entre Monteverdi et Bach, un côté très Steffani… Airs quasiment tous à deux voix !

♥♥♥ Steffani – Duetti di camera – Mazzucato, Watkinson, Esswood, Elwes, Curtis… (Archiv)

Legrenzi  – Compiete con le letanie e antifone della Beata Vergine – Nova Ars Cantandi, Giovanni Acciai (Naxos 2020)
→ Un des plus grands compositeurs du XVIIe siècle, Legrenzi excelle dans toutes formes d'audace, un contrepoint riche et libre, une harmonie mouvante, une agilité qui préfigure le seria du XVIIIe siècle…
→ Première gravure discographique de ces Complies Op. 7, la dernière prière du jour. Superbes voix franches et articulées… sauf le soprano masculin, très engorgé, vacillant, inintelligible, qui tranche totalement avec le reste et distrait assez désagréablement. Étant la partie la plus exposée, le plaisir est hélas un peu gâché.

Bach – Cantates format chambre – Nigl

Haendel – Dixit Dominus – Scholars Baroque (Naxos)
→ Première fois cette version en entier. Génial 1PP.

Haendel – Dixit Dominus
Réécoutes et nouvelles écoutes : Gardiner-Erato, Scholars Baroque, haïm, Toll, Fasolis, Creed Alte Musik, Öhrwall Drottningholm, Zoroastre Rochefort, Meunier, Parrott, Minkowski, Chistophers-Chandos, Christophers-Coro, Rademann, Dijkstra, Gardiner-Decca, Bates, Preston.

du baroque à Satie – « War & Peace, 1618-1918 » – Lautten Compagney (DHM 2018)
→ Amusant mélange (avec la Gnossienne n°3 revisitée par cet ensemble baroque), plaisant et bien interprété (avec une soprano au fort accent britannique).

Pergolesi – Stabat Mater – Galli, Richardot ; Silete venti, Toni (La Bottega Discantica, 2016)

Borodine – Requiem (arr. Stokowski) – BBC Symphony Chorus, Philharmonia Orchestra, Geoffrey Simon (Signum 2020, réédition)
→ Cinq minutes de paraphrase sur le thème grégorien, avec des harmonies typiques de l'avant-garde russe du second XIXe. Les doublures pizz-bois alla Godounov sont incroyables !
+ Suite Prince Igor, Petite Suite…




5. CONCERTOS

nouveautés CD

Rejcha – Symphonies concertantes flûte-violon, puis 2 violoncelles  – Kossenko, Stranossian, Coin, Melknonyan ; Gli Angeli Genève, MacLeod (Claves 2020)
→ Flûte-violon : aimable. Entre le son un peu aigrelet des solos sur instruments d'époque (pas faute d'aimer ces quatre artistes pourtant) et la progression harmonique très traditionnelle, les mélodies vraiment banales, je n'y trouve pas le grand Rejcha que j'aime. Joli mouvement lent tout de, qui débute par violon et flûte seuls.
→ La symphonie à deux violoncelles est bien plus intéressante, en particulier le premier mouvement inhabituellement varié (dont le premier fragment thématique est similaire à celui de Credeasi misera) et le final assez foisonnant. Mais pour cette œuvre, le disque Goebel-WDR (aux couplages passionnants) de cette même année 2020 m'avait davantage convaincu.

B. Romberg – Cello Concertos Nos. 1 and 5 (Melkonyan, Kölner Akademie, Willens) (CPO 2016)
→ Décevant, du gentil concerto décoratif et virtuose, rien à voir avec ses duos de violoncelle, très musicaux et variés !

Lalo, Ravel  – Symphonie espagnole ; La Valse, Tzigane & Bolero – Deborah Nemtanu, Pierre Cussac, La Symphonie de Poche, Nicolas Simon (Pavane 2017)
→ Sympathique, mais la partie concertante et le mixage permettent moins d'apprécier l'exercice que dans le disque Beethoven.

Elgar – Concerto pour violoncelle – Johannes Moser, Suisse Romande, Manze (PentaTone 2020)
→ Très sérieux et dense, nullement sirupeux, avec un orchestre à la belle finesse de touche, qui fait entendre le contrechant avec netteté.
→ Parution du seul concerto, uniquement en numérique (avant un futur couplage en disque physique ?).

♥♥♥ Schmidt, Stephan – Symphonie n°4, Musique pour violon & orchestre – Berlin PO, K. Petrenko (Berliner Philharmoniker 2020)
→ Interprétations très fluides et cursives, dans la veine transparente du nouveau Berlin issu de Rattle, vision assez lumineuse de ces œuvres à la taciturnité tourmentée.

Hisatada Otaka : Concerto pour flûte (version orchestre) – Cheryl Lim, Asian Cultural SO, Adrian Chiang (YT 2018)
→ Décevante orchestration : les harmonies sont noyées dans des jeux de cordes très traditionnels (et un peu mous), on perd beaucoup de la saveur de la verison Op.30b avec accompagnement de piano, à mon sens.

♥♥ Mossolov, Concerto pour harpe, Symphonie n°5 – Moscou SO (Naxos)
→ Très festif, très décoratif, très « Noël », cet étonnant concerto pour harpe que je n'aurais jamais imaginé une seconde attribuer à Mossolov !
→ Dans la Symphonie, on entend surtout des chants populaires traités en grands accords. Joli, mais pas très fulgurant par rapport à sa période futuriste.

♠ Lubor Barta – Concerto pour violon n°2 1969 – Ivan Straus, Otakar Trhlik (1969)




6. SYMPHONIES & POÈMES ORCHESTRAUX

nouveautés CD

SYMPHONISTES GERMANIQUES

♥♥ Beethoven / Robin Melchior  – « Beethoven, si tu nous entends » – La Symphonie de Poche, Nicolas Simon (Klarthe 2020)
→ Jubilatoire blind-test pot-pourri dont les développements sont (très bien !) récrits. Le tout étant joué pour quatuor, contrebasse, flûte, clarinette, clarinette basse, saxhhorn baryton, accordéon, harpe et percussions… !
→ Il m'a fallu quelques secondes pour retrouver le fantastique mouvement lent du Concerto n°5 ainsi transfiguré… dont la cadence de harpe débouche sur les pointés du mouvement lent de la Quatrième Symphonie !  Mazette.
→ Ou encore la fin sur une boucle minimaliste autour du thème de l'Ode à la Joie.
→ Par des musiciens de très très haute volée, la densité sonore et l'engagement individuel comme collectifs sont exceptionnels.
→ La fièvre de la nouveauté s'empare de nous en réécoutant Beethoven pour la millième fois.

Haydn – les Symphonies Parisiennes – Orchestre de Chambre de Paris, Boyd (NoMadMusic 2020)
→ Petite frustration en première écoute : attentivement, j'y retrouve tout l'esprit (quel sens de la structure !) de cette association formidable, mille fois admirée en concert… Mais à l'écoute globale, j'entends plutôt l'épaisseur des timbres d'instruments modernes, comme une petite inertie – alors qu'ils jouent sans vibrato, et pas du tout selon le style tradi !
→ Quelque chose s'est perdu via le micro, la prise de son, l'ambiance du studio… Pincement au cœur, je les adore en concert, mais à côté des nombreuses autres propositions discographiques « musicologiques », ce n'est pas un premier choix.

A. Romberg – Symphony No. 4, "Alla turca" – Collegium Musicum Basel, K. Griffiths (CPO 2018)

♥♥♥ B. Romberg – Symphonies Nos. 2 and 3 / Trauer-Symphonie (Kolner Akademie, Willens) (Ars Produktion 2007)
→ Symphonies contemporaines de Beethoven (1811, 1813, 1830), qui en partagent les qualités motoriques et quelques principes d'orchestration (ballet des violoncelles, traitement thématique et en bloc de la petite harmonie, sonneries de cor qui excèdent Gluck et renvoient plutôt à la 7e…).
→ Je n'avais encore jamais entendu de symphonies de l'époque de Beethoven qui puissent lui être comparées, dans le style (et bien sûr dans l'aboutissement). En voici – en particulier la Troisième, suffocante de beethovenisme du meilleur aloi !

Brahms
– Symphonies – Pittsburgh SO, Janowski (PentaTone 2020)
→ Très tradi, sans doute impressionnant en vrai connaissant l'orchestre et le chef, mais pas très prenant au disque par rapport à la pléthore et à l'animation enthousiasmante des grandes versions. Assez massif, peu contrasté et coloré, pas très convaincu (vu l'offre) même si tout reste cohérent structurellement et inattaquable techniquement.
→ Tout de même très impressionné par la virtuosité de l'orchestre : rarement entendu des traits de violon aussi fluides, les cuivres sont glorieux, la flûte singulièrement déchirante…

Brahms – Symphonie n°3, lieder de Schubert orchestrés, Rhapsodies hongroises, Rhapsodie pour alto – Larsson, Johnson, SwChbO, Dausgaard (BIS)

Mahler – Totenfeier – ONDIF, Sinaisky (ONDIF live)
→ Cet entrain, ces cordes graves !

Nielsen – Symphonie n°1 – LSO, Ole Schmidt (alto)
→ Très énergique, mais trait gras.

Nielsen – Symphonie n°1 – LSO, C. Davis (LSO Live)

♥♥ Nielsen – Symphonie n°1 – BBC Scottish SO, Vänskä (BIS)

♥♥♥ Nielsen – Symphonie n°1 – Ireland NSO, Leaper  (Naxos)

♥♥♥ Nielsen – Symphonies n°1,2,3,4,5,6 – Stockholm RPO, Oramo (BIS)
→ Lyrisme, énergie mordante, couleurs, aération de la prise… une merveille, qui magnifie tout particulièrement la difficile Sixième Symphonie !

Mahler – Symphonie n°5 – Boulez Vienne (DGG)
→ Un peu terne et mou, du moins capté ainsi.

Schmidt – Symphonies – Frankfurt RSO, Paavo Järvi (DGG)
→ Au sein de ce corpus extraordinaire, voire majeur, le plaisir d'entendre une version qui s'impose d'emblée comme colorée, frémissante, captée avec profondeur et détails, par un orchestre de première classe, et surtout articulée avec ce sens incroyable des transitions qui caractérise l'art de Järvi. Chacune des symphonies en sort grandie. Indispensable.

Graener – Variations orchestrales sur « Prinz Eugen » – Philharmonique de la Radio de Hanovre, W.A. Albert (CPO 2013) → On ne fait pas plus roboratif… mon bonbon privilégié depuis deux ans que je l'ai découvert par hasard, en remontant le fil depuis le dernier volume de la grande série CPO autour du compositeur (concertos par ailleurs tout à fait personnels et réussis).




SYMPHONISTES SLAVES

Tchaïkovski – Symphonie n°5, Francesca da Rimini – Tonhalle Zürich, Paavo Järvi (Alpha 2020)
→ Ébloui en salle par le génial sens des transitions organiques de Järvi, où chaque thème semblait se verser dans l'autre (avec l'Orchestre de Paris), je le trouve ici plus corseté, plus raide. Je ne sais quelle est la part de la différence de culture des orchestres (Zürich a toujours eu un maintien assez ferme) et d'écoute un peu distraite au disque au lieu de l'attention indivisée en salle sur tous les détails splendides. Peut-être la prise de son un peu lointaine et mate, aussi ?  Mais ce fonctionnait très bien avec les Mahler de Bloch…
→ Très belle lecture pas du tout expansive, très sobre et détaillée, en tout état de cause.
→ Francesca da Rimini confirme cette impression d'interprétation très carrée – on y entend encore l'orchestre de Bringuier !

Borodine – Symphonie n°1 – URSS SO, Svetlanov
→ Là aussi, des thèmes populaires, quoique plus tourmentés. Pas très développé mais grand caractère.
→ bissé

Borodine – Symphonie n°2 – Royal PO, Ashkenazy (Decca 1994)

Balakirev, Kalinnikov – Symphonies n°1 – Moscou PO, Kondrachine (Melodiya)
→ Foisonnement de thèmes folkloriques !  Interprétation pas si typée…

Kalinnikov – Cedar and Palm - Bylina - Intermezzos - Serenade & Nymphs –
The Ussr Symphony Orchestra, Evgeniy Svetlanov, (Svetlanov 1988)

Novák – Suite de la Bohême méridionale + Toman & la Nymphe des Bois – Moravian PO Olomouc, Marek Štilec (Naxos 2020)
→ Généreux slavisme qui a entendu Wagner. Le grand poème Toman de 25 minutes est une très belle réussite, qui culmine dans des élans richardstraussiens irrésistibles.
→ Bissé.

Vladigerov – Symphonies 1 & 2 – Radio de Bulgarie, Vladigerov (Capriccio)
→ Le partenariat Capriccio avec les Bulgares se poursuit !  J'avais beaucoup aimé ses concertos pour piano…



SYMPHONISTES BRITANNIQUES & IRLANDAIS

Bax – Symphonie n°2 – LPO, Myer Fredman (Lyrita)

Scott – Symphonie n°3 « The Muses » – BBCPO, Brabbins (Chandos)
→ Debussyste en diable (le chœur de Sirènes…), de bout en bout, et très beau.
+ Neptune
→ Très debussyste aussi, remarquablement riche (un côté Daphnis moins contemplatif et plus tendu). Splendide.

Scott – Symphonie n°4 – BBCPO, Brabbins (Chandos)

Kinsella – Symphonies Nos. 3 and 4 – Ireland NSO, Duinn (Marco Polo 1997)
→ étagements brucknériens à certains endroits.

♥♥ Kinsella :
Symphony No. 5, "The 1916 Poets":  – Bill Golding, Gerard O'Connor, ; Ireland RTÉ National Symphony Orchestra; Colman Pearce
Symphony No. 10 – Irish ChbO, Gábor Takács-Nagy (Toccata Classics)
→ n°5 : avec basse et partie déclamée. Très vivant.
→ n°10 : Néoclassicisme avec pizz et percussions prédominantes, très dansant. Vrai caractère, très beaux mouvements mélodiques ni sirupeux ni cabossés.



SYMPHONISTES JAPONAIS

Hisatada Otaka – Sinfonietta pour cordes 1937 – Sendai PO, Yuzo Toyama
→ Assez lisse.

Hisatada Otaka – Suite japonaise (1936, orch. 1938) –  Shigenobu Yamaoka
→ Orchestration de la suite piano.

Hisatada Otaka – Midare pour orchestre – NHK, Niklaus Aeschbacher (1956)
→ Un peu néo, du xylophone, du romantique un peu univoque, avec un côté mauvaise imitation occidentale du japin, à la fin de la pièce. Mitigé.

Akira Ifukube - Symphonie concertante avec piano (1941)  –Izumi Tateno, Japon PO, Naoto Otomo
→ Du planant sirupeux fade, pas trop mon univers.

Akira Ifukube – Ballata Sinfonica (1943)  – Tokyo SO, Kazuo Yamada (1962)
→ Entre Turandot et l'Oiseau de feu, en plus simple (tire sur Orff).
→ (bissé par curiosité trois jours plus tard)

♥ Yasushi Akutagawa – Prima Sinfonia 1955 – Tokyo SO, Akutagawa
→ Étonnant, et très riche, pas du tout sirupeux (pas mal de Mahler et de Proko, mais dans un assortiment personnel). J'aime beaucoup.
→ Pas du tout dans le genre du symphonisme japonais post-debussyste ou, horresco referens, post-chopinien.




7. MUSIQUE DE CHAMBRE

nouveautés CD


SONATES
♥♥♥ J. & H. Eccles, Matteis, Daniel Purcell – « The Mad Lover » – Langlois de Swarte, Dunford (HM 2020)
→ Les Matteis et (Henry) Eccles sont fulgurants !  Quelle musique rare, sophistiquée et jubilatoire ! Dunford improvise avec une richesse inouïe et la musicalité de Swarte emporte tout.

Rossini, Castelnuovo-Tedesco… – « Rossiniana » (pour violoncelle & piano) – Elena Antongirolami (Dynamic 2020)
→ Toutes sortes de variations & paraphrases, très sympa.

Mendelssohn – Les 3 Sonates violon-piano – Shlomo Mintz, Roberto Prosseda (Decca 2020)
→ Violon très baveux, dont le timbre s'altère au fil des phrasés, je n'aime pas du tout. Et conception générale assez figée… voyage dans le passé (et pas forcément chez les meilleurs). Pas du tout aimé.

♥♥♥ Gédalge, Marsick, Enescu – Sonate violon-piano n°1 / Poème d'été / Sonates 1 & 2 – Julien Szulman, Pierre-Yves Hodique
→ Œuvres très rares, incluant celles des professeurs d'Enescu, lui dédiant leurs nouvelles œuvres alors qu'il n'a que seize ans ! 
→ Martin-Pierre Marsick, son professeur de violon, écrit clairement de la « musique d'instrument ».
→ En revanche André Gedalge, assistant (et véritable professeur officieux) de la classe de composition de Massenet puis Fauré, nous livre un vrai bijou, écrit dans une veine mélodique un peu convenue, mais où tout effet est pesé – et pèse –, avec un sens de la structure remarquable (quels développements !). La superposition en décalé des thèmes, dans le faux scherzo, est un coup de maître assurément.
→ Pas très séduit par la Sonate n°2 d'Enescu : trop de complexités, une expression contournée qui déborde de partout dans l'harmonie ultra-enharmonique, le rythme (premier mouvement en 9/4, à quoi bon), sa fin nue anticlimactique. Plus de complexité pour moins d'effet…
→ Car la n°1, au contraire (à 16 ans !) manifeste une générosité mélodique et un lyrisme très emportés, certes pas du tout subversifs, mais focalisés dans une forme maîtrisée qui en accentue le caractère profusif, jusqu'aux bouts de contrepoint du final !
→ Interprètes de premier choix (Julien Szulman, qui finit une thèse sur Enescu au CNSM, vient d'être nommé violon solo au Philharmonique de Radio-France), avec un violon au son assez international, dense, d'une virtuosité immaculée et chaleureuse, sise sur la musicalité attentive, exacte et subtile de Pierre-Yves Hodique.

Dupuis  – Sonate violon-piano – Prouvost, Reyes (En Phases)

♥ Hisatada Otaka – Concerto pour flûte version avec piano – Miki Yanagida, Takenori Kawai (YT 2016)
→ Captation sèche qui ne fait pas épanouir toute la poésie de la pièce. Mais plus convaincant qu'à l'orchestre, clairement, avec ses très belles couleurs debussystes.



DUOS

♥♥ Rameau – Suites à deux clavecins tirées des Indes, Zoroastre… – Hantaï, Sempé (Mirare)

♥♥ A. Romberg & B. Romberg – Duos for violin and cello – Barnabás Kelemen, Kousay Kadduri (Hungaroton 2002)
→ Interprétation très tradi, pas très exaltante, de ces duos remarquablement écrits, quoique moins fascinants que ceux pour violoncelle.
→ Les variations finales du troisième duo Op.1 sont écrites sur le premier air d'Osmin de l'Enlèvement au Sérail !
→ Quant au premier duo d'Andreas Romberg, il se fonde sur « Se vuol ballare » des Noces de Figaro ; le second, sur « Bei Männerm », le duo Pamina-Papageno…

A. Romberg & B. Romberg – Duo for Violin and Cello in E Minor, Op. 3, No. 3 – Duo Tartini (Muso 2019)

Wagner – Götterdämmerung final par Tal & Groethuysen sur deux pianos (Sony)
→ Chouette initiative, mais manque un peu de fièvre.

Fauré, Widor, Dupré, D. Roth, Falcinelli, Mathieu Guillou, J.-B. Robin – « L'Orgue chambriste, du salon à la salle de concert » –Thibaut Reznicek, Quentin Guérillot (Initiale 2020)
→ Beau programme (en particulier Roth, intéressé aussi par l'inattendue Sonate de Dupré), beau projet, où je découvre un violoncelliste au grain extraordinaire, Thibaut Reznicek, sacré charisme sonore !

Hisatada Otaka – Midare capriccio pour deux pianos – Shoko Kawasaki, Jakub Cizmarović (YT 2015)



TRIOS

Beethoven – Trios Op.1 n°3 et Op.11, arrangement anonyme pour hautbois, basson et piano – Trio Cremeloque (Naxos, octobre 2019)
→ On perd clairement en conduite des lignes et en nuances, avec les bois. Mais très agréable de changer d'atmosphère.

♥♥ B. Romberg:  3 Trios, Op. 38:  – Dzwiza, Gerhard; Fukai, Hirofumi; Stoppel, Klaus (Christophorus 2007)
→ Étonnant effet symphonique de ces trois cordes graves !

Tchaïkovski-Goedicke – Les Saisons – Varupenne, Trio Zadig (Fuga Libera 2020)
→ La redistribution de la matière pour piano seul à trois instruments (dont le piano…) n'est pas la chose la plus exaltante du monde (mélodies au violon, piano simplifié…), mais c'est une occasion d'entendre un des meilleurs trios de l'histoire de l'enregistrement dans un répertoire qu'ils servent merveilleusement – hâte qu'ils gravent le Trio de Tchaïkovski, qu'ils jouent mieux que personne.
→ Et en effet, (Ian) Barber particulièrement en forme, Borgolotto toujours d'une présence sonore impérieuse, Girard-García un peu sous-servi par l'encloisonnement dans un disque, mais on sent toute son élégance néanmoins. D'immenses musiciens à l'œuvre, on l'entend.

Saint-Saëns – Violin Sonata No. 1, Cello Sonata No. 1 & Piano Trio No. 2 – Capuçon, Moreau, Chamayou (Erato 2020)
→ Surtout impressionné par le grain et la présence de Moreau, saisissants. Le son très rond / vibré de Capuçon convient un peu moins bien à Saint-Saëns (surtout la Sonate) qu'aux Brahms et Fauré où il a fait merveille avec sa bande !

♥♥ Magnard – Piano Trio in F Minor / Violin Sonata in G Major – Laurenceau, Hornung, Triendl (CPO) 
→ Merveille, et à quel niveau !  (lyrisme de Laurenceau, et comme Hornung rugit !)

♥♥♥ Clarke – 3 Mvts for 2 violins & piano / Sonates violon-piano : en ré, fragments en sol / Trio Dumka / Quatuor– Lorraine McAslan, Flesch SQ, David Juriz, Michael Ponder, Ian Jones… (Dutton Epoch 2003)
→ Le trio à deux violons et surtout la Sonate en ré sont des sommets de la musique de chambre mondiale, d'une générosité incroyable, et sises sur une très belle recherche harmonique qui doit tout à l'école française.

♥♥ Graener – Trios avec piano – Hyperion Trio (CPO 2011)
→ Lyrique et simple pour la musique aussi tardive, ce fait remarquablement mouche !  (Plus proche de Taneïev que des décadents allemands.)



QUATUORS À CORDES

Beethoven, Quatuor n°1 / Bridge, Novelettes / Chin, Parametastrings – « To Be Loved » – Esmé SQ (Alpha)
→ Très vivante version de l'excellent n°1 (enfin, dans l'ordre d'édition) de Beethoven. (Testées en salle : énergie folle dans le n°11.)
→ Pépiements sympas de Chin.

♥♥♥ Beethoven, Quatuor n°3, Orford SQ (Delos)
→ Superbe détail.
+ Cremona, Takács, Bartók, Jerusalem, Belcea

♥♥♥ Beethoven, Quatuor n°4, Orford SQ (Delos)
→ Pas très tendu, mais remarquablement articulé !
+ Quatuor n°15 : là aussi pas un sommet émotionnel, mais j'aime beaucoup certe individualisation extrême des voix !

♥♥ Arriaga – Quatuors – La Ritirata (Glossa 2014)
→ Très belle lecture sur instruments anciens. Reste un corpus bien plus mineur que ses œuvres orchestrales, d'un jeune romantisme encore assez poliment classique.
→ Le rare Tema variado en cuarteto est en revanche une petite merveille !

♥♥♥ Stenhammar : Quatuors 3 & 4 – Stenhammar SQ (BIS)

♥♥♥ d'Albert – Quatuors – Sarastro SQ (Christophorus)

♥♥ Weigl String Quartet No. 3 // Berg Op.3 – Artis SQ (Orfeo)
→ Richesse et véhémence remarquables de ce corpus sans comparaison avec les pâles symphonies !  Parmi les très grands quatuors du premier XXe siècle.
→ Le Berg est vraiment très beau, d'une tonalité tourmentée.

Weigl
– 5 Lieder pour soprano & quatuor Op.44, Quatuor n°5 – Patricia Brooks, Iowa SQ (NWCRI 2010)
→ Son ancien.

♥♥ Weigl String Quartets Nos. 1 and 5 (Artis Quartet) (Nimbus)
→ Richesse et véhémence remarquables de ce corpus sans comparaison avec les pâles symphonies !  Parmi les très grands quatuors du premier XXe siècle.

♥♥ Weigl – String Quartets Nos. 7 & 8 – Thomas Christian Ensemble (CPO 2017, parution en dématérialisé le 3 juillet 2020)
→ Weigl est donc un grand compositeur… mais certainement pas de symphonies !  Ces quatuors, plus sombres, mieux bâtis, d'une veine mélodique très supérieure et d'une belle recherche harmonique, s'inscrivent dans la veine d'un postromantisme dense, sombre, au lyrisme intense mais farouche, à l'harmonie mouvante et expressive. Des bijoux qui contredisent totalement ses jolies symphonies toutes fades. (On peut songer en bien des endroits au jeune Schönberg, à d'autres à un authentique postromantisme limpide mais sans platitude.)
→ Aspect original, le spectre général est assez décalé vers l'aigu : peu de lignes de basses graves, et les frottements harmoniques eux-mêmes sont très audibles aux violons, assez haut. avec pour résultat un aspect suspendu (le Quatuor de Barber dans le goût des décadents autrichiens…) qui n'est pas si habituel dans ce répertoire.

♥♥ Weingartner – Quatuor n°5, Quintette à cordes –  Sarastro SQ, Petra Vahle (CPO)
→ Rien trouvé de très saillant, à réessayer encore ?
→ trissé. toujours rien.

♥♥♥ Hahn – Quatuors à cordes, Quintette piano-cordes – Tchalik SQ, Dania Tchalik (Alkonost 2020)
→ Encore un coup de maître pour l'élargissement répertoire avec le Quatuor Tchalik !  La sophistication souriante de la musique de chambre de Hahn, où le compositeur a clairement laissé le meilleur de sa production (particulièrement dans ces œuvres, ainsi que dans le Quatuor piano-cordes qui manque ici), se trouve servie avec une ardeur communicative.
→ Le déséquilibre antérieurement noté entre violon I & violoncelle très solistes d'une part (les frères), petite harmonie très discrète d'autre part (les sœurs) s'estompe au fil des années vers un équilibre de plus en plus convaincant. Et toujours cette prise de risque maximale, au mépris des dangers.
→ Grandes œuvres serives de façon très différente des Parisii :(qui étaient plus étales et contemplatifs, plus voilés, moins solistes, très réussis aussi).
→ Saint-Saëns, Hahn, Escaich… en voilà qui ne perdent pas leur temps à rabâcher le tout-venant !  (Merci.)
→ Bissé.

Novák – Quatuor n°3 – Novák SQ (SWR Classic Archive, parution 2017)
→ Très folklorisant et en même temps pas mal de sorties de route harmoniques, sorte de Bartók gentil. On sent la préoccupation commune du temps.

♥♥♥ Scott – Quatuors 1,2,4 – Archeus SQ (Dutton Epoch 2019)
→ Très marqués par l'empreinte française (on y entend beaucoup Debussy, le Ravel de Daphnis également), des bijoux pudiques, d'une sophistication discrète et avenante. Un régal absolu !

♥♥ Bridge, Holst, Goossens, Howells, Holbrooke, Hurlstone –  « Phantasy » – Bridge SQ (EM Records)
→ Goossens impressionnant. Howells frémissant…



AUTRES QUATUORS

Ritter – Quatuors avec basson – Paolo Cartini, Virtuosi Italiani (Naxos 2007)
→ Très joliment mélodique. Moins riche et virtuose que Michl.

B. Romberg:  Variations and Rondo, Op. 18 – Mende, Trinks, Pank & piano (Raumklang 2012)
→  Très beau postclassique.



QUINTETTE

Bax – Quintette avec piano – Naxos

♥♥♥ Scott, Bridge – Quintette avec piano n°1 / en ré mineur – Bingham SQ, Raphael Terroni (Naxos 2015)
→ Beau Quintette de Bridge, splendide de Scott, avec son premier mouvement très… koechlinien-2 !
→ Bissé Scott.



SEXTUOR ET AU DELÀ

♥♥♥ Weingartner – Sextuor pour quatuor, contrebasse & piano / Octuor pour clarinette, cor, basson, quatuor & piano – Triendl (CPO)
→ Complètement fasciné par le Sextuor pour piano et cordes (la pochette dit Septuor à tort). Un lyrisme extraordinaire.
→ bissé

Chabrier – Souvenirs de Munich (arrangement David Matthews pour ensemble) – Membres du Berlin PO, Michael Hasel (Col Legno 2009)
→ Doublures étranges qui accentuent le côté foire de ces réminiscences de Tristan façon quadrille.

Roussel, Koechlin, Taffanel, d'Indy, Messager, Françaix, Chabrier, Bozza, Tansman – musique française pour vents et piano – V. Lucas, Gattet, Ph. Berrod, Trenel, Cazalet (solistes de l'Orcheste de Paris), Wagschal (Indésens 2020)
→ Joli ensemble, pas le meilleur de la production chambriste française (excepté les extraits de la Suite de d'Indy), avec des timbres assez blancs, il existe plus exaltant ailleurs même si le projet est très beau et mérite d'être salué !



HORS DES FRONTIÈRES

♥♥ de Mey – Musique de table – James Cromer, Corey Robinson, Gregory Messa (vidéo culte d'Evan Chapman)




8. SOLOS

nouveautés CD

Froberger – Œuvres pour orgue – Temple Saint-Martin de Montbéliard, Coudurier (BNL)

Folías par Frédéric Muñoz à l'orgue de Guimiliau –  https://www.youtube.com/watch?v=EX8OSpPboz4 (YT 2017)
→ Superbe orgue XVIIe en état de jeu. Pourquoi ne s'en sert-on pas davantage pour les enregistrements, plutôt que des instruments contemporains de la composition (qu'il y avait moins de probabilité de pouvoir jouer à l'époque, car en petit nombre), voire postérieurs ?

Gabrielli, Biber, Young – « Jacob Stainers Instrumente » – Maria Bader-Kubizek, Anita Mitterer, Christophe Coin (Paladino 2020)
→ La Partita 6 de l'Harmonia artificiosa-ariosa est marquante par son vaste air à variations de 13 minutes et son langage un peu original.
→ La parenté des traits de (Domenico) Gabrielli avec les figures des Suites pour violoncelle de Bach reste toujours aussi frappante. (Coin fait merveille dans ce grand solo.)  Elles sont assez bien documentées au disque, ce sont des bijoux.

♥♥ Gabrielli – Œuvres complètes pour violoncelle – Hidemi Suzuki, Balssa, Otsuka (Arte dell'arco 2012)
→ Quels solos bachiens, en plus rayonnants !
→ Bissé.

♥♥ Giuliani – Le Rossiniane – Goran Krivokapić, guitare (Naxos 2020)
→ Réellement des arrangements (virtuoses) de grands airs rossiniens, en particulier comiques (Turco, Cenerentola…), très bien écrits (quel symphonisme !) et exécutés avec une rare qualité de timbre et de phrasé.

Bach, Chorals / Elgar, Sonate 1 / Lefébure-Wély Boléro / Karg-Elert 3 Impressions / John Williams, 3 arrangements de Star Wars – Nouvel orgue de la cathédrale Saint-Stéphane de Vienne, Konstantin Reymaier (DGG 2020)
→ Splendides Bach pudiques sur jeux de fonds, une transcription de Williams réussie, les frémissements du trop rare Karg-Elert, un joli Elgar sérieux inattendu… Superbe récital.





9. MADRIGAL, AIR DE COUR, LIED & MÉLODIE

nouveautés CD


MADRIGAL & AIR DE COUR

♥♥♥ Monteverdi – Combattimento – Beasley & Regenc'hips en concert (YT)

Lanier, Ramsey, Jenkis, Banister, Lawes, Webb, Hilton… – « Perpetual Night » – Richardot, Correspondances, Daucé (HM 2018)
→ Ni les œuvres ni la manière ne me font dresser l'oreille, je l'avoue. Très rond, confortable, contemplatif, le tout manque vraiment d'arêtes, d'événements.

♥♥ Jacquet de La Guerre – Le Déluge – Poulenard, Verschaeve, Giardelli, Guillard (Arion)

Monteverdi, Purcell, Haendel – « Guerra amorosa » – Nigl, Pianco, Ghielmi (Passacaille 2012)

♥♥ Cerutti, Auletta, Tartini, Mayr, anonymes – « Il Gondoliere veneziano » – Holger Falk, Nuovo Aspetto (WDR 2020)
→ Varié et réjouissant, chanté avec verve !

Steffani, Vivaldi, Hahn, Satie… – « Eternity » Kermes & Gianluca Geremia, théorbe (Simone Kermes 2020)
→ Très joli album planant et délicat, sur son propre label. 30 minutes de musique, un format uniquement dématérialisé je suppose.



LIEDER ORCHESTRAUX

♥♥♥ Schubert – An Schwager Kronos (orchestration Brahms)
→ Monteverdi Choir ♥
→ Schroeder, AMSO, Botstein (horriblement engorgé)
→ Steffeb Lachenmann, Brandenburger Pkr, gernot Schulz (mou et pas ensemble)
→ Johan Reuter, SwChbO Dausgaard (orch en folie) ♥♥♥

♥♥♥ Schubert – «  Nacht und Träume » (orchestrations de Berlioz, Liszt, Reger, R. Strauss, Britten) – Lehmkuhl, Barbeyrac, Insula O, Equilbey (Warner 2017)
→ Splendidement chanté, accompagné sur instruments d'époque, un régal.
→ bissé

♥♥ Schubert – Lieder orchestrés par Max Reger – Ina Stachelhaus, Dietrich Henschel, Stuttgarter Kammerorchester, Dennis Russell Davies (MDG 1998)

Schubert – Lieder orchestrés (Liszt, Brahms, Offenbach, Reger, Webern, Britten…) – von Otter, Quasthoff, COE, Abbado (DGG 2003)
→ Orchestrations pas nécessairement passionnantes en tant que telles, même si entendre Schubert dans ce contexxte dramatisé fait plaisir. (Les Webern sont franchement décevants.) 
→ Splendide orchestre (même si direction un peu hédoniste), von Otter un peu fatiguée mais fine, Quashoff à son faîte.
→ Étonnement : les attaques de l'orchestre sont de façon récurrente désynchronisées des chanteurs (pas mal de retards, quelques-fois de l'avance). Typiquement, Die Forelle, Ellens Gesang…
On parle d'Abbado, du COE, de von Otter qui a chanté du R. Strauss à la scène, je ne sais pas trop comment / pourquoi c'est possible. (Je ne vois pas à quoi ça sert si c'est volontaire, pour moi ça ressemble au chef qui attend le phrasé de la chanteuse mais qui réagit un peu tard.)
Peut-être est-ce que l'attaque est au bon endroit mais que le gros du son parvient plus tard. (Mais justement, en principe c'est anticipé par les musiciens, les contrebasses attaquent toujours avec un peu d'avance pour cette raison.)

♥♥♥ Fried – Die verklärte Nacht – Ch. Rice, Skelton, BBCSO, Gardner (Chandos 2021)
Chef-d'œuvre absolu du lied orchestral décadent, tout en vapeurs, demi-teintes et éclats aveuglants, cette Nuit transfigurée bénéficie à présent d'une seconde version, aux voix très différentes (Rice plus charnue et timbrée, Skelton plus sombre) et à la direction très lyrique. Je conserve ma tendresse pour Foremny qui privilégie le mystère initiatique plutôt que les couleurs orchestrales (et la clarté éclatante de Rügamer dans la transfiguration est un bonheur sans exemple !), mais disposer d'un second enregistrement, et de niveau aussi superlatif, est absolument inespéré – et quoique dès longtemps attendu.
→ Parution en janvier 2021, mais les chanteurs ont déjà fait fuiter sur les comptes YouTube respectif la plupart des pistes vocales…
→ (déjà écouté une dizaine de fois)

♥♥♥ Fried – Die verklärte Nacht – Foremny
→ (réécouté à peu près autant de fois le mois passé…)

♥♥ Schoeck – Nachhall – Arthur Loosli, ChbEns Radio de Berne, Theo Loosli –  (Jecklin 2015)
→ Tout est plus clair, l'orchestre (moins dramatique, certes), le chant…

♥♥ Schoeck – Nachhall – Hancock, AmSO, Botstein (AmSO)
→ Splendide ambiance de fin du monde mélancolique.

♥♥♥  Fefeu & Gérard Demaizière – L'An 1999 – François Juno (RGR 1979)
→ et diverses parodies (version metal, version symphonique, version épique…), voire son interprétation imaginaire de Quelque chose en nous de Tennessee…



LIED & MÉLODIE

Schubert, Spohr, Weber, Giuliani – Lieder arrangés  avec guitare – Olaf Bär, Jan Začek (Musicaphon 2007)

♥♥ Beethoven – Lieder (An die ferne Geliebte) – Bär, Parsons (EMI 1993)

♥♥♥ Beethoven, Schubert, Britten… – « I Wonder as I Wander » – James Newby, Joseph Middleton (BIS 2020)
→ Splendide voix de baryton-basse, mordante, clairement dite, sensible aux enjeux dramatiques, aussi à l'aise dans la demi-teinte a cappella des Britten que dans la gloire mordante des poèmes les plus expansifs. Grand liedersänger très à son aise ici, et une fois de plus très bien capté par BIS.

♥♥♥ Beethoven ferne Geliebte, Schubert, Rihm – « Vanitas » – Nigl, Pashchenko (Alpha)
→ Accompagné sur piano d'époque.
→ Emporté d'emblée par les mots et le phrasé de cette ferne Geliebte ; splendeur de cette voix claire et souple, adroitement mixée et extraordinairement expressive (Beethoven !).
→ Concentration et la clarté de cette voix assez incroyables, on dirait un représentation de l'époque glorieuse des années 50-60, j'entends la concentration du son des très grands ténors d'autrefois (quelque part entre Cioni et Tino Rossi pour l'allègement délicat).
→ (Mais je ne comprends pas pourquoi il est noté baryton, c'est assez clairement un ténor pour moi, même s'il chante dans des tessitures centrales… Peut-être l'équilibre harmonique de la voix est-il différent en personnel.)
→ Et tout cela lui permet une finesse d'expression assez extraordinaire. (Rihm très réussis, je ne suis pas sûr que cet univers un peu raréfié m'aurait autant séduit sinon !)

♥♥ Schubert – Die junge Nonne
→ Ameling, Baldwin ♥♥
→ Ludwig, Gage

♥♥ Mahler – Wundherhorn – Gerhaher, Huber (RCA)

Mahler – Ruckert-Lieder / Des Knaben Wunderhorn– Bauer, Hielscher (Ars Musici 2003)
→ Voix vraiment claire, manque d'assise et d'incarnation pour une fois !

♥♥ Schoeck – Notturno – Gerhaher, Rosamunde SQ
→ Gerhaher très peu vibré, un peu sophistiqué, mais remarquable. Le grain du quatuor est fantastique.

Mitterer – Im Sturm – Nigl, Mitterer (col legno 2013)
→ Très mélodique (et le naturel de Nigl !), sur poèmes romantiques, avec bidouillages acousmatiques un peu stridents (trop proches dans la captation, on reçoit tout dans les oreilles sans distance) mais pas déplaisants.
→ Beaucoup de citations (Ungeduld de la Meunière), quasiment de l'a cappella avec des effets atmosphériques autour… Fonctionne très bien grâce à l'incarnation exceptionnelle de Nigl !




nouveautés CD

LISTE D'ÉCOUTES à faire – nouveautés

→ reich eight lines
→ philippe leroux : nous par delangle (BIS)
→ Ch Lindberg
→ kontogiorgos, kaleidoscope pour guitare
→ adiu la rota
→ australian music two pianos « the art of agony »
→ elisabetta brusa ulster O
→ rossini matilde di shabran passionart O
→ haydn messe st tolentini naxos

→ vivaldi argippo eura galante
→ fürchtet euch nicht
→ letters chamber choir ireland
→ stanford chamber somm
→ alcione Marais
→ arte scordatura
→ trios alayabiev glinka rubinstein, brahms Trio (naxos)
→ martynov : utopia
→ boesmans & cornet à bouquin

→ asperen louis couperin
→ tabarro puccini janowski jagde
→ quartetto cremona : italian postcards
→ dmytro popov hymns of love
→ gurrelieder thielemann
→ Schubert: Lieder (orchestrations de Mottl, Britten, Liszt, Brahms, Berlioz, Strauss, Reger, Webern...)/Barbeyrac, Lehmkuhl, Equilbey
→ mahler lied erde bloch

(plus tous les autres des listes précédentes…)



nouveautés CD

LISTE D'ÉCOUTES à (re)faire – autres

→ Christie Combattimento
→ symphs Romberg
→ Bruch symphs
→ legrenzi sedecia
→ legrenzi missa lauretana
→ LEGRENZI, G.: Concerti musical per uso di chiesa, Op. 1 (Oficina Musicum Chorus, Favero)

→ GOOSENS, E.: Violin Sonata No. 1 / HURLSTONE, W.: Violin Sonata in D Major / TURNBULL, P.: Violin Sonata in E Minor (Mitchell, Ball)
→ Chamber Music - LALLIET, C.-T. / POULENC, F. / RACHMANINOV, S. / RAVEL, M. (Trio Cremeloque)
→ BACH, C.P.E.: Oboe Concerto, Wq. 164 and 165 / Solo, Wq. 135 (Ebbinge, Amsterdam Baroque Orchestra, Koopman)
→ wellesz symph 1
→ alwyn symph 3
→ křenek symph 2
→ oratorium fanny
→ farrenc sextuor & trio
→ schoeck notturno bär
→ froberger moroney org robert-dallam de lanvellec

→ lebendig begraben

→ bax 2 lloyd ou lyrita

→ rééd rückert minton boulez
→ coin
→ mosaïques SQ der Beeth

→ Blancrocher - L’Offrande. Pièces de Froberger, Couperin, Dufaut et Gaultier:
→ forqueray intégral devérité & friends, rannou…

→ schoeck nathan berg griffiths) + opéras
→ lalande laudate
→ bär gelibte

→ Lamia de Dorothy Howell

→ vivaldi baiano cctos clvcn
→ holger falk + nigl + newby

→ Lugansky franck debussy

→ Rawsthorne McCabe, Hoddinott,  Mathias.   Bate et Benjamin, coles. swayers.
→ Solemnis gardiner

→ A. Rawsthorne, Symphony No. 2
→ reutter op.58,56,jahreszeiten
→ Robert Simpson, Symphonie n°9, Bournemouth SO, Vernon Handley.
→ rubbra ccto pia
→ Coles : je réécoute les Four Verlaine Songs pour la dixième fois aujourd'hui, c'est véritablement renversant.
→ e préfère moi aussi la No. 2 de Boughton et pas qu'un peu,

→ stephan sieben saiteninstrumente, horenstein ensemble ( et suite pour quatuor de butterworth)
→ Michel dens
→ Goublier - Mélodies lyriques populaires (6) : baryton, choeurs, et Orchestre - Michel Dens - HD

→ The Primrose Piano Quartet : Hurlstone, Quilter, Dunhill, Bax
→ BRITISH PIANO QUARTETS : Mackenzie, Howells, Bridge, Howells, Stanford, Jacob, Walton (The Ames Piano Quartet)
→ Viola Sonatas, Idylls & Bacchanals : McEwen, Maconchy, Bax, Jacobs, Rawsthorne, Milford, Leighton (Williams/Norris)

(plus tous les autres des listes précédentes…)




… et voici pour la dernière livraison de l'année 2020, deux ans complets de traque aux pépites nouvelles – et il y en a beaucoup, même en mettant l'accent sur les répertoires délaissés ou les interprétations hors du commun !

Je n'ai pas encore décidé si je poursuivais l'aventure en 2021 : je fais ce repérage pour moi-même, mais la mise en forme lisible prend à chaque fois plusieurs heures, et j'ai plusieurs séries de notules que j'aimerais davantage achever, poursuivre ou débuter. Je me disais que ce pouvait être utile, puisque j'écoute beaucoup et laisse des traces écrites, mais en fin de compte, devant la masse, je crains de noyer mes lecteurs plus que de les éclairer. Et cela suppose aussi que mon agenda soit gouverné par les parutions plutôt que par ma fantaisie (ce qui n'est pas bien).

Ce qui est sûr, c'est que je n'aurai pas le temps de faire la remise des prix des disques de l'année. Ce serait absurde de toute façon : même en choisissant un disque par genre et par époque, je serais obligé de trancher de façon parfaitement arbitraire. Il y a beaucoup de choses à découvrir, avec leurs commentaires à chaque fois, aussi je vous invite, si vous souhaitez façonner votre propre bouquet, à remonter la piste du chapitre correspondant dans CSS, et à faire votre choix parmi les disques mentionnés en bleu-violet ou 2-3 cœurs !

Si jamais vous vous interrogiez sur la conclusion l'année Beethoven, j'ai ici commis une petite suite de tweets où je relève ce qui m'a paru marquant, en classant par genre – et en incluant les disques traitant des contemporains, puisqu'il y a eu beaucoup de parutions majeures autour de Salieri / Rejcha / B. Romberg / Hummel / Moscheles que vous seriez fort avisés de ne pas négliger… (En revanche, il y eut extrêmement peu de raretés du catalogue de Beethoven à proprement parler.)

Belles explorations à vous, et à bientôt, sous d'autres formats sans doute !

mardi 17 novembre 2020

Le défi 2020 des nouveautés – épisode 15 : trios de référence, cycle RVW, Garanča apprivoisée, diamants brésiliens, Charpentier ultramontain, Verdi gallican


L'enfermement favorisant l'exploration discographie, une nouvelle et prompte livraison s'imposait.

winterreise_nawak.jpg

Du vert au violet, mes recommandations… en ce moment remplacées par des .
♦ Vert : réussi !
♦ Bleu : jalon considérable.
♦ Violet : écoute capitale.
♦ Gris : pas convaincu. ♠
(Les disques sans indication particulière sont à mon sens de très bons disques, simplement pas nécessairement prioritaires au sein de la profusion de l'offre.)

En rouge, les nouveautés 2020 (et plus spécifiquement de l'automne).
Je laisse en noir les autres disques découverts.
En gris, les réécoutes de disques.



nouveautés CD

OPÉRA


Haendel – Rinaldo – Aspromonte, Galou, Luigi De Donato ; Accademia Bizantina, Dantone
→ Déçu par cette lecture assez terne d'un des plus beaux seria de Haendel : Dantone a toujours été  un accompagnateur probe qu'un inventeur de textures, mais ici, sans le renfort du drame, c'est assez frustrant. D'autant plus qu'Aspromonte blanchit terriblement dans le seria (c'est dans le XVIIe déclamatoire qu'elle fait merveille), que Galou est dans un jour peu propice (ou bien est-ce l'aspect héroîque du rôle, à rebours de sa personnalité vocale ?)… il n'y a que Luigi De Donato qui, comme d'habitude (cf. le récent Samson d'Alarcón dans la livraison précédente, n°14), impose présence et mordant charismatiques. Dommage, l'œuvre mérite vraiment une discographie abondante et il y a encore de la place pour de nouvelles propositions…

[vidéo en direct de l'Opéra-Comique] : Rameau, Hippolyte & Aricie, Pichon (avec Elsa Benoit, Mechelen, Brunet…)
→ Orchestre splendide (ampleur, couleurs, énergie), œuvre toujours aussi peu passionnante pour moi, livret misérable, et voix qui vibrent quand même beaucoup pour ce répertoire (Benoit était fulgurante dans la Dame Blanche).

♥♥♥ Auber – Les Diamants de la Couronne – Raphanel, Einhorn, Arapian, Médioni ; Colomer (Mandala)
♥♥♥ Auber – Les Diamants de la Couronne – Raphanel, Einhorn, Arapian, Médioni ; Colomer (vidéo de la même production, Compiègne)
→ Sommet du livret haletant (merci Scribe) et d'une musique divertissante pourtant pleine de modulations, d'ensembles travaillés, de surprises… Un des plus beaux opéras comiques jamais écrits. (Peut-être même le plus beau en langue française…)  Distribution fabuleuse et orchestre audiblement passionné. Mise en scène tradi pleine de vie.

♥♥ Donizetti – Lucia di Lammermoor (Sextuor) – Rost, Ford, Michaels-Moore, Miles, Hanover Band, Mackerras
→ Ma version chouchoute (instruments anciens, vivacité)… version française exceptée évidemment.
Autres écoutes :
López-Cobos (Caballé, Carreras, Ramey)
Bonynge (Sutherland, Pavarotti, Milnes)

♥♥♥ Verdi – Rigoletto (extraits en français) – Robin, Michel, Maurice Blondel, Dens, Depraz, Noguera ; Opéra de Paris, Dervaux (Marianne Mélodie publication 2013)
→ Des fulgurances et des étrangetés dans la traduction… étonnant comme le mot juste qui éblouit alterne avec les laborieuses maladresses prosodiques (ou affadissements inutiles du sens). Exécution foudroyante.
→ trissé

♥♥ Verdi – Traviata (extraits en français) – Robin, Finel, Dens ; Opéra de Paris, Dervaux (Marianne Mélodie publication 2013)
→ Le livret est assez mutilé par les pudibonderies fadissimes de la traduction, mais entendre cette qualité de chant et d'incarnation demeure inestimable, et dans un français sublime.
→ trissé

Verdi – Le Trouvère (extraits en français) –  Juyol, Laure Tessandra, Poncet, Dens ; divers orchestres, Delfosse / Etcheverry / Dervaux (Marianne Mélodie publication 2013)
→ bissé

Verdi – Aida – Milanov, Thebom, Del Monaco, London, Hines ; Met, Cleva (Pristine)
→ Surtout remarquable par l'ardeur orchestrale (et bien disciplinée pour le Met de l'époque !). Mais si l'on veut le Del Monaco le plus sonore et glorieux, clairement la bonne adresse – je l'aime davantage, plus fragile et approfondi, plus tard.

Verdi – Aida (extraits en français) – Irène Jaumillot, Élise Kahn, Poncet, Borthayre (x2), Koberl ; Orchestre inconnu, Robert Wagner (Marianne Mélodie publication 2013)
→ bissé

♥♥ Verdi – Otello (extraits en français) – Jeanne Segala, Thill, José Beckmans ; Opéra de Paris, François Ruhlmann (Marianne Mélodie publication 2013)
→ trissé

♥♥ Offenbach – Barbe-Bleue – Séchaye, Vidal, Félix… ;  Opéra de Rennes, Campellone (plan fixe d'archives)

♥♥♥ Offenbach – Barbe-Bleue – Mas, Beuron, Mortagne ; Pelly, Opéra de Lyon (vidéo France 2, diffusion 2020)

Prokofiev – Guerre & Paix – Markov, Stanislavsky… (vidéo du Stanislavsky 2020)
→ Pas la soirée la plus voluptueuse musicalement ni inspirée scéniquement, mais très belles voix des jeunes premiers.



nouveautés CD

MUSIQUE DE SCÈNE / BALLETS

Delibes – Ballets Sylvia, La Source, Coppélia – N. Järvi (Chandos)
→ Pas le plus marquant de Delibes, mais contenu de ploum-ploum plutôt magnifié par le grand geste unifiant de Järvi.

Grieg – Peer Gynt, les 2 Suites – Bergen PO, Ruud (BIS)
→ Un peu déçu à la réécoute, pas aussi singulier et coloré – ou bien était-ce davantage le cas dans la musique de scène totale par les mêmes ?

♥♥ Schmitt – Oriane & le Prince d'Amour, Tragédie de Salomé, Musique sur l'eau, Légende – Susan Platts, Nikki Chooi ; Buffalo PO, Falletta (Naxos 2020)
→ Passionnant ensemble de raretés (des premières ?) de Schmitt. Outre l'incontournable suite de Salomé (les pas d'action sont supprimés et le tout réorchestré pour très grand orchestre), que je trouve admirablement interprétée par Buffalo-Falletta, dont je n'avais pas de tels souvenirs d'excellence et de style (plus massifs et moins finement articules), on y rencontre la précieuse Oriane, une mélodie avec orchestre qui tire un réel profit des qualités de sophistication et de naturel conjugués dont peut faire preuve Schmitt !

Vaughan Williams – Job – Bergen PO, Andrew Davis (Chandos 2017)
→ Moins intéressé dans cette version (par rapport à Hallé-Elder présenté dans la livraison n°14), plus lisse, plans moins détaillés pour une œuvre déjà étale et homogène.



nouveautés CD

MUSIQUE SACRÉE

Beretta, Merula, Cazzatti, Giambelli, Benevolo, Cavalli, Charpentier – Messes à chœurs multiples – Correspondances, Daucé (HM)
→ Il manque hélas les deux plus belles pièces de la tournée de concerts (de Legrenzi, évidemment), mais pour le reste, ce tour de la moitié Nord de l'Italie autour des messes et motets à chœurs multiples est un enchantement : découverte de traitements variés, du plus hiératique (Cavalli évidemment, toujours le dernier de la classe celui-là) aux irisations de Beretta. Rarissime, passionnant, très convaincant.
→ Le résultat semble avoir beaucoup mûri depuis les concerts de 2017 (entendu pour ma part dans l'acoustique peu favorable de la Seine Musicale) : j'avais été frustré par le choix de Daucé de magnifier les coloris au détriment de la danse dans ce Charpentier (qui n'est déjà le meilleur de son auteur en termes d'audace et de personnalité)… alors qu'ici, avec encore plus de chatoyances (infinies, réellement), l'impression de mobilité n'est jamais prise en défaut. Grand disque, même pour la version du Charpentier.

♥♥♥ Charpentier – Méditations pour le Carême – Camboulas (Ambronay)
→ Déjà présenté. Et notule en préparation.

♥♥♥ Campra – Exaudiat te Dominus, De Profundis – Christie (Erato)
→ Tantôt guerrier, tantôt tendrement méditatif, un chef-d'œuvre servi par les meilleurs !

♥♥♥ Beethoven – Missa Solemnis – Hanover Band, Kvam (Nimbus)

Berlioz – L'Enfance du Christ, arrivée à Saïs – Graham, Le Roux ; OSM, Dutoit (Decca)
→ Sympa, mais il existe tellement mieux.

Mendelssohn – Church Music, Vol. 2 - Vom Himmel hoch / Ave maris stella / Te Deum in D Major (Bernius) (Carus)
→ Un peu servilement du néo-Bach, sur cet album. Chœur et orchestre de Bernius un peu plus ternes qu'à l'habitude aussi.

♥♥ Mendelssohn – Church Music, Vol. 3 - 3 Psalms / Christus / Kyrie in D Minor / Jube Domine / Jesus, meine Zuversicht (Stuttgart Chamber Choir) (Carus)

Mendelssohn – Church Music, Vol. 6 - Psalm 115 / O Haupt voll Blut und Wunden / Wer nur den lieben Gott lasst walten (Bernius) (Carus)

♥♥♥ Mendelssohn – Chœurs sacrés Op. 39, 115, 116, Te Deum, Herr sei gnädig… Vol.7 – Bernius (Carus 2006)
→ Collection de merveilles riches et épurées… un sérieux candidat pour la livraison 1830 d' « Une décennie, un disque ».

Bruckner – Motets – Chœur de la Radio Lettonne, Kļava (Ondine 2020)
→ Belle version où l'on retrouve à la fois les motets bien connus et les sopranos mêlant voix lyriques et techniques droites « de cristal », caractéristiques de la Radio lettonne.
→ Belles lectures apaisées, même si ma préférence va à des chœurs encore plus ecclésiaux (St Mary's d'Édimbourg, cathédrale de Bergen) ou dotés de courbures plus généreuses (Collegium Vocale de Gand) – par exemple.



nouveautés CD

CONCERTOS

Mozart – Concertos pour hautbois et basson – Koopman
→ Très beau et fin, même si désavantagé par la facture qui lime l'impact des solistes et les places toujours à la frontière du refus d'obstacle !

♥♥ Martinů – Concertos pour violon 1 & 2 // Bartók, Sonate pour violon solo – F.P. Zimmermann, Bamberg SO, Hrůša (BIS)
→ Le premier d'un postromantisme tourmenté (comme « soviétisé »), le second typique des coloris orchestraux néoclassique. Pas du niveau des concertos pour violoncelle, mais change considérablement des habitudes. La virtuosité n'y empêche pas la musicalité, a fortiori avec Zimmermann qui ne cherche pas la chatoyance facile et mise tout sur l'élan irrésistible de son discours !
→ Pas particulièrement marqué par Bamberg-Hrůša-BIS, pourtant tiercé de chouchous, mais j'ai peu écouté ces œuvres, je ne mesure pas nécessairement à quel point ils en tirent le meilleur.
→ (J'ai distraitement écouté le Bartók, désolé.)

John Williams – Concerto pour basson – Robert Williams, Detroit SO, Slatkin (Naxos single)
→ Sans être le chef-d'œuvre ultime, l'un des tout meilleurs concertos pour basson.




nouveautés CD

SYMPHONIES & poèmes orchestraux

Schubert – intégrale des Symphonies – Chamber Orchestra of Europe, Harnoncourt (ica / COE, publié en 2020 mais capté en 1988)
→  Parution d'un concert inédit de 1988, qui paraît moins essentielle alors que depuis dix ans, les parutions de verisons « musicologiques » des symphonies de Schubert se sont multipliées, avec des propositions très stimulantes ou plus radicales qu'ici.
→ Pour autant, l'association produit de belles choses, le chant des cuivres, les sforzati secs mais non excessifs dans cette acoustique réverbérée, les beaux aplats de cordes. Loin de l'Harnoncourt débordant de couleurs de la dernière période, mais une belle lecture, à défaut d'être désormais prioritaire.

Berlioz – Sara au bain pour chœur, quelques mélodies irlandaises orchestrées – OSM, Dutoit (Decca)
→ Captation assez lointaine et floue, dommage. Les pièces, avec le chœur vraiment moyen de l'OSM ou les chanteurs peu idiomatiques, ne sont pas servies au mieux – alors qu'il y a des merveilles, et que Dutoit-OSM ont montré leur valeur dans ce répertoire.

Berlioz –  Roméo et Juliette – Dragojević, Staples, Miles ; Radio Suédoise, Ticciati (Linn 2016)
→ Limpide, du côté d'un Berlioz fin et épuré, pas du tout son versant coloré et sauvage. (Pour la force intérieure, privilégier Ozawa, et Dutoit pour la couleur.)

♥♥♥ Czerny – Symphonie n°1 – Frankfurt (Oder), Athinäos (Christophorus)

♥♥♥ Roth – Symphonie en mi – Rückwardt

♥♥♥ Bowen – Symphonies 1 & 2 – Andrew Davis (Chandos)

♥♥♥ H. Andriessen – Libertas venit – PBSO Enschede, Porcelijn (CPO)
→ Quelle sombre épopée, mi-grandiose, mi-intérieure… !

♥♥♥ Graener – Variations orchestrales sur « Prinz Eugen » – Philharmonique de la Radio de Hanovre, W.A. Albert (CPO 2013)
→ On ne fait pas plus roboratif… mon bonbon privilégié depuis deux ans que je l'ai découvert par hasard, en remontant le fil depuis le dernier volume de la grande série CPO autour du compositeur (concertos par ailleurs tout à fait personnels et réussis).

Vaughan Williams – Symphonie n°2 – Hallé O, Elder (Hallé)
→ Transparence debussyste très bienvenue dans cette symphonie contemplative à laquelle je trouve, ainsi, de très belles qualités.

Vaughan Williams – Symphonie n°3 – LSO, Hickox (Chandos)
→ Remarquablement articulé, comme toujours (avec fond un peu brouillé à cause de Chandos, mais tout est très audible, capté de près), superbes gradations.

Vaughan Williams – Symphonie n°3 (premier mvt)
¶ LPO, Norrington (Decca 2017) *
→ Captation un peu frontale et dure.
New Philharmonia, Boult (EMI) *** **
→ Détaillé, tranchant et debussyste, superbe pensée.
LPO, Haitink (EMI)  *** *
→ Calme, mais très bien équilibré.
LSO, Hickox (Chandos) *** *** *
→ Remarquablement articulé, comme toujours (avec fond un peu brouillé à cause de Chandos, mais tout est très audible, capté de près), superbes gradations.
¶ Hallé O, Elder (Hallé) *** ***
→ Superbe lisibilité et aération, assez statique alla Faune
LPO, Boult (Decca) **
→ Prise de son un peu ancienne, par blocs, mais toujours très beau détail.
LSO, Previn (Sony) ***
→ Beau, un peu étale et hédoniste, frémissements intéressants, fond un peu brouillé.

Vaughan Williams – Symphonie n°4 – Atlanta SO, Spano (ASO Media)
→ Superbe réalisation plastique qui rend moins suffocante l'atmosphère, sans renoncer à la tension. (On peut considérer que c'est passer à côté du propos, mais ça correspond bien à ce dont j'ai besoin, n'aimant pas trop le paroxysme permanent et terrifiant de cette symphonie.)

Vaughan Williams – Symphonie n°4
¶ Philharmonique de ?, Mitropoulos (Music & Arts)
→ Énergie débordante et sale, impressionnant. Sonne tellement Chostakovitch (en plus nourrissant).
¶ New Phia, Boult II (EMI)
→ Cuivres vraiment pouêt-pouêt anglais, mais cassant et impressionnant, véritable énergie.
¶ Atlanta SO, Spano (ASO Media)
→ Très rond, mais est-ce le but ?
¶ NYP, Bernstein (Sony)
→ Lent et écrasant.

Vaughan Williams – Symphonie n°5 – Royal PO, Menuhin (Virgin)
→ Cordes très phrasées, comme toujours. (Un peu trop pour cette symphonie suspendue, sans réelle prépondérance thématique ?)

Vaughan Williams – Symphonie n°5 – Brandebourg StO, Hilgers (Genuin)
→ Très lisse, un peu impavide, déçu malgré les colorations toujours exceptionnelles de la petite harmonie de Frankfurt sur l'Oder…
(puis Philharmonia & Collins chez BIS, pas beaucoup de relief non plus malgré la belle prise de son)

♥♥♥ Diamond – Symphonies 2 & 4 – Seattle SO, Schwarz (Naxos)
→ Toujours aussi motorique, roboratif et exaltant !



nouveautés CD

MUSIQUE DE CHAMBRE

♥♥ Michl – Quatuors avec basson (Naxos)

♥♥ Beethoven – 6 Trios piano-cordes Op.1, Op.70, Op.97 – Trio Sōra (Naïve)
→ Très belle anthologie (manquent l'opus 11 qui existe aussi avec clarinette, l'opus 38 qui transcrit le Septuor, ainsi que la réduction de la Deuxième Symphonie, toutes des pièces de moindre importance que les 6 présents ici), interprétée avec l'ardeur admirable qu'on leur connaît. Profondeur de son, piano à la belle finesse de touche jusque dans les traits périlleux, et structurant le discours, violoncelle intense…
→ Deux petites réserves qui ne tiennent pas à l'interprétation en tant que telle : d'abord la lassitude qu'impose la suite de ces trios très similaires – et qui n'ont ni la variété ni la profondeur des Sonates pour piano ou Quatuors à cordes du Grand Sourd. J'aurais aimé avoir l'Op.1 n°1 et l'Archiduc couplés par exemple avec les Wieck-Schumann et Mendelssohn-Hensel qu'elles promeuvent formidablement en concert, ou leur Chausson, ou le contemporain (Kagel, des compositrices…) qu'elles servent magnifiquement.
→ Seconde réserve, un peu injuste, mais depuis le départ de leur violoniste Magdalena Geka (pour l'ONDIF), l'équilibre du trio s'est redistribué, plutôt autour de Pauline Chenais au piano, qui assure fabuleusement ce rôle, mais la personnalité généreuse des cordes se trouve bridée par ce nouvel agencement, ne leur permettant pas la même expansivité, et je ne peux m'empêcher de le regretter en les entendant.
→ Pour autant, si l'on n'écoute pas ce disque pour ce qu'il ne veut pas (un programme équilibré plutôt qu'une monographie) ou ne peut pas (l'ancienne équipe) être, c'est là une très, très belle et lecture des œuvres présentées, pleine de panache et d'une finistion remarquable.

Schubert – « In Stille Land », lieder pour quatuor à cordes (sans voix) + Quatuors 6 & 14 – Signum SQ (PentaTone)
→ Beaux lieder (pas les plus marquants, et la Jeune Fille & la Mort simplement dans sa première partie !), démarche originale. Tout est joué comme soufflé, susurré, de façon assez poétique et convaincante.
→ Le 6 (un de ses très beaux de jeunesse) est remarquablement joué, le 14 claque dans ses paroxysmes (mais la tension baisse brusquement dans les moments plus calmes). Une très très belle version de plus, qui aurait révolutionné la discographie il y a vingt ans, et qui aujourd'hui s'ajoute aux propositions superlatives des Jerusalem, Ehnes, Cremona, Leipziger, Debussy, Novus…

♥♥ Cherubini – Quatuors 3,4,5,6 – Venezia SQ (Decca)
→ Très beau, équilibré, détaillé dans une veine traditionnelle qui respire remarquablement entre les pupitres. (Un peu moins impressionné par les œuvres à la réécoute, en revanche.)

Fanny Mendelssohn-Hensel – Quatuor – Asasello SQ (CAvi)
Fanny Mendelssohn-Hensel – Quatuor – Ébène SQ (Virgin)

Schumann – Quatuor n°3 – Kuijken SQ
→ Très décevant : pas du tout tranchant, et assez mou, toujours doux et ne claque jamais, même dans les paroxysmes du scherzo – j'ai peut-être été trop bien habitué par les jeunes quatuors !

Schumann – Quatuor n°3 pour piano quatre mains – Duo Eckerle (Naxos)
→ Survol. Toute tension est perdue, pas intéressant (et interprétation assez molle).

♥♥♥ Arenski, Chostakovitch, Mendelssohn – Trios n°1 – Trio Zeliha (Mirare)
→ Trois chefs-d'œuvre ultimes, dont le rare Arenski, d'où émane une générosité thématique russe au carré, à la façon de ce que fait Kalinnikov dans la symphonie. La structure et l'harmonie ne sont pas aussi inventives que chez Tchaïkovski, mais l'expansivité mélodique y est réellement comparable. L'étonnant Chostakovitch de jeunesse demeure tout aussi grisant par ses poussées de sève à la fois conquérantes et désolées. Quant au sommet de sombre fièvre que constitue le trio de Mendelssohn, on l'aura peu souvent entendu aussi généreux et lisible.
→ Dans un son pur à la française, le Trio Zeliha se distingue, pour chaque pupitre, par une netteté, un charisme, un abandon absolument hors du commun, du diamant soyeux… Ce n'est ni très russe, ni très allemand, mais le discours de chaque pièce semble porté à son point d'ébullition, là où la musique nous renverse par delà les styles – avec une sobriété d'exécution qui leur fait honneur, a fortiori à leur âge, dans un répertoire qui appelle facilement l'emphase.
→ Je les ai entendus jouer ce programme en salle, une des grandes expériences de ma vie de mélomane. Je n'ai tout simplement jamais entendu un trio, en plus de son grand élan collectif, qui soit à ce point à un tel niveau individuel (Galy, Quennesson, Gonzales Buajasan) dans chaque partie. Rare d'avoir une violoniste aussi intouchable techniquement, un violoncelliste avec un tel grain, un pianiste à ce point souple dans les nuances et intégré au discours… Ma crainte est donc que les offres avantageuses d'une carrière soliste ne finissent bientôt par les séparer.
→ (Je ne sais pas ce qui s'est passé avec la pochette.)

♥♥ Debussy – Quatuor, les 3 Sonates – Orlando SQ (Accord)

Goldmark – Quintettes piano-cordes Op.30 & 54 – Quatuor Sine Nomine, Triendl (CPO)

♥♥♥ Weingartner – Sextuor pour quatuor, contrebasse & piano / Octuor pour clarinette, cor, basson, quatuor & piano – Triendl (CPO)
→ Complètement fasciné par le Sextuor pour piano et cordes (la pochette dit Septuor à tort). Un lyrisme extraordinaire.
→ bissé

Schoeck – Sonate pour clarinette basse & piano – Henri Bok, Rainer Maria Klaas (Clarinet and Saxophone Classics 1999)
→ Étrange influence rhapsodique et déhanchée du jazz sur du Schoeck !  Capté de trop près, timbres assez vilains des instruments. Se trouve aussi, en version orchestrée par Willy Honegger, dans le disque Venzago contenant notamment la version ultime de Besuch in Urach (avec Rachel Harnisch, en version orchestrale).

N. Boulanger, Stravinski-Piatigorski, Piazzolla, Carter – « Dear Mademoiselle », violoncelle & piano – Astrig Siranossian, Nathanaël Gouin, Daniel Barenboim (Alpha)
→ Bel album original d'hommage à Nadia Boulanger. Je n'ai pas totalement été saisi par les œuvres, mais le plaisir de la rencontre est grand, avec un violoncelle aux teintes très mélancoliques. Les Boulanger sont même accompagnés par Barenboim, que je suis stupéfait de retrouver dans un répertoire si peu couru, comme accompagnateur d'une jeune artiste et sur un label moins internationalement exposé – de plus humbles que lui auraient refusé !  Occasion aussi d'écouter Gouin, fabuleux pianiste (voir ses récents Bizet) et la rare Sonate de Carter, qui hésite entre romantisme, atonalité et jazz.

♥♥♥ Takemitsu – Bryce, Toward the Sea I… – Aitken (Naxos)



nouveautés CD

PIANO SOLO

Beethoven – Sonate pour piano n°4, écoute comparée
→ Say, Nat, Goode, Buchbinder II, Grinberg, Pommier, Kovacevich, Bellucci, Barenboim DGG, Lortie, Barenboim 2020, Backhaus II, Bilson, Barenboim 66…
(Choisi seulement des grandes versions. Placées dans mon ordre d'appréciation personnel, les six premiers, et plus singulièrement les trois, m'éblouissant tout à fait.)

♥♥♥ Beethoven – Complete Piano Sonatas – Fazil Say (Warner)
(pour l'instant écouté les 1-2-4-5-6-7-27-28-29-30-31)
→ Poursuite de l'écoute amorcée il y a quelques mois lors de la parution.
→ Outre l'aisance de Say dans les plus redoutables défi techniques, on bénéficie aussi d'une riche palette harmonique, où la résonance remplit réellement les interstices de la musique, tout en restant d'une limpidité exemplaire (à laquelle la prise de son rend justice). À l'usage ces derniers mois, je n'ai pas trouvé version qui magnifie mieux l'ambition et l'ardeur de ces pages, et avec une telle qualité de réalisation. Beaucoup de pédale, mais toujours pour créer des rencontres harmoniques, jamais par réflexe ou paresse. Seul défaut (il y en a toujours un) : le micro étant proche, Say grogne beaucoup pendant les mouvements rapides avant de frapper les accords, c'est un peu impatientant dans les sonates de facture plus classique du début du corpus.

♥♥ Beethoven – Sonates pour piano n°28, 30, 32 – Lugansky (HM 2020)
→ Toujours ce toucher incroyablement présent et plein, avec ce sens du phrasé qui permet de donner du liant très bienvenu aux âpretés de Beethoven. On sent la grande maturation – il jouait peu Beethoven, dans sa jeunesse, à l'époque où je suivais ses concerts de plus près.
→ 28 sublime. 32 acérée, presque dure, très animée et découpée, d'une tension remarquable. 30 davantage dans la norme du très haut niveau.
→ Sonne avec une qualité d'attaque légèrement dure et cristalline, une palette harmonique compacte qui évoquent les pianos d'époque.

Schumann – Fantasiestücke Op.12
¶ Nat (3 premiers chez Documents)
¶ Frankl

♥♥ Schumann – Fantasiestücke Op.12 & Intermezzi Op.4 – Daniela Ruso (Amadis)
→ Captation sèche et proche, mais superbe son, jeu très découpé et charismatique !  Pour  des œuvres de  qui ne sont pas les plus jouées, mais pas les moins inspirées de son auteur !




nouveautés CD


LIED & MÉLODIE

Schubert – Die schöne Müllerin – Ian Bostridge, Saskia Giorgini (PentaTone)
→ Très belle version, en particulier pour le piano de diamant de Giorgini, acéré comme peu dans ce cycle (on peut songer, dans un style plus détaché, à l'épique tranchant de Gothóni).
→ Bostridge y est comme toujours sophistiqué, frémissant et habité, mais la voix, un peu plus terne désormais, en fait sa Meunière la moins extraordinaire, que ce soit son étrange première avec Johnson ou le point d'équilibre assez ultime entre sinuosité et classicisme avec Uchida.

♥♥♥ Schumann, Frauenliebe und Leben // Brahms, lieder – Garanča (DGG)
→ Divine surprise… Garanča, impératrice des volapüks, livre une interprétation vibrante, tétanisante d'intensité de ces Brahms denses et sublimes, et même du très-enregistré Frauenliebe de Schumann !  Avec une voix qui a peut-être vieilli et où elle tire des couleurs très inhabituelles, davantage replacées vers le nez, un léger mixte obtenu en teintant de couleurs de poitrine, elle obtient une interprétation qui semble remonter le temps, et produit un effet charismatique immédiat, sans du tout négliger la diction. Splendide programme, exécution très prenante – un petit coup de foudre pour moi qui, d'ordinaire, n'aime pas sa diction brumeuse et son chant à la fois lisse et légèrement hululant. Le lied révèle une tout autre artiste !
→ bissé

Mahler – Lieder eines fahrenden Gesellen (arr. A. Schoenberg) – Bär, Linos Ensemble (Capriccio)
→ Bär manque un peu d'assise et de mordant ici, pour une fois !



nouveautés CD

LISTE D'ÉCOUTES à faire – nouveautés

→ alcyone Marais
→ vladigerov symphs 1 & 2
→ schmitt salomé ( & raretés) falletta
→ arte scordatura
→ trios alayabiev glinka rubinstein, brahms Trio (naxos)
→ martynov : utopia
→ rasi art de la fugue consort de violes
→ vasks viatore, distant light, radio munich
→ boccherini les ombres
→ leningrad concertos
→ albums toccata classics : fürstenthal, carrillo, sivelöv, osca da silva
→ auvinen lintu
→ rudolf wagner genesis
→ passacaglie d'amore nisini
→ grondahl legacy

→ britten saint nicolas
→ nigl rihm beethoven lieder
→ proko 5 miasko 21 v.petrenko oslo
→ brahms trios le sage
→ schubt s2 & 3 zender basel kamO
→ huvé beeth pianoforte
→ gran partita ogrintchouk ccgbw BIS
→ dall'abacco il tempio armonico
→ barenboim beethoven intégrale n°5
→ monteverdi terzo libro alessandrini naïve

(plus tous les autres des listes précédentes…)



nouveautés CD

LISTE D'ÉCOUTES à (re)faire – autres

À nos morts ignorés Antoine - Boulanger - Caplet - Debussy - Hahn - Gurney  Mauillon Le Bozec

bär cantates bach (olaf bär)

weingartner

triendl :
fibich dohnanyi sext,
kiel piaQ,
gernsheim quint
goetz quint
gilse tanzskizzen
magnard trio laurenceau

Rutland Boughton : Symphonie No. 3, concerto pour hautbois No. 1 (Vernon Handley) (hyperion)

Wolf Bostridge

fervaal hogué et bardes

koechlin thal & grothuysen

chaîne mathias vidal

RVW 4 : spano, bernstein, boult-phia, berglund
RVW 5 : Hilgers-FkftOder, collins-BIS, menuhin, boult-phia, elder, marriner, barbirolli,
RVW 6 : boult-LSO, elder, berglund, a.davis BBCSO, c.davis BayRSO,
RVW 8 : Jurowski-LPO

tout CPO
tout Hortus
(Timpani c'est à peu près fait)

(plus tous les autres des listes précédentes…)




… et à bientôt pour une prochaine livraison ! 

(Notez que je ne suis pas certain de poursuivre le format l'an prochain, trop de notules plus stimulantes en souffrance pour faire la chronique des disques, je le crains.)

vendredi 13 septembre 2019

Dernières nouveautés discographiques – et commentaires


En haut à gauche de chaque page du site, en bleu, figure « Nouveautés discographiques & commentaires  ». En cliquant dessus, vous accédez à l'intégralité des disques publiés & commentés depuis janvier (une centaine actuellement, sur les plus de 500 à mentionner).

Récemment mis à jour : la plus incroyable prise de son de Bruckner du monde, le dernier Winterreise de Bostridge, Mendelssohn par Johannes Moser, grands motets de LULLY avec Mathias Vidal en vedette, Fauré et Berlioz par Fouchécourt avec accompagnement de quatuor à cordes, Wesendonck-Lieder par Ch. Prégardien…

Belles découvertes à vous !

jeudi 29 novembre 2018

Tarare de Beaumarchais & Salieri – IV – après l'épreuve de la salle


(Voyez aussi les épisodes I & II, plus étayés, ou III.)

L'écoute hier soir de l'œuvre en salle, en conditions réelles, a mis en valeur certaines lignes de force et confirmé ce qui ne restait qu'à l'état d'intuition.

¶ L'œuvre frappe d'abord par sa variété de moyens : un nombre incalculable de figures d'accompagnement, d'astuces harmoniques, de types de climats mélodiques, qui se succèdent à un rythme effréné. Les airs sont très courts et immédiatement enchaînés, voire interrompus, si bien que l'on ne peut presque plus parler de numéros – l'intégration est encore plus forte que chez Meyerbeer, il me semble !  L'étape suivante, c'est Wagner, et encore, il existe quasiment des airs et duos ceints de récitatifs dans Die Walküre
Harmoniquement aussi… les fausses cadences de l'air séditieux de Calpigi, c'est stupéfiant, ou les enchaînements entre sections.

¶ De même pour le livret, il se passe un milliard de choses à la minute, si bien qu'en le réécoutant inlassablement depuis toutes ces années, en le voyant en action deux fois en une semaine, je parviens seulement à me familiariser avec certains détails – en particulier les relations complexes entre l'eunuque Calpigi et le sultan Atar (le second maudit et pourchasse sans cesse le premier, sans jamais le châtier), la disposition du ballet interrompu de l'acte III (avec l'échelle de soie et les lumières du sérail…), les quiproquos accumulés dans le sérail au IV (chacun se faisant passer pour un autre qui peut être, ultimement, lui-même, et croyant avoir été joué en jouant celui qui voulait l'empêcher de le jouer), qui n'arrvient pas simultanément, mais tombent en cascade à chaque réplique.
    Par ailleurs, un des rares livrets réellement drôles – l'exposition, très concise, pose tout de suite la haine paradoxale du sultan (exécrant être trop bien servi) en des termes délicieux, dont la bouffonnerie ne retire rien à l'impressionnante cruauté (ni au désarroi attendrissant du méchant). À ce titre, Beaumarchais ose des choses très rares avant le XXe siècle, comme cet esclave qu'on croit récurrent et qui, après une réplique anodine, est immédiatement occis par son prince – manière qu'on fasse comprendre qu'on badine volontiers avec la mort. Glaçant, surtout juxtaposé à cette esthétique encore gluckiste.

¶ Dans la longueur des phrases (et l'abstraction de leur propos, même hors des Prologue / Épilogue dans les nuées limbiques), on sent l'homme de théâtre pas du tout rompu aux exigences spécifiques de l'opéra. Certaines des punchlines font huit vers avec inversions et enchâssements… avec l'extension de la temporalité par le chant, les éventuels mots qu'on manque et l'attention qu'on porte à la musique, dur de tout suivre à la première écoute !  On y reconnaît d'ailleurs très bien la syntaxe du Beaumarchais du Mariage… Salieri s'en tire admirablement au demeurant, mais c'est un cas assez unique de livret manifestement « amateur » (alors que les amateurs ont toujours été légion dans le métier !) avant que les compositeurs ne commencent à écrire les leurs (Wagner, hélas… puis pas mal de monde au XXe, hélas aussi).

Le nom de Tarare (en principe une interjection dubitative ou agacée) tourne dans toutes les bouches en permanence, on ne peut pas faire une imprécation, un souhait, une action sans le mentionner, sous toutes les formes, sous tous les cris, avec au sommet l'acte II où les soldats le brament (les initiés riront) avec joie, ce serait l'équivalent de faire chanter extatiquement : « Gnagnagnagna ! Gnagnagnagna ! » (à peu près la signification de l'interjection Tarare !). C'était le défi que Beaumarchais s'était lancé en conservant le nom du personnage d'Antoine Hamilton (où Tarare est un conseiller du Prince, d'abord rusé avant que d'être bienveillant) : il souhaitait, par son caractère et à force d'invocations, réussir à faire aimer ce nom ridicule du public. Musique irrésistible de Salieri  aidant – qui ne laisse jamais passer son nom sans le faire trompetter –, c'est très réussi, si j'en juge le nombre de spectateurs qui chantaient ces répliques-là en quittant le théâtre. J'avais rarement vu un public aussi chantant en sortant d'un spectacle – et très certainement jamais pour une œuvre pré-1800 !
    Aussi étrange que ce puisse paraître, cette particularité est peut-être ce qui fait la différence entre une belle œuvre (qui regorge de mélodies irrésistibles, certes) et un chef-d'œuvre aussi prégnant que Tarare, dont le nom tournoie et vous habite longtemps après l'écoute… Un peu comme pour Pelléas : on vous dit un mot et vous avez envie de chanter la réplique qui correspond (ce qui ne se produit pas avec des tubes d'un genre différent, comme Traviata ou Carmen). Hé bien ici, on vous cite le titre et quatre ou cinq répliques viennent chanter à votre bouche…

¶ Quelques autres remarques, davantage dans le détail, mais des aspects qui m'ont réellement frappé en salle :
→ D'ordinaire, les récits de hors-scène servent à compenser l'action qu'on ne peut montrer, ici ils s'y ajoutent (après avoir montré un assassinat anodin au début du I, on a bien compris que la bienséance…), avec une science du dévoilement progressif chez Beaumarchais et une ardeur étourdissante chez Salieri. Récit de l'enlèvement d'Astasie, du combat de Tarare contre le ravisseur, de l'introduction pas si secrète dans le sérail… Nombreux, longs et virtuoses.
Le goût du métatextuel, là aussi rare à l'opéra, même pour les œuvres plus récentes. Ainsi il est fréquent que les numéros obligés reçoivent une forme d'explication dramatique : le ballet monté à la hâte pour couvrir l'enlèvement, commenté par Calpigi « On croirait voir ce spectacle de France / Où tout va bien pourvu qu'on danse », ou bien l'ariette-conseil de Spinette (un format très utilisé chez LULLY, cf. les suivantes d'Armide), qui justifie sa répétition par le risque que son mari ne l'ait pas bien comprise.
→ Enfin, je n'avais pas rêvé, il y a bel et bien des motifs récurrents – une première dans l'histoire de l'opéra, je crois – en tout cas un, celui des astuces bienveillantes de Calpigi pour secourir Tarare, motif léger et dansant qui n'apparaît que lorsque le premier dévoile son véritable visage secourable au second (trois ou quatre occurrences, assez en évidence, mais pas identiques, adaptées à la musique du contexte, vraiment du letimotive !).
 


Je n'ai jusqu'ici rien dit de précis sur la distribution, d'abord parce que je n'avais vu que la générale (et il n'est pas convenable de communiquer des observations sur une séance de travail, en particulier pour les chanteurs, qui chantaient le lendemain, et dans une salle très différente), ensuite parce qu'elle est assez idéale, tout simplement – mes contre-propositions n'auraient été, en toute honnêteté, pas spécialement meilleures dans le cas où elles auraient aussi bien réussi.

Je ne dis donc un mot que sur quelques détails, ceci n'est pas un compte-rendu, une critique ou je ne sais quoi, juste quelques réflexions sur les choix de distributions ou détails qui m'ont marqué.

Le choix de Karine Deshayes (dont la voix est devenue assez large et ronde) a dû coûter cher en cachet pour un rôle aussi court et secondaire, bien qu'il soit le centre de l'intrigue (Astasie, l'épouse de Tarare enlevée par le sultan)… mais c'était un coup de maître, les plaintes et cris un peu stéréotypés (dont le grand « Tarare ! » à la fin, un aigu à cru saisissant comme en écrivent plus tard Verdi et Wagner) de cette victime archétypale deviennent immédiatement farouches et plus grands que nature, c'est absolument parfait.

Lorsque, à l'époque des Horaces, on avait annoncé Tarare en 2018, j'avais rêvé Mathias Vidal et surtout Bernard Richter (qui, vu ses engagements dans des premiers rôles à Vienne, ne doit plus être très intéressé par le pré-1800, ni dans les gammes de prix envisageables…). Cyrille Dubois est un excellent choix, mais dans une cette distribution idéale, je n'ai pas pu m'empêcher d'entendre, en filigrane, l'héroïsme que j'avais d'abord imaginé pendant plusieurs mois – Cyrille Dubois a toujours ce côté gentil garçon, ce qu'est Tarare assurément (et qui réussissait magnifiquement même dans un rôle aussi complètement romantique que Gérard de Coucy chez Halévy), mais il me manque, je crois, l'aspect impressionnant du guerrier invincible, charismatique du personnage. Il est si aimable, si poli, si modeste, qu'il séduit absolument, mais qu'on ne ressent pas pourquoi tout le monde semble aussi impérieusement pressé de mettre son nom à la bouche.
    Il semblait un peu ému, aussi, et la voix n'a réellement éclaté que dans les grands reproches de l'acte V, où il était saisissant d'assurance et de vérité.
    Par ailleurs, qu'on ne se méprenne pas : c'est un commentaire sur un détail de ce que j'ai senti, plus relié à l'œuvre qu'à l'interprète : Tarare, en plus de la partition, appelle dans l'imaginaire quelqu'un qui soit jeune, beau, vaillant, délicat, tout à la fois philosophe et athlète, doté de ce je-ne-sais-quoi qui fascine tout le monde… je ne prétends pas que ce soit la faute des interprètes s'ils n'ont pas à la fois la voix souple, le timbre clair, la couleur héroïque, la taille haute et le torse bronzé !  À cela s'ajoute que j'ai Howard Crook dans l'oreille, et que c'est possiblement le ténor que j'aime le plus dans toute la musique enregistrée…
    S'il faut parler spécifiquement de Cyrille Dubois, alors je soulignerais avant tout la diction parfaite, le style ciselé  (ces appoggiatures sans vibrato où le timbre se colore légèrement, pour mettre en valeur la tension mélodique et harmonique), du grand art.

Enguerrand de Hys, en eunuque adjuvant, ose ajouter de la nasalité à son timbre, ce qui est osé (risque d'être catalogué comme ténor de caractère, alors qu'il chante superbement les lyriques et la mélodie), mais lui permet simultanément d'être mieux audible et de jouir d'une plus grande palette expressive sur les mots, dont il fait un usage foisonnant et irrésistible. Je lui tire mon chapeau, vraiment. (Et son timbre, quoique pas à la mode, est très beau comme ça.)

Jubilation absolue et univoque, comme à chaque fois, avec Jean-Sébastien Bou en Atar : rien qu'en se mouvant dans l'étroit réduit de son pupitre, il possède la scène… La déclamation emportée, la générosité du son jusque dans le murmure, la finesse des intonations (mordant, drôle, à la fois distant sur lui-même et immédiatement crédible), la rondeur du timbre qui passe cependant très bien grâce à une assise sur un métal solide et absolument pas agressif, il incarne l'absolu de ce que peut être un baryton d'opéra. Chaque spectacle le confirme, et Atar lui fournit un rôle à sa mesure, très long, très exubérant, très drôle et très généreux vocalement.

De même, je suis frappé par les progrès des Talens Lyriques et l'absence totale de lien avec ce qu'ils ont pu être, depuis Bellérophon (1,2,3) à peu près (2010) : ils avaient la réputation (exagérée, mais pas tout à fait sans cause) d'une certaine indolence, malgré le grand sens du style de Rousset (les danses ont toujours été les plus élégantes du marché…). Leur Persée chez Ambroisie en témoigne, même si Didon de Desmarest, Cadmus et Roland montre que, sous des apparences peut-être plus ternes que la concurrence, la finesse était patente.
Dans les années 2010, grand virage donc : à ces qualités s'ajoutent, et de plus en plus, l'ardeur et la couleur. Ce que j'ai entendu hier soir, avec ses cordes d'une chaleur, d'un grain, d'une sûreté hors du commun, était absolument renversant. Les cors aussi, qui étaient réputés peu fiables, n'ont rien mis à côté, et avec quelles iristations, alors qu'ils étaient très généreusement sollicités.

Tandis que les Musiciens du Louvre, à force de XIXe, ont beaucoup perdu en personnalité, que le Concert Spirituel, toujours très intéressant, a pris un profil sonore moins adapté au XVIIe (il continue d'être remarquable dans le XVIIIe), et que d'une manière générale les chefs baroques qui ont eu du succès semblent avoir vécu comme une promotion de pouvoir jouer du Beethoven et du Brahms (Harnoncourt, Gardiner, Minkowski, Niquet, Hengelbrock, Poppen, Manze…) ou se content un peu de rejouer sans cesse le répertoire qu'ils ont exhumé (Christie), je sais infiniment gré à Christophe Rousset d'être resté fidèle, malgré sa célébrité croissante, à la mise en valeur de ce répertoire, à continuer de créer de nouvelles œuvres – alors qu'on le sait, structurellement, si on publie un Don Giovanni, on trouve tout de suite son public, et avec beaucoup moins de préparation nécessaire (ne serait-ce que constituer et payer le matériel d'orchestre !)… jouer de l'inédit réclame beaucoup plus de travail pour moins de succès. Et quelles œuvres !  Outre l'intégrale LULLY manifestement en cours – on n'avait pas de Bellérophon, et on avait si cruellement besoin d'une Alceste, par exemple, sans compter l'intérêt des volumes réenregistrés, comme Armide ! –, qui d'autre a donné inlassablement ces titres inédits, dont la dernière proposition fut cette intégrale des opéras français de Salieri ?



Une œuvre totalement atypique (et une des plus intéressantes de tout le répertoire, je trouve) + une interprétation d'une qualité délirante + un disque assuré, finalement il n'en faut pas beaucoup pour rendre David content, n'est-ce pas ?

J'espère avoir l'occasion de revenir sur quelques détails plus musicaux (notamment ces affaires d'enchaînements, d'harmonies, de leitmotive), ayant déjà quelques idées de titres pas du tout provocateurs – « [guerre des gangs] Salieri a peut-être tué Mozart, mais Wagner lui a tout volé ».
Cependant, en attendant, j'ai un programme de décembre à publier… et au autre chef-d'œuvre, cette fois du XIXe, à présenter – Paul & Virginie de Massé, une découverte assez incroyable. La notule est presque achevée, j'attends l'autorisation de publier des extraits (sinon il faudra un petit délai pour que je les enregistre moi-même).

samedi 3 novembre 2018

Innovant novembre




Encore une fois, sélection personnelle dont le ressort est souvent la rareté ou la bizarrerie. Pour une sélection plus transversale et moins triée, l'Offi et Cadences sont assez complets (tout en ratant certaines de mes propositions, considérant les recoins où je râcle des pépites et ma veille généralisée des clubs interlopes). Et bien sûr France Orgue pour les concerts de pouêt-pouêts à tuyaux, ce n'est pas exhaustif, mais de très loin ce qu'on trouve de plus complet !



1. Rétroviseur

En cliquant sur les liens, mon avis (égrené en général sur le fil Twitter de CSS dans les heures suivant le spectacle, voire dès l'entracte) apparaît. Je m'efforce autant que possible de remettre aussi les œuvres en perspective et de poser des questions plus larges que le bon / pas bon du soir donné, aussi j'espère que les retardataires et les absents y trouveront quelques satisfactions tout de même.

Les ♥ mesurent mon émotion (depuis « ça va, c'est joli » jusqu'à l'extase), non la qualité des spectacles. Des spectacles que j'ai trouvés remarquables m'ont touché avec modération, tandis que d'autres plus bancals ou moins exceptionnels m'ont bouleversé. C'est ainsi.
Quant à ♠ : j'ai pas du tout aimé.

♥ Agréable, mais je ne suis pas entré dans le spectacle.
♥♥ Intéressant.
♥♥♥ Excellent.
♥♥♥♥ Merveilleux.
♥♥♥♥♥ Événément marquant dans une vie de spectateur.

♠ J'aime pas.
♠♠ Je déteste.
♠♠♠ C'est scandaleux !  (encore jamais attribué)
♠♠♠♠ J'ai hué le metteur en scène et vais lui défoncer sa race à la sortie.

► #12 Extraits de tragédies en musique (LULLY, Charpentier, Destouches, Rameau) pour soprano (Eugénie Lefebvre) et deux clavecins, dans la merveilleuse église (juxtapositions XIe-XVIe) d'Ennery. Un délice d'éloquence et de contrepoints : grand, grand concert. ♥♥♥♥♥
► #13 Révélation de Léonora Miano (pièce mythologique évoquant les traites négrières) mis en scène par Satoshi Miyagi en japonais à la Colline, avec un orchestre de 11 percussionnistes. Un univers très étonnant. (avec des morceaux de mythologie et d'onomastique dans mon commentaire) ♥♥♥
► #14 Rarissime exécution en concert du Quintette piano-cordes de Jean Cras, les chants de marin les plus modulants que l'on puisse rêver !  (avec quelques extraits de partition) ♥♥♥♥♥
► #15 Bérénice de Michael Jarrell à Garnier. Grande déception – je n'y retrouve ni le sens dramatique de Cassandre (qui n'était certes pas un opéra), ni le contrepoint lyrique de Galileo (qui n'était certes pas sis sur des alexandrins français).  ♠
► #16 Symphonie n°7 de Stanford (et Concerto pour clarinette), Éric van Lauwe. Très belle interprétation, œuvres pas au faîte du catalogue de Stanford. ♥♥
► #17 Tristan und Isolde : Serafin, Schager, Gubanova, Goerne, Pape ; Viola, Sellars, ONP, Jordan. ♥♥♥ (ça en mérite davantage, mais je connais tellement l'œuvre que l'effet de surprise n'est pas le même, et du fond de Bastille…)
► #18 Grétry, Le Jugement de Midas. CRR de Paris. ♥♥♥♥
► #19 Destouches, Issé. Wanroij, Santon, E. Lefebvre, Vidal, Collardelle, Lecroart, Dolié, Barolz ; Chantres, Les Surprises, Camboulas. ♥♥ (parce que c'est une nouveauté… mais pas palpitant, la faute au livret, et sans doute aussi un biais d'interprétation défavorable au drame, à la danse, à la déclamation)
► #20 Orgue à la Madeleine par Matthew Searles : Franck, (Samuel) Rousseau, Saint-Saëns, Tournemire, Demessieux… Programme français assez incroyable, autour des chorals et de l'improvisation transcrite (celles de Saint-Saëns et Tournemire sont incroyables !). ♥♥♥♥♥
► #21 Quatuor a cappella Bonelli, dans Josquin, Palestrina, Victorian, Mendelssohn, Sullivan, bruckner, Debussy, Peterson-Berger, Duruglé, Kodály, Poulenc, gospels… à un par partie !  Fulgurant, la technique parfaite, et jusque dans les langues !  ♥♥♥♥♥
► #22 Maeterlinck, La Princesse Maleine, Pascal Kirsch. ♥♥♥♥♥
► #23 Bernstein, Candide. Swanson, Devieilhe, Rivenq, Amiel, Saint-Martin, Courcier, Koch. Opéra de Marseille, Robert Tuohy. ♥♥♥♥
► #24 Toshiki Okada, Five Days in March (en japonais). ♥♥
► #25 Meyerbeer, Les Huguenots. Oropesa, Jaho, Kang, Testé… Kriegenburg, ONP, Mariotti. ♥♥♥♥♥
► #26 Berlioz, La Mort de Cléopâtre (Richardot), Symphonie fantastique, ORR, Gardiner. ♥♥♥♥
► #27 Debussy, Pelléas et Mélisande, version piano. Lanièce, Dominguez, Degout, Dear… Martin Surot. ♠ (c'est terrible, encéphalogramme plat… vraiment dangereux à présenter après si peu de répétitions… et pas du tout aimé ce que faisaient les chanteurs, alors même que j'ai adoré Lanièce jusqu'ici, mais il change sa voix, et beaucoup aimé Dear, mais dans des rôles plus opératiques…)
► #28 Haendel, Serse. Fagioli, Kalna, Genaux, Aspromonte, Galou, Andreas Wolf, Biagio Pizzuti. Il Pomo d'oro, Emelyanychev. ♥♥♥♥ (interprété comme cela, quel plaisir !)
► #29 Baroque viennois (Kerll, Fux, Conti, Schmelzer) par le Consort Musica Vera. Une brassée de découvertes ! ♥♥♥♥
► #30 Emond de Michalik. ♥♥♥♥♥ (en cours de commentaire, revenez plus tard)
► #31 Magnard, Hymne à la Justice, par les Clés d'Euphonia. (Et Ravel main gauche, Strauss Tod und Verklärung.) ♥♥ (Magnard passionnant et très réussi, j'étais dans de moins bonnes dispositions pour écouter le reste du programme.)

Et quelques déambulations illustrées d'octobre :
☼ La Forêt de Rambouillet traversée du Sud au Nord, du Palais du Roi de Rome jusqu'aux Étangs de Hollande.
☼ La Forêt d'Armainvilliers, ses arbres remarquables et vestiges archéologiques.
☼ Baillet-en-France, Chauvry, Béthemont, Villiers-Adam… villages autour de la Forêt de l'Isle-Adam

Château de Rambouillet.
Palais du Roi de Rome.

† Église XIIe-XVIe d'Ennery, premier gothique et flamboyances prolychromes.
† Cathédrale Saint-Maclou de Pontoise.
Église Saint-Lubin de Rambouillet (avec vidéo-test d'acoustique).
† Cathédrale Saint-Louis de Versailles.
Sainte-Marie des Batignolles.
† Saint-Joseph-Artisan.
† Saint-Nicolas-des-Champs
† Temple de Port-Royal.

Expo Miró au Grand-Palais

Pour ceux qui ne sont pas mis en lien, vous les trouverez épars sur cette page.



2. Distinctions

Quelques statistiques :
● 20 concerts en octobre (oui, c'est beaucoup) dans 18 lieux différents dont 6 où je n'avais jamais mis les pieds. C'est plutôt bien d'y parvenir encore, après dix ans de loyaux services dans la région.

putto incarnat
Quelques ovations musicales :
Putto d'incarnat de l'exhumation : Consort Musica Vera pour le Requiem de Kerll, Ferey & Sine Qua Non pour le Quintette piano-cordes de Cras, Matthew Searles pour l'ensemble de son programme.
Putto d'incarnat œuvre : Les Huguenots de Meyerbeer, Callirhoé (extraits) de Destouches, Requiem de Kerll, Quintette de Cras, Médée (extraits) de Charpentier.
Putto d'incarnat claviers : Clément Geoffroy (à deux clavecins + continuo Issé), Matthew Searles (registration et souplesse).
Putto d'incarnat orchestre : Orchestre Révolutionnaire et Romantique (couleurs et cohésion dans Berlioz), CRR de Paris et environnants pour Grétry (quel engagement !).
Putto d'incarnat direction : Mariotti (animer ainsi cet orchestre, et rattraper l'air de rien les décalages des chanteurs dans les grands ensembles des Huguenots, du grand art), Ph. Jordan (Tristan).
● Une belle moisson de chanteurs exceptionnels (et je pèse mes mots) : Morgane Collomb (Kerll), Fanny Soyer (quatuor a cappella), Eugénie Lefebvre (Médée, Callirhoé, Amélite, Hespéride d'Issé), Marion Vergez-Pascal (quatuor a cappella), Bo Skovhus (Bérénice), Mathieu Lecroart (Issé), Biagio Pizzuti (Serse), Andreas Wolf (Serse), Adrien Fournaison (quatuor a cappella)… auxquels nous décernons volontiers un putto d'incarnat 2018.
● et les Putti d'incarnat de l'injustice critique, pas forcément adorés comme ceux choisis précédemment, mais réellement admirés, excellents, au-dessus de la désapprobation et que j'ai pu lire ou entendre de façon récurrente à leur encontre : Ermonela Jaho, Martina Serafin, Yosep Kang, Il Pomo d'oro… Courage les petits, vous êtes des grands !

putto incarnat
Quelques saluts théâtraux :
Putto d'incarnat théâtre : Maleine de Maeterlinck (pour le texte et sa vie sur scène, pas pour la mise en scène qui l'abîme en certains endroits), Edmond de Michalik (une sorte de vaudeville à références littéraires, très accessible et tout à fait jubilatoire à chaque instant).
Putto d'incarnat acteurs : Haruyo Suzuki (voix d'Inyi dans Révélation), Bénédicte Cerutti (la Reine étrangère dans Maleine), Cécile Coustillac (la Nourrice semi-comique dans Maleine), Nicolas Rivenq (quel anglais remarquable en narrateur-Pangloss de Candide).

Autant dire que je ne suis pas assuré que novembre soit du même tonnel…



3. Sélection des raretés et événements

En rouge, les interprètes qui méritent le déplacement.
En gras, les œuvres rares.
Et donc combiné : œuvres rares et tentantes (déjà écoutées, ou quelquefois simplement significatives / prometteuses).

Vendredi 2
→ Auditorium de Vincennes : Hymne à la Justice de Magnard (+ Tod & Verklärung, Ravel gauche). Les Clefs d'Euphonia. Libre participation.
→ Gaveau : Schütz, Erlebach, Theile, Ritter, Tunder par l'Arpeggiata.

Samedi 3
→ 16h, Saint-Gervais. Intégrale des motets de Couperin #4 par l'Ensemble Marguerite Louise (Gaëtan Jarry). Libre participation.
→ 18h, Royaumont, Masterclass Immler & Deutsch avec Garnier & Oneto-Bensaid (putto d'incarnat novembre 2017), Boché (putto d'incarnat mai 2018 et juin 2018) & Vallée… 18h, sur inscription.
→ Saint-Merry, violoncelle roumain & français.
→ Maison de la Radio, Esther de Racine avec la musique de scène d'origine de Moreau.
→ Auditorium de Vincennes : Hymne à la Justice de Magnard (+ Tod & Verklärung, Ravel gauche). Les Clefs d'Euphonia. Libre participation.

Dimanche 4
→ 14h30, Péniche Over the Rainbow : des succès de comédie musicale sous la direction de l'ancien grand chanteur-baroque-français Luc Coadou.
→ 15h, Saint-Germain-des-Prés : Concert baroque & musique ancienne coréenne.
→ 16h, Auditorium de Vincennes : Hymne à la Justice de Magnard (+ Tod & Verklärung, Ravel gauche). Les Clefs d'Euphonia. Libre participation.
→ 17h Temple Saint-Pierre (Paris XIX), Reincken au clavecin et Pachelbel à l'orgue par Clément Geoffroy (putto d'incarnat de septembre 2018 et octobre 2018). 55 rue Manin, gratuit.

--

Lundi 5
→ Philharmonie, création de CHEN Qigang, Capitole, Sokhiev.

Mardi 6
→ 12h30 puis 19h, CNSM : ECMA, Académie de Musique de Chambre Européenne, le lieu chaque année de mes grands coups de cœur et de mes nouveaux chouchous !  J'y ai découvert avant tout le monde les Akilone, Hanson, Arod, Sōra, Zadig, lorsqu'ils étaient encore élèves…
→ 12h30, Orsay, masterclass de la Fondation Royaumont, cf 3 novembre.
→ Opéra de Versailles, Berlioz, Damnation de Faust. Antonacci, Vidal, Courjal, Les Siècles, Roth. Alerte glottique !  Mathias Vidal a remplacé en catimini (le déjà très bon) Bryan Register. On se retrouve donc avec le plus beau plateau jamais réuni pour cette œuvre. Hélas, il ne reste plus que des places à 80€, car tout était déjà parti…

Mercredi 7
→ Temple du Luxembourg : Massé, Paul & Virginie ; Compagnie de L'Oiseleur. T. Rousseau, G. Laurens, Ratianarinaivo, Qiaochu Li… Massé n'a pas écrit que les pièces légères Les Noces de Jeannette (grand succès d'alors) ou Galathée (qui a bénéficié, il y a longtemps, des rares honneurs du disque) ; voici un de ses drames plus sérieux, qui met en relation ces héros emblématiques de la littérature française avec leurs lecteurs, avec de beaux
ensembles consonants mais riches. Hâte d'entendre cela en action !  Libre participation.
→ Philharmonie : Tippett, A Child of Our Time ; Connolly, Padmore, Relyea, OP, Adès. Oratorio très réussi (style brittenien en mieux), son œuvre emblématique.
→ Philharmonie : Armand Couperin, Dandrieu… par Béatrice Martin, Olivier Baumont, Claire Antonini, et Julien Cigana à la déclamation en français restitué (il n'y a pas plus savoureux que lui !).
→ Odéon : Début des Femmes Savantes mises en scène par Braunschweig.

Jeudi 8
L'une des journées les plus riches de l'année !
→ 18h, Musée d'Orsay : Lauréats de la Fondation Royaumont (dont les membres de la masterclass du 3 novembre) répartis dans le musée !
→ 19h, CNSM : Ouverture du Fliegende Holländer, Concerto pour violon et orchestre à vents de Weill, Concerto pour violon n°2 de Bartók. Orchestre des Lauréats du Conservatoire. Gratuit.
→ Mairie du IIIe : Quintette piano-cordes de Durosoir (et celui de Franck) par l'Ensemble Syntonia (putto d'incarnat 2017). Gratuit ?
→ Philharmonie : Tippett, A Child of Our Time ; Connolly, Padmore, Relyea, OP, Adès. Oratorio très réussi (style brittenien en mieux), son œuvre emblématique.
→ Orsay : Immler-Deutsch dans Schreker, Grosz, Gál, Wolf, Berg. Rarissime et exaltant mais cher pour un récital de lied (35€).
→ Invalides : Requiem de Farr, Élégie pour cordes et harpe de Kelly. Pas des chefs-d'œuvre intersidéraux, mais plaisants et rarissimes.
→ Seine Musicale : Haydn, Symphonie n°102, une Symphonie de CPE Bach, Concerto pour piano n°20 de Mozart. Insula Orchestra, Christian Zacharias.
→ Philharmonie : Louis & François Couperin par Rousset.
→ CRR de Paris : Debussy, Pelléas ; la formation n'est pas claire, j'avais compris Pascal Le Corre au piano, mais je vois qu'à présent des élèves instrumentistes sont crédités. Gratuit.
→ Ivry : Les Justes de Camus.

Vendredi 9
→ TCE : Verdi, Nabucco ;  Opéra de Lyon avec Anna Pirozzi, Leo Nucci… Les meilleurs titulaires d'aujourd'hui, pour un opéra d'un accomplissement remarquable, certes un tube, mais guère donné en France.
→ Chapelle Royale de Versailles : Moulinié, Cantique de Moÿse & Requiem, motets Louis XIII de Formé et Bouzignac. 18€.
→ Philharmonie : Durosoir, Amoyel, Britten, Debussy, Bach sur une copie du violoncelle de fortune de Maurice Maréchal, dans les tranchées. Par Emmanuelle Bertrand.
→ CRR de Paris : Debussy, Pelléas ; la formation n'est pas claire, j'avais compris Pascal Le Corre au piano, mais je vois qu'à présent des élèves instrumentistes sont crédités. Gratuit.
→ Massy : Samson & Dalila, production de Metz (Kamenica, Furlan, Duhamel).
→ Chelles : Sopro, pièce de Tiago Rodrigues en portugais, autour de la figure d'une souffleuse (réellement souffleuse). Donné également jusqu'à mi-décembre au Théâtre de la Bastille, dépêchez-vous, la plupart des dates sont complètes.

Samedi 10
→ 15h, Cortot : Septuor de Saint-Saëns (OCP)
→ 18h, Gargenville (aux Maisonnettes, l'ancienne maison de Nadia & Lili Boulanger), concert viole de gambe / clavecin. 8€.
→ 20h, Église écossaise : violon-piano de Janáček, Sonate pimpante de Rodrigo, Beethoven 9.
→ 20h30, La Chapelle-Gaillard : Lambert, Jacquet, Marais, Dandrieu, etc. Entrée libre. Réservation conseillée.
→ Début de Nel paese d'inverno (en italien) de Silvia Costa, plasticienne qui a été l'assistante de Castellucci.

Dimanche 11
→ Ivry : Les Justes de Camus.
→ 21h, Philharmonie : Chœurs de Caplet (Messe à 3), Reger, Schönberg, Ravel, Poulenc, Fujikura. Chœur de Chambre du Québec, Sequenza 9.3, Chœurs de l'Armée Française. Déplacé à 21h pour cause d'Armistice. Complet mais vérifiez sur la Bourse aux Billets (ou demandez-moi, je risque de revendre ma place…).

--

Lundi 12
→ CNSM : programme de chambre au Salon Vinteuil du BDE.
→ Athénée : Mirianashvili.
→ 21h, Théâtre de la Bastille : Sopro, pièce de Tiago Rodrigues en portugais, autour de la figure d'une souffleuse (réellement souffleuse).Jusqu'à mi-décembre,la plupart des dates sont complètes.

Mardi 13
→ Toute la journée : masterclass de Gary Hoffman (violoncelle) au CNSM.
→ 14h, CRR : masterclass publique sur les vaudevilles du XVIIIe siècle.
→ 18h, CNSM : pièces du compositeur récemment disparu Nguên Thiên Dao.
→ 20h, Colline : début du Lazare de Castellucci.
Chœur Calligrammes (putto d'incarnat du concert de l'année en 2017 et 2018 !), programme « Noël espagnol des trois Amériques » : Guastavino, Susa, Galindez, Valera, Corona (pardon, en vérifiant le lieu, je vois que c'est évidemment en décembre)

Mercredi 14
→ 14h, CRR : masterclass publique sur les vaudevilles du XVIIIe siècle.
→ 19h, CNSM : concert de thèse, Paganini au piano. Liszt, Busoni, Michael Zadora, Ignaz Friedman.

Jeudi 15
→ 18h30, Favart : Stockhausen, Donnerstag aus Licht. L'opéra totalisant qui regroupe une large part de sa production sera (partiellement) donné cette année : Jeudi à l'Opéra-Comique, et plus tard dans la saison Samedi à la Philharmonie !  Ici, c'est avec mise en scène, une expérience qui vous convaincra diversement (ensemble très hétéroclite, mais atonal bien sûr), à ne pas rater, au moins pour connaître cet objet étrange.
→ 19h, CNSM : cours public d'improvisation de musique indienne
→ Orsay : pièces à thématiques circassiennes de Satie (Parade !), Stravinski, Rota, Debussy (orchestrations de Children's Corner) etc., par le Secession Orchestra dirigé par Clément Mao-Takacs.
Chœur Calligrammes (putto d'incarnat du concert de l'année en 2017 et 2018 !), programme « Noël espagnol des trois Amériques » : Guastavino, Susa, Galindez, Valera, Corona (pardon, en vérifiant le lieu, je vois que c'est évidemment en décembre)
→ Philharmonie : Monologues de Jedermann de Frank Martin par Goerne, un des grands cycles vocaux du XXe siècle (assez récitatif et dramatique, comme les Vier dramatische Gesänge de Gurlitt ou les Häxorna de Rangström). Couplé avec la Dante-Symphonie de Liszt, fameuse et très enregistrée mais peu donnée en concert.

Vendredi 16
→ Invalides (salon) : pièces à deux pianistes de Saint-Saëns, Debussy, Rachmaninov, Chostakovitch. Avec Jean-Philippe Collard.
→ Philharmonie : Vivier, Grisey (Les Chants du Seuil), EIC, Louledjian (très remarquée la saison dernière dans la Damoiselle Élue – quelle diction, quelle présence !).

Samedi 17
→ 16h30 Épinay-sous-Sénart : baroque des Andes.
→ 18h, Écouen : Jodelle, Cléopâtre captive. Rare représentation de cette pièce fondamentale du patrimoine français. Gratuit sur réservation, dans le cadre merveilleux du château !
→ 18h30, Favart : Stockhausen, Donnerstag aus Licht. Voir jeudi pour commentaires.

Dimanche 18
→ 16h, Maison de la Radio : Chœurs de Schubert, Mendelssohn, Brahms par le Chœur de Radio-France. Ma dernière expérience, il y a près de dix ans, avait été très peu concluante (techniques lourdes qui s'accommodent mal de cette forme délicate), mais Sofi Jeannin (et désormais Martina Batič ?) les a beaucoup assouplis pendant son bref intérim.

--

Lundi 19
→ Toute la journée au CNSM : masterclasses du Quatuor Ébène. Gratuit.
→ 19h, CNSM : Symphonies 1 de Beethoven et 9 de Schubert, par les Lauréats du Conservatoire (multi-putto d'incarnat ces dernières années). Gratuit sur réservation.
→ 20h, Villette : début des représentations de l'épisode du Mahābhārata vu par Miyagi, avec son orchestre de percussions (et en japonais), gros succès à Avignon…

Mardi 20
→ 19h, Bondy : Chansons de Bord de Dutilleux (bijoux !), Chansons de la Pointe de Manac'h, Kodály, Ligeti, Fujiwara, par la Maîtrise de Radio-France. Gratuit.
→ 19h, CNSM : Concertos baroques de Jiranek, Heinichen, Reichenauer, Bentner et Zelenka ! Gratuit.

Mercredi 21
→ 20h30, Bal Blomet : pièces d'Anthiome, Berlioz, Saint-Saëns, Fauré. Ambroisine Bré et l'Ensemble Contraste. 22€.

Jeudi 22
→ 12h30 Petit-Palais : récital de lied & mélodie par Kaëlig Boché (double putto d'incarnat au dernier semestre !) et Jeanne Vallée.
→ 20h, Invalides : Programme varié très étonnant. Pièces héroïques pour orgue et cuivres de Widor et Dupré, extraits de Janáček (Glagolitique, Tass Boulba), Bartók, Pärt, Nilović, Eötvös, Rhapsodie pour clarinette et orchestre de Debussy… !
→ 20h, Opéra Royal de Versailles : Salieri, Tarare. Un des plus hauts chefs-d'œuvre de l'histoire de l'opéra, l'un des plus grands succès de l'Opéra de Paris également. J'en avais présenté le livret et le contexte ici. Équipe de dingue menée par Dubois, Bou, Rousset… Donné également à la Cité de la Musique.
→ 20h, Maison de la Radio : Bernstein, Divertimento, Halil, Riffs ; Dusapin, Morning in Long Island. ONF, Sirvend.
→ 20h, Fondation Singer-Polignac : Lauréats du prix Boulanger. Est-ce public ?  (souvent, non, mais je n'ai pas vérifié ici, étant déjà pris…)
→ 20h, T2G : Début des représentations de la pièce de Hideto Iwaï (en français).
→ Maison du Japon : « Jetons les livres ». Théâtre en japonais, viol / pop / onirique / trash. Pas pour moi, mais doit être assez surprenant.
→ 20h30, Philharmonie : Koechlin, Vers la Voûte étoilée (très jolie pièce, pas son chef-d'œuvre, mais on ne le joue jamais, c'est déjà bien…) et autres programmes stellaires d'Adès, Holst, Ives, R. Strauss. Orchestre de Paris, Pierre Bleuse (absolument formidable dans le récent album d'airs français de Julien Behr).
→ 21h, Théâtre de Saint-Louis-en-L'Île : mélodies de Kuula, O. Merikanto, Sibelius, Melartin, par Sophie Galitzine (une bonne voix) et Jean Dubé (oui, le Jean Dubé !). Programme déjà rodé au moins depuis le début d'année.

Vendredi 23
→ 19h, CRR de Paris : Orchestre d'harmonie de la Région Centre dans Roger Boutry (Concerto pour violoncelle et ensemble à vent), et arrangements : Lili Boulanger (D'un matin de printemps), Debussy (Fêtes des Nocturnes) et Bernstein (Suite de Candide). Gratuit.
→ 20h30 : Début de La Naissance de la tragédie de Kuvers.

Samedi 24
→ 15h, Cortot : quatuor à vent. Français, Villa-Lobos, Rossini, Beethoven, Poulenc, Jolivet
→ Tout l'après-midi, MAHJ  : Intégrale des Quatuors avec piano de Mendelssohn (œuvres de prime jeunesse, pas le plus grand Mendelssohn, mais déjà très belles et jamais données) avec le Trio Sōra, Mathieu Herzog, et culminant en fin de journée dans une transcription de la Première Symphonie avec le Quatuor Akilone (et un piano) !
→ 20h30, Saint-Joseph-Artisan : Automn de Delius, première audition française de ce mouvement de suite symphonique. Programme un peu moins aventureux que d'ordinaire (après un tout-Stanford !). Couplage avec le Second Concerto de Brahms. Excellent orchestre d'Éric van Lauwe. Libre participation.

Dimanche 25
→ 12h, Garnier : Quatuors de compositeurs d'opéra. Grétry n°3, Verdi, Meyerbeer Quintette avec clarinette.
→ 16h, Saint-Joseph-Artisan : Automn de Delius, première audition française de ce mouvement de suite symphonique. Programme un peu moins aventureux que d'ordinaire (après un tout-Stanford !). Couplage avec le Second Concerto de Brahms. Excellent orchestre d'Éric van Lauwe. Libre participation.
→ 16h, Chapelle royale de Versailles : Couperin, extraits de la Messe pour les Couvents par Desenclos, et motets par l'Ensemble Marguerite Louise.
→ 17h, Le Pecq : Garnier & Oneto-Bensaid (laquelle fut multi-putto d'incarnat et vient de sortir son premier disque, entièrement des transcriptions de sa main ! ♥) Dans Schubert, Duparc, Poulenc…

--

Lundi 26
→ Toute la journée, CNSM : masterclasses du Quatuor Modigliani. Gratuit.

Mardi 27
→ Uniquement des événements déjà cités.

Mercredi 28
→ 19h, CNSM : Concert (de chambre) de l'Association de musique Sainte-Cécile, sorte de remise de prix organisée par d'anciens du CNSM, une des plus anciennes associations culturelles de France. Je ne dispose pas du programme, mais en principe ce sont des gens plutôt bons –  et c'est dans ces murs que je vis régulièrement mes plus belles expériences de musique de chambre !
→ 20h30, Philharmonie : Salieri, Tarare. Un des plus hauts chefs-d'œuvre de l'histoire de l'opéra, l'un des plus grands succès de l'Opéra de Paris également. J'en avais présenté le livret et le contexte ici. Équipe de dingue menée par Dubois, Bou, Rousset… Donné également à Versailles la semaine précédente.
→ 20h30, Philharmonie : Intégrale des airs de cour de Couperin (très peu donnés, même pas sûr d'en avoir déjà entendu !) + divertissements, Sempé.

Jeudi 29
→ 19h, CNSM : orgue de Reger, Escaich, Bach.
→ 20h, Maison de la Radio : Martinů (Concerto pour violon n°1), Bernstein (Songfest, une grande cantate assez réussie), Barber (Adagio & ouverture pour The School for Scandal). ONF.
→ 20h30, Grand-Palais : Lotti, Giove in Argo, étudiants du CNSM, García-Alarcón. Gratuit sur réservation. On dispose de très peu de choses de ce compositeur vénitien (et essentiellement de la musique sacrée, très bien faite). On est à (1718) à l'époque du premier seria, mais on peut parier pour que ce soit plutôt du haut de gamme musical, avec peut-être une forme plus libre, que de la pure ostentation vocale. Mais c'est pur pari de ma part…

Vendredi 30
→ Fin de l'exposition des étonnantes gravures de Georges Focus à l'École des Beaux-Arts.
→ 20h, Maison de la Radio : Symphonie n°2 de Bernstein, OPRF, Vasily Petrenko. Je trouve personnellement cette symphonie particulièrement sinistre et insipide, mais elle est incontestablement rarement donnée.
→ 20h, Opéra Royal de Versailles : première des trois représentations d'Actéon de Charpentier et Pygmalion de Rameau, par l'Atelier Tafelmusik de Toronto. Mise en scène toujours adroite avec peu de moyens de Pynkoski.
→ 20h30, Philharmonie de Paris : Manfred de Tchaïkovski. Orchestre des Jeunes de Roumanie, Mandeal. Très peu joué en France et difficile à réussir, alors par de petits jeunes enthousiastes, c'est tentant !

Samedi 1er décembre
→ 17h30, Écouen, Le Procès de Monsieur Banquet (théâtre). Aménagement d'une pièce allégorique du XVIe siècle, interprété par un seul comédien.

Dimanche 2 décembre
→ 17h, Invalides : Jacques Alphone de Zeegant et Karoł Kurpinski, une Messe, et une Symphonie Chemin des Dames !



Mon agenda étant déjà totalement occupé, je n'ai pas vérifié les récitals d'orgue, mais si vous êtes intéressés, France Orgue fait une grande partie du travail pour vous !

Courage pour vivre votre (meilleure) vie au milieu de toutes ces tentations afférentes !

mardi 2 octobre 2018

Roy-Destouches : Séramiramis enfin reconnue


sémiramis destouches

Un rêve devient réalité : Sémiramis de Destouches est donnée à Ambronay vendredi prochain, dans une distribution éclatante (Judith van Wanroij, Emmanuelle de Negri, Mathias Vidal, João Fernandes, avec Les Ombres de Margaux Blanchard & Sylvain Sartre).

Le poème est une merveille de concision théâtrale (dans une langue classique splendide), la partition révèle une musique de première qualité dont l'élan dramatique se conjugue avec une beauté particulière des contrechants et des parties intermédiaires, typiques de détouches.

J'en avais enregistré l'air d'entrée de Sémiramis à titre d'illustration (version dessus et version haute-contre), un de ces airs-scènes-monde à la fois très brefs et typiques du genre de la tragédie en musique, où l'on s'attarde peu (avant les ariettes vaines de Rameau) sur les airs, au profit des récits dramatiques (et des danses galantes, certes). Cette puissance du résumé de toute une géopolitique en quelques couplets me fascine au plus haut point dans l'association Roy-Destouches. L'air en question figure même dans la liste des Boucles !, que je suis capable d'écouter de façon répétée – jusqu'ici interprété par moi-même, donc.

La notule présentait aussi l'œuvre et son contexte, la reliant au goût du temps (et à sa promotion simultanée de la tragédie radicale et du ballet dramatique galant).

Seule autre tragédie en musique de Destouches officiellement publiée au disque, et du même poète, le meilleur de son temps : Callirhoé, dont la version originale, assortie à nouveau de quelques goodies et easter eggs sonores à destination des fans, avait aussi été présentée en première mondiale dans ces pages.

Un site a été ouvert sur la production, et permet d'en entendre de très brefs extraits (appétissants !). Ce sera diffusé sur France Musique, donc si comme moi vous n'y pouvez courir, ressourcez-vous sur CSS et filez écouter la bande lorsqu'elle sera disponible !

samedi 28 avril 2018

Les soirées de mai dans (Paris)


Comme naguère, vous trouverez ici le planning PDF où apparaissent tous les dates et lieux sélectionnés, quantité de petits concerts (ou au contraire de concerts très en vue) dont je ne parle pas ci-dessous.

N'hésitez pas à réclamer plus ample information si les abréviations (tirées de mon planning personnel, destiné au maximum de compacité) ou les détails vous manquent.
(Les horaires indiqués le sont parfois par défaut par le logiciel, vérifiez toujours !)



0. Rétroviseur

Auparavant, les impressions d'avril, quantité de propositions originales que nous avons pu honorer de notre vénérable présence. Cliquez pour lire les impressions succinctes sur les œuvres et les interprètes.

►#87 Atelier lyrique de Vincent Vittoz : 8 saynètes de 10 minutes bâties autour d'un seul chanteur et de partenaires scéniques. Cilea, L. Aubert, Respighi, Messiaen, Berio, C.-M. Schoenberg, Sondheim…  (CNSM)
►#88 Ives, Symphonie n°4. Orchestre de Paris (Philharmonie)
►#89 Mini-récital de Kaëlig Boché (Aubert, Kosma, Barbara, C.-M Schoenberg) tiré des ateliers lyriques #87. (CNSM)
►#90 Mendelssohn, Elias sur crincrins et pouêt-pouêts. Direction démiurgique de Pablo Heras-Casado, voilà une jeune vedette qui n'a pas atteint les couvertures de magazines par simple fantaisie moutonnière de la presse spécialisée ! (Philharmonie)
►#91 Cantates profanes et airs de cours du premier XVIIe italien : Obizzi, Marini, G. Stefani, Rovetta, Legrenzi ! Par le grand duo formé par Zachary Wilder et Josep María Martí Duran. Le disque vient de paraître, et couvre beaucoup des aspects les plus passionnants du chant profane de cette période. (Théâtre Grévin)
►#92 Philippe d'Orléans, Penthée. Le roi jaloux du jeune Bacchus et dépecé par sa mère et sa fiancée, dans une musique très hardie (et « italienne ») due au futur régent (aidé de Gervais). Une notule plus détaillée et contextualisée est en préparation. (Galerie des Batailles)
►#93 Rott, Symphonie en mi par le Philharmonique de Radio-France et Constantin Trincks, étagements tout en sobriété et maîtrise de cette œuvre folle… Vous pouvez chercher dans les archives, déjà deux ou trois autres notules sur le sujet (progressivement de plus en plus enthousiastes), et quelques projets d'autres sur des détails inspirants ouïs pendant ce concert. (Maison de la Radio)
►#94 Berlioz, Benvenuto Cellini, co-mis en scène par Terry Gilliam. Comme presque toujours à Bastille hors œuvres très subtiantielles orchestralement (Wagner, Tchaïkovski, Strauss), assez tièdement déçu. Entre l'orchestre qui joue à l'économie et la distance physique et le voisin qui joue à faire claquer ses ongles et lâche un tonitruant « pardon !! » pendant la musique lorsqu'un geste discret le lui signale, difficile de se laisser totalement emporter. (Bastille)
►#95 Masterclass de Jean Mouillère, du Quatuor Via Nova. Pédagogie à l'ancienne, disons. (Salon d'honneur du Château de La Roche-Guyon.)
►#96 Lieder de Pfitzner, Wolf (Buonarroti), Wesendonck-Lieder, Im Abendrot, par Matthias Goerne & Seong-Jin Cho. (Palais Garnier)
►#97 Henri Rabaud, Mârouf, savetier du Caire, reprise de la mise en scène Deschamps, avec l'ONBA et Minkowski. En écoutant davantage cette fois l'orchestre, que de splendeurs révélées !  Une grande œuvre, en réalité. Favart)
►#98 Zemlinsky, Maiblumen blühten überall. (Et la Symphonie Lyrique. Et la Nuit Transfigurée.) Impressions complémentaires ici et .  (Philharmonie)
►#99 Wagner, Parsifal, avec extrait sonore (Bastille)

Et quelques déambulations illustrées :
Ambleville : château, église, bourg.
La Roche-Guyon et Haute-Isle (en cours de narration) : forteresse des Rohan, boves et donjon taillés dans la craie, chapelles troglodytiques, 7 monuments classés et une longue promenade grimpant à flanc de coteau en surplomb des îles de l'Yonne.



00. Manqué !

En raison de l'expiration de mon Pass UbiQui'T, je n'ai pu tout voir, tout entendre. Voici, à titre purement indicatif, quelques autres soirées qui ont attiré mon attention, à titre de curiosité.

Eine Ballettsuite de Reger par l'ensemble orchestral d'Éric van Lauwe (à Saint-Joseph-artisan). Œuvre totalement inattendue pour du ballet, pour du Reger, pour de la musique allemande.
Contes et légendes estoniens chantés par Baquet et accompagnés par Grandet. Vous pourrez vous consoler avec un concert du genre (re)donné au Théâtre de l'Île-Saint-Louis à l'automne prochain.
Symphonies de Brahms par Brême et Paavo Järvi.
Masterclass de Gary Hoffmann (CNSM).



À présent, la prospective.

J'attire en particulier votre attention sur quelques perles. Classées par ordre de composition approximatif à l'intérieur de chaque catégorie.

(En rouge, les œuvres rarement données – et intéressantes !)
(En bleu, les interprètes à qui je ferais confiance, indépendamment du seul programme.)



A. Opéras & cantates

LULLY, Phaëton. Il est assez rare qu'on donne des opéras de LULLY en version scénique, sorti d'Armide. Et ici dans la plus belle distribution qu'on puisse souhaiter : Mathias Vidal, Eva Zaïcik, Cyril Auvity, Léa Trommenschlager !  La fine fleur du chant baroque français (je n'aurais pas mieux choisi moi-même, si vous mesurez le compliment). Version sans doute chatoyante de Vincent Dumestre avec le Poème Harmonique… et le Chœur de l'Opéra de Perm ! (musicAeterna, le terrain de jeu du méga-mégalo Currentzis)
Donné sur trois ou quatre dates, de surcroît. Seule réserve : comme c'est Lazar, il faudra sans doute souffrir le français restitué selon Green (rien d'idéologie : je le goûte au théâtre, mais il voile inutilement l'élocution à l'Opéra).

Galiard, Telemachus, une coproduction L'Oiseleur-Robidoux au Temple du Luxembourg. Pièce du début du XVIIIe anglais d'après Fénelon. Je n'ai aucune notion de ce à quoi ce peut ressembler, en toute franchise. On se situe dans l'époque assez mal documentée post-Purcell (et bien avant les faits de gloire de Thomas Arne). Sans doute plus de la déclamation pure ornée d'ariettes ; sans doute pas encore du seria haendelien…
Leurs résurrections étant en général, à l'un comme à l'autre, étonnantes et convaincantes, j'y vais en toute confiance.

Debussy, Pelléas et Mélisande dans une distribution de feu : Devieilhe, Andrieux, Buet !  Certes accompagnés par le modeste Orchestre Pelléas (qui ne m'avait pas fait forte impression, dans un tout autre répertoire). Le 2 au TCE.

Extraits d'opérettes au CRR. Le 24 à 19h, gratuit.



B. Musique chorale


Chants patriotiques de Grétry, Méhul, Dalayrac, Catel, Berlioz… et Vierne. Par le chœur Les Voix impériales (?) et l'Académie Symphonique de Paris (des amateurs de niveau honorable, je crois, mais pas vérifié). Ce ne sera pas de la grande musique, mais ce devrait être plutôt roboratif !  Le 24 aux Invalides (cathédrale).

Musiques a cappella de Grieg, Stenhammar et Sandström par Le Jeune Chœur de Paris et des élèves du CRR de Paris. Direction Willberforce et Korovitch. Le 19 au CRR.

Motets de Duruflé, Djinns de Fauré, Psaume 129 de Lili Boulanger par le Chœur de l'Orchestre de la Sorbonne, le 18.

♦ Chœurs a cappella de Mikalojus Čiurlionis, Jāzeps Vītols, Janis Zalitis, Mart Saar, Cyrillus Kreek, par le Chœur Philharmonique de Chambre d'Estonie, dirigé par Kaspars Putniņš. Le 22 au Musée d'Orsay (12h30).



C. Musique symphonique

♦ Symphonies n°2 de Beethoven et n°6 de Schubert par la classe de diction « A et B » pour « débutants » (CNSM). Parfois avec les Lauréats du CNSM, parfois non. Toujours très beau. Le 25, gratuit.

♦ Les 22 et 24, entre la Cité de la Musique et le TCE, il sera possible d'entendre les deux Sérénades de Brahms.

Elgar, Symphonie n°1 sans vibrato par Norrington. Ça va être rigolo.
(ça fonctionnait du tonnerre dans les Tallis de Vaughan Williams, alors pourquoi pas ici ?)
Joué avec assez de relief, c'est une œuvre tout à fait sympathique. Et très peu donnée en France.

Toward the Sea II de Takemitsu, la version pour flûte, flûte alto et orchestre (originellement pour flûte et guitare, refait en IIIe pour flûte et harpe). Couplage avec Die Seejungfrau de Zemlinsky. Le Philhar' de Radio-France et Vasily Petrenko devraient être parfaits là-dedans, l'expansivité décadente est leur gros point fort. Philharmonie le 4.

Les Bandar-Log de Koechlin et la Symphonie n°2 de Honegger. Le premier est très original, mais n'étant fanatique d'aucun des deux, je ne suis pas bon juge pour conseiller ou pas de s'y rendre. En tout cas dirigé par David Zinman (qui fouette bien l'Orchestre de Paris, et qui a déjà dirigé ce Koechlin, ainsi que tout le Livre de la Jungle, d'ailleurs).

Ferroud, Foules. Petite pièce orchestrale originale (comme toujours avec Ferroud). À la Maison de la Radio, couplage très traditionnel comme Krivine les aime : Cinquième de Tchaïkovski et Troisième (Concerto) de Prokofiev. Le 31 à la Maison de la Radio.

Chostakovitch, Symphonie n°11. Strauss, Métamorphoses. Par les étudiants du CRR (et des élèves de niveau supérieur du PSPBB). Difficile de pronostiquer la qualité du résultat, cela dépend grandement des élèves présents (vu un Lalo-Chabrier-d'Indy où les violonistes étaient des collégiens, donc forcément pas la même maturité…), du nombre de répétition… En général, le niveau au CRR reste correct mais pas renversant, pas du niveau professionnel de ce qu'on entend au CNSM. Néanmoins, programme souvent étonnants (concertos pour violoncelle de Lalo ou John Williams, Symphonie italienne de d'Indy…), le programme n'est actualisé que mois par mois sur le site mais il mérite d'être vérifié – leurs productions d'opéra baroque sont, elles, de niveau pro (les classes de musique ancienne font office de CNSM pour HIP).

Classe de direction d'orchestre d'Alain Altinoglu. Je n'ai pas encore le programme, mais c'est toujours remarquable (avec le fabuleux Orchestre des Lauréats du CNSM). Le 17, gratuit.



D. Musique solo et chambriste

Couperin à l'Hôtel de Soubise par les étudiants du Conservatoire du VIIe, le 30 à 12h30.

Variations Goldberg pour quatuor à cordes, par l'excellent Quatuor Ardeo, résident du Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines. Le 29.

♦ Plusieurs concerts alléchants Hôtel de Lauzun sous l'égide de Julien Chauvin, mais je ne suis pas trop sûr des conditions d'accès (voire d'accession, si soumis à l'inclusion dans la Société savante qui y loge). Notamment les Quatuors de Gounod du Quatuor Cambini qui sortent ces jours-ci au disque. Les dates sont dans l'agenda, avec le peu de détail que j'ai pu glaner.

Musique pour piano descriptive Empire (très) rare :
Oginski, Deux polonaises ;
Gurilev, Deux chants russes ;
HarteveldGrande affliction – Partant pour la Syrie ;
JadinLa Grande Bataille d’Austerlitz ;
SteibeltL’incendie de Moscou ;
◊ du Beethoven (variations sur Paisiello, Trois Grandes Marches, Sonate Les Adieux).
Par Nikolay Khozyainov, aux Grand Salon des Invalides, le 25.

Quintette pour clarinette et cordes de Baermann (le n°2 ?), un des nombreux représentants du « style Mozart » dans cet effectif, et très réussi. Couplé avec extrait du Quintette de Françaix. À Tremblay le 5 (je crois que c'est gratuit).

Ballades pour piano de Brahms. Pas son sommet pianistique, mais elles sont assez peu données en concert, j'ai l'impression. Couplées avec la Sonate n°3, par Goeffroy Couteau, à l'Amphithéâtre de la Cité de la Musique, le 26 (15h).

Fantaisie pour quatre altos de Bowen (grand symphoniste postromantique, mais jamais écouté ceci). Couplage avec du Turina et l'Octuor de Mendelssohn, musiciens de l'Orchestre de Chambre de Paris, salle Cortot le 26 à 15h.

Flûte, alto et harpe chez Takemitsu, Debussy, Ravel, Beffa. Hôtel de Soubise, le 26.

Piano balte par Mūza Rubackytė : Čiurlionis (Préludes & Nocturnes), Vītols (Préludes), Eller (Les Cloches), et Scriabine (Valse, 4 Études).

Transcriptions pour marimba. Adelaïde Ferrière, la virtuose en vue du moment, au Petit-Palais, le 24 à 12h30.



E. Lieder, mélodies & airs de cour

Saint-Saëns, Nuits persanes. Version orchestrale (avec des interludes et des mélodrames, ici arrangés pour piano) des Mélodies persanes, récemment (merveilleusement) gravées par le couple Christoyannis-Cohen (chez Aparté). Sahy Ratianarinaivo, qui a remarquablement mûri ces dernières années, les donne depuis un moment, par morceaux (aux Invalides) ou en entier (dans la classe de Jeff Cohen, précisément…). Accompagné par une spécialiste très spirituelle, Qiaochu Li, dans ce qui est possiblement le plus bel ensemble de mélodies de Saint-Saëns. Le 31 au Petit-Palais (12h30).

Chostakovitch, cycle Blok. Brahms, lieder pour soprano, (violon) alto et piano. Avec Prudenskaya, le 3 au TCE.

Classe de duos de lied & mélodie de Jeff Cohen. J'aurai les programmes assez tard, je les communiquerai lorsque (si) je les obtiens à temps. Le nombre d'étudiants a décru ces dernières années (avant, deux dates bien pleines), mais l'expérience d'un programme complet de lieder jonglant avec les langues reste toujours très singulière, d'autant qu'on y croise de très belles individualités très prometteuses (découverte en ces lieux de Raquel Camarinha ou Elsa Dreisig, pour ma part).



F. Pour le plaisir de retrouver quelques chouchous

♦ Tournée du Requiem de Verdi en Île-de-France à partir du 20, par l'ONDIF et le Chœur de l'Orchestre de Paris, association de rêve.

♦ Pas particulièrement un chouchou, mais rare, le Philharmonique d'Helsinki vient (sous la direction de la raidissime Mälkki, hélas – même dans le contemporain, elle est tellement sèche et désarticulée…) à la Seine Musicale (où les orchestres symphoniques sonnent très agressivement, hélas aussi). Dans Mahler 9, c'est quand même intriguant de les entendre en vrai, ce n'est pas tous les jours qu'on en a l'occasion.



G. Cours publics et masterclasses

David Higgs, organiste maître de la transcription (testez sa Mahler n°5, saisissante de vérité !), donne une masterclass au CNSM le 17, tôt dans la soirée. Gratuit.
♦ Les 24,25,26, journées du pianoforte au CRR de Paris. Gratuit.



C'est le temps des plaisirs et des tendres amours.

vendredi 22 septembre 2017

Opéras 2017-2018 : raretés et beaux plateaux en Province


Comme chaque année, quantité de bijoux vont circuler à travers le territoire hexagonal (et étranger proche). En particulier à Bordeaux, Lyon, Tours ou Toulouse, mais pas seulement.

Cette année le centre du monde lyrique se trouve incontestablement à Bordeaux, dont toutes les productions suscitent le plus vif intérêt. J'y débute donc mon tour de France. Contrairement aux précédentes éditions, je me suis dit que le lieu était peut-être plus déterminant que les styles : on voyage plus volontiers dans une ville pas trop distante, quitte à étendre ses choix. Et cela procure aussi une visibilité sur les dominantes des différentes maisons. [Retours appréciés sur la question, si vous vous en servez / avez une opinion.]



N.B. : La cote en putti d'incarnat suit la cote « spectacle vivant » et non celle habituelle des disques.

Cote d'intérêt d'œuvre, si elle est rare, pour vous aider à vous déterminer (je ne vais pas me risquer à me prononcer sur les intérêts relatifs de la Flûte vs. Traviata vs. Lohengrin…).
un putto d'incarnat : dispensable
un putto d'incarnatun putto d'incarnat : intéressant (avec des réserves)
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : stimulant
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : grisant
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : depuis tout ce temps qu'on l'attendait !

Cote d'attente d'interprétation. Par essence, contrairement aux œuvres qui existent déjà, elle n'est qu'une projection de probabilités (subjectives de surcroît…).
un putto d'incarnat : ouille
un putto d'incarnatun putto d'incarnat : inégalement attirant
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : très appétissant
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : exceptionnel
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat : potentiellement une référence à venir




En Province


Bordeaux :
Bellini – Il Pirata un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Ce n'est pas l'œuvre du siècle, assez loin des grands aboutissements de Bellini (même de La Straniera et des Capuletti, voire de la Sonnambula), du belcanto assez pâle à mon gré (sans les petites finesses harmonies ou les joliesses d'orchestration dont il est coutumier par ailleurs). Mais c'est rare. De la distribution, je ne connais que René Barbera (excellent ténor spécialiste), et Adèle Charvet dans le petit rôle d'Adele. Si le reste est du même niveau, ce sera très beau.
Offenbach – La vie parisienne un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Pas l'œuvre majeure du répertoire, mais dirigé par Minkowski avec Gillet, M.-A. Henry, Extrémo, de Hys, Fouchécourt, Barrard, H. Deschamps. Uniquement des chouchous, et uniquement de grands interprètes.
Debussy – Pelléas et Mélisande un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Minkowski, Skerath, Brunet, Barbeyrac, Duhamel et Varnier !  Quelle distribution éclatante, complètement francophone de surcroît – et de quelle façon !  Petite curiosité, la mise en scène est assurée par Philippe Béziat, qui avait tourné le documentaire autour de la création russe de Pelléas en juin 2007 – par Minkowski et Py.
R. Strauss – Elektra un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Brimberg, M.-A. Henry, Palmer, Alvaro, Mortagne, Delunsch (dans les élans de la Cinquième Servante !), et dans les rôles minuscules Morel, Pasturaud, Legay, Tachdjian, Tréguier !  Même au disque et en studio, j'ai peu vu de distributions aussi exaltantes : le duo épique des sœurs, la Cinquième Servante, l'ultra-luxe de chaque petit rôle…
Henri Rabaud – Mârouf, savetier du Caire. un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Un opéra rare foisonnant, très riche et fantaisiste, qu'on peut conseiller à tous : beaucoup de matière musicale, beaucoup d'action, mise en scène traditionnelle (mais animée) très chatoyante pour les novices, et distribution de feu : Bou, Santoni, Teitgen, et puis dans la constellation de petits rôles importants Legay, Contaldo, Leguérinel, Peintre, Tachdjian, Yu Shao – toutes personnes dont l'éloge a déjà été fait dans ces pages.
Boesmans – Pinocchio un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
La nouvelle production Boesmans-Pommerat, après le succès remarquable d'Au Monde (sorte de langage de Pelléas atonal placé dans l'univers théâtral désabusé d'aujourd'hui), prend à nouveau une distribution remarquable (Briot, Lhote, Auvity, Le Saux…), et va tourner en France. Intriguant et très attirant. La cotation n'exprime que l'attente, puisque personne ne l'a encore entendu !
Annoncé pour 2018 en Île-de-France (Athénée à l'automne ?).

◊ Seule production peu attirante, la Lucia de Donizetti avec Behr et Sempey, qui va agréger à peu près tout ce que je n'aime pas en chant – mais ce ne sera pas vilain non plus, loin s'en faut. Et il y aurai Thomas Bettinger (Arturo) et François Lis (Raimondo).


Toulouse :
d'Albert – Tiefland un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Certes avec Schukoff, Brück et Flor, donc pas la fête de la glotte facile ni des baguettes élancées, mais tout de même, ce petit bijou de romantisme décadent – plaqué sur un livret réaliste, sorte de Wally allemande, à ceci près que la musique en est remarquable…
Puccini – La Rondine un putto d'incarnatun putto d'incarnat
De la conversation en musique dans le genre lyrique italien. Je ne suis pas un inconditionnel (ça sirupise beaucoup), dans le genre Wolf-Ferrari a beaucoup mieux réussi la juste mesure, à mon sens. Mais c'est peu donné.


Limoges :

Piazzolla – María de Buenos Aires
Je suppose que ce dépendra beaucoup du parti pris lyrique ou non. (Je me rends compte que je ne l'ai jamais écouté, alors que ça pique ma curiosité depuis lontemps !)
Bizet – Les Pêcheurs de perles un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Guilmette, Dran et Duhamel. Là encore, du très bon francophone !  (Duhamel y était tout bonnement miraculeux il y a un peu plus d'un lustre. La voix a changé vers plus de noirceur, moins de clarté, d'impact et d'aisance en haut, il faut voir. Mais ce sera très beau de toute façon.)


Rennes :
Gounod – Le Médecin malgré lui un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Rare, et agréable.
Zemlinsky – Der Zwerg un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Un opéra court assez régulièrement donné en France (et la Tragédie florentine doit être dans le top 5 ou 10 des opéras du XXe montés en France…). L'intérêt réside particulièrement dans la prise de rôle de Mathias Vidal, le chanteur le plus éloquent en activité – jamais entendu en allemand pour ma part, en italien il est quasiment aussi excellent qu'en français. La voix a gagné en largeur, et il a démontré qu'il pouvait tenir, malgré sa nature de départ, de véritables rôles lyriques. Ici, on est à la frontière du très grand lyrique, voire du dramatique (surtout à l'échelle italienne !), mais l'orchestre ne concurrence pas trop, je suis très curieux d'entendre le résultat.


Angers-Nantes :

1 opéra-comique d'Hervé : Mam'zelle Nitouche
1 opérette de Messager : Les P'tites Michu
Haendel – Rinaldo un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Dirigé par B. Cuiller, avec Negri, Dolié et surtout Benos – le seul contre-ténor en activité, avec Bejun Mehta dans un genre plus héroïque, qui me paraisse vraiment doté d'un impact physique et d'une capacité de diction. Je n'aime pas faire de généralités abusives, mais vraiment, tous les autres altos masculins que j'ai entendus en salle, même ceux qui sonnent bien en retransmission et au disque (Fagioli, Čenčić…) n'ont aucun impact sonore, même de près, et s'expriment dans une certaine bouillie verbale. C'est très bien dans le répertoire sacré (en particulier dans les chœurs et les ensembles), mais pour tenir des solos dans des situations dramatiques, ça ne fonctionne vraiment pas bien. Sauf Benos, passionnant jusque dans le lied.
[Tournée à Quimper, Besançon, Saint-Louis, Compiègne, Dunkerque, Charleroi, Mâchon, La Rochelle.]
Berlioz – La Damnation de Faust un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Hunold, Spyres, Alvaro. Ça vient de se terminer et c'était semble-t-il hautement satisfaisant.


Tours :
Gounod – Philémon et Baucis un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Pas le Gounod le plus saillant (un peu uniformément doux…), mais rarissime, à l'occasion de l'anniversaire.
Tchaïkovski – Iolanta un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Le dernier opéra de Tchaïkovski semble s'imposer durablement sur les scènes européennes. Pas du niveau constant de ses deux précédents, toujours au répertoire (Onéguine et Dame de Pique, sommets assez absolus du genre opéra), mais un joli conte aux couleurs plus françaises, moins prodigue en épanchements lyriques. J'aimerais bien qu'on nous donne aussi les premiers, qu'on ne joue jamais (L'Enchanteresse en particulier, mais je ne dirais pas non à Vakoula ou au Voïévode !).
Rimski-Korsakov – Mozart et Salieri un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Mise en musique littérale de portions des saynètes de Pouchkine, sous une forme très récitative. Pas évident pour les non-russophones, et pas très chatoyant en tout état de cause, mais change de ce qu'on joue majoritairement.
Britten – A Midsummer Night's Dream un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Non sans longueurs, mais non sans charmes (les chœurs, les répliques de Puck !).


Caen :
Hervé – Les Chevaliers de la Table Ronde un putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Vraiment pas grand intérêt musical ni scénique, sans être sublimé par l'interprétation pour ce dont j'ai pu juger par la retransmission (en tournée depuis deux ans).
Marais – Alcione un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Production de l'Opéra-Comique (Savall / L. Moaty).
Poulenc – Dialogues des Carmélites un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Production du théâtre des Champs-Élysées dans la belle mise en scène de Py, avec sa distribution affolante : Petibon-von Otter-Gens-Devieilhe-Koch-Barbeyrac-Cavallier (et Piolino, Hys et Lécroart dans les petits rôles !).


Rouen :
Cherubini – Médée un putto d'incarnatun putto d'incarnat
En version française, avec Hervé Niquet.


Lille :
Mozart – Così fan tutte un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Par Haïm et Honoré. Avec Azzaretti, Arduini et Rivenq qui seront excellents. Autres interprètes inconnus de moi (Mantashyan, Verrez, Giustiniani).
Offenbach – Le Roi Carotte un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Reprise de la production Pelly : Schnitzler, Mortagne, Beuron, H. Mas, Gay, Grappe, Briot…
Zemlinsky – Der Zwerg un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Un opéra court assez régulièrement donné en France (et la Tragédie florentine doit être dans le top 5 ou 10 des opéras du XXe montés en France…). L'intérêt réside particulièrement dans la prise de rôle de Mathias Vidal, le chanteur le plus éloquent en activité – jamais entendu en allemand pour ma part, en italien il est quasiment aussi excellent qu'en français. La voix a gagné en largeur, et il a démontré qu'il pouvait tenir, malgré sa nature de départ, de véritables rôles lyriques. Ici, on est à la frontière du très grand lyrique, voire du dramatique (surtout à l'échelle italienne !), mais l'orchestre ne concurrence pas trop, je suis très curieux d'entendre le résultat.

Tourcoing :
Debussy – Pelléas et Mélisande un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Très appétissante version : à la perspective intriguante d'écouter Malgoire diriger ce répertoire, s'ajoute une distribution où figurent uniquement (hors Andrieux, et Devieilhe et ses soirs) des diseurs baroqueux !  Devieilhe en alternance avec Reinhold (pas du tout les mêmes caractéristiques, ce serait étonnant de comparer !), Andrieux, et puis Buet, Haller, Delaigue, Faraon, Buffière !

Reims :
Grétry – Richard Cœur de Lion un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Emblématique sans être majeur, on ne peut néanmoins considérer avoir vécu sans entendre « Ô Richard, ô mon roi » et bien sûr l'ariette de Laurette chantée de façon complètement désarticulée par la vieille Comtesse dans la Dame de Pique de Tchaïkovski.
Bizet – Les Pêcheurs de perles un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Guilmette, Dran et Duhamel. Là encore, du très bon francophone !  (Duhamel y était tout bonnement miraculeux il y a un peu plus d'un lustre. La voix a changé vers plus de noirceur, moins de clarté, d'impact et d'aisance en haut, il faut voir. Mais ce sera très beau de toute façon.)


Metz :
Saint-Saëns – Samson et Dalila un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Kamenica, Furlan, Duhamel, Bolleire !  Sans doute pas très intelligible chez Kamenica (mais quel fruité !), et francophones remarquables et vaillants pour les autres.
☼ (On annonce Sigurd de Reyer en début de saison prochaine !)


Nancy :
Massenet – Werther un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Montvidas et d'Oustrac. Probablement pas totalement idoine, mais très intriguant assurément, et sans doute original et… différent !


Strasbourg :

■ Saison étrange, très peu de titres grand public, beaucoup d'arrangements et de contemporain.
Zandonai – Francesca da Rimini un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
L'œuvre, langage italien de la mouvance pucciniste, est mâtinée d'aspects plus richardstraussiens, un beau mélange sonore, même si le livret est particulièrement immobile – une action par acte, dans un rythme dramatique qui n'excède pas de beaucoup Lohengrin (Parsifal, à côté, c'est The Naked Gun III). Après une assez longue éclipse dans tout le milieu du XXe siècle, elle semble être programmée à intervalles assez régulier en Europe ces dernières années (à un échelon moindre, un peu comme Hamlet de Thomas, Die tote Stadt de Korngold ou les Janáček).
Manoury – Kein Licht un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Manoury fait partie des rares compositeurs atonals en activité à être capable d'écrire réellement bien pour le drame et la voix. Très curieux de voir ça très bientôt à l'Opéra-Comique à Paris.


Dijon :
Mondonville – L'Amour et Psyché un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Un ballet en un acte qui n'a jamais été enregistré – style galant post-ramiste. En couplage avec le merveilleux Pygmalion Avec Bennani de Rameau., Léger, Sicard (et Mechelen Jr. dans Pygmalion), le Concert d'Astrée.

Verdi – Simone Boccanegra
Pas souvent donné en Province, j'ai l'impression.
Boesmans – Pinocchio un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
La nouvelle production Boesmans-Pommerat, après le succès remarquable d'Au Monde (sorte de langage de Pelléas atonal placé dans l'univers théâtral désabusé d'aujourd'hui), prend à nouveau une distribution remarquable, différente de Bordeaux (Briot, Degout, Beuyron, Boulianne, Munger…), et va tourner en France. Intriguant et très attirant. La cotation n'exprime que l'attente, puisque personne ne l'a encore entendu !
Annoncé pour 2018 en Île-de-France (Athénée à l'automne ?).

Saint-Étienne :


■ Depuis l'expulsion de Campellone, qui vient désormais plus régulièrement à Paris pour combattre la pénurie de concerts (…), pour notre plus grand plaisir… Saint-Étienne n'est plus, hélas, le même centre d'exploration du répertoire massenetien et du XIXe français tardif.
Cilea – Adriana Lecouvreur un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Là aussi, peu donnée en France. Pour ma part, j'adore les parties comiques (début du I et du III), c'est-à-dire à peu près toutes les scènes de Michonnet, dans une veine archaïsante qui n'empêche pas la virtuosité ; beaucoup moins toute la partie sérieuse, où les gros motifs sont rabâchés à coups de doublure voix-orchestre, vraiment pas du grand raffinement. Et puis cette fin supposément pathétique (et tellement peu XVIIIe, malgré le sujet « réaliste ») qui vient conclure un vaudeville que je trouve plutôt fendard…


Lyon :

■ Pour la première fois depuis bien des années, Lyon n'est pas l'Opéra doté de la plus belle programmation de France – je mets de côté l'Opéra-Comique qui, en abandonnant le grand répertoire à Garnier, Bastille et Champs-Élysées, peut se spécialiser dans les répertoires qui me plaisent. Néanmoins, si Bordeaux fait carton plein, Lyon représente cette saison encore un très solide dauphin !
Mozart – Don Giovanni un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Montanari, le très charismatique Sly (le rôle doit lui aller comme un gant), l'inaltérable Buratto, l'expressif Ketelsen – certes, il y a Julien Behr et ses limites, mais ce n'est pas non plus de quoi sortir fâché. Très prometteur.
Rossini – La Cenerentola un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Mise en scène de Herheim en coproduction avec Oslo, direction musicale du spécialiste Montanari (et Cyrille Dubois en Prince), de quoi rehausser la seule reprogrammation d'un classique.
Verdi – Attila un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Des longueurs assez peu exaltantes (les duos des amoureux, peu tourtereaux au demeurant), mais aussi des moments impressionnants comme les affrontements entre Attila et l'Ambassadeur de Rome, ou ses songes terrifiants. Avec T. Serjan, Markov, Ulyanov. Et visite à Paris ensuite.
Verdi – Don Carlos un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Version française de ce standard. Production d'Honoré, et belle distribution : S. Matthews, Romanovsky, Degout, Pertusi, Scandiuzzi, Bolleire.
Rimski-Korsakov – Mozart et Salieri un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Mise en musique littérale de portions des saynètes de Pouchkine, sous une forme très récitative. Pas évident pour les non-russophones, et pas très chatoyant en tout état de cause, mais change de ce qu'on joue majoritairement.
Zemlinsky – Der Kreiderkreis un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Un des grands Zemlinsky les moins joués, servi par une brochette de spécialistes : L. Koenigs à la direction, Beller Carbone, G. Fassbender, (Lauri) Vasar et le miraculeux Rügamer. Mise en scène d'un excellent directeur d'acteurs chantants, Richard Brunel.
Respighi – La Belle au bois dormant un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Une charmante miniature ni hardie, ni totalement archaïsante. Très séduisant.

☼ Comme si cela ne suffisait pas, sept (!) soirées avec le War Requiem de Britten « mis en scène », avec rien de moins que Chtcherbatchenko, Groves et L. Vasar !

Avignon :

♦ Deux titres légers (Des Land des Lächelns de Lehár et Les Mousquetaires au couvent de Varney).

Montpellier :
Verdi – Nabucco un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Pas si souvent donné en France, et avec Jennifer Check en Abigaille – il y a quinze ans, elle chantait formidablement Rusalka… Ça fait a priori plutôt très envie, si la voix a évolué harmonieusement (j'ai pourtant tâché de la suivre, mais les bandes américaines circulent moins bien, et je ne crois pas qu'elle ait fait une carrière gigantesque).
Grieg – Peer Gynt un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Philipe Estèphee, Norma Nahoun et Marie Kalinine, direction Schønwandt.
Bizet – Carmen un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Je ne connais pas Robert Watson en José, mais Anaïk Morel et Alexandre Duhamel, je n'aurais pas choisi mieux si on m'avait demandé mon avis (et Piolino en Remendado !).


Marseille :

Neuf titres du répertoire léger : 1 J. Strauß II, 2 Offenbach, 1 Messager, 1 O. Straus, 1 Yvain, 1 F. Loewe, 2 Lopez !
Rossini – Tancredi un putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Il faut aimer le seria romantique, avec ses livrets remarquablement immobiles en compensation de son agilité glottique spectaculaire, mais il sera servi par les meilleurs spécialistes : Carella, Barcellona, A. Massis, Bolleire…
Donizetti – La Favorite un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Une des plus belles réussites de Donizetti, dont la veine mélodique semble mieux s'épanouir loin des contraintes de l'agilité démonstratives, et dont le sens dramatique, sis sur un bon livret mobile, surprend. Distribution contrastée : Courjal devrait être un pontife fulgurant, mais il faudra supporter en regard l'engorgement et la diction de Margaine, et l'élégance discutable de Fanale (que j'anticipe mal, peut-être à tort, dans les souplesses et demi-teintes du répertoire français).
Verdi – Ernani un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Un livret certes privé du sel de son modèle (la censure tudesque n'a pas voulu du Roi dans l'armoire !), et une langue musicale encore très belcantiste, mais aussi de très belles choses – l'air d'entrée d'Ernani, le duo et l'ensemble de la chambre… Avec Hui He, Meli, Tézier, Vinogradov, dirigés par Foster.
Massenet – Hérodiade un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Pas le Massenet le plus subtil, enfilade d'airs à forte couleur locale (supposément antique, donc), et donc assez dépendant des qualités individuelles. Il y aura Nicolas Courjal pour le monologue des Astres, et Lapointe pour « Vision fugitive » ; pour le reste, Mula, Uria-Monzon et Laconi, sans être du tout indignes, ne promettent pas une exécutionde la première grâce (disons).
(David) Alagna – Le dernier jour d'un condamné un putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Pas le grand opéra de son temps, avec une musique oscillant entre les innovations du début du XXe (Debussy, R. Strauss) et une laque de sirop post-puccinien par-dessus, un livret qui ne brille pas par ses nuances ni par la sobriété d'un verbe hautement littéraire… Néanmoins, tout cela est assez agréable, et servi, outre Alagna, par des artistes francophones de grande qualité (Dudziak, Ghazarossina, Ermelier, Martin-Bonnet…) et dirigé par Ossonce.




Dans les Provinces


Liège :
Bellini – Norma un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Silvia Dalla Benetta (capiteuse et ardente), Kunde, J-.M. Lo Monaco et dirigé par le très détaillé, net et animé Zanetti (sa Luisa Miller dans les mêmes lieux était un modèle).

Bruxelles :

♦ Dallapiccola – Il prigioniero un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Avec Blancas-Gulín, Graham-Hall et Nigl.
[Couplé avec Das Gehege de Rihm, monodrame.]
♦ Poulenc – Dialogues des Carmélites un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Mise en scène de Py, avec des variations de distribution réjouissantes dans la distribution B : Altinoglu, et Gillet en Blanche avec M.-A. Henry en Lidoine, Deshayes en Mère Marie, et bien sûr Saelens en Premier Commissaire. Toujours Barbeyrac et Cavallier ; Brunet en Croissy.

Anvers :
♦ Donizetti – Le Duc d'Albe un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Un Donizetti français assez pâle, où on retrouve l'absence de veine mélodique qui caractérise un grand nombre de ses titres italiens – on retrouve bien le compositeur de Bolena, Stuarda, Devereux, Borgia, Pasquale, plus que celui de La Favorite, L'Elisir ou Lucia.
♦ Korngold – Der Wunder der Heliane
un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Musique comme livret, si le vocable décadent a un sens… il s'incarne ici. Assez peu donné, surtout à portée de français…
♦ Prokofiev – Le Joueur un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Quasiment pas d'opéra russe en France cette année, hors Onéguine (voire Iolanta), et encore moins des titres rares. Dirigé par Dmitri Jurowski.


Lausanne :
Menotti – Amahl et les visiteurs du soir un putto d'incarnatun putto d'incarnat
Conte de Noël. Pas vertigineux, mais c'est assurément rare.


Monaco :


■ Toujours des distributions très prestigieuses et au cordeau, avec en particulier :
Verdi – I Masnadieri un putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Pas le meilleur Verdi, mais de beaux ensembles. Et une distribution de gens très concernés et adroits : Giannattasio, Vargas, N. Alaimo.
Gounod – Faust un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Campellone, Calleja, Rebeka, Lhote.
Offenbach – Les Contes d'Hoffmann un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Lacombe, Peretyatko (quatre héroïnes), Flórez, Courjal, R. Briand (4 valets) !  Ce serait bien qu'il soit retransmis, celui-là : ce sera très différent de l'ordinaire (Flórez moins dramatique, Courjal plus basse, Brian sans nul doute épatant, Lacombe toujours parfait dans ces répertoires…). Et avec toutes ces vedettes (même Burshuladze en Crespel !), une excuse toute trouvée à la diffusion.
Britten – Peter Grimes un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec José Cura.


Barcelona :
Donizetti – Poliuto un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Avec Callegari, Radvanovsky, Kunde, Salsi.
Wagner – Tristan und Isolde un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Mise en scène Ollé, avec Theorin et Vinke !
Rubinstein – Le Démon un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Très bel opéra pas si russe (largement teinté de Marschner) dans une production (probablement hardie) importé du Helikon de Moscou. Particulièrement rare sous nos contrées, un livret très prenant et de la belle musique.


Bilbao :

♦ Bellini – Norma un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat
Avec Axentii reconvertie en soprano, et dans l'autre distribution Tro Santafé et Kunde.
Verdi – I Masnadieri un putto d'incarnatun putto d'incarnat / (un putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnatun putto d'incarnat)
Avec Giannattasio, Stoyanov, Kares.
Britten – War Requiem
Avec le meilleur diseur (allemand) actuel, Thomas E. Bauer.



Je consacrerai une notule complète à l'intention des grands voyageurs, autour des opéras vraiment rares, eux, à voir en Europe.

mercredi 30 août 2017

Saison 2016-2017 : bilan de l'année concertante & grande remise des Putti d'incarnat


Voici juillet, le moment d'un retour sur une saison musicale bien remplie.
139 spectacles dans 69 lieux (dont 31 nouveaux) – 134 si je ne compte pas, ainsi que c'était l'usage, l'été.

Ce sera aussi l'occasion de la grande remise annuelle de la récompense suprême pour tout artiste informé, le putto d'incarnat – qui est au diapason d'or ce qu'est la médaille olympique de lancer de poids à la compétition de pétanque de la félibrée.
Seule la rédaction de Carnets sur sol, réunie en collège extraordinaire, est habilitée à le décerner, ce qui garantit la clairvoyance de son attribution, et l'absence absolue de collusion maligne.

Hautement respecté, il se matérialise par un putto de van Dyck, remis directement à chaque lauréat sous forme d'un précieux carré de pixels.

Au delà du jeu des breloques, c'est aussi et surtout l'occasion de mettre en valeur des œuvres, concerts ou interprètes qui n'ont pas toujours été très exposés. Il est vrai que le travail de recherche de ces concerts est un poste de dépense, en temps, assez considérable à lui seul !



En fin de saison 2015-2016, nous promettions :

Nous songeons à louer une salle pour la cérémonie de l'an prochain, avec retransmission en mondiovision et partenariat avec Medici.tv. Kim Jong-eun a déjà proposé de prêter le Salon Kim Il-sung de l'aile Ouest du Mémorial du Juche, mais nous voudrions accueillir un public nombreux et cherchons une adresse un peu moins enclavée en transports (on travaille le lendemain). Toute proposition sérieuse acceptée.

Pour de dérisoires questions de visa et d'anéantissement imminent du monde, le lieu de tenue de remise des prix sera le même que celui de l'an passé, ici même, chez vous. En vous remerciant chaleureusement de votre accueil.




1. Liste des spectacles vus

Concerts, opéras, théâtre… En voici la liste, dans l'ordre de la saison. Beaucoup ont été commentés, et quelques-uns ont servi de présentation à une œuvre, un genre, une problématique transversale…

Hors décompte : août 2016. Ordinairement non inclus dans les précédents relevés.

a) Comédie Nation – Marivaux, Les Sincères (avec musique de scène a cappella) – collectif Les Sincères
b) La Huchette – La Poupée sanglante, comédie musicale d'après G. Leroux

Puis, de septembre à juin :

1. Philharmonie – Bruckner, Symphonie n°7 – Staatskapelle Berlin, Barenboim
2. Champs-Élysées – Tchaïkovski, Symphonie n°5 / R. Strauss, Vier letzte Lieder – Damrau, Bayerisches Staatsorchester, K. Petrenko
3. Maison de la Radio – Schmitt, Salomé / Ravel, Shéhérazade – d'Oustrac, National de France, Denève
4. Philharmonie – Schumann, Szenen aus Goethes Faust – H.-E. Müller, Staples, Gerhaher, Selig, Orchestre de Paris, Harding
5. Hôtel de Castries – Jazz vocal
6. Hôtel de Béhague – œuvres pour violon et piano d'Enescu, Bobescu
7. Maison de la Radio – Poulenc, Les Biches / Milhaud, La Création du Monde – National de France, Denève
8. Châtelet – Faust I & II de Goethe – Ferbers, R. Wilson, Berliner Ensemble, Grönemeyer [notule]
9. Garnier – Cavalli, Eliogabalo – García-Alarcón
10. La Commune – Kleist, Amphitryon – Sébastien Derrey
11. Louvre – programme Cœur du Poème Harmonique – Zaïcik, Le Levreur, Goubioud, Mauillon, Dumestre
12. Foyer de l'Âme – Motets de Charpentier, Pietkin… – Ensemble Athénaïs
13. Temple du Port-Royal – Haydn, Sept dernières Paroles pour clarinette d'époque, clarinette d'amour et cors de basset
14. Saint-Louis-en-l-Île – Programme Venise 1610 – Vox Luminis, Capriccio Stravagante, Skip Sempé
15. Opéra Royal – Saint-Saëns, Proserpine – Gens, M.-A. Henry, Antoun, Vidal, Foster-Williams, Teitgen, Müncher Rundfunkorchester, Schirmer
16. Champs-Élysées – Bellini, Norma – Caurier & Leiser, Rebeca Olvera, Bartoli, Norman Reinhardt, I Barrochisti, Gianluca Capuano
17. Opéra Royal – Salieri, Les Horaces – Wanroij, Bou, Talens Lyriques, Rousset
18. Champs-Élysées – Brahms, Deutsches Requiem – Collegium Vocale, Champs-Élysées, Herreweghe
19. Champs-Élysées – Verdi, Requiem – Santoni, Kolosova, Borras, D'Arcangelo, National de France, Rhorer
20. Philharmonie – Debussy, Faune / Debussy, Jeux / Stravinski, Sacre du Printemps – Nijinski restitué (ou réinventé), Les Siècles, Roth
21. Salle d'orgue du CNSM – Académie Européenne de Musique de Chambre (ECMA) – Trio Sōra dans Kagel, Quatuor Bergen dans Chostakovitch…
22. Salle d'orgue du CNSM – Académie Européenne de Musique de Chambre (ECMA) – Trio Zadig dans Schumann, Quatuor Akilone dans Chostakovitch…
23. Athénée (rénové) – Strindberg, Danse macabre (en italien) – Desplechin
24. Maison de la Radio – 20 ans de l'ADAMI – Barrabé, Duhamel, Scoffoni…
25. Sainte-Élisabeth-de-Hongrie – Messe d'Innocent Boutry – Le Vaisseau d'or, Robidoux
26. Gennevilliers – Hirata, Gens de Séoul 1909 (en japonais et coréen)
27. Maison de la Radio – Tchaïkovski, Symphonie n°6 / Sibelius, Symphonie n°2 – Phiharmonique de Radio-France, M. Franck
28. Gennevilliers – Hirata, Gens de Séoul 1919 (en japonais et coréen, avec chants coréens)
29. Amphi Cité de la Musique – Soutenance musicale de l'enseignement du violon en France au XIXe siècle – pièces pour violon et piano (d'époque) d'Hérold, Alkan et Godard
30. Bastille – Les Contes d'Hoffmann – Vargas, d'Oustrac, Jaho, Aldrich…
31. Salle d'orgue du CNSM – Hommage à Roland-Manuel : piano et mélodies – Cécile Madelin…
32. Théâtre 71 (Malakoff) – Lü Bu et Diao Chan (opéra chinois) – troupe agréée par le Ministère
33. Salle d'orgue du CNSM – Hommage à Puig-Roget : piano et mélodies – Edwin Fardini…
34. Hôtel de Soubise – Airs et canzoni de Kapsberger, Merula, Strozzi… – les Kapsber'girls
35. Abbesses – Goethe, Iphigénie en Tauride – Jean-Pierre Vincent
36. Maison de la Radio – Sibelius, Symphonie n°5 / Brahms, Concerto pour piano n°1 – Lugansky, National de France, Slobodeniuk
37. Maison de la Radio – Nielsen, Symphonie n°4 – Philharmonique de Radio-France, Vänskä
38. Philharmonie – Mendelssohn, Elias – Kleiter, A. Morel, Tritschler, Degout, Ensemble Pygmalion, Pichon
39. Salon Vinteuil du CNSM – Mahler, Kindertotenlieder (et présentation musicologique) – Edwin Fardini au chant
40. Salle Cortot – Beethoven, Quatuor n°7  – Quatuor Hanson
41. Athénée – Hahn, L'Île du Rêve – Dhénin, Tassou, Pancrazi, de Hys, Debois, Orchestre du festival Musiques au Pays de Pierre Loti, Masmondet
42. Philharmonie – Adams, El Niño – Joelle Harvey, Bubeck, N. Medley, Tines, LSO, Adams
43. Salle Turenne – Bertali, Lo Strage degl'Innocenti / Motets de Froberger – membres du CNSM (Madelin, Benos…)
44. Salle Dukas du CNSM – masterclass de Gabriel Le Magadure (violon II du Quatuor Ébène) – Trio de Chausson par le Trio Sōra
45. Champs-Élysées – Mozart, Don Giovanni – Braunschweig, Bou, Gleadow, Humes, le Cercle de l'Harmonie, Rhorer
46. Hôtel de Béhague – Mélodies orientalisantes (Louis Aubert, etc.) – Compagnie de L'Oiseleur
47. Bastille – Mascagni, Cavalleria Rusticana / Hindemith, Sancta Susanna – Martone, Garanča, Antonacci, Rizzi
48. Studio de la Philharmonie – Schumann, Märchenerählungen / Kurtág, Trio et Microludes – membres de l'EIC et de l'OP
49. Champs-Élysées – Haendel, The Messiah – Piau, Pichanik, Charlesworth, Gleadow, le Concert Spirituel, Niquet
50. Garnier – Gluck, Iphigénie en Tauride – Warlikowski, Gens, Barbeyrac, Dupuis, Billy
51. Temple du Luxembourg – André Bloch, Antigone / Brocéliande – Compagnie de L'Oiseleur
52. Philharmonie – Schumann, Das Paradies und die Peri – Karg, Goerne, OP, Harding
53. Châtelet – H. Warren, 42nd Street – G. Champion, troupe ad hoc
54. Auditorium Landowski du CRR de Paris – Audition de la classe de chant baroque
55. Salle d'art lyrique du CNSM – Schumann, Symphonie n°2 / Mozart, Concerto pour piano n°9 – Classe de direction
56. Salle d'orgue du CNSM – Vierne, cycle Les Angélus pour soprano et orgue – Harmonie Deschamps
57. Saint-Quentin-en-Yvelines – Sacchini, Chimène ou Le Cid – Le Concerto de la Loge Olympique, Chauvin
58. Auditorium Landowski du CRR de Paris – de Mendelssohn à Aboulker, chœurs oniriques d'enfants
59. L'Usine (Éragny) – Ibsen, Hedda Gabler – Paolo Taccardo
60. Studio 104 – Quatuors : n°4 Stenhammar, n°2 Szymanowski – Royal Quartet
61. Salle d'orgue du CNSM – Cours public sur le premier des Trois Chorals de Franck – M. Bouvard, Latry et leurs élèves
62. Philharmonie – Tchaïkovski, Symphonie n°5 – ONDIF, Mazzola
63. Auditorium Landowski du CRR de Paris – Sonates avec violon : Debussy, Ropartz n°2 – Stéphanie Moraly
64. Amphi de la Cité de la Musique – Schubert, Der Schwanengesang – Bauer, Immerseel
65. Cité de la Musique – Schumann, Liederkreis Op.24 – Gerhaher, Huber
66. Auditorium Landowski du CRR de Paris – Salomon, Médée et Jason, acte II
67. Athénée – Strindberg, Danse Macabre (en italien) – Desplechin
68. Champs-Élysées – Bizet, Carmen – Lemieux, Spyres, Bou, National de France, S. Young
69. Salle d'art lyrique du CNSM – Durey, Œuvres pour harmonie – Harmonie des Gardiens de la Paix
70. Champs-Élysées – Schubert, Die schöne Müllerin – Goerne, Andsnes
71. Bastille – Wagner, Lohengrin – Guth, M. Serafin, Schuster, Skelton, Konieczny, Ph. Jordan
72. Garnier – Mozart, Così fan tutte – Keersmaeker, Losier, Antoun, Sly, Szot
73. Temple du Luxembourg – Paladilhe, Le Passant – Compagnie de L'Oiseleur
74. Châtelet – Offenbach, Fantasio – Jolly, Philharmonique de Radio-France, Campellone
75. Temple de Pentemont – Motets de Campra et Bernier, Troisième Leçon de Couperin  – Le Vaisseau d'or, Robidoux
76. Trianon de Paris – Lecocq, Le Petit Duc – Les Frivolités Parisiennes
77. Le Passage vers les Étoiles – Méhul, Stratonice – Les Emportés, Margollé
78. Studio-Théâtre du Carrousel du Louvre – Maeterlinck, Intérieur – comédiens-français
79. Temple du Saint-Esprit – Motets de Charpentier, Morin et Campra pour petits braillards – Pages du CMBV, musiciens du CRR de Paris, Schneebeli
80. Amphi de la Cité de la Musique – Chambre de Usvolskaya, mélodies de Vainberg, Chostakovitch, Prokofiev – Prudenskaya, Bashkirova
81. Salle d'art lyrique du CNSM – Cimarosa, Il Matrimonio segreto – H. Deschamps, Perbost, McGown, Rantoanina, Lanièce, Worms, Orchestre du CNSM
82. Salle des Concerts du Conservatoire – Haydn, Les Saisons dans la version de sa création française – Palais-Royal, Sarcos
83. Conservatoire de Puteaux – Chansons à boire de Moulinié et LULLY, poèmes de Saint-Amant – Cigana, Šašková, Il Festino, de Grange
84. Salle Maurice Fleuret du CNSM – Schmitt, La Tragédie de Salomé version originale – Orchestre du CNSM, étudiants de la classe de direction d'A. Altinoglu
85. Philharmonie – Mozart, Symphonie n°38 (et spectacle afférent) – Orchestre de Paris
86. Oratoire du Louvre – Vêpres de Monteverdi, Suite de danses de LULLY, Concerto grosso de Noël de Corelli, Soupers du comte d'Artois de Francœur – Collegium de l'OJIF
87. Champs-Élysées – Beethoven, Symphonies 1-4-7 – Orchestre des CÉ, Herreweghe
88. Philharmonie – Tchaïkovski, La Pucelle d'Orléans – Chœurs et Orchestre du Bolchoï, Sokhiev
89. Maison de la Radio – Nielsen, Symphonie n°2 – National de France, Storgårds
90. Odéon – T. Williams, Suddenly Last Summer – Braunschweig
91. Champs-Élysées – Berlioz, Nuits d'Été, Schönberg, 5 pièces, Schumann, Symphonie n°2 – Gerhaher, Jeunes Gustav Mahler, Harding
92. Bastille – Mendelssohn, A Midsummer Night's Dream, Ouvertures, Symphonie pour cordes n°9 – Balanchine, Orchestre de l'Opéra, Hewett
93. Salle d'orgue du CNSM – Concert lauréats Fondation de France : La Maison dans les Dunes de Dupont, Ophelia-Lieder de R. Strauss
94. Champs-Élysées – Brahms, Vier ernste Gesänge et  Deutsches Requiem – Orchestre des CÉ, Herreweghe
95. Oratoire du Louvre – Leçons de Ténèbres pour basse de Charpentier – MacLeod, Les Ambassadeurs, Kossenko
96. Philharmonie – Mahler, Wunderhorn ; Bruckner, Symphonie n°4 – Gubanova, D. Henschel, OPRF, Inbal
97. Conservatoire de Boulogne-Billancourt – Mendelssohn, Octuor ; Schönberg, Kammersymphonie n°2 ; Poulenc, Sinfonietta – OJIF, Molard
98. Salle Saint-Thomas d'Aquin – airs à une ou plusieurs parties de Lambert, Le Camus… – Š€ašková, Kusa, Il Festino, de Grange
99. Athénée – Maxwell Davies, The Lighthouse – Le Balcon
100. Hôtel de Soubise – Trios de Tchaïkovski et Chostakovitch (n°2) – Trio Zadig
101. Richelieu – Marivaux, Le Petit-Maître corrigé – Hervieu-Léger, comédiens-français
102. Salle Maurice Fleuret du CNSM – Spectacle théâtral et chanté autour de la domesticité – élèves de la classe d'E. Cordoliani
103. Favart – Marais, Alcione – L. Moaty, Concert des Nations, Savall
104. Hôtel de Soubise – Cantates de Clérambault et Montéclair – Zaičik, Taylor Consort
105. Menus-Plaisirs – Écosse baroque, concert de soutenance – Clémence Carry & Consort
106. Salle d'orgue du CNSM – Programme de lieder et mélodrames d'Eisler – classe d'accompagnement d'Erika Guiomar
107. Athénée – Rítsos, Ismène (musiques de scène d'Aperghis) – Marianne Pousseur
108. Saint-Germain-l'Auxerrois – Motets baroques portugais – ensemble Calisto
109. Salle Maurice Fleuret du CNSM – Pelléas, L'Étoile, Cendrillon de Massenet – classe d'ensembles vocaux (Bré, Lanièce…)
110. Salle d'orgue du CNSM – lieder de Schubert, Nuits Persanes de Saint-Saëns, Caplet – (Gourdy, Ratianarinaivo…)
111. Champs-Élysées – Les Pêcheurs de Perles de Bizet – Fuchs, Dubois, Sempey, National de Lille, A. Bloch
112. Champs-Élysées – Pelléas de Debussy – Ruf, Petibon, Bou, Ketelsen, Teitgen, National de France, Langrée
113. Bibliothèque Marmottan – L.-A. Piccinni, musiques de scène (La Tour de Nesle, Lucrèce Borgia) – conclusion du colloque sur la musique de scène en France
114. Bastille – Eugène Onéguine – Decker, Netrebko, Černoch, Mattei, Orchestre de l'Opéra, Gardner
115. Philharmonie – Aladdin de Nielsen, Sept Voiles, Shéhérazade de Ravel, Suite de L'Oiseau de feu – Capitole, Sokhiev
116. Cathédrale des Invalides – Jensen, Rheinberger, J.-B. Faure… mélodies et lieder commémoratifs de la Grande Guerre – classe d'accompagnement d'Anne Le Bozec
117. Philharmonie – Symphonie n°2 de Mahler – Orchestre de Paris, Harding
118. Saint-Saturnin d'Antony – Motets de Buxtehude, Telemann et Bernier – Françoise Masset
119. Saint-Louis de la Pitié-Salpêtrière – du Mage, Clérambault et pièces pour saxophone & orgue
120. Athénée – Déserts de Varèse et Dracula de Pierre Henry réarrangé avec instruments acoustiques – Le Balcon, M. Pascal
121. Salle Fauré du CRR de Paris – Études Latines de Hahn, Liebhabers Ständchen de Schumann… – étudiants du CRR
122. Champs-Élysées – Halévy, La Reine de Chypre – Gens, Droy, É. Dupuis, Chambre de Paris, Niquet
123. Bouffes-du-Nord – Lemoyne, Phèdre – Wanroij, Axentii, de Hys, Dolié, Loge Olympique, Chauvin
124. Favart – récital français en duo : Gluck, Chabrier, Bizet… – Arquez, Bou, Pordoy
125. Studio 104 – Motets de Guédron, Boësset, Constantin, Moulinié – Correspondances, Daucé
126. Maison du Danemark – Contes d'Andersen et leurs mises en musique – Françoise Masset (accompagnée sur guitares début XIXe)
127. Saint-Eustache – Funérailles de Purcell, Reger, Totentanz de Distler – Chœur de l'Orchestre de Paris, Sow
128. Sainte-Jeanne-de-Chantal – Haendel, The Ways of Zion Do Mourn – Le Palais-Royal, Sarcos
129. Favart – Saint-Saëns, Le Timbre d'argent – Devos, Montvidas, Christoyannis, Les Siècles, Roth
130. Temple de Passy – Chœurs de Bonis, Sibelius, Aboulker, Wennäkoski… – échange franco-finlandais de chœurs amateurs
131. Cité de la Musique – Gade, grande cantate Comala – Opéra de Rouen, Équilbey
132. Petit-Palais – Couperin et Bach (suite française) pour clavecin
133. Petit-Palais – Airs et duos de LULLY et Desmarest – Pancrazi, Debieuvre
134. Hôtel de Soubise – Quatuors de Beethoven n°7 et Debussy – Quatuor Akilone
135. Notre-Dame-du-Liban – Chœurs d'inspiration populaire de Saint-Saëns, d'Indy, Schmitt et Poulenc – Chœur Calligrammes
136. Salle des Fêtes de la Mairie du IVe arrondissement – Quintettes à vent de Debussy, Arnold, Barber, Ligeti – Chambre de Paris
137. Cour de Guise – Trios avec piano de Schubert n°2 et Ravel – Trio Zadig
138. Saint-Croix-des-Arméniens – Canzoni de Kapsberger, Strozzi, et Lamento della Pazza de Giramo – Kapsber'girls
139. Collégiale de Mantes-la-Jolie – Pièces pour orgue de Buxtehude, Mendelssohn, Franck et Vierne – Michel Reynard




2. Liste des spectacles non vus

Ce pourrait paraître déraisonnablement rempli, et pourtant, il a fallu renoncer à quantité de spectacles qui paraissaient à peu près aussi appétissants (vie professionnelle ou personnelle, simultanéités de concerts, envie d'autre chose, tarifs, concerts complets, etc.) :

→ musique de chambre de Cartan & Lekeu,
→ les Cantates de Jacquet de La Guerre par La Rêveuse,
→ les chœurs de Franck et Daniel-Lesur,
→ le Philharmonia dirigé par Salonen (Beethoven 3, Sibelius 5),
→ les extraits des Éléments de Destouches,
Dichterliebe avec harpe,
→ Charpentier par les étudiants du Conservatoire de Palerme,
→ cours public de cor ou de direction,
→ trio de Gouvy par le Trio Sōra aux Bouffes-du-Nord,
→ le Second Trio de Mendelssohn par le Trio Sōra à Soubise,
→ le Trio de Tchaïkovski par le Trio Sōra à la cour de Guise,
→ le Trio de Chausson par le Trio Sōra au musée Henner puis à Villecerf (décidément !),
→ Leyla McCalla au violoncelle dans de la musique haïtienne,
→ Ariadne auf Naxos au CNSM,
→ la Neuvième de Mahler par Harding,
→ mélodies de L. Boulanger et Berkeley,
→ musique sacrée de Frémart-Bouzignac-Moulinié par Schneebeli,
→ Neuvième de Beethoven par le Philharmoniue de Bruxelles,
→ récital folk de Weyes,
→ Saint-Cécile de Chausson et le Septuor de Caplet à Notre-Dame,
→ Fidelio par la Chambre de Paris,
→ les monumentales variations de Rzewski sur El Pueblo unido salle Turenne,
→ les musiques de scène de Molière par Lombard, Dumora et Correas.
→ le Quinzième Quatuor de Beethoven par le Quatuor Arod,
→ Rameau par Kožená,
Hänsel und Gretel arrangé pour cuivres et récitant,
Musique pour cuivres et cordes de Hindemith par van Lauwe,
→ récital Desandre-Cochard,
→ trios de Chaminade et Bonis,
→ programme Guy Sacre et Boisgallais,
→ programme d'orgue Letton à la Maison de la Radio,
→ le Songe d'une Nuit d'Été de Thomas par la Compagnie de L'Oiseleur,
The Tempest Songbook de Saariaho par l'Orchestre Baroque de Finlande,
Les Aveugles de Maeterlinck à Vitry-sur-Seine,
Tafelmusik de Telemann au château d' Écouen,
Ce qui plaît aux hommes de Delibes par les Frivolités Parisiennes au Théâtre Trévise,
→ la BBC Wales dans Sibelius 5 à la Seine Musicale,
→ programme Lalo-Dukas-Ravel par Les SIècles,
Médée de Charpentier par Tafelmusik de Toronto et Pynkosky,
→ mélodies de Vierne, Podlowski et Koster par Lièvre-Picard,
Ascension de Messiaen et Widor 6 à Saint-Sulpice,
→ récital Louis Saladin et Salomone Rossi aux Menus-Plaisirs,
Musicalische Exequien de Schütz et motets de la familel Bach par Vox Luminis,
→ Lura dans de la musique du Cap-Vert à l'Espace Cardin,
→ grands motets de Lalande à Versailles,
→ demi-Winterreise de Bostridge & Drake au musée d'Orsay,
→ motets de Charpentier par La Chanterelle,
→ lieder de Weigl à la Maison de la Radio,
→ legs pédagogique du violoncelle français (Franchomme, etc.) au château d'Écouen,
Diva de Wainwright,
→ Cécile Madelin dans des extraits d'Atys au Petit-Palais,
Snegourotchka de Rimski-Korsakov à Bastille (la seule rareté de l'année à Bastille, hors le demi-Hindemith !),
→ récital d'opéra Meyerbeer-Février à la Philharmonie,
→ l'Yriade dans les Stances du Cid à Favart,
Il Signor Bruschino aux Champs-Élysées,
→ piano de Bizet, Saint-Saëns et Brahms par Oppitz,
→ « symphonie en si mineur » de Debussy à la Maison de la Radio,
→ récitals de mélodie Gens-Manoff,
Elisir d'amore avec Poulakis et Lanièce au Théâtre des Variétés,
→ spectacle Les Madelon (Fontenay-le-Fleuyr),
→ Dvořak 9 au piano solo par Mařatka,
La Double Inconstance de Marivaux à Richelieu,
→ madrigaux de Marenzio et Lejeune à la Bibliothèque de Versailles,
→ concert de la Fête de la Musique du Chœurs de l'Orchestre de Paris,
→ deux concerts de musique de chambre incluant Koechlin, au Conservatoire de Bourg-la-Reine,
→ pièces symphoniques de Nováček, Warlock et Delius par van Lauwe,
Rigoletto avec Grigolo et Lučić à Bastille,
Nozze di Figaro avec la Chambre de Paris
→ quatuors de Kodály, Bella et Tansman par le Quatuor Airis au Centre Culturel Tchèque,
→ Tableaux d'une exposition pour quintette à vent à Soubise,
Hippolyte de Garnier au Studio-Théâtre,
L'Écume des jours à la Huchette…
→ et bien d'autres.

Certains font mal à relire, mais je n'avais pas toujours le choix (ni l'envie de vivre aussi reclus qu'en conclave, contrairement aux apparences les spectacles ne sont pas du tout mon activité prioritaire).

Et je ne parle que de l'Île-de-France : on voit la difficulté pour donner, malgré tout, un avis global sur la saison. Il faudrait être beaucoup plus centré sur un répertoire précis, voire s'y mettre à plusieurs, or en cette matière comme en beaucoup d'autres, je ne suis que ma fantaisie…





3. Bilan général et comptes-rendus de concert

    La plupart de ces concerts ont été commentés, je n'ai pas la patience d'aller récupérer plus de cent liens, comme les autres années, mais ils se retrouvent facilement en entrant les mots-clefs dans la boîte de recherche à droite, ou, pour beaucoup, en regardant dans le chapitre « Saison 2016-2017 » (les notules les plus complètes ne sont pas classées là, mais il y a déjà une certaine masse à parcourir).

    En revanche, je commence la remise de prix par le plus important : les œuvres révélées, les plus beaux spectacles de la saison, les compagnies à suivre.



3a. Œuvres découvertes

Je vous renvoie d'abord vers la notule-éditorial de la prochaine saison, qui énumère les nombreux opéras rares remontés cette saison (§B). Saison faste, donc.

les putti d'incarnat L'arrêt des Putti d'incarnat les putti d'incarnat

Suite de la notule.

dimanche 4 septembre 2016

Saison 2015-2016 : bilan statistique et subjectif… et putti d'incarnat


Vous l'attendiez, vous n'en pouviez plus. Le voilà.

Juillet a été riche, août fut mort ; il est temps de proposer un petit bilan autour des choses vues.
D'abord, un retour sur les saisons précédentes.


Cette saison, en plus des statistiques, une grande remise de putti d'incarnat. les putti d'incarnat

Comme c'est devenu la tradition, le putto d'incarnat récompense une réalisation exceptionnelle dans le domaine des arts. Seule la rédaction de Carnets sur sol, réunie en collège extraordinaire, est habilitée à le décerner, ce qui garantit son attribution, complètement indépendante, aux meilleurs artistes de notre temps.

Hautement respecté, il se matérialise par un putto de van Dyck (ou Lagrenée, selon les années), remis directement au lauréat sous forme d'un carré de pixels.

C'est aussi et surtout l'occasion de mettre en valeur certains concerts ou certains interprètes qui sont restés un peu négligés par la presse ou l'exposition publique – mais ce paramètre n'entre pas en considération dans l'attribution des récompenses.

(Le jury tient à souligner que ne sont nommés qu'un petit nombre parmi  les plus marquants, les autres étant loin de faire figure tocards pour autant…)




1. Liste des spectacles vus

Concerts, opéras, théâtre… En voici la liste, dans l'ordre de la saison. Beaucoup ont été commentés, et quelques-uns ont servi de présentation à une œuvre, un genre, une problématique transversale… les liens sont indiqués entre crochets et s'ouvrent dans une nouvelle fenêtre.

Hors décompte : août 2015. N'ayant jusqu'ici jamais fait de concert en août, je ne les décompte pas dans la saison pour ne pas fausser les statistiques.

a) Parc Floral – polyphonies et chansons – Voces8 [notule]
b) Parc Floral – Brahms, Premier Trio avec piano – Fouchenneret, Julien-Laferrière, H. Cartier-Bresson [notule]
c) Parc Floral – Gossec, Symphonie – Orchestre de Chambre Pelléas [notule]
d) Parc Floral – Beethoven, Concertos pour piano 3 & 5 – Orchestre de Chambre de Paris, F.-F. Guy

Puis, de septembre à début juillet :

1. Philharmonie (PP) – Sibelius, Symphonie n°5 – Orchestre de Paris, Paavo Järvi [notule]
2. Théâtre des Champs-Élysées (TCE) – Weber, Der Freischütz – Gens, Schukoff, Speer, NDR Hambourg, Hengelbrock
3. Maison de la Radio (MR) – Dutilleux, The Shadows of Time / Poulenc, Litanies – Maîtrise de RF, Philharmonique de RF, Mikko Franck
4. Studio 105 – Waed Bouhassoun dans ses propres compositions
5. 38 Riv' – Santiago de Murcia pour harpe et guitare
6. Cité de la Musique (CiMu) – Meisel, Berlin, Die Sinfonie der Großstadt en réduction – Philharmonique de Strasbourg, Strobel [notule]
7. TCE – R. Strauss, Ariadne auf Naxos – Amber Wagner, Kaufmann, Opéra d'État de Bavière, K. Petrenko [notule]
8. Gaveau – Monteverdi, L'Orfeo – van Elsacker, Lefilliâtre, van Achten, La Fenice, Tubéry [notule]
9. PP – Stravinski et Bartók, L'Oiseau de feu et Le Mandarin merveilleux complets – London Symphony, Gergiev [notule]
10. 38 Riv' – Visée et Dollé pour théorbe et gambe – Thibaut Roussel, Robin Pharo [notule]
11. PP – Mahler, Symphonie n°3 – Jennifer Johnson, Orchestre de Cleveland, Welser-Möst [notule]
12. Ménilmontant – Ibsen, John Gabriel Borkman – Compagnie du Tourtour, Claudine Gabay [notule-bilan sur le patrimoine et les lignes de force d'Ibsen]
13. Bastille – Schönberg, Moses und Aron – Castellucci, Graham-Hall, Mayer, Castellucci, Ph. Jordan [notule 1] [notule 2]
14. PP – Saint-Saëns, Symphonie n°3 – Gabetta, Orchestre de Paris, P. Järvi [notule] [l'orgue]
15. Studio 104 – Walton, Symphonie n°1 – D. Pascal, Orchestre Colonne, Petitgirard [notule]
16. TCE – Britten, Sérénade pour ténor, cor et cordes – Staples, Orchestre de Chambre de Paris (OCP), Boyd [notule]
17. Saint-Gervais – Motets de Charpentier – Ensemble Marguerite Louise, Gaétan Jarry
18. MR – Tchaïkovski, Symphonie n°1 – Ehnes, Orchestre National de France (ONF), Gardner [notule]
19. PP – Mahler, Symphonie n°5 – Argerich, Orchestre du Festival de Lucerne, Nelsons [notule]
20. CiMu – Bach, Motets et Cantates – Ensemble Pygmalion, Pichon
21. Cortot – Cœur : Guédron, Le Roy & friends – Lefilliâtre, Le Levreur, Goubioud, Mauillon, Le Poème Harmonique, Dumestre [notule]
22. CNSM, salle d'orgue – Telemann, Saint-Saëns, G. Jacob… Hommage à Colette Lequien
23. PP – Clyne, création ; Tchaïkovski, Symphonie n°2 – Bavouzet, Orchestre National d'Île-de-France (dit ONDIF), Mazzola [notule]
24. Invalides, Grand Salon – LULLY, airs d'Atys, Armide ; Charpentier, Stances du Cid – Madelin, Croux, Benos, Hyon… CNSM, Haïm
25. PP – Dvořák, Symphonie n°7 – Orchestre de Paris, Dohnányi
26. PP – Nono, Prometeo – SWR Freiburg Baden-Baden, Matilda Hofman, Metzmacher [notule, expérience]
27. Bastille – Berlioz [notule], La Damnation de Faust – Hermanis, Koch, Kaufmann, Terfel, Ph. Jordan [notule et huées]
28. PP – LULLY, Armide – M.-A. Henry, Wanroij, Chappuis, Auvity, Mauillon, Les Talens Lyriques, Rousset [notule]
29. Cité des Arts – Hahn, Koechlin, Ravel, Emmanuel pour violon et piano – Moraly, R. David [notule]
30. CNSM, salle d'orgue – Fauré, Vierne, Hakim pour orgue – Kumi Choi [notule]
31. PP – Magnificat de Bach, Psaume et Cantate de Mendelssohn – Orchestre de Paris, Hengelbrock [notule]
32. Vieux-Colombier – Goldoni, I Rusteghi – comédiens-français [notule]
33. CNSM, salon Vinteuil – Marx, pièces pour quatuor avec piano – étudiants du CNSM [notule]
34. MR – Scherzo de Suk, Concerto pour violoncelle n°1 révisé et Symphonie n°6 de Martinů – J. Moser, Philharmonique de Radio-France (OPRF), Hrůša [notule]
35. MR – Haydn 103, Mozart concerto 23, Schubert n°5 – OPRF, Norrington [notule]
36. MR – Tchaïkovski, Symphonie n°5 – ONF, Gatti [notule]
37. MR  – Dutilleux, Symphonie n°2, Métaboles… – OPRF, Kwamé Ryan [notule]
38. TCE – Garayev, Thilloy, Debussy (Nocturnes), Poulenc (Les Biches) – Orchestre Lamoureux, Antoine Marguier [notule]
39. PP – Hommage à Boulez – Damiens, Ensemble Intercontemporain, Orchestre de Paris, P. Järvi… [notule]
40. PP – Bruckner, Symphonie n°5 – Orchestre de Paris, P. Järvi [notule]
41. Billettes – Airs de cour baroques espagnols – Kusa, Egüez [notule]
42. Opéra Royal – Godard, Dante – Gens, Montvidas, Radio de Munich, Schirmer [notule, présentation de l'œuvre]
43. PP – Bartók, Le Prince de bois – Orchestre de Paris, Zinman
44. PP – audition d'orgue : Bach, transcriptions, Widor 6… – Foccroulle, Lefebvre, Latry, Marshall
45. CNSM, salle Fleuret – Beethoven, Ouverture pour Coriolan – étudiants membres du BDE (Bureau des Étudiants)
46. TCE – Haendel, Rinaldo – Lezhneva, Gauvin, Fagioli, Wey, A. Wolf, Il Pomo d'Oro, Montanari [notule plus générale sur les erreurs de falsettistes et de diapasons]
47. PP – Verdi, Requiem – Grimaldi, Lemieux, Pirgu, Pertusi, Orchestre de Paris, Noseda
48. PP – Mendelssohn, symphonies 2 & 3 – RIAS Kammerchor, Chamber Orchestra of Europe, Nézet-Séguin [notule]
49. PP – Mendelssohn, symphonies 1, 4 & 5 – Chamber Orchestra of Europe (COE), Nézet-Séguin [notule]
50. Sainte-Élisabeth – Charpentier, motets pour le Port-Royal – Achille, Boudet, Le Vaisseau d'Or, Robidoux [notule]
51. PP – Sibelius, Symphonie n°3 – Orchestre de Paris, P. Järvi [notule]
52. PP – Bruckner, Symphonie n°9 – OPRF, Inbal [notule]
53. MR – Soir de Fête de Chausson, Printemps de Debussy, Les Animaux modèles de Poulenc – Latry, ONF, Gabel [notule]
54. MR – Lalo-Coquard, La Jacquerie – OPRF, Davin [notule]
55. Studio 104 – Musique de chambre de Castillon, Saint-Saëns et Fauré – membres de l'ONF, Girod [notule]
56. Théâtre de la Porte Saint-Martin – Massenet, Don César de Bazan – Revault d'Allonnes, Dumora, Sarragosse, Les Frivolités Parisiennes
57. TCE – airs et duos de LULLY, Charpentier, Rameau, Leclair – von Otter, Naouri, Le Concert d'Astrée, Haïm [notule]
58. Châtelet – Sondheim, Passion – Ardant, E. Spyres, Dessay, K. McLaren, R. Silverman, Thantrey, A. Einhorn [notule]
59. CiMu – Bource, The Artist – Hazanavicius, Brussels Philharmonic, Ernst Van Tiel [notule]
60. CiMu – Symphonie en ut de Bizet, Concerto pour hautbois de R. Strauss – Leleux, COE, Pappano [notule]
61. CNSM, salle Fleuret – Récital-spectacle Kosma – Vittoz, H. Deschamps, Fanyo, A. Bertrand, Woh, Worms… [notule]
62. Musée d'Orsay – Pillois, et mélodies orientales de Saint-Saëns, Caplet, Delage, Stravinski… – Brahim-Djelloul, Garde Républicaine [notule]
63. Hôtel de Soubise – Schubert 13, Ravel, BoutryQuatuor Akilone [notule du concert]
64. Bastille – Wagner, Die Meistersinger – Herheim, Kleiter, Keitel, Spence, Jovanovich, Skovhus, Finley, Groissböck, Ph. Jordan [notule et les bizarres longueurs wagnériennes]
65. CNSM, salle Fleuret – « Notre Falstaff », d'après Nicolai notamment – Cordoliani, (jeunes) étudiants du CNSM, Molénat [notule sur la méthodologie]
66. PP – Sibelius, Symphonie n°4 – Bell, Orchestre de Paris, Paavo Järvi [notule sur la place du soliste]
67. CNSM, salle d'art lyrique – Transcriptions d'opéra pour un ou deux pianos à deux ou quatre mains – Classe d'Erika Guiomar (Lucie Seillet, Rémi Chaulet, Pierre Thibout, Nicolas Chevereau…) [notule]
68. TCE – Persée de LULLY dans la révision de Dauvergne, Bury et Francœur en 1770 – Guilmette, Santon, Kalinine, C. Dubois, Vidal, Christoyannis, Teitgen, Le Concert Spirituel, Niquet [longue notule]
69. CNSM, salle d'art lyrique – Liederabend Zemlinsky par la classe d'Anne Le Bozec – Madelin, Garnier, Feix, Spohn, Bunel, Benos, Boché, Worms, Spampanato… [notule]
70. Lycée d'État Jean Zay, salon de réception – La Création de Haydn en français – Le Palais Royal, Sarcos [notule]
71. Théâtre Trévise – Adam, Le Farfadet – Les Frivolités Parisiennes [notule]
72. Ancien Conservatoire – La Création de Haydn en français – Bello, R. Mathieu, Tachdjian, Le Palais Royal, Sarcos [notule]
73. PP – Grieg, Concerto pour piano ; Dvořák, Symphonie n°8 – Tonhalle de Zürich, Bringuier [notule autour de l'importance de la vue]
74. PP, salle de répétition – Beethoven, Symphonie n°7 pour nonette à vent – souffleurs de l'Orchestre de Paris [notule : éditions et la discographie]
75. 38 Riv' – Quatuors de Haensel, Auber et I. Pleyel – Quatuor Pleyel [notule sur les œuvres]
76. Palais Garnier – Ballets de Paulli, Sauguet et Damase – École de Danse de l'Opéra, Orchestre des Lauréats du CNSM
77. MR – Schumann, Symphonie n°3 – OPRF, Norrington
78. Église de Joinville-le-Pont – Autour d'Ariane : Haendel, Vivaldi, Marcello, Marais, Mouret, Benda – Lohmuller, Ensemble Zaïs, B. Babel [notule sur les œuvres]
79. Bastille – Rigoletto de Verdi – Guth, Peretyatko, Kasarova, Fabiano, Kelsey, Siwek, Luisotti [notule]
80. MR – Beethoven, Symphonie n°2 – OPRF, Koopman
81. MR, studio 104 – Franck, chœurs ; Aboulker, Boule de Suif – Maîtrise de Radio-France
82. CiMu – Airs de Charpentier & co – Petibon, Amarillis, Cochard, H. Gaillard
83. TCE – Wagner, Tristan und Isolde – Audi, Nicholls, Breedt, Kerl, Polegato, Humes, ONF, Gatti [notule]
84. Notre-Dame-de-Paris – Credo de MacMillan, Requiem de Fauré – Maîtrise de NDP, OCP, J. Nelson
85. CRR – Campra, L'Europe Galante – Étudiants en musique ancienne du CRR
86. CRR – Mélodies orchestrales de Marx, Concerto pour violoncelle de J. Williams – Orchestre des étudiants du CRR
87. PP – Concerto pour violoncelle n°2 de Dvořák, Symphonie Fantastique de Berlioz – G. Capuçon, Capitole de Toulouse, Sokhiev
88. Bastille – R. Strauss, Der Rosenkavalier – Wernicke, E. Morley, Kaune, Houtzeel, Demuro, Gantner, P. Rose, Ph. Jordan
89. TCE – Spontini, Olympie (version originale) – Gauvin, K. Aldrich, M. Vidal, Le Cercle de l'Harmonie, Rhorer
90. Cinéma Le Balzac – Busatto, The Black Pirate (sur le film d'A. Parker écrit par Fairbanks) – Busatto himself [notules]
91. Notre-Dame-des-Blancs-Manteaux – Puccini, La Bohème – Galvez-Vallejo, Ut Cinquième
92. CNSM, salle d'art lyrique – Récital de fin d'études de Master 2pas du tout aimé, garde le nom secret pour ne pas nuire à la chanteuse [notule]
93. Palais Garnier – Reimann, Lear – Bieito, Dasch, Merbeth, Alisch, A. Conrad, Skovhus, Luisi [notule]
94. PP – Mahler, Symphonie n°3 – DeYoung, Orchestre de Paris, P. Järvi [notule]
95. Palais Garnier – Adam & tripatouilleurs, Le Corsaire – Petipa-Sergueyev-A.M.Holmes, Rojo, Hernández, Corrales, Saruhashi, Orchestre Colonne [longue notule]
96. CiMu – Cantates de Liszt et Gounod (sainte Cécile et saint François) – Deshayes, Barbeyrac, Sempey, OCP, Équilbey
97. Hôtel des Menus-Plaisirs – extraits d'Alcide de Marais & Louis Lully – chantres du CMBV, membres des CRR de Versailles et Cergy, van Rhijn
98. Cour de Guise (à Soubise) – Spanisches Liederspiel de Schumann, Neue Liebeslieder Waltzes de Brahms – Perbost, Zaïcik, P. García, Raschke, Ambroselli Brault, Williencourt
99. Cour de Guise – Quatuors avec piano, n°1 de Fauré et n°3 de Brahms – Trio Karénine, Sarah Chenaf
100. Cité Internationale des Arts – Programme Georges Migot (violon-piano, poèmes) – Couic Le Chevalier, Hosoya [lien]
101. Cour de Guise – Quatuor n°8 de Beethoven, Quintette avec piano de BrahmsAkilone SQ, Williencourt

C'est beaucoup, et pourtant quasiment que des très grandes soirées.





2. Commentaires manquants

Grande résurrection inattendue d'une œuvre crue détruite dans l'incendie de l'Opéra-Comique, finalement partiellement retrouvée et tout à fait reconstruite, Don César de Bazan, composé tôt dans sa carrière (juste après Le Roi de Lahore, son premier) figure parmi les toutes dernières partitions inédites de Massenet pour l'opéra. La plupart de ce qui reste se résume à des œuvres légères de prime jeunesse ou à des œuvres inachevées et souvent perdues (La Coupe du Roi de Thulé sur le livret d'É. Blau et Gallet figure parmi les plus intriguantes). Des œuvres écrites après sa trentième année et non perdues, il n'y a plus guère que Bacchus qui n'ait pas été remonté (il me semble) et qu'Ariane et Panurge qui ne disposent pas d'enregistrement officiel.
        Le résultat s'est révélé remarquable : œuvre d'essence plutôt légère, mais dont la musique n'est nullement triviale, Bazan explore la vie supposée du personnage plaisant de Ruy Blas de Hugo ; la pièce de théâtre initiale (écrite près de 30 ans plus tôt par le futur librettiste de Massenet, en collaboration avec l'ancien directeur du Théâtre des Variétés) est commandée par le créateur du rôle chez Hugo qui voulait conserver son personnage tout en ayant le premier rôle. L'opéra de Massenet qui se fonde sur lui est une sorte de vaudeville (mais au contenu musical très développé et sérieux, comme un opéra comique) qui joue avec la mort (et se laisse quelquefois rattraper), débutant en beuverie, se constellant d'amitiés sincères, culminant avec une évasion, et finissant par faire du frippon le mari le plus soucieux des convenances (assez étonnant comment cet opéra au ton supposément canaille finit par laisser au transgresseur les clefs des convenances les plus bourgeoises), mettant à la porte le roi.
       Plaisant, vif, plein de séductions, et servi par une équipe musicale extraordinaire (en particulier Dumora et Sarragosse, et par-dessus tout l'orchestre des Frivolités Parisiennes, du grand premier choix !), une résurrection méritée dans les murs mêmes où le Don César en version parlée fut créé – Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Pas eu le loisir non plus de dire mon émerveillement devant le programme des danseurs de l'École de l'Opéra, et pas seulement à cause de l'enthousiasme et de la qualité des jeunes interprètes, d'une qualité d'expression rarement vue, pour ma part, chez leurs aînés. Trois ballets courts.
        La musique de Paulli est peut-être la pire chose que j'aie entendu… certes, il s'agit d'imiter une école de danse et la muzak qui y sévit, mais même un exercice d'harmonie de première année sonne mieux, on dirait que le but est de produire la plus mauvaise musique possible sans enfreindre aucune règle. À côté, Anna Bolena, c'est déroutant et tendu comme Pierrot Lunaire. Presque physiquement violent.
       En revanche, belle réussite pour Les Forains de Roland Petit, jolie histoire mélancolique sur une musique de Sauguet qui tire adroitement parti de l'univers du cirque, avec beaucoup de couleurs et d'assemblages un peu crus et très variés ; et surtout, surtout, l'éblouissement du Piège de lumière de John Taras, avec une musique lyrique du Damase des grands jours, nullement répétitif ou prévisible, osant des coloris sombres qui lui sont moins familiers, même dans les tourments de L'Héritière ou les trahisons de Colombe. L'argument du ballet est lui-même très inhabituel et assez prenant, pour une fois : des détenus d'un pénitencier s'échappent , et bien sûr de rayonnants épanchements.dans la forêt vierge. Pris par la soif, l'un d'eux voit des papillons s'ébattre autour de lui comme dans un délire. L'occasion de sacrés contrastes visuels et sonores, et une intrication de deux sujets incompatibles très réussie.
      
Entendre le Rosenkavalier en salle a été une expérience extraordinaire : contrairement au disque, l'orchestre domine et la finesse de l'écriture, la récurrence des motifs frappent en pleine figure ; c'est toute la science de Wagner au service d'une expression guillerette, mais pas moins raffinée ni profonde. Une des expériences musicales les plus impressionnantes que j'aie faites, alors même que je ne suis (toujours) pas un gros client de l'œuvre au disque – chez le Strauss « conversationnel », j'aime davantage Intermezzo et surtout Arabella. Mais le Rosenkavalier, malgré son livret pas complètement bien proportionné, justifie sa haute réputation par l'ambition de sa musique, très impressionnante. (Par ailleurs, cette fois-ci, les qualités de détail de Philippe Jordan, audibles à la radio mais pas toujours en salle, étaient complètement perceptibles, ce qui ajoutait à l'impression d'extraordinaire.)

En fin de saison, quelques grands moments d'émotion toute nue, avec de la musique de chambre interprétée avec chaleur (n°99 & 101) : entendre ces œuvres bien structurées s'épanouir dans l'acoustique sobre d'une cour d'hôtel, dans une atmosphère qui n'a pas du tout les pesanteurs de la saison officielle (où, surtout à Paris, le public vient souvent à l'adulation ou à la curée), et par de jeunes musiciens encore émerveillés de toucher à ces chefs-d'œuvre (quoique parfaitement aguerris), c'est la musique brute, au delà de toutes les questions accessoires. Dans certains cas, partition (discrètement) en main, pour profiter de tous les détails. L'impression de revenir à l'essentiel, d'une certaine façon.




3. Statistiques

3a. Statistiques : lieux fréquentés

Septième saison francilienne, et cependant encore un assez respectable taux de renouvellement des salles : 101 soirées, 43 lieux, dont 15 nouveaux. Soit un tiers de lieux inédits (notés en gras).

(Philharmonie 1 & 2 : 30)
Philharmonie : 22
(MR total : 14)
(Conservatoires total : 13)
MR auditorium : 10
TCE : 10
(CNSM total : 9)
(Opéra de Paris total : 8)
CiMu : 7
Opéra Bastille : 5
(Soubise total : 4)
Parc Floral : 4
--
CNSM (salle Fleuret) : 3
CNSM (Salle d'art lyrique) : 3
MR Studio 104 : 3
Palais Garnier : 3
Hôtel de Soubise (cour de Guise) : 3
38Riv' : 3
CNSM, salle d'orgue : 2
CRR Auditorium Landowski : 2
Cité Internationale des Arts : 2
Versailles (Opéra Royal) : 1
Musée d'Orsay : 1
Billettes : 1
Gaveau : 1
Salle Cortot : 1
Invalides (grand salon) : 1
Châtelet : 1
Hôtel de Soubise (salon) : 1
Hôtel des Menus-Plaisirs : 1
Salle des Concerts du Vieux Conservatoire : 1
Salle de répétition 1 de la Philharmonie : 1
CNSM, salon Vinteuil : 1
NDP, côté portail Ouest : 1
Saint-Gervais : 1
Notre-Dame des Bancs Manteaux : 1
Sainte-Élisabeth-du-Temple : 1
Église Saint-Charles de Joinville-le-Pont : 1
MR Studio 105 : 1
Théâtre de la Porte Saint-Martin : 1
Théâtre Trévise : 1
Vieux-Colombier : 1
Théâtre de Ménilmontant : 1
Cinéma Le Balzac : 1
Grand Salon du Lycée d'État Jean Zay : 1

Sans doute liée à la fermeture de théâtres lyrique comme l'Opéra-Comique et l'Athénée (et aussi à la programmation sympa, à l'effet de nouveauté, etc.), claire avance de la Philharmonie, et de Radio-France (gonflé par les places impossibles à revendre, précisons-le…). Présence significative des conversatoires, des Champs-Élysées, contre-performance de Versailles (malgré le très beau programme !), de l'Opéra de Paris, des Billettes (ce sera peut-être pire la saison prochaine vu le programme très italien-XVIIIe), du Musée d'Orsay (toute la bonne came est le midi en semaine, et c'est encore pire pour la saison à venir !).



3b.  Statistiques : genres écoutés

Pour la première fois, il me semble, l'opéra n'est pas en première place, grosse orgie symphonique. Belle proportion de musique de chambre aussi, ça manquait cruellement les années passées.

Symphonique : 36 (dont baroque 2, classique 8, romantique 21, décadent 7, moderne 14, néo- 1, cœur XXe 3, contemporain 9)
Opéra : 21 (dont 8 scéniques, 10 en concert – et les autres ? ; dont 10 en français, 7 en allemand, 4 en italien ; dont premier baroque 1, tragédie lyrique 5, seria 1, opéra comique 1, grand opéra 3, romantique 5, décadent 2, atonal 1, contemporain 1)
Chambre : 18 (dont baroque 3, classique 2, romantique 7, décadent 2, moderne 6,contemporain 3 ; violon-piano 1, violon orgue 1, quatuor piano-cordes 1, quatuor 5, piano 5, nonette à vent 1)
Lied & mélodie : 11 (dont airs espagnols 1, air de cour 2, mélodies françaises 2 ; avec ensemble 1, avec orchestre 4, en quatuor vocal 1)
Musique vocale sacrée : 11 (dont baroque allemand 2, baroque français 2, classique 2, XIXe français 2, XIXe italien 1, XIXe allemand II, XXe 1, XXIe 1)
Orgue : 6 (dont baroque 3, moderne 3, contemporain 1, improvisations 2)
Récital d'opéra : 6 (tragédie lyrique 4, seria 1, diplôme 1)
Improvisations : 5
Ballet : 4 (scénique 2, triple-bill 2, concert 2)
Ciné-concert : 3
Théâtre : 4 (dont Ibsen 1)
Chœurs profanes : 2
Spectacle musical : 4
Traditionnel : 2
Chanson : 2
Piano : 2
Jazz : 1
Pop : 1
Comédie musicale : 1

Vous noterez que les récitals vocaux sont à peu près exclusivement dévoués au lied, à la mélodie et à la tragédie en musique… Prendre en tranches les parties les moins intéressantes des opéras les plus rebattus, bof.

Très peu de théâtre cette année, faute de temps vu la place occupée par les concerts… (et puis un seul Ibsen autre que Dukkehjem) Quelques titres supplémentaires cet été – Marivaux avec chants a cappella à la Comédie Nation, La Poupée sanglante d'après Gaston Leroux à la Huchette, également jubilatoires – mais ils entreront dans la statistique de la saison prochaine.



3c.  Statistiques : époques musicales

traditionnel : 2
XVIe1 : 1
XVIe2 : 3
XVIIe1 : 6
XVIIe2 : 14
XVIIIe1 : 16
XVIIIe2 : 14
XIXe1 : 23
XIXe2 : 47
XXe1 : 35
XXe2 : 18
XXIe : 17

En réalité plus représentatif de l'offre que de choix réels, mais il est certain qu'à la jointure du XIXe et du XXe siècles, les grandes machines orchestrales des symphonies et des opéras ont une réelle plus-value avec l'impact physique de la salle. Ce sont aussi des musiques complexes qui bénéficient d'une écoute attentive et d'un support visuel. Mais clairement, il y aurait plus d'offre en XVIIe, l'écart ne serait pas du tout le même.



3d.  Statistiques : orchestres et ensembles

28 orchestres, dont 13 découvertes en salle, soit près de la moitié (notés en gras). Et beaucoup de grands noms ou de découvertes assez épatantes.

Orchestre de Paris 11 (+ membres 1)
Orchestre Philharmonique de Radio-France 9
Orchestre de l'Opéra de Paris 6
Orchestre National de France 4 (+ membres 1)
Orchestre de chambre de Paris 4
Chamber Orchestra of Europe 3
Les Frivolités Parisiennes 2
Orchestre Colonne 2
Orchestre National d'Île-de-France
LSO
Radio de Munich
Capitole de Toulouse
Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Ut Cinquième
Orchestre des Lauréats du CNSM
Orchestre des Étudiants du CNSM
Orchestre du Bureau des Étudiants du CNSM
Orchestre des Jeunes du CRR
Orchestre Lamoureux
Brussels Philharmonic
Tonhalle Zürich
Elbphilharmonie de la NDR de Hambourg
Le Palais-Royal
Orchestre du Festival de Lucerne
Orchestre Symphonique de Cleveland
Opéra de Munich (Bayerisches Staatsorchester)
SWR Freiburg Baden-Baden
Orchestre de chambre Pelléas

les putti d'incarnat Arrêt des Putti d'incarnat les putti d'incarnat
Meilleur orchestre de la saison, sont nommés :
Brussels Philharmonic (The Artist de Bource), Tonhalle de Zürich (concerto pour piano de Grieg), Orchestre de Paris (Sibelius 3,4,5),
Orchestre National d'Île-de-France (Tchaïkovski 2, Clyne), Les Frivolités Parisiennes (Le Farfadet, Don César de Bazan), Chamber Orchestra of Europe (Symphonies de Mendelssohn et Bizet), Opéra de Paris (Rosenkavalier).
Attribué à : Orchestre National d'Île-de-France. Pas le plus virtuose malgré de superbes cordes graves (la petite harmonie est clairement en deçà des standards des grands orchestres), mais à chaque fois une intensité hors du commun et l'exaltation palpable des musiciens. N'a pas de prix. [notule]
Dauphin : Les Frivolités Parisiennes. Quelle divine surprise, avec de ce qui devrait théoriquement être un orchestre de cacheton (ou de professionnels passionnés mais de seconde zone), de rencontrer un orchestre d'une précision remarquable, et de dotés de timbres personnels et chaleureux, un vrai son français au meilleur sens du terme, franc, doté d'un grain très physique, et sans les défauts d'approximation ou de laideur qu'on y associe souvent. [notule]



De même, un assez grand nombre d'ensemble sur instruments anciens (et 8 sur 14 étaient des premières écoutes en salle) :

Les Talens Lyriques
Le Cercle de l'Harmonie
Le Concert Spirituel
Le Concert d'Astrée
Ensemble baroque du CNSM
Ensemble Pygmalion
Ensemble La Fenice
Il Pomo d'Oro
Ensemble Zaïs
Ensemble Pulcinella
Ensemble Marguerite Louise
Le Vaisseau d'or
Étudiants de Versailles et Cergy autour de Marie van Rhijn
Orchestre issu du département de musique ancienne du CRR de Paris

les putti d'incarnat Arrêt des Putti d'incarnat les putti d'incarnat
Meilleur ensemble sur instruments anciens de la saison, sont nommés :
Les Talens Lyriques
(Armide de LULLY), Le Cercle de l'Harmonie (Olympie de Spontini), La Fenice (Orfeo de Monteverdi),
Ensemble baroque du CNSM (récital LULLY dirigé par Emmanuelle Haïm), Ensemble Zaïs (autour d'Ariane), Il Pomo d'Oro (Rinaldo de Haendel), Ensemble Pulcinella (récital Magiciennes de Petibon), Ensemble Marguerite Louise (motets de Charpentier)
Attribué à : La Fenice. La variété des couleurs d'ensemble est formidable, mais c'est plus encore la présence individuelle de chaque interprète qui impressionne (à commencer par le cornetiste-chef, la violoniste-soprano, ou le théorbiste-baryton Nicolas Achten). En plus, une vision assez renouvelée et cohérente d'un bijou rabâché – L'Orfeo.  [notule]
Dauphin : Ensemble baroque du CNSM. Quel sens du style !  Il Pomo d'Oro dans le seria, à la fois virevoltant et sans tropisme pour les effets extérieurs, ou bien la finesse du continuo de l'Ensemble Zaïs méritaient les plus beaux éloges.



Enfin, deux ensembles spécialistes en musique contemporaine :

Ensemble Intercontemporain (hommage à Boulez)
Ensemble Recherche (participant au Prometeo de Nono)



3e.  Statistiques : chœurs

22  formations, dont 10 nouvelles.

Chœur ONP x5
Chœur OP x4
Maîtrise de Radio-France x2
Chœur RF x2
Maîtrise OP
Maîtrise NDP
Radio Flamande
Radio Bavaroise
WDR Köln
NDR Chor
Chœur Lamoureux
Accentus
Frivolités Parisiennes
Le Palais-Royal
Chœur ad hoc Châtelet Sondheim
Pygmalion
Concert Spirituel
Le Vaisseau d'or
RIAS Kammerchor
Schola Heidelberg
Chœur de chambre de Namur
Voces8

Voces8 est un peu à part, étant un ensemble à 8 (extraordinaire collectivement, individuellement, stylistiquement…). Une référence aussi bien pour les Motets de Bach que pour les transcriptions de standards de jazz.

les putti d'incarnat Arrêt des Putti d'incarnat les putti d'incarnat
Meilleur chœur de la saison, sont nommés :
Chœur de l'Orchestre de Paris (Requiem de Verdi), Maîtrise de Radio-France (Litanies de Poulenc, Chœurs de Franck), Chœur du Palais-Royal (La Création de Haydn en français), Chœur féminin du Vaisseau d'or (Messe du Port-Royal de Charpentier)
Chœur de l'Orchestre de Paris
Attribué à : Chœur de l'Orchestre de Paris.  [notule]
Dauphin : Maîtrise de Radio-France.



3f.  Statistiques : chefs


64 chefs d'orchestre, dont 37 entendus pour la première fois en salle (et un certain nombre tout simplement découverts dans l'absolu).


Chefs multi-fréquentés
Paavo Järvi x7 (OP)
Philippe Jordan x4 (Opéra de Paris)
Emmanuelle Haïm x2 (Ensemble baroque du CNSM, Concert d'Astrée)
Daniele Gatti x2 (ONF)
Roger Norrington x2 (OPRF)
Thomas Hengelbrock x2 (NDR Hambourg, OP)
Jean-Philippe Sarcos x2 (fondateur Palais Royal)

Avec orchestres franciliens
Fabio Luisi (Opéra de Paris)
Nicola Luisotti (Opéra de Paris)
Christoph von Dohnányi (OP)
Gianandrea Noseda (OP)
David Zinman (OP)
Edward Gardner (ONF)
Fabien Gabel (ONF ; ancien assistant de Zinman)
Mikko Franck (OPRF)
Eliahu Inbal (OPRF)
Ton Koopman (OPRF)
Patrick Davin (OPRF)
Jakub Hrůša (OPRF)
Kwamé Ryan (OPRF)
Andy Einhorn (OPRF dans Sondheim)
Douglas Boyd (OCP)
John Nelson (OCP)
Laurence Équilbey (OCP)
François-Frédéric Guy (OCP)
Enrique Mazzola (ONDIF)
Guillermo García Calvo (Lauréats du CNSM dans Sauguet et Damase)
Xavier Delette (Orchestres des Jeunes du CRR)
Marion Ladrette (Orchestres des Jeunes du CRR)
François Boulanger (Garde Républicaine)
Matthias Pintscher (EIC)
Laurent Petitgirard (Colonne)
Gavin Sutherland (Colonne)
Antoine Marguier (Lamoureux)
Mathieu Romano (Frivolités Parisiennes – Bazan)
Nicolas Simon (Frivolités Parisiennes – Farfadet)
Benjamin Levy (fondateur orchestre de chambre Pelléas ; ancien assistant de Zinman)
chefs du BDÉ du CNSM
Romain Dumas (Ut Cinquième)

Avec orchestres invités
Frank Strobel (Philharmonique de Strasbourg)
Tugan Sokhiev (Toulouse)
Ernst Van Tiel (Brussels Philharmonic)
Yannick Nézet-Séguin (COE)
Antonio Pappano (COE)
Valery Gergiev (LSO)
Ingo Metzmacher (SWR Baden-Baden Freiburg)
Matilda Hofman (SWR Baden-Baden Freiburg)
Andris Nelsons (Lucerne)
Lionel Bringuier (Tonhalle Zürich)
Ulf Schirmer (Radio de Munich)
Kirill Petrenko (Opéra de Munich)
Franz Welser-Möst (Cleveland)


les putti d'incarnat Putti d'incarnat les putti d'incarnat
Meilleur chef d'orchestre, sont nommés :
Paavo Järvi
(Sibelius 5, Bruckner 5), Philippe Jordan (Rosenkavalier), Roger Norrington (Haydn), Christoph von Dohnányi (Dvořák 7), Gianandrea Noseda (Requiem de Verdi), David Zinman (Le Prince de bois de Bartók), Edward Gardner (Tchaïkovski 1), Eliahu Inbal (Bruckner 9), Ton Koopman (Beethoven 2), Jakub Hrůša (Martinů 6 & Premier Concerto pour violoncelle), Kwamé Ryan (Métaboles), Enrique Mazzola (Tchaïkovski 2), Frank Strobel (Berlin de Meisel), Yannick Nézet-Séguin (Intégrale Mendelssohn), Antonio Pappano (Symphonie en ut de Bizet), Valery Gergiev (L'Oiseau de feu de Stravinski), Mikko Franck (Poulenc, Dutilleux).
Attribué à :
Honnêtement, pas possible de choisir entre les structures de Järvi, le détail poétique de Jordan, le tranchant de Dohnányi, l'élan de Noseda et Zinman, l'intensité d'Inbal et Gardner, le goût parfait de Koopman… Mais puisqu'il faut bien en distinguer quelques-uns, alors ce seront Mazzola, Koopman, Järvi et Inbal. Et Gardner, et Dóhnanyi, et Jordan, et Strobel… Stop, stop, c'est reparti !




Avec ensembles sur instruments anciens
Emmanuelle Haïm x2 (Ensemble baroque du CNSM, Concert d'Astrée)
Jean Tubéry
Hervé Niquet
Christophe Rousset
Vincent Dumestre
Jérémie Rhorer
Raphaël Pichon
Gaétan Jarry (Ensemble Marguerite Louise)
Héloïse Gaillard (Pulcinella)
Marie van Rhijn (Étudiants de Versailles et Cergy)
Sébastien Marq (Département Musique Ancienne CRR Paris)
Stefano Montanari (chef invité par Il Pomo d'Oro)
Martin Robidoux (fondateur Vaisseau d'Or)

Meilleur chef d'ensemble spécialiste, sont nommés :
Vincent Dumestre
(Guédron & Friends), Jean Tubéry (L'Orfeo), Emmanuelle Haïm (LULLY avec le CNSM, surtout pas avec son ensemble !), Héloïse Gaillard & Violaine Cochard (Pulcinella), Marie van Rhijn (Alcide de Marais), Sébastien Marq (L'Europe galante), Stefano Montanari (Rinaldo).
Attribué à : Vincent Dumestre toujours à la pointe des meilleurs arrangements dans l'air de cour du début du XVIIe siècle.
Dauphine : Emmanuelle Haïm pour son travail avec les étudiants du CNSM dans LULLY (le récital du même répertoireavec son ensemble sentait au contraire la routine et le peu d'entrain…).



3g.  Statistiques : metteurs en scène & chorégraphes

Wernicke, Bieito, Guth, Herheim, Hermanis, Castellucci, les metteurs en scène les plus en vogue se sont succédés dans ma saison scénique (pourtant limitée en nombre).

Dominique Pasquet (Les Sincères de Marivaux)
Jean-Louis Benoît (I Quattro Rusteghi de Goldoni)
Alvis Hermanis (La Damnation de Faust de Berlioz-Nerval-Gandonnière)
Claus Guth (Rigoletto de Verdi & Piave)
Pascal Neyron (Le Farfadet d'Adam & Planard)
Anna-Marie Holmes (chorégraphie pour  Le Corsaire d'Adam, d'après celle de Sergueïev – d'après celle de Petipa)
August Bournonville (chorégraphie pour Conservatoire de Holger-Simon Paulli)
Stefan Herheim (Die Meistersiner von Nürnberg de Wagner)
Claudine Gabay (John Gabriel Borkman d'Ibsen)
Damien Bigourdan (Don César de Bazan de Massenet & d'Ennery, Dumanoir, Chantepie)
Herbert Wernicke (Der Rosenkavalier de R. Strauss & Hofmannsthal)
Romeo Castellucci (Moses und Aron de Schönberg)
John Taras (chorégraphie pour Piège de lumière de Damase)
Roland Petit (chorégraphie pour Les Forains de Sauguet)
Calixto Bieito (Lear de Reimann & Henneberg-Zimmer)
Fanny Ardant (Passion de Sondheim & Lapine)
Éric Chantelauze (La Poupée sanglante de Didier Bailly & Jérôme Chantelauze)

Je ne compte pas les mises en espace de circonstance (Kosma et Notre Falstaff au CNSM, L'Europe Galante au CRR, Alcide aux Menus-Plaisirs, ni La Favola d'Orfeo par Tubéry à Gaveau, remarquablement suggestive d'ailleurs, avec ses musiciens chantants qui se lèvent ou apparaissent dans les loges !).

Chacun assez conforme à ses habitudes : Hermanis un peu perdu par ses propres concepts (potentiellement stimulants, mais tellement déconnectés de la scène), Guth dans un bon jour pas trop hardi (le double de Rigoletto ne dit pas grand'chose, en revanche le carton mobile est très beau et renvoie efficacement les voix), Herheim dans l'univers où il excelle (niveaux de lecture multiples, beauté plastique, lisibilité et direction d'acteurs permanente, même chez ceux qui se taisent), Castellucci plaisant visuellement sans chercher à construire un récit, Wernicke que je n'avais jamais vu aussi subtil (malgré les reprises en son absence, gestuelle très précise et riche)… chacun a fait ce qu'on attendait de lui. Seul Bieito m'a paru décevant eu égard à ses standards : peu d'usage de la profondeur de scène, personnages peu caractérisés, ensemble plutôt statique, et un peu comme la musique, grande uniformité des aspects visuels gris. Dans le genre sombre, très loin de la réussite de son Wozzeck magnétique, par exemple.

En revanche, beaucoup de choses très impressionnantes dans les petites salles : la finesse des dialogues se prolonge dans de délicats intermèdes musicaux a cappella chez Dominique Pasquet (nouveau collectif Les Sincères), la place laissée par Jean-Louis Benoît à la verve des meilleurs acteurs comiques du Français (Hecq, Raffaelli…), la vie apportée à un petit opéra comique par Pascal Neyron, l'adroite scénographie avec des moyens limités chez Damien Bigourdan, et l'inventivité épatante de cette fresque racontée à trois acteurs dans la Poupée de Chantelauze… autant de régals.

S'il fallait faire ici aussi une remise de prix, ce serait par la force des choses Herheim (virtuose au dernier degré) voire Wernicke (dans un ouvrage plus facile à servir, mais fin et plastique à la fois, c'est toujours un enchantement. Mais, avec les moyens très limités (ne serait-ce que l'espace de 10m², sans décor), sans doute encore plus impressionné par la justesse de Pasquet et l'inventivité débridée de Chantelauze.

Pour la chorégraphie, musique, sujet, chorégraphie (et même qualité des danseurs), tout plaide pour Piège de lumière, une des grandes musiques de Damase, pas du tout une pièce de circonstance aux ressorts un peu répétitifs (comme ses concertos par exemple), mais au contraire un univers riche et généreux, de plus extrêmement avenant pour tout public (sorte de Poulenc lyricisé). Sur un argument à la fois original et propice aux épanchements féeriques.



3h.  Statistiques : instrumentistes

Autre nouvelle catégorie. Où l'on recense tous les solistes entendus et distingue quelques chambristes particulièrement remarquables.

Pianistes :
François-Frédéric Guy (Beethoven 3 & 5), Lars Vogt (Brahms 2, puis Mozart), Denis Pascal (dans le Burleske de R. Strauss), Jean-Efflam Bavouzet (Rachmaninov 2), Romain David (Koechlin), Emmanuel Ax (Beethoven 2), Momo Kodama (Mozart 23), Maroussia Gentet (Dutilleux), Pierre Thibout (Tannhäuser), Nicolas Chevereau (Thaïs), Radu Lupu (Beethoven 3), Jean-Yves Thibaudet (Grieg).
→ Hors solistes internationaux : Pierre Thibout et Nicolas Chevereau (par accompagnateur régulier de L'Oiseleur des Longchamps) se produisaient comme élèves de la classe de direction de chant d'Erika Guiomar.

Violonistes :
Simon Ehnes (Britten), Stéphanie Moraly (Koechlin), Julian Rachlin (Prokofiev 2), Francesca Borrani (tutti Mendelssohn), Gil Shaham (Brahms), Joshua Bell (Tchaïkovski), Émeline Concé (Boutry, Ravel), Fanny Robilliard (Brahms, Quatuor avec piano n°3).
→ Hors solistes internationaux : Francesca Borrani est violon solo à l'Orchestre de Chambre d'Europe (COE), Émeline Concé est le premier violon du Quatuor Akilone (et aussi chef d'attaque des seconds violons à l'Orchestre Lamoureux), Fanny Robilliard est membre du Trio Karénine (avec piano), et occasionnellement de Musica Antiqua Köln et de l'ensemble baroque du Philharmonique de Berlin.

Altistes :
► Beaucoup d'excellents entendus (chefs de pupitre au Philharmonique de Radio-France pour Dutilleux, ou à la Tonhalle de Zürich pour Dvořák…), mais réellement mis en valeur, et de toute façon la plus passionnante, Sarah Chenaf (du Quatuor Zaïde) emporte la palme.

Violoncellistes :
Johannes Moser (Martinů 1 révisé), Sol Gabetta (Saint-Saëns 1), Gautier Capuçon (Dvořák 2).

Flûtistes :
Philippe Bernold (Mozart harpe), Emmanuel Pahud (Widmann), Vincent Lucas (Nielsen), Clara Andrada de la Calle (Bizet, Symphonie).
→ Hors solistes internationaux : Vincent Lucas est solo à l'Orchestre Paris (venu jouer le concerto de Nielsen), Clara Andrada de la Calle est solo à l'Orchestre de Chambre d'Europe.

Ondiste :
► Thomas Bloch (dans Thilloy).

Pour beaucoup d'entre eux  – sauf Capuçon (entendu dans la même œuvre il y a un peu plus de quinze ans !), Lupu (il y a un peu plus de dix ans), Shaham (idem) et Concé (trois fois rien que cette année !) –, c'était la première fois que je les entendais en salle.

Et à présent, les distinctions :

les putti d'incarnat Putti d'incarnat les putti d'incarnat

Meilleur pianiste de la saison, sont nommés :
Emmanuel Ax (Beethoven 2), Romain David (Koechlin), Pierre Thibout (Tannhäuser), Nicolas Chevereau (Thaïs), Radu Lupu (Beethoven 3), Jean-Yves Thibaudet (Grieg).
Attribué à : Pierre Thibout. « Rien qu'en plaquant les accords simples de la marche des pèlerins de Tannhäuser, on entendait la causalité de chaque accord, chacun pourvu d'un relief extraordinaire… on entendait Wagner composer ! » [notule]
Dauphin : Romain David. « il est facile d'être un peu décontenancé et mécanique dans les contrepoints du Koechlin, par exemple, mais ici on sentait au contraire (et plus encore lorsqu'on a l'habitude de l'écouter, le lire ou le jouer) un soin apporté à chaque section. Pas de camouflage à la pédale au piano, pas de régularité négligente, au contraire chaque phrasé semble avoir été patiemment pensé. » [notule]
♥ … au demeurant très impressionné par la présence sonore d'Emmanuel Ax, dans une œuvre que j'ai longtemps crue (à tort, je l'admets) mineure.

Meilleur violoniste de la saison, sont nommés :
Simon Ehnes (Britten), Stéphanie Moraly (Koechlin), Francesca Borrani (violon solo du COE, tutti Mendelssohn), Émeline Concé (Boutry, Ravel), Fanny Robilliard (Brahms, Quatuor avec piano n°3).
Attribué à : Stéphanie Moraly. « malgré l'acoustique très précise et impitoyable, une interprétation d'une précision extraordinaire (même chez les très bons, une telle justesse d'intonation chez un violoniste, sur un programme aussi long et technique, est rarissime) et travaillée dans ses moindres recoins [...] Stéphanie Moraly présentait très brièvement chaque pièce avec chaleur, aisance, un sens de l'anecdote, [...] un ton très direct [...] et une très jolie voix, souple et mélodieuse. » [notule]
Dauphine : Émeline Concé. « Le Quatuor Akilone s'exprime par un beau truchement : un son franc, bien étagé, physique, brillant mais sans rondeurs inutiles. Dans Ravel, on a l'impression de revenir aux sources d'un goût français du sans façons, loin des fondus d'orchestre et des épaisseurs confortables. Et, surtout : elles savent phraser ! La moindre articulation du discours est amenée avec naturel, et dans une pièce aussi souvent jouée et enregistrée, elles se frayent un chemin personnel sans le moindre effet appuyé. De la musique en barre, émouvante avant d'être (très) impressionnante. » [notules]
♥ … et je n'ai jamais vu konzertmeisterin aussi ardente et communicative que Borrani, ni soliste aussi aisé et musical (dans l'assommante choucroute virtuosissime et amélodique de Britten) qu'Ehnes, on aurait pu prolonger la distribution.

Meilleur altiste de la saison :
Louise Desjardins
(Quatuor Akilone) dans le Huitième Quatuor de Beethoven, Sarah Chenaf (Quatuor Zaïde) dans le Troisième Quatuor avec piano de Brahms, Jean-Baptiste Brunier (alto solo de l'OPRF) dans la Seconde Symphonie de Dutilleux.
Attribué à : Sarah Chenaf (membre du Quatuor Zaïde, également primé à Bordeaux). Impressionné par sa présence exceptionnelle dans des pièces de musique de chambre (Troisième Quatuor avec piano de Brahms, en particulier) où elle devrait être cachée milieu de l'harmonie, et où elle fait primer chaque détail avec un charisme rare dans ces parties.

Meilleur violoncelliste de la saison, sont nommés, sont nommés :
Johannes Moser (Martinů 1 révisé), Sol Gabetta (Saint-Saëns 1).
Attribué à : Johannes Moser. « … bien que complètement de dos, le son parvenait sans effort, parfaitement timbré (pas du tout ce côté élimé et râpeux fréquent dans le violoncelle concertant, sans être du gros son pour autant)… le tout culminant dans une sarabande de Bach (Première Suite), murmurée mais timbrée comme à pleine puissance, osant même les diminutions dans les reprises. Il pourrait paraître un excellent violoncelliste parmi d'autres, mais dans la salle, on s'aperçoit vraiment qu'il s'agit d'un interprète particulièrement exceptionnel. » [notule]
Dauphine : Sol Gabetta. En salle, le son un peu poussé ou geignard qu'on entend en retransmission disparaît complètement, et se projette glorieusement, avec assez bon goût d'ailleurs – même si l'on demeure très loin, tout de même, de la classe intersidérale et inaccessible de Moser.

Meilleur flûtiste de la saison, sont nommés :
Attribué à : Clara Andrada de la Calle. « meilleure flûte solo [du COE] de tous les temps : comment est-il possible de timbrer aussi rondement (et d'exprimer aussi bien) sur ce petit tube dont les plus grands tirent souvent des sons lourdement empreints de souffle ! » [notule]



3i.  Statistiques : chanteurs

Comme chaque année, beaucoup d'interprètes exceptionnels dont je ne peux pas forcément parler à chaque fois… Voici leurs noms.

Légende :
¶ Formidable comme d'habitude
Opinion améliorée par rapport à une précédente expérience
Première audition en salle

Sopranos :
Agathe Boudet (Port-Royal),
Cécile Madelin (Sangaride, Zemlinsky),
♪ Cécile Achille (Port-Royal),
Marie Perbost (Spanisches Liederspiel),
Julia Lezhneva (Almirena),
♪ Marie-Adeline Henry (Armide),
♪ Michaela Kaune (Werdenberg),
Erika Grimaldi (Requiem de Verdi),
Amber Wagner (Ariadne).

Mezzo-sopranos :
Eva Zaïcik (Rosina, Spanisches Liederspiel),
Niina Keitel (Lene),
Stephanie Houtzeel (Octavian),
Jennifer Johnson (Mahler 3).

Contre-ténors, falsettistes :
Bruno Le Levreur (Guédron),
Paul-Antoine Benos (Cid, Zemlinsky)

Ténors :
Paul Belmonte ? / Alexandre Cerveux ? (Alcide – divergence entre les programmes !)
Pablo García (Spanisches Liederspiel),
Oliver Vincent (Voces8),
Serge Goubioud (Guédron),
Kevin Connors (Tanzmeister dans Ariadne),
Jean-Noël Teyssier (Bastien dans Le Farfadet)
♪ Mathias Vidal (Persée, Cassandre),
♪ Fabien Hyon (Atys),
Andrew Staples (Serenade de Britten),
Francesco Demuro (le chanteur italien),
Michael Fabiano (Duca di Mantova),
Saimir Pirgu (Requiem de Verdi),
♪ Jonas Kaufmann (Bacchus, Damnation de Faust),
Brandon Jovanovich (Stolzing),
♪ John Graham-Hall (Aron).

Barytons :
♪ Marc Mauillon (Guédron, La Haine),
Nicolas Achten (berger de l'Orfeo),
Andreas Wolf (Argante),
Christian Immler,
♪ Jean-Baptiste Dumora (César de Bazan),
Steven Humes (Marke),
Gerald Finley (Sachs),
♪ Thomas Johannes Mayer (Moses).

Basses :
Dingle Yandell (Voces8),
Jean-Claude Sarragosse (Premier Ministre dans Bazan),
Yorck Felix Speer (Cuno),
Günther Groissböck (Pogner),
Peter Rose (Ochs).

… les voilà réunis pour une petite remise de prix.


les putti d'incarnat Putti d'incarnat les putti d'incarnat

Meilleur soprano (léger) de la saison, sont nommées :
Agathe Boudet (Port-Royal), Cécile Madelin (Sangaride, Zemlinsky), Marie Perbost (Spanisches Liederspiel), Julia Lezhneva (Almirena).
Attribué à : Cécile Madelin.
Dauphine : Marie Perbost.

Meilleur soprano (grand format) de la saison, sont nommées :
Véronique
Gens (Béatrix, Marie), Marie-Adeline Henry (Armide), Michaela Kaune (Werdenberg), Amber Wagner (Ariadne).
Attribué à : Véronique Gens.
Dauphines : Amber Wagner, Marie-Adeline Henry.

Meilleur mezzo-soprano de la saison, sont nommées :
Eva Zaïcik (Rosina, Spanisches Liederspiel), Niina Keitel (Lene), Stephanie Houtzeel (Octavian), Jennifer Johnson (Mahler 3).
Attribué à : Eva Zaïcik.
Dauphine : Jennifer Johnson.

Meilleur falsettiste de la saison :
Attribué à : Paul-Antoine Benos (Cid, Zemlinsky).
Dauphin : Bruno Le Levreur (Guédron).

Meilleur ténor (léger) de la saison, sont nommés :

Oliver Vincent (Voces8), Serge Goubioud (Guédron), Mathias Vidal (Persée, Cassandre), Fabien Hyon (Atys), Andrew Staples (Serenade de Britten)
Attribué à : Mathias Vidal (pour Persée en particulier).
Dauphin : Andrew Staples.

Meilleur ténor (grand format) de la saison, sont nommés :
Saimir Pirgu (Requiem de Verdi), Michael Fabiano (Duca di Mantova)Jonas Kaufmann (Bacchus, Damnation de Faust), Brandon Jovanovich (Stolzing), John Graham-Hall (Aron).
Attribué à : Saimir Pirgu.
Dauphin : Brandon Jovanovich.

Meilleur baryton (lyrique) de la saison, sont nommés :
Marc Mauillon (Guédron, La Haine), Nicolas Achten (berger de l'Orfeo), Andreas Wolf (Argante), Jean-Baptiste Dumora (César de Bazan).
Attribué à : Marc Mauillon.
Dauphins : Andreas Wolf.

Meilleur baryton-basse de la saison, sont nommés :
Steven Humes (Marke), Gerald Finley (Sachs), Thomas Johannes Mayer (Moses).
Attribué à : Steven Humes.
Dauphin : Gerald Finley.

Meilleure basse chantante de la saison :
Attribué à : Dingle Yandell (Voces8).

Meilleure basse noble de la saison, sont nommés :
Jean-Claude Sarragosse (Premier Ministre dans Bazan), Yorck Felix Speer (Cuno), Günther Groissböck (Pogner), Peter Rose (Ochs).
Attribué à : Yorck Felix Speer.
Dauphin : Günther Groissböck.

Je devrais faire la même chose pour les danseurs de ballet, mais j'en ai finalement peu vu, et surtout aimé les petits jeunes de l'Opéra (dans Les Forains de Petit et Piège de lumière de Taras), et l'English National Ballet (Rojo forever)…




4. Ressenti

Que souligner, hors l'extrême variété et surabondance de l'offre, très loin d'être épuisée par ce tour d'horizon qui ne reflète que ma pratique personnelle de l'année, le concert n'étant même pas mon premier poste en dépense de temps…

Toujours énormément de concerts gratuits (notamment dans les conservatoires, les églises…), originaux, et de haute volée… on peut se faire une saison complète à l'œil, sans rien rogner sur la qualité. Certes, on ne verra pas les orchestres internationaux ni les solistes à la mode, et le niveau individuel de virtuosité sera peut-être (pas systématiquement, loin s'en faut !) moindre. Mais ce sera grand tout de même – car Paris est généreuse.

Alors, peut-être souligner la présence de quelques (beaucoup de) superbes raretés, comme les airs de cour de Guédron, le Berlin de Meisel, la Première Symphonie de Walton (symphonie de l'année ?), la Sonate avec violon de Koechlin, etc.

Remarqué une fois de plus que le répertoire symphonique français, qui m'exalte tellement au disque, me touche moins fort au concert, à cause de sa forme moins discursive (plus rhapsodique, ou du moins plus contemplative) que les grands monuments germaniques équivalents. Chausson (Soir de fête) et Debussy (Printemps) en l'occurrence, face à Bruckner – que je n'aurais pas dit du même tonnel…

La grande surprise des productions lyriques ne provenait pas de Bru Zane cette saison (contrairement au Cinq-Mars fulgurant de Gounod, possiblement son meilleur opéra) : il me semble que la politique de la maison se tourne de plus en plus vers la documentation de ce qui avait du succès au XIXe (David, Joncières…) plus que de ce qui peut marquer notre propre époque. Travail précieux de musicologie et d'historiographie, mais moins stimulant pour le mélomane : Dante de Godard et La Jacquerie Lalo & Coquard n'étaient pas dépourvus de qualités ponctuelles, mais leur inégalité et la faiblesse extrême de leurs livrets expliquent très bien qu'ils n'aient pas été repris au delà de leur propre période. Patrie ! de Paladilhe, La Dame de Monsoreau de Salvayre ou Hernani de Hirchmann, pour se limiter à des titres souvent cités en ces pages (pour le reste, il y en a quelques tombereaux ).
        Côté opéra, le grand coup fut frappé, dans le secteur même d'activité de Bru Zane, par Les Frivolités Parisiennes, remarquable compagnie qui emploie les plus fins musiciens (ainsi que d'excellents chefs, chanteurs et metteurs en scène) dans des productions scéniques complètes ; bien que peu subventionnée, elle se produit dans d'adorables théâtres (cette saison, Trévise et Porte Saint-Martin…) avec une qualité de finition épatante et des tarifs très abordables. Pour de l'opéra de veine comique, nul besoin de se forcer à écouter pour la vingtième fois le Barbier de Séville à 50 mètres des chanteurs pour 150€, on a ce qu'il vous faut. Don César de Bazan de Massenet, qu'on avait cru perdu, se révèle, sinon le chef-d'œuvre de son auteur (l'ensemble reste sur un ton en général aimable plus qu'audacieux), une œuvre d'une cohérence et d'une séduction assez imparables.

L'année Louis XIV n'a pas permis au CMBV de proposer des explorations majeures en tragédie en musique (plutôt centré cette année sur les célébrations religieuses, programme au demeurant très intéressant.). Cette année, la nouveauté majeure en tragédie lyrique fut le Persée de LULLY dans sa révision massive à un siècle de distance (1682-1770) par Dauvergne, Bury & Francœur, à l'occasion du mariage de Marie-Antoinette ; une partition très différente, très surprenante, mais pas sans charme, grisante par endroit, qui a cependant mis en fureur ceux (je ne dénonce personne) qui espéraient entendre du LULLY et ont récolté de la déclamation post-gluckiste (malgré la date, ça tire déjà pas mal vers Gossec et Méhul, étrangement) avec des ariettes et des fusées orchestrales post-ramistes.

Seule découverte réellement désappointante, Garayev et Thilloy dans un concert coloré d'horizons (Nocturnes de Debussy, Pulcinella de Stravinski, Les Biches de Poulenc) de l'Orchestre Lamoureux (en très petite forme) ; le premier d'un orientalisme insipide, quoique pas déplaisant ; le second, tiré d'une musique de film, brille au concert par une vacuité qui ferait passer les Glassworks pour L'Art de la Fugue après duplications en miroir.
Je ne reviens pas sur ma souffrance Migot, récemment partagée avec force jérémiades hyperboliques.



Trois soirées auront probablement marqué mon expérience de mélomane et de spectateur : la Deuxième Symphonie de Tchaïkovski par Mazzola, le Rosenkavalier par Wernicke & Jordan, le Berlin de Meisel (dans un arrangement sans cordes) par Strobel et avec projection du film – mais la musique est sublime sans, malgré son caractère figuratif. Des sommets comme on n'en croise pas souvent, même à l'échelle de la démentielle offre francilienne.

Et puis quantité de spectacles extraordinaires pour une raison ou une autre (œuvres, interprètes, ambiance générale), et qui n'entraient pas forcément dans l'une ou l'autre catégorie des récompenses : la Poupée sanglante, Armide par Rousset, Walton 1 par Colionne, Sibelius 5 par Järvi, Bruckner 5 par Järvi, Mahler 3 par Järvi, Bazan, Koechlin par Moraly & R. David, Brahms et Fauré par le Trio Karénine + S. Chenaf, Guédron & Friends, Liederpiel à Soubise, récital LULLY au CNSM, Sérénade de Britten par Staples, Shadows of Time couplées avec les Litanies de Poulenc, Dvořák 7 par Dohnányi, Tchaïkovski 1 par Gardner, Requiem de Verdi par Noseda, Meistersinger par Herheim & Jordan, Akilone SQ dans Beethoven 8, Akilone SQ dans Ravel & Boutry, Bruckner 9 par Inbal, Transcriptions des futurs chefs de chant du CNSM, Les Sincères de Marivaux avec intermèdes a cappella, le Farfadet d'Adam à Trévise, le Persée de 1770, The Artist de Bource en concert, I Rusteghi par les comédiens-français, les quatuors avec piano de Marx, Voces8, Piège de lumière de Damase, hommage à Boulez, extraits des Ariane de Marais et de Mouret, Martinů par Hrůša, Beethoven 2 par Koopman…

À peu près tout le reste était peut-être un peu moins excessivement génial, mais quand même tout à fait épatant (très bien choisi sans doute, mais au sein d'une offre qui permet de faire 100 concerts épatants tout en ratant beaucoup d'autres grandes soirées…) : Olympie de Spontini, intégrale Mendelssohn du COE, Franck par la Maîtrise de Radio-France, Quatuors de Haensel-Auber-Pleyel, Sibelius 3 par Järvi, Sibelius 4 par Järvi, Dollé-Visée, Trio avec piano 1 de Brahms avec Cartier-Bresson, L'Orfeo par Tubéry, inauguration de l'orgue de la Philharmonie, cantates de Liszt et Gounod, COE & Pappano, airs de cour espagnols, la Création de Haydn en français, le Prince de Bois par Zinman, Rinaldo par Il Pomo d'Oro, concert Dutilleux par Ryan, l'Oiseau de feu par Gergiev, Credo de MacMillan, le Corsaire avec Tamara Rojo, Rigoletto par Guth-Luisotti, Les Animaux Modèles (et Printemps !), le Concerto de Grieg par la Tonhalle, le Freischütz par Hengelbrock…

Dans les semi-réussites, peut-être Schubert 5 par Norrington (joué de façon aussi haydnienne, exalte surtout la simplicité et les répétitions), Bach et Mendelssohn par l'Orchestre de Paris (problème de style malgré Hengelbrock, ça ne se fait pas en une nuit), le Tristan d'Audi (musicalement superbe, mais visuellement bâclé un à point qui m'avait presque agacé), Mahler 3 par Cleveland (problème basique de gestion de la tension des phrasés tuilés),  Petibon donc la voix s'est beaucoup arrondie pour chanter LULLY et ses semblables… mais de très bonnes soirées tout de même ! 

Un peu plus réservé sur Passion de Sondheim (vraiment pas très grand, et la mise en scène très grise et conventionnelle d'Ardant ne comblait pas les manques), Santiago de Murcia pour guitare baroque et harpe (problème d'instruments surtout, ils sonnaient mal… dans ce répertoire, si on n'a pas de bons crincrins…). Assez perdu, même en étant familier du sujet et des œuvres jouées (et en ayant lu le programme de salle), par Notre Falstaff au CNSM. Comme si j'assistais à un happening de regietheater avec des moyens amateurs ; sans être déplaisant, déstabilisant. Trouvé le temps très long dans le Concerto pour violoncelle de John Williams au CRR (sans grand intérêt), et puis c'était l'orchestre des étudiants, pas encore aguerri). Mais dans ces deux cas, ce sont des concerts gratuits ouverts au public pour permettre l'entraînement des étudiants… c'est en général assez superlatif, mais il n'y a pas d'obligation de résultat, on est invité à voir les travaux en cours et on aurait mauvaise grâce à le leurreprocher !

Ce que je n'ai vraiment pas aimé ?  L'examen de fin d'année d'une étudiante de master au CNSM (j'avais dit que je me demandais à quoi servait de bâtir une voix d'opéra épaisse, moche et inintelligible si c'est pour ne pas se faire entendre au bout d'une salle de 100m²), parce qu'il dit quelque chose des techniques (à mon avis dévoyées) à la mode dans l'enseignement et la pratique du chant. Et surtout, bien sûr, ma souffrance intense en compagnie de Georges Migot. Deux entreprises au demeurant sympathiques (examen ouvert au public, mise en valeur d'un compositeur totalement négligé), on voit à quel point il y avait peu matière à se plaindre de cette très vaste saison de concerts.



Le moment est-il venu de se quitter en distinguant les plus beaux spectacles de l'année ?  J'ai été le premier surpris du résultat.


les putti d'incarnat Putti d'incarnat les putti d'incarnat

Meilleur opéra en version scénique, sont nommés :
Le Farfadet (Frivolités Parisiennes), Don César de Bazan (Frivolités Parisiennes), Die Meistersinger von Nürnberg (Herheim-Ph.Jordan), Der Rosenkavalier (Wernicke-Ph.Jordan)
Attribué à : Der Rosenkavalier.
[La saison passée : Rusalka par Carsen-Hrůša.]

Meilleur opéra en version de concert, sont nommés :
Armide (Talens Lyriques), Persée 1770 (Concert Spirituel), Olympie (Cercle de l'Harmonie)
♥♥ Attribué à : Armide.
[La saison passée : Cinq-Mars par Schirmer.]

Meilleur concert symphonique, sont nommés :
Bruckner 5 (OP-Järvi), Bruckner 9 (OPRF-Inbal), Tchaïkovski 1 (ONF-Gardner), Clyne & Tchaïkovski 2 (ONDIF-Mazzola), Mahler 3 (OP-Järvi), Sibelius 5 (OP-Järvi), Walton 1 (Colonne-Petitgirard), Suk-Martinů (OPRF-Hrůša), Poulenc-Dutilleux (OPRF-Franck)…
♥♥ Attribué à : Clyne & Tchaïkovski 2.
[La saison passée : Tchaïkovski 5 par P. Järvi.]

Meilleur concert chambriste, sont nommés :
Quatuor Pleyel (Haensel, Auber, Pleyel), Quatuor Akilone & Williencourt (Beethoven 8, Quintette Brahms), Trio Karénine & S.Chenaf (Brahms 3, Fauré 1), Transcriptions de la classe de direction de chant du CNSM, Quatuors avec piano de Marx, Quatuor Akilone (Schubert 13, Ravel, Boutry), S.Moraly-R.David (Hahn, Koechlin, Ravel, Emmanuel).
♥♥
Attribué à : S.Moraly-R.David (Hahn, Koechlin, Ravel, Emmanuel).
Dauphin : Trio Karénine + S. Chenaf ; Transcriptions CNSM. Au demeurant, les Akilone ont livré un deuxième Razoumovski de Beethoven et un Ravel qui n'ont guère d'équivalents ! (en revanche bizarrement à la peine dans le Quintette de Brahms)
[La saison passée : ECMA, avec notamment les quatuors Akilone, Hanson et Arod.]

Meilleur concert de lied ou mélodie, sont nommés :
Spanisches Liederspiel de Schumann (Perbost, Zaïcik, García, Reschke…), Serenade pour ténor, cor et cordes de Britten (Staples, OCP, Boyd).
♥♥
Attribué à : Spanisches Liederspiel. Au moins du niveau de l'assemblage Röschmann-Kirchschlager-Bostridge-Quasthoff-Deutsch-Drake (tournée européenne de 2009), c'est assez en dire. La qualité stylistique et expressive de ces jeunes chanteurs non-natifs est très impressionnante, en plus de la beauté des voix (les deux demoiselles en particulier).
Dauphin : Serenade de Britten. Outre que c'est magnifique en soi, le remplacement de l'excellent Toby Spence par Andrew Staples a permis de prendre la mesure d'un véritable miracle – la maîtrise absolue de l'instrument comme des intentions, et une variété de coloris immense. Il chante énormément sur les plus grandes scènes (il sera à nouveau là pour les Scènes de Faust à la Philharmonie, une partie qu'il a déjà beaucoup éprouvée, à Berlin, à Munich…), mais il n'a étrangement pas atteint la notoriété d'autres chanteurs de ce registre (rôles de caractère et oratorio romantique & XXe, disons, un lyrique assez léger – mais la voix est extraordinairement projetée, il pourrait tout aussi bien chanter des héros romantiques, Roméo au minimum).
[La saison passée : Elsa Dreisig – extraits du concert dans cette notule.]

Meilleur concert baroque, sont nommés :
Guédron & Friends (Dumestre), récital LULLY (CNSM, Haïm), Port-Royal (Vaisseau d'or, Robidoux), figures d'Ariane (Zaïs), Dollé-Visée (R. Pharo, Th. Roussel), airs de cour espagnols (Kusa, Egüez)
♥♥ Attribué à : récital LULLY. De jeunes chanteurs dont certains sont de très grandes promesses pour le répertoire (Cécile Madelin, Paul-Antoine Benos), et d'autres des chanteurs qui ne se spécialiseront peut-être pas (Fabien Hyon) mais qui forcent l'admiration par leurs qualités propres. Concert fondé sur des duos et ensembles qui ne sont pas tous des tubes (la dispute du IV d'Atys !), et accompagné avec un feu dansant incroyable par les élèves du CNSM. Le contraste avec le (plaisant mais) poussif récital von Otter-Naouri dirigé par la même Haïm avec son ensemble était d'autant plus saisissant. [Au passage, ce sont les seuls récitals d'opéra de l'année avec celui de Zaïs, vraiment le seul répertoire qui est représenté dans cette catégorie peu noble, à chaque saison de CSS.]
Dauphin : Guédron & Friends. Dans une certaine mesure plus proche de la chanson (enfin, à plusieurs parties, donc madrigalisée…), avec des ostinati irrésistibles et des textes débordant d'une roborative verdeur. Et quels chanteurs (Le Levreur, Goubioud, Mauillon, meilleurs qu'ils ne l'ont jamais étés), attelés avec l'étrange (et fascinante) Lefilliâtre.
[La saison passée : Vespri de Rubino en collaboration CNSM-Palerme.]

Théâtre, sont nommés :
Les Sincères de Marivaux, Les Rustres de Goldoni, John Gabriel Borkman d'Ibsen, La Poupée sanglante de Chantelauze & Bailly (d'après Leroux).
♥♥ Attribué à : La Poupée sanglante. Inventif et jubilatoire. En plus mis en musique.
Dauphin : Les Sincères.
[La saison passée : La Mort de Tintagiles de Maeterlinck mise en scène par Podalydès et en musique avec une sélection et des improvisations de Coin. Complètement terrifiant et tellement poétique.]

Œuvre en première mondiale (re-création), sont présents :
La Création de Haydn dans la version de la création française, La Jacquerie de Lalo & Coquard, Dante de Godard, Don César de Bazan de Massenet, Quatuors avec piano de Joseph Marx, Musique de chambre de Migot.
♥♥ Attribué à : Don César de Bazan. Vraie bonne surprise.
Dauphin : Quatuors avec piano de Joseph Marx (étudiants du CNSM).
Les autres n'étaient pas grandioses (et Migot carrément pénible).
[La saison passée : Cinq-Mars de Gounod.]

Compositeur vivant, sont présents :
Aboulker (Maîtrise de Radio-France), Widmann (Orchestre de Paris), Burgan (Orchestre Colonne), Clyne (Orchestre National d'Île-de-France). [Boulez, Damase et Dutilleux y échappent de peu, mais leurs œuvres présentées datent souvent d'un demi-siècle de toute façon…]
♥♥ Attribué à : Anna Clyne. Très belle utilisation de l'orchestre pour une écriture très accessible et avenante (ce n'est pas du néo- ni du tonal définissable pour autant).
    Boule de suif d'Aboulker est un peu long et recycle tout le temps les mêmes (bons) effets, par ailleurs déjà entendus chez elle.
    La Suite pour flûte et orchestre de Widmann est d'un modernisme de moyen terme bon teint, parfait pour avoir l'air d'aujourd'hui sans rien oser… d'ailleurs, je n'ai pas trouvé très honnête de finir sur une pièce assez jubilatoire (et bissée !) qui n'avait rien à voir avec le reste et citait la Badinerie de Bach (et Tristan !), façon un peu vulgaire d'attirer les applaudissements Cela dit, c'était le seul bon moment de la pièce, j'étais ravi que ce soit bissé, mais triompher en pillant Bach dans les cinq dernières minutes me laisse un peu interdit sur la philosophie du compositeur – je tire à la ligne pendant un quart, et puis j'emprunte un tube pour faire un joli final brillant. Il fait une très belle carrière de clarinettiste, pourquoi s'imposer ça ?
    Mais c'est toujours mieux que Le Lac de Burgan qui met en musique le poème de Lamartine – dans des atmosphères indistinctes et une prosodie aberrante.
    Par ailleurs, les moments Damase-Dutilleux-Boulez ont été excellents, tout n'est pas perdu pour les gens du XXIe siècle.
[La saison passée : Au monde de Boesmans.]




5. Et puis

En finissant, je m'aperçois que le parti de distinguer individuellement entre en contradiction avec la recherche de lignes de force, mais après tout, comme il s'agit d'une bilan purement personnel, limité à ce que j'ai vu, autant conserver les propos généraux pour les annonces de saison.
    J'espère surtout que ce contribuera à mettre en lumière des lieux et des artistes particulièrement intéressants.

Pour ceux qui sortent parfois avec le sentiment d'à-quoi-bon en quittant un concert prestigieux où l'on n'a pas été très concerné (voire agacé), un concert dans une petite salle avec des interprètes enthousiaste est un remède assez irrésistible – l'émotion n'est pas du tout de même nature qu'avec les solistes les plus professionnalisés au milieu d'une grande salle.
        Indépendamment de l'engagement (qui peut s'émousser, ou du moins s'automatiser, chez ceux qui ont passé quarante ans à recueillir des triomphes en enchaînant les plus grandes salles) et de la dimension des lieux (sentir le grain des timbres sur sa peau est quelque chose de très précieux, qui ne passe pas la rampe dans les vastes ensembles architecturaux), il existe, me semble-tèil, une plus-value psychologique immédiate. Dans un concert prestigieux, on jauge toujours les artistes, on attend que ce soit au niveau (a fortiori si on a payé cher, raison pour laquelle je m'y refuse), que leur travail nous séduise, voire nous subjugue ; dans le concert intime, on regarde au contraire d'un œil bienveillant des artistes en devenir ou restés discrets, et qui malgré l'absence de regards officiels susceptibles de promouvoir leur carrière, partagent avec nous un moment privilégié. Dans le premier cas, on sent la pression de l'événement, et qu'on le veuille ou non, on le regarde comme tel, on se doit d'une certaine façon de déterminer avant l'entracte si c'était bon ; dans le second, on se sent au contraire en connivence, récipiendaires d'un secret, partenaires d'une passion commune.
        Pardon de le dire ainsi, mais les mélomanes sont comme les poules de batteries auxquelles, si l'on donne trop d'espace (mais pas beaucoup pour autant, ni de plein air), développent des instincts cannibales : le lieu et le statut du concert ont, très involontairement, une influence mécanique sur la perception des choses. J'étais émerveillé d'entendre la Première Symphonie de Walton en concert, avec une exécution qui m'aurait sans doute mis en fureur (ou plus vraisemblablement fait lever un demi-sourcil) s'il s'était agi d'un Beethoven à la Philharmonie, mais qui m'a ravi dans ce contexte, parce qu'elle apportait tout l'élan et la lisibilité nécessaires à cette musique (et vu sa difficulté et sa rare pratique, on n'allait pas mégoter sur la beauté des timbres ou les détails de mise en place)…

Cette saison (comme la précédente), les repérages de concerts insolites ou rares (plutôt en Île-de-France, puisque c'est issu de recherches initialement pour ma pomme) seront plutôt proposés mensuellement qu'annuellement, la formule a paraît-il semblé plus efficace.

Nous songeons à louer une salle pour la cérémonie de l'an prochain, avec retransmission en mondiovision et partenariat avec Medici.tv. Kim Jong-eun a déjà proposé de prêter le Salon Kim Il-sung de l'aile Ouest du Mémorial du Juche, mais nous voudrions accueillir un public nombreux et cherchons une adresse un peu moins enclavée en transports (on travaille le lendemain). Toute proposition sérieuse acceptée.

samedi 16 avril 2016

Le Persée de 1770 : après les représentations


… et avant le disque (publication d'ici un an). Comme promis, voici un petit bilan de la partition après écoute, de la soirée aussi, avec quelques questions sur l'état du chant baroque français aujourd'hui – et même des propositions de solutions. The notula to read, en somme.

Pour ceux qui auraient manqué la première partie, elle se trouve ; j'y ai adjont, pour plus de commodité, cette seconde partie.



4. Après la représentation : état de la partition

Quelques compléments à l'issue du concert du Théâtre des Champs-Élysées.

Les coupures opérées par Joliveau accentuent le schématisme de l'action et des psychologies, dans un livret qui était déjà extrêmement cursif chez Quinault – ce sont encore Phinée (le rival) et Méduse qui ont le plus d'épaisseur, et le raccourcissement (mêlé d'interventions de circonstance et de galanteries pastorales ou virtuoses tout à fait stéréotypées pour 1770) ne font qu'accentuer ces manques. Ce n'est pas de côté-là qu'il faut chercher le grand frisson.

¶ Les LULLYstes ont pu constater avec effroi, pour ne pas dire avec colère, que le « Persée de Lully version 1770 » ne contenait finalement pas grand'chose de LULLY : les récitatifs (certes, c'est le plus important), quelques airs (arioso de Céphée, scène de Méduse) réorchestrés (plus de cordes, et beaucoup de doublures de vents pour épaissir la pâte, cors notamment), et telle ou telle portion (chœurs de l'acte IV-V, là encore renforcés orchestralement par l'ajout de fusées de violon). Mais, globalement, les parties instrumentales (même dans les accompagnements des parties originales, hors récitatifs) sont toutes neuves, et l'essentiel des airs et ensembles sont aussi remis au goût du jour. Il y surnage certes un peu de LULLY (l'acte III, qui contient les hits de Méduse et Mercure, a été assez peu touché contrairement aux autres), mais l'opéra sonne comme un opéra des années 1770 à 1800 (assez neuf pour 1770, même).
Le parallèle le plus honnête serait sans doute avec le Thésée de Gossec, qui en partage bien des recettes musicales (dont le spectaculaire traitement des chœurs de combat hors scène).
On voit bien le problème de vendre un spectacle « Persée de Dauvergne-F.Rebel-Bury avec des bouts de Lully réorchestrés », surtout avec notre réflexe de valoriser la singularité de l'auteur, mais mettre en avant le nom de LULLY était très trompeur, et avait d'autant plus de quoi désarçonner les auditeurs qui n'y auraient pas prêté garde… qu'il s'agit d'une esthétique d'un siècle postérieure !

L'effectif est déjà celui du Rameau tardif (Boréades) ou de la tragédie lyrique « réformée » d'après Gluck : adjonction de 2 clarinettes et de 2 cors à la nomenclature (2 traversos, 2 hautbois, 2 bassons). Le nombre de cordes sur scène est plutôt important (14 violons, 6 altos, 6 violoncelles, 2 contrebasses), mais c'était aussi, en réalité, le type de nombres présents du temps de LULLY (voire supérieurs) – même si on le joue désormais avec des proportions plus réduites (à ma grande satisfaction). Le contraste de ce point de vue relève donc de l'illusion d'optique.

¶ Le continuo est en train de disparaître : le clavecin accompagne bien sûr les récitatifs de la main de LULLY (avec un violoncelle), mais ne double pas tout le temps l'orchestre. Bien sûr, sa présence n'est jamais indiquée explicitement sur les portées, mais c'est bel et bien l'époque où il disparaît progressivement : il peut rester en fond (beaucoup d'ensembles spécialistes adoptent désormais, à l'exemple de Jacobs, le pianoforte à la place, pour raffermir le son d'orchestre), mais n'a plus du tout la même fonction d'assise, considérant les carrures beaucoup plus régulières (batteries de cordes fréquentes, c'est-à-dire le même rythme égal répété en accords). De fait, il devient facultatif, et chez Haydn ou Gossec, il n'est plus véritablement nécessaire – même s'il peut encore figurer, plus ou moins à la fantaisie du compositeur ou des interprètes, pour ce que j'en vois dans les disques (je n'ai pas creusé les contours exacts de l'historicité de cette pratique).

¶ Musicalement, le contraste est plus frappant à l'intérieur des actes (et pas seulement entre les parties originales et les parties récrites) qu'entre eux : le style disparate qu'exposent Dauvergne, F. Rebel et Bury est assez comparable d'un acte à l'autre.
Les danses, dont plus aucune n'est de LULLY, ont un aspect martial et tempêtueux assez étonnant, qui ne laissent quasiment pas de part à la galanterie ; un air de Persée et la grande tirade de Vénus tirent un peu plus sur la pastorale pour l'un, l'air galant pour l'autre (malgré son propos solennel, celui de célébrer les commanditaires !), mais globalement, on se situe plutôt du côté des plus mâles portions du Grétry de Céphale et Procris ou du Gossec du Triomphe de la République. Elles font au demeurant partie des plus réussies que j'aie entendues dans ce style – je crois bien que j'aime davantage ça que les belles danses un peu plus décoratives de LULLY (magnifiques, ne me faites pas dire autre chose).

¶ Au chapitre des étrangetés réussies, les parties autonomes et thématiques des violoncelles en certaines occasions (jusqu'ici, le baroque les réservait à l'assise de la ligne de basse, fût-elle vive et marquante) ; ou bien cet air vocalisant final chanté par Persée comme un héros ramiste… mais accompagné d'un tapis choral qui évoque plutôt les airs de basse des deux Passions de Bach…

¶ En fin de compte, l'aspect général ressemble à du Gossec (oui, vraiment proche de Thésée, mais avec des mélodies plus inspirées et un sens du drame plus exacerbé), où persistent les beaux frottements harmoniques de Rameau (le milieu du XVIIIe siècle étant plus audacieux harmoniquement, en France, que la période qui a suivi). Un très beau mélange, que j'ai trouvé pour ma part tout à fait enthousiasmant : plutôt qu'à un LULLY du rang, on a droit à une partition de premier plan de la « quatrième école » de tragédie en musique, qui combine, de mon point de vue, tous les avantages de la période : drame exacerbé (façon Danaïdes de Salieri), danses très franches et roboratives (façon Triomphe de la République de Gossec), éclats tempêtueux saisissants (façon Sémiramis de Catel), harmonie ramiste (façon Boréades, un langage qui n'est plus de mise dès Gluck), des ariettes virtuoses étourdissantes (là aussi, encore un peu ramistes, façon final de Pygmalion), mais sans les longueurs galantes (ni les fadeurs compassées dans les moments dramatiques) qui font souvent pâlir les opéras de cette période face à LULLY. Évidemment, la prosodie n'est pas du même niveau, mais ce demeure un opéra remarquablement réussi.

J'ai sans doute eu l'air un peu sérieux en décrivant ses écarts par rapport à l'original, mais le résultat, même en révérant LULLY, était particulièrement réjouissant, peut-être davantage même que l'original – car plus concis, moins prévisible aussi, considérant sa nature hétéroclite.



5. Après la représentation : quels moyens aujourd'hui pour jouer la tragédie en musique ?


Bien sûr, avant toute chose, il faut souligner combien l'offre, qui était à peu près nulle (en quantité comme en qualité) il y a 30 ans, est aujourd'hui généreuse, les nouveautés continuant à pleuvoir (même si ses anciens défricheurs émérites comme Herreweghe, Christie, Gardiner, Minkowski… sont partis enregistrer Brahms ou rejouer à l'infini leurs propres standards  – Niquet le fait aussi, mais en supplément et non exclusivement).
Chose particulièrement significative, les exhumations sont généralement adossées à des financements discographiques qui permettent de documenter le répertoire pour ceux qui n'habitent pas à côté de la salle de concert.

En matière d'interprétation aussi, on a beaucoup exploré, et les continuistes capables de réaliser des contrechants riches et adaptés à chaque caractère sont désormais légion. Néanmoins, je remarque quelques réserves récurrentes, qui étaient rares il y a 15 ans.

Bref, il y a tout lieu de se féliciter de la situation ; j'ai souvent écrit ici que nous vivons un âge d'or pour le lied, jamais aussi bien chanté (et notamment sous l'influence des recherches baroqueuses), de façon aussi précise et expressive (la comparaison avec les grands diseurs d'autrefois est même assez cruelle, tant leur rigidité éclate, quelle que soit la beauté de la voix ou la science rhétorique). On pourrait presque être tenté de dire la même chose pour le baroque… et pourtant, par rapport aux deux premières vagues de découvertes dans le répertoire français (de la fin des années 80 au début des années 2000), quelque chose manque.

Mercredi soir, donc, nous disposions d'un des meilleurs ensembles spécialistes et du meilleur du chant francophone pour servir l'œuvre.

¶ Le Concert Spirituel était particulièrement en forme : son empreinte sonore caractéristique, plus ronde que d'ordinaire chez les instruments d'époque, était aussi caractérisée ce soir-là par une homogénéité que je n'avais pas toujours noté en concert (de petits trous ou des inégalités ponctuelles dans le spectre sonore) ; le niveau semble avoir (encore) monté, et en plus de conserver ses qualités, il sonne avec autant d'assurance que dans ses meilleurs studios. La direction d'Hervé Niquet en tire chaleur et engagement constants, c'est formidable, et de ce point de vue, nul doute, instrumentalement ce répertoire n'a jamais été aussi bien servi qu'aujourd'hui.

Mathias Vidal est le plus grand chanteur francophone actuel chez les Messieurs (je suppose que chez les dames, l'honneur reviendrait à Anne-Catherine Gillet), et le confirme encore : le grain de la voix n'a pas la pureté des chanteurs les plus célébrés, mais c'est pour permettre une franchise des mots et une vérité prosodique extraordinaires (à l'inverse des voix parfaites qui s'obtiennent par un reculement des sons et un nivellement des voyelles), une éloquence, une urgence de tous les instants. Non seulement le texte est toujours très exactement articulé, mais il est aussi en permanence appuyé avec justesse, et pour couronner le tout ardemment incarné – trois qualités très rarement réunies, et à peu près jamais à ce degré, chez un même interprète. (Car il est possible d'avoir les bons appuis avec un texte peu clair ou des apertures fausses, ou en de disposer de tout cela sans en faire un usage expressif particulier, comme les grands anciens des années 50…)
Son principal défaut était finalement que la voix sonnait un brin étroite, limitée en volume. Ce n'est plus du tout le cas, et comme si la bride avait lâché, Vidal tourne le potentiomètre à volonté lorsque l'expression le requiert, dominant ses partenaires et l'orchestre. J'attends avec impatience son Parsifal dans la traduction française de Gunsbourg.


Le contraste avec le reste de la distribution est d'autant plus spectaculaire. Elle est loin d'être mauvaise, mais comment se peut-il que le français soit aussi peu intelligible chez des spécialistes francophones de format léger ?  Ce seraient des wagnériens hongrois, je ne dis pas, mais en l'occurrence…

Deux grandes catégories dans cette distribution :

¶ Ceux qui ont les atouts idéaux de leurs rôles mais ne sont manifestement pas sollicités par le chef sur la question de la déclamation.
Hélène Guilmette, favorise davantage la netteté légère de son timbre que l'ampleur, la rondeur et le moelleux (propre aux francophones américains) qu'elle peut manifester autre part, et se coule parfaitement dans le rôle. Mais les phrasés ne sont pas réellement déclamés, simplement joliment chantés, alors qu'elle est une grande mélodiste par ailleurs ; il n'aurait pas fallu lui en demander beaucoup pour qu'elle fasse quelque chose de plus éloquent d'Andromède !
Jean Teitgen (Céphée, le père d'Andromède) a déjà fait frémir de terreur les amateurs du genre, en Zoroastre de Pyrame et surtout en Amisodar de Bellérophon ; pourquoi, dans ce cas, se contente-t-il ici de chanter (de sa voix de basse d'une densité et d'une portée extraordinaires) tout legato, en belles lignes égales, quand il sait si bien mettre les mots en valeur dans d'autres circonstances ?  De vraies basses nobles françaises, il n'y a que Testé (dont l'émission est parente) et, dans un autre genre, Varnier et Courjal, qui soient de cette trempe, aussi bien vocale qu'interprétative… 
Tassis Christoyannis (Phinée, le rival), dont on dit toujours le plus grand bien ici pour son mordant, son intensité, sa voix impeccable et sa diction parfaite, que ce soit dans Salieri, Grétry, David, Verdi ou Gounod, est certes moins habitué au répertoire du XVIIe siècle (or il dispose essentiellement ici de récitatifs de LULLY), mais semble déchiffrer (quelques détails pas très propres) et chante lui aussi de façon très homogène et égale, sans exprimer grand'chose… Vraiment étonnant de sa part, comme s'il avait été laissé à l'abandon dans un style (à peine) différent.
Cyrille Dubois (Mercure) est le seul à être égal à lui-même, avec son étrange voix, étroite et grêle, mais d'un grain très particulier. Sa diction est fort bonne, mais là aussi, assez inférieure à ses propres standards – son Laboureur du Roi Arthus crissait des mots crus, tout à fait saisissant.

Eux semblent victimes d'un absence de soin porté à la diction (Christie le faisait, Rousset le fait, les autres attendent un peu qu'on fasse le travail pour eux), peut-être d'un nombre de répétitions réduit, d'une étude pas assez précise de leur partie…

¶ Les autres sont limités par des caractéristiques plus inhérentes à leur technique.
Chantal Santon-Jeffery, en Vénus, rôle élargi par Joliveau, confirme une évolution préoccupante ; je me rappelle avoir été très séduit lorsque je l'ai découverte (en salle, me semble-t-il), dans du baroque français sacré, où la voix était franche et la diction parfaitement acceptable (ce doit pourtant faire à peine plus de 5 ans). Désormais, est-ce l'interprétation occasionnelle de rôles plus larges (des parties écrasantes dans les Cantates du Prix de Rome, ou même Armida de Hadyn, partie plus vocal), ou, comme je le crains, plutôt le moment de sa vie où la voix change, mais les stridences ont augmenté, et surtout le centre de gravité de la voix a complètement reculé, avec une émission (légèrement dure mais très équilibrée) devenue flottante, quasiment hululante pour ce répertoire. En plus, l'effort articulatoire paraît très (inutilement) important (peut-être parce que la nature de la voix est un peu trop dramatique pour ce répertoire) pour des rôles à l'ambitus aussi réduit et à la tessiture aussi confortable.
Restent deux options : reprendre la technique en main, chercher la netteté et l'antériorité plutôt que de sauver à tout prix le timbre au détriment de tous les autres paramètres ; ou bien se tourner vers un autre répertoire, sa voix évoluant clairement vers davantage de largeur (mais j'ai bien conscience que lorsqu'on est chanteur, on ne choisit pas, et vu qu'elle a ses réseaux déjà constitués, pas sûr que ce puisse changer si facilement). En l'état en tout cas, impossible de sasisir un mot de ce qu'elle dit, ce qui est un peu incompatible avec ce répertoire.
Marie Lenormand (Cassiope), égale à elle-même : comme Michèle Losier (qui est plus phonogénique), son émission typiquement américaine (plus en arrière, beaucoup de fondu) nuit à son impact physique et à sa déclamation (mais dans le peu qui reste du rôle, elle demeure au-dessus de tout reproche, ce n'est pas inintelligible non plus).
Katherine Watson (Mérope), étrange choix pour une jalouse, même si la refonte de Joliveau gomme sa participation néfaste, file un mauvais coton : la voix devient de plus en plus minuscule et de moins en moins timbrée… il ne s'agit presque plus de chant d'opéra, dans la mesure où le timbre est « soufflé » et où la projection est quasiment celle de la voix parlée… J'en ai souvent dit du bien ici, parce que j'ai toujours cru que c'était – la faute des programmes qui ne les mettaient jamais dans l'ordre, j'ai vérifié – Rachel Redmond, que j'aime beaucoup en revanche (minuscule, mais le timbre est net et focalisé) ; ce doit être la première fois que j'entends l'une sans l'autre !  Même si je n'ai donc jamais été très enthousiaste, je trouve que dans un rôle aussi modeste, ne pas faire sortir la voix n'est pas un très bon signe – très facile à dire de mon siège, mais ajouté à l'absence à peu près généralisée de souci déclamatoire (chez elle aussi), cela finit par nuire collectivement à l'œuvre et au genre.
– Enfin Thomas Dolié (Sténone), grand sujet de perplexité : je l'avais beaucoup aimé lors de ses premiers grands engagements, au début des années 2000 (avant sa consécration aux Victoires de la Musique, bizarrement sans grand effet sur sa carrière, qui reste essentiellement confinée à des seconds rôles réguliers), et en particulier dans le lied, où l'assise grave du timbre et la sensibilité au texte produisait de très belles choses pour un aussi jeune chanteur, et pas d'origine germanophone. Son Jupiter dans Sémélé était très respectable également – même s'il s'agissait, comme d'habitude dans ce répertoire, d'un baryton et non d'une réelle basse comme on pourrait l'attendre ici.
Mais depuis un moment, la construction de la voix à partir du grave lui joue des tours : depuis le second balcon, il était littéralement inaudible dès que l'orchestre jouait, toute la voix restait collée dans une émission extrêmement basse (dans le sens du placement, pas de la justesse qui est irréprochable) ; depuis le parterre, et surtout lorsque sa partie s'élargit dans la seconde partie, on entendait beaucoup plus d'harmoniques (les harmoniques, justement, sont toutes redirigées vers le bas de la salle, c'est très étrange, sans doute à cause d'une impédance exagérée), et la conviction était perceptible – l'engagement de l'artiste finissait par donner vie au personnage et lever une partie des préventions. Néanmoins, qu'une articulation aussi lourde et opaque produise aussi peu de son explique sans doute, d'un point de vue pratique, la limitation de ses emplois : il n'est pas suffisament adapté stylistiquement à ce répertoire pour tenir des premiers rôles, et il n'aurait pas le volume suffisant pour tenir des rôles de baryton dans des opéras du XIXe siècle. Encore une fois, la construction de voix trop tôt couvertes, très en arrière, bâties à partir des graves et non des aigus, provoque des résultats bouchés et difficiles à manœuvrer. Ce peut donner l'illusion de l'ampleur dramatique au disque, mais c'est toujours frustrant, en salle, par rapport à une voix nasillarde qui sonnera infiniment plus ample (syndrome Mime, quasiment tous sont plus sonores que les Siegfried de nos jours…).
À titre personnel, quitte à avoir de petits volumes, je choisis des émissions libres et intelligibles, comme Igor Bouin (vraiment minuscule) ou Ronan Debois (pas si mal projeté au demeurant !) ; qu'on ait ce type de caractéristiques pour chanter les Russes ou Wagner, soit, mais dans de la tragédie en musique, il ne paraît pas logique que la voix paraisse aussi (inutilement) étrangère à l'émission parlée.

Il n'y avait donc pas de mauvais chanteurs, mais ils semblent avoir été peu (pas) préparés sur la question de la diction (voire, pour certains, avoir peu lu leur partie), et un certain nombre dispose de caractéristiques qui peuvent trouver leur juste expression ailleurs, pas vraiment adaptées à ce répertoire.

J'ai de l'admiration pour Marie Kalinine : elle incarne exactement le type d'émission que je n'aime pas (fondée d'abord sur un son très couvert et sombré, et pas sur la différenciation des voyelles ou sur la juste résonance efficace), et pourtant elle s'efforce, saison après saison, de se fondre dans les styles avec le plus de probité possible – peu de Santuzza peuvent se vanter de faire des LULLYstes potables, et inversement. Par ailleurs, son carnet en dessins, drôle et attachant, laisse percevoir une conscience très franche de son art et une absence radicale de prétention, ce qui ne fait que la rendre plus sympathique.
Je ne peux pas dire que sa Méduse m'ait séduit (déjà, quel dommage que Bury l'ait confié à une femme, alors que la voix de taille ou basse-taille campait immédiatement le caractère !), mais elle est avant tout desservie par le diapason, ce qui me permet (merci Marie Kalinine !) d'aborder une question que je me pose depuis longtemps et que j'ai pas vraiment eu l'occasion de développer jusqu'ici.

On entendait essentiellement Zachary Wilder (Euryale) dans les ensembles, difficile de mesurer l'étendue de ses talents : issu du Jardin des Voix, j'ai été jusqu'ici très impressionné par ses retransmissions, un beau ténor libre et lumineux (et au français parfait) comme l'école américaine en produit régulièrement depuis Aler et Kunde. En salle, la rondeur du timbre n'était pas équivalente et la projection limitée, mais on sentait bien que, dès que la partie s'élevait un peu dans l'aigu, toutes ses aptitudes revenaient (d'où sa meilleure adéquation dans les retransmissions de Rameau). Dans un Hérold, ça aurait sans doute fait beaucoup plus d'étincelles, la tessiture basse éteignant mécaniquement le timbre. Ce qui rejoint la même remarque que pour Marie Kalinine, donc.

J'ai le sentiment désagréable d'avoir paru assez négatif alors que j'ai finalement tout aimé (peut-être moins la grande tirade de Vénus, déjà pas la plus grande trouvaille de Dauverge, par Chantal Santon, vu que le texte était impossible à suivre et la voix pas adéquate non plus), de l'œuvre aussi bien que du résultat interprétatif – avec la petite frustration d'un manque de déclamation, mais avec des artistes de ce niveau (et quelques-uns qui jouaient vraiment le jeu), ce n'est pas une grande mortification non plus.
Je suppose que c'est le principe même d'entrer dans le détail qui met en valeur les petites réserves : souligner tout ce qu'on a (de belles voix qui chantent juste et avec implication) est tellement évident qu'on entre dans d'autres. Et puis il y a mes marottes (probablement plus fondées que pour Wagner) sur la mise en valeur du texte, que tous les contemporains décrivaient comme primant sur la musique dans les techniques de chant (les français ayant la réputation de hurleurs) ; dans l'absolu, c'est bien chanté tout de même. [Disons qu'à volume sonore tout aussi modeste, on pouvait avoir des couleurs vocales plus libres et séduisantes, un texte énoncé avec plus de naturel.]

Illustration : Mathias Vidal, grand-prêtre de la diction dans un petit couvent, tiré d'un cliché de Jef Rabillon.



6. État des lieux du chant baroque français


Pour le chant baroque dans l'opéra seria, un point a déjà été partiellement réalisé .

Cette soirée donne l'occasion de mentionner quelques évolutions.

Le niveau des orchestres (et en particulier des orchestres baroques, de pair aussi avec la spécialisation des facteurs, je suppose) a considérablement augmenté au fil du XXe siècle, et il est assez difficilement contestable que dans tous les répertoires, on entend aujourd'hui couramment des interprétations immaculées de ce qui était autrefois joué un peu plus à peu près, que ce soit en cohésion des pupitres, en précision des attaques, en célérité, en justesse.

La voix n'a pas les mêmes caractéristiques mécaniques et c'est sans doute pourquoi elle est beaucoup plus tributaire de l'air du temps, des professeurs disponibles, de la langue d'origine des chanteurs.

        Au début de l'ère du renouveau baroque français, de la moitié des années 80 à celle des années 90, le vivier était constitué essentiellement de spécialistes, formés pour cette spécialité par Rachel Yakar (pour la partie technique) et William Christie (de façon plus pratique), de pair avec une galaxie de professeurs qui officiaient pour ceux qui n'étaient pas au CNSMDP (ou à l'Opéra-Studio de Versailles), voire de « rabatteurs » (Jacqueline Bonnardot, quoique pas du tout spécialiste, envoyait certains talents à Christie, m'a-t-il semblé lire).
        Autrement dit, les gosiers qui chantaient cette musique étaient spécifiquement formés à cet effet (d'où la mauvaise réputation de « petites voix » qui a persisté assez couramment au moins jusqu'au début des années 2000), en privilégiant la clarté du timbre, le naturel de l'articulation verbale, l'aisance dans la partie basse de la tessiture, la souplesse des ornements, au détriment d'autres paramètres prioritaires dans l'opéra du « grand répertoire », à commencer par la puissance et les aigus. (Un certain nombre de ces voix très légères et claires peuvent rencontrer des difficultés dans les aigus, qu'elles ont pourtant, mais que leur technique d'émission, centrée sur une zone plus proche de la voix parlée, ne favorise pas.)

        La reconversion n'était pas chose facile : Jean-Paul Fouchécourt s'est limité à quelques rôles de caractère, Paul Agnew n'a guère excédé Mozart et Britten (il aurait pu, d'ailleurs), Agnès Mellon a fait une belle carrière de mélodiste après sa grande période lyrique, et l'on voit mal Monique Zanetti ou Sophie Daneman chanter un répertoire plus large. Ceux qui se sont adaptés l'ont fait soit assez tôt, au fil du développement de leur voix (Gens, Petibon, et aujourd'hui Yoncheva, dont la formation initiale n'était de toute façon pas baroque), soit au prix de changements assez radicaux, comme Gilles Ragon, qui a assez radicalement changé sa technique pour pouvoir chanter les grands ténors romantiques (avec un bonheur débattable).

        On disposait alors de réels spécialistes, pas forcément exportables vers d'autres répertoires (ne disposant pas nécessairement de la même qualité d'agilité que pour l'opéra seria italien), en dehors de Mozart éventuellement ; mais ils étaient rompus à toutes les caractéristiques de goût (agréments essentiellement, c'est-à-dire notes de goût ; les ornements plus amples, de type variations, n'étaient alors guère pratiqués par les pionniers) et de phonation spécifiques à ce répertoire.
        Christie était assisté, jusqu'à une date récente, d'une spécialiste de la déclamation française du Grand Siècle, qui participait à la formation permanente des chanteurs récurremment invités par les Arts Florissants. L'insistance sur l'articulation du vers, sur la mise en valeur de ses appuis et de ses consonances (ce qu'on pourrait appeler la « profondeur » de son pour les syllabes importantes) était une partie incontournable de son travail de chef, l'une des nouveautés et des forces de sa pratique, dont tout les autres ensembles ont tiré profit – une fois émancipés (ou lassés / fâchés), les anciens disciples allaient travailler chez les ensembles concurrents tandis que Christie formait de nouvelles générations, équilibre qui a pendant deux décennies élargi le spectre des productions où la qualité du français, que le chef y prête attention ou pas, était particulièrement exceptionnelle.

        Mais Christie était seul à produire cet effort de formation – depuis, le CMBV fait de belles choses avec ses chantres, mais plutôt orienté vers la formation de solistes ou de comprimari que de grands solistes, considérant les voix assez blanches qui en sortent souvent (mais ce n'est pas une généralité, témoin l'immense Dagmar Šašková, sans doute actuellement la meilleure chanteuse pour le baroque français). Et cet effort, pour des raisons que j'ignore, s'est interrompu : il a cessé, apparemment, de faire travailler spécifiquement la déclamation, et, lui qui était célèbre pour son tropisme vers les voix étroites et aigrelettes, s'est mis à recruter des voix moelleuses articulées plus en arrière, selon la mode d'aujourd'hui – qu'il chouchoute Reinoud van Mechelen était une perspective inconcevable il y a quinze ans !  [Mode qui a son sens au disque mais est, à mon avis, assez absurde du point de vue des résultats en salle – les voix sont moins intelligibles et ont très peu d'impact sonore, qu'elles soient grandes ou petites.]
        Emmanuelle de Negri, elle-même une voix beaucoup plus ronde que les anciennes amours de Christie, est à peu près la seule de sa génération à avoir repris le flambeau du verbe haut. Elle chante d'ailleurs fort peu d'autres répertoires, et sa Mélisande (tout petit rôle de l'Ariane de Dukas) paraissait un peu désemparée par rapport à un univers technique tout à fait différent du sien – précisément parce que toutes ses forces sont tournées vers l'excellence spécifique du répertoire baroque français.

        Aujourd'hui, par conséquent, plus personne n'informe et ne gourmande, au besoin, les chanteurs sur ce point. On trouve donc (comme dans ce Persée) les voix les plus adaptées à ce répertoire laissées sans direction, ce qui donne à voir de rageant gâchis : non pas que ce soit mauvais, mais ces chanteurs ont tous les moyens et savent faire, à condition d'être entraînés et incités à appliquer ces préceptes.
       À cela s'ajoute le fait que, victime de son succès, l'opéra baroque français accueille volontiers des chanteurs de formation traditionnelle. Certains en font leur seconde maison au hasard des réseaux de leurs années d'insertion professionnelle (Thomas Dolié par exemple, qui a étudié au CNIPAL, plutôt un réservoir de voix pour les grands rôles lyriques… et avec Yvonne Minton) et ont donc l'opportunité d'en acquérir les codes, d'autres le font occasionnellement pour ajouter d'autres répertoires conformes à leur voix (porte d'entrée en Europe pour Michèle Losier), d'autres enfin viennent comme invités-vedettes pour fournir un type de voix rare ou un prestige particulier à une production (Nicolas Testé en Roland, dont on sent les origines extra-baroques, mais qui se plie remarquablement à l'exercice).
        Le problème est que, dans bien des cas, la technique de départ n'est pas vraiment compatible avec le baroque : les voix très couvertes, où les voyelles sont très altérées, n'ont pas grand rapport avec le chant réclamé par ces partitions. Stéphane Degout et Florian Sempey s'en tirent très bien (alors que je ne les aime guère ailleurs), mais on peut s'interroger sur la logique d'employer des voix aussi extérieures au cahier des charges de la tragédie en musique.

J'ai déjà longuement ratiociné sur ces questions dans de précédentes notules, ce qui me mène à quelques interrogations nouvelles supplémentaires.



7. Quelques questions à se poser


D'abord, il ne faut pas désespérer : certains chanteurs qui n'ont pas suivi cette voie manifestent les qualités requises, à commencer par Mathias Vidal (CNSM de Paris) !  Par ailleurs, Christophe Rousset, en plus d'être un peu seul à se consacrer aussi méthodiquement à explorer le répertoire enseveli de la tragédie en musique, demande cet effort de mise en valeur des mots à ses chanteurs – il est un peu celui qui a imposé, par exemple, l'accent expressif ascendant sur les « ah ! », d'abord largement moqué et qui est devenu une norme par la suite chez les autres ensembles (en cours de disparition, puisque plus personne ne semble s'intéresser au texte des œuvres jouées). Son insistance, dans les séances de travail, sur l'expressivité, jusqu'à la demande de l'outrance, est centrale, et se ressent à l'écoute – alors même que sa direction musicale pouvait être, il y a dix ans, assez molle. Il suffit d'observer les mêmes chanteurs chez lui et chez les autres : avec lui, ils phrasent ; ailleurs, certains semblent moins s'occuper des mots.

En revanche, voilà un moment que je n'ai pas entendu Niquet, malgré toutes ses qualités de clairvoyance dans le choix des œuvres et de générosité dans leur mise en œuvre, donner des productions où le phrasé est mis en valeur…

D'où me viennent deux questions, contradictoires d'ailleurs :

        ¶ Alors qu'on s'échine à utiliser des instruments originaux, à les préserver ou à les reconstruire, qu'on va jusqu'à reprendre les diapasons exacts des différents lieux où l'on créa les œuvres, n'est-il pas étrange d'embaucher des chanteurs dont la technique est fondée sur les nécessités vocales de l'opéra italien du XIXe siècle ?  Comment est-il possible, pour ces gens qui s'interrogent sur le style exact d'un continuo de 1710 vs. 1720, sur le nombre de battements d'un tremblement pratiqué dans telle chapelle, de ne pas voir la terrible transgression d'engager des mezzos-sopranos verdiens et des barytons wagnériens pour chanter des œuvres où les interprètes utilisaient une technique tellement naturelle qu'on les décrivait comme criant ? 
        J'ai bien conscience qu'on ne peut pas gagner sa vie en chantant simplement dans les quelques productions de baroque français (essentiellement concentrées à Paris, Bruxelles et Versailles d'ailleurs, plus un peu à Toronto et Boston…), et que construire une voix exclusivement calibrée pour le lied (sans en avoir forcément la diction allemande) serait un suicide professionnel… Mais tout de même, n'y a-t-il pas une réflexion à avoir là-dessus ?

        ¶ Car les tessitures du baroque, et spécifiquement celles du baroque français, sont très basses. Les rôles de dessus chez LULLY culminent au sol, ce qui, joué au diapason d'origine (392 Hz), équivaut à peu près à un fa, soit trois tons plus bas que les mezzos-sopranos verdiens, voire plus bas que les grands rôles de contralto !  Or, on ne peut pas faire jouer la jeune première Andromède pépiant sur son rocher par l'équivalent de Maureen Forrester, n'est-ce pas. Et inversement, faire chanter une soprane aussi bas va l'empêcher de projeter ses sons, voire « éteindre » sa voix.
        C'est pourquoi la catégorisation en soprano / mezzo n'a pas grande pertinence dans ce répertoire, et qu'il s'agit avant tout d'une question de couleur – à l'opéra, dessus et bas-dessus ont d'ailleurs strictement la même tessiture avant Rameau !  Couleur qui ne peut jamais, considérant l'effectif raisonnable, l'accompagnement discret, l'aération des timbres des instruments naturels (pas de mur de fondu comme avec les instruments modernes) et la nécessité d'intelligibilité, être trop sombre, ni le grain trop épais.
       La couverture vocale (c'est-à-dire la modification des voyelles pour pouvoir émettre des aigus qui ne soient pas serrés et poussés) n'a de ce fait pas grand sens dans ce répertoire, en tout cas chez les femmes (chez les hommes, on peut couvrir en mixant chez les ténors, et certains aigus des basses demandent sans doute un peu de rondeur et de protection, procurées par la couverture vocale), pas à l'échelle massive où le chant lyrique l'utilise d'ordinaire (souvent trop ou mal, même pour du Verdi).
       Alors, si l'on ne peut pas changer du tout au tout l'enseignement du chant (la tradition adéquate existe-t-elle seulement encore ?  peut-on la retrouver aussi aisément que pour un instrument ?), ne serait-il pas judicieux, quitte à ne pas être authentique, de remonter le diapason d'un ou deux tons, pour permettre aux techniques d'opéra telles qu'elles sont de retrouver leur centre de gravité et leur brillant – étant calibrées pour s'élever avec confort loin de la zone de la parole…

Illustration : costume de Louis-René Boquet pour les représentations de 1770, une Éthiopienne (parfaitement).

Je livre cet état des lieux à votre sagacité, n'ayant pas de réponse sur la marche à suivre – et tout de même assez émerveillé d'entendre ces œuvres et ces ensembles spécialistes qu'on n'aurait jamais rêvé d'entendre, et certainement pas aussi bien, il y a seulement trente ans ! 

mercredi 6 avril 2016

Persée de LULLY en 1770 : Dauvergne, qu'as-tu fait ?


Un immense concours, par LULLY attiré,
Découvrit l'imposture tout écumant de rages :
Qu'aurait Dauvergne osé ? – Grands gestes et visages
De toutes parts tournaient vers l'oracle admiré.

Bref, on me demande, je réponds.

Le Concert Spirituel joue, dans une distribution éclatante constituée des meilleurs spécialistes (M. Vidal, Guilmette, Christoyannis, K. Watson, Teitgen, Kalinine, Santon, Lenormand, Dubois, Dolié, Z. Wilder !), Persée de LULLY, mais dans sa dernière révision de 1770, celle qui fut chantée par Sophie Arnould (1,2,3,4) et Henri Larrivée !
Le concert vient d'être donné à Metz et passe ce soir au Théâtre des Champs-Élysées, la semaine prochaine à l'Opéra Royal de Versailles.

En 1770, il s'agit d'agrémenter le mariage de Marie-Antoinette d'Autriche avec le Dauphin, et d'inaugurer l'Opéra Royal du château de Versailles, rien de moins.

Comme c'était l'usage tout au long du XVIIIe, les tragédies en musique dotées du plus grand succès sont reprises, mais adaptées au goût du temps. Les poèmes de Quinault étaient réputés indémodables, et malheur à ceux qui y touchaient, tel Pitra pour Racine, pour les besoins de la cause – Marmontel fit les frais de ces quolibets pour Atys recomposé par Piccinni et, justement, pour une récriture de Persée, en 1780 (toute la musique y est, semble-t-il, de Philidor).

En principe, comme la sobre galanterie des vers de Quinault et l'expressivité de la prosodie de LULLY sont considérées comme inégalables, les adaptateurs récrivent surtout l'Ouverture, les danses, vers une forme plus vive (plus ramiste, pourrait-on dire), et certains airs. L'essentiel des récitatifs est en principe conservé.

Ces adaptations vont aussi dans le sens d'une plus grande concision du texte : il n'est pas rare, comme ici, que les cinq actes en deviennent quatre. Malgré les remarques désagréables sur le livret (j'y reviens),la musique a rencontré un assez beau succès.



1. Pourquoi jouer cette version adaptée ?

Je vois plusieurs motivations assez puissantes, et ce n'est pas la suppression du Prologue pour faire plaisir à Hervé Niquet, puisque Bernard de Bury en a composé un autre un nouveau texte (sera-t-il joué ?).
Comme précisé en commentaires : ce Prologue a été composé en 1747 par Bernard de Bury, et n'a pas été repris dans la version de 1770. (Vu l'aspect très post-ramiste de l'Ouverture, voire gosseco-grétrysant, je gage qu'elle a aussi été récrite en 1770, peut-être plutôt par Dauvergne, en charge des actes I et IV – hypothèse confirmée par le document reproduit ci-après.)

¶ L'intérêt pour les chercheurs, auxquels sont adossés les concerts du CMBV : on parle souvent de ces adaptations, et on les entend peu. Ou alors des refontes du compositeur (versions de Castor et Pollux ou de Dardanus de Rameau), ou des recompositions comme l'Armide de Gluck ou l'Atys de Marmontel ; mais les remises à neuf d'opéras de LULLY avec conservation de portions anciennes, c'est très rare. Il faut donc au moins essayer pour voir – même si les LULLYstes qui rôdent dans ces pages seront forcément déçus de la ramisation rampante de la bonne musique.

Persée a déjà été donné récemment à l'Opéra Royal de Versailles, et n'a pas la réputation d'Atys ou d'Armide pour maintenir un public aussi fréquemment : c'est une façon de renouveler l'intérêt du public d'aujourd'hui aussi, de suggérer qu'on redonne du neuf. (Même si je crois que, justement, le public est rassuré par la présence de noms et de références familiers.)

¶ Enfin, même s'il n'a guère été mis en avant, l'argument de l'inauguration de l'Opéra Royal et du mariage du futur Louis XVI a sans doute un aspect assez flatteur pour ceux qui aiment à s'imaginer dans les chaussons des Grands d'autrefois, vivre le frisson de l'histoire en se figurant qu'on pourrait, soudain, s'incarner dans un quelque-part (confortable) du passé.

Je crois cependant que l'argument « recherche du CMBV » est le plus pertinent, dans la mesure où un titre célèbre de LULLY est meilleur moyen de remplir que tous les autres argumentaires évoqués ; et dans la mesure, aussi, ou le CMBV décide bel et bien de la programmation en fonction des actualités de sa propre recherche.En témoigne le colloque dont vous pouvez trouver, ici, le détail.



hôtel de luzy putto dauvergne
Lullyste après un soir de Dauvergne, stuc vers 1770.
Hôtel de Luzy, 6 rue Férou à Paris.




2. À quoi ressemble le livret ?

C'est donc la question qui m'a été posée sans relâche. Voici un début de réponse.

Le livret a été remanié pour l'occasion par Nicolas-René Joliveau, secrétaire perpétuel de l'Académie (Royale / Française) ; le poème dramatique est d'1/3 plus court que celui de Quinault, dont il n'a donc conservé que la moitié – le texte final ne contient donc qu'environ1/5 de vers nouveaux.

En réalité, Joliveau coupe ce qui est (paradoxe, considérant le goût dramatique et musical du temps !) le plus décoratif, et conserve l'action principale de Quinault. Il fusionne l'action des actes IV et V – il est vrai que cette double fin était bien étrange, de nouvelles péripéties surgissant à coup de magie une fois la victoire remportée contre la Gorgone, les réunir dans un acte unique n'a rien d'absurde. Nombre de rôles campant simplement un caractère précis (le Grand Prêtre…) disparaissent, et les parents d'Andromède (Mérope et Céphée) sont réduits à laportion congrue.

Le chœur est au contraire élargi, et ses dernières interventions, de même que la tirade de Vénus écrite par Joliveau (« Hymen, d'un jour si beau consacre la mémoire ») ou la passacaille du divertissement final, célèbrent à mots à peine voilés l'union du Dauphin et de la Dauphine.

Les critiques les plus violentes subies par Joliveau (car il était indispensable d'adapter Quinault & LULLY, mais adaptateurs se faisaient toujours démolir pour leur incompétence ou leur impudence, surtout les poètes !) portent sur la « correction » de 11 vers de Quinault, conservés mais altérés, ce qui a suscité une ire dont mesure mal la force si l'on ne lit pas les imprécations des contemporains.



3. Que contient la musique ?

Les visuels de promotion du spectacle ne sont pas très clairs, puisqu'il reste du LULLY, largement remplacé / augmenté par Antoine Dauvergne, qui n'est pas le seul à officier, puisque François Rebel (acte II) et Bernard de Bury (acte III) contribuent aussi.

Les notices bibliographiques du Fonds Philidor (il faut aller chercher dans l'aborescence, donc je reproduis l'information ci-après) détaillent la contribution de Dauvergne :

 ACTE I [Vol. 1]
 - p. 1-13 : Ouverture. Fièrement, sans lenteur, puis Allegro, Ut Majeur, C/, 3
 [SCÈNE 5]
 - p. 23 : Ritournelle, sol mineur, 2
 - p. 29 : Annonce, sol mineur, 2
 - p. [30-[32] : Marche, sol mineur, 2
 - p. 33-41] : Trio et Choeur. O déesse veillez sur nos jours (Trois Éthiopiens, Choeur), sol mineur, 3
 - p. 43 : Air grave pour la lutte, Ut Majeur, C/
 - p. 44-54 : Air vif. Presto, Ut Majeur, 3
 - p. 55-61 : Air pour l'exercice de l'arc. Presto, Ut Majeur, 6/8
 - p. 62-63 : [Air et Choeur]. [Des beaux noeuds de l'hymen] protectrice adorable (Une Éthiopienne, Choeur), la mineur, 3 [début raturé]
 - p. 64-65 : Air pour la danse gracieuse. Voluptueusement, La Majeur, 3 [2e partie raturée]
 - p. 65-[67] : Air pour la danse vive. Gaiment, La Majeur, 2
 - [68]-[73] : 3e Air pour la danse gracieuse et vive en même tems. Allegro, La Majeur, 2/4
 - p. 74-84 : Choeur. Fière trompette éclatez dans les airs, Vivement, Ré Majeur, 2
 - p. 87-88 : Entracte, Sol Majeur, C/
 
 ACTE IV [Vol. 2]
 [SCÈNE 2]
 - p. [59]-[67] : [Duo] Les vents impétueux (Mérope, Phinée), Si b Majeur, 3 [quelques bribes vocales de Lully]
 SCÈNE 3
 - p. [67]-[71] : Choeur [et récit] O ciel inexorable (Mérope, Phinée, Un Éthiopien, Choeur), sol mineur, 2 [quelques fragments de la musique de Lully]
 SCÈNE 6
 - p. [90bis] : Duo. Les plus belles chaînes [Andromède, Persée], si mineur, 3
 - p. [91]-[93] Bruit. D'où naît ce bruit ? (Cephée), Ré Majeur, 2
 SCÈNE 10
 - p. [100]-[102] [Air] Cessons de redouter la fortune cruelle (Persée), Ré Majeur, 3
 - p. [103] : [Récit] Mortels, vivez en paix (Vénus), si mineur, 3
 - p. [103]-[104] : [Air] Grâces, jeux et plaisirs (Vénus), Si Majeur, 3/8
 - p. [105]-[113] : Choeur. Gaiment. Chantons, célébrons le beau jour (Vénus, Choeur), Si Majeur, [3/8]
 - p. [114]-[116] : [Air instrumental]. Legerement, Si Majeur, 2
 - p. [116] : [Récit] Hymen, de ce beau jour (Vénus), Si Majeur, 2
 - p. [117]-[123] : [Air] L'aimable Hébé, le dieu des coeurs (Vénus), Si Majeur, 2
 - p. [125]-[130] : Passacaille. Du plus doux présage (Choeur), MI Majeur, 3
 - p. [131]-[132] : 1er Air léger, Mi Majeur, 2
 - p. [133] : Ariette pour Persée [début uniquement]
 - p. [134] : 2e Air léger, mi mineur, 2
 - p. [135]-[154] : Ariette et Choeur. Vivement et fort. Sur l'univers règne à jamais (Persée, Choeur), Mi Majeur, 2/4
 - p. [155]-[160] : Chaconne, mi mineur, [3]
 - p. [161]-[182] : Chaconne a 2 tems, Gaiment, Mi Majeur, 2

Donc pas mal de choses, et je suppose que François Rebel s'est chargé de faire subir le même sort aux actes II et III.  (Couper du Quinault-LULLY supposément dispensable pour y fourguer des airs galants, sérieusement les gars ?)

Comme précisé en commentaires : en réalité, l'acte III a échu à Bernard de Bury.

On peut quand même y vérifier que si les danses sont très largement remplacées, un certain nombre de parties vocales d'origine sont préservées.

… Pour le reste, j'attends d'entendre la chose sur place. Pour les absents, un disque est prévu.



4. Après la représentation : état de la partition

Quelques compléments à l'issue du concert du Théâtre des Champs-Élysées.

Les coupures opérées par Joliveau accentuent le schématisme de l'action et des psychologies, dans un livret qui était déjà extrêmement cursif chez Quinault – ce sont encore Phinée (le rival) et Méduse qui ont le plus d'épaisseur, et le raccourcissement (mêlé d'interventions de circonstance et de galanteries pastorales ou virtuoses tout à fait stéréotypées pour 1770) ne font qu'accentuer ces manques. Ce n'est pas de côté-là qu'il faut chercher le grand frisson.

¶ Les LULLYstes ont pu constater avec effroi, pour ne pas dire avec colère, que le « Persée de Lully version 1770 » ne contenait finalement pas grand'chose de LULLY : les récitatifs (certes, c'est le plus important), quelques airs (arioso de Céphée, scène de Méduse) réorchestrés (plus de cordes, et beaucoup de doublures de vents pour épaissir la pâte, cors notamment), et telle ou telle portion (chœurs de l'acte IV-V, là encore renforcés orchestralement par l'ajout de fusées de violon). Mais, globalement, les parties instrumentales (même dans les accompagnements des parties originales, hors récitatifs) sont toutes neuves, et l'essentiel des airs et ensembles sont aussi remis au goût du jour. Il y surnage certes un peu de LULLY (l'acte III, qui contient les hits de Méduse et Mercure, a été assez peu touché contrairement aux autres), mais l'opéra sonne comme un opéra des années 1770 à 1800 (assez neuf pour 1770, même).
Le parallèle le plus honnête serait sans doute avec le Thésée de Gossec, qui en partage bien des recettes musicales (dont le spectaculaire traitement des chœurs de combat hors scène).
On voit bien le problème de vendre un spectacle « Persée de Dauvergne-F.Rebel-Bury avec des bouts de Lully réorchestrés », surtout avec notre réflexe de valoriser la singularité de l'auteur, mais mettre en avant le nom de LULLY était très trompeur, et avait d'autant plus de quoi désarçonner les auditeurs qui n'y auraient pas prêté garde… qu'il s'agit d'une esthétique d'un siècle postérieure !

L'effectif est déjà celui du Rameau tardif (Boréades) ou de la tragédie lyrique « réformée » d'après Gluck : adjonction de 2 clarinettes et de 2 cors à la nomenclature (2 traversos, 2 hautbois, 2 bassons). Le nombre de cordes sur scène est plutôt important (14 violons, 6 altos, 6 violoncelles, 2 contrebasses), mais c'était aussi, en réalité, le type de nombres présents du temps de LULLY (voire supérieurs) – même si on le joue désormais avec des proportions plus réduites (à ma grande satisfaction). Le contraste de ce point de vue relève donc de l'illusion d'optique.

¶ Le continuo est en train de disparaître : le clavecin accompagne bien sûr les récitatifs de la main de LULLY (avec un violoncelle), mais ne double pas tout le temps l'orchestre. Bien sûr, sa présence n'est jamais indiquée explicitement sur les portées, mais c'est bel et bien l'époque où il disparaît progressivement : il peut rester en fond (beaucoup d'ensembles spécialistes adoptent désormais, à l'exemple de Jacobs, le pianoforte à la place, pour raffermir le son d'orchestre), mais n'a plus du tout la même fonction d'assise, considérant les carrures beaucoup plus régulières (batteries de cordes fréquentes, c'est-à-dire le même rythme égal répété en accords). De fait, il devient facultatif, et chez Haydn ou Gossec, il n'est plus véritablement nécessaire – même s'il peut encore figurer, plus ou moins à la fantaisie du compositeur ou des interprètes, pour ce que j'en vois dans les disques (je n'ai pas creusé les contours exacts de l'historicité de cette pratique).

¶ Musicalement, le contraste est plus frappant à l'intérieur des actes (et pas seulement entre les parties originales et les parties récrites) qu'entre eux : le style disparate qu'exposent Dauvergne, F. Rebel et Bury est assez comparable d'un acte à l'autre.
Les danses, dont plus aucune n'est de LULLY, ont un aspect martial et tempêtueux assez étonnant, qui ne laissent quasiment pas de part à la galanterie ; un air de Persée et la grande tirade de Vénus tirent un peu plus sur la pastorale pour l'un, l'air galant pour l'autre (malgré son propos solennel, celui de célébrer les commanditaires !), mais globalement, on se situe plutôt du côté des plus mâles portions du Grétry de Céphale et Procris ou du Gossec du Triomphe de la République. Elles font au demeurant partie des plus réussies que j'aie entendues dans ce style – je crois bien que j'aime davantage ça que les belles danses un peu plus décoratives de LULLY (magnifiques, ne me faites pas dire autre chose).

¶ Au chapitre des étrangetés réussies, les parties autonomes et thématiques des violoncelles en certaines occasions (jusqu'ici, le baroque les réservait à l'assise de la ligne de basse, fût-elle vive et marquante) ; ou bien cet air vocalisant final chanté par Persée comme un héros ramiste… mais accompagné d'un tapis choral qui évoque plutôt les airs de basse des deux Passions de Bach…

¶ En fin de compte, l'aspect général ressemble à du Gossec (oui, vraiment proche de Thésée, mais avec des mélodies plus inspirées et un sens du drame plus exacerbé), où persistent les beaux frottements harmoniques de Rameau (le milieu du XVIIIe siècle étant plus audacieux harmoniquement, en France, que la période qui a suivi). Un très beau mélange, que j'ai trouvé pour ma part tout à fait enthousiasmant : plutôt qu'à un LULLY du rang, on a droit à une partition de premier plan de la « quatrième école » de tragédie en musique, qui combine, de mon point de vue, tous les avantages de la période : drame exacerbé (façon Danaïdes de Salieri), danses très franches et roboratives (façon Triomphe de la République de Gossec), éclats tempêtueux saisissants (façon Sémiramis de Catel), harmonie ramiste (façon Boréades, un langage qui n'est plus de mise dès Gluck), des ariettes virtuoses étourdissantes (là aussi, encore un peu ramistes, façon final de Pygmalion), mais sans les longueurs galantes (ni les fadeurs compassées dans les moments dramatiques) qui font souvent pâlir les opéras de cette période face à LULLY. Évidemment, la prosodie n'est pas du même niveau, mais ce demeure un opéra remarquablement réussi.

J'ai sans doute eu l'air un peu sérieux en décrivant ses écarts par rapport à l'original, mais le résultat, même en révérant LULLY, était particulièrement réjouissant, peut-être davantage même que l'original – car plus concis, moins prévisible aussi, considérant sa nature hétéroclite.



5. Après la représentation : quels moyens aujourd'hui pour jouer la tragédie en musique ?

Bien sûr, avant toute chose, il faut souligner combien l'offre, qui était à peu près nulle (en quantité comme en qualité) il y a 30 ans, est aujourd'hui généreuse, les nouveautés continuant à pleuvoir (même si ses anciens défricheurs émérites comme Herreweghe, Christie, Gardiner, Minkowski… sont partis enregistrer Brahms ou rejouer à l'infini leurs propres standards  – Niquet le fait aussi, mais en supplément et non exclusivement).
Chose particulièrement significative, les exhumations sont généralement adossées à des financements discographiques qui permettent de documenter le répertoire pour ceux qui n'habitent pas à côté de la salle de concert.

En matière d'interprétation aussi, on a beaucoup exploré, et les continuistes capables de réaliser des contrechants riches et adaptés à chaque caractère sont désormais légion. Néanmoins, je remarque quelques réserves récurrentes, qui étaient rares il y a 15 ans.

Bref, il y a tout lieu de se féliciter de la situation ; j'ai souvent écrit ici que nous vivons un âge d'or pour le lied, jamais aussi bien chanté (et notamment sous l'influence des recherches baroqueuses), de façon aussi précise et expressive (la comparaison avec les grands diseurs d'autrefois est même assez cruelle, tant leur rigidité éclate, quelle que soit la beauté de la voix ou la science rhétorique). On pourrait presque être tenté de dire la même chose pour le baroque… et pourtant, par rapport aux deux premières vagues de découvertes dans le répertoire français (de la fin des années 80 au début des années 2000), quelque chose manque.

Mercredi soir, donc, nous disposions d'un des meilleurs ensembles spécialistes et du meilleur du chant francophone pour servir l'œuvre.

¶ Le Concert Spirituel était particulièrement en forme : son empreinte sonore caractéristique, plus ronde que d'ordinaire chez les instruments d'époque, était aussi caractérisée ce soir-là par une homogénéité que je n'avais pas toujours noté en concert (de petits trous ou des inégalités ponctuelles dans le spectre sonore) ; le niveau semble avoir (encore) monté, et en plus de conserver ses qualités, il sonne avec autant d'assurance que dans ses meilleurs studios. La direction d'Hervé Niquet en tire chaleur et engagement constants, c'est formidable, et de ce point de vue, nul doute, instrumentalement ce répertoire n'a jamais été aussi bien servi qu'aujourd'hui.

Mathias Vidal est le plus grand chanteur francophone actuel chez les Messieurs (je suppose que chez les dames, l'honneur reviendrait à Anne-Catherine Gillet), et le confirme encore : le grain de la voix n'a pas la pureté des chanteurs les plus célébrés, mais c'est pour permettre une franchise des mots et une vérité prosodique extraordinaires (à l'inverse des voix parfaites qui s'obtiennent par un reculement des sons et un nivellement des voyelles), une éloquence, une urgence de tous les instants. Non seulement le texte est toujours très exactement articulé, mais il est aussi en permanence appuyé avec justesse, et pour couronner le tout ardemment incarné – trois qualités très rarement réunies, et à peu près jamais à ce degré, chez un même interprète. (Car il est possible d'avoir les bons appuis avec un texte peu clair ou des apertures fausses, ou en de disposer de tout cela sans en faire un usage expressif particulier, comme les grands anciens des années 50…)
Son principal défaut était finalement que la voix sonnait un brin étroite, limitée en volume. Ce n'est plus du tout le cas, et comme si la bride avait lâché, Vidal tourne le potentiomètre à volonté lorsque l'expression le requiert, dominant ses partenaires et l'orchestre. J'attends avec impatience son Parsifal dans la traduction française de Gunsbourg.


Le contraste avec le reste de la distribution est d'autant plus spectaculaire. Elle est loin d'être mauvaise, mais comment se peut-il que le français soit aussi peu intelligible chez des spécialistes francophones de format léger ?  Ce seraient des wagnériens hongrois, je ne dis pas, mais en l'occurrence…

Deux grandes catégories dans cette distribution :

¶ Ceux qui ont les atouts idéaux de leurs rôles mais ne sont manifestement pas sollicités par le chef sur la question de la déclamation.
Hélène Guilmette, favorise davantage la netteté légère de son timbre que l'ampleur, la rondeur et le moelleux (propre aux francophones américains) qu'elle peut manifester autre part, et se coule parfaitement dans le rôle. Mais les phrasés ne sont pas réellement déclamés, simplement joliment chantés, alors qu'elle est une grande mélodiste par ailleurs ; il n'aurait pas fallu lui en demander beaucoup pour qu'elle fasse quelque chose de plus éloquent d'Andromède !
Jean Teitgen (Céphée, le père d'Andromède) a déjà fait frémir de terreur les amateurs du genre, en Zoroastre de Pyrame et surtout en Amisodar de Bellérophon ; pourquoi, dans ce cas, se contente-t-il ici de chanter (de sa voix de basse d'une densité et d'une portée extraordinaires) tout legato, en belles lignes égales, quand il sait si bien mettre les mots en valeur dans d'autres circonstances ?  De vraies basses nobles françaises, il n'y a que Testé (dont l'émission est parente) et, dans un autre genre, Varnier et Courjal, qui soient de cette trempe, aussi bien vocale qu'interprétative… 
Tassis Christoyannis (Phinée, le rival), dont on dit toujours le plus grand bien ici pour son mordant, son intensité, sa voix impeccable et sa diction parfaite, que ce soit dans Salieri, Grétry, David, Verdi ou Gounod, est certes moins habitué au répertoire du XVIIe siècle (or il dispose essentiellement ici de récitatifs de LULLY), mais semble déchiffrer (quelques détails pas très propres) et chante lui aussi de façon très homogène et égale, sans exprimer grand'chose… Vraiment étonnant de sa part, comme s'il avait été laissé à l'abandon dans un style (à peine) différent.
Cyrille Dubois (Mercure) est le seul à être égal à lui-même, avec son étrange voix, étroite et grêle, mais d'un grain très particulier. Sa diction est fort bonne, mais là aussi, assez inférieure à ses propres standards – son Laboureur du Roi Arthus crissait des mots crus, tout à fait saisissant.

Eux semblent victimes d'un absence de soin porté à la diction (Christie le faisait, Rousset le fait, les autres attendent un peu qu'on fasse le travail pour eux), peut-être d'un nombre de répétitions réduit, d'une étude pas assez précise de leur partie…

¶ Les autres sont limités par des caractéristiques plus inhérentes à leur technique.
Chantal Santon-Jeffery, en Vénus, rôle élargi par Joliveau, confirme une évolution préoccupante ; je me rappelle avoir été très séduit lorsque je l'ai découverte (en salle, me semble-t-il), dans du baroque français sacré, où la voix était franche et la diction parfaitement acceptable (ce doit pourtant faire à peine plus de 5 ans). Désormais, est-ce l'interprétation occasionnelle de rôles plus larges (des parties écrasantes dans les Cantates du Prix de Rome, ou même Armida de Hadyn, partie plus vocal), ou, comme je le crains, plutôt le moment de sa vie où la voix change, mais les stridences ont augmenté, et surtout le centre de gravité de la voix a complètement reculé, avec une émission (légèrement dure mais très équilibrée) devenue flottante, quasiment hululante pour ce répertoire. En plus, l'effort articulatoire paraît très (inutilement) important (peut-être parce que la nature de la voix est un peu trop dramatique pour ce répertoire) pour des rôles à l'ambitus aussi réduit et à la tessiture aussi confortable.
Restent deux options : reprendre la technique en main, chercher la netteté et l'antériorité plutôt que de sauver à tout prix le timbre au détriment de tous les autres paramètres ; ou bien se tourner vers un autre répertoire, sa voix évoluant clairement vers davantage de largeur (mais j'ai bien conscience que lorsqu'on est chanteur, on ne choisit pas, et vu qu'elle a ses réseaux déjà constitués, pas sûr que ce puisse changer si facilement). En l'état en tout cas, impossible de sasisir un mot de ce qu'elle dit, ce qui est un peu incompatible avec ce répertoire.
Marie Lenormand (Cassiope), égale à elle-même : comme Michèle Losier (qui est plus phonogénique), son émission typiquement américaine (plus en arrière, beaucoup de fondu) nuit à son impact physique et à sa déclamation (mais dans le peu qui reste du rôle, elle demeure au-dessus de tout reproche, ce n'est pas inintelligible non plus).
Katherine Watson (Mérope), étrange choix pour une jalouse, même si la refonte de Joliveau gomme sa participation néfaste, file un mauvais coton : la voix devient de plus en plus minuscule et de moins en moins timbrée… il ne s'agit presque plus de chant d'opéra, dans la mesure où le timbre est « soufflé » et où la projection est quasiment celle de la voix parlée… J'en ai souvent dit du bien ici, parce que j'ai toujours cru que c'était – la faute des programmes qui ne les mettaient jamais dans l'ordre, j'ai vérifié – Rachel Redmond, que j'aime beaucoup en revanche (minuscule, mais le timbre est net et focalisé) ; ce doit être la première fois que j'entends l'une sans l'autre !  Même si je n'ai donc jamais été très enthousiaste, je trouve que dans un rôle aussi modeste, ne pas faire sortir la voix n'est pas un très bon signe – très facile à dire de mon siège, mais ajouté à l'absence à peu près généralisée de souci déclamatoire (chez elle aussi), cela finit par nuire collectivement à l'œuvre et au genre.
– Enfin Thomas Dolié (Sténone), grand sujet de perplexité : je l'avais beaucoup aimé lors de ses premiers grands engagements, au début des années 2000 (avant sa consécration aux Victoires de la Musique, bizarrement sans grand effet sur sa carrière, qui reste essentiellement confinée à des seconds rôles réguliers), et en particulier dans le lied, où l'assise grave du timbre et la sensibilité au texte produisait de très belles choses pour un aussi jeune chanteur, et pas d'origine germanophone. Son Jupiter dans Sémélé était très respectable également – même s'il s'agissait, comme d'habitude dans ce répertoire, d'un baryton et non d'une réelle basse comme on pourrait l'attendre ici.
Mais depuis un moment, la construction de la voix à partir du grave lui joue des tours : depuis le second balcon, il était littéralement inaudible dès que l'orchestre jouait, toute la voix restait collée dans une émission extrêmement basse (dans le sens du placement, pas de la justesse qui est irréprochable) ; depuis le parterre, et surtout lorsque sa partie s'élargit dans la seconde partie, on entendait beaucoup plus d'harmoniques (les harmoniques, justement, sont toutes redirigées vers le bas de la salle, c'est très étrange, sans doute à cause d'une impédance exagérée), et la conviction était perceptible – l'engagement de l'artiste finissait par donner vie au personnage et lever une partie des préventions. Néanmoins, qu'une articulation aussi lourde et opaque produise aussi peu de son explique sans doute, d'un point de vue pratique, la limitation de ses emplois : il n'est pas suffisament adapté stylistiquement à ce répertoire pour tenir des premiers rôles, et il n'aurait pas le volume suffisant pour tenir des rôles de baryton dans des opéras du XIXe siècle. Encore une fois, la construction de voix trop tôt couvertes, très en arrière, bâties à partir des graves et non des aigus, provoque des résultats bouchés et difficiles à manœuvrer. Ce peut donner l'illusion de l'ampleur dramatique au disque, mais c'est toujours frustrant, en salle, par rapport à une voix nasillarde qui sonnera infiniment plus ample (syndrome Mime, quasiment tous sont plus sonores que les Siegfried de nos jours…).
À titre personnel, quitte à avoir de petits volumes, je choisis des émissions libres et intelligibles, comme Igor Bouin (vraiment minuscule) ou Ronan Debois (pas si mal projeté au demeurant !) ; qu'on ait ce type de caractéristiques pour chanter les Russes ou Wagner, soit, mais dans de la tragédie en musique, il ne paraît pas logique que la voix paraisse aussi (inutilement) étrangère à l'émission parlée.

Il n'y avait donc pas de mauvais chanteurs, mais ils semblent avoir été peu (pas) préparés sur la question de la diction (voire, pour certains, avoir peu lu leur partie), et un certain nombre dispose de caractéristiques qui peuvent trouver leur juste expression ailleurs, pas vraiment adaptées à ce répertoire.

J'ai de l'admiration pour Marie Kalinine : elle incarne exactement le type d'émission que je n'aime pas (fondée d'abord sur un son très couvert et sombré, et pas sur la différenciation des voyelles ou sur la juste résonance efficace), et pourtant elle s'efforce, saison après saison, de se fondre dans les styles avec le plus de probité possible – peu de Santuzza peuvent se vanter de faire des LULLYstes potables, et inversement. Par ailleurs, son carnet en dessins, drôle et attachant, laisse percevoir une conscience très franche de son art et une absence radicale de prétention, ce qui ne fait que la rendre plus sympathique.
Je ne peux pas dire que sa Méduse m'ait séduit (déjà, quel dommage que Bury l'ait confié à une femme, alors que la voix de taille ou basse-taille campait immédiatement le caractère !), mais elle est avant tout desservie par le diapason, ce qui me permet (merci Marie Kalinine !) d'aborder une question que je me pose depuis longtemps et que j'ai pas vraiment eu l'occasion de développer jusqu'ici.

On entendait essentiellement Zachary Wilder (Euryale) dans les ensembles, difficile de mesurer l'étendue de ses talents : issu du Jardin des Voix, j'ai été jusqu'ici très impressionné par ses retransmissions, un beau ténor libre et lumineux (et au français parfait) comme l'école américaine en produit régulièrement depuis Aler et Kunde. En salle, la rondeur du timbre n'était pas équivalente et la projection limitée, mais on sentait bien que, dès que la partie s'élevait un peu dans l'aigu, toutes ses aptitudes revenaient (d'où sa meilleure adéquation dans les retransmissions de Rameau). Dans un Hérold, ça aurait sans doute fait beaucoup plus d'étincelles, la tessiture basse éteignant mécaniquement le timbre. Ce qui rejoint la même remarque que pour Marie Kalinine, donc.

J'ai le sentiment désagréable d'avoir paru assez négatif alors que j'ai finalement tout aimé (peut-être moins la grande tirade de Vénus, déjà pas la plus grande trouvaille de Dauverge, par Chantal Santon, vu que le texte était impossible à suivre et la voix pas adéquate non plus), de l'œuvre aussi bien que du résultat interprétatif – avec la petite frustration d'un manque de déclamation, mais avec des artistes de ce niveau (et quelques-uns qui jouaient vraiment le jeu), ce n'est pas une grande mortification non plus.
Je suppose que c'est le principe même d'entrer dans le détail qui met en valeur les petites réserves : souligner tout ce qu'on a (de belles voix qui chantent juste et avec implication) est tellement évident qu'on entre dans d'autres. Et puis il y a mes marottes (probablement plus fondées que pour Wagner) sur la mise en valeur du texte, que tous les contemporains décrivaient comme primant sur la musique dans les techniques de chant (les français ayant la réputation de hurleurs) ; dans l'absolu, c'est bien chanté tout de même. [Disons qu'à volume sonore tout aussi modeste, on pouvait avoir des couleurs vocales plus libres et séduisantes, un texte énoncé avec plus de naturel.]

Illustration : Mathias Vidal, grand-prêtre de la diction dans un petit couvent, tiré d'un cliché de Jef Rabillon.



6. État des lieux du chant baroque français

Pour le chant baroque dans l'opéra seria, un point a déjà été partiellement réalisé .

Cette soirée donne l'occasion de mentionner quelques évolutions.

Le niveau des orchestres (et en particulier des orchestres baroques, de pair aussi avec la spécialisation des facteurs, je suppose) a considérablement augmenté au fil du XXe siècle, et il est assez difficilement contestable que dans tous les répertoires, on entend aujourd'hui couramment des interprétations immaculées de ce qui était autrefois joué un peu plus à peu près, que ce soit en cohésion des pupitres, en précision des attaques, en célérité, en justesse.

La voix n'a pas les mêmes caractéristiques mécaniques et c'est sans doute pourquoi elle est beaucoup plus tributaire de l'air du temps, des professeurs disponibles, de la langue d'origine des chanteurs.

        Au début de l'ère du renouveau baroque français, de la moitié des années 80 à celle des années 90, le vivier était constitué essentiellement de spécialistes, formés pour cette spécialité par Rachel Yakar (pour la partie technique) et William Christie (de façon plus pratique), de pair avec une galaxie de professeurs qui officiaient pour ceux qui n'étaient pas au CNSMDP (ou à l'Opéra-Studio de Versailles), voire de « rabatteurs » (Jacqueline Bonnardot, quoique pas du tout spécialiste, envoyait certains talents à Christie, m'a-t-il semblé lire).
        Autrement dit, les gosiers qui chantaient cette musique étaient spécifiquement formés à cet effet (d'où la mauvaise réputation de « petites voix » qui a persisté assez couramment au moins jusqu'au début des années 2000), en privilégiant la clarté du timbre, le naturel de l'articulation verbale, l'aisance dans la partie basse de la tessiture, la souplesse des ornements, au détriment d'autres paramètres prioritaires dans l'opéra du « grand répertoire », à commencer par la puissance et les aigus. (Un certain nombre de ces voix très légères et claires peuvent rencontrer des difficultés dans les aigus, qu'elles ont pourtant, mais que leur technique d'émission, centrée sur une zone plus proche de la voix parlée, ne favorise pas.)

        La reconversion n'était pas chose facile : Jean-Paul Fouchécourt s'est limité à quelques rôles de caractère, Paul Agnew n'a guère excédé Mozart et Britten (il aurait pu, d'ailleurs), Agnès Mellon a fait une belle carrière de mélodiste après sa grande période lyrique, et l'on voit mal Monique Zanetti ou Sophie Daneman chanter un répertoire plus large. Ceux qui se sont adaptés l'ont fait soit assez tôt, au fil du développement de leur voix (Gens, Petibon, et aujourd'hui Yoncheva, dont la formation initiale n'était de toute façon pas baroque), soit au prix de changements assez radicaux, comme Gilles Ragon, qui a assez radicalement changé sa technique pour pouvoir chanter les grands ténors romantiques (avec un bonheur débattable).

        On disposait alors de réels spécialistes, pas forcément exportables vers d'autres répertoires (ne disposant pas nécessairement de la même qualité d'agilité que pour l'opéra seria italien), en dehors de Mozart éventuellement ; mais ils étaient rompus à toutes les caractéristiques de goût (agréments essentiellement, c'est-à-dire notes de goût ; les ornements plus amples, de type variations, n'étaient alors guère pratiqués par les pionniers) et de phonation spécifiques à ce répertoire.
        Christie était assisté, jusqu'à une date récente, d'une spécialiste de la déclamation française du Grand Siècle, qui participait à la formation permanente des chanteurs récurremment invités par les Arts Florissants. L'insistance sur l'articulation du vers, sur la mise en valeur de ses appuis et de ses consonances (ce qu'on pourrait appeler la « profondeur » de son pour les syllabes importantes) était une partie incontournable de son travail de chef, l'une des nouveautés et des forces de sa pratique, dont tout les autres ensembles ont tiré profit – une fois émancipés (ou lassés / fâchés), les anciens disciples allaient travailler chez les ensembles concurrents tandis que Christie formait de nouvelles générations, équilibre qui a pendant deux décennies élargi le spectre des productions où la qualité du français, que le chef y prête attention ou pas, était particulièrement exceptionnelle.

        Mais Christie était seul à produire cet effort de formation – depuis, le CMBV fait de belles choses avec ses chantres, mais plutôt orienté vers la formation de solistes ou de comprimari que de grands solistes, considérant les voix assez blanches qui en sortent souvent (mais ce n'est pas une généralité, témoin l'immense Dagmar Šašková, sans doute actuellement la meilleure chanteuse pour le baroque français). Et cet effort, pour des raisons que j'ignore, s'est interrompu : il a cessé, apparemment, de faire travailler spécifiquement la déclamation, et, lui qui était célèbre pour son tropisme vers les voix étroites et aigrelettes, s'est mis à recruter des voix moelleuses articulées plus en arrière, selon la mode d'aujourd'hui – qu'il chouchoute Reinoud van Mechelen était une perspective inconcevable il y a quinze ans !  [Mode qui a son sens au disque mais est, à mon avis, assez absurde du point de vue des résultats en salle – les voix sont moins intelligibles et ont très peu d'impact sonore, qu'elles soient grandes ou petites.]
        Emmanuelle de Negri, elle-même une voix beaucoup plus ronde que les anciennes amours de Christie, est à peu près la seule de sa génération à avoir repris le flambeau du verbe haut. Elle chante d'ailleurs fort peu d'autres répertoires, et sa Mélisande (tout petit rôle de l'Ariane de Dukas) paraissait un peu désemparée par rapport à un univers technique tout à fait différent du sien – précisément parce que toutes ses forces sont tournées vers l'excellence spécifique du répertoire baroque français.

        Aujourd'hui, par conséquent, plus personne n'informe et ne gourmande, au besoin, les chanteurs sur ce point. On trouve donc (comme dans ce Persée) les voix les plus adaptées à ce répertoire laissées sans direction, ce qui donne à voir de rageant gâchis : non pas que ce soit mauvais, mais ces chanteurs ont tous les moyens et savent faire, à condition d'être entraînés et incités à appliquer ces préceptes.
       À cela s'ajoute le fait que, victime de son succès, l'opéra baroque français accueille volontiers des chanteurs de formation traditionnelle. Certains en font leur seconde maison au hasard des réseaux de leurs années d'insertion professionnelle (Thomas Dolié par exemple, qui a étudié au CNIPAL, plutôt un réservoir de voix pour les grands rôles lyriques… et avec Yvonne Minton) et ont donc l'opportunité d'en acquérir les codes, d'autres le font occasionnellement pour ajouter d'autres répertoires conformes à leur voix (porte d'entrée en Europe pour Michèle Losier), d'autres enfin viennent comme invités-vedettes pour fournir un type de voix rare ou un prestige particulier à une production (Nicolas Testé en Roland, dont on sent les origines extra-baroques, mais qui se plie remarquablement à l'exercice).
        Le problème est que, dans bien des cas, la technique de départ n'est pas vraiment compatible avec le baroque : les voix très couvertes, où les voyelles sont très altérées, n'ont pas grand rapport avec le chant réclamé par ces partitions. Stéphane Degout et Florian Sempey s'en tirent très bien (alors que je ne les aime guère ailleurs), mais on peut s'interroger sur la logique d'employer des voix aussi extérieures au cahier des charges de la tragédie en musique.

J'ai déjà longuement ratiociné sur ces questions dans de précédentes notules, ce qui me mène à quelques interrogations nouvelles supplémentaires.



7. Quelques questions à se poser

D'abord, il ne faut pas désespérer : certains chanteurs qui n'ont pas suivi cette voie manifestent les qualités requises, à commencer par Mathias Vidal (CNSM de Paris) !  Par ailleurs, Christophe Rousset, en plus d'être un peu seul à se consacrer aussi méthodiquement à explorer le répertoire enseveli de la tragédie en musique, demande cet effort de mise en valeur des mots à ses chanteurs – il est un peu celui qui a imposé, par exemple, l'accent expressif ascendant sur les « ah ! », d'abord largement moqué et qui est devenu une norme par la suite chez les autres ensembles (en cours de disparition, puisque plus personne ne semble s'intéresser au texte des œuvres jouées). Son insistance, dans les séances de travail, sur l'expressivité, jusqu'à la demande de l'outrance, est centrale, et se ressent à l'écoute – alors même que sa direction musicale pouvait être, il y a dix ans, assez molle. Il suffit d'observer les mêmes chanteurs chez lui et chez les autres : avec lui, ils phrasent ; ailleurs, certains semblent moins s'occuper des mots.

En revanche, voilà un moment que je n'ai pas entendu Niquet, malgré toutes ses qualités de clairvoyance dans le choix des œuvres et de générosité dans leur mise en œuvre, donner des productions où le phrasé est mis en valeur…

D'où me viennent deux questions, contradictoires d'ailleurs :

        ¶ Alors qu'on s'échine à utiliser des instruments originaux, à les préserver ou à les reconstruire, qu'on va jusqu'à reprendre les diapasons exacts des différents lieux où l'on créa les œuvres, n'est-il pas étrange d'embaucher des chanteurs dont la technique est fondée sur les nécessités vocales de l'opéra italien du XIXe siècle ?  Comment est-il possible, pour ces gens qui s'interrogent sur le style exact d'un continuo de 1710 vs. 1720, sur le nombre de battements d'un tremblement pratiqué dans telle chapelle, de ne pas voir la terrible transgression d'engager des mezzos-sopranos verdiens et des barytons wagnériens pour chanter des œuvres où les interprètes utilisaient une technique tellement naturelle qu'on les décrivait comme criant ? 
        J'ai bien conscience qu'on ne peut pas gagner sa vie en chantant simplement dans les quelques productions de baroque français (essentiellement concentrées à Paris, Bruxelles et Versailles d'ailleurs, plus un peu à Toronto et Boston…), et que construire une voix exclusivement calibrée pour le lied (sans en avoir forcément la diction allemande) serait un suicide professionnel… Mais tout de même, n'y a-t-il pas une réflexion à avoir là-dessus ?

        ¶ Car les tessitures du baroque, et spécifiquement celles du baroque français, sont très basses. Les rôles de dessus chez LULLY culminent au sol, ce qui, joué au diapason d'origine (392 Hz), équivaut à peu près à un fa, soit trois tons plus bas que les mezzos-sopranos verdiens, voire plus bas que les grands rôles de contralto !  Or, on ne peut pas faire jouer la jeune première Andromède pépiant sur son rocher par l'équivalent de Maureen Forrester, n'est-ce pas. Et inversement, faire chanter une soprane aussi bas va l'empêcher de projeter ses sons, voire « éteindre » sa voix.
        C'est pourquoi la catégorisation en soprano / mezzo n'a pas grande pertinence dans ce répertoire, et qu'il s'agit avant tout d'une question de couleur – à l'opéra, dessus et bas-dessus ont d'ailleurs strictement la même tessiture avant Rameau !  Couleur qui ne peut jamais, considérant l'effectif raisonnable, l'accompagnement discret, l'aération des timbres des instruments naturels (pas de mur de fondu comme avec les instruments modernes) et la nécessité d'intelligibilité, être trop sombre, ni le grain trop épais.
       La couverture vocale (c'est-à-dire la modification des voyelles pour pouvoir émettre des aigus qui ne soient pas serrés et poussés) n'a de ce fait pas grand sens dans ce répertoire, en tout cas chez les femmes (chez les hommes, on peut couvrir en mixant chez les ténors, et certains aigus des basses demandent sans doute un peu de rondeur et de protection, procurées par la couverture vocale), pas à l'échelle massive où le chant lyrique l'utilise d'ordinaire (souvent trop ou mal, même pour du Verdi).
       Alors, si l'on ne peut pas changer du tout au tout l'enseignement du chant (la tradition adéquate existe-t-elle seulement encore ?  peut-on la retrouver aussi aisément que pour un instrument ?), ne serait-il pas judicieux, quitte à ne pas être authentique, de remonter le diapason d'un ou deux tons, pour permettre aux techniques d'opéra telles qu'elles sont de retrouver leur centre de gravité et leur brillant – étant calibrées pour s'élever avec confort loin de la zone de la parole…

Illustration : costume de Louis-René Boquet pour les représentations de 1770, une Éthiopienne (parfaitement).

Je livre cet état des lieux à votre sagacité, n'ayant pas de réponse sur la marche à suivre – et tout de même assez émerveillé d'entendre ces œuvres et ces ensembles spécialistes qu'on n'aurait jamais rêvé d'entendre, et certainement pas aussi bien, il y a seulement trente ans ! 

dimanche 28 février 2016

Mars et avril au concert – sélection et conseils


Suite à des demandes de plus en plus pressantes, voici la sélection de nos facétieux lutins pour les deux mois à venir. (Avec, nécessairement, des ajouts de dernière minute pour des concerts plus confidentiels.)  Tiré de ma sélection personnelle, je n'ai pas retiré les codes (les couleurs déclinant la certitude de ma venue et les nécessités de vente).

J'attire notamment votre attention sur les jeunes quatuors Hanson et Akilone, tout à fait exceptionnels, qui méritent le déplacement. Une réalité assez récurrente pour le quatuor : les jeunes ensembles sont souvent plus intéressants, moins assis dans les certitudes de leur style personnel ; beaucoup plus de prises de risque, beaucoup plus d'engagement que les grands quatuors (célèbres à juste titre, mais qui, en s'institutionnalisant, perdent un peu de cette fougue). 

Immanquable, bien sûr, la re-création mondiale de Don César de Bazan de Massenet (Théâtre de la Porte Saint-Martin, le 13 mars), d'après le personnage de Ruy Blas. Avec Jean-Baptiste Dumora, Sabine Revault d'Allonnes, Jean-Claude Sarragosse ! Pour les jeunes, il y a même des places de première catégorie bradées sur BilletReduc. 

Je suis aussi assez curieux de ce fonds de cantiques finno-suédois du XVIe siècle (salle Cortot, le 29 mars).

Autrement, vous trouverez des transcriptions de Beethoven pour octuor à vent (Philharmonie, le 17 avril – Tarkmann est grand), du Damase (1, 2, 3) par l'École de danse (Palais Garnier, le 18 avril), Caplet à Notre-Dame (le 26 avril) !

À cela s'ajoute un peu de théâtre américain (Albee à l'Œuvre, T. Williams à la Colline) qu'on n'a pas si souvent l'occasion de voir en nos contrées.



Et toujours quelques places pas à chères (et bien placées, expérience oblige) à vendre (celles qui sont en rouge). Directement sur ZePass ou par courriel (colonne de gauche).


mar. 01 mars  

(( bastille meistersinger

NDP palestrina monteverdi bach haendel mendelssohn
mer. 02 mars  

PP sibelius 3, nielsen flûte, beeth ccto 3, OP p.järvi
jeu. 03 mars  

**** PP sibelius 3, nielsen flûte, beeth ccto 3, OP p.järvi

AV **** PP sibelius 3 lupu järvi

bastille trovatore

MR chosta 5 hindemith visione liszt brceau / muti ONF
ven. 04 mars  

)) bastille barbiere

****PP bruck 9 widmann flûte / inbal OPRF (pahud)
sam. 05 mars  

16h st grmain musiques sacrées esp boterf CNSM lyon

bastille meistersinger

MR chosta 5 hindemith visione liszt brceau / muti ONF

soubise ctre-sjets haendel bach telemann sonates cctos
Programme

Georg Friedrich Haendel (1685 – 1759)
Trio Sonata en sol majeur, HWV 399 Allegro
A tempo ordinario
Allegro, non presto
Passacaille
Gigue (Presto)
Menuet (Allegro moderato)
Georg Philipp Telemann (1681 – 1767)
Double concerto pour flûte à bec, viole de gambe et orchestre en la mineur, TWV 52:a1 Grave
Allegro
Dolce
Allegro
Entracte
Johann Sebastian Bach (1685 – 1750)
Concerto pour clavecin et orchestre en la majeur, BWV 1055 Allegro
Larghetto
Allegro ma non tanto
Georg Philipp Telemann (1681 – 1767)
Double concerto pour flûte à bec, traverso et orchestre en mi mineur, TWV 52:e1 Largo
Allegro
Largo
dim. 06 mars  

17h st éloi musiques sacrées esp boterf CNSM lyon

bastille trovatore

colonne 16h trios ac cor/durand/brahms
lun. 07 mars (Semaine 10)  

(( garnier iolanta

TCE schubert statz quintette vcls brahms clar talich hoffman lethiec
mar. 08 mars  

? garnier damrau deutsch ?

TCE schubt 3 EOP
mer. 09 mars  

bastille meistersinger

garnier iolanta

orlouvre Charpentier smne snte daucé Leçon vddi miserere stabat, litanies
jeu. 10 mars  

**** MR debussy prntmps chausson fête poulenc animx ccto org / ONF gabel (latry)

bastille trovatore
ven. 11 mars  

**** MR Lalo Jacquerie

CNSM gary hoffman jsq 17h30

CNSM manchester PMDavies turnage boulez

garnier iolanta

gaveau piano : ciurlionis schumann 9 proko la ; MUZA RUBACKYTE

massy italienne CHER

§ 19h15 louvre marchenerz + trio krtg

§ louvre trios mzt schum ktg widmann par widmann et tabea
sam. 12 mars  

18h MR Castillon QuatPia, St-S SQ2, Fauré piano / girod, mmbres ONF

20h ? MR Collard msq frçse

? CNSM jolas iliade

¤15h cortot devienne mzt dantin, quatuors avec basson

§ NDLiban ut 5 beeth 5 galanta

§ villeneuve-st-g siegfried I/copland clar/5 épisodes heroic ma mre l'oye ONDIF
dim. 13 mars  

! 16h MR latry org 15€

16h st martin massenet bazan

17h st-cloud siegfried I/copland clar/5 épisodes heroic ma mre l'oye ONDIF

18h MR mélodies gubisch altinoglu

PP 14h30 montgeroult sonate vln pia

§ 17h Riv' :ground et follias byrd à bach cornet bouquin ou flûtes + trocellier
lun. 14 mars (Semaine 11)  

garnier iolanta
mar. 15 mars  

**** )) bastille trovatore bilyy sartori he

? CNSM jolas iliade

AV ****2 PP requ mzt minko

gaveau siegfried I/copland clar/5 épisodes heroic ma mre l'oye ONDIF

§ 20h MR matrise gtuit byrd messe, chnsns janequin desprez, serminsky
mer. 16 mars  

(( châtelet sondheim passion

19h CNSM org

amphi AL tchaï mouss rach chosta-juives mélodies

§ TCE haydn paroles croix herreweghe
jeu. 17 mars  

12h30 pp mcGown myrthen/clown/passagères/HahnStevenson

? CNSM jolas iliade

garnier iolanta

singer-polignac hanson SQ beeth 7 mzt quint clar

TCE mahler 5 jansons radio bavaroise coriolon beeth

§ gaveau king's singers Ireland, Tallis, Byrd, Gibbons, Elgar, Britten, The Beatles
ven. 18 mars  

**** châtelet sondheim passion

19h30 arod SQ

20h st-bastille résidnce msq chb

§ MR ascension, images deb / franck OPRF

§ TCE lully charpentier leclair rameau otter naouri haïm
sam. 19 mars  

(( bastille R&J proko

15h CiMu the artist ONIDF

garnier iolanta

MR proko 5 glière ccto cor RK pâque russe / N.Järvi ONF

¤ OR don gio
Jean Teitgen, Birgitte Christensen, Anna Grevelius, Laura Nicorescu,
Matthew Durkan, Patrick Bolleire

Frédéric Roels, mise en scène

Chœur Accentus
Orchestre de l‘Opéra de Rouen Haute Normandie,
Léo Hussain, direction

§ 17h abbesses beyer hantaï bach
dim. 20 mars  

**** 17h CiMu Artist

14h&17h CiMu the artist ONIDF

16h30 mahler 3 LAP dudamel

17h bagneux siegfried I/copland clar/5 épisodes heroic ma mre l'oye ONDIF

¤ OR don gio
lun. 21 mars (Semaine 12)  

AV ****3 bastille meistersinger

garnier iolanta

TCE bostridge rousset amadis pygmalion purcell haendel

§ orlouvre matthäus 1/partie NIEUWE PHILHARMONIE UTRECHT
mar. 22 mars  

amphi AL petite messe rossini

AV **** CiMu mzt 25 strauss htbs bizet ut fauré pavane leleux COE pappano (2 plces)

bastille R&J proko

CNSDM lauréats SG mus chb

TCE vivaldi khoury takemitsu mendelssohn hope nemtanu EOP
mer. 23 mars  

bastille R&J proko

garnier iolanta

gaveau cctos à 2 et 3 clvecins : martin alard rondeau, françoises, PCA !

massy st jean aedes

PP rachma cloches cprice bohémien ccto 4 rozh OP
jeu. 24 mars  

)) châtelet sondheim passion

****2 PP rachma cloches cprice bohémien ccto 4 rozh OP

13h st-bastille schubt quat 15

amphi AL petite messe rossini

§ CNSM atelier lyrique
ven. 25 mars  

AV ****2 PP gardiner matthäus

bastille meistersinger

MR purcell mary haydn nelson martland eternity / jeannin OPRF & ChRF

§ CNSM atelier lyrique

§ OR bach matthäus pichon prégardien
Sabine Devieilhe, Julian Prégardien, Stéphane Degout , Damien Guillon, Maïlys de Villoutreys, Terry Wey, Samuel Boden , Thomas Hobbs , Christian Immler

§ TCE jaroussky legrenzi steffani strozzi sartorio cavalli monteverdi
sam. 26 mars  

16h orsay delage/pillois/persanes st-s/caplet/pierné/stra brahim-djelloul, mus garde rép

bastille R&J proko

garnier iolanta

OR bach matthäus pichon prégardien

soubise akilone SQ schubt12/ravel/dvoCyprès/boutry
dim. 27 mars  

20h OR bach messe christie watson negri mead mechelen morsch

garnier fleming jordan piano
lun. 28 mars (Semaine 13)  

****2 )) bastille meistersinger

garnier iolanta
mar. 29 mars  

bastille R&J proko

cortot piæ cantiones en finnois suédois et latins 1582
mer. 30 mars  

garnier iolanta
jeu. 31 mars  

(( colline t.williams ménagerie de verre jeanneteau

(( ville pirandello personnages auteur

****2 PP sibelius 4, nielsen clar, tchaï vln, OP järvi, bell

bastille R&J proko

CNSM notre falstaff

§ singer-polignac cc chb

§ TCE mzt 31, silla, air, britten illuminations, bartok mandarin petibon ONF gimeno
ven. 01 avr.  

)) garnier iolanta stieghorst

bastille R&J proko

CNSM notre falstaff

MR mahler 1 beeth trple ccto / Chung OPRF

TCE bruckner 8 nézet rotterdam
sam. 02 avr.  

11h MR milhaud création menotti maze sosnina sable / OPRF 20€

15h cortot schumann trio 2 brahms quintette
dim. 03 avr.  

)) œuvre woolf

10h45 cirq tchaï 6 colonne petitgirard

bastille R&J proko
lun. 04 avr. (Semaine 14)  
 
mar. 05 avr.  

! résas TCE

(( BdN mies julie angl

CNSM dir chant (arrngmts op)
mer. 06 avr.  

****2 TCE lully persée

AV **** CiMu airs sérieux et à boire

café de la danse farfadet adam
jeu. 07 avr.  
 
ven. 08 avr.  

19h CNSM accmpgnmt vocal le bozec

bastille R&J proko

billettes livre aliénor//hersant//DeCælis,Brisset

SQY claudel annce mrie, beaunesne

§ PP mazzola b-a millhaud/sacre/rosamunde ONDIF
sam. 09 avr.  

(( bastille rigoletto kelsey

)) ville pirandello personnages auteur

17h abbesses schwaiger heine dichterliebe clara liszt, 3 schwanengesang, brahms

AV ****2 TCE werther florez didonato rivenq ONF lacombe

SQY claudel annce mrie, beaunesne
dim. 10 avr.  

bastille R&J proko

hanson SQ harpes camac : mendel, debussy
lun. 11 avr. (Semaine 15)  

bastille rigoletto kelsey

BdN i.cooper schumann liszt wagner
mar. 12 avr.  

bastille R&J proko

§ orlouvre luminis// pachelbel,buxtehude,bach
mer. 13 avr.  

19h CNSM jeff cohen

bastille R&J proko

invalides cathdrl création haydn en fr palais-royal sarcos
jeu. 14 avr.  

(( ville madame ong

19h CNSM jeff cohen

bastille rigoletto kelsey

gaveau poul hirt&lieder//arpeggione/trioOp.99

invalides korngold bloch cctos vcl gaillard lamoureux judd

§ massy renarde

§ perreux mazzola b-a millhaud/sacre/rosamunde ONDIF

§ vx cservtre création haydn en fr palais-royal sarcos
ven. 15 avr.  

**** MR prodigue, srtilèges / Franck, OPRF

AV **** dvo 8 grieg ccto tonhalle bringuier thibaudet

bastille R&J proko

massy renarde

puteaux mazzola b-a millhaud/sacre/rosamunde ONDIF

TCE rachma symph 2 ccto 1 ashkenasy phia bezezovsky

vx cservtre création haydn en fr palais-royal sarcos

§ louvre mandoline bach 1004 et japs

§ OR Lully Persée Niquet
Hélène Guilmette, Chantal Santon Jeffery, Katherine Watson, Mathias Vidal, Zachary Wilder
Jean Teitgen, Élodie Hache, Marie Kalinine, Thomas Dolié, Cyrille Dubois, Tassis Christoyannis

Choeur et Orchestre du Concert Spirituel,
sam. 16 avr.  

)) bastille R&J proko

)) BdN mies julie angl

garnier ballet damase sauguet paulli

herblay athalia haendel
dim. 17 avr.  

)) madame ong

**** 11h PPR ouv fidelio et symph 7 pour nonette à vent !

16h herblay athalia haendel

bastille rigoletto kelsey

garnier ballet damase sauguet paulli
lun. 18 avr. (Semaine 16)  

****2 garnier ballet damase sauguet paulli

debussy schubert quint haydn 20-2 ébène, capuçon
mar. 19 avr.  

*** PP gurre OO

19h gtuit bondy amy beach Peter Pan
mer. 20 avr.  

(( bastille rigoletto lungu

¤ TCE bruck 6 brahms tgq enlightmt rattle
jeu. 21 avr.  

****2 PP philhar sibelius 5 ccto faune kavakos franck

invalides marches funèbres auber adam halévy fauré nuits été deshayes, wellington beeth

OR lucio silla skerath fagioli insula equilbey
Franco Fagioli, Olga Pudova, Paolo Fanale
Chiara Skerath, Hila Fahima

Jeune Chœur de Paris,
Insula Orchestra,
Laurence Equilbey, direction

orlouvre lassus herreweghe : larmes st-pierre//madrigx sprtuels

§ TCE berg frühe mahler 4 mzt divtmto schäfer ONF gatti
ven. 22 avr.  
 
sam. 23 avr.  

11h MR schumann symph 3 norrington OPRF

AV **** MR schumann 3 haydn 49 mzt ccto 27 / norrington OPRF (laloum)

bastille rigoletto kelsey

CiMu lucio silla
dim. 24 avr.  

12h garnier schumann-reimann chb
robert Schumann fantasiestücke,
pour violoncelle et piano
Aribert reimann aria pour violoncelle et piano
Aribert reimann adagio zum Gedenken
an robert Schumann, pour quatuor à cordes
robert Schumann Quintette pour piano
et cordes, op. 44
_
lun. 25 avr. (Semaine 17)  
 
mar. 26 avr.  

bastille rigoletto kelsey

NDP caplet charpentier lully bach lallouette ; achille, castagnet
mer. 27 avr.  
 
jeu. 28 avr.  

)) colline t.williams ménagerie de vere jeanneteau

bastille rigoletto lungu
ven. 29 avr.  

§ MR tchaï 4//ginastera malambo//chopin 1// lehninger, OPRF
sam. 30 avr.  

AV **** MR mendel 1//haydn 82//mzt ccto 22//norrington OPRF (cassard)
dim. 01 mai  
 
lun. 02 mai (Semaine 18)  

3**** bastille rigoletto kelsey


dimanche 1 novembre 2015

[Carnet d'écoutes n°91] – Un opéra français de Mozart, un opéra biographique sur Schubert, le Sacre par Currentzis…


Et le nouvel orgue de la Philharmonie de Paris, Moses par Castellucci et Ph. Jordan…






--

Lachnith-Mozart – Les Mystères d'Isis (1801)


Une petite douceur, tirée du concert, vient de paraître…

lachnith

Au début du XIXe siècle, on n'avait rien joué de la Flûte Enchantée, grand succès outre-Rhin, en France – en dehors de quelques airs, dont le premier air de la Reine de la Nuit… en italien !  La version originale n'est donnée qu'en 1829 (à l'Opéra-Comique, par une troupe allemande), mais l'essentiel de l'œuvre est donné dès 1801 (exactement comme pour le Freischütz d'abord joué, avant l'adaptation de Berlioz, sous la forme du Robin des Bois de Castil-Blaze) dans un nouveau livret de Morel de Chédeville (qui reprend l'essentiel de l'argument).

Les personnages et les situations demeurent sensiblement les mêmes (leurs noms sont surtout hellénisés : la Reine de la Nuit devient Myrrène, Tamino devient Isménor, et plus fort encore, Papageno transmute en Bochoris) ; en revanche la musique est redistribuée (les numéros n'arrivent pas du tout au même moment), pas toujours attribuée aux mêmes situations (la musique de Monotatos attribuée à Mona-Papagena et Pamina, par exemple).

L'œuvre devant être présentée à l'Opéra, il fallait écrire des récitatifs, que Ludwig Wenzel Lachnith fournit dans le style en vigueur, d'une sobriété gluckiste assouplie (on est très proche de l'esthétique de ceux de Sémiramis de Catel, voire des différents Grétry sérieux [voir les liens au début de cette notule], du Thésée de Gossec, etc.). Il arrange aussi la musique elle-même (suppression, ajouts de mesures dans tel ou tel phrasé), changeant des ensembles en airs et des airs en ensembles…  Le tout devient, en y ajoutant son nouveau texte français, très conforme au style du temps – la Flûte mozartienne s'échappant déjà du classicisme standard tout en en conservant l'essentiel des codes, sa concordance avec le goût révolutionnaire est assez parfaite.

Le disque lui-même est excellent, puisque servi par les meilleurs spécialistes de l'Univers de la musique française de la période : Le Concert Spirituel, Diego Fasolis, Chantal Santon-Jeffery, Marie Lenormand, Renata Pokupić, Sébastien Droy, Tassis Christoyannis, Jean Teitgen (et quand même Camille Poul, Jennifer Borghi, Mathias Vidal et Marc Labonnette dans Dames, Suitvantes, Prêtres, Ministres, Gardien !). Outre le fait que Vidal parvient à impressionner dans ses courtes interventions (maître absolu du récitatif), c'est Christoyannis qui ébaubit le plus, d'une distinction (et d'une articulation française !) à peu près sans exemple.
La diction générale est bonne, mais ne permet pas toujours, chez les dames, de se dispenser du livret.

Petit reproche, la notice de Glossa, passionnante au demeurant sur le cahier des charges et les conditions de la création, ne détaille pas clairement les correspondances entre numéros (l'essentiel est dit dans un coin de paragraphe). Certes, le disque s'adresse à un public déjà un peu informé et curieux, qui n'aura aucun mal à vaindre ce blind test – puisque se mêlent à la Flûte des numéros des Noces de Figaro (dernier air de Figaro, les cors solos du final du IV), de Don Giovanni (premier air d'Anna, air « du champagne »), de la Clémence de Titus (strette de Sextus, dernier air de Vitellia), l'adagio de la Symphonie n°103 de Haydn et quelques sources anonymes.
J'ai même cru y percevoir (première scène de l'acte II) le Quatuor de l'acte I de L'Amant jaloux (« Plus d'égards, plus de prudence »), mais à la réécoute, il s'agit en réalité des avances de Monostatos (« Du feines Täubchen »), très proche effectivement, et arrangé avec une fin d'un grand élan lyrique (qui se trouve chez Grétry et pas chez Mozart). C'est ce genre de détail qui permet d'adapter l'œuvre au goût français, avec un certain bonheur.

Voyez par exemple (cliquez pour le son) comment la comptine « Ein Mädchen oder Weibchen » devient (IV,2) à la fois galante :

La vie est un voyage,
Tâchons de l'embellir ;
Jetons sur ce passage
Les roses du plaisir.

et philosophisante :

À la ville, au village,
On est content de rien ;
Pensons comme le sage
Qui dit que tout est bien.

Le vrai bien n'est qu'imaginaire,
Chacun jouit de sa chimère ;

pour finir sur l'inévitable éloge bachique :

Chantons, célébronts tour à tour,
Bacchus, le plaisir et l'amour
Que sous la treille
Le plaisir veille :
Tenant le flambeau de l'amour,
Bacchus sera le Dieu du jour.

Si l'on n'est pas en France avec ça !

Autre beau moment, la strette de l'air de bravoure de Sextus (Parto), qui devient un duo pour ténor et baryton (avec clarinette obligée) – acte I, scène 7 (« Ô Ciel, quelle injustice »).

Du fait de l'usage d'autres sources, il manque quelques tubes (Der Hölle Rache, quand même !), mais il y eut plusieurs états de la partition, peut-être l'inclusion eut-elle lieu à un autre moment. En tout cas, je trouve pour ma part le résultat infiniment plus convaincant que les îlots de musique très mélodique au milieu de babillage terne comme c'est le cas dans l'original (où la rupture entre le parlé et le chanté est vraiment abrupte) – ici, on passe progressivement du récitatif assez nu aux airs très mélodiques, avec beaucoup plus de souplesse. Sans parler du plaisir d'avoir du Mozart en français, bien sûr !

On peut jeter une oreille et consulter le livret (avec des indications sur les sources musicales – incomplètes et vagues, mais tout de même).

Vous pouvez trouver d'autres œuvres du même genre dans ce chapitre de CSS.

--

Franz von Suppé – Franz Schubert

Largement fondée sur des lieder de la Meunière de Schubert (Das Wandern, Morgengruß, Ungeduld) – mais on y retrouve aussi Marguerite au Rouet, Heidenröslein, La Truite ou la strophe majeure de Gute Nacht, par exemple – cette opérette égrène sous forme réarrangée un certain nombre de lieder-cultes… Il faut entendre ce Morgengruß en trio avec ses jolis contrechants, entrecoupé de récitatifs alternativement schubertisants et johannstraussiens !

suppé schubert

Très bien servi par l'omniprésent et omnipotent American Symphony Orchestra (le plus large répertoire du monde ?) sous la direction du visionnaire Leon Botstein – on reparlera d'eux prochainement.

Se trouve dans leur collection de téléchargements numériques officiels.

Dans le genre des adaptations insolites, il y a bien sûr Pagnol-Rossi.

--

Le nouvel orgue Rieger de la Philharmonie de Paris

(Entrée commandée par le tout nouveau carnet collectif Battement(s).)

rieger

Mercredi et jeudi, inauguration de l'orgue de la Philharmonie de Paris, que les spectateurs avaient déjà pu découvrir, de façon inattendue, dans le concert d'opéra français de Minkowski (l'air inédit de Poniatowski se déroule dans une cathédrale).

La disparité des salles de concert permet sans doute d'anticiper moins facilement le rendu d'un tel instrument, et la firme Rieger était donc face à un véritable défi.

L'orgue n'est pas entièrement prêt (tous les tuyaux sont là, bien sûr, mais deux tiers des jeux seulement sont harmonisés), mais on pouvait déjà percevoir quelques constantes :
¶ les timbres, pour un orgue néo-classique de concert, ne sont pas trop froids ni métalliques, principal écueil pour la plupart des proto-Klais en circulation ;
¶ les jeux de fond sont même d'une rondeur et d'une fermeté rares, pas souvent entendu d'aussi beaux ;
¶ la réverbération plutôt généreuse de la Cathédrale Œcuménique de la Porte de Pantin évite la trop grande sécheresse, et gère assez bien la surpuissance de l'instrument (capable d'engloutir un orchestre entier en plein tutti !). Pas de flou, pas d'aspiration du son… l'instrument et la salle sont mutuellement parfaitement calibrés.

Le jeudi, l'improvisation de Thierry Escaich, nettement moins vaporeuse et sophistiquée que le mercredi, était un bout de patrimoine : répétitions sur différents registres (et à traverse force marches harmoniques) d'un thème de toute évidence inspiré de Widor (ou du Chasseur maudit de Franck),  avec une partie centrale où l'on sent poindre le Bartók de Barbe-Bleue. Le tout s'achève avec des accords typiques du style organistique (grands aplats triomphants) enrichis de notes étrangères, très impressionnants.

Curieux d'entendre les quatre improvisateurs sur l'orgue complet, au début de l'année prochaine.

--


Schönberg – Moses und Aron – Castellucci, Ph. Jordan

moses_castellucci.jpg

Déjà touché un mot à l'occasion de la retransmission (toujours visible), mais depuis vu en salle.

Quelques précisions : très bons solistes, en particulier Thomas Johannes Mayer (Moïse), bien sûr, mais aussi John Graham-Hall (Aaron) dont on peut lire plutôt du mal un peu partout, et qui passe très bien dans Bastille – le grain n'est pas aussi pur et juvénile que Langridge en studio, forcément, mais on n'entendrait pas forcément Langridge au font de Bastille !  Il joue adroitement d'un mécanisme léger très puissant (sorte de voix mixte légère ou de fausset renforcé, mais qui a encore plus de largeur que sa voix de poitrine standard) et assène tout son rôle avec assurance et nuances, de quoi mériter de meilleurs commentaires que ceux soulignant un timbre fatigué (en réalité, c'est surtout que le métal est assez apparent, ce qui lui permet d'être entendu).

Pas mal de doutes sur la sonorisation, je m'explique vraiment mal comment la voix parlée, même d'un chanteur aussi aguerri que Mayer (par ailleurs pas la plus grosse projection du monde, quand même), peut être aussi sonore qu'une voix chantée (et sembler provenir de toute la scène). Ce n'est pas honteux du tout, mais ça confirme ce qu'on peut supposer sur la sonorisation de confort (remarquablement faite d'ailleurs, puisqu'on ne peut jamais en jurer et que ça paraît toujours naturel).

J'avais dit du mal du Chœur de l'Opéra à partir de la retransmission, mais en salle, cette pâte lourde et cet impact brutal correspondent assez bien au sujet. Bien sûr, j'aurais volontiers échangé contre les demi-teintes de n'importe quel chœur allemand, mais ce n'était pas indigne du tout, en tout cas pas braillé comme c'est quelquefois le cas à l'ONP, et très conforme au climat archaïsant campé par le livret et Castellucci.

Sinon, visuellement, ce que fait Castellucci est assez joli – pas du tout dramatique, mais vu le vague néoplatonisme visqueux du livret pseudo-talmudique, on ne peut pas forcément faire mieux. L'œuvre elle-même fonctionne moins bien sur scène qu'au disque pour cette raison : la musique, malgré les nombreuses formes exploitées, ne sonne pas avec beaucoup de variété (tout le temps pleine, pléthorique, légèrement tendue), et il ne se passe à peu près rien – de l'Égype au Veau, tout peut être résumé par « avoir l'idée de Dieu, n'est-ce pas déjà une représentation de Dieu ? ». Sacré pitch pour un thriller.

Agréable (à défaut d'être profond, puisque ce sont finalement de grands aplats visuels), la mise en scène finit par se répéter assez pendant la seconde moitié de l'acte II (après l'avertissement du Jeune Homme – Nicky Spence y est assez marquant, d'ailleurs), surtout que le goudronnage et la piscine à double fond ne sont pas les trouvailles les plus vertigineuses de la soirée.
Rien de très hardi ni choquant en tout cas – à part pour les choristes souillés et les femmes de ménage surmenées, sans doute (ils doivent moins rigoler).

--

Stravinski – Le Sacre du Printemps – Musica Æterna, Currentzis

currentzis sacre

Écouté avec curiosité la toute neuve version de Teodor Currentzis dirigeant son orchestre MusicAeterna (je crois que c'est la graphie officielle…). Après avoir trouvé sa Dido chichiteuse, ses Noces magnifiques, son Rameau décoratif, agréablement translucide et étrangement planant, son Così très pâle… je ne suis pas très surpris de son Sacre.

On retrouve en réalité exactement la même ligne stylistique dans tous ses enregistrements (sa Quatorzième Symphonie de Chostakovitch incluse : sèche, claire, méditative), et ce Sacre ne fait pas exception.

Pour Currentzis, la musique est clairement première, et il semble surtout passionné par le naturel du résultat, la qualité du flux sonore… Aucune recherche dramatique, par exemple. Cela fonctionnait magnifiquement dans les Noces où le livret et la musique sont déjà très virevoltants, et pas pour Così qui se transformait en une suite d'ensembles vocaux sans grand enjeu ; pareil pour sa Didon contemplative et apprêtée, que je n'ai pas vénéré pour ma part, mais qui en a séduit beaucoup d'autres ; ou pour son Rameau qu'on peut trouver superficiel (très lisse) ou très séduisant (de très beaux climats suspendus, une lumière crue, une vivacité froide).

Et pour le Sacre, il en va de même : net, limpide, dans un son d'orchestre très fin, très simple, aucune boursouflure, aucune recherche de violence. Currentzis ne prête attention qu'à la musique, absolument rien de dramatique ici – la danse, elle, est plus présente dans la légèreté de la touche que dans la pulsation sauvage. L'œuvre s'écoute d'un flux unique, avec une évidence étonnante considérant la variété des épisodes très typés, sur la partition.

J'aime vraiment beaucoup, mais ça ne plaira pas à ceux qui veulent avoir le goût du sang, assurément.


jeudi 12 février 2015

Charles GOUNOD — Cinq-Mars : résurrection !


Je n'en ai pas encore parlé, mais la résurrection à Munich, Vienne et Versailles, les 25, 27 et 29 janvier derniers, était un très grand moment.

¶ D'abord, pour ceux qui la chercheraient, vu qu'elle n'a été disponible sur la Radio Bavaroise qu'une poignée de jours, voici la bande. Je précise qu'elle ne contient, à dessein, que la première moitié du spectacle : Bru Zane va la publier sous forme de disque, et je ne veux pas dispenser quiconque de l'acheter ! Il s'agit de la soirée d'ouverture, à Munich, où Charles Castronovo, souffrant, avait été remplacé par Mathias Vidal (ayant étudié sa partie écrasante, hors de ses habitudes vocales et en principe un peu loin de sa voix… en 24h !). Le pire est qu'il s'y montre, comme d'ordinaire, miraculeux d'aisance, de naturel et surtout d'éloquence – et les mots sont ciselés, sans que le la ligne paraisse éclatée. Mais comment fait-il, pour que chaque mot vibre d'ardeur, pour que chaque inflexion soit juste et bouleversante, alors qu'il découvre quasiment ce qu'il lit ? Un artiste incommensurable, sérieux candidat au titre de meilleur ténor du monde.

¶ Concernant l'œuvre, on pouvait craindre, vu la notoriété de Gounod, une mise sous le boisseau pour quelque raison. À part Le Tribut de Zamora (qui, à la lecture de la partition, m'a paru très valable mais pas vertigineux non plus), tous ses opéras ont été remontés à ce jour… pourquoi ce très appétissant grand opéra, son avant-dernier (conçu comme un « opéra comique » en IV actes, donc avec dialogues parlés, mais refondu en V avec récitatifs chantés dès l'année de la création, en 1877), n'avait-il jamais été remonté, alors même que l'air « Nuit resplendissante » fait depuis longtemps les beaux jours des récitals de langue française ?
Je n'ai pas de réponse au pourquoi, mais à l'écoute, puis à la réécoute… il s'agit, pour moi, du meilleur opéra composé par Gounod (et d'assez loin). Il est vrai que l'œuvre (à l'exception du chœur des conspirateurs, dont le compositeur semble si content qu'il le sollicite quatre fois, alors même qu'il inclut déjà des répétitions de couplets !) est peu prodigue en grandes mélodies propres à devenir des standards. En revanche la qualité de l'écriture est constante, le drame très intense, rien ne se relâche, et les morceaux de bravoure (duos d'amitié, d'amour, d'affrontement, pièces de caractère, grands récitatifs enflammés, scènes de foule avec solistes…) se succèdent sans cesse, sans qu'il semble jamais y avoir de remplissage. Même le ballet archaïsant est remarquablement écrit – au moins du niveau de celui d'Henry VIII de Saint-Saëns, rien à voir avec Faust ou Roméo !
L'acte de la conspiration est une formidable orgie sonore renouvelée de façon ininterrompue, qui se mesure à l'aune de ceux du Roi malgré lui de Chabrier ou des Huguenots de Meyerbeer.
Seule réserve : le livret, très efficace et convaincant, utilise bizarrement Marion de Lorme et Ninon de Lenclos, parquées dans des coins d'actes pour chanter des divertissements.

¶ Le plateau était lui aussi extraordinaire, permettant de servir l'œuvre avec le meilleur des luxes.

Suite de la notule.

mercredi 2 juillet 2014

Hors du nombril du Monde : opéra en province et à l'étranger en 2014-2015

En tant que spectateur, on a sans doute tendance à faire trop confiance à ses goûts : j'étais déçu de la saison de l'Opéra de Paris (je vais même probablement faire le voyage à Lyon pour voir Rusalka, plutôt que la production locale !), mais en fin de compte, il y a tellement à faire qu'on est bien content que toutes les salles ne proposent pas la même densité que Versailles en chefs-d'œuvres incontournables ou que l'Athénée en dispositifs intrigants.

On se retrouve d'ailleurs face au choix d'explorer à fond un domaine qui nous plaît — dans ce cas, en voyageant un tout petit peu, rien qu'en France, on peut être comblé ! — ou de varier les plaisirs (dans ce cas, le temps manque rien qu'à Paris). Je suis plutôt dans la seconde perspective (il y aura donc Decaux, Menotti, Uthal, Amendoeira et Bobby & Sue), mais pour ceux qui souhaitent plutôt approfondir la première, voici de quoi vous occuper un peu l'année prochaine.

Comme l'an passé, en gras les œuvres peu données et particulièrement intéressantes, en souligné les distributions très alléchantes.

Suite de la notule.

samedi 11 mai 2013

CIMCL - Concours International de Musique de Chambre de Lyon, 2013 : lied & mélodie


En août dernier, j'avais touché un mot de ce concours, disposant du jury liederistique le plus prestigieux possible. Il vient de s'achever, et je voudrais y revenir.


Cyrille Dubois et Tristan Raës, lauréats du concours.


1. Principe du concours & jury

Voici d'abord la présentation proposée précédemment :

Reçu, voilà quelques jours, une très aimable notification du Concours International de Musique de Chambre de Lyon, qui souhaite manifestement une couverture maximum pour disposer du meilleur recrutement possible. Vu l'intérêt de la manifestation pour les niches abordées ici, je joins volontiers mon obole baveuse à l'éminente entreprise.

Ce concours a été fondé en 2004, et a la particularité de sélectionner chaque année un type de formation, un peu sur le modèle du Concours Reine Elisabeth, mais à plus longue échéance :

  1. trio pour piano et cordes,
  2. quintette de cuivres,
  3. duo voix / piano (lied et mélodie),
  4. duo violon / piano,
  5. quintette à vents (si j'en juge par les lauréats, sur le seul modèle flûte-hautbois-clarinette-basson-cor, il est vrai très courant)
  6. quatuor à cordes


Outre cette structure originale, le concours a pour lui un jury assez impressionnant, fondé uniquement sur la participation de professionnels ayant contribué de façon très conséquente au dynamisme de la mélodie et du lied :

  • Donna Brown, peut-être plus célèbre discographiquement pour le répertoire baroque, mais qui a fait de jolis Debussy,
  • Hedwig Fassbender, spécialiste de rôles de (fort) caractère sur scène, et liedersängerin assez intense. La tension qu'elle parvient à insuffler à ses lieder de Strauss (pourtant des partitions plutôt aimables) est remarquable.
  • François Le Roux, le mélodiste fondamental que l'on sait, à la tête d'une très vaste discographie et fondateur du Centre International de la Mélodie Française (à Tours), où les adhérents peuvent accéder à des oeuvres introuvables, glanées au fil des ans en bibliothèque. Egalement organisateur pendant cinq ans des récitals à la Bibliothèque de France.
  • Wolfgang Hozmair, qui malgré toutes les réserves que l'on peut faire sur la voix, la carrière, a produit certains disques de lieder d'excellente qualité, à commencer par son Winterreise et Dichterliebe (voir ici.
  • Roger Vignoles, un des accompagnateurs incontournables d'aujourd'hui pour le lied. J'avoue que le son timide m'a un peu déçu en salle, mais il a commis de beaux disques - voir par exemple son Winterreise avec Thomas Allen ou Frauenliebe und Leben avec Bernarda Fink.
  • Philippe Cassard, pianiste spécialisé dans la musique de chambre et la mélodie. Egalement auteur d'une monographie sur Schubert (Actes Sud).
  • John Gilhooly, directeur du Wigmore Hall, un des hauts lieux du lied dans le monde, pourvu depuis quelques années de son propre label (très intéressant, et fournissant les textes complets et traduits des lieder).


Comme si ce n'était pas suffisant, le concours fait aussi oeuvre de promotion du patrimoine mélodistique, puisque l'épreuve éliminatoire impose de picorer dans quatre cycles très rares (suggérés par le partenaire, le toujours providentiel Palazzetto Bru Zane) :

  • Expressions Lyriques de Massenet ;
  • Chansons de Marjolie de Dubois ;
  • Feuilles au vent de Paladilhe ;
  • Biondina de Gounod.


L'administration du concours est fort aimable, puisqu'elle joint les partitions numérisées (accessibles même au public). On voit les bienfaits d'IMSLP pour la paix du monde (les versions scannées libres de droit en sont manifestement tirées).
Tous ces cycles se situent dans le versant lisse de la mélodie, d'esthétique anté-debussyste. Quelle joie d'y trouver, au sein d'une sélection déjà très originale, les Chansons de Marjolie, vrai chef-d'oeuvre du genre, dont on comptait parler prochainement ici.

Autrement, le choix est oeuvres est assez libre, et l'imposé contemporain est de Nicolas Bacri (donc en principe chantable), en cours de composition.

--

Pour les artistes, les inscriptions sont ouvertes jusqu'au 31 janvier 2013. Pour les spectateurs, le concours se déroule du 22 au 28 avril 2013. Si ce n'était pas en semaine et s'il ne m'était pas impossible de prendre des congés à cette période, je serais volontiers allé entendre les éliminatoires pour découvrir de jeunes chanteurs dans un répertoire aussi exaltant. Que ceux qui le peuvent ne s'en privent pas, le concours promet beaucoup, du moins si les candidats sont à la hauteur de ce qui leur est offert.

A suivre !


2. Les épreuves

Le concours s'est déroulé en trois étapes, chacune attestant de capacités spécifiques.

A) Une session de qualification de 15 minutes par candidat (c'est-à-dire par duo piano-chant), comprenant :
=> 1 lied de Schubert, Schumann, Brahms ou Wolf.
=> Des mélodies au choix tirées des quatre cycles romantiques français rares mentionnés ci-dessus (Massenet, Gounod, Paladilhe, Dubois).

B) Demi-finale de 25 minutes :
=> Commande du concours à Nicolas Bacri : Drei romantische Liebesgesänge Op.126, dans un style proche des "décadents" allemands. 15 minutes environ.
=> 1 pièce ou ensemble de pièces composé après 1990.
=> 1 mélodie française (ou ensemble de mélodies) du premier XXe siècle.

C) Finale de 30 minutes :
Programme libre, devant contenir au moins une mélodie française.

De ce fait, on pouvait évaluer aussi bien les capacité dans le lied que dans la mélodie, et dans toutes les époques concernées par le genre (romantique, décadent, contemporain - pour faire simple).

La finale a manifestement été captée (mais je ne parviens pas à mettre la main dessus, rien sur le site du Concours, de l'Université Lyon II, sur la Webradio de France Culture... si plus rien n'est disponible une semaine après le concours, ça devient compliqué !), mais on trouve surtout aisément la demi-finale sur YouTube (même pas clairement recensée sur les sites officiels, j'ai dû passer par le moteur de recherche de YouTube pour la trouver !). C'est la seule à avoir été captée en vidéo, et c'est bien dommage, parce que la pièce imposée (agréable, accessible aux interprètes et au public, mais sans saillance particulière, comme souvent avec Bacri) occupe l'essentiel du temps imparti. Par ailleurs, la mélodie contemporaine n'est pas forcément la plus propice à l'expression de jeunes artistes "forcés".

Je regrette surtout l'absence de captation de la session de qualification (je suppose qu'il s'agit de faire des choix, et de protéger ainsi l'image du concours en captant les sessions les plus restreintes), où l'on trouve généralement une plus grande diversité de personnalités... et où figuraient surtout les quatre cycles proposés par Bru Zane ! Moi qui espérais collectionner les belles versions de Marjolie à cette occasion... [Pour les curieux, le seul disque du commerce (Saint-Denis / Godin) est merveilleux et idéal. Mais en entendre d'autres ne peut pas faire de mal !]

3. Palmarès et candidats

Demi-finalistes :

  • duo CONTRASTE (Cyrille Dubois et Tristan Raes) ;
  • duo PAQUIN et BROEKAERT (Andréanne Paquin et Michel-Alexandre Broekaert) ;
  • duo IRIS (Lamia Beuque et Claire Schwob) ;
  • duo DIX VAGUES (Clémentine Decouture et Nicolas Chevereau) ;
  • duo CEZALY (Céline Mellon, et Elizavetha Touliankina) ;
  • duo BRIOSO (Zsofia Bodi et Nikolett Horvath) ;
  • duo FUJII et MOTOYAMA (Rena Fujii et Norihiro Motoyama) ;
  • duo SOLENN et NAOKO (Solenn Le Trividic et Naoko Jo) ;
  • duo OXYMORE (Etienne Bazola et Thomas Costille) ;
  • duo MAYENOBE et JULIEN (Benjamin Mayenobe et Marion Julien).


Finalistes :

  • duo CONTRASTE (Cyrille Dubois et Tristan Raes) ;
  • duo PAQUIN et BROEKAERT (Andréanne Paquin et Michel-Alexandre Broekaert) ;
  • duo IRIS (Lamia Beuque et Claire Schwob) ;
  • duo DIX VAGUES (Clémentine Decouture et Nicolas Chevereau).


Prix :

  • 1er prix Ville de Lyon (10.000 €€)+ Coup de coeur Bayer & Prix du Public (8.000€ €) : Duo Contraste (Cyrille Dubois, ténor ; Tristan Raes, pianiste) - France
  • 2ème prix ADAMI (7.000 €) : Duo Paquin-Broekaert (Andréanne Paquin, soprano ; Michel-Alexandre Broekaert, pianiste) - Canada
  • 3ème prix (5.000 €) : Duo Iris (Lamai Beuque, mezzo soprano ; Claire Schwob, pianiste) - Suisse
  • Prix Sacem pour la meilleure interprétation de la pièce de Nicolas Bacri : Duo Dix Vagues (Clémentine Decouture, soprano ; Nicolas Chevereau, pianiste) - France


4. Interprétations

N'ayant pu être sur place et considérant que seule la demi-finale est accessible à ce jour, il va de soi que mes commentaires sont à lire non seulement à l'aune de mes limites et subjectivités, mais de surcroît à celle de cette seule épreuve, avec tous les biais que cela suppose.

Le premier prix à Cyrille Dubois n'est pas une surprise : ténor clair (presque aigrelet), prodigue en sons droits, au français parfait et expressif, un peu le genre Mathias Vidal (voix un peu courte mais grand spectre expressif, particulièrement en français). Idéal pour la mélodie, où il brille effectivement ; et il est clair qu'à ce concours, il écrabouille (sans exagération) une bonne partie de la concurrence. Mais la concurrence est un peu déloyale dans la mesure où il fait déjà carrière : il enregistre des disques (Messe de Schumann avec les Cris de Paris, Tistou les pouces verts de Sauguet avec le Philharmonique de Radio-France, petits rôles dans le Paradis Perdu de Dubois et Renaud de Sacchini - avec Rousset !). Et il chante régulièrement (certes, depuis un ou deux ans) dans les plus prestigieuses salles d'Ile-de-France : Opéra-Comique, Athénée, Opéra Royal de Versailles. En janvier dernier, il avait même droit à un récital à l'Opéra de Paris, Amphi Bastille ! Certes, avec l'argument marketing de Michel Dalberto à l'accompagnement, mais tout de même, ce n'est plus exactement ce qu'on peut appeler un débutant dans la carrière...
En plus de cela, son choix de pièces complémentaires était très avisé : son allemand étant moyen, il s'en est tenu au français, avec des pièces de Théodore Dubois (autres que les Marjolie, un peu moins "dramatiques" mais délicieuses) pour les mélodies du premier XXe, et des mélodies françaises de Graciane Finzi, dans un langage léger et totalement tonal, pour les pièces d'après 1990. Que des choses qui convenaient parfaitement à son caractère et demeuraient accessibles pour un public ou un jury en première écoute.

Je m'émerveille toujours de la façon dont, à travers le vingtième siècle, les pianistes accompagnateurs sont passés du statut de chefs de chant empesés à ceux de virtuoses polyvalents et remarquablement sûrs. Même en comparant avec ceux d'il y a deux générations, on n'entend plus aujourd'hui, chez les grands accompagnateurs, que des gens très sûrs de leurs doigts et de leur rythme. Ensuite, bien sûr, les personnalités fortes sont toujours rares, quelle que soit l'époque, mais il est trop difficile d'en juger sur quelques minutes de concours, aussi je m'en tiendrai au coup de chapeau technique. Evidemment, sur une série de trois petits récitals dans des styles très différents, le jury a eu matière pour juger de façon plus éclairée - d'autant qu'y figurent deux grands noms de l'accompagnement de lied & mélodie.




Le fossé est (très) important avec le deuxième prix.

Suite de la notule.

mercredi 10 octobre 2012

Atys de Niccolò PICCINNI - II - La musique de Piccinni (et de Chauvin)



Suite de la première partie, consacrée à la situation temporelle et à la refonte du livret.

A nouveau avec des extraits sonores - et un mot sur l'interprétation en fin de notule.
3 - La position de Piccinni. 4 - Mise en forme piccinniste du livret. 5 - Audaces. 6 - Le rapport à Lully. 7 - Version réduite et abrégée. 8 - Interprétation.


Pour plus de commodité, l'ensemble du texte de ces deux notules assez longues a été réuni en PDF.


3. La position de Piccinni

     Comme signalé dans le précédent épisode, Piccinni appartient à cette génération qui fait entrer la tragédie en musique dans le style classique : disparition du continuo (la basse est simplement tenue par les contrebasses, violoncelles et bassons, même si l'on peut avoir un clavecin dans l'orchestre), fin de l'alternance de l'instrumentarium (les récitatifs sont tous assurés par l'orchestre au même titre que les airs, et contiennent même quelquefois des effets d'orchestration), et d'une manière générale plus d'épure, un goût pour les formules symétriques ou « carrées », prédilection pour les tonalités majeures particulièrement lumineuses.
     Il y aurait de quoi se répandre sur ces questions de transition, qui ne sont pas réellement notre sujet.

     Piccinni se singularise vis-à-vis de Gluck par un soin mélodique supérieur dans le récitatif (et au contraire des airs plus conventionnels), mais comme on le soulignait, il est difficile d'entendre une véritable opposition, tant leur travail tire la tragédie chantée dans la même direction.


Extrait de la fin de l'oeuvre : on y entend le délire d'Atys (avec les spectaculaires récitatifs de Piccinni, admirablement incarnés par Mathias Vidal) et le choeur de déploration dont il est question plus loin dans la notule.


4. Mise en forme piccinniste du livret

     Par essence, cette nouvelle manière, et particulièrement chez Piccinni, Bach, Sacchini et Grétry (la chose est moins flagrante chez Gluck et Salieri), favorise les tonalités majeures et les expressions galantes. On entend donc très peu de mode mineur (qui en devient très saisissant, avantage du procédé), et en revanche quantité d'airs très galants, ornés et dansants comme s'il s'agissait de divertissements pastorales.
     Cela nous fait retomber dans un paradoxe propre à ce temps : en voulant créer un drame épuré, les classiques aboutissent en réalité à un résultat sonore qui tient davantage, à nos oreilles contemporaines, des inclusions de divertissements italiens (comme dans Médée de Charpentier, Le Carnaval de Venise de Campra ou Le Carnaval et la Folie de Destouches) que du grand galbe dramatique du récitatif accompagné.
     Quand cela se joint à des développements poétiques pas toujours heureux (on a longuement observé le cas de la plate exultation de Celænus), on peut évidemment considérer qu'Atys a été abîmé.

     Pourtant, s'il est assez évident que cette refonte n'atteint pas le degré d'audace et la puissance dramatique de son modèle, l'œuvre ne manque pas de charmes, dans l'esthétique qui lui est propre.
     A commencer par le récitatif : beaucoup de belles répliques sont peut-être un peu platement traitées, ou systématiquement servies sur fond de trémolos (le fait de condenser les moments les plus dramatiques en 1h10 rendait parfois presque cocasse l'omniprésence du procédé), et pourtant le galbe des phrases y est particulièrement beau. On est très loin des choses flasques et / ou sans substance musicale qu'on peut trouver chez Sacchini ou Cherubini (qui sont plus proches, surtout le second, des italiens du type Mayr), et on peut même considérer que le soin et l'intérêt du récitatif dépasse assez considérablement les rectitudes de Gluck dans Iphigénie en Aulide, par exemple.

     En termes d'inspiration, à défaut d'être profondément singulière (par rapport à la période, du moins : vu la faible diffusion des partitions et le petit nombre de productions, il est encore difficile de déterminer qui invente quoi !), la partition appartient plutôt à ce qui se fait de mieux dans la tragédie en musique de style classique. Même les airs, d'ordinaire un peu fades (même chez les grands Grétry...), se révèlent de belle facture, avec quelques sommets dès que Piccinni s'aventure dans le mode mineur, comme « Quel trouble agite mon cœur » qui exprime les remords d'Atys trahissant le Roi interpolé ce soir-là avec l'air de Celænus (qui se déroule dans la partition à l'acte suivant), ce qui était plus logique dramatiquement vu ce qu'il restait du texte (exultation du Roi, puis remords d'Atys).





5. Audaces

     A cela s'ajoutaient des étrangetés. Outre Salieri et Catel dont il s'approche pour la qualité du récitatif, Piccinni, écrit, la même année qu'Andromaque, les mêmes types de ponctuations méditatives dans les récitatifs, confiées aux seuls bois. Grétry les utilise généreusement, et toujours en relation avec la mélancolique d'Andromaque. Dans ces extraits d'Atys, on ne les entend que brièvement, mais considérant que quatre mois séparent les deux créations (février 1780 pour Atys, juin pour Andromaque), il est douteux que l'orchestration (qui dépend dans ce cas de la matière musicale) ait été changée si soudainement.
     On est sur le chemin de la recherche de couleur orchestrale, au delà de quelques spécialisations (flûtes bucoliques, trompettes guerrières, trombones « sacrés », etc.), qui fait sa première apparition comme sujet principal de préoccupation à ma connaissance dans les Variations orchestrales sur la Follia di Spagna de Salieri (1815).
     Qui a commencé ? Peut-être Piccinni dans son Roland des mêmes Quinault & Marmontel en 1778 ? Quelqu'un d'autre ? En tout cas, on n'entend rien de tel chez Grétry : rien dans les récitatifs de Céphale et Procris (1773, encore un livret de Marmontel), tout comme dans Les Mariages Samnites (1776, livret de Rosoi d'après Marmontel, décidément, pas étonnant qu'il ait eu autant d'ennemis) où il n'y a que des dialogues. Il n'est pas impossible du tout que le procédé ait été emprunté à quelqu'un d'autre encore, a priori pas un italien vu la prédominance, encore pour longtemps (jusqu'à Donizetti à peu près), du recitativo secco (basse continue ou clavier seuls). Mais quelqu'un désireux de produire un effet, comme Mozart dans le cimetière de Don Giovanni (accompagnement de trombones pour les paroles du Commandeur au milieu du récitatif), a toujours pu l'essayer, quelle que soit sa nationalité et son esthétique.
     Bref, cette nouveauté qui avait frappé beaucoup de monde dans Grétry ne lui est vraisemblablement pas due ; en tout cas Piccinni n'a pas attendu la création d'Andromaque pour en faire usage !

     Autre procédé, plus étrange encore, la symphonie presque montéverdienne utilisée comme prélude de l'acte II dans l'arrangement présenté par Bru Zane. En réalité, ce passage est tiré de la fin de l'acte I (cérémonie en l'honneur de Cybèle), mais après vérification de la partition, ce n'est pas une fantaisie, la musique est réellement celle-là. Très étonnant, son harmonie et même ses appuis rythmiques semblent de cent cinquante ans en décalage et je n'ose croire qu'il puisse s'agir d'une goujate allusion à l'âge de la « mère des dieux ». En tout cas, ce moment a beaucoup de charme, et il étonne par sa disparité avec le reste du drame (très homogène esthétiquement).



     L'audace la plus spectaculaire se trouve dans le choeur très étrange « Atys, Atys lui-même / Fait périr ce qu'il aime », qui semble changer de mode au milieu de la phrase. La réduction Bru Zane fait le choix (étrange, et qui sonne étrange) de copier Lully en faisant chanter ce cœur a cappella. S'agit-il d'une façon de complaire au public qui attend cet instant ? En tout cas, sur la partition dont je dispose (et l'œuvre étant assez rapidement tombée, il n'y a jamais eu de révision...), l'orchestre est bel et bien présent, avec des mentions d'orchestration assez précises (seulement les bois, de la flûte au basson, clarinettes comprises), et en se taisant, il supprime de beaux mélismes qui produisent des effets d'écho.
     J'éprouve donc quelque difficulté à juger de cet alliage timbral que personne de vivant n'a jamais entendu, mais tel qu'il était présenté, je trouvais que cette phrase musicale torturée qui arrive soudain au milieu d'un langage très dépouillé sonnait à la fois très artificiellement... et particulièrement laborieux, comme si un modeste tâcheron avait voulu se mettre, le temps d'une dizaine de mesures, sur son trente-et-un musical.
     Disons que la tentative de mettre en relief ce moment très singulier de l'opéra de Lully, mais d'une façon alternative, était louable, à défaut d'avoir complètement abouti.


6. Le rapport à Lully

font-style: normal

Suite de la notule.

mercredi 3 octobre 2012

Atys de Niccolò PICCINNI - I - La part de Marmontel (1780 ARdM - 2012 Bouffes du Nord)



Mise à jour du 10 octobre 2012 : II - présentation de la musique de Piccinni, et de l'interprétation de la soirée.

L'ensemble de ces deux notules assez longues existe également en PDF pour faciliter la consultation.


--

Afin de contenter les lecteurs impatients, voici la première partie du voyage autour de cette œuvre, partiellement recréée les 23 et 24 septembre derniers. Agrémentée d'extraits.


Musiciens du Cercle de l'Harmonie dirigés par Julien Chauvin : ouverture et plainte d'Atys (« Amants qui vous plaignez »). Ce n'est pas une modification de l'arrangement proposé ce soir-là (oeuvre condensée enn 1h10 de musique), Marmontel fait bien ouvrir le drame immédiatement après l'ouverture par Atys sans Idas, ce qui se défend assez bien dans le cadre d'une version déjà raccourcie en 1780 par rapport à celle de 1676. Atys par Mathias Vidal, Sangaride par Chantal Santon.
Merci au spectateur qui a fourni ce matériel sonore ! Je précise toutefois que la captation, quoique de bonne qualité, ne rend pas justice à la beauté et à la cohésion des timbres en salle, et on entend, à cause de la réverbération en haut du théâtre vide (moi, j'étais placé au fond du parterre, où le problème ne se posait pas), des sortes de "scories", à l'orchestre en particulier, qui en réalité n'existaient pas dans la salle. Même chose pour l'impact des chanteurs, supérieur sur place.


Dans une salle à peu près complètement vide (à part le parterre, de plus exigu, le théâtre n'était quasiment pas rempli, on devait être quelque part entre le quart et le tiers de la jauge, même les couloirs étaient déserts), le Théâtre des Bouffes du Nord programmait une production de la désormais rituelle association CMBV / Bru Zane, autour de la dernière relecture de l'Atys de Quinault. Un document passionnant.

On peut lire un commentaire sur l'œuvre-source de Quinault & Lully ici.


1. Niccolò Piccinni (1728-1800) en France

Originaire de Bari, Piccinni se fait d'abord, comme il est d'usage, un nom en Italie, à Naples, puis à Rome. L'ambassadeur du royaume de Naples en France l'invite à rejoindre Paris en 1776, sur impulsion de la reine Marie-Antoinette, dont il devient le professeur de chant. Sa carrière est alors déjà faite en Italie, avec des dizaines d'opéras bien accueillis dans les différents temples lyriques italiens : Fiorentini, Nuovo, San Carlo et Pergola à Naples ; Argentina, Valle, Dame, Capranica à Rome ; et Turin, Bologne, Milan, Venise, Modène... Ce à quoi il faut ajouter des commandes pour des capitales européennes comme Dresde ou Lisbonne.
Néanmoins, son succès commence à pâtir à Rome de ceux de son ancien élève Pasquale Anfossi, et le prestige (assez singulier en Europe) de la Cour parisienne est alors tout indiqué pour relancer sa carrière.

On décrit régulièrement sa « rivalité » (comme très souvent, plus une rivalité des admirateurs que des compositeurs eux-mêmes) avec Gluck comme une seconde Querelle des Bouffons, où Piccinni tiendrait le rôle (forcément) de l'italien partisan de la joli musique contre Gluck, défenseur d'un texte fort.
Il est possible qu'à l'époque le contraste ait existé, car Piccinni dispose en effet d'une veine mélodique plus conjointe, moins accidentée que Gluck ; mais en regardant les partitions, néanmoins, il apparaît que la différence entre les deux est une affaire de nuance, et certainement pas d'opposition. Gluck paraît peut-être, vu de loin, plus sombre et intransigeant avec ses drames, mais la comparaison des relectures de Quinault de chacun ne me paraît pas à l'avantage du germanique. Tous deux répondent tout simplement à un changement du goût dans la tragédie en musique, au même titre que l'ont fait (J.-Ch.) Bach, Grétry, Sacchini ou Salieri.

Et à mon sens, malgré ces différences, les deux compositeurs œuvrent dans la même direction de l'histoire musicale : la querelle des gluckistes et des piccinnistes ne me paraît pas soulever des enjeux aussi contradictoires et fondamentaux que la précédente controverse.

Dans ces drames, l'épure prévaut, avec la disparition des lignes courbes, une simplification rythmique (on préfère désormais la symétrie à la danse). C'est aussi le temps d'une domination absolue d'un mode majeur très lumineux (et naïf à nos oreilles d'aujourd'hui), même pour exprimer les tourments les plus amers - en parfaite concordance avec l'image que la postérité a donné de la Cour de Marie-Antoinette, d'une gaîté qui paraît naïve et superficielle, et par ailleurs sans rapport avec la réalité du monde. Et pourtant, à l'opposé, on n'a jamais autant aimé les grands récitatifs dramatiques violents.

Malgré les explorations de partitions, je n'arrive pas bien à situer ''qui'' impose ce style. Manifestement Gluck, vu les dates, mais Gluck demeure un peu à part, moins sensible au majeur, et beaucoup moins éloquent que Piccinni ou Salieri dans le récitatif (oui, contrairement à l'image qu'on en a) - il semble que pour lui, le récitatif demeurait pour partie une couture inférieur aux "numéros", un peu comme en Italie, même s'ils sont chez lui infiniment plus écrits et intéressant. Ce style galant et violent à la fois, commun à Piccinni, Grétry, Sacchini, Salieri, Catel, compositeurs chez qui l'on retrouve quasiment les mêmes formules dans le récitatif (sauf Sacchini, le plus faible de tous ceux-là), d'où vient-il ? Peut-être justement de Piccinni, mais je n'ai pas de réponse.


2. Jean-François Marmontel et la dernière révision d'Atys

Il est de tradition pendant tout le XVIIIe siècle de reprendre les livrets admirés du Grand Siècle, et en particulier ceux de Quinault. Au début, en conservant le récitatif de Lully (toujours considéré comme une référence) et en récrivant les divertissements selon l'évolution des goûts du public. Puis on récrit totalement la musique (Gluck pour Armide, 1777), on coupe le texte pour le réorganiser en moins d'actes (Jean-Chrétien Bach pour Amadis de Gaule, 1779), et on finit par rectifier les vers et ajouter le texte d'ariettes (Piccinni et Marmontel pour Roland, 1778, et Atys, 1780).

On a donc mis assez longtemps pour oser amender profondément le livret original, peu ou prou un siècle, ce qui est assez exceptionnel en un temps où l'on n'avait pas du tout le même culte pour la conservation qu'on observe aujourd'hui.

Marmontel coupe donc dans le texte de Quinault, amende quelques vers, et développe les états d'âme des personnages.

Un exemple peut nous servir de point de départ concret.

Suite de la notule.

dimanche 10 juin 2012

Rameau - Hippolyte et Aricie : la nouveauté et l'échec


1. Une nouveauté

Hippolyte & Aricie constitue le premier essai à l'opéra d'un compoiteur cinquantenaire, mais disposant d'une longue carrière théâtrale à venir. Sa réputation est flatteuse dans les histoires de la musique, et souvent chez les amateurs du genre. Je me garderai bien de porter un jugement sur les goûts de ces derniers, en revanche pour ce qui est de l'histoire, c'est à tort et à raison.

Incontestablement, lorsque cette oeuvre apparaît sur la scène de l'Académie Royale de Musique, le 1er octobre 1733, elle rompt avec tout ce qui pouvait être entendu jusqu'alors. Le succès est considérable, et les remaniements par Rameau durent jusqu'en 1757, tandis que les reprises se poursuivent tout au long du XVIIIe siècle.

--

2. Une musique inouïe

Il faut se référer d'abord à cette notule sur le sens du mot italianisme dans la France musicale du XVIIIe siècle pour constater un peu où l'on se trouve à cette date.

Il existe déjà des poussées d'italianisme chez les compositeurs, controversées chez le public et la critique pour des raisons de chauvinisme plus que de goût - il suffit d'observer quels opéras, en dépit de ces critiques, ont progressivement eu le plus de succès...
C'est-à-dire, pour simplifier à l'excès la chose, qu'on y trouve des airs ornés plus virtuoses (ce que nous entendons volontiers aujourd'hui par italianisme à l'opéra), mais aussi une orchestration plus inventive et beaucoup plus d'audaces harmoniques.

Tout cela se rencontrait depuis longtemps, dès Médée de Charpentier (1693), Alcyone de Marais (1706), le Premier Livre de Cantates de Clérambault (1710), Idoménée de Campra (1712), les Leçons de Ténèbres de Couperin (1714)... Etonnamment pour nous, le genre galant avec ses danses omniprésentes et ses intrigues-prétextes (typiquement les opéras-ballets ou les tragédies galantes comme Omphale de Destouches) n'était pas du tout assimilé à l'Italie, mais bien au génie français, et il est exact que ce modèle provenait bel et bien de la Cour française.

Toutefois, pour Hippolyte & Aricie, un saut qualitatif considérable se produit.


Dessin de Jean Berain pour le Prologue d'Aricie, opéra de Louis de La Coste sur un livret de l'abbé Pic (1697).


=> Ornements : Les nombreux airs de caractère se multiplient, mais leur tonalité reste très française, avec une vocalisation plutôt limitée en longueur de souffle, et surtout appuyée sur les mots-types ("volez", "triomphez"...). C'est plutôt l'Amour qui fait des coloratures, et les scènes pittoresques sont celles de bergers ou de chasseur. Dans la pure tradition française, l'innovation n'est pas ici.
De même, au passage, pour le goût du décor, avec les contrastes spectaculaires entre le temple, les Enfers, le palais, la mer, la forêt... Le goût pour le Deus ex machina (présent à chaque acte !) est aussi très habituel de cette veine galantes qui débute en fait avec L'Europe Galante de Campra & La Motte (1697), simultanément avec la présentation de tragédies au langage musical plus italien et au contenu dramatique beaucoup plus sombre (cf. Philomèle de La Coste & Roy).


Ligne autonome des bassons dans Médée de Charpentier (Ballard 1693) et Hippolyte & Aricie de Rameau (édition manuscrite de 1757).


=> Orchestration et rythmes: Le goût italien avait déjà consacré le principe de soli autonomes du chant (et simultanés), mais Rameau pousse loin les alliages de timbres. Il est en particulier le premier compositeur en Europe à donner cette place autonome au basson : sur les partitions, il est désormais noté indépendamment de la basse continue, et peut disposer de solos (typiquement Tristes apprêts dans Castor & Pollux, où il tient la ligne mélodique à l'orchestre). Pendant l'acte des Enfers, il a même un rôle d'accompagnement et de coloration très important en solo. Ce n'est pas non plus une nouveauté complète (on trouve, ponctuellement, cette ligne indépendante).
Par ailleurs, Rameau multiplie et perfectionne les figuralismes sonores des événements climatiques, en particulier les tempêtes, en développant les intuitions de Marais dans Alcyone (1706) et en inventant d'autres procédés d'imitation du réel.
D'une manière générale, le goût pour les traits et fusées caractérise Rameau, beaucoup moins homophonique et massif que ses prédécesseurs, ouvrant réellement la voie à toute la suite du XVIIIe, au moins français.


Fusées ramistes à l'acte II d'Hippolyte & Aricie de Rameau dans l'édition de 1757.


=> Harmonie : C'est ici que Rameau fait le pas décisif. Même si la couleur harmonique peu paraître, à l'oreille, homogène et un peu stéréotypée comme chez ses devanciers, Rameau pousse en réalité très loin les innovations : les modulations sont fréquentes (alors qu'elles se faisaient généralement seulement entre sections / scènes / numéros), les audaces assez considérables (retards de septième et de neuvième, quintes augmentées passagères, voir en particulier le second trio des Parques).


Extrait du second Trio des Parques, à l'acte II. Edition Ballard 1742.


En fin de compte, Rameau, par l'accumulation de nouveauté, produit quelque chose de très différent et par son succès projette réellement l'opéra français dans un nouveau paradigme, où le souci de la prosodie le cède à l'éclat instrumental.

--

3. Un livret redoutable

Le livret de Simon-Joseph Pellegrin a une vertu incontestable : il propose ce qu'on attendait de lui, un support à machineries spectaculaires. On ne compte plus les décors admirables, les descentes de dieux, les monstres effroyables, les scènes de caractère avec leur lot d'accessoires.
Pour faire bonne mesure, il permet même, au milieu de la tragédie domestique de Phèdre, d'aller un peu taquiner la Tisiphone aux Enfers.


Projet de Jean Berain pour le Palais de Pluton à l'orphique acte III du Carnaval de Venise de Campra sur le livret de Regnard.


Bref, un support idéal pour une musique qui se mêle avant tout de créer du climat, de la couleur, de l'effet. De ce point de vue, Rameau inaugure une particularité de la musique française qui éclatera tout particulièrement à partir de la fin du XIXe, lorsque les Français opposeront au goût de la forme celui du climat, où la musique n'est pas soumise à la logique d'un discours, mais à celle d'une évocation. Debussy contre Mahler.

Sur la qualité littéraire et dramatique, en revanche, ce livret offre une succession de caractères fantomatiques, de vers platissimes, de clichés épuisés, de tunnels de parole, de dialogues sans substance. Si bien qu'à la fin de deux heures et demie de théâtre, on a l'impression de ne connaître aucun personnage, de n'avoir rien vu se passer, et on peine à comprendre pourquoi cette débauche d'énergie de l'Autre Monde pour une histoire qui ne mériterait même pas mention dans l'omnisciente Bibliothèque d'Apollodore.
Outre que l'ensemble est assez mal écrit et très artificiellement collé, toutes les articulations psychologiques sont incompréhensibles (même avec le support de la scène, je me perds à chaque fois dans les répliques mal synchronisées des refus d'Hippolyte), alors qu'on s'étend en bavardages inutiles et contradictoires chez les suivants de Diane (qui défendent l'Amour).

Je ne m'étendrai pas plus avant à propos des faiblesses du livret de l'abbé Pellegrin, ne trouvant pas un intérêt énorme à démontrer la vacuité de la chose... mais si des lecteurs ont envie d'en débattre plus précisément, ce sera volontiers. Promis, je ne prendrai pas l'original de Racine comme argument.

Le plus intéressant est en réalité de constater, à quelque temps de la Querelle entre Anciens et Modernes, la christianiformisation avancée du panthéon antique : l'Amour incarnant au moins autant la Charité que les passions érotiques, Diane présidant à la chasteté au sens de la tempérance matrimoniale, le Destin interventionniste (hérésie !) représentant la Providence, etc.
Cette tendance à l'assimilation des divinités antiques aux valeurs chrétiennes trouvera son apogée chez Rameau dans le Zoroastre de Louis de Cahusac, où le rôle-titre tient le rang d'une sorte de Christ cryptique qui serait relu par les Maçons.

--

4. Légitimité scénique

Considérant personnellement cette oeuvre comme assez moyenne, alternant quelques moments spectaculaires (les Parques !) ou séduisants (l'ensemble de la chasse), culminant dans les superbes duos et ensembles de l'acte IV, j'admets cependant tout à fait qu'elle tient un rang particulier dans l'histoire de l'opéra français.

Pas à cause de Racine, dont il ne reste plus rien : entre les vers de mirliton et le théâtre à machine, il serait difficile de trouver un point commun, à part la loitaine subsistance du personnage de Phèdre, de toute façon complètement vide de substance.

Mais musicalement et esthétiquement, on se trouve à un point de fracture que l'adhésion du public a rendu irréversible.


Batteries de cordes à l'italienne et fusées dans la partition d'orchestre d'Hippolyte & Aricie (édition de 1742 publiée par Jean-Christophe Ballard).


Ayant lu les propos très engageants d'Ivan Alexandre sur sa conception de la mise en scène, faisant écho à ce qu'on a pu dire ici même sur le caractère inspirant de l'authenticité, mais absolument illusoire (n'ayant pas lu les mêmes livres ni écouté les mêmes musiques, n'écoutant pas l'oeuvre dans l'effervescence, etc.), avec beaucoup de finesse d'ailleurs - on tenta de se confronter scéniquement à l'oeuvre.

D'autant que la légendaire production de Gardiner et Pizzi (Aix 1983) qui disposait de magnifiques organes (Yakar, Norman, Aler, van Dam, Bastin !) était jouée à un tempo impossible, avec une mollesse du récitatif et un statisme de la direction d'acteurs qui ne permet pas de juger des qualités dramatiques éventuelles de l'oeuvre.

--

5. Toulouse 2009 - Paris 2012 : la mise en scène

Suite de la notule.

dimanche 22 avril 2012

Le disque du jour - XLVII - Le Paradis Perdu de Théodore DUBOIS


Une grande nouvelle, la parution (le 20 mars dernier, mais cela avait échappé à la vigilance korrigane) du Paradis Perdu de Dubois, sous forme de disque officiel (chez Aparté, distribué par Harmonia Mundi).

Il s'agit d'un jalon essentiel de la discographie de Dubois, et même de l'oratorio français. On avait dit quelques premières impressions (avec extrait sonore) sur cette oeuvre à partir de la bande radio (abondamment réécoutée depuis).


Par rapport à la captation France Musique, on entendra un "volume" sonore assez réverbéré - peut-être beaucoup par rapport au format chambriste de l'orchestration d'Olivier Schmitt, l'oeuvre n'étant pas destinée à la liturgie. [1]
En revanche, on y percevra bien mieux le détail des timbres de l'ensemble instrumental, si bien qu'il est possible qu'on y gagne.

L'exécution demeure sensiblement autant digne d'éloges qu'à Montpellier, en particulier Alain Buet qui assume remarquablement son rôle de Satan mélancolique quoique sans compassion, et Mathias Vidal, dont les compositions sont toujours de premier intérêt (et dont la voix se révèle particulièrement phonogénique).

A signaler, une belle recension sur cette page (où figurent d'autres extraits, cette fois tirés du disque).

--

Egalement, à propos de grande nouvelle, on annonce la parution prochaine chez Glossa de Sémiramis de Catel (1802), un sacré chef-d'oeuvre profane - au point d'intersection entre la fin de la tragédie lyrique et la victoire progressive du sentiment sur la forme.

Notes

[1] Sa création a eu lieu au Châtelet, en 1878, un bon lustre en aval de sa composition.

jeudi 1 décembre 2011

Haÿdée de D.F.E. Auber : somnambulisme et polytonalité


Un cas très étonnant de polytonalité (pas forcément littéralement, mais bien ressentie comme telle par l'auditeur), en 1847, dans un opéra comique sérieux qui s'apparente beaucoup à un Grand Opéra à la française (avec dialogues remplaçant les récitatifs, donc).

Illustré par un inédit, seul enregistrement jamais réalisé de cette oeuvre (Compiègne 2004).

--

1. Contexte

Daniel-François-Esprit AUBER

Haÿdée ou Le Secret - (1847, à l'Opéra-Comique)

Livret d'Eugène Scribe d'après la traduction par Mérimée d'une nouvelle russe, Six et quatre, dont la matière a de toute évidence inspiré la célèbre Partie de tric-trac (où le coup gagnant du tricheur est également un six-et-quatre).

Nous sommes à la fin de l'acte I : Lorédan, valeureux amiral vénitien, est épié par son capitaine Malipieri, jaloux de ses succès. Après un air de menace, celui-ci aperçoit Lorédan en crise de somnambulisme, en train de revivre un souvenir douloureux...


--

2. Polytonalité

Dans l'extrait, à partir de 8'20'', l'orchestre ne joue pas faux. En réalité, tandis que la mélodie orchestrale reprend en ut majeur (comme lors de la deuxième exécution du thème), l'accompagnement contient un la bémol qui donne l'impression d'entendre simultanément un fa mineur (donné juste auparavant).
La ligne mélodique n'est d'ailleurs plus chantée par Lorédan, les flûtes figurent le souvenir du chant de ses soldats, lui-même se contentant de répéter ce la bémol dissonant.

On obtient ainsi une superposition très étrange, surtout dans le style, qui figure remarquablement la superposition des strates du rêve de Lorédan (la chanson initial et la culpabilité), ainsi que son trouble intense dû à sa conscience tourmentée.

Cet espèce de nuage qui entoure le retour de la chanson initiale est aussi étonnant qu'admirable, surtout dans le cadre du langage assez sobre harmoniquement qui est celui d'Auber.

Un moment assez hors du commun dans l'écriture musicale de l'époque, du moins avant la Sonate en si et Tristan - qui changent complètement les normes de la dissonance et de la liberté harmonique dans la musique du XIXe siècle.

On peut également le rapprocher du phénomène de la musique subjective, puisque nous entendons les sons tels que déformés par les souvenirs malades de Lorédan.

--

3. Scribe & Auber

On remarque la vogue désormais des "grands sujets" à l'Opéra-Comique, qui s'amorce depuis Hérold (Zampa ou La Fiancée de Marbre, immense succès en 1831 et jusqu'au début du XXe siècle, était également de tonalité assez grave, et Le Pré aux clercs comportait aussi des traits sérieux, comme le rang des personnages ou le réalisme et l'issue du duel final). Haÿdée a les dimensions dramatiques d'une tragédie, à ceci près que le ressort en est le secret, voire le quiproquo (Lorédan se confiant dans son sommeil à son ennemi), davantage attaché à l'imaginaire comique.

Cette oeuvre est la plus audacieuse d'Auber, du moins à ce jour dans tout ce que j'ai pu entendre ou lire de ses partitions. On trouve quelquefois des trouvailles assez saisissantes, telle la « Ballade des Enfants de la Nuit » dans Les Diamants de la Couronne (livret co-écrit par Scribe), mais jamais des hésitations harmoniques comparables à cette Haÿdée - jusque dans les chants de victoire du début de l'acte II, on entend des bizarreries, en tout cas une harmonie qui n'est pas fondée, comme c'est d'ordinaire l'usage dans ce type de pièces, sur une gamme à peu près sans altérations accidentelles...

L'écriture de Scribe est ici totalement représentative de ses fulgurances et de ses fragilités : vers brefs aux rimes très chiches (on n'échappe pas à quelques rimes "impures" pour l'oeil, ni même à "amours / toujours"), mirlitonisantes, mais puissance motrice assez incroyable de l'intrigue, avec une concentration des enjeux toujours très efficace. Voilà un maître de la tension scénique, et de la tension riante de surcroît, jamais dépourvu de recul sur ses personnages : même lorsque Lorédan s'apprête à réaliser sa forfaiture, on le voit bien dire d'un air faussement surpris "ah, six et quatre !", ce qui ne peut pas être pris tout à fait au sérieux. Alors même que le situation croquée reste sombre et réellement émouvante.

--

4. Texte

Pour pouvoir suivre, le livret :

Suite de la notule.

mercredi 5 octobre 2011

Grétry : Panurge, la fin des préjugés - Sacchini : Renaud, la fin de l'espoir


Extraits sonores fournis.


Ensemble à l'acte I de Panurge dans l'Île des Lanternes de Grétry. Le Concert Spirituel, Hervé Niquet.
La représentation n'étant en principe pas documentée par France Musique, je prends la liberté de vous en proposer des extraits à titre d'illustration, afin de ne pas laisser perdre ce beau travail d'exhumation. La qualité n'est pas pas parfaite, et ne rend pas justice en particulier aux équilibres, à l'articulation des chanteurs, ni au grain des cordes. Bien évidemment, si l'un des ayants droit ne souhaite pas cette publication (à mon sens à leur avantage, mais ils sont seuls juges), je le retirerai immédiatement.


--

1. Etat des lieux

D'André Ernest Modeste Grétry, l'Histoire commune n'avait retenu, jusqu'à 2009, qu'un musicien galant assez fade, dans la succession du Devin du Village de Rousseau. Tout ce qu'on pouvait trouver au disque était son Richard Coeur de Lion, opéra-comique dont le livret de Sedaine, assez malingre n'était pas fait pour exciter l'admiration.

L'oeuvre n'était même pas célèbre pour ses qualités intrinsèques : l'air de Blondel "Ô Richard, ô mon roi" était devenu l'air de ralliement des royalistes dans les années 1790 (il était de surcroît commode de remplacer Richard par Lou-is), devenant ainsi un pan d'histoire politique. Et, sur le versant plus musical, la Dame de Pique de Tchaïkovsky rendait marquante l'ariette de Laurette "Je crains de lui parler la nuit", démembrée et allentie par la vieille comtesse éponyme, en proie aux souvenirs.

EMI avait, comme pour Richard, publié L'Amant jaloux, autre comédie propre à conforter les clichés (dans un genre plus proche du vaudeville galant que de la pastorale). Mais l'exécution en était si lourde et le style tellement incompatible avec la grâce fragile de cette musique que toutes les fulgurances en passaient absolument inaperçues. Même après en avoir écouté l'interprétation adéquate (et inspirée) de Jérémie Rhorer, il reste impossible de se plonger sérieusement dans ce disque...
La situation était moins critique pour Zémire et Azor, à défaut d'être complètement enthousiasmante au disque. L'oeuvre a également été donnée lors de cette même saison de l'Opéra-Comique.

Enfin, La Caravane du Caire gravée par Minkowski ne révélait pas une musique extraordinaire (loin s'en faut !) et souffrait grandement des conditions figées du studio.

Puis vint la saison d'automne 2009 du CMBV, qui proposa coup sur coup plusieurs chefs-d'oeuvre qui révolutionnèrent complètement la perception de Grétry. Perception qui se révéla complètement erronée. Car non seulement Grétry n'est pas un musicien superficiel, mais de surcroît il est l'un des compositeurs les plus raffinés, les plus inspirés et les plus modernes du second XVIIIe siècle.

D'abord vint Andromaque (1780), coup de tonnerre auquel on a consacré plusieurs notules, toutes réunies dans cette catégorie (la liste des articles figure sur cette page) : l'oeuvre annonçait Berlioz, déployait quelques audaces en matière d'orchestration, proposait pour la première de la "musique subjective", et se montrait pourvue d'un haut sens dramatique et réutilisant amplement le matériau littéral racinien. Dans le même temps, l'Opéra Royal de Versailles proposait le ballet héroïque (véritable opéra en réalité) Céphale et Procris (1775), dont les qualités musicales, en particulier dans les récitatifs, se révélaient encore plus hautes. Des extraits de Guillaume Tell (1791) par Sébastien d'Hérin et ses Caractères avaient aussi mis en valeur une partition manifestement inégale, mais pourvue par endroit d'un grand souffle (l'air de Gessler !).

Enfin, la production scénique et stylistique adéquate de L'Amant jaloux (1778) à l'Opéra-Comique réhabilitait l'intérêt du Grétry comique ou léger.

Depuis, de nombreux autres titres sont exhumés (diversement intéressants) : Grétry a repris son rang de compositeur majeur de l'ère Louis XVI. Les partitions étant sensiblement plus difficiles à dénicher que pour les oeuvres du XIXe siècle - et le rendu bien moindre sans le truchement d'interprètes de valeur -, les lutins de CSS suivent donc avec avidité les nouveaux concerts autour de cette grande figure.

[D'autres disques ont paru, mais ne sont plus guère disponibles, par exemple ceux jamais réédités en CD, et notamment ce Panurge, comme la version de Jacques Houtman avec l'Orchestre de Chambre de la RTBF en 1972, distribuant notamment Julien Haas, Jean Ségani et même... Jules Bastin !]

--

2. Grétry : Panurge dans l'Île des Lanternes (1785)

Hervé Niquet avait décidé de clore son concert d'hier (4 octobre 2011) par cinquante minutes extraits de cette oeuvre, dernier membre d'un triptyque de comédies lyriques qui imposa le genre pour la première fois sur la scène de l'Opéra (et non dans les salles spécialisées). Après l'Embarras des richesses et la Caravane du Caire, Grétry composa donc cette troisième comédie, dont le nom, évocateur des adaptations de la Foire plus que de la fine comédie de moeurs, fait peu attendre.

C'est à tort, car il s'agit ici encore d'une partition profondément originale.

D'abord, ses parentés musicales se trouvent souvent dans le futur. Bien sûr, dans la structure dramatique, on retrouve les marivaudages à la mode, et l'on songe à Così fan tutte, mais le livret de Chédeville ne semble pas exploiter bien loin les enjeux psychologiques, les abîmes ouverts par Da Ponte. Musicalement, on entend des trilles façon Osmin, ou certains bondissements pointés présents chez Leporello. Rien cependant de furieusement mozartien, à part qu'ils partagent un langage classique assez parent.
Je suis également frappé de la tournure très beethovenienne de l'introduction de l'air jaloux dévolu à l'épouse de Panurge : on songe très fort au larghetto de la Deuxième Symphonie ou à Fidelio. D'une façon générale, Grétry utilise comme Beethoven (sans bien sûr les construire de façon aussi récurrente et rigoureuse) quantité de petits motifs orchestraux, soit pour apporter de la couleur orchestrale, soit pour donner du caractère à l'accompagnement.


Katia Vellétaz, épouse délaissée de Panurge et réduite en esclavage, dans son grand air.


Dans ce même morceau, on entend de grands sauts d'intervalle vocaux, à la façon de "Dopo un'orrida procella de Vivaldi, ou des airs dans le goût de Lucio Silla'' chez Mozart...

Car de nombreux traits rattachent tout de même Grétry à son temps. Ainsi l'usage d'une pythonisse (la femme de Panurge déguisée, qui permet d'apitoyer le volage), d'une présence assez joyeuse, sans être tout à fait parodique non plus : le propos est riant, mais la figure de la prêtresse n'est nullement tournée en ridicule, comme si Chédeville avait tiré tout le parti comique d'une institution tout en se gardant d'abîmer les souvenirs qu'elle évoque dans le grand genre.

Enfin, l'on retrouve les qualités propres à Grétry, ces belles fusées, ces motifs spirituels, et tant de détails conçus pour conserver une poussée constante à l'ensemble - souci dont semble totalement dépourvu Sacchini, quel contraste entre les deux compositeurs joués par les mêmes interprètes le même soir !

Le final tendre serait assez étonnant si l'on n'avait pas encore dans l'oreille Ismène et Isménias de La Borde, témoignage essentiel de l'écriture de la troisième école chez un compositeur qui n'adopte pas la mode galante de Rameau ou Mondonville.

Mais surtout, c'est cet orage de réjouissances qui produit un effet totalement inédit. A cause de l'oracle, tandis que l'orchestre se déchaîne dans une superbe section en mineur menaçant - avec des zébrures impressionnantes de flûtes et de cors (encore une trouvaille, qui évoque un peu la mort de Pyrrhus) -, les personnages manifestent leur joie ("ah ! quel bonheur !").
Ce moment est réellement stupéfiant, à une époque où l'on utilise essentiellement les tonalités majeures, même pour manifester le tourment ou l'affliction.


L'orage paradoxal de l'acte I.


La section est assez courte, et la suite de la scène de l'orage est dominée par une sorte de marche très tapageuse et entraînante, dans un majeur éclatant, une chose beaucoup plus "normale" cependant. Mais ces instants d'originalité, comme souvent dans les oeuvres abouties de Grétry, sont assez profondéments marquants.

--

3. Antonio Sacchini : Renaud ou la suite d'Armide (1783)

Suite de la notule.

samedi 27 août 2011

Charles-Simon CATEL - Sémiramis (et son temps) - recréation Niquet Montpellier 2011


A l'écoute, je suis frappé par le caractère encore une fois singulier d'une oeuvre (1802) dans ce secteur si peu exploré par le disque et la scène...

Certes, on entend bien le pont entre Andromaque de Grétry (1780) et Fernand Cortès de Spontini (1809), les liens aussi avec les Danaïdes de Salieri (1784), bref un chaînon manquant de plus dans une époque encore mal documentée.
On peut aussi y relever des tournures (en particulier conclusives, ou pendant les duos d'amours) apparentées au style mozartien : duo de l'acte I avec La Clemenza di Tito (1791), duo de l'acte II avec Don Giovanni (1787 ; des traits communs avec "Fuggi crudele", qui n'est pourtant pas banal).

Mais le plus étonnant, c'est que l'ouverture et certains moments du premier acte m'évoquent fortement... Alfonso und Estrella de Schubert (1821) !

Toute une époque qui passe en revue, et on entend ici parfaitement l'emplacement chronologique de Sémiramis.

--

Il y reste beaucoup de traits de la tragédie lyrique de la "quatrième école", en particulier les récitatifs, très proches de l'Iphigénie en Tauride de Piccinni, des Danaïdes et de Tarare de Salieri, de Guillaume Tell de Grétry... L'invocation de l'oracle sous forme de choeur mystérieux évoque d'ailleurs beaucoup le précédent de Callirhoé de Destouches (1712, refonte 1743). Et les trombones dramatiques sont du pur Gluck du point de vue du matériau, mais utilisés d'une façon dramatique qui évoque quasiment le goût de Berlioz. [En fait, ça ressemble furieusement à la toute fin de l'air d'Aubry à l'acte II du Vampyr de Marschner (1828).]

Les récitatifs sont écrits avec une belle véhémence, sans atteindre la puissance des plus belles pages de Grétry, Salieri ou Gossec (pour Thésée). En revanche, cette Sémiramis peut, en termes de matière musicale, rivaliser sans peine avec Gluck, Piccinni et Sacchini (et surpasser la majorité de leur production aujourd'hui publiée). Le lien avec ce dernier est d'autant plus évident qu'on a déjà parlé des parentés de Chimène ou Le Cid avec Don Giovanni...

--

J'y reviendrai sans doute, et je laisse donc les éloges sur l'exécution de Niquet pour plus tard. Mathias Vidal est particulièrement épanoui, comme d'habitude, dans la tragédie lyrique "mature" des troisième et quatrième écoles, mais ici, il rayonne tout particulièrement.

lundi 1 août 2011

Bienheureux retard - [Le Paradis Perdu de Théodore Dubois]


1. Emplacement historique

Je suis frappé, en écoutant avec délices Le Paradis Perdu de Théodore Dubois, de la parenté avec, certes, sa manière bienveillante habituelle (voir la description du Quintette pour piano, hautbois et cordes), mais aussi avec L'Enfance du Christ d'Hector Berlioz.


Un des - nombreux - moments forts de l'oeuvre.
Recréation mondiale, donnée Salle Pasteur à Montpellier, ce 14 juillet 2011 avec Chantal Santon (Eve), Jennifer Borghi (L'Archange), Mathias Vidal (Adam), Alain Buet (Satan). Ensemble chambriste formé par des solistes des Siècles, choeur Les Cris de Paris, l'ensemble dirigé par le directeur historique des Cris de Paris, Geoffroy Jourdain.


Il est amusant de voir que Dubois a pu écrire en 1878, dans un style consonant et naïf, ce que Berlioz avait réussi à faire passer, en 1854, pour un oratorio caché de la fin du XVIIIe ! Certes, avec le recul, nous sourions un peu de cette mascarade, parce que l'Enfance aurait été très neuve pour une fin du XVIIIe, même en convoquant le Salieri lyrique français de Tarare et Danaïdes, le Gossec de Thésée ou le Méhul de Joseph en Egypte. Les alliages instrumentaux et les transitions harmoniques n'y sont pas celles de la fin du XVIIIe siècle. Mais cette simplicité-là, en revanche, renvoie plus aux années 1820-1830 qu'à 1854, et encore moins 1878 !

C'est une fois de plus une preuve de la représentation erronée qu'on se fait généralement de l'histoire de la musique, qui est restée une histoire-bataille, comme si à partir de La Mer et Elektra tout le monde s'orientait vers une destruction de la tonalité et comme si après Parade tout le monde écrivait de la musique concrète.
Dans la réalité, les compositeurs célèbres demeurent des exceptions (et c'est bien pourquoi ils nous fascinent, parce que leur discours est singulier et puissant...). Et juger la production musicale à leur aune revient à considérer toute la production musicale avec quarante ans de décalage.

--

2. Spécificités de Dubois ?

Et quoi qu'il en soit, en tant que tel, dans un style qui peut le faire joindre à Méhul en passant par Berlioz (le choeur final, lui, évoque ceux des Psaumes de Mendelssohn !), il existe une forme de sincérité très particulière dans la musique de Dubois, comme si elle était écrite sans ambition de singularité, mais en aimant les consonances existantes.

Et en fin de compte, on obtient une couleur qui, personnellement, me paraît réellement propre à ce compositeur, et surtout très touchante si on n'est pas rétif à la consonance.

Tout cela s'incarne à merveille dans ce très bel oratorio présenté au festival de Montpellier. Une fois qu'on s'est habitué à la transcription d'Olivier Schmitt pour ensemble réduit (mais judicieux : quintette à cordes, quintette à vents et piano), écrite pour l'occasion, on y gagne de la transparence et de belles couleurs - en y perdant un peu de drame dans les grands éclats.
Il est à noter cependant que ce choix n'est pas tout à fait arbitraire, puisqu'il subsistait seulement une réduction piano / chant. Dans ce contexte, Olivier Schmitt a même été obligé de recomposer une partie de la partition, puisque la réduction piano implique bien entendu de supprimer des détails - des détails qu'il a dû imaginer à nouveau pour obtenir une orchestration cohérente. Il semble en revanche que l'ensemble de chambre de ce type lui ait été imposé (peut-être pas à l'instrument près, mais en tout cas dans l'essentiel).

--

3. Livret

Enfin, concernant le texte (inspiré de Milton), la générosité d'Adam qui veut se substituer à Eve pour un crime que, dans le livret, elle est seule à commettre à l'origine, ne fait pas passer Dieu pour très beau joueur... ni la femme pour une créature très réussie. Si la seconde proposition était peut-être acceptable pour Dubois et ses contemporains, je doute que la première, qui rend encore plus "inhumain" le Dieu de l'Ancien Testament, ait jamais été dans les projets de cet oratorio.

Si bien que malgré le châtiment qui fonde une partie de la théologie chrétienne, Dubois propose un final qui exalte au contraire le pardon, ce qui constitue pour le moins une exotique conclusion au sujet d'Eden.

Certes, Milton finit de façon optimiste :

Som natural tears they draped, but wiped them soon ;
The World was all before them, where to choose
Their place of rest, and Providence Their guide :
They hand in hand with wadding steps and slow,
Through Eden took Their solitaire way.

Néanmoins, contrairement à Dubois qui semble exulter, ce vague soutien de la Providence n'y occulte pas l'image du quatrain qui précède directement cette fin :

They looking back, all th' Eastern side beheld
Of Paradise, so late Their happier seat,
Waved over by that flaming Brand, the Gate
With dreadful Faces thronged and firey Arms :

Il y a de quoi s'interroger sur les libertés possibles avec le texte saint chez un compositeur aussi lié au sacré, même lorsque les cantates sont destinées au concert : parce qu'en l'occurrence, la couleur originelle de la Genèse est assez notablement fléchie. Evidemment, au vingtième siècle, les lectures démystifiantes ou au contraire "refictionnalisées" n'ont plus le même caractère subversif, puisqu'elles ne sont plus censées influer directement sur la foi, et que les sujets religieux en concert sont généralement considérés comme des objets d'art indépendants.

mercredi 2 décembre 2009

Résurrection - les 24 Violons du Roy dans Psyché II de Lully


... et un mot sur le countertenor.

--

Merci à Era qui nous signale cette vidéo :

Suite de la notule.

vendredi 15 février 2008

Compositeurs, interprètes & chanteurs : sites choisis

Quelques perles (oeuvres rares, interprétation exceptionnelles) peuvent figurer sur des sites d'artistes. On peut y découvrir des oeuvres méconnues ou des interprétations inédites mais superlatives.

CSS en a sélectionné quelques-unes pour vous (en exclusivité mondiale comme il va de soi).

Pour les chanteurs par exemple, on précise le type de voix, les emplois, et les extraits à découvrir.

Ce billet, placé dans la catégorie Astuces, devrait être mis à jour de temps à autre, au fil des découvertes.

Suite de la notule.

mercredi 24 octobre 2007

[Vidéo en libre service] Jean-Philippe RAMEAU - Motets - Hervé Niquet, Le Concert Spirituel

Une captation du 14 octobre dernier à l'occasion du fastueux anniversaire du Centre de Musique Baroque de Versailles. (CMBV. Valable jusqu'au 27 octobre.)

Hervé Niquet et Le Concert Spirituel, dont on a mainte fois chanté les louanges sur CSS, pour leur fondu instrumental magnifique, leur continuo invraisemblable (les théorbes en particulier), l'urgence dramatique qui s'exhale de chacune de leurs interventions, la finition intellectuelle et technique du résultat, proposaient deux motets célèbres de Jean-Philippe Rameau, In convertendo et Quam dilecta, avec notamment le tissu doux de Stéphanie Révidat et l'élégance discrète de Mathias Vidal (très mal captés ici, entendus seulement via la réverbération arrière, panne de micro semble-t-il).

La volupté sonore qui séduit à l'opéra nous convainc toujours moins que les raffinements de Christie pour ce répertoire de musique sacrée française qui y perd peut-être en solennité, en ferveur, en incisivité. Mais on aurait tort de bouder son plaisir devant tant de largesses - surtout que les moments tendres sont très touchants.

Ces pièces de Rameau, antérieures à ses opéras, sont interprétées, outre les forces du Concert Spirituel, orchestre et choeurs, par les dessus Stéphanie Révidat et Hanna Bayodi, la haute-contre Mathias Vidal, la taille Marc Mauillon - dont la voix légère, quasiment naturelle, blanchit un peu vite - et la basse-taille Stephan MacLeod.

Suite de la notule.

David Le Marrec

Bienvenue !

Cet aimable bac
à sable accueille
divers badinages :
opéra, lied,
théâtres & musiques
interlopes,
questions de langue
ou de voix...
en discrètes notules,
parfois constituées
en séries.

Beaucoup de requêtes de moteur de recherche aboutissent ici à propos de questions pas encore traitées. N'hésitez pas à réclamer.



Invitations à lire :

1 => L'italianisme dans la France baroque
2 => Le livre et la Toile, l'aventure de deux hiérarchies
3 => Leçons des Morts & Leçons de Ténèbres
4 => Arabelle et Didon
5 => Woyzeck le Chourineur
6 => Nasal ou engorgé ?
7 => Voix de poitrine, de tête & mixte
8 => Les trois vertus cardinales de la mise en scène
9 => Feuilleton sériel




Recueil de notes :
Diaire sur sol


Musique, domaine public

Les astuces de CSS

Répertoire des contributions (index)


Mentions légales

Tribune libre

Contact

Liens


Chapitres

Archives

Calendrier

« avril 2024
lunmarmerjeuvensamdim
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
2930