Carnets sur sol

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Luth, théorbe, guitare baroque & associés


Avant que de commenter brièvement le concert auquel nous avons eu le bonheur d'assister, nous aimerions poser quelques préalables simples.

Pour chaque instrument, une photo et une vidéo significative (mise en ligne par les interprètes), de façon à obtenir un panorama assez parlant.

On travaille aussi sur l'évolution de leur usage.

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1. Origines du luth

Le luth appartient à la famille des cordes grattées. Il en est la forme standard qui existait dans les cours d'Europe au XVIe et XVIIe siècles.

Il descend directement de l'Oûd et d'une manière générale des instruments piriformes à cordes grattées originaires d'Iran (barbat) et du Moyen-Orient.


Cet instrument est toujours pratiqué pour exécuter la musique classique arabe, de façon très courante en Afrique du Nord.


Ali Sriti et son élève Anouar Brahem, deux figures tutélaires de l'oûd. Ici, il pratiquent le jeu au risha, c'est-à-dire avec un plectre, mais l'instrument se joue aussi directement avec les ongles, bien entendu. En principe, on ne joue pas d'accords à l'oûd (à part en utilisant la corde de bourdon simultanément avec une autre corde), on se contente d'actionner rapidement les cordes à la suite), on en entend toutefois quelques-uns ici au début.


2. Le luth

Le luth (italien liuto, allemand laute) en descend directement : même coupe (à moitié) piriforme, avec son dos bombé et côtelé (ajouté au barbat persan). Son cheviller est lui aussi place en angle par rapport au manche.


Dans Les Ambassadeurs de Holtein, un détail montre très bien la structure générale d'un luth, face et dos.


Le luth comportait initialement cinq doubles cordes et une chanterelle. Chaque groupe de deux cordes identiques (accordées à l'octave pour les plus graves, à l'unisson pour les aiguës) était appelé "choeur" (la chanterelle constituant un choeur à elle toute seule). On a ainsi évolué du luth renaissant à six choeurs vers des luths baroques qui pouvaient comporter treize choeurs (soit vingt-cinq cordes !). L'accord variait, mais on parle globalement de vieux ton pour le plus courant au XVIe siècle (chaque corde ascendance étant accordé à la quarte supérieure, comme sur la guitare moderne) et de nouveau ton pour le plus courant au XVIIe (intervalles modifiés pour faciliter le jeu en ré mineur).

Son son, si on le compare à la guitare d'aujourd'hui, est plus incisif et acide, plus aigu aussi.


Une pièce de John Dowland jouée par Valéry Sauvage.


Le son du luth a toujours quelque chose d'extrêmement direct et intimiste : la hauteur et l'incisivité du son font que tous les détails sont audibles, et la modestie de son impact sonore le rend très chaleureux, propre à sonner admirablement dans les pièces les plus étroites.

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3. Le théorbe
3.1. Un nouvel instrument

Cependant le luth va être de plus en plus concurrencé, à partir du XVIIe siècle, par le théorbe. L'introduction en France se fait en 1650, mais le mot tiorba apparaît dès 1598 (dictionnaire italien-anglais de John Florio).
Il existait plusieurs types de théorbes (déjà, l'italien connaît tiorba et theorbo pour la même racine...), et on distingue généralement le padouan du romain (qui était plus grand, appelé chitarrone, c'est-à-dire grande guitare). J'en discutais encore avec un luthiste il y a une dizaine de jours, et les différences sont extrêmement subtiles d'un instrument à l'autre, d'un facteur à l'autre, d'une région à l'autre, d'un répertoire à l'autre.

Je vais donc me limiter à énoncer la différence nette et objective entre les luths et les théorbes (aussi nommés luth-théorbe, luth théorbé, chitarrone...). Avec, au passage, quelques faits avérés pour mieux distinguer les sous-catégories.

Le théorbe se distingue assez simplement du luth. Il est constitué de la même façon (forme de la caisse, cordes par deux - mais sans chanterelle isolée) mais dispose de deux chevillers, et les cordes les plus graves, attachées au second cheviller, ne peuvent pas être actionnées sur la touche.
Pour parler plus clairement : pour jouer du violon ou de la guitare, on pose les doigts sur les cordes pour changer leur longueur et donc leur hauteur. Dans le cas du théorbe, les cordes les plus graves gardent toujours la même hauteur une fois accordées (on peut bien sûr modifier l'accord avant de jouer).


On voit très bien le système sur cette photographie où Ronaldo Lopes joue en présence de l'ensemble Les Passions : les cordes libres en haut (les plus graves) ne touchent pas la touche où l'on pose les doigts. Il peut arriver d'ailleurs que les cordes passent au-dessus de la touche, mais l'inclinaison et la distance ne permettent pas pour autant de les jouer.


Avec cela, on peut déterminer à l'oeil nu ce qu'est un théorbe. D'un point de vue décoratif, on peut remarquer (mais ce n'est en rien une preuve, c'est juste une question de résonance comme la caisse est en général plus grande !) que les théorbes français sont généralement percés de trois rosaces (et non d'une comme pour le luth).

3.2. Usage du théorbe

Voyons à présent les caractéristiques musicales.

Le théorbe a la particularité d'utiliser un accord rentrant, c'est-à-dire que les deux dernières cordes du bas, au lieu de continuer à progresser vers l'aigu, sont légèrement plus graves que la troisième (et la quatrième) en partant du bas. Cet accord a deux raisons principales.

  • Il permettait de jouer des notes conjointes (c'est-à-dire qui se suivent) sans poser les doigts sur la touche, ce qui est infiniment pratique lorsqu'on dispose de plus de dix cordes à manipuler avec quatre doigts...
  • Le théorbe était essentiellement employé en accompagnement, et par conséquent le fait de ne pas disposer d'un aigu brillant n'était nullement un obstacle.


3.3. Qualités spécifiques

Le théorbe sonne plus grave pour trois raisons.

  • Les cordes graves descendent plus bas que le luth.
  • Ces cordes ne sont pas retenues par la main et continuent à vibrer une fois actionnées, ce qui renforce la résonance des basses.
  • L'accord rentrant "bouche" en quelque sorte l'aigu, puisqu'il n'est pas naturellement dans l'accord des cordes.

Son timbre est aussi plus rond, quelque part entre le luth et la guitare moderne. Il a quelque chose de très spécifiquement chaleureux, quelque chose de berçant à la façon d'un murmure de voix humaine. S'il a été aussi apprécié (avant d'être en partie supplanté par l'archiluth), c'est qu'il était plus puissant que le luth dans les parties graves (et pourtant, quiconque a assisté à un concert avec théorbe peut témoigner qu'on entend mal l'instrument, même en solo, en dehors de petits espaces...), et donc plus adapté à l'accompagnement.

La taille de l'instrument est bien plus grande parce que, du moins en l'accordant avec des boyaux, on ne peut pas indéfiniment augmenter la densité du matériau qui vibre pour rendre le son plus grave : il faut forcément allonger les cordes. Les anciens avaient tout de même rusé, avant qu'apparaisse le filage en laiton, en tressant des boyaux ensemble : un boyau trop large sonne mal, mais l'élasticité de petits boyaux mis en semble était meilleure. Les anglais appelaient cela cet assemblage catlin.
La caisse de résonance est du coup également agrandie, et le son plus large.
Cela peut d'ailleurs limiter physiquement la possibilité de certains interprètes de jouer des théorbes très grands lorsque le bout de la touche est loin.


Avec ces instruments, étonnant, c'est chez les amateurs et les musiciens du rang qu'on trouve le plus son bonheur, je ne suis pas toujours comblé par les phrasés un peu affectés et pas toujours clairs, par les prises de son aussi des disques du commerce. Ici, malgré quelques petits problèmes d'intonation au début, on danse parfaitement, et avec une clarté complète.
Par ailleurs, on entend très bien ici la chaleur du timbre du théorbe.


3.4. Répertoire

Du fait de ses caractéristiques d'accompagnement, il existe peu de littérature pour théorbe soliste, et la plupart de ces pièces sont d'ailleurs composées par des compositeurs qui étaient également luthistes.
Comme, par ricochet, tous les luthistes ne sont pas théorbistes et comme le disque donne assez peu de choses à l'instrument, on peut citer les compositeurs tutélaires chez qui chercher :

  • Bellerofonte Castaldi
  • Nicolas Hotman (introducteur de l'instrument en France)
  • Johannes Hyeronimus Kapsberger
  • Alessandro Piccinni
  • Robert de Visée

Les trois derniers fournissent l'essentiel du corpus. Mais bien entendu, il existe toutes sortes de transcriptions possibles à cette époque, et l'on peut tout arranger pour tout, il va sans dire.

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4. Autres types de 'théorbes'

Si l'on conserve la distinction précédente entre luth et théorbe comme absolue, on peut faire à coup sûr la différence entre ces deux instruments.

A présent, si vous souhaitez raffiner la finesse, c'est possible.

Il existe quantité de types d'appellation pour ces instruments. Elles peuvent varier selon les périodes, les lieux, les styles, l'emploi de ces instruments ; mais elles dépendent aussi de la fantaisie du luthier, voire d'une certaine attitude commerciale : donner un nom qui réponde à un besoin.
Dans les faits en tout cas, la nuance n'est pas toujours ressentie, même par les interprètes ou les théoriciens. Le luth-théorbe, par exemple, est tout simplement synonyme de théorbe (il est employé à l'époque de l'apparition du théorbe par certains luthiers qui souhaitent ainsi expliciter la nature de leur instrument). De la même façon, luth théorbé désigne un théorbe.

Il arrive cependant qu'on trouve mention des deux noms désignant le même objet sur un même disque d'un interprète - je pense par exemple au disque consacré aux trois premières suites pour le violoncelle de Bach jouées par Pascal Monteilhet pour les deux premières au théorbe et pour la troisième au luth théorbé. C'est tout simplement qu'en général on conserve le nom original donné par le facteur, même s'il est synonyme d'un terme générique plus courant. C'est du respect historique... et puis ça fait un peu rêver, tous ces noms bizarres et mystérieux sur les pochettes de disque.

Je ne visite donc ici que les termes les plus couramment employés, ceux dont on trouve encore mention sur les disques.

4.1. Le chitarrone

Ou 'grande guitare'. Le mot désigne à l'origine la variété romaine de théorbe, qui s'oppose à la variété padouane, plus petite. C'est le romain qui s'est le plus répandu à cause de la puissance de son médium et de ses graves, pour les raisons qu'on a expliquées précédemment.


On retrouve le principe du théorbe : un luth dont les cordes les plus graves sont très longues et ne sont pas actionnées depuis la touche.


On en trouve encore mention dans certains enregistrements - ô hérésie, le continuo de l'Orfeo de 1968 de Nikolaus Harnoncourt en comporte un (alors que, géographiquement parlant, la proximité padouane avec Mantoue semblait plus logique - mais à cette date, en 1607, le théorbe de grande taille l'avait largement emporté, et le clavecin commençait de toute façon à supplanter les cordes grattées).

Mais, d'une manière générale, on ne peut pas le définir comme un type d'instrument à part entière, il s'agit bien du nom du théorbe à un moment donné de son histoire et de sa géographie. Ce serait, si on veut, le premier nom du théorbe le plus courant.

Par ailleurs, comme c'est très souvent le cas, on peut douter que l'instrument de cette vidéo soit un chitarrone (un peu court en longueur, en graves et en puissance), mais plutôt un archiluth (voir ci-après)...

4.2. Le tiorbino

Ou 'petit théorbe'. Jusqu'au début du XVIIe siècle, il existe une variante petite et aiguë du théorbe, notamment exploitée par Bellerofonte Castaldi en duo avec le grand frère théorbe.

Il est évidemment conçu pour aller de pair avec le théorbe traditionnel, puisque c'est un peu un non-sens (à quoi servent ces cordes à vide si elles ne sont pas longues ?). Tout au plus cela allonge-t-il sa tessiture vers le grave pour un instrument qui sert de toute façon à jouer les parties qu'on dit de dessus...


Le Duo Castaldi nous fait ainsi entendre un très beau tiorbino dont le timbre s'apparente... à un luth.


Mais c'est ainsi, le luth le plus fréquemment joué est le luth ténor, mais on peut comme pour toute famille d'instruments, le décliner dans toutes les tessitures.

Nous attendons donc impatiemment le basson sopranino, puisque la basse de hautbois à strictement parler est le cromorne...


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5. L'archiluth

(italien arciliuto, allemand Erzlaute)

Réservons toutefois une catégorie particulière à ce théorbe-là qui a son importance historique.

Contrairement à ce qu'on lit parfois, l'archiluth ne regroupe pas la famille des grands luths, dont ferait partie le théorbe. L'archiluth apparaît alors que le théorbe l'a emporté sur le luth grâce à sa plus grande puissance dans le continuo (c'est-à-dire, pour faire vite, dans les parties d'accompagnement).

L'archiluth est un luth qui adopte la disposition à deux chevillers du théorbe. C'est donc un théorbe, mais qui conserve la morphologie du luth.

Autrement dit un petit théorbe, ou plus exactement un luth avec deux chevillers.

On attribue son invention à Alessandro Piccini, en 1694, un compositeur important pour ces instruments.


Quel est son intérêt ?

Le théorbe est grand et peu maniable. Lorsqu'arrive la fin du XVIIe siècle, les parties de basse continue sont systématiquement renforcées par violoncelle et viole de gambe, plus sonores que les cordes grattées. Le caractère sonore du théorbe n'est alors plus un atout indispensable, et il peut être remplacé par les archiluths, qui ont à peu près la taille du luth et la tessiture du théorbe, mais sonnent moins que ce dernier. Leur grande tessiture et leur maniabilité les rendait plus
Surtout, ils n'utilisaient pas l'accord rentrant qui rendait difficile l'usage en instrument soliste. L'archiluth, lui, disposait à la fois de bonnes basses à vide, comparables au théorbe (certes moins puissantes) et du registre aigu propre au luth.

On présente parfois les choses à l'inverse, le théorbe étant un type d'archiluth, mais ce qui est juste du point de vue du facteur est trompeur historiquement : le théorbe n'est pas né de l'extension de l'archiluth, c'est plutôt l'archiluth qui s'impose en miniaturisant le théorbe. De toute façon, l'archiluth n'est pas tout à fait un théorbe puisque son accord n'est pas rentrant.


Maurizio Manzon joue une composition de 2008 (Cipolloni) à l'archiluth. On aperçoit très bien la taille de l'instrument et ses cordes à vide.

L'archiluth finit par être totalement supplanté par le clavecin, comme les autres instruments à cordes grattées, au cours du XVIIIe siècle (on en trouve de dernières survivances dans les années vingt chez Haendel qui note par exemple teorba et arciliuto dans la nomenclature de quelques opéras, dont le fameux Giulio Cesare).

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6. La guitare baroque

Puisqu'il existait un équivalent à la guitare actuelle en la personne du luth (en termes de diffusion et d'usage soliste, pas en termes de lutherie bien entendu), il faut peut-être aller chercher les ancêtres de la guitare. Ceux-ci sont fort anciens [1], mais n'avaient pas son prestige - prestige reste somme toute modeste, l'un des instruments les plus populaires et les plus accessibles.

En tout cas, la guitare baroque n'était pas l'équivalent, en termes de répertoire, de l'omniprésente guitare. En revanche, elles sont bien d'une famille parallèle à celle des luths (le fond de leur caisse est plat, par exemple). C'est un petit instrument, qui a exactement la même forme, mais bien plus réduite, que la 'guitare classique' (qui date en réalité de 1874), et qui pouvait être joué en solo ou en accompagnement.

Comme le luth, elle est accordée en choeurs, c'est-à-dire par groupe de deux cordes à l'unisson (ou à l'octave). On dispose de cinq choeurs sur une guitare baroque, soit dix cordes (mais la chanterelle, la corde la plus haute, n'était pas toujours doublée, ce qui produisait alors un total de neuf cordes).


Antonello Lixi à la guitare baroque. Le décor de l'instrument est toujours très caractéristique.


La guitare baroque utilise l'accord rentrant, mais dans le sens inverse du théorbe : ce sont les deux choeurs censés être les plus graves qui sont accordés plus aigus. Cela permet de jouer facilement des notes conjointes (qui se suivent) sans actionner la touche, c'est ce que l'on appelle le jeu en campanella (en clochette), qui facilite beaucoup le jeu des mélodies.
Bref : c'est un instrument qui est conçu pour pouvoir tenir aisément une mélodie.

Cependant, on pouvait aussi actionner la guitare baroque en la grattant d'une traite, en accords, lorsqu'on voulait obtenir un son d'accompagnement clair et brillant dans un continuo.

Son son est très agréable et reconnaissable : assez aigu, incisif et lumineux, mais toujours chaleureux. Quelque part entre le théorbe et la clavecin (mais dans un registre aigu évidemment).


Regina Albanez joue une pièce de Gaspar Sanz. Elle utilise aussi bien l'aspect mélodique ou polyphonique que les accords, ce qui permet d'observer la palette technique de l'instrument.


L'instrument a été stable pendant plusieurs siècles, depuis la Renaissance jusqu'au XIXe siècle ; son accord et sa décoration ont très peu varié contrairement à ses cousins de la famille du luth auxquels il a survécu, avant de se changer en autre chose.

En termes de répertoire solo, il existe pour le théorbe quelques compositeurs tutélaires :

  • Francesco Corbetta (France)
  • Robert de Visée (France)
  • Gaspar Sanz (Espagne)

L'instrument se pratiquait surtout en Espagne, Italie et France.

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7. La vihuela de mano

(La vihuela de arco, elle, est un instrument à rapprocher des violes, comme l'indique d'ailleurs son nom.)

La forme est très proche de la guitare, mais elle n'en est pas un exemplaire ; sa caisse et très proche et son accord reprend celui du luth. Elle naît en Espagne et y est surtout pratiquée au XVIe siècle, ainsi qu'au Sud de l'Italie en raison des liens commerciaux d'alors. Il n'existe pas réellement de répertoire international pour l'instrument, mais il faut signaler son existence, elle est très appréciée des guitaristes d'aujourd'hui.

Son son est extrêmement doux, mat et étouffé.

En effet cette sorte de petite guitare est l'un des instruments incontournables de l'accompagnement de la musique mariachi, puisque l'époque de sa diffusion en Espagne correspond à celle de la colonisation - et son usage s'est maintnu au Mexique.

De la même façon, la jarana est une survivance mexicaine (Etat de la Veracruz) de la guitare baroque.


Vihuela (ou viuelle) moderne. On voit son dos encore légèrement bombé, qui la distingue nettement de la famille des guitares.



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8. Variantes miniatures du luth

Ici, il en existe quantité, et si vous rencontrerez quelques noms connus, nous n'allons pas détailler trop en profondeur, sinon nous y passerions plus que notre jeunesse.

Les noms et les états sont surtout une affaire de chronologie.
(Il n'est que de constater la similitude troublante entre les noms portés, de toute façon.)

8.1. La mandore

Aussi appelée gallichon (gallizona), elle est la forme médiévale du luth, et la forme de sa caisse préfigure la mandoline. Par ailleurs, la mandole peut aussi bien désigner la mandore qu'un type de mandoline (voir 8.4.).

Contrairement au luth, elle était semble-t-il accordée en quintes.


Sur la vidéo que j'ai sélectionnée, on voit une mandore de type renaissant, contrairement au type médiéval de l'illustration. Vous remarquerez son timbre aigrelet, presque métallique, comme un petit luth aigu - bien que faute de tradition, on en soit réduit à des suppositions.


8.2. Le colachon (colascione)

Il s'agit d'un petit luth parfois présenté à manche long (mais les représentations divergent). Il a surtout été rendu célèbre par son utilisation dans le théâtre de la commedia dell'arte. Il n'existe pas réellement de répertoire écrit spécifiquement pour lui.
En réalité, si la forme est celle du luth, les cordes (métalliques) ne sont pas toujours organisées en choeurs. Par ailleurs, le colachon ne comporte que trois cordes ou trois choeurs, il est donc très limité. C'est bel et bien un instrument pratique, d'usage populaire.


A manche long...

... ou à manche court !
(Instrument de Brigitte & Philippe Rik.)


On peut proposer une vidéo pour chaque type de manche, court ou long.

8.3. Le lutino

Ce petit luth très peu puissant du début du XVIIe ne dispose pas non plus de répertoire spécifique. Ce serait simplement la variante plus aiguë de la famille du luth, comme l'est le tiorbino, si sa caisse plus étroite et son cheviller légèrement courbe ne rappelaient la mandoline...


Instrument de Brigitte & Philippe Rik.)


8.4. La mandoline

Attestée dès le XVe siècle, c'est une sorte de petit luth soprano, mais dont la caisse de résonance est en forme d'amande plus que de poire et dont le cheviller légèrement courbe rappelle la guitare.

Elle est le creuset de tout ce qui peut exister de confusions dans ce domaine. Par exemple, la mandurina (pas si loin de 'mandore', n'est-ce pas ?) désigne le type milanais de mandoline, tandis que mandole désigne en français aussi bien la mandore que la mandoline ténor (et mandola la mandoline alto en anglais...).

Mais, pour faire simple, il existe deux types de mandoline :

  • La mandoline milanaise (ou mandurina) comporte six choeurs et se joue avec les doigts, son ouïe est circulaire. Il en existe des exemplaires en métal qui se jouent avec plectre. A l'origine, l'accord se fait en tierce et quarte, mais il arrive désormais qu'on l'accorde comme la guitare.
  • La mandoline napolitaine (ou mandolina) comporte quatre choeurs. Son ouïe est ovale et elle se joue essentiellement avec plectre, souvent en tremolo dans la musique traditionnelle (la corde est actionnée plusieurs fois par le plectre) - d'où un revêtement d'écaille pour éviter les marques accidentelles de plectre. Elle est accordée en quintes, ce qui la distingue du luth.



Mandoline napolitaine.


C'est évidemment l'exemplaire napolitain qui s'est largement imposé, en particulier au XVIIIe siècle. Il en existe cependant assez peu d'occurrences dans la musique sérieuse. On peut citer le fameux concerto de Vivaldi, la romance Pendant que tout sommeille de l'Amant Jaloux de Grétry, la nomenclature de certaines oeuvres de Boulez (Eclat, Pli selon pli), mais son introduction, à part chez Vivaldi où elle est traitée comme un luth aigu et très mélodique, est toujours de l'ordre du clin d'oeil folklorique.

Par ailleurs, son nombre très réduit de choeurs ne permet pas d'exécuter du répertoire polyphonique, c'est très souvent un instrument qui se joue pour de petites mélodies, ou bien en trémolo seule ou en groupe pour accompagner (ou remplacer le cas échéant) le chant.

Pour les vidéos, on peut voir le jeu monodique (concerto en ré de Vivaldi, avec quelques notes répétées) ou le jeu d'accompagnement en trémolo (Alagna hors style - mais en progrès - dans L'Amant jaloux). Jeu au plectre pour une mandoline napolitaine - bien entendu.

Il faut noter que l'instrument a connu un certain renouveau au vingtième siècle, sous de multiples avatars plus ou moins inattendus, notamment sous sa forme bluegrass asymétrique.

8.5. La citole et le cistre

Attention, ce sont de petits instruments à cordes grattées de l'époque, mais pas de la famille du luth.

(Cittern en allemand, parfois traduit cetra en italien - c'est-à-dire 'cithare', qui peut être un synonyme de 'lyre'.)


Citole.


La citole s'utilise au Moyen-Age, c'est un instrument à cordes pincées (quatre choeurs) dont la forme se rapproche du violon. Le cistre lui succède, dans un usage plutôt populaire du XVIe au milieu du XVIIe siècle. C'est à partir de 1770, après une période d'oubli, qu'il devient à la mode dans la bonne société, mais la mode est aussi violente (un facteur voulait permettre d'actionner un cistre au clavier pour les plus frustrés) que fugace, puisqu'elle cesse dès 1800.

La caisse du cistre est assez arrondie, mais à fond plat. Il comporte très tôt des barrettes, à la façon de la guitare moderne classique, pour marquer les demi-tons. Son répertoire écrit se limite donc à une trentaine d'années, et on n'en joue plus aujourd'hui que sous une forme modernisée, pour le répertoire 'celtique'. Il s'exécutait largement avec plectre, au moins jusqu'à la Renaissance.


Cistre de type renaissance.


Vous pouvez profiter du son médiéval de la citole reconstitué sur cette vidéo (je ne garantis pas l'intérêt féroce de l'oeuvre exécutée) ou du cistre renaissant.

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9. Un premier bilan

En cherchant les vidéos les plus parlantes (et non sujettes à violation de droits des interprètes), j'ai découvert cette très bonne introduction :


On y entend très bien les sons naturels de chaque instrument. Et aussi l'accord rentrant du théorbe.

Toutefois, il faut apporter une précision et corriger une véritable erreur.

  1. L'erreur, vous l'aurez notée, c'est que les notes de basse du "luth", tendues sur un second cheviller, nous démontrent qu'il s'agit en réalité d'un... archiluth. On voit très bien sa taille de luth et ses cordes tendues à part à la manière du théorbe.
  2. La précision qu'il faut apporter, c'est que le luth et surtout l'archiluth peuvent tout à fait être utilisés pour la basse continue, même si, effectivement, la mode est plutôt au théorbe aujourd'hui.


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10. Histoire et précisions
10.1. Usage de la tablature

L'ensemble de ces instruments a utilisé, pour être joué, un système de tablatures. Le principe est que l'on représente l'emplacement des doigts sur une portée (dont les lignes représentent les cordes), et non les notes jouées. La notation sur tablature a considérablement évolué et variait à la même date selon les nations (ainsi les allemands plaçaient-ils les aigus en bas et les français en haut, sans parler de la notation italienne qui était elle aussi particulière), et supposait bien sûr que l'on dispose d'un instrument doté du même nombre de choeurs et du même accord (même si ce dernier point peut se modifier, bien entendu)...
La tablature permet, comme les portées transpositrices pour les instruments à vents, de changer d'instrument sans avoir à réapprendre les doigtés pour une note donnée : il suffit de continuer à exécuter les doigtés écrits, même si l'on n'a aucune idée de ce que l'on joue...

Le fonctionnement est inverse de la partition, où l'on a la musique, et où l'on doit se débrouiller pour la réaliser ; ici, on a la réalisation, et on en déduira ensuite la musique que l'on joue...

On voit un exemple de tablature baroque française pour luth, avec ses signes propres, sur cette notule que nous avions consacrée à Charles Mouton.

10.2. Usage du plectre

Le plectre, qui a lui aussi porté des noms très nombreux selon les époques, les régions et les styles, est un petit onglet qui sert à activer les cordes de façon très dynamique. Il permet bien le tremolo (le même choeur est activé plusieurs fois rapidement à la suite), mais rend impossible, puisque toute la main droite est alors occupée à le tenir, le jeu polyphonique.

Il était déjà en vigueur au Moyen-Age, mais son usage disparaît avec le goût polyphonique renaissant, qui persiste dans la musique baroque. On le revoit paraître pour la mandoline napolitaine, qui utilise beaucoup le trémolo presque toujours le plectre.

La guitare moderne peut se jouer avec plectre également.

10.3. Le jeu en accords

De la même façon, l'utilisation de l'accord qui actionne d'un coup de main toutes les cordes varie selon les instruments, les genres, etc. Le nombre de cordes du luth ou du théorbe le rend presque impossible sur l'ensemble de l'étendue de l'instrument, ou alors pour un nombre très réduit d'accords (puisqu'on peut modifier au maximum quatre choeurs d'un coup, tout le reste restant à sa hauteur d'accord par défaut).

On l'utilise en revanche fréquemment à la guitare baroque (cinq cordes seulement, et un côté brillant et clair, presque percussif, donné à un accompagnement), et bien sûr pour la guitare moderne, lorsqu'on accompagne d'une manière un peu sommaire une chanson populaire.

10.4. Une évolution

Pour se concentrer sur la période qui nous occupait principalement (XVIe-XVIIIe siècles), si l'on résume :

  1. Développement du jeu avec les doigts au XVIe siècle pour permettre la polyphonie, de jouer des pièces complètes.
  2. Essor du luth.
  3. A partir du début du XVIIe siècle en Italie, du milieu du siècle en France, le luth est concurrencé par le théorbe, plus grave, plus sonore, et accordé de façon plus conforme à l'accompagnement.
  4. Vers la fin du XVIIe siècle, le théorbe est en partie remplacé par l'archiluth, plus maniable, plus propre au répertoire solo, mais avec une extension grave comparable. Sa puissance moindre est compensée par l'usage d'instruments à cordes frottées pour la basse continue dans les parties d'accompagnement orchestral.
  5. Les possibilités techniques bien plus étendues du clavecin, son meilleur rendement sonore aussi, finissent par prendre de plus en plus la place des instruments à cordes grattées, jusqu'à les éclipser totalement au XVIIIe siècle pour l'usage comme instrument d'accompagnement, et même comme instrument soliste pour lequel il n'est presque plus rien de produit de 'sérieux'. En tout état de cause, le continuo disparaît définitivement avec l'ère classique (où l'orchestre est monobloc et où l'improvisation à la basse disparaît).
  6. Développement de la mandoline napolitaine à la fin du XVIIIe siècle.
  7. 1875 : Invention de la 'guitare classique' par le luthier espagnol, qui ouvre la voie à toute la littérature et les transcriptions du vingtième siècle.

Bien entendu, les choses sont très loin, on en a eu un petit aperçu, d'être aussi linéaires que cela, mais cela permet d'y voir un peu plus clair après ces nombreuses considérations...

10.5. Patrimoine discographique

Dans le répertoire soliste baroque et renaissance, c'est de loin le luth qui dispose de la plus vaste littérature, et le théorbe, à cause des propriété qu'on a vues, est moins présent dans les oeuvres qui nous sont parvenues, même si tout était susceptible d'être arrangé et transposé (beaucoup d'oeuvres pour luth proviennent ainsi... de l'orgue !).

Par ailleurs, le luth se capte extrêmement bien grâce à son son légèrement incisif.

Le théorbe, lui, pose des problèmes de captation : il n'est pas très sonore, comme tous les instruments de cette famille, mais ses harmoniques graves, s'il est capté de trop près, saturent quasiment les micros et créent un halo désagréable. Si peu qu'on y ajoute de façon naturelle ou artificielle un peu de réverbération, le résultat est souvent très inférieur à ce qu'il vaut réellement dans de bonnes conditions.

L'archiluth n'est que très rarement distingué de ces deux représentants sur les disques.

Enfin, on ne peut que regretter très vivement le très petit nombre de disques consacrés à la guitare baroque, mais il est vrai que du fait de son accord rentrant et de ses cinq choeurs, l'instrument dispose d'une toute petite tessiture qui ne permet pas forcément de jouer aisément le grand répertoire avec ses chants et contrechants.

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11. En guise de conclusion

Tout d'abord, un grand merci aux amateurs (et certains professionnels) qui partagent ainsi leurs bijoux, souvent à haut niveau, et permettent de rendre ce support plus pertinent que les livres - en ce qui concerne la musique. C'est la destination originelle de YouTube, et une sacrée bonne idée.

On espère que le parcours aura été suffisamment clair pour que vous puissiez à présent vous repérer sans faille dans cet univers peuplé de bizarreries et d'exceptions, mais aussi de très beaux timbres à découvrir.

Il est dommage, au demeurant, que la qualité ou l'originalité de la littérature, du moins avant le vingtième siècle, n'ait pas toujours été au rendez-vous (on a toujours l'impression d'entendre les mêmes oeuvres gracieuses et peu audacieuses...).

A présent, il nous restera juste à faire la même chose pour la famille du clavecin (ce sera plus court et plus facile), et nous pourrons dire un mot de ce concert à L'Archipel. D'autant qu'il n'y a pas tant à dire, mais on s'est dit que ce prolégomène serait peut-être un tout petit long pour une chronique de spectacle.

Dieu merci, le format internet permet l'extension miraculeuse des papiers. Unto us, a ribbon is given.

Notes

[1] Les ancêtres de la guitare et du luth, à l'instar de la harpe, de la flûte et du hautbois, sont aussi anciens que les fouilles archéologiques nous permettent de le montrer, jusqu'à plusieurs millénaires avant notre ère.


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Commentaires

1. Le mardi 29 décembre 2009 à , par Morloch

Merci, un article encore une fois tres bien fait. Je crois que de mon cote je vais tenter de me mettre au Pipa local, pour voir...

2. Le mardi 29 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec

Merci Morloch, les grattouilleurs vaincront.

Ah oui, si tu te mets à explorer l'extra-européen-occidental-savant, tu vas laisser mon panorama sur le bord du chemin. Déjà que j'ai passé plusieurs jours à préparer les distinctions, les illustrations visuelles et sonores...

Bon, cela dit, pour le pipa, c'est du sous-luth tout de même - non seulement c'est encore plus casserole que le colachon et le cistre, mais en plus il n'y a même pas de cordes doublées. Vraiment des primitifs, ces gens. Et j'en ai autant au service du biwa.
Plus sérieusement, je trouve l'Orient extrême plus inspiré pour les instruments à vent.

A propos, pour t'écrire, il vaut mieux passer par quoi ? Courriel, MPs ?

3. Le mardi 29 décembre 2009 à , par lou :: site

Passionnant ! en particulier pour les cancres curieux (on ne parle bien que de soi).
En écoutant Maurizio Manzon (peut-être mon préféré), je me suis demandé qui était ce Cipolloni. Un compositeur contemporain que je ne connaîtrais pas encore ?
Non, bien sûr, c'est le luthier Urgiante Cipolloni.
Et Sautscheck ?
Evidemment, c'est un des pseudonymes de Roman Turovsky-Savchuk, dont j'avais bien reconnu l'écriture à la première écoute.

Je te l'ai déjà dit, David, ces études d'histoire et de musicologie devraient être éditées, avec deux ou trois CD (audio et vidéo) insérés dans la couverture. C'est magnifique, c'est... au-delà des mots.
[comme tu as écrit que tu aimais les lutins flatteurs, je fais de mon mieux]

Autrement, ça te revient bien de critiquer le clavier azerty des autres, fier légat que tu es !
Pour cela tu n'auras qu'une mention B.

4. Le mardi 29 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec

Effectivement, je confirme, tu flattes très bien, je t'offre un accès illimité aux commentaires de CSS. J'accueille avec joie ta suggestion d'édition... parce que tu as bien un éditeur à me recommander, n'est-ce pas ?
Sans quoi, il faudra se résoudre à s'esquinter les yeux sur écran. Oui, c'est cruel.

En attendant, tu peux toujours fureter dans l'index à la section pédagogique, c'est et c'est moins cher qu'en Pléiade avec SACD et Blue-Ray.

Oui, Cipollini, c'est du néobaroque, il y a quelques compositions dans le genre qui fleurissent, mais qui sont surtout l'oeuvre de praticiens de ces instruments qui s'amusent. Comme RTS, précisément. Je salue ta grande culture.

Quant à l'Azerty, je me garderais bien de le critiquer, surtout lorsqu'il s'agit comme pour l'exotique Morloch d'un Qwerty.

Et pof.

5. Le mercredi 30 décembre 2009 à , par lou :: site

Et pof ?
Flattez, prenez de la peine, soyez discret ! peine perdue.

Le portrait de Jean de Dinteville et Georges de Selve que tu causes, tu l'attribues à un inconnu de moi - il est vrai que je ne connaissais pas Cipolloni (décidément... mais là, le "i" et le "o" sont tout proches).
Mon "B" n'aura servi à rien. Si tu n'en n'as pas l'usage, je le reprends.

Ce point, vraiment négligeable dans la page, m'a immédiatement interpellé quelque part. Un professeur de philosophie (pas un philosophe) connu, un peu, se pique d'histoire de l'art. A la veille d'une conférence qu'il devait donner sur la représentation de nos truchements, il fut fort dépourvu : il ne savait pas qui était (avait été) à la palette ; c'était sur une liste d'Histoire Générale de l'Art, tellement confidentielle que personne ne risquait de l'y reconnaître, ni même de lui répondre et de lui envoyer une reproduction, parfois utile pour montrer de quoi on parle - personne, sauf... LOL. Je l'ai retrouvé, quelque temps plus tard sur une Philoliste, où il faisait aussi bien le pitre, mais ça passait inaperçu dans la masse des comiques.

6. Le mercredi 30 décembre 2009 à , par lou

Je viens juste de retrouver l'image qui t'a inspiré (on la reconnaît à la petite ligne verticale au milieu des cordes). Ne recopie pas les erreurs des autres :) il y en a tant sur la toile.

7. Le mercredi 30 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec :: site

[Précision pour les lecteurs des commentaires : j'ai écrit Holtein au lieu de Holbein pour l'illustration du luth.]

Je ne me lancerai pas dans une savante démonstration sur l'évolution labio-alvéolaire du |b] en [t] dans les idiomes de type semi-germaniques au contact d'influences linguistiques extérieures, tu ne pourrais pas comprendre.

Oui, effectivement, il y a erreur. Pour mes notules, je récupère généralement les images sur la Toile, et en l'occurrence, celle-ci m'a paru montrer très bien l'aspect standard du luth, qui plus est des deux côtés de la caisse. Effectivement, malgré la célébrité du tableau, je ne fréquente pas Holbein tous les jours et j'ai fait confiance à la légende plus qu'à un souvenir brumeux. Comme il n'était pas question de peinture et que j'ai déjà passé plusieurs jours à confronter les informations, organiser, iconographier et illustrer de façon sonore la notule, je reconnais volontiers ne pas avoir poussé l'investigation plus avant.

Ta parabole du conférencier me chiffonne, parce que je vois au moins deux nuances notables avec notre cas : le salaire et la spécialisation. Je ne revendique aucun des deux. :)

--

J'en profite, petit facétieux, pour rebondir plus largement sur une grave question qui agite nos crânes austères ; tout ça repose la question des ouvrages de référence sur la question, qu'il vaudrait mieux consulter qu'un improbable carnet de Toile.

Mais c'est le serpent qui se mord la queue, parce qu'on en a déjà parlé, il n'existe guère d'ouvrages généralistes à la fois accessibles et précis (sans parler des impossibles illustrations sonores). Ceux qui existent sont malheureusement souvent farcis d'erreurs (musicales, pour le coup), même dans les collections sérieuses. C'est extrêmement désagréable lorsqu'on veut s'intéresser au sujet, et m'a valu quelques déconvenues il y a quelques années, ainsi qu'à d'autres je suppose, lorsqu'on s'aperçoit qu'on a appris des choses qu'on peut objectivement qualifier d'inexactes...

Et qui doit se mettre au boulot dans son bac à sable, hein ?

Tu te rends compte du nombre de pixels qu'on a dû tuer pour simplement un petit caractère pas à sa place ? Et tu n'as pas honte ? Tu sais pourtant que la reproduction du pixel est un grave sujet de préservation du netosystème !

8. Le jeudi 31 décembre 2009 à , par Morloch

Oh on peut me joindre de toutes les facons, il faut juste que je me reinstalle internet, j'ai quitte la chere residence universitaire pour m'installer du cote d'Andingmen (安定门, la porte de la tranquilite, de la serenite ou un truc du genre) et ensuite je devrais retrouver l'usage des accents.

Ici, le climat est rude, les lutins devront bien se couvrir : je n'avais pas compris que Pekin etait dans le desert de Gobi. Ce n'est pas le cas officiellement, mais en depit de mon horrible esprit contestataire, je commence a realiser qu'en ces lieux, il faut parfois se mefier des verites officielles.

Faut avouer, le pipa ca fait un peu casserole. Je vais m'enquerir de ce qui existe a part ca.

9. Le jeudi 31 décembre 2009 à , par lou :: site

Précision pour les lecteurs des commentaires

Et moi qui ai tout fait pour être discret, tss...

Je ne me lancerai pas dans une savante démonstration

Trop tard, je te retourne la balle de la gameboy, j'attends la démonstration, même en semi germanique ! :)

Ta parabole du conférencier

Ce n'est pas une parabole, c'est du à plat, tu veux le nom ? en public ? j'ai les documents (une maladie compulsive). Tu n'as pas la spécialisation, soit, heureusement, parce que toi quand tu parles de religion (et de gameboy), tu connais les textes - tu as lu chez moi que je m'étais rappelé notre échange et ton article sur les oeuvres de jeunesse (de genèse ?) du Bienheureux.

[je n'ai pas mis le lien, trop impliqué dans les commentaires, je ne fais ma promo que chez les autres]
Le salaire ? et pas que. Philo en prépa à Toulouse, ça doit être plus cool que chanter en hiver vers (!) Paris.

Et puis je ne voulais pas le dire ni même poser une question.
Un article de récréation, en brèves et jeux, ça te prend... cinq minutes selon la police, une heure selon les lecteurs. Un article comme celui-ci, tu diras que tu l'as publié en cinq minutes (publié, attention), et la préparation ? combien d'heures ? sur plusieurs années, forcément. Et on ne t'en veut pas d'ignorer Johannes de Delft - je ne ferai pas plus près pour le nom réel, ou alors un petit pas dans ma signature.

Jean Jacques pas Delf...

10. Le jeudi 31 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec

@ Morloch : Bien, bien ! On écrira alors, et avec des moufles encore !
Quant au pipa, je constate avec soulagement que les vérités officielles n'ont pas encore subverti ton esprit critique ou à tout le moins ta clairvoyance esthétique. :-)

11. Le jeudi 31 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec

Lou :
Et moi qui ai tout fait pour être discret, tss...

Certes, certes, mais ça devenait un peu nébuleux, je pense. Et puis comme il était question de recopier, j'ai préféré être clair : le contenu de la notule est bien du contenu original. :-)

j'attends la démonstration, même en semi germanique ! :)

C'est barré, trop tard.

Ce n'est pas une parabole, c'est du à plat, tu veux le nom ?

Je ne parle pas de la réalité de ton affirmation, que je crois très volontiers bien évidemment, j'étais juste dubitatif sur la parallèle.

Un article comme celui-ci, tu diras que tu l'as publié en cinq minutes (publié, attention), et la préparation ? combien d'heures ? sur plusieurs années, forcément.

Si tu me poses la question, ça m'a pris pas mal d'heures en effet, puisqu'il faut confronter un certain nombre de sources : du fait de la mobilité de ces instruments par rapport aux claviers par exemple, il est difficile d'obtenir des distinctions cohérentes (que ce soit par l'accord, par la tessiture, par l'emploi... c'est encore la forme qui est la plus probante, et pas toujours).
Les illustrations, en particulier sonores, prennent toujours beaucoup de temps aussi. Mais la vitesse n'excuse rien, ce n'était pas mon propos. J'ai surtout précisé parce qu'à la lecture de ton commentaire, on aurait pu penser que j'avais recopié, et des bêtises en plus, dans les parties musicales de l'article, alors qu'il s'agit d'une erreur de graphie dans le nom du peintre.

Et on ne t'en veut pas d'ignorer Johannes de Delft - je ne ferai pas plus près pour le nom réel, ou alors un petit pas dans ma signature.

Ce n'est pas parce que j'ai remplacé une lettre par une autre chez Holbein que je n'ai jamais vu de tableau non plus. :-) J'ai hésité à l'employer, justement, pour la guitare baroque, mais on ne voyait pas le fond de la caisse ; en revanche, il en sera question pour le Muselaar, je n'en dis pas plus.

12. Le vendredi 1 janvier 2010 à , par tudel

Je suis admirative devant ce genre d'articles.
Vraiment passionnant tout ce que l'on apprend. ça en fait des instruments à cordes pincées, grattées. C'est vrai que cela mériterait d'être édité, mais internet apporte une maniabilité vraiment très grande. Ou alors il faudrait créer une série de DVD, là ça serait idéal!

13. Le vendredi 1 janvier 2010 à , par DavidLeMarrec :: site

J'en suis flatté, Tudel. :) Pour les pincées, c'est en préparation, c'est quand même un tout petit peu plus simple (il y a surtout des confusions de vocabulaire entre les langues).

14. Le dimanche 3 janvier 2010 à , par Morloch

Ah ok tu reserves le mot pincees pour les boites a clous. Pourquoi pas, ces distinctions ne sont pas fondamentales tant qu'on sait de quoi on parle. Cet apres-midi je vais m'enquerir des flutes indigenes, j'en ai vu de jolies en bois a la television ( oui, je vais au fond des choses ) ce sera sans doute plus amusant et je pense qu'une fois au'on a compris comment souffler dans le bidule, on fait plus vite des progres.

15. Le dimanche 3 janvier 2010 à , par DavidLeMarrec :: site

Oui, c'est le mot consacré. Même si dans les faits on pince les cordes grattées ; même si le bec d'un sautereau ne pince pas plus qu'un ongle ou qu'un plectre ; même si l'ancêtre du clavecin, le psaltérion, était à cordes frappées (ou frottées pour certaines espèces, d'ailleurs). Bref. C'est comme ça, et c'est pratique, disons.

Très bien, très bien ! Pense aussi à essayer un suona, c'est quand même un grand incontournable de la nomenclature Kunqu / Sichuan & Cie. Et c'est un très beau son, pour le coup.

16. Le lundi 4 janvier 2010 à , par Morloch

Je crois que j'ai jete mon devolu sur le 笛子 (dī zi), le son est joli et je crois que ce n'est pas trop cher - sachant que le but est de trouver un pretexte supplementaire de papoter en chinois. Ton biniou je ne sais pas trop, je vais jeter un oeil tout de meme (et une oreille).

17. Le lundi 4 janvier 2010 à , par DavidLeMarrec :: site

C'est sans doute un peu plus délicat à manipuler, à cause de l'anche double. Ta flûte traversière, cela dit, il faut avoir la colonne de souffle... Tu me diras.

18. Le mardi 5 janvier 2010 à , par Morloch

Ca y est : j'ai mon flutiau. Il ne reste plus qu'a passer a l'etape B du plan, trouver un professeur.

Ca n'a pas l'air si evident a jouer, pour la colonne d'air, je verrai si j'y arrive.

19. Le mercredi 6 janvier 2010 à , par DavidLeMarrec :: site

Ah oui, bon plan pour faire un peu de conversation. Ce doit être un exercice drôlement intéressant du coup.

Tout le monde y arrive, pour la colonne d'air. Il faut juste... du temps. Tu en as un peu devant toi, donc c'est impeccable. :)

20. Le mercredi 5 mai 2010 à , par leDamien

page très intéressante, je cherchais des informations sur le théorbe.
Dans beaucoup de concerts baroques où je vais il y a un théorbe qui fait le continuo avec un clavecin, et je suis bien incapable de le distinguer à tel point que je me demandais si le théorbe ne jouait pas essentiellement pour les musiciens. À vous lire j'ai l'impression qu'en principe sauf pour une période début XVIIème le clavecin et le théorbe auraient plutôt une présence exclusive.
Par exemple cette semaine à la cité de la Musique, Acis et Galatée de Haendel, avec un théorbe, un clavecin, 3 violoncelles, et une contrebasse...

21. Le mercredi 5 mai 2010 à , par DavidLeMarrec

Oui, le théorbe est vraiment à la mode depuis quelque temps, souvent désormais on en met deux (il y a aussi des archiluths quelquefois). Comme la guitare, il manque beaucoup de puissance, et on doit mobiliser toute son attention pour percevoir les sons (dans le médium grave de l'orchestre, un volume minime et des harmoniques très douces, ça n'aide pas).

En revanche, non, il n'était pas forcément seul, bien que toutes les combinaisons aient existé. Il est vrai qu'au début du XVIIe on ne doublait pas forcément avec une viole de gambe ou un violoncelle. Et surtout on était beaucoup plus près que dans les grandes salles d'aujourd'hui.

Trois violoncelles dans le continuo ? C'est la première fois que je vois ça. Il n'y aurait pas une viole de gambe, une basse de violon ou un lirone avec ? Normalement, il n'y a pas d'instruments à cordes frottées de même type dans le continuo. Ca n'aurait pas grande utilité, et au delà de deux cordes frottées c'est déjà redondant. Dumestre a fait ça pour le Combattimento et Fiera di Farfa (violoncelle + viole de gambe + lirone, et même basse de violon il me semble), et c'était inutilement pesant.

Merci pour cette réaction, et bonne fin de soirée !

22. Le jeudi 6 mai 2010 à , par leDamien

oups...
2 violoncelles (chacun tenu entre les jambes comme une viole de gambe, et non posé sur la pointe), 1 contrebasse, 1 basson, 1 clavecin, et 1 théorbe pour être complet sur le continuo (4+3 violons, et 3 flûtes/hautbois).

23. Le jeudi 6 mai 2010 à , par DavidLeMarrec

Deux violoncelles, c'est déjà plus envisageable (même si je ne suis pas sûr, à part peut-être dans Bach, d'en avoir vu).

Mais tout est possible, cela dit.

Continuo fourni quoi qu'il en soit. Ca jouait y compris pendant les récitatifs ?

24. Le jeudi 6 mai 2010 à , par leDamien

il me semble que oui la plupart du temps.
Pour sûr, le théorbe ne jouait jamais sans que le clavecin je joue, l'inverse n'étant pas vrai.
J'avais l'impression que l'orchestre était trop fourni et que cela enlevait au son sa vivacité baroque, mais cela correspondait peut-être mieux à l'ambiance amoureuse de la pièce.
merci beaucoup de vos réponses

25. Le jeudi 6 mai 2010 à , par DavidLeMarrec

Oui, c'est le problème si on met trop de monde dans le continuo, en particulier côté cordes frottées, ça devient vite un peu pesant, presque gourd.

Cela dit c'est étonnant, Pickett a d'habitude un continuo fourni (en particulier en cordes grattées) mais très mobile.

Merci pour ces précisions, et bonne soirée !

26. Le mardi 8 février 2011 à , par laura

merci grace a vous g pu faire ma recherche facilement et rapidement

27. Le mercredi 9 février 2011 à , par DavidLeMarrec

Bonjour Laura,

J'en suis ravi, c'est fait pour. Bonne journée.

28. Le vendredi 11 février 2011 à , par Morloch

et c'est ainsi que se repandirent les cordes égratignées grattées... La persevérance au 笛子 est difficile pour une raison pratique : le boucan fait par le bousin quand on n'a pas le temps de s'exercer sauf le soir. Je me suis donc remis à la guitare - au moins personne n'entend.

29. Le dimanche 13 février 2011 à , par DavidLeMarrec

Les Chinois ont donc réellement des siècles d'avance sur les puissances de l'Ancien Monde : ils sont capables de faire des instruments à cordes grattées qu'on entend !

Hier encore, j'étais à cinq mètres d'un luth _solo_ et je n'entendais... rien.

Sans parler de l'épisode cocasse où chantant dans un conservatoire, je vis débouler l'occupant d'une salle adjacente me confiant, très embarrassé, qu'il ne parvenait pas à entendre sa guitare - lorsqu'on a entendu la nature de ma voix, il y a de quoi rigoler doucement.

30. Le lundi 14 février 2011 à , par Morloch

Ah oui, le concert de luth, c'est premier rang ou rien :) tout de même, cinq mètres c'est limite, je n'ai pas entendu mais il se pourrait qu'il y ait un manque de technique, le volume sonore fait partie des paramètres de ce genre de joueurs de biniou.

Je regrette de ne jamais avoir entendu Julian Bream en concert, sa réputation est qu'on pouvait l'entendre pour de vrai, sans sonotone, micro-zoom ni hallucination auditive.

31. Le lundi 14 février 2011 à , par DavidLeMarrec

Oui, il y avait clairement un problème de son côté : il jouait remarquablement, mais on n'entendait aucune différence de volume entre les arpèges qu'il faisait pour s'accorder discrètement et les morceaux qu'il jouait...
J'avais envie de lui conseiller de laisser pousser ses ongles, dans un cas aussi désespéré...

A côté d'un luth ou un théorbe, une guitare classique, de toute façon, c'est déjà les grandes orgues. Ils n'ont jamais pensé à proposer des luths folk ou des théorbes électriques ?

32. Le mardi 24 avril 2012 à , par Christian Vasseur

Bonjour, je viens de regarder la vidéo en néerlandais et n'y trouve pas l'erreur à laquelle vous faites allusion, le luth joué est un luth baroque de type allemand à 13 choeurs et non un archiluth. Ce type de luth dispose de ce qu'on nomme un cavalier (http://www.guitareclassiquedelcamp.com/viewtopic.php?f=101&t=21374&start=45#p184230)
l'archiluth dispose comme le théorbe d'une extension (http://fr.wikipedia.org/wiki/Archiluth)
mais a un diapason plus court et jamais d'accord rentrant, il était accordé comme le luth renaissance alors que le luth baroque esrt accordé en ré (dit accord nouveau).
Bien cordialement. Christian Vasseur

33. Le mardi 24 avril 2012 à , par DavidLMarrec

Bonjour !

Merci pour ces mises au point. Je déduis de votre propos qu'il faut impérativement que les cordes à vide soient sur un cheviller indépendant pour pouvoir parler d'archiluth ? Pour des raisons d'intervalle (plus important) entre le dernier choeur et les cordes à vide ?

Voilà une subtilité supplémentaire à ajouter aux nombreuses autres (avec des excuses en néerlandais).

Merci !

34. Le vendredi 14 mars 2014 à , par Sébastien

Bonjour,
Je suis étudiant en histoire de l'art mais également musicien. Je doute que vous lisiez ce commentaire, mais si c'est le cas, j'aurais vraiment besoin de votre grande science en matière d'instruments à cordes anciens, moi simple guitariste, afin d'interpréter justement l'iconographie d'une oeuvre.

Je travaille actuellement sur le tableau de Gerrit van HONTHORST 'Le Concert' de 1624 qui se trouve au Louvre. http://cartelfr.louvre.fr/cartelfr/visite?srv=car_not_frame&idNotice=10377&langue=fr
Je fais appel à votre connaissance puisque j'aimerais tirer au clair la nature des instruments représentés (avec me semble-t-il un grand réalisme). Nous sommes donc au maximum en 1624, dans les actuels Pays-Bas (alors Provinces Unies). Je présume que le théorbe est déjà très répandu grâce à vos informations et a même quasiment supplanté le luth. Ainsi, même s'il me semble que la demoiselle à droite joue du luth (dites-moi si je me trompe), celle de gauche semble jouer du théorbe, le "second manche" étant très long. La caisse paraît peu allongée, notamment à cause du raccourci, mais n'est-ce pas parce qu'il s'agirait d'un "chitarrone"?

Je vais présenter cette oeuvre à des visiteurs et j'aimerais beaucoup identifier les instruments pour tâcher de trouver l'enregistrement d'un morceau qui se rapproche le plus possible de la scène visible sur le tableau : théorbe, luth, et chant. Ainsi, je pourrais accompagner l'art visuel de l'art auditif qu'il représente. Vous voyez l'idée!

En espérant vous lire rapidement,
Merci pour ces précieuses informations

35. Le samedi 15 mars 2014 à , par DavidLeMarrec

Bonjour Sébastien,

Vous me faites l'honneur de me lire, le moins que je puisse faire est d'essayer de répondre. Je précise tout de suite que je ne suis pas luthier, je ne peux que répondre dans la mesure de mes (minces) aptitudes.

Effectivement, sur la droite, pas de doute : manche court à angle droit, dos en tortue, c'est un luth.

Sur la gauche, ça ne ressemble pas à un théorbe de la grande époque en effet (trois ouvertures dans la caisse, une forme plus élancée). Les manches des chitarroni sont général plus longs, même si on est dans la bonne époque. Pour moi, ça ressemble à un archiluth (donc un luth avec extension grave de cordes à vide).

Mais pour le décider, il faudrait l'entendre, car c'est l'accord (linéaire pour un archiluth, rentrant pour un chitarrone) qui ferait la différence, ultimement.

De toute façon, la terminologie est fluctuante entre chitarrone, théorbe, archiluth et luth théorbé : il n'y avait pas de nomenclature officielle et on remarque diverses façons de nommer la même chose (ou des variations sur des objets nommés identiquement). Donc, ne disposant pas de l'accord de l'instrument, aucun des quatre termes ne serait une énormité.


Il n'y a pas énormément de disques pour deux gratteurs et chant dans le commerce, si vous avez besoin d'aide, je peux regarder ce que j'ai... spontanément, luth + théorbe + chant, dans un répertoire joué aux Provinces Unies (donc plutôt en italien), je ne vois pas de disque. Le mieux est de chercher chez Piccinini et Kapsberger, mais je n'ai pas de disque à indiquer avec deux luthistes.

J'espère néanmoins avoir répondu à votre question.

36. Le vendredi 21 mars 2014 à , par Sébastien

Je vous remercie grandement pour cette réponse si rapide et si détaillée. Je pense que je n'opterais peut-être pas pour un extrait sonore de peur d'alourdir un commentaire déjà bien fourni, et il serait de toute façon inexact!

J'aime bien l'idée que vous exposez, étant qu'on ne peut pas définir précisément la nature de l'instrument sans l'entendre! C'est terrible : jamais on ne pourra l'entendre, si beau soit-il, et si charnues soient les musiciennes!
Pour ce qui est du répertoire italien supposé dont vous parlez, cela va très bien avec la carrière du peintre en question, Honthorst, qui a passé une bonne dizaine d'années à Rome - comme tous ses collègues - pour étudier la peinture mais qui a bien dû passer du bon temps à écouter quelques joueurs ou joueuses d'archiluth/chitarrone en poussant la chansonnette!

En tous cas, merci encore, et bravo pour cette belle page! Il me faudrait plusieurs vies pour me mettre à étudier ces beaux instruments... ainsi que d'autres [la vielle à roue qui m'impressionne notamment]! Nous ne finirons jamais de nous émerveiller de l'ingéniosité des anciens!

37. Le samedi 22 mars 2014 à , par DavidLeMarrec

Je suis ravi d'avoir pu répondre à votre attente, je n'en étais pas si sûr.

On bâtissait même des théorbes à partir de luths (d'où le nom de luth théorbé, mais ce serait trop facile si le terme ne voulait dire que cela...), et les décorations (une grosse ouverture pour le luth et l'archiluth, trois petites pour le théorbe) ne sont pas des indices certains, plutôt des traditions. Ce qui les différencie, ultimement, c'est bien l'accord, en particulier de l'aigu : accord standard du grave à l'aigu pour un luth ou un archiluth, fait pour tenir des parties mélodiques, tandis que le théorbe et son accord rentrant facilite l'accompagnement (meilleur remplissage harmonique).
Si on accord un archiluth avec un accord rentrant, ça devient un théorbe, d'une certaine manière.

Et les deux étant utilisés en accompagnement... on ne peut pas vraiment dire, en effet. En tout cas, moi, je ne le peux pas ; peut-être que d'autres pourraient identifier les facteurs à l'œil, je ne peux pas l'exclure.

Bonnes recherches à vous !

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