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Le livre, l’informatique, la Toile, la nouvelle hiérarchie et les nouveaux dangers



Ça ne badine pas par ici, non mais.


On se souvient que CSS avait déjà noté la réticence de quelques éminentes figures érudites face à l’usage de l’Internet sur l’information. Ils semblent s’être, face à l’inévitable, en partie ravisés, mais de façon plus défensive qu’enthousiaste – barrer la voie à la toute-puissance (il est vrai inquiétante) de Gooooooogle plutôt que créer spontanément un projet merveilleux.

Il est vrai que les méthodes de recherche informatiques, et surtout via les moteurs de recherche Internet, diffèrent profondément de la logique d’érudition qui prévalait alors. Il y a de quoi s’en réjouir comme de quoi s’en alarmer. Quelques pistes rapides de réflexion.

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1. La parabole du point de croix

On ne parlera pas ici des questions d’interactivité et de Web 2.0., tant il est évident que la possibilité de répondre directement à l’auteur en annotant son livre (comme sur CSS, par exemple) est quelque chose que le support papier ne permet pas. La mise à jour constante, également, qui permet au lecteur de picorer et à l’auteur d’amender sans cesse son travail. Les liens hypertexte, aussi constituent une facilité majeure par rapport à une bibliographie qui demande d’aller attraper l’ouvrage, ou pis, de sortir pour le rechercher, l’emprunter ou l’acheter. Mais, en fin de compte, les internautes se faisant paresseux, ouvrir une nouvelle fenêtre rallentit la machine et devient, finalement, une autre forme d’effort, même minime.

On s’attachera plutôt aux questions de méthode. Car la Toile change radicalement le rapport au savoir quantitatif. Qualitatif, c’est différent, il existe toujours des écrivains brillants des deux côtés du système, capables de faire usage de leurs lectures pour produire des écrits intéressants.

Pensons-y, et imaginons une situation concrète. On désire connaître une information, mettons, sur la sociologie des hérissons. Ou mieux, sur le point de croix. Sans Internet, cela nécessite une culture préalable, ou des recherches relativement importantes avant de pouvoir accéder à l’ouvrage qui contient l’information. Est-ce un un lieu douloureux du corps humain, ou bien une région de Jérusalem ? Et pour les plus cultivés [1], est-ce de la dentelle, de la broderie, de la couture, du tricot ? Est-ce un outil, une technique, un support, un résultat ?
Pour le jeune homme encore ignorant du monde qui méconnaîtrait toute ces merveilles essentielles, fruit du génie humain, il faudrait donc en amont chercher une définition dans le dictionnaire (à « point » ou à « croix » ?), puis trouver une entrée dans son encyclopédie (en espérant l’y trouver), avant de se rendre dans le bon rayon du libraire (éventuellement pour disposer d’une bibliographie…). Ou passer un coup de fil à un de ses ascendants, en supposant qu’il en ait entendu parler de leur bouche.


Un napperon de dentelle utilisant la technique du point de croix à des fins dévotes.


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2. Les distinctions fondamentales

Bref, l’usage exclusif des livres réclame une connaissance préalable minimale de ce qu’on cherche. Il faut avoir une idée thématique des ouvrages de sa bibliothèque, et des chapitres, qui peuvent contenir (ou qui contenaient) l’information.

Sur l’Internet, il en va tout autrement. La recherche s’effectue via des moteurs (qui peuvent déboucher sur des annuaires thématiques, mais très rarement). Sans moteurs, pas d’utilisation possible du contenu d’Internet à l’heure actuelle.
Cela signifie que les mots-clefs recherchés suffisent généralement, sans culture préalable (c’est le cas pour le point de croix). Si l’on cherche une information précise sur le sujet, il ne faut pas feuilleter le bon chapitre du bon livre – les pages Internet étant généralement plus brèves et très spécialisées –, mais imaginer ce que contient potentiellement la page que l’on cherche, en entrant les bons mots. Car les mots-clefs ne sont pas thématiques, ils désignent le contenu même de la page – et il faut deviner ce que continet ce qu’on ne connaît pas.

C’est là que se situe la distinction fondamentale entre les deux méthodes.

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3. Par le contenant ou par le contenu

L’usage du livre réclame de connaître le contenant de ce que l’on cherche : le type d’ouvrage (vulgarisation ou spécialité, général ou monographique, théorique ou technique, etc.), sa place dans la bibliothèque personnelle ou universelle.

Pour l’Internet, il faut au contraire imaginer le contenu : celui qui n’est pas capable de mettre en perspective le sujet recherché et les mots indispensables dans celui-ci peut ne jamais accéder à l’information. Par exemple, pour chercher un livret d’opéra sur la Toile, mieux vaut en connaître quelques répliques (qui ne soient pas des débuts de scène, sinon on tombe sur l’indexation des CDs sur les disques commerciaux, et impossible de trouver quoi que ce soit), et les placer entre guillemets pour vérifier si elles se trouvent en ligne, du moins sur les sites non pourvus de mot de passe.

L’intérêt de l’Internet étant que le mot-clef fait accéder à une sorte de compilation de chapitres sur le sujet qui nous intéresse, sans avoir besoin de déplacer trente ouvrages dont quelques lignes nous sont utiles. On n’est plus alors dans le registre thématique vertical, où l’on va sélectionner un ou deux livres sur le sujet qui nous intéresse, mais plutôt dans une approche horizontale, qui sélectionne tous les chapitres correspondant (ou non…) à la recherche, dans différents domaines. Un livre sur la vie de Mahomet peut être écrit dans une perspective de foi, une perspective historique, une perspective philosophique, voire une perspective critique. On se tiendra à l’orientation de ce livre et de quelques autres.
Internet va au contraire picorer sur le point précis qu’on va chercher des informations tirées aussi bien de l’Alcoran que des pages d’érudition sur l’évolution de la poésie persane (qui feront référence à telle ou telle sourate), ou des pamphlets approximatifs sur la religion musulmane. Sur un mot-clef donné, tous les sujets, tous les modes d’approche peuvent être brassés.


Un autre point de Croix : le Golgotha.
Jan van Noordt (musée Calvet d’Avignon).


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4. Jurons, jurons par nos dangers

Ainsi, plus facile de prime abord, moins pénible (pas de recherches de livre en livre, ni de déplacements), la méthode Internet a tout pour séduire un public vaste. Y compris pour choisir ensuite un livre à acheter (une fois déblayé le sujet, glané quelques critiques, voire effectué une petite vérification sur le contenu par Google Livres).
C’est sans doute pour partie ce qui irrite certains érudits de l’ancienne école jaloux de leur statut. Ce qui auparavant était contenu dans la mémoire de chaque individu, ou bien la connaissance précise des bibliographies qui pouvaient donner accès rapidement à la bonne information, quand ce n’est pas tout simplement la possession d’une vaste bibliothèque, reflet du savoir accumulé, peut se donner facilement à qui se donne la peine de chercher quelques instants. Il y a là une différence d’effort qui est proprement vertigineuse, si bien qu’on pourrait penser qu’à l’écrit il ne soit plus possible de déceler la différence entre un spécialiste et un novice qui a ouvert Wikipédia.

On sait bien que, dans les faits, la clarté et la précision du spécialiste se repèrent. Surtout, le fait que le savoir soit accessible aisément à qui se donne une peine, même minime, de chercher… et de lire, c’est bien le rêve ultime de l’humanité littéraire, non ?

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L’ancienne école formule un deuxième reproche, qui n’est pas infondé, mais qu’en son temps nous avions repoussé. Il ne serait plus guère défendu aujourd’hui, je pense. Car l’absence de hiérarchie est un faux procès : les sites institutionnels ou les références sérieuses finissent par être repérés, stockés dans les favoris de chacun, fréquemment mis en lien, et même moyennement référencés dans les moteurs, sont très consultés. On sait bien qu’un document scanné pour Gallica est plus fiable typographiquement qu’une recopie d’un chapitre sur un coin de carnet.
Du reste, la présentation même du site permet de connaître si l’on a affaire à un amateur ou à une administration, à un dilettante négligent ou à un esprit informé, etc.

Il existe aussi des sites qui effectuent, comme tâche principale ou plus souvent secondaire, des classements thématiques d’autres sites. Bref, le deuxième reproche, finalement, tombe.


Illustration conjointe de la problématique de la hiérarchie par l’abbaye de Saint-Gall et Georges Clémenceau. Les livres sont semblables aux aparatchiks qui disent du mal d’Internet : ce sont les plus haut placés qui servent le moins.


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Le troisième est plus intéressant. La distribution des ressources d’Internet par mot-clef, par le seul truchement des moteurs de recherche qui, seuls, gèrent l’accès à l’information, génère deux impossibilités.

La première, qui se soigne, est l’impossibilité d’accès à ce qui n’est pas pensé. L’Internet, par sa richesse même, génère du cloisonnement. On peut passer sa journée sur les deux cents forums francophones spécialistes du point de croix, lire les quarante webzines, sans parler des actualités des tournois dans l’Humanité Dimanche ou le Figaro Madame.
Pis, on peut ne jamais songer à aborder tel ou tel sujet en faisant des recherches ciblées sur le site du libraire géant Amazon, alors que dans une librairie réelle, on s’arrête devant un rayon, on songe qu’on devrait se remettre à la poésie du stigmate ou aux méthodes juridiques de l’épinglage des dépenses publiques.
Le moteur de recherche fournit de la précision, mais pas une promenade dans le vaste monde. Si on veut développer des curiosités, ce sera par hasard, mais par un hasard plus ténu que dans « la vie physique ».

La seconde, plus pernicieuse [2], est l’impossibilité d’accès à ce qui n’est pas indexé. Les algorythmes de Yahoo et Google sont très bien faits, et on y trouve au premier chef des sites pertinents, même s’ils sont de petite taille – tapez donc « opéra contemporain » et émerveillez-vous de la clairvoyance admirable de la réponse.
Cela écarte en partie l’argument sur le fait que le quantitatif vaut pour le qualitatif – ce qui est faux en réalité, puisque ce classement s’appuie à la fois sur les mots pertinents dans la page et sur le nombre de liens désignant la page, c’est-à-dire sur la confiance et l’autorité qu’elle suscite… Comme pour une référence papier dont la majorité des gens dit qu’elle est valide. Certes, la voix d’un professeur d’université ne vaudra pas plus que celle d’un de ses étudiants, et même moins si son site est moins bien référencé, mais il n’empêche que ce principe démocratique, par le principe des moyennes sur les grands nombres, tombe assez juste. Les sites les plus en vue ont incontestablement une plus-value en termes de caractère ou d’information.
Et la possibilité de rebond et de réaction permet de châtier sévèrement les imposteurs – dans la plupart des cas. Comme pour la presse, ils peuvent cependant convaincre dans leur réseau fermé, avec un public très « préparé » idéologiquement.

Mais si ces moteurs, par défaillance ou par choix, n’incluaient pas dans leurs résultats, ou rétrogradaient à une place misérable certains sites ou certaines opinions, elles disparaîtraient de la réalité du monde, sorte de microcosme connu seulement dans le réseau de ceux à qui on a communiqué l’adresse – certains peuvent déjà le choisir en incluant la célèbre balise « no index, no follow » au début du code de leur page. On court donc un danger majeur de manipulation de l’information ou, plus vraisemblablement, de censure massive. Vu la compétence des algorythmes, on peut trembler. Il serait tout à fait possible d’acculer tous ceux qui ont Internet pour source exclusive d’information à la méconnaissance de certains faits, et éventuellement favoriser certaines interprétations.
On pourrait même imaginer une pression d’un grand moteur dominant sur des titres de presse, menaçant officieusement de ne plus les référencer, ainsi que leurs annonceurs, en cas de discordance.

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C’est évidemment une théorie du complot qui n’a pas lieu d’être aujourd’hui, mais :
- on a vu avec les « accommodements » en Chine que l’intérêt commercial pouvait tout ;
- on a vu avec les récentes censures (avortées) d’Amazon sur la littérature trop liée à l’hétérodoxie sexuelle (l’homosexualité, quoi) qu’il était possible de supprimer une part écrasante des ventes (et de revenus) de certains ouvrages, et même de certains sujets ;
- on a vu dans ces deux cas que les compétences techniques existaient pour le faire ;
- la situation monopolistique d’Amazon (mieux fourni que quiconque et moins cher que tout le monde) et de Google (simplicité, rapidité, fiabilité, services complémentaires novateurs) leur permet à eux seuls de décider quasiment comme seuls acteurs.

On va prendre un exemple simple. Nous n’avons pas de sympathie particulière pour la pornographie, particulièrement lorsqu’elle se répand de façon sauvage sans qu’on en connaisse les sources (âge des participants, conditions de réalisation), ni qu’on puisse s’en passer si on ne souhaite pas voir son écran infesté. Mais le nombre de moteurs de recherche et d’annuaires qui filtrent ces contenus envahissants donnent une idée de la dose de censure qui pourrait s’exercer contre une idée un peu unanimement acceptée comme négative.

On pourrait faire taire les théories du complot un peu trop irrespectueuses, mais aussi les militants des droits de l’homme s’ils sont trop irrévérencieux religieusement parlant, mettre à l’écart les sensibilités dérangeantes (opposition aux théories climatiques dominantes, sexualités autorisées par la loi mais considérées comme déviantes, etc.). Un consensus, à l’échelle d’un pays ou même du monde, pourrait laisser se constituer (car il est peu probable qu’on puisse censurer tout à fait en cachette) un bâillon qui fasse taire ce qui dérange, illégal ou pas. Et quand bien même, songeons que le souhait de changer la loi n’est pas un délit – seulement l’apologie de sa transgression, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. [Même si les amateurs de résine décérébrante et autres soutiens des marchands de mort [3]) ne semblent pas avoir bien saisi la nuance.]

Pour information : malgré une clientèle fidèle, liée pour grande partie à des relations un peu plus poussées hors de CSS, et pour autre partie à la forme diarisée, mise régulièrement à jour, 80% des lecteurs de Carnets sur sol proviennent de Gooooooogle… C’est le cas pour la plupart des sites. On conçoit la conséquence qu’il faut en tirer sur l’importance des portails d’accès dans la distribution de l’information.


Capture d’écran des tous derniers affluents de CSS.


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5. Conclusion

On l’aura compris, je pense, CSS ne partage pas les reproches de désordre ou de menace du savoir faits à la Toile, dont nous admirons intensément la révolution bienfaitrice. Des possibles immenses s’ouvrent (et sont depuis longtemps exploités) grâce à l’outil informatique (la recherche en plein texte, qui permet de trouver n’importe quelle occurrence, automatiquement !). Tant pis si cela dépossède les savants d’un peu de leur prestige magique.

En revanche, le risque de cloisonnement et de repli existe. Et, surtout, le risque modérément probable (car ce serait jouer la survie d’entreprises très rentables, et profitables à tous), mais suprêmement dangereux, d’un filtrage partisan de l’information, d’une impossibilité d’accès à certains pans de la culture. Ce serait moins visible que la disparition d’un rayon de libraire, et plus facilement réalisable que la mise à jour postérieure de toutes les bibliographies – à la façon du service des archives de 1984 [4].

Une occultation de grande ampleur – à défaut d’une réelle manipulation – qui réclame toute notre vigilance : elle n’est pas probable, mais le jour où les conditions du consensus seront réunies, elle sera très facile à mettre en œuvre… et redoutable.

Dans l’attente, les lutins se régalent des richesses mises à disposition, en tâchant de ne pas rester trop prisonniers de leur propre univers mental dans les mots-clefs… Pour ne pas tourner en rond en ne cherchant que ce qui nous intéresserait a priori.
A propos, en la matière, Wikipédia est très bien faite pour décloisonner un peu, et l’augmentation impressionnante, ces deux dernières années, de sa qualité globale en fait une fréquentation certes peu originale, mais très profitable. Une piste parmi tant d’autres.

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P.S. pour ne pas rire : Autre danger, plus exogène celui-là. Saviez-vous qu'en cas d'explosion nucléaire dans la stratosphère au-dessus d'un pays, les vents éloigneraient la radioactivité, mais l'ensemble des circuits électromagnétiques seraient tués ? C'est-à-dire, entre autres choses, que tout matériel informatique serait inutilisable. Juste un conseil des lutins : doublonnez tous vos fichiers importants sur un serveur situé sur un autre continent, car cet usage-là est infiniment plus probable que l'attaque nucléaire contre des vies civiles.

Notes

[1] On donne la réponse pour l’édification des lecteurs masculins qui ne connaissent que le petit point pratiqué pendant leur service national : c’est de la broderie, et cela désigne à la fois l’usage d’un support prédessiné et une technique en sautoir.

[2] Car elle ne peut guère être contournée.

[3] Non, non, pas ceux-là, on parle bien sûr de leurs collègues qui n’ont pas pignon sur rue.

[4] Et dire qu’il aurait fallu écrire quelque chose aussi sur ce roman et sur son adaptation lyrique… et de même sur la Dame de Pique… Un jour peut-être.


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1. Le mercredi 8 septembre 2021 à , par Miltonpap

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David Le Marrec

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