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samedi 24 décembre 2022

L'année musicale 2022


Estimés lecteurs,

Après un inhabituel silence lié à une actualité personnelle peu riante, me voici de retour pour célébrer 2022.

À la vérité, je ne nourris pas du tout un fétichisme des bilans, mais la perspective de papoter musique avec deux amies chères, encouragée par l'adorable complaisance de nos camarades – comment ne pas y céder ?

Cette fois-ci, le bilan a donc été essayé en vidéo – occasion aussi de tester des outils et des formats pour d'autres expérimentations de Carnets sur sol, notamment l'idée de présenter les œuvres inédites avec un son produit maison, pour rendre les éloges d'inédits moins abstraits et pouvoir étendre la connaissance du répertoire aux amateurs non pourvus d'un piano. En voici deux essais avec l'acte I (piano seul) et l'acte II (piano et voix) du Vercingétorix de Félix Fourdrain, compositeur niçois dont on ne trouve quasiment rien nulle part – et auquel je consacrerai bientôt une notule.

Ce n'est évidemment pas plus que ce que ça prétend être : une conversation (devant une dizaine de spectateurs que nous connaissions quasiment tous personnellement) entre passionnés, une fenêtre où les curieux peuvent jeter un coup d'œil – mais sans aucun apprêt ni maîtrise technique, cela viendra peut-être un jour.

Ce bilan ne me dispense pas tout à fait d'écrire une notule – comme vous le voyez ; tout n'a pas été dit à l'antenne, et le format vidéo est moins aisé à compulser qu'un résumé écrit. Résumé que je vais donc vous livrer, d'autant plus succinct qu'il existe cette version développée.





1. Réponse aux questions des internautes

Avant de commencer, nous avons répondu aux questions fondamentales qui nous avaient été posées. (Je ne donne que mes réponses, pour celles des camarades, vous pouvez regarder la vidéo.)

Adalbéron Palatnįk : « Quel est le plus beau coup de glotte de l'année ? »
    Le coup de glotte n'est pas qu'une coquetterie, la pression subglottique peut être un paramètre très important dans l'organisation vocale, en particulier pour les rôles lourds : lorsqu'on veut émettre une note, en particulier aiguë, de façon nette (un aigu isolé, par exemple), on peut obturer le conduit d'air par l'épiglotte et tout relâcher d'un coup, créant un son puissamment soutenu (et générant au passage un « plop » caractéristique).
    Ce phénomène se trouve même phonématisé dans la langue danoise, où un mot peut changer de sens selon qu'il inclue ou non le coup de glotte (stød).
    La réponse n'est pas facile : j'ai entendu beaucoup de chanteurs et je n'ai pas catégorisé de la sorte. En salle, c'est probablement Ekaterina Semenchuk en Hérodiade (chez Massenet) qui faisait les plus audibles… mais à l'échelle de la saison d'opéra mondiale, c'est assurément Dorothea Röschmann qui aura fait les plus beaux (je ne l'ai pas entendue cette saison). C'est inhabituel dans Mozart, assurément, mais elle va chanter Isolde cette année à Nancy et à Caen, alors ce sera l'occasion de vérifier ce qui est davantage un pronostic qu'un bilan.

Grégounet : « Quel est le ploum-ploum de l'année, disque et spectacle ? »
    Ploum-ploum : Dans certaines communautés Twitter, désigne une forme de musique légère dont l'accompagnement fait ploum. Ce peut désigner les Italiens (Donizetti peut-être, Rossini surtout), mais il s'agit en général de nommer le répertoire léger français, d'Adam à Yvain en passant bien sûr par Offenbach (où la catégorie ploum-ploum fait régulièrement l'intersection avec la catégorie glouglou).
    Au disque, clairement Le Voyage dans la Lune d'Offenbach (Dumoussaud chez Bru Zane), grande fantaisie jubilatoire dans l'esprit du Roi Carotte, à la rencontre de peuples lunaires. Le final de la neige est particulièrement jubilatoire et irrésistible, surtout dans cette très belle réalisation. La production était donnée à Massy ces jours-ci et une autre passera à l'Opéra-Comique en début d'année prochaine.
    En salle, l'un des tout meilleurs Offenbach (avec les deux sus-cités), Barbe-Bleue, dans une production amateur de très haut niveau, par l'orchestre et les chœurs Oya Kephalê – qui produisent, chaque mois de juin que Dieu fait, un opéra d'Offenbach.

Romain Tristan : « Et le piano de l'année ?  Et l'orgue de l'année ? »
    Il y sera répondu dans les parties suivantes !

« Le dîner, avant ou après le concert ? »
    Tout dépend de votre microbiote… Pour ma part, comme je ne mange pas souvent, ce n'est pas toujours une question. Il faut étudier si vous êtes plutôt sensible au ventre vide plaintif ou aux assoupissements postprandiaux. Cela dit, dans le second cas, la structure canonique des concerts ouverture-concertos-symphonie permet avantageusement de siester avant l'entracte sans manquer la musique intéressante qui vient après.

« Laisser un pourboire ? »
(nous avons oublié d'y répondre, je donne donc une réponse plus détaillée ici)
    Le classique ne générant pas de recettes suffisantes, il est en général soit autoproduit dans de petites salles (concerts au chapeau ou billetterie helloasso / weezevent…), soit rendu accessible par des subventions dans les grandes salles publiques. Il existe quelques zones intermédiaires, comme le Théâtre des Champs-Élysées, où la programmation est soutenue par une institution publique (la Caisse des Dépôts et Consignations, sans laquelle il serait impossible d'équilibrer le budget avec les seules ressources de billetterie), mais sous la forme d'un mécénat de droit privé. Si bien qu'il s'agit d'un théâtre privé, répondant comme tel à un droit dérogatoire, spécifique aux théâtres parisiens. Alors que dans tous les autres corps de métier et partout en France, il est interdit de rémunérer un salarié sans une base fixe (d'où l'utilisation du statut d'auto-entrepreneur pour le nouvel lumpenprolétariat des livreurs à vélo)… les théâtres privés parisiens, eux, ont le droit de rémunérer leurs ouvreurs aux seuls pourboires. Ce n'est donc pas un mensonge – comme je l'ai d'abord cru à mon arrivée dans la région –, mais bel et bien leur unique source de rémunération.
    S'ensuivent un certain nombre d'abus (agressivité envers le public, corruption pour de meilleures places), particulièrement au Théâtre des Champs-Élysées dont la direction souhaite depuis longtemps supprimer pourboires et replacements sauvages, sans y parvenir. Pour les replacements, parce que Perret était un imposteur qui ne savait pas bâtir des angles, si bien qu'une large partie du théâtre (la moitié ?) voit au mieux les deux tiers de la scène en se penchant. 35€ pour voir 30% de la scène, c'est cher. Et une partie du public joue donc aux ninjas des coursives. Pour le pourboire, parce qu'il est en réalité plus rémunérateur que le salaire pour le peu d'heures travaillées, ce qui rend les ouvreurs peu enclins à renoncer à cet avantage paradoxal.
    C'est actuellement en cours de négociation au Théâtre des Champs-Élysées (à l'Athénée, ils ne réclament jamais rien et sont de toute façon adorables, on leur donne avec grand plaisir), mais ça dure depuis 2020 et n'a toujours pas abouti.
    Alors, laisser un pourboire ?  J'avoue que la perspective de payer son maton ne m'enchante pas – c'est vraiment l'ambiance au TCE, on paie la personne qui vous empêchera de vous asseoir à un meilleur siège vide –, mais considérant que c'est la seule rémunération qu'ils perçoivent, si jamais je me fais placer, je donne. Si je me place tout seul, non, je ne finance pas les emplois fictifs non plus.



2. 2022 : l'année Franck ?

En 2022, il y avait assurément beaucoup de choix !  De Scriabine, on n'aura guère eu que le concerto pour piano (deux fois à Paris, alors qu'il est plutôt rare d'ordinaire), quelques disques (souvent des couplages), et le nombre habituel de Poème de l'Extase. Vaughan Williams a été fêté au Royaume-Uni, guère ici. Quant aux autres, même ceux qui pourraient être emblématiques (l'importance de Goudimel dans la diffusion de la Réforme, Halphen juif dans la France antisémite et mort sur le front en 1917…), célèbres (Forqueray, E.T.A. Hoffmann, Xenakis), patrimoniaux en France (Chambonnières, Mondonville, Davaux, Séverac, Büsser) ou tout simplement rocambolesques (Dupuy), rien.

Vous pouvez en retrouver une liste agrémentée de conseils dans ces six épisodes qui m'ont occupé de l'automne 2021 à l'automne 2022 :

I – de 1222 à 1672 : Morungen, Mouton, Goudimel, Ballard, Benevolo, Gaultier, Chambonnières, Schütz, Schürmann, Forqueray, Kuhnau, Reincken…
II – de 1722 à 1772 : Benda, Mondonville, Cartelleri, Daquin, Triebensee…
III – 1822, Hoffmann, Davaux, Dupuy… : l'auteur de génie qui compose, l'inventeur véritable du métronome, la perte des Reines du Nord…
IV – 1872 (a), Moniuszko, Carafa, Graener, Alfvén : Pologne, Campanie, Reich, Suède
V – 1872 & 1922 : Hausegger, Halphen, Juon, Büsser, Perosi, Séverac, Vaughan Williams, Scriabine, Baines
VI – 1922 & 1972 : Popov, Leibowitz, Grové, Grofé, Amirov, Xenakis, Erkin, Bárta, Wolpe, Bryant…


Le grand vainqueur, c'est donc César Franck. En quantité, on a assez peu eu de concerts, à part une concentration de concerts dans les églises (par l'Orchestre Colonne, le CRR de Paris, Oya Kephalê et même quelques-uns à Radio-France) autour de la date de sa naissance (10 décembre). Heureusement, Bru Zane a remonté Hulda, dont la production à Fribourg, malgré la qualité des interprètes mandatés, ne rendait pas du tout justice. Outre ses influences wagnériennes (rien à voir avec l'italianisant Stradella, par exemple), on pouvait profiter d'un livret particulièrement étonnant – dans l'esprit de Psycho de Hitchcock, quasiment tous les personnages principaux sont massacrés aussitôt qu'on les a présentés !

Au disque, trois disques ont marqué l'année.

¶ Une belle intégrale des mélodies (qui s'étendent de l'épure de la dévotion d'église à la sophistication chromatique) par Christoyannis, Gens et Cohen.
¶ Le ballet intégral de Psyché par Kurt Masur à Verbier – un chef-d'œuvre, l'œuvre la plus lyrique de tout Franck, et à la fois très rarement donnée, encore plus rarement en entier, et quasiment jamais par des interprètes de premier plan.
¶ L'intégrale de la musique de chambre chez Fuga Libera (Trio Ernest, Quartetto Adorno, Miguel Da Silva, Gary Hoffman, Franck Braley…), qui permettait notamment d'entendre les rares Trios piano-cordes, qui sont des chefs-d'œuvre très bien bâtis et particulièrement élancés.

Côté intégrale pour orgue, il y a eu à boire et à manger (quelques-unes à la finition moyenne sur des Cavaillé-Coll immondes), mais on avait déjà du choix de ce côté-là. C'est davantage le Franck lyrique (mélodies, liturgie, opéra) qu'il fallait remettre à l'honneur. Ce fut fait, sans grand tintamarre à destination du grand public, mais les mélomanes curieux avaient la possibilité d'en profiter.



3. Géopolitique et musique

Le fait qui a bouleversé notre perception du monde et nos existences (économiques, du moins) n'a pas été sans conséquence sur notre représentation de l'histoire musicale du monde. Devant ce qui s'annonçait comme une dévastation systématique de l'Ukraine, on ne pouvait pas faire grand'chose… sauf peut-être s'intéresser à un patrimoine immatériel qui, même lui, sera possiblement en danger dans les prochaines années.

J'ai été un peu déçu, je l'avoue, du peu de concerts thématiques sur le sujet (qu'on aurait pu introduire par des conférences), et les disques parus sont plutôt des concepts d'hommage (chansons traditionnelles notamment). Même à Paris, à part le concert d'Igor Mostovoï au Châtelet, le concert du Symphonique de Kiev à la Cité de la Musique et les quelques propositions du « Week-end à l'Est » consacré à Odessa (concert vocal à Saint-Germain et concert symphonique au Châtelet, tous deux organisés par le Châtelet, et à nouveau Mostovoï), on n'a pas croulé sous l'offre. Quelques récitals de piano (partiellement) composés de compositeurs ukrainiens. Mais aucune maison n'a tenté de monter (ou d'inviter une troupe) un opéra ukrainien, un cycle de symphonies, une saison thématique. Je sais qu'il faut du temps pour mettre sur pied ce genre de projet, mais je crains que si cela n'a pas été fait sous l'impulsion de l'émotion, maintenant que le conflit s'est installé dans la durée et que plus personne ne joue l'hymne ni ne dédie son concert à l'Ukraine, ce ne sera pas la saison prochaine que la Philharmonie (et encore moins l'Opéra de Paris) proposeront un grand cycle thématique. (Il y aura bien un week-end spécial dans la prochaine saison de la Philharmonie, bien sûr, dans l'air du temps, mais je doute qu'on bénéficie d'une exploration systématique.)

Pour le disque, le délai de publication étant toujours long (un an en général entre la captation et la mise sur le marché), nous verrons. Quelques récitals de chansons ukrainiennes jusqu'ici, mais c'est à peu près tout.

De mon côté, à défaut de pouvoir aider, je voulais comprendre, et dans la mesure du possible participer à la sauvegarde d'une culture qui sera potentiellement en danger (que sont devenus ces chœurs polyphoniques de vieilles dames ? seront-ils transmis ?). Pour la musique traditionnelle, le Polyphony Project a effectué un travail inestible de recensement et d'immortalisation.

Pour un propos plus détaillé, je parle sur Twitter de quelques spécificités de la musique ukrainienne et en présente également quelques dizaines des principaux compositeurs, avant de le développer en essayant de l'articuler à diverses problématiques, dans cette série de notules.

Après écoute d'un peu plus de 80 disques, de quelques enregistrements hors commerce et concerts, après quelques lectures aussi, j'ai quelques éléments à souligner.

¶ Comme la musique russe, la musique ukrainienne utilise énormément de thèmes folkloriques. Essentiellement ceux  contenus dans la collection Lvov-Prač, la seule disponible au XIXe siècle. Recueil inestimable, qui ne distingue pas entre les mélodies populaires russes et ukrainiennes, qui circulent donc beaucoup aussi bien chez les compositeurs russes qu'ukrainiens. (Mais Lysenko va aussi effectuer lui-même des relevés.)

La musique russe et la musique ukrainienne ne se distinguent pas fondamentalement à l'oreille. Elles ont des principes communs (les modes harmoniques utilisés, le goût pour le lyrisme et le folklore, le rhapsodisme plutôt que la grande forme, etc.), mais cette absence de distinction est aussi due à la situation politique.
    ¶¶ Lorsque des compositeurs ukrainiens, comme ceux qui sont présentés comme les trois premiers compositeurs russes (Berezovsky, Bortniansky, Vedel) sont repérés comme talentueux après leurs études en Ukraine, ils sont recrutés pour la chapelle impériale de Saint-Pétersbourg, où ils sont formés par des compositeurs italiens (et pour deux d'entre eux, partent temporairement étudier et exercer en Italie). Les premiers compositeurs russes sont d'abord des compositeurs… ukrainiens. Comme les commandes et le pouvoir sont en Russie, ils partent s'y perfectionner et y vivre.
    ¶¶ De même, s'il existe peu d'opéra ukrainien, par exemple, c'est que l'oukase d'Ems (en 1876, au moment précisément où la culture spécifique ukrainienne commence à être abondamment mise en valeur) interdit l'impression de textes en langue ukrainienne. Dans le même esprit, le mot « ukrainien » (qui veut déjà dire habitant « de la Marche », c'est-à-dire « du truc dont on se sert pour que les ennemis les bolossent avant nous ») est banni est remplacé par « petit-russien », qui n'est donc pas tant un terme affectif qu'une marque de domination. J'ai été frappé par le fait qu'on retrouve exactement la même rhétorique de la fraternité que dans le discours officiel russe actuel, mais une fraternité oppressive, celui du grand qui a autorité sur le petit et qui se pense des droits sur lui.
                → Il est donc exact que la musique ukrainienne se distingue peu de la musique russe… mais si cette école musicale ukrainienne ne s'est pas singularisée, c'est d'abord qu'il ne lui était pas possible, politiquement, de le faire !

Beaucoup de compositeurs que nous pensons comme russes sont en réalité ukrainiens : Berezovsky, Bortniansky, Vedel, Glière (qui utilise beaucoup de thématiques proprement ukrainiennes), Roslavets, Feinberg, Ornstein, Mosolov… sont nés en Ukraine et y ont (sauf Roslavets) été formés !  (Je trouve incroyable qu'on ne le sache pas davantage pour Mosolov, par exemple !)
On peut y ajouter quelques cas plus ambigus : Anton Rubinstein (fondateur du Conservatoire de Moscou et grand représentant de la culture russe de référence), né à Ofatinți, partie de la Transnistrie rétrocédée à la Moldavie en 1940… mais dont une fine bande de terre à été redonnée à l'Ukraine !  Gavriil Popov, né à Novocherkassk, qui a toujours été en Russie, mais qui était l'ancienne capitale des Cosaques – qui sont à l'origine de la formation de l'Ukraine moderne – si bien que culturellement, on pourrait l'inclure dans la sphère d'influence ukrainienne. Enfin Sergueï Prokofiev, né à Sontsivka, à l'Ouest de Donetsk, est considéré comme russe mais est pourtant bel et bien né dans un territoire ukrainien (et au recensement de 2001, plus de 92% de la population avait l'ukrainien pour langue maternelle !).
Voilà qui fait un certain nombre des plus grands compositeurs russes nés (et pour beaucoup formés) en Ukraine !




4. Spectacles

Pour les comptes-rendus, je vous renvoie à la vidéo ou aux commentaires faits après chaque concert sur Twitter (mot-dièse #ConcertSurSol).

Tentative de podium :

1. Barbe-Noire d'Ambroise Divaret au CRR
2. Marie Tudor au CNSM
3. Der Schatzgräber de Schreker à Strasbourg
4. Le Destin du Nouveau Siècle de Campra (où, sans contrainte, le compositeur se lâche totalement)
5. Doubles chœurs de Rheinberger & Mendelssohn par le Chœur de Chambre Calligrammes
6. La Nativité de Messiaen par les élèves de Sylvie Mallet au CRR
7. Phryné de Saint-Saëns à l'Opéra-Comique
8. Rheingold par Nézet-Séguin au TCE
9. Suite de Rusalka d'Ille & Honeck à la Maison de la Radio
10. Programme franco-italien du Poème Harmonique avec Eva Zaïcik à la Fondation Singer-Polignac
11. Journée à la Roche-Guyon du festival Un Temps pour Elles (3 concerts, 3 violoncellistes de mon top 5 : Luzzati, Legasa, Phillips !)
12. Trio n°3 de Frank Bridge avec Christine Lagniel à l'Amphi Bastille
13. Schubert et Chostakovitch par le Quatuor Belcea au Théâtre des Champs-Élysées

Et aussi…
Bru Zane : Hulda TCE
Larcher PP
Neojiba Cerqueira PP
Schmitt Psaume 47 MR
Stockhausen Freitag PP
Tailleferre opéras-minute au CNSM
Turangalila Salonen PP
Elektra à Bastille
Cendrillon de Massenet à Bastille
Vestale Spontini TCE
Roi Carotte Oya Kephalê
Parsifal Bastille
Karawane PP
Ariane & Bacchus Marais TCE
Thaïs TCE

J'ai un peu oublié les bides, mais je me souviens de mêtre ennuyé ferme pour A Quiet Place de Bernstein à Garnier, et m'être demandé pourquoi jouer des œuvres rares qui ne sont pas propres à soulever l'enthousiasme, quand le choix est si vaste parmi les chefs-d'œuvre ? (réalisation par ailleurs assez terne)

Parmi les moments forts, deux histoires à vous partager.


Benjamin Bernheim, alors qu'on lui fait un entretien de complaisance, en profite pour faire longuement l'éloge de son pianiste. Un ténor qui ne parle pas de lui, et en plus qui complimente son accompagnateur alors que ce n'est même pas la question posée, je ne pensais pas voir ça un jour. (et ça m'a ému)


¶ Reprise de Robert le cochon et les kidnappeurs de Marc-Olivier Dupin à l'Opéra-Comique.
Un véritable traumatisme (que je vous raconte à la fin de la vidéo).

Il s'agissait de la reprise d'un spectacle destiné au jeune public, par l'adroit compositeur du Mystère de l'écureuil bleu, qui sait manier les références et écrire de la musique à la fois nourrissante et accessible. Mais cette fois…
 
D'abord, peu d'action, beaucoup de numéros assez figés, aux paroles plutôt abstraites… j'ai pensé à l'opéra italien du XIXe siècle et à ses ensembles où chaque personnage évoque son émotion, son saisissement… pas forcément la temporalité adaptée pour les moins de dix ans.
 
Ensuite, le propos éducatif était… déroutant. La méchante, c'est la propriétaire de la décharge qui veut simplement conserver un peu d'ordre alors que Mercibocou le loup et Nouille la Grenouille cassent et mettent tout en désordre. Robert le Cochon, en voulant parlementer pour sauver son ami le loup, prisonnier (personne ne l'a kidnappé, il a surtout été arrêté alors qu'il commettait un délit…), se fait éjecter. Mais il trouve la solution, la seule fructueuse, pour être entendu : il apporte une hache. Et là tout le monde s'enfuit et il peut délivrer son ami. (La violence ne résout rien, mais quand même, elle rend tout plus facile. Prenez-en de la graine les enfants.)

Et surtout, des images traumatiques. Nouille la grenouille est éprise de Mercibocou le loup, mais elle est surtout passablement nymphomane. Elle s'éprend aussi du chasseur de loup embauché par la directrice de la décharge, lui fait une cour éhontée, s'empare d'une « machine d'amour » pour le forcer à l'aimer. Âmes sensibles comme je le suis, ne lisez pas ce qui va suivre.
Nouille attrape alors le chasseur de loup, qui se débat, elle le tire par les pieds alors qu'il s'accroche désespérément au plancher en criant « je ne veux pas ! », et l'emporte dans la fusée où elle le viole – hors du regard du public, mais dans la fusée au milieu de la scène, tout de même –, et lui appliquant la « machine d'amour », le tue. Elle sort alors en pleurant et traîne le cadavre du chasseur sur toute la scène.
Oui, parfaitement, dans un opéra pour enfant, l'un des principaux personnages présentés comme sympathiques viole un autre personnage, sur scène, avant le tuer et de se promener partout avec son cadavre ! 
Pour mettre à distance un peu cette scène, on nous apprend, une demi-heure plus tardi (sérieusement ?  j'ai eu le temps de développer deux ou trois névroses dans l'intervalle…), qu'en réalité ce n'était pas un véritable homme mais une baudruche. Je ne sais pas si c'est vraiment mieux : on sous-entend ainsi que si vous voulez violer quelqu'un mais qu'il se révèle par accident n'être pas véritablement un humain, alors vous n'avez rien à vous reprocher. Quant au procédé même de catégoriser un personnage en non-humain pour mieux pouvoir le torturer, je ne suis pas trop sûr non plus de ce que j'en pense exactement… mais mon ressenti ne valait clairement pas assentiment !

J'ai vraiment peine à comprendre comment personne, dans le processus de création, librettiste, compositeur, metteur en scène, producteurs, interprètes, professionnels de la maison, public interne des filages, public de la prémière série en 2014… n'a demandé à un moment « mais le viol sur scène suivi de meurtre et d'exhibition du cadavre avant de le décréter sous-homme, est-ce totalement la meilleure idée pour un opéra jeune public ? ». Dans un opéra décadent comique du milieu du XXe siècle, ça aurait pu être amusant, mais dans au premier degré dans un opéra pour enfants, j'en suis resté traumatisé – et je l'ai raconté par le menu à tous ceux qui ont eu l'imprudencede me demander ce que j'avais vu de marquant dernièrement.


Le bilan de tout cela reste quand même que sur les 6 meilleurs spectacles de l'année, je recense trois spectacles d'étudiants et un concert d'amateurs !  Honnêtement, cela vaut la peine d'aller voir, surtout au CNSM où le niveau est très élevé (niveau pro, l'enthousiasme des débuts en sus). Les concerts des conservatoires sont toujours gratuits de surcroît ! 
Le recensement n'est pas toujours évident (c'est annoncé peu de temps à l'avance, dans des sites fastidieux à consulter, date à date), aussi je vous rappelle que je maintiens à cet effet un agenda des concerts franciliens où j'inclus et mets en avant les soirées intéressantes. Les spectacles avec mise en situation théâtrale au CNSM (la classe d'Emmanuelle Cordoliani en particulier) me fournissent chaque année des expériences parmi les plus originales et marquantes de la saison.

C'est un peu tôt (en général à 19h), mais si vous avez la possibilité de partir un peu en avance ou si vous posez occasionnelle des après-midis de congé, courez-y, beaucoup n'osent pas, mais on est tout à fait bienvenu, c'est fait pour et disposer d'un public aide à la formation de ces jeunes !  Et le résultat est en général très enthousiasmant (pour les grands spectacles baroques du CRR, les auditions de ses classes d'instrument ou à peu près tout au CNSM).



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5. Nouveautés discographiques : œuvres

Difficile de sélectionner (mon fichier d'écoutes de 2022 fait un millier de pages, plusieurs heures d'écoutes quotidiennes et peu de redites…)

Je tente un petit palmarès.

1. Eben – intégrale d’orgue vol.1 : Job, Fantasia Corale, Laudes… – Janette Sue Fishell (Brilliant Classics 2022) ♥♥♥
→ Ensemble assez incroyable de bijoux… je découvre la densité du langage (très accessible cependant) de la Fantasia Corale, une certaine parenté avec Messiaen, en moins exagérément idiosyncrasique… Et une très belle version de Job, l’une des plus belles et ambitieuses œuvres pour orgue du XXe siècle, avec récitants anglais.
→ Très belles versions, tendues, bien registrées, bien captées… et l’on n’avait de toute façon, que des bouts de choses jusqu’ici. Début d’une série absolument capitale.

2. Winter, Schack, Gerl, Henneberg, P. Wranitzky, Salieri, Haydn, Mozart – « Zauberoper », airs d’opéras fin XVIIIe à sujets magiques – Konstantin Krimmel, Hofkapelle München, Rüdiger Lotter (Alpha 2022) ♥♥♥
→ Encore un carton plein pour Krimmel. Un des plus passionnants (et ardents !) récitals d’opéra de tous les temps. Voilà. (Et il y a beaucoup d’autres compositeurs que « Mozart Haydn Salieri » dans cet album).
→ Document passionnant regroupant des inédits de première qualité (enfin un peu du génial Oberon de Pavel Vranický au disque !) interprétés avec ardeur, et dits avec une saveur extraordinaire. (Je vous recommande chaleureusement son récital de lieder Saga, exceptionnel lui aussi.)
→ Par ailleurs une très belle voix, bien faite, qui ne cherche pas à s’épaissir contre-productivement et conserve sa clarté malgré les formants très intenses qui permettent à la voix de passer l’orchestre.

3. Campra – Le Destin du Nouveau Siècle – Valiquette, Lefilliâtre, Vidal, Mauillon, Van Essen ; La Tempest, Bismuth (CVS)
→ Campra, dans ce sujet purement allégorique où les sujets de la Guerre et de la Paix expriment leurs émotions (!), peut s'en donner à cœur joie et ne rien brider de son imagination musicale. Ébouriffant. (Et quelle distribution, bon sang.)

4. Saint-Saëns – Phryné – Valiquette, Dubois, Dolié ; Rouen, Niquet (Bru Zane 2022) ♥♥♥
→ Intrigue déjà utilisée par Don Pasquale, Das Liebesverbot, Die schweigsame Frau…
→ Nous n'avions qu'une bande de la RTF mal faite, et c'est ici la révélation, toutes ces saveurs dans tous les sens. Court et absolument jubilatoire.

5. Ireland, Stanford, Coleridge-Taylor, Clarke, Liszt – Sonates & autres pièces pour piano – Tom Hicks (Divine Art 2022) ♥♥♥
→ Très beau corpus pianistique anglais… la Sonate d’Ireland manifeste une grande ambition, postdebussyste (mais avec une forme thématique plus charpentée), et regorge de séductions.
→ Et, divine surprise, la version de la Sonate de Liszt échappe totalement à la virtuosité fulgurante qui m’exaspère d’ordinaire : Hicks travaille véritablement l’harmonie (très claire, mais il crée parfois des sortes d’appoggiature en laissant chevaucher la pédale), la structure, le son n’est pas le plus brillant du marché, mais la réalisation est l’une des plus éloquentes !  J’ai l’impression de découvrir – enfin ! – l’intérêt que les mélomanes lui portent.

6. Eleanor Alberga – Concertos pour violon 1 & 2 – Pearse, Bowes, BBC National Orchestra of Wales, Swensen (Lyrita 2022) ♥♥♥
→ Compositrice. Noire. Toutes les raisons de ne pas être jouée… et à présent toutes les raisons d’être réessayée. Vraiment dubitatif lors du concerto pour violon n°2 qui ouvre le disque, assez plat. En revanche le cycle de mélodies est marquant, et surtout l’incroyable premier mouvement du Premier Concerto, dans un goût quelque part entre Mantovani et Berg, de grandes masses orchestrales contrapuntiques menaçantes, mais tonales et très polarisées. Assez fantastiquement orchestré !

7. Pijper, (Louis) Andriessen, (Leo) Smit, Loevendie, Wisse, Henkemans, Roukens – « Dutch Masters », œuvres pour piano à quatre mains – Jussen & Jussen (DGG 2022) ♥♥♥
→ Panorama très varié (du postromantique décadent étouffant de Pijper à l’atonalité dodécaphonique avenante de Louis Andriessen en passant par les debussysmes de Smit) de ce fonds musical incroyablement dense pour un pays à la démographie aussi modeste. (Ma nation musicale chouchoute d’Europe avec les Danois, je me fais très souvent des cycles consacrés à l’un ou l’autre, avec un émerveillement récurrent.)
→ Pour finir, un étonnant concerto très syncrétique de Roukens, manifestement inspiré à la fois par le jazz, varèse et la musique grand public !  (et sans facilité, vraiment de la très bonne musique)

8. Maria Bach – Quintette piano-cordes, Sonate violoncelle-piano, Suite pour violoncelle seul – Hülshoff, Triendl (Hänssler 2022) ♥♥♥
→ Œuvres denses et avenantes à la fois, culminant dans cette Suite pour violoncelle qui m’évoque Elias de Mendelssohn : on y sent sans équivoque l’hommage à Bach, mais un idiome romantique plus souple et expressif qui me séduit considérablement. Oliver Triendl fait des infidélités à CPO et, de fait, les œuvres communes au disque CPO y sont plus ardentes.
&
Maria Bach – Quintette piano-cordes, Quintette à cordes, Sonate violoncelle-piano– (CPO 2022) ♥♥
→ Quintette à cordes de toute beauté, germanique mâtiné d’influences françaises. Thèmes fokloriques russes très audibles.

9. Hans Sommer – Lieder orchestraux – Mojca Erdmann, Vondung, Appl ; Radio Berlin (ex-Est), (PentaTone 2022) ♥♥♥
→ Généreux postromantisme sur des textes célèbres, très bien orchestré et chanté par des diseurs exceptionnels (Vondung, et surtout Appl). Coup de cœur !

10. Schütz, Gagliano, Marini, Grandi & Roland Wilson – Dafne – Werneburg, Hunger, Poplutz ; La Capella Ducale, Musica Fiata, Roland Wilson (CPO 2022) ♥♥♥
→ Si la reconstruction d’un opéra perdu peut paraître une pure opération de communication – la preuve, je me suis jeté sur ce disque alors même que je savais qu’il ne contenait pas une mesure de Dafne ! –, le projet de Roland Wilson est en réalité particulièrement stimulant.
→ En effet, partant de l’hypothèse (débattue) qu’il s’agissait bel et bien d’un opéra et pas d’une pièce de théâtre mêlée de numéros musicaux, il récupère les récitatifs de la Dafne de Gagliano (qui a pu servir de modèle), inclut des ritournelles de Biagio Marini, un lamento d’Alessandro Grandi (ami de Schütz), et surtout adapte des cantates sacrées de Schütz sur le livret allemand qui, lui, nous est parvenu. (Wolfgang Mitterer a même fait un opéra tout récent dessus…)
→ Le résultat est enthousiasmant, sans doute beaucoup plus, pensé-je, que l’original : énormément de danses très entraînantes, orchestrées avec générosité, un rapport durée / saillances infiniment plus favorable que d’ordinaire dans ce répertoire (même dans les grands Monteverdi…). Ce n’est donc probablement pas tout à fait cohérent avec le contenu de l’original, mais je suis sensible à l’argument de Wilson : c’est l’occasion d’entendre de la grande musique du temps que, sans cela, nous n’aurions probablement jamais entendue !  (Et dans un cadre dramatique cohérent, ajouté-je, ce qui ne gâche rien.) → Les deux ténors sont remarquables, l’accompagnement très vivant, et surtout le choix des pièces enthousiasmant !

10. Vladigerov – « Orchestral Works 3 » – Chambre Bulgare, Radio Nationale Bulgare, Vladigerov (Capriccio 2022) ♥♥♥
→ Remarquablement écrit tout cela !  Tonal et stable, mais riche, plein de couleurs, de climat, de personnalité, et surtout un élan permanent. Un grand compositeur très accessible et très méconnu.
→ Si le Poème juif se révèle l’héritier d’un postomantisme germanique généreux et décadents, les Impressions de Lyutin sont marquées par l’influence des motorismes soviétiques, tandis que le dernier des 6 Préludes Exotiques porte, lui, la marque éclatante du Ravel le plus expansif !  Et à chaque fois, sans pâlir du tout devant ses modèles, et non sans une personnalité réellement décelable.
→ D’autres choses sont moins marquantes, mais pas sans valeur, comme le lyrisme filmique de l’Improvisation & Toccata, qui a quelque chose de Max Steiner et Korngold…
→ Clairement le meilleur album de la série, trois disques de merveilles.

11. Czerny, Sonate n°6 / Schubert, Sonate D.958 en ut mineur – Aurelia Vişovan (Passacaille 2022) ♥♥♥
→ Encore un coup de maître d’Aurelia Vişovan… Première fois de ma vie que je suis passionné par une sonate de Schubert (hors peut-être la dernière). Quelle puissance rhétorique implacable, et sur un joli blong-blong en sus !
→ Très belle sonate (en sept mouvements !) de Czerny également.
→ Découvrez absolument aussi son disque Hummel / Beethoven !

12. Noskowski – Quatuors n°1 & 2 – Four Strings Quartet (Acte Préalable 2022) ♥♥♥
→ Le 2 est un bijou de lyrisme intense, quoique pas du tout « douloureux » comme le prétendent les indications de caractère des mouvements, au contraire d’un élan lumineux remarquable !

13. Taneïev – Trio à cordes Op.31, Quatuor piano-cordes Op.20 – Spectrum Concerts Berlin (Naxos 2022) ♥♥♥
→ Le Trio est rarement enregistré, petite merveille jouée avec des cordes d’une intensité d’attaque, d’une résonance, d’une précision d’intonation assez vertigineuses. Et le Quatuor, toujours aussi puissamment inspiré dans ses élans mélodiques… Disque miraculeux.

14. Pachelbel – Les Fugues Magnificat – Space Time Continuo (Analekta 2022) ♥♥♥
→ Oh, quelle merveille !  Des fugues distribuées à différents ensembles : théorbe, orgue ou consort de violoncelles, parfois même au sein de la même fugue. La matière en est très belle (cette Chaconne en fa mineur !) et la réalisation suprême.

15. Charlotte Sohy – Œuvres avec piano (dont mélodies) – Garnier, Nikolov, Phillips, Luzzati, Oneto Bensaid, Kadouch, Vermeulin (La Boîte à Pépites 2022) ♥♥♥
→ Première publication de ce label qui a déjà fourni beaucoup de matière en musique féminine de premier plan (cf. son calendrier de l’Avent récent ou le festival Un Temps pour Elles qui lui est lié).
→ Ce volume contient des pièces pour piano, des mélodies (les très belles Chansons de la Lande, qui ont clairement entendu Duparc), de la musique de chambre, en particulier le miraculeux trio, dont le traitement thématique est absolument fascinant. (Et quels artistes possédés par leur sujet, dans le trio tout particulièrement !)
→ Les pièces pour piano m’ont paru moins essentielles, davantage tournées vers le caractère, la décoration, le salon. À réécouter.

Mais il y a aussi :

Ibert : Le Chevalier errant
Messiaen : Chronochromie
Jarre (Maurice) : Concertino pour percussions et cordes
Mihalovici : Symphonie n°2, Toccata pour piano & orchestre
Milhaud : L’Homme et son désir
Roussel : Concert, Suite en fa, Symphonie n°3
Honegger : Symphonie n°3
Debussy : Marche écossaise, Berceuse héroïque, Faune, Nocturnes, La Mer, Jeux
Ravel : Alborada, Oye
⇒ Radio de Baden-Baden, Hans Rosbaud (SWR Classic 2022) ♥♥♥
→ 4 CDs dans un son clair très réaliste et physique, avec une direction acérée et tendue… Ibert extraverti, Messiaen totalement déhanché et débridé, Honegger frénétique, Debussy tranchant… vraiment un concentré de bonheur, de bout en bout… et avec quelques véritables raretés, comme le remarquable Chevalier Errant d’Ibert, ou bien sûr Maurice Jarre et les pièces de Mihalovici.

Perosi – Quintettes piano-cordes 1 & 2, Trio à cordes n°2 – « Roma Tre Orchestra Ensemble » : Spinedi, Kawasaki, Rundo, Santisi, Bevilacqua (Naxos 2022) ♥♥♥
→ On a beau être mélomane de longue date, la vie peut toujours réserver des surprises : en deux jours, moi qui trouvais le genre du Trio à cordes assez peu fulgurant, je viens de découvrir les deux plus beaux trios que j'aie entendus, et que je n'avais jamais écoutés !  Après Taneïev, voici Perosi n°2.
→ Le feu qui traverse cette œuvre est assez grisant, sans effets de manche ni épanchements superficiels. (Les Quintettes sont très beaux aussi, mais je les connaissais déjà.)

Fauchard – Intégrale pour orgue – orgue de Detmold, Flamme (CPO 2022)♥♥♥
→ Des aspects Vierne, mais aussi un grand nombre de citations de thèmes liturgiques, en particulier dans la Symphonie Mariale que je trouve particulièrement réussie, évocant les Pièces de Fantaisie de Vierne, mais dans une perspective structurée comme un Symphonie de Widor.
→ La Symphonie Eucharistique est encore plus impressionnante en développant davantage et ressassant moins. Quelques contrastes incroyables (dans le II « Sacrifice » !).
→ De la grande musique pour orgue – si vous aimez les grandes machines évidemment. (J’ai songé aux aplats enrichis du Job d’Eben en plus d’une occurrence dans la Quatrième Symphonie, et c’est un beau compliment.)

Bach (Suite n°1), Duport, Piatti, Battanchon, Hindemith (Sonate n°3), Sollima (Sonate 1959), Casals, Rostropovitch, Matt Bellamy – « Le Chant des Oiseaux » – Thibaut Reznicek (1001 Notes 2022) ♥♥♥
→ Programme puissamment original, qui parcourt des pans majeurs de l’œuvre pour violoncelle seul, un Bach sublime mais aussi de passionnants Battanchon et Hindemith, un touchant Sollima (cette simplicité qui touche toujours juste, encore plus peut-être que dans ses délectables Quatuors…). Et Reznicek en gloire, l’un des grands violoncellistes d’aujourd’hui, doté d’un grain et d’une musicalité qui ont peu d’équivalent sur la scène actuelle.

Edelmann, Persuis, Gluck, Monsigny, Grétry, J.-C. Bach, Dalayrac, Cherubini – « Rivales », scènes d’opéra rares du XVIIIe – Gens, Piau, Le Concert de la Loge Olympique, Chauvin (Alpha 2022)
→ J'ai vu le CD « Rivales », je me suis dit « oh non, encore un récital téléphoné à base de joutes vocales fantasmées ». En réalité, recueil de grandes scènes dramatiques françaises fin XVIIIe jamais enregistrées. Et interprétation aux couleurs et inflexions extraordinaires !
→ Les figuralismes de l’abandon d’Ariane (rugissements de bêtes, tempête maritime…) chez Edelmann sont absolument incroyables ; mais aussi le grand récit de Démophoon de Cherubini, et évidemment « Divinités du Styx » par Gens.



6. Nouveautés discographiques : versions

Et bien sûr des choses moins neuves, mais dans des interprétations miraculeuses.

LULLY – Acis & Galatée – Bré, Auvity, Crossley-Mercer, Tauran, Cachet, Getchell, de Hys, Estèphe ; Chœur de Chambre de Namur, Les Talens Lyriques, Rousset (Aparté 2022) ♥♥♥
→ Tout l’inverse du parti pris esthétique du Zoroastre paru la même semaine : déluge de couleurs variées et de dictions affûtées (mention particulièrement à Bénédicte Tauran, particulièrement charismatique). Immense proposition de toute l’équipe.

Purcell – Dido & Aeneas – Les Argonautes, Jonas Descotte (Aparté 2022) ♥♥♥
→ Incroyable !  Purcell joué comme du LULLY. Voix fines et expressives (à l’accent français plus délicieux qu’envahissant), couleurs orchestrales magnifiques, et le tout dans une finition d’une perfection absolue. Voilà qui rejoint d’emblée García Alarcón sur le podium des versions les plus intenses de cette œuvre pourtant rebattue !
→ Les danses, que j’ai toujours trouvées moins passionnantes que les récitatifs (quelle surprise…) se révèlent ici absolument irrésistibles. (Et les récitatifs restent fabuleux aussi.)
→ J’espère que cet ensemble ira loin, et fera la promotion du répertoire français en complément d’autres bien en cour actuellement, mais aux postures plus hédonistes (Les Surprises, Les Ambassadeurs font de l’excellent travail, mais ce n’est pas l’esthétique qui fonctionne le mieux dans ces musiques, à mon sens…).

Voříšek, Mozart – Symphonie en ré Op.23, Symphonie 38 – Gewandhaus O, Blomstedt (Accentus Music 2022) ♥♥♥
→ Contre toute attente, après des Brahms plutôt impavides et indolents, un Mozart plein de vie et d’aspérité : certes tradi, mais un tradi vibrillonnant, qui ne se contente jamais d’énoncer les formules mais les accompagne et leur insuffle un feu permanent. Une des plus belles versions que j’aie entendues, pour moi qui ai pourtant tendance à privilégier le crincrin crissant et le pouêt-pouêt couaquant !  Une partie du plaisir provient aussi de l’exécution intégrale, avec les reprises (18 minutes pour le premier movement, et 12 pour l’andante !), ce qui permet de goûter pleinement les équilibres formels et les trouvailles merveillleuses de notre (presque) vieux Mozart.
→ La Symphonie en ré de Voříšek est elle aussi extraordinairement réalisée, Blomstedt mettant en valeur son très grand potentiel dramatique, ses parentés avec Mozart dans la recherche harmonique, la variété de ses climats (des contrastes impressionnants dans le mouvement lent). Elle ne m’avait pas du tout autant frappé, et pour cause, dans l’excellente version Goebel.

Weber, Schubert, Schumann – Lieder orchestrés, airs d’opéra (Alfonso und Estrella, Euryanthe…) – Devieilhe, Fa, Degout ; Pygmalion, Pichon (HM 2022) ♥♥♥
→ Le projet ne m’enthousiasmait pas, mais le choix des œuvres (de très beaux airs de baryton de Weber et Schubert, rarement gravés en récital) et leur réalisation sur instruments anciens, débordant de couleurs et de textures, est absolument superlative. Je suis resté sonné par l’intensité de la réalisation – et Degout, qui n’est pas mon chouchou, est en forme olympique !
→ Du même degré de réussite que l’album « Mozart inachevés » de Pygmalion.

Schumann – Quatuors piano-cordes, Märchenerzählungen (version avec violon) – Dvořák PiaQ (Supraphon 2022) ♥♥♥
→ Je découvre avec stupéfaction qu’il existe un autre quatuor piano-cordes de Schumann… et qu’il vaut de surcroît son génial autre !  (Version formidable aussi.)

Meyerbeer – Robert le Diable – Morley, Edris, Darmanin, Osborn, Courjal ; Opéra de Bordeaux, Minkowski ♥♥
→ Je reste toujours partagé sur cette œuvre : les actes impairs sont des chefs-d’œuvre incommensurables, en particulier le III, mais les actes pairs me paraissent réellement baisser en inspiration. Et certaines tournures paraissent assez banales, on n’est pas au niveau de finition des Huguenots, où chaque mesure sonne comme un événement minutieusement étudié. Pour autant, grand ouvrage électrisant et puissamment singulier, bien évidemment !
→ Comme on pouvait l’attendre, lecture très nerveuse et articulée. Courjal, que je trouvais un peu ronronnant ces dernières années, est à son sommet expressif, fascinant de voix et d’intentions. Bravo aussi à Erin Morley qui parvient réellement à incarner un rôle où l’enjeu dramatique, hors de son grand air du IV, paraît assez ténu par rapport aux autres héroïnes meyerbeeriennes – avant tout un faire-valoir.
→ Très (favorablement) étonné de trouver ce chœur, qui bûcheronnait il y a quinze ans, aussi glorieux – son à la fois fin mais dense, ni gros chœur d’opéra, ni chœur baroque léger, vraiment idéal (seule la diction est un peu floue, mais il est difficile de tout avoir dans ce domaine).

Gluck, Rossini, Bellini, Donizetti, Halévy, Berlioz, Gounod, Massenet, Saint-Saëns – « A Tribute to Pauline Viardot » – Marina Viotti, Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (Aparté 2022) ♥♥♥
→ Voilà, pour une fois, un récital intelligent, qui tient les promesses de son titre : le répertoire de Pauline Viardot, sur instruments d’époque, par une voix exceptionnelle, d’une très belle patine mais brillante, à la diction affûtée, à la projection manifestement aisée, maîtrisant aussi bien la cantilène profonde que la déclamation dramatique ou l’agilité la plus précise.
→ Orphée, La Juive, La Favorite, Les Troyens sont d’éclatantes réussites, qui offrent à la fois une qualité supérieure de diction et d’expression… mais aussi un accompagnement d’un caractère et d’une singularité qui renouvellent véritablement l’écoute !

Czerny – Nonette – Brooklyn Theatre Salon Ensemble (Salon Music 2022) ♥♥♥
→ Une nouvelle version du Nonette !  Timbres moins parfaits que chez le Consortium Classicum, mais la prise de son est encore plus aérée et détaillée, beaucoup d’aspect qu’on a l’impression de mieux découvrir. Pour l’un des plus hauts chefs-d’œuvre de Czerny.

¶ Brahms – Symphonie n°1, Concerto pour violon (S.-M. Degand, Le Cercle de l'Harmonie, Rhorer) (NoMadMusic 2021) ♥♥♥
→ Fin de l'année 2021, passé inaperçu dans les bilans.
→ Formidables couleurs renouvelées, et dans le concerto, ce que tire Degand de cordes en boyaux est tout simplement hallucinant d'aisance et de musicalité. Versions majeures, et très différentes de ce qu’on peut entendre ailleurs.

Brahms – Les Symphonies – Chambre du Danemark, Ádám Fischer (Naxos 2022) ♥♥♥
→ Dans le même goût que leurs Beethoven, avec une Héroïque particulièrement marquante, un Brahms aux cordes non vibrées qui n’en ressort pas (comme c’est en général le cas) rigidifié ou anémié : Fischer s’empare de cette options en faisant tout claquer avec une vivacité impressionnante… le plus admirable est que les mouvements lents eux-mêmes en sortent particulièrement rehaussés, par le grain, par la lisibilité structurelle, par la force des intensions.
→ Une très grande lecture, particulièrement marquante, qui renouvelle radicalement l’approche de ces œuvres d’ordinaire beaucoup plus pâteuses, et dont l’orchestration sort ici transfigurée. Je le mets dans mon panthéon aux côtés de Manze (pour la couleur, les accents) et Zehetmair (pour l’intelligence de l’articulation des cordes).
→ Bissé.

Offenbach – Le Voyage dans la Lune – Derhet, Lécroart ; ON Montpellier, Dumoussaud (Bru Zane 2022) ♥♥♥
→ Sur un schéma habituel (princesse enlevée par un prince mauvais sujet), farci de rebondissements plein de fantaisie (fusée, terre habitée, volcan), quelques pastiches identifiables (les enchères à la chandelle de la Dame Blanche « Personne ne dit mot ? »), et plusieurs moments assez marquants mélodiquement (le chœur de la neige), un bel Offenbach ambitieux et puissamment original, dans le goût du Roi Carotte ou de Barbe-Bleue.

Dubois, d’Indy, Caplet – Dixtuor, Chansons & Danses, Suite Persane  – Polyphonia Ensemble Berlin (Oehms 2022) ♥♥♥
→ Trois très belles œuvres, mais le disque vaut particulièrement pour sa version des Chansons & Danses de d’Indy, d’une verdeur exceptionnelle, complètement nasillarde et terroir – je n’imaginais pas des musiciens allemands capables de se donner à fond là-dedans !  Indispensable version de premier plan de ce chef-d’œuvre.

Sibelius – Symphonies 3 & 5, La Fille de Pohjola – Symphonique de Göteborg, Rouvali (Alpha 2022) ♥♥♥
→ Voilà une intégrale réalisée par un autre prodige finlandais, sur beaucoup plus long terme qu’Oslo-Mäkelä, et qui apporte, cette fois, une toute nouvelle perspective sur ces œuvres !  Captation merveilleuse de surcroît.
→ Rouvali a la particularité de traiter les transitions non comme des passages d’attente, mais comme si (et c’est le cas !) elles étaient le cœur du propos. Il n’hésite pas à mettre en valeur les motifs d’accompagnement et à les rendre thématiques (sans abîmer pour autant l’équilibre général de la symphonie et les thèmes). On se retrouve donc avec deux fois plus de thèmes (et de bonheur).
→ Sa Première était un bouleversement paradigmatique ; les autres parutions m’avaient moins impressionné. Mais dans cette Troisième, au premier mouvement très vif et élancé, au deuxième au contraire d’une lenteur particulièrement inspirée (avant que tout ne s’emballe), on sent à quel point, à nouveau, chaque équilibre, chaque progression est pensée. Vraiment un témoignage de tout ce qu’un chef peu magnifier dans une grande partition. → Tout simplement (et de loin) la meilleure version que j’aie entendu de la Troisième (et j’ai écouté toutes les intégrales discographiques de Sibelius).
→ La Cinquième est moins singulière, mais toujours remarquablement articulée et captée (pas une version où l’appel de cor du final est particulièrement majestueuse / exaltante, attention à ceux pour qui c’est important).

Sibelius – Symphonie n°7, Suite de Pelléas, Suite de Kung Kristian II – Radio Finlandaise, Nicholas Collon (Ondine 2022) ♥♥♥
→ Premier directeur musical non finlandais à la tête de la Radio, ce n’est en tout cas pas une erreur de casting : une Septième pleine de frémissements, de détails, de vie, de bout en bout, l’une des plus abouties de celles (très nombreuses) qu’il m’ait été donné d’entendre.

Langgaard – Symphonie n°1, « Pastorale des falaises » – Berliner Philharmoniker, Sakari Oramo (Da Capo 2022) ♥♥♥
→ Cette unique symphonie de Langgaard écrite dans le goût postromantique généreux (sur les 16 de son catalogue) trouve ici une lecture particulièrement limpide et animée… le résultat est d’un souffle absolument irrésistible.




7. Découvertes de l'année

L'exploration des anniversaires a bien sûr été l'occasion de beaucoup de belles découvertes (Ballard, Schürmann, Baines… et bien sûr la vie absolument démente de Dupuy !).

De même pour l'Ukraine. Parmi les belles rencontres inattendues, Semen Hulak-Artemovskiy dont l'histoire m'a passionné, et Leo Ornstein, pianiste exilé aux États-Unis dont le futurisme débridé me ravit absolument (le disque de Janice Weber avec les Sonates 4 & 7, ou le Quintette qu'elle a gravé avec le Quatuor Lydian, sont à couper le souffle).

En lisant Pelléas au piano, j'ai été frappé comme la foudre par l'hypocrisie de Debussy, se moquant de la façon de Wagner d'écrire un opéra à partir de bouts de motifs hystériques. Or, bien que les exégètes que j'ai lus aient toujours paru relativiser les leitmotive dans Pelléas, en réalité le plus clair de l'opéra n'est bâti que sur ces motifs (souvent des interludes ou des sections entiers !), peut-être encore davantage que dans Tristan ou le Ring… Découverte qui m'a stupéfié, j'étais toujours passé à côté à l'écoute – activité dont je ne suis pourtant pas suspect d'avoir été économe. Il y aura des notules (et peut-être même une « conférence-concert ») sur le sujet. Voyez déjà cette notule générale et celle-ci, plus récente.

Autre grand choc, la découverte des concertos pour violon de Pierre Rode, d'un style postclassique à la fois dramatique et d'une veine mélodique incroyable (un peu dans l'esprit de Dupuy), que j'ai écoutés en boucle pendant mes randonnées depuis le printemps dernier.

Une claque monumentale avec I Masnadieri de Verdi dans la version de Gavazzeni à Rome en 1972 (Ligabue, G. Raimondi, Bruson, Christoff).
Je n'avais jamais été très touché par cet opéra encore un peu formellement post-belcantiste, et dans des versions molles (Gardelli notamment) distribuées totalement à rebours (Bergonzi en brigand sans limites !). Réécoute avec cette version possédée, en relisant sa source Die Räuber.  J'en suis sorti vraiment sonné… Les plot twists surabondants et délirants (il y en a combien, une demi-douzaine rien que dans la dernière scène ?), et la fin assez inattendue et insoutenable, le désespoir qui baigne le tout – chaque personnage étant persuadé de sa damnation et se débattant malgré tout en s'enfonçant dans ses crimes et en choisissant mal la loyauté de ses serments –, la recherche d'un sublime perverti, tout concourt au malaise exaltant.
Ces outrances sidérantes ont dû faire réagir sur le plan de la bienséance, même pour un public habitué aux fantaisies romantiques !  Mais c’est aussi le terreau pour des scènes très contrastées comme Verdi les aime – la prière apocalyptique du méchant !  Les rôles sont eux aussi démesurés : l’épouse qui dérobe une épée et tient en respect le méchant, le baryton totalement maléfique, le ténor vociférant… j’en suis sorti assez secoué avec cet attelage plus grand que nature.
→ Et alors, Gianni Raimondi, que je tenais pour une belle voix (idéalement émise mais) un peu aimablement lisse, totalement hors de lui, est hallucinant dans sa dernière scène.

Quelques opéras du romantisme allemand, aussi, à commencer par Die Räuberbraut de Ries (dont je n'avais jamais rien trouvé saillant, et qui se révèle un tempérament dramatique de premier ordre !) et Die Lorelei de Bruch (de très loin supérieure en intensité à ses autres vocales comme Ulysse ou Arminius).

Enfin, les symphonies d'Alfvén dirigées par le compositeur, tellement claires, mordantes et redevables au folklore, on ne l'imaginerait pas du tout en écoutant les autres versions du commerce (beaucoup plus vaporeuses et « atmosphériques »).



8. Cycles de l'année

Pour approfondir un sujet ou préparer une notule, j'ai tendance à creuser un même sillon, d'où la poursuite de quelques cycles.

Cycle opéra suédois :
Je ne suis toujours pas inconditionnel de la Fête à Solhaug de Stenhammar (un rare Ibsen mis en musique), mais son Tirfing sur un sujet médiéval est absolument enthousiasmant, ces finals tournoyants particulièrement généreux m'ont transporté !  On trouve pas mal d'œuvres chez Sterling.
J'ai aussi profité de tout le fonds édité par BlueBell : récitals d'artistes suédois qui chantent tout le répertoire… en suédois. Mozart, Verdi, Wagner, R. Strauss, tout y passe… voix phénoménales et saveur très particulière de cette langue (variété vocalique et, par rapport à l'allemand, une fermeté qui n'exclut pas la rondeur). Vous pouvez commencer par le volume consacré à Arne Tyrén, vertigineux. Il faut après naviguer selon ses goûts, mais la quinzaine d'albums vaut le détour, particulièrement pour les chanteurs moins connus (qui chantent mieux…).

Cycle Segerstam
Cycle Westerberg
(de pair avec ce cycle opéra suédois)

Cycle opéras français post-1870 :
Hérodiade de Massenet, Aben-Hamet de Dubois, Vercingétorix de Fourdrain, Lutetia d'Holmès, Ivan le Terrible de Gunsbourg… évoquent tous à leur manière les tourments de la défaite et la recherche du sublime malgré la déchéance et l'horreur. Il est frappant de voir que le parallèle Romains-Germains est réalisé par plusieurs de ces œuvres (Hérodiade, Vercingétorix, Lutetia), alors que dans notre imaginaire contemporain la culture romaine (ne serait-ce que par la distribution linguistique) s'oppose justement à celle du Nord de l'Europe.

Cycle opéras de Théodore Dubois
En train de déchiffrer au piano tous ceux que j'ai pu trouver : Le pain bis, Xavière, Le Guzla de l'Émir, Aben-Hamet, Le Paradis perdu… Et je m'émerveille à chaque fois de la facilité de lecture et de l'économie de la pensée musicale, dispensant beaucoup de beautés, mais toujours à la juste proportion, comme une épice vient relever un plat sans le dénaturer.

Cycle Taneïev
Sa musique de chambre est extraordinaire, et les symphonies aussi. 45 disques écoutés, à peu près toutes les œuvres que j'ai pu trouver couramment disponibles.

Cycle intégrale Verdi
Réécoute de tous les opéras de Verdi. Toujours source d'émerveillement et de plaisir.

Cycle Oliver Triendl
Le grand pianiste défricheur (les concertos rares et la musique de chambre interlope chez CPO, c'est très souvent lui !). En plus il joue merveilleusement. J'ai suivi sa trace pour faire encore davantage de belles découvertes !

Et quelques autres autour de compositeurs :

Cycle Dupuy
Cycle Czerny
Cycle Stenhammar
Cycle Pejačević
Cycle Juon
Cycle Miaskovski
Cycle Tchèques milieu XXe (Luboš Fišer et Jan Fischer !)
Cycle Sviridov

Ou d'interprètes :

Cycle Gianni Raimondi
Cycle Fedoseyev
Cycle Dähler (le pianiste)

… ou même un cycle Civil War, pour retrouver la trace des thèmes les plus célèbres utilisés dans la musique américaine. (Pas évident de trouver de bons disques, beaucoup d'arrangements dégoûtants – j'ai dû fouiller un peu.)

Si vous êtes curieux, une recherche en ctrl+F dans le fichier des écoutes et dans son archive vous permettront de retrouver les disques et les commentaires.



9. Doudous

J'ai aussi réécouté certains de mes doudous personnels : les Variations « Prinz Eugen » de Graener, Miles fortis de Hamel, Raoul Barbe-Bleue de Grétry, Ungdom og Galskab de Dupuy, et j'ai découvert ou réécouté sans trête la musique de chambre de compositeurs majeurs dans ce genre et trop méconnus : Krug, Koessler, Schillings, Pejačević, Kabalevski, Taneïev, Howells…




J'espère que ce bilan vous aura donné des idées d'écoutes, ou que la vidéo vous aura amusés. À défaut, sachez que je diffuse et commente mes écoutes en temps réel sur ce fichier.

À l'année prochaine, estimés lecteurs !

lundi 1 août 2022

Les meilleures nouveautés de la mi-2022




Estimés lecteurs,

Je m'apprête à prendre pour quelques jours congé de vous : je suis obligé, afin d'éviter la publicité pharmaceutique des automates russes et l'expression de l'absence de vie d'un troll récurrent ici, de ne pas publier les commentaires tout de suite, mais ils seront  lus avec attention et joie (et obtiendront évidemment une réponse) dès mon retour.

Pour les plus enragés / désœuvrés, je laisse ici un point d'étape sur les écoutes discographiques de l'année déjà pour plus de moitié écoulée. Cela permettra aussi de retrouver les références dans le moteur de recherche du site, plutôt que de devoir jongler avec un hébergeur extérieur (dont personne ne peut prévoir, au demeurant, la persistance).

Avec la sélection « rechercher dans la page », vous pouvez grâce à l'étiquetage retrouver les 79 écoutes du Cycle Ukraine, ainsi que toutes les nouveautés discographiques écoutées (il y en a 215). Vous pouvez aussi copier-coller les cœurs pour retrouver spécifiquement les disques à trois cœurs (le mien est large, il y a 176 disques concernés) ou à deux (319…).

Pour vous mettre en appétit, quelques disques ressentis à ♥♥♥, dont vous retrouverez les commentaires ci-après.



A. Nouveautés

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→ Cardoso, Messes par Simon Lloyd
→ Aumann, Musique de chambre par Letzbor
→ Campra, Le Destin du Nouveau Siècle par Bismuth
→ Schumann Quatuor piano-cordes en ut mineur par le Dvořák Piano Quartet
→ Offenbach, Le Voyage dans la Lune par Dumoussaud
→ Massenet, Mélodies orchestrales par Niquet
→ Saint-Saëns, Phryné par Niquet
→ Fauchard, Œuvres pour orgue, par Fiedhelm Flamme
→ Taneïev, chambre par Spectrum Concerts Berlin
→ Perosi, Trio à cordes n°2 par Roma Tre Orchestra
→ Marinuzzi, Palla de' Mozzi, Grazioli
→ Louis Andriessen, Smit, Pijper et piano à quatre mains du XXe néerlandais par les Jussen
→ Vladigerov, Orchestral Works 3 par Vladigerov
→ Alberga, Concertos pour violon par Swensen
→ Solos de violoncelle par Thibaut Reznicek




B. Nouvelles versions

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→ Haydn, Symphonies par le Basel Kammerorchester
→ Voříšek & Mozart 38 par Blomstedt
→ Beethoven, Symphonies par Le Concert des Nations
→ Schubert, Winterreise par Benjamin Appl
→ Ireland et Liszt, sonates par Tom Hicks
→ Brahms, Concerto pour violon par Degand & Rhorer
→ d'Indy, Chansons & Danses par le Polyphonia Ensemble Berlin
→ Debussy, Pelléas & Mélisande par Les Siècles
→ Sibelius, Symphonie n°7 par Nicholas Collon
→ « Mirages » par Roderick Williams



C. Découvertes personnelles

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→ Rode, Concertos pour violon par Friedemann Eichhorn
→ Dupuy, Ungdom og Galskab par Schønwandt
→ Röntgen, Concerto pour violon en la mineur par Ragin Wenk-Wolf
→ Alfvén par Alfvén
→ Kienzl, Quatuors (et trio) par le Thomas Christian Ensemble
→ Kienzl, Der Evangelimann & Der Kuhreigen
→ R. Strauss, Alpensinfonie par Shipway
→ Ornstein, Sonates par Janice Weber
→ Wirén, Quatuors par le Wirén SQ
→ Maria Bach, musique de chambre par Hülshoff & Triendl (et aussi le disque CPO)
→ Eben, Job par Titterington
→ Alberga, Quatuors



D. Doudous increvables

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→ Grétry, Raoul BB
→ Stenhammar, quatuors par les Gotland SQ, Fresk SQ et Copenhagen SQ
→ Nielsen, Saul og David par Neeme Järvi
→ Verdi, Il Trovatore par Muti 2000
→ Pejačević, Quatuor avec piano et Quintette par Triendl & Sine Nomine SQ
→ Saint-Saëns, Symphonie n°3 par Paul Paray



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Suite de la notule.

dimanche 6 février 2022

Le défi 2022 des nouveautés – saison IV, épisode 1 – baroque autrichien, préromantiques danois, concertos surprenants et anniversaires…


lattès

Nouvelle saison !

Devant la quantité d'enregistrements écoutés, et sur lesquels j'écris pour moi-même, je m'interroge toujours sur le format pour les partager au mieux. Je sais que certains camarades ou lecteurs de passage aiment avoir un avis sur les nouveautés, ou des idées d'écoutes – et j'aime assez l'idée qu'au bout de quelques années, on puisse trouver, en cherchant sur le site, beaucoup d'éléments croisés sur beaucoup plus de compositeurs que les entrées habituelles, avec un nom par publication, ne me laisseront jamais aborder sérieusement.

Hélas, mettre en forme mes brouillons prend beaucoup de temps sur mes autres travaux pour CSS, et je cherche, depuis que j'ai débuté ce défi, un moyen de conjuguer la mise à disposition un minimum utilisable et attractive de ces notes… avec un temps raisonnable à y consacrer.

J'ai donc changé, pour cette année, mes notes qui étaient organisées en tableau difficilement exportable sur une page web, au profit d'un format brut qu'il suffit de mettre en couleur et de coller dans une notule. À voir à l'usage (pour vous, ce ne devrait visuellement pas changer grand'chose).



Cycles

Beaucoup de symphonies romantiques germaniques (Loewe, Gade…), un grand cycle danois (Kunzen, Kuhlau, Dupuy, Gade, Heise, Hamerik, Langgaard), un autre consacré à Grétry, beaucoup de Karg-Elert et un gros arrêt sur Kienzl, ce mois-ci. Mais aussi les chorals et le quatuor de Franck, les concertos pour violon de Röntgen, le baroque autrichien et tant d'autres petites choses à explorer.

Énorme coup de cœur en découvrant l'ensemble Ars Antiqua Austria et sa discographie consacrée au baroque et au classicisme autrichiens, avec une vitalité qui m'a immédiatement conquis, alors que la musique instrumentale baroque n'est a priori pas la matrice de mes plus grands frissons.

Et bien sûr ce qu'il faut pour préparer les notules anniversaires (Davaux, Dupuy, Graener, Alfvén, Perosi… mais ça ne réclame pas de se forcer beaucoup !).

J'ai aussi poursuivi à réécouter en boucle le motet Astra Cœli de Jean-Noël Hamal, en découvrant sans cesse de nouveaux détails qui concourent à l'exaltation ressentie à l'écoute. (Écriture orchestrale très précisément pensée pour mettre en valeur, sans y paraître, la tension de la ligne vocale.)



lattès


La légende

Pour gagner du temps, j'ai changé ma légende (au profit de symboles présents par défaut sur un clavier).

Je ne saurais insister assez, à nouveau, sur le fait qu'il ne s'agit en rien d'une note, ni même d'une évaluation de qualité des enregistrements. Ce sont simplement des repères, pour moi d'abord et pour mes lecteurs qui le souhaitent ensuite, pour guider vers ce qui doit être écouté ou réécouté en priorité. Ce sont des indications sur mon ressenti, mes émotions : il y a certains enregistrements techniquement hasardeux que je vais apprécier, et d'autres impeccables qui vont me laisser totalement froid, tout cela étant évidemment pondéré par mon tropisme personnel pour les œuvres jouées, la rareté de la proposition, l'humeur du moment, voire (pour ceux qui y croient) le matériel de reproduction sonore…

Comme mes repères globaux à trois niveaux n'étaient pas toujours parlants pour moi-même (œuvre fabuleuse mais interprétation terne, œuvre terne mais interprétation qui l'exalte…), j'ai conservé les repères à trois niveaux mais les ai répartis entre œuvre et interprétation.

Ce qui donne des symboles, en fin de titre, de ce type : !/+++ **.

! : Très bonnes œuvres.
!! : Œuvres fabuleuses.
!!! : Va changer votre vie.

+ : Très bonne interprétation.
++ : Interprétation particulièrement remarquable.
+++ : Va bouleverser vos perceptions.

* : Très bon disque, à écouter !
** : Disque formidable, à écouter d'urgence !
*** : Vous n'entendrez plus la musique de la même façon.

Il peut exister une décorrélation entre mon ressenti sur l'œuvre / l'interprétation et celui sur le disque en général, ce n'est pas forcément une erreur. Ce peut notamment être tempéré par l'offre discographique : une symphonie de Beethoven (à !!! sur l'œuvre, donc) avec une interprétation à ++, vu l'offre pléthorique, peut très bien avoir une opinion de * sur le disque.

Comme d'habitude, le fait même d'avoir une « récompense » signifie que je recommande le disque. Si je ne suis pas très touché, je mets un « . », ce qui ne veut pas dire que ce soit mauvais, mais que je ne vois pas de plus-value majeure à écouter l'œuvre, l'interprétation ou le disque en question. (Encore une fois, avis purement personnel, je peux tout à fait me tromper, ou simplement ne pas avoir les mêmes attentes que d'autres mélomanes tout aussi valeureux.)  Il existe quantité de disques parfaits, mais je réserve les « *** » pour ceux qui me paraissent changer notre perception, régler la question d'une discographie, faire découvrir un pan du répertoire génial et inexploré, etc. Sinon la plupart seraient à !!!/+++ *** et on ne serait pas très aidé pour choisir ses écoutes.

Si vraiment j'ai trouvé quelque chose de raté (le son sature tout le temps, les interprètes jouent faux, le disque inclut du Philip Glass), je mets ¤ (¤¤, ça n'arrive jamais, il faudrait vraiment que ce soit honteux comme une symphonie de Philip Glass).

En rouge, les nouveautés du mois. En gras, les disques que je recommande tout particulièrement.

Si jamais j'ai omis d'ôter les « ° », ce sont mes repères pour les disques que j'écoute pour la première fois ou pour les nouveautés.

Le tout est classé par genre, puis par ordre chronologique très approximatif (tantôt la génération des compositeurs, tantôt la composition des œuvres, quelquefois les groupes nationaux…) au sein de chaque catégorie, pour ménager une sorte de progression tout de même.




lattès
(Oui, vous aurez remarqué que ce n'est pas le mois des jolies-pochettes.)




La liste


OPÉRAS FRANÇAIS

Grétry – Céphale & Procris – van Waas (Ricercar) !!!/+++ ***

Grétry – L'Amant jaloux – Celeste Lazarenko, Alexandra Oomens, Jessica Aszodi, Ed Lyon, Andrew Goodwin, David Greco ; Pinchgut Opera, Melissa Farrow (Pinchgut Opera) !!/+ **
→ Compagnie sise à Sydney, qui fait du très beau travail, dont témoigne cette seule version CD de L'Amant jaloux depuis l'antique version Doneux avec Mesplé (disque qui ne rend pas du tout justice à l'écriture orchestrale et au rythme de la comédie, et discutable y compris sur le plan du chant).
→ Ici, les accents ne sont pas parfait, les voix féminines assez opaques et moches, mais l'orchestre dispose du style approprié (ainsi qu'Ed Lyon, bien sûr !), et le rythme tournoyant du drame est pleinement là, ainsi que toutes les beautés instrumentales disposées par Grétry.

Grétry – Raoul Barbe-Bleue – Wåhlberg (Aparté 2019) !!!/+++ ***

Grétry – Guillaume Tell – Opéra Royal de Wallonie, Scimone (Musiques en Wallonie) !!/++ **

Méhul – Uthal – Deshayes, Beuron, Bou ; Les Talens Lyriques, Rousset (Singulares) !!/+++ **

Spontini – Olimpie – Rhorer !/++ **

Hérold – Le Pré aux clercs – Gulbenkian SO, McCreesh !!/+ *

Halévy – La Reine de Chypre – Gens, Dubois, Dupuy ; OCP, Niquet (Singulares) !!/+++ **

F. David – Herculanum – Gens, Deshayes, Montvidas, Courjal (Singulares) !!/+++ **

F. David – Christophe Colomb – Santon, Behr ; Les Siècles, Roth (Singulares) !!/+++ **

Gounod – Le Tribut de Zamora – Holloway, Montvidas, Christoyannis (Singulares) !!/+++ **

Offenbach – La Vie parisienne (version restituée de 1866) – Christian Lacroix ; Devos, Buendia, Briand, Huchet, Mauillon, Leguérinel ; Musiciens du Louvre, Romain Dumas (Arte Concert 2022) !/++ *
→ La (première) mise en scène de Lacroix est peu élégante et peu lisible. Distribution remarquable, mais qui n'est pas dans son meilleur jour : Buendia, Briand, Huchet étrangement en retrait de leurs fulgurances habituelles ; mais Devos et Leguérinel brûlent les planches et chantent remarquablement, tout de même !  Et l'œuvre, malgré le rehaussement supposé par ces numéros perdus et restitués pour la spremière fois, reste tout de même enserrée dans ses trépidations un peu primaires et son livret à la fois peu lisible et peu profond.
→ Mais dans le cadre de ce qu'est La Vie parisienne, une version qui vaut la peine, en particulier pour la qualité des textures et de l'engagement des Musiciens du Louvre !

Massenet – Le Mage (acte I) – Hunold, Aldrich, Lombardo ./+ .

Saint-Saëns – Le Timbre d'argent – Les Siècles, Roth (Bru Zane) !!/+++ **

Debussy – Pelléas & Mélisande – Santoni, Behr, Duhamel, Teitgen ; Les Siècles, Roth (HM 2022) !!!/+++ ***
→ Très convaincu par la lecture orchestrale totalement renouvelée grâce aux instruments anciens, et à la science de gérer individuellement chaque pupitre par Roth. Très belle distribution également, Santoni très « vocale » mais au cordeau, Behr qui n'a jamais été aussi éloquent qu'ici (sans l'impression d'effort articulatoire énorme qui prévaut d'ordinaire chez lui). Un peu moins enthousiasmé par Duhamel, incarnation très homogène, uniment sombre, émission assez en arrière qui le limite dans ses éclats aigus ; mais le timbre reste très beau et l'artiste généreux.
→ Sur les représentations avec Santoni, Teitgen, Les Siècles, j'avais dit quelques mots ici :  https://twitter.com/carnetsol/status/1448542505704755200 .

Hahn – Ô mon bel inconnu – Gens, Dubruque, Dolié ; O Avignon-Provence, (Bru Zane) !/+ *

Lattès – Le Diable à Paris – Tassou, Dubroca, Frivolités Parisiennes (B Records 2021) !!!/+++ ***
→ Quelle merveille, farcie de tubes (essayez le compactage incroyable de moments de caractère dans le final de l'acte I), et interprétée absolument idéalement par des interprètes qui écoutent de couvrir leur voix comme des chanteurs d'opéra (tout en en ayant toute la robustesse !), et font vivre tous les frémissements de ce livret absolument loufoque. (Le Diable, convoqué par deux cheminots en mal de beauté ou d'argent, accepte de rendre les âmes contre un séjour à Paris pour échapper à sa femme.)
→ Nouveauté de l'année dernière dont j'avais déjà fait un autre petit commentaire, déjà très enthousiaste.

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OPÉRAS ITALIENS

(Pierantonio) TASCA –  A Santa Lucia – Derilova, Kapfhammer, Marschall, Paulsen, Wade ; Dessau Anhalt Theater Chorus, Dessau Anhalt Philharmonic, Markus L. Frank (CPO 2022) !!/+ **
→ Dans le goût sonore de Cavalleria Rusticana, une autre histoire terrible de jalousie féminine et d'hommes inconséquents, mais avec davantage de richesse dans la musique, même si la couleur en est très proche. Chanté avec des techniques qui ne sont pas au niveau de ce que nous ont laissé les générations précédentes, avec un italien très international et des voix parfois hululantes (le ténor est quand même très bon), ce reste une expérience réellement intéressante.

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OPÉRAS ALLEMANDS

Loewe – Die drei Wünsche – Klepper, (Jonas) Kaufmann, Hawlata, SWR Stuttgart, Peter Falk (Capriccio 1998) !!/++ **

Abert – Ekkehardt – Kaufmann, Gerhaher (Capriccio) !!/++ **

Kienzl – Der Evangelimann – Donath, Wenkel, Jerusalem, R. Herrmann, Moll ; Radio de Munich, Zagrosek (Warner) !!!/+++ ***
→ Écouté cinq fois ce mois-ci, quelle bien belle œuvre aux élans irrésistibles !  (et servie ici superlativement)

Kienzl – Don Quixote – Mohr (CPO) !!/++ **

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OPÉRAS ANGLAIS

Haendel – Semele – Labin, Skerath, Blondeel, Savinoya, Zazzo, Newlin, (Andreas) Wolf ; Chœur de Chambre de Namur, Millenium Orchestra, García Alarcón (Ricercar 2022) ./+ .
→ Une distribution qui promettait (en particulier Blondeel, Zazzo et A. Wolf), mais malgré l'animation sans reproche de García Alarcón, je trouve l'œuvre toujours assez pâle, et les émissions plutôt blanches et flasques des chanteuses n'aident pas à soutenir l'intérêt. En concert, avec la différenciation visuelle des attitudes physiques, ce devait bien fonctionner, mais disque, tout paraît un peu étale et égal, manquant de l'invention et des couleurs ordinairement dispensées par Alarcón… (Il se met à enregistrer des choses célèbres, rien ne va plus !)

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OPÉRAS SCANDINAVES

Kunzen – Holger Danske – Bonde-Hansen, Rørholm, Elming ; Schønwandt (Dacapo) !!!/++ ***
→ Déjà commenté dans de précédents épisodes, une sorte de Flûte enchantée romantisante en danois, partition assez exceptionnelle.
→ Bissé.

Dupuy – Ungdom Og Galskab (Youth and Folly) – Elming, Cold ; Collegium Musicum Copenhagen, Schønwandt (Dacapo 1997) !!!/+++ ***
→ x5.

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OPÉRAS RUSSES

Moussorgski – Sorochinskaya yarmarka (Sorochintsi Fair) (completed by V. Shebalin) – Ljubljana Opera, Hubad  (Naxos Historical, 1955, réédition ) !!/++ **

Moussorgski – Sorochinskaya yarmarka (Sorochintsi Fair) (completed by V. Shebalin) – Guennadi Troitzki, Antonina Kleschova, Ludmila Belobraguina , Alexei Ousamanov, Iouri Elnikov, Alexander Poliakov, Sergei Troukatchev  ; Choeurs De La Radio De L'U.R.S.S., Orchestre De La Radio De L'U.R.S.S., Yuri Aranovich (vinyle de 1969)
→ Version vraiment empesée...

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RÉCITALS D'OPÉRA

LULLY, Desmarest, Charpentier… – « Passion » – Gens, Les Surprises, Bestion de Camboulas (Alpha 2021) !!!/+++ ***
→ Déjà présenté précédemment. L'air-chaconne d'Astérie dans Circé de Desmarest, petite merveille.

A. Scarlatti, Haendel, Vivaldi, Sorro, Caldara – « A Baroque Tenor : Arias for Annibale Fabbri » – Marco Angioloni, Ensemble Il Groviglio, Stéphane Fuget (Pan classics 2022) !!/+ *
→ Concept habituel de l'album autour d'un interprète historique, ici « Balino ». Beau choix d'airs, vraiment prenants, et inhabituel pour célébrer un ténor dans le seria pré-1750, où ce sont rarement des tessitures mises en valeur.
→ L'accompagnement est remarquablement, plein d'esprit et de vivacité, mais une certaine interrogation concernant le soliste : la voix est belle, mais incomplètement formée (elle sonne encore en partie « parlée »), ainsi que nombre d'excellents étudiants qui doivent encore mûrir. Je m'interroge donc un peu sur la pertinence de graver ceci avec lui ou à ce moment de sa carrière : le disque, lui, ne va pas mûrir, et on est mis un peu mal à l'aise, par moment, par le timbre partiellement formé.

Mozart – airs de Lucio Silla, Mitridate et des Da Ponte « Mozart x 3 » – Elsa Dreisig, Basel KO, Langrée (Erato 2022) !!!/+++ **
→ Programme absolument pas original, mais réalisé avec une qualité de moelleux vocal, de coloration et d'expression tout à fait remarquables. (Voyez en particulier la façon expressive dont Dreisig mixe voix et de tête et de poitrine en descendant dans les médiums !)

Carafa – « Ah! Fermate … Raoul! … Perche non chiusi », acte II de Gabriella di Vergy – Yvonne Kenny, Doghan ; Geoffrey Mitchell Choir, Philharmonia Orchestra, David Parry (Opera Rara) !/+ *
Voir ici.

° Carafa – « Quell'aspetto … quegl'accenti ! », acte III de Gabriella di Vergy – Matteuzzi, B. Ford ; Academy of St. Martin in the Fields, David Parry (Opera rara) !/. *
Voir ici.

Carafa – « L'amica encor non torna » dans Le Nozze di Lammermoor – DiDonato Opéra de Lyon, Minasi (Virgin 2014) !/+ *
Voir ici.
 
Gade – extrait Elverskud (Elf-King's Daughter), Op. 30 – Lauritz Melchior, Studio orchestra (Danacord, publication 1987)
→ Bissé (parce qu'il ne m'en restait rien !).

Youmans, Beydts, Lattès, Hahn, Messager, Yvain, Caryll, Berger, Fourdrain, LeBoy, Hope Temple, Haydn Wood – « Tea for Two » – Decouture, Brocard, Frivol'Ensemble (Naxos 2018) !/. .
→ Deux chanteurs que j'aime beaucoup en concert, mais pour un récital au disque, cela s'avère manquer un peu de brillant. Les arrangements de Michard pour ensemble de chambre sont délicieux.

Corigliano – Air du Ver (des Ghosts of Versailles) – Graham Clark, Met (vidéodiffusion de la production) !!!/++ ***

Corigliano – Air du Ver (des Ghosts of Versailles) – Robert Brubaker, LA Opera, Conlon (DVD Bridge ?) !!!/++ **

Corigliano – Air du Ver (des Ghosts of Versailles) – Brenton Ryan, Jalisco PO, Plácido Domingo (vidéodiffusion d'Operalia, Guadalajara 2016) !!!/+++ ***

Corigliano – Air du Ver (des Ghosts of Versailles) – Tenor Adrian Dwyer, Kelvin Lim au piano (YT, Londres 2017) !!!/+ **

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MUSIQUES DE SCÈNE

Biber – Karneval in Kremsier – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Pan Classics) !/++ *

Édouard Dupuy – Overture to «Youth and Folly» – Swiss Orchestra, Lena-Lisa Wüstendörfer (YT, capté en 2019 à la Tonhalle de Zürich) !!/+ **
https://www.youtube.com/watch?v=UkIfYOeQy4M

ADAM, A.: Jolie Fille de Gand (La) [Ballet] (Queensland Symphony, Mogrelia) (Naxos 2022) ./. .
→ Œuvre assez peu exaltante, vraiment du ploum-ploum bas de plafond pour jarrets ; et par l'orchestre jamais très beau du Queensland, la double peine d'une certaine façon.

Kuhlau & Gade (Elverhøj), Mikel (Les Lanciers), Lange-Müller – « DER ER ET YNDIGT LAND » – Inger Dam-Jensen, Poul Elming, Johannes Soe Hansen, Michael Kristensen ; Radiosymfonikerna du Danemark,  Schønwandt (Dacapo 2007) ./+ .
→ Beaucoup de danses légères dans cette anthologie, qui comporte l'intérêt d'inclure des extraits d'opéras qui ne sont pas disponibles au disque, comme la Petite Christine de Gade (chantée par Elming !) ou Il était une fois de Lange-Müller.

Thrane, Udbye, Haarklou, Ole Olsen, Apestrand, Elling, Borgstrøm, Eggen – « Ouvertures d'opéras norvégiens » – Opéra National de Norvège, Ingar Bergby (LAWO 2021) !!/+ **
→ Écume d'un patrimoine enfoui où se révèlent de véritables personnalités mélodiques et dramatiques (toutes sont de style romantique) – et enfin une seconde version de l'ouverture de Thora på Rimol, le chef-d'œuvre tétanisant de Borgstrøm !
→ Que ne rejoue-t-on cela sur les scènes de Norvège, puis partout ailleurs, fût-ce en traduction ! !!/++

TCHAIKOVSKY, P.I.: Snow Maiden (The) (Snegurochka) (Erasova, Archipov, Vassiliev, Russian State Chorus and Orchestra, Chistiakov) (Brilliant Classics, réédition sous licence 2018) !/++ *
→ Belle version incarnée et plutôt typée, d'une œuvre dans l'ensemble joliment décorative – mais les tourbillons de l'entracte du II restent franchement impressionnant !

Mussorgski – Extraits de La foire de Sorotchinski & La Khovanchtchina – Philharmonia Orchestra, Walter Susskind (réédition BNF)

ALFVEN, H.: Midsummer Vigil / Den forlorade sonen / Bergakungen / Festspel (Alfven, Westerberg) (1954-1957) (Swedish Society)
→ Direction pleine d'humour des danses du Fils prodigue par Alfvén lui-même !

 Lopez, Pitrès – Il était un petit navire, ballet pantomime – Orchestre Robert Lopez (BNF)
→ Musique de scène où la chanson est reprise à l'orchestre en mineur tourmenté !
→ En dématérialisé seulement : https://www.deezer.com/fr/album/13057310 .

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CANTATES PROFANES

Haendel – Apollo e Dafne, Armida Abbandonata – Kathryn Lewek, John Chest, Il Pomo d'Oro, Francesco Corti (PentaTone 2022) !/+ *
→ Armide fonctionne vraiment très bien, et l'accompagnement d'Il Pomo toujours aussi électrisant !  Vocalement, les voix (même John Chest que je trouve pourtant remarquable en salle !) sonnent un peu larges et amollies par rapport à la finesse des lignes écrites, mais tout le mondde tient très bien son rang.

Beethoven – Cantate sur la mort de l'empereur Joseph II, WoO 87 – Mullerova, Adlerová, Voraček, Chadima ; Prague Mixed Choir, South Bohemia Chamber PO, Jiří Petrdlík (Arcodiva) !!/. .
→ Des bouts de Fidelio (notamment la fin du II – hautbois amoureux et réjouissance). Chœur amateur à la technique vraiment sommaire (et pas toujours juste). Vu qu'il y a un peu de choix, autant éviter celle-ci.

Beethoven – Cantate sur la mort de l'empereur Joseph II, WoO 87 – Matthews, Mumford, Banks, Foster-Williams ; SFSO & Ch, Michael Tilson Thomas (SFSO) !!/+ *
→ Très bien.

Beethoven – Cantate sur la mort de l'empereur Joseph II, WoO 87 – Margiono, Verebely, (Ulrike) Helzel, (Clemens) Bieber, Shimell ; Deutsche Oper, Thielemann (DGG) !!/++ **
→ Contre toute attente, la version la plus vivante, d'assez loin. Shimell est particulièrement charismatique dans son grand récit.

Beethoven – Cantata on the accession of Emperor Leopold II – Ch. Schäfer, C. Bieber, von Halem ; Deutsche Oper, Thielemann (DGG) !/+ *

Gade – Erlkönigs Tochter – Junker, Weisser, Danish National Vocal Ensemble, Concerto Copenhagen, Mortensen (Dacapo 2018) !!!/+++ ***

Gade – Elverskud – Elmark, Dolberg, Paevatalu, Tivoli Concert Choir, Tivoli SO, Schønwandt (Dacapo) !!!/+ **

Gade – Elverskud, Échos d'Ossian, 5 mélodies – E. Johansson, Gjevang, Elming ; Danish NRSO, Kitayenko (Chandos) !!!/++ **

Gade – Korsfarerne (Les Croisés) – Rørholm, Westi, Cold ; Canzone Choir, The Camera Choir, Choir 72, Aarhus Music Students Chamber Choir, Aarhus SO, Frans Rasmussen (BIS 1990) !/+ *

Gade – Baldurs drøm, Fruhlings-Botschaft – Rørholm, Elming, Høyer ; Canzone Choir, Helsingborg SO, Rasmussen (Dacapo) !!/++ **

Bliss – Mary of Magdala + Meditations on a Theme by John Blow – Dame Sarah Connolly, James Platt ; BBC Symphony Chorus BBC Symphony Orchestra, Sir Andrew Davis (Chandos) ./+ .

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A CAPPELLA PROFANE

Alfvén – « Choral and Vocal Music » – Orphei Drängar, Robert Sund (BIS 1993) !/+ *
Voir ici.

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SACRÉ

Machaut – Messe de Notre-Dame – Organum, Pérès ./++ *
→ À la corse en effet…

(Manuel) Cardoso – Complete Masses, Vol. 1 – Choir Of The Carmelite Priory London, Simon Lloyd (Toccata Classics 2022) !!!/++ ***
→ Petit bijou de polyphonie Renaissance, particulièrement éloquent.

Pfleger – Sacred Cantatas (cantates latines) – Manfred Cordes (CPO) !!/++ **

Jeremiah Clarke : Ode on the Death of Henry Purcell / Purcell : Music for the Funeral of Queen Mary, Welcome to All the Pleasures… – album « Son of England » – Watson, Tamagna, Thompson, Buffière ; Les Cris de Paris, Le Poème Harmonique, Dumestre (Alpha 2017) !!/+++ **
→ La cantate de Clarke est une merveille de contrepoint souple et éloquent, très touchante !

Lalande – Dies iræ, Miserere, Veni Creator – Ensemble Correspondances, Daucé (HM 2022) !! / ++ **
→ Je n'ai pas vérifié les solistes. À l'oreille, je dirais Weynants, Richardot et Collardelle ?
→ Dommage, alors qu'il reste autant de motets inédits de Lalande, de réenregistrer toujours les mêmes – pas forcément les meilleurs au demeurant, témoin Jubilate Deo omnis terra, enregistré seulement sur un antique disque Erato avec la Grande Écurie dirigée par Colléaux, indisponible depuis des lustres alors que c'est une tuerie de bout en bout !
→ Une fois cette frustration exprimée, on ne peut que reconnaître les qualités de Daucé ici : il privilégie comme toujours la couleur et le climat de recueillement à la rhétorique verbale et au mouvement de danse. Je m'en plains quelquefois (ce n'est pas mon inclination), mais c'est ici superbement réalisé et très adéquat. Parmi les plus belles versions qu'on ait de ces motets, et le Veni Creator, qu'on entend moins souvent, est une petite merveille. On apprécie aussi ces solistes qui ne cherchent pas la singularité appuyée dans le timbre ou l'expression (sauf Richardot évidemment, mais elle se coule dans l'esprit général), comme s'ils faisaient un pas hors du chœur (ce qui est le cas, en réalité, même s'ils ont une carrière de soliste, ils chantent aussi leur partie chorale), ce qui procure une atmosphère d'humilité assez touchante.

Ramhaufski, Hochreither – « Festive Masses for Lambach Abbey » – St. Florianer Sängerknaben, Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Accent) !!/. *
→ Beaux contrepoints lents doublés aux sacqueboutes, même s'il faut supporter les petits braillards à l'autrichienne, pas les plus confortables à écouter !
→ Interprétation un peu discontinue (des 'blancs' entre les blocs orchestraux) et pas très dynamique, un peu déçu d'AAA ici !

Aumann – Requiem – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Pan Classics 2011) !/++ *

Jean-Noël HAMAL – Motets – Scherzi Musicali, Achten (Musiques en Wallonie 2021) !!!/+++ ***
→ (En particulier « Ah! si langet cor » et surtout l'architube coloraturé et tuilé « Miles fortis ».)
→ x10.

Beethoven – Messe en ut – M. Marshall, Wulkopf, Dallapozza ; Radio Bavaroise, Wand (1982, édité par Hänssler Profil en 2007) !!/++ **
→ Seconde version disponible par Wand (il en existe aussi une autre, plus ancienne, de la Radio de Cologne).
→ Concert qui n'est pas le plus gracieux ou le plus précis, mais porté par une force souterraine impressionnante.
 
Beethoven – Messe en ut – Audrey Michael, Bizineche, M. Schäfer, Michel Brodard ; Gulbenkian de Lisbonne, Corboz (Erato, réédition 2006) !!/++ **
→ Toujours cette belle ferveur propre à Corboz, qui emporte l'auditeur.

Beethoven – Messe en ut – Palmer, Watts, Tear, Keyte ; St. John's College Choir Cambridge, Academy of St. Martin in the Fields Orchestra, George Guest (Decca) !!/+ *
→ Petits braillards inclus, effet très étrange.

Beethoven – Messe en ut – Margiono, C. Robbin, Kendall, Miles ; ORR, Gardiner (Archiv, réédition 2015) !!/++ *
→ Hélas prise de son un peu lointaine et bouchée, qui limite le plaisir des instruments anciens.

Beethoven – Messe en ut – van Kampen, Danz, K. Lewis, Michel Brodard – Stuttgart Gächinger Kantorei, Stuttgart Bach Collegium, Rilling (Hänssler) !!/++ *
Toujours très bien mené, beau discours, un peu lisse peut-être par rapport à la réussite absolue de son Christ au Mont des Oliviers (ou de ses oratorios de Mendelssohn).

Loewe – Die Auferweckung des Lazarus – Eva Kirchner, Kammerloher, WDR, Froschauer (Capriccio 1997) !/. *
→ Plus opératique (dans le goût de Genoveva de Schumann), mais difficile de juger de ses qualités dans cette exécution assez molle – très bien chantée en revanche.
→ Couplé avec des chœurs a cappella intéressants, mais là un peu trop mollement exécutés pour pouvoir disposer d'un avis éclairé.

Loewe – Das Sühnopfer des neuen Bundes (Oratorio de la Passion) – Mauch, Malotta, Poplutz, A. Burkhart ;  Arcis-Vocalisten Munich, L'Arpa Festante, Thomas Gropper (Oehms 2019) !!/+++ ***
→ En réalité une Passion, où l'on retrouve toutes les caractéristiques du genre :  Évangéliste en récitatifs, chorals, chœurs d'action, airs solos (très brefs ici), on entend très bien la parenté avec Bach (et les oratorios de Mendelssohn).
→ Très bien écrit dans l'ensemble, beau romantisme apaisé, avec une veine mélodique régulièrement inspirée. On peut aussi relever quelques fulgurances, comme le chœur de libération « Nicht dieser, sonder Barabban ! » ou l'air d'alto « Ach seht, der allen wohlgethan », où l'empreinte du meilleur Bach (chœurs d'action de la Saint-Jean, Es ist vollbracht…) se fait vraiment sentir, mais transcrit dans l'univers sonore de Mendelssohn.
→ Exécution formidable : sur instruments anciens, une couleur de cordes incroyable (l'impression d'une grande lyre à archet…), particulièrement vivant et habité dans son texte (très intelligible), ses situations, ses formules musicales.
→ Bissé.

F. David – Le Jugement Dernier / 6 Motets religieux – Ch Radio Flamande, Brussels PO, Niquet (Singulares) !/+++ *

Moniuszko – « Sacred Choral Music » : Messe en la, motets – Musica Sacra Warsaw-Praga Cathedral Choir, Łukaszewski (DUX) !/+ *

Perosi – La risurrezione di Lazzaro (+ Il gran sasso d'Italia)    – Gavarini, Popescu, Puddu, Camastra, Guidotti ; I Polifonici, Nuova Cameristica di Milano, Sacchetti (Bongiovanni) !/. *

Perosi – La Strage degli Innocenti – Fons Amoris Coro, Carlo Coccia Symphony, Sacchetti (Bongiovanni) !/+ *

Alfvén – Herrans bön (The Lord's Prayer), Op. 15 – Iwa Sörenson, Brigitta Svendén, Christer Solen, Rolf Leanderson ; Stockholm Motet Choir, Storkyrkans Kor, Norrköping SO, Gustaf Sjokvist (Bluebell 1989) !/. *
→ Sorte de vaste motet de 45 minutes.

Paray – Messe pour les 500 ans de la mort de Jeanne d'Arc (Mercury) !/++ *
→ Bissé.

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SYMPHONIES FRANÇAISES

F. David – Symphonie n°3, poèmes symphoniques – Brussels PO, Niquet !/++ *

MESSAGER, A.: Symphony in A major / FAURÉ, G.: Allegro symphonique / FRANCK, C.: Symphonic Variations (Ferey, Orchestre Symphonique du Mans, Gendille) (Skarbo 2001) !!/++ **

Saint-Saëns – Symphonie n°3 – Dupré, Detroit SO, Paray (Mercury) !!!/++ ***
→ Mainte fois.

Saint-Saëns – Symphonie n°3 – Latry, ONF Măcelaru (Erato 2021) !!/+++ **

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AUTRES SYMPHONIES ROMANES

Perosi – Orchestral Music (Suite Venezia) – Bellasi, F. Pavone, Nuova Cameristica di Milano, Orchestra Sinfonica Stabile di Alba, A. Sacchetti (Bongiovanni) !!/. **
→ Très belles œuvres instrumentales, calmes et raffinées, plus subtiles que ses oratorios davantage tournés vers une expression épurée de la foi.
→ Bissé.

Martinucci – Symphonie n°2 en fa – Philharmonia, d'Avalos

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SYMPHONIES GERMANIQUES

Aufschnaiter – Dulcis Fidium Harmonia: symphoniis ecclesiasticis concinnata - opus 4 M. DCC. III – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Arcana 2019) !!!/+++ ***
→ Musique instrumentale jubilatoire, et jouée avec un allant irrésistible !

Haydn – « Haydn 2032, Vol.11 : Au goût parisien » Symphonies 2,24,82,87 – Kammerorchester Basel, Giovanni Antonini (Alpha 2022) !!/+++ ***
→ Oh les doublures de flûtes très grétrystes !  Très vivant et coloré, et la 24 est un délice méconnu !  Vivement recommandé.

Beethoven – Symphonies 6,7,8,9 – Le Concert des Nations, Jordi Savall (Alia Vox 2022) !!!/+++ ***
→ Du même niveau que le premier volume. Peut-être rien de très singulier ou surprenant, mais tout est porté à un tel niveau que c'est possiblement l'interprétation discographique la plus constante en termes de qualité superlative…
→ À distinguer en particulier : la précision et le timbre insolent des cordes (qui résonnent comme si tout était joué sur des cordes à vide, en particulier impressionnant dans les accords !), et le timbalier en furie (mais très musical, comme s'il jouait des thèmes).
→ J'apprécie aussi que malgré son caractère « musicologique » très affirmé, Savall ne cherche pas à remporter les records de vitesse façon Currentzis (ou, en concert, Rousset) : le final de la 7 est pris à un tempo qui permet d'entendre les volutes de cordes, la tension des progressions harmoniques du développement, les allègements poétiques du spectre… et ne se contente pas de faire sonner les accents de trompettes à chaque mesure (si l'on va trop près du tempo indiqué par Beethoven, c'est fatalement ce qui se produit).
→ Un vrai talent aussi, dans le détail, pour faire vraiment sonner les spécificités de texture et de couleur de chaque moment, Beethoven fait beaucoup alterner les masses, et Savall rend ces contrastes avec beaucoup de précision et de poésie.

Schubert – Fierrabras & Symphonie restituée – Venzago (2022) !/++ *
→ Pas une révélation, en particulier la symphonie restituée. Je n'ai pas encore lu les notes d'intention de Venzago pour voir si elles sont aussi fantaisistes de que sa narration fantasmagorique de la véritable Inachevée qui aurait été complète (il y a une notule sur le sujet…). Bonne exécution sinon, mais Venzago a fait mieux – dans l'Inachevée notamment !

Loewe – Symphonie n°1 en ré mineur – Philharmonie de Lorraine, Jacques Houtmann (UMG / DGG) !!/+ **

Gade – Symphonie n°3, Échos d'Ossian – Danish National, Hogwood (Chandos) (!!/++) **

Gade – Symphonies n°2 & 8, In the Highlands – Danish National, Hogwood (Chandos) (!/++) *

Mendelssohn, Meeresstille und glückliche Fahrt / Bruckner, Symphonie n°6 – MDR Leipzig, Rögner (Genuin, publication 2022) !!/+++ ***
→ Couplé avec l'Inachevée, la Pastorale et les Variations Mozart de Reger (tout cela me tente moins). Prise de son incroyable, on retrouve les qualités de fluidité, de clarté et de tension de Rögner, mais magnifiée par les timbres à la fois précis et typés de la Radio de Leipzig, et servie par une prise de son d'une vérité incroyable.

Brahms – Concerto pour violon, Symphonie n°1 – Degand, Cercle de l'Harmonie, Rhorer (NoMadMusic 2021) !!!/+++ ***
→ Formidables couleurs renouvelées, et dans le concerto, ce que tire Degand de cordes en boyaux est tout simplement hallucinant d'aisance et de musicalité. Versions majeures, et très différentes.

Mahler – Symphonie n°9 – Oslo PO, Jansons (Simax) !!!/++ **

Alfvén – Orchestral Music (Alfven Conducts Alfven 1932-1952) : Cantate pour les 500 ans du Parlement Suédois, Symphonies 3 & 4 – Royal Stockholm Philharmonic, Alfvén (Phono Suecia 1997) !!!/+++ ***
→ Versions par Alfvén lui-même, splendidement restaurées et publiées par Phono Suecia (on entend très bien le détail !), je crois qu'elles surpassent tout par leur caractère direct, net et emporté à la fois.
→ Sa longue vie nous permet de l'entendre diriger ses propres œuvres, et de profiter de l'humour avec lequel il dirige les danses du Fils prodigue, ou de la flamme qui habite son interprétation de sa cantate pour les 500 ans du Parlement Suédois, ce que vous trouverez chez lui de plus proche d'un opéra !  Il a aussi été capté dans ses symphonies (3 & 4) avec le Philharmonique Royal de Stockholm. Et je suis frappé de la vivacité de jeu, de la clarté du spectre, de l'exaltation du rebond et des références folkloriques dans la Troisième, avec une sorte d'emphase souriante et volontairement exagérée, comme un personnage d'opéra un peu grotesque qui chante sa chanson avec une pointe d'excès. Absolument délicieux, très différent, et réellement convaincant – probablement le compositeur à m'avoir le plus convaincu dans ses propres œuvres !  Quant à la Quatrième, très cursive (on croirait qu'il dirige Don Juan de R. Strauss, tant l'orchestre fulgure !), elle inclut la participation de la jeune… Birgit Nilsson !
→ Trissé.

Graener – Comedietta – Staatskapelle Berlin, Abendroth (Jube Classics) !!/++ **
Voir ici.

Graener – Œuvres orchestrales, vol.2 : Symphonie en ré mineur, Échos du royaume de Pan, Variations Prinz Eugen – Radiophilharmonie de Hanovre, W.A. Albert (CPO) !!!/+++ ***
Voir ici.
→ Bissé.
→ Prinz Eugen 7 fois.

Graener – Œuvres orchestrales, vol.3 : Comedietta, Variations sur un chant russe – Alun Francis (CPO) !!/++ **
Voir ici.

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SYMPHONIES DES ÎLES BRITANNIQUES

(William) Wordsworth – Symphonie n°7 (Orchestral Music, Vol. 4) – Liepaja SO (Toccata Classics 2022) ./+ .
→ Rien relevé de particulièrement remarquable lors de cette (première) écoute. Il faudrait réeessayer naturellement.

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SYMPHONIES SLAVES

(Moritz) Moszkowski – Orchestral Works, Vol. 3 – Sinfonia Varsovia, Ian Hobson (Toccata Classics 2022) !/++ *
→ Moins exaltant que les deux précédents volumes (que je recommande vivement aux amateurs de romantisme paisible).

Mosolov – Symphony No. 5 & Harp Concerto – Taylor Ann Fleshman, Moscou SO, Arthur Arnold (Naxos 2020) !!/++ **
→ Un délice tout particulier que ce concerto pour harpe très étrange, qui échappe totalement à l'esprit habituel de dialogue et de virtuosité apparente des concertos. J'y reviens souvent.

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SYMPHONIES NORD-AMÉRICAINES

Bernstein – Symphonie n°1 – Arctic PO, Ch. Lindberg (BIS)

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SYMPHONIES SUD-AMÉRICAINES

(Aurelio) Barrios y Morales – « Anthology of His Symphonies » – Orquesta Sinfónica de Coyoacán Nueva Era A.C., Rodrigo Elorduy (Sterling 2022) !!/++ **
→ Petite merveille d'un romantisme doux (et mexicain, mais absolument aucune couleur locale ici).
→ Bissé.

VILLA-LOBOS, H.: Symphonies Nos. 1 'O Imprevisto' and 2 'Ascenção' (São Paulo Symphony, Karabtchevsky) (Naxos 2017) !!/+ *
→ Quadrissé.

VILLA-LOBOS, H.: Symphonie No. 2 – SWR Stuttgart, St. Clair (CPO 2000) !!/+ *

VILLA-LOBOS, H.: Symphonies Nos. 3 'War' and 4 'Victory' (São Paulo Symphony, Karabtchevsky) (Naxos) !/+ *

VILLA-LOBOS, H.: Symphonies Nos. 6 & 7 (São Paulo Symphony, Karabtchevsky) (Naxos) ./+ .

VILLA-LOBOS, H.: Symphonies Nos. 8,9,11 (São Paulo Symphony, Karabtchevsky) (Naxos 2017) ./+ .

VILLA-LOBOS, H.: Symphonie No. 10 (São Paulo Symphony, Karabtchevsky) (Naxos) !!/+ .

VILLA-LOBOS, H.: Symphonie No. 10 – SWR Stuttgart, St. Clair (CPO 2000) !!/+ *

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AUTRES SYMPHONIES

Saygun – Symphonies 1 & 2 – Rheinland-Pfalz State Philharmonic Orchestra, Rasilainen (CPO) ./.  .
→ Toujours aussi peu discursif, vaste, errant, plat.

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POÈMES SYMPHONIQUES

Gade – « King Frederik IX Conducts the Danish National Radio Symphony » : Échos d'Ossian (Dacapo publication 2000)
→ Manque absolu d'entrain, ressemble à une marche militaire empesée, en fait de mystères battus par le vent des Hébrides…

Gade – Échos d'Ossian – Rheinland-Pfalz State Philharmonic Orchestra, Ole Schmidt (CPO 1995)
→ Sonneries très lentes, et équilibres de l'orchestre pas très beaux (ni timbres), mais beaucoup de vie dans les épisodes intermédiaires.

Gade – Échos d'Ossian – National de la Radio Danoise, Hogwood (Chandos) !!!/+++ ***

Arensky – Variations on a Theme of Tchaikovsky, Op. 35a (pour orchestre à cordes) – Moscow Symphony Orchestra, Kerry Stratton (Dorian Sono Luminus) ./. .

Dukas, L'apprenti Sorcier / Tchaïkovski, Casse-Noisette / Bach-Stokowski, Toccata & Fugue en rém – Bernard Herrmann (Decca) !/+ *

Novák – Toman et la Nymphe des bois – Hrůša (Supraphon) **

Novák – Nikotina – Brno PO, Jílek (Supraphon) !!!/++ ***

Ravel – La Valse, Le Tombeau de Couperin, Alborada del Gracioso, Une Barque sur l'Océan… – Stockholm RPO, Oramo (BIS 2022) !/+ *
→ Prise et jeu très clairs, mais je n'y trouve pas la plus-value spectaculaire des couleurs d'Oramo dans Elgar, Nielsen ou Sibelius, sans doute parce que Ravel est suffisamment précisément orchestré pour ne changer qu'à la marge d'une interprétation à l'autre.

Kienzl - Symphonic Variations on the Strassburglied (Zu Strassburg auf der Schanz) from the opera Der Kuhreigen op.109a (1925? pub. 1934) - Stuttgart Radio-sinfonieorchester,  Fritz Mareczek (archive YT)
→ Trissé.

Mantovani – Time Stretch – TM+, Cuniot (æon)

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CONCERTOS

Radolt – Concertos pour luth viennois – Hubert Hoffman, Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Challenge Classics 2008) !!/++ **

Telemann, Platti, Vivaldi & Geminiani – « Concerti all'arrabbiata » – Freiburger Barockorchester, Gottfried von der Goltz (Aparté 2011) ./. .
→ Écouté devant l'enthousiasme d'un compère ici présent, je n'ai à la vérité, comme je le redouté, pas perçu de différence notable avec les autres disques de ce genre : il y a même plus coloré, plus typé, plus virtuose… (Mais il faut dire que les Freiburger d'aujourd'hui, en particulier avec Goltz, me paraissent toujours assez lisses et léchés, pas vraiment ce que j'ai envie d'entendre dans des œuvres qui ne débordent déjà pas de surprises.)

Graupner – Ouvertures et Concertos pour chalumeaux – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Challenge Classics) !/++ *

Dittersdorf – Harp Concerto in A Major – Andrea Vigh, Budapest Strings, Béla Bánfalvi !!/. .

Haendel, Boïeldieu – Concertos pour harpe – Marisa Robles, ASMF, Iona Brown (Decca) !!/. *

Haendel, Dittersdorf, Boïeldieu – Concertos pour harpe – Claudia Antonelli, Innsbrucker KO, Hans Ludwig Hirsch (Arts 2012) !!/+ **

Davaux – Symphonie concertante mêlée d'airs patriotiques – Concerto Köln (Capriccio 1989) !!/+++ **

Davaux – Symphonie concertante mêlée d'airs patriotiques – Le Concert de la Loge Olympique, Chauvin (Aparté) !!/++ **

Dupuy – Concerto pour flûte n°1 – Collegium Musicum Copenhagen, Schønwandt (Dacapo 1997) !!/+++ **
→ Quadrissé.

Dupuy – Concerto pour basson en la mineur – Christian Davidsson ; Sundsvall ChbO, Niklas Willén !/++ *

Dupuy – Concerto pour basson en ut mineur – Sambeek ; Orchestre du Sud des Pays-Bas, Spering (YT) !!!/++ **

Dupuy – Concerto pour basson en ut mineur – Sambeek ; Suède ChbO, Ogrintchouk (BIS 2019) !!!/+++ ***

Bernhard Romberg – Concerto pour flûte en si mineur, Quintette pour flûte et cordes  – John Wion */. .
→ Interprétation à l'ancienne.

Bernhard Romberg – Concertos pour violoncelle 2 & 6, Rondo capriccioso – Raphael Wallfisch, London Mozart Pleyers, (CPO 2022) !/+ *
→ Le meilleur de Romberg est à chercher dans ses duos et surtout dans ses symphonies. Ses concertos, vaillamment gravés les un après les autres par CPO, restent de jolies pièces de virtuosité un peu galante.

Bernhard & Andreas Romberg – Ouverture Mendoza (A.), Ouverture de concert (B.), Violin Concerto No. 3, Cello Concerto No. 2 – Yury Revich, Lionel Cottet, Hofer Symphoniker, Luca Bizzozero
→ Comme toujours, Bernhard deux crans au-dessus.

Brahms – Concerto pour violon, Symphonie n°1 – Degand, Cercle de l'Harmonie, Rhorer (NoMadMusic 2021) !!!/+++ ***
→ Formidables couleurs renouvelées, et dans le concerto, ce que tire Degand de cordes en boyaux est tout simplement hallucinant d'aisance et de musicalité. Versions majeures, et très différentes.

Brahms – Concerto pour piano n°2 – Magaloff, Den Haag, Otterloo (VOX)
→ Déçu, très figé, assez lent, véritables césures entre les phrases, comme si tout le monde se découvrait le jour même de l'enregistrement. J'attendais mieux de cet équipage qui n'a produit que des merveilles !

Brahms – Piano Concertos 1 & 2 – Garrick Ohlsson, Melbourne Symphony Orchestra, Tadaaki Otaka (ABC Classics / MSO Live 2013) !!!/++ *

Röntgen, Amanda Maier, Brahms – Concertos pour violon – Cecilia Zilliacus ; Malmö Symphony Orchestra, Västerås Sinfonietta, Kristiina Poska (dB Productions 2022) !!/++ **
→ Maier est nettement plus marquante dans le beau romantisme simple de ses œuvres de chambre qu'ici. Le concerto en fa dièse mineur de (son mari) Röntgen, dont c'est la seule gravure que je connaisse (il existe un autre très beau concerto, en la mineur, chez Centaur).

Röntgen, Hubay, Chausson – Concertos pour violon : en lam, n°3, poème – Ragin Wenk-Wolf (Centaur 2006) !!!/++ ***
→ Le concerto de Röntgen est en particulier une merveille de caractère, qui vaut bien les grands standards connus. Comme pour ses sonates avec violon, Röntgen se distingue particulièrement avec cet instrument (alors que les concertos pour violoncelle ressemblent à Dvořák en moins exaltant, que les concertos pour piano et surtout les symphonies sont assez plats…).

Tchaikovski – Andante & Finale Op. 79 (arr. S. Taneyev for piano and orchestra) – Hoteev, Tchaikovsky Symphony, Fedoseyev (Hänssler réédition 2021) !/+ *
→ Final vraiment lent, qui ne lui fait pas gagner en légèreté. Sinon, bien sûr très articulé avec du grain, mais vraiment moins grisant que Glemser-Wit.

Tchaikovski – Troisième Concerto, Andante & Finale Op. 79 (arr. S. Taneyev for piano and orchestra) – Glemser, Polish National O Katowice, Wit (Naxos 1996) !!/++ ***
→ Bissé le concerto, trissé l'Op.79.

Boïeldieu, Saint-Saëns, Pierné, Renié – « French Concertos for Harp » – Xavier de Maistre !!/++ *

Sibelius, Stenhammar, Nielsen, Svendsen, (Daniel) Nelson – Romances & danses pour violon & orchestre – Zilliacus, Västerås Sinfonietta, Koivula (Intim Music 2004) !/++ *
→ Pas des chefs-d'œuvre, mais plaisir d'entendre le suraigu qui tinte chez Zilliacus, dans ce répertoire peu couru.

Bruch, Bloch, Ravel, Korngold – Kol Nidrei, From Jewish Life, 2 Mélodies hébraïques, Concerto en ut – Edar Moreau (Erato 2022) !!/+++ **
→ Grande version de Kol Nidrei !  Et réussites partout ailleurs, dont le rare concerto de Korngold. Décidément Moreau, après Offenbach-Gulda, nous offre du neuf de grand intérêt !
→ Bissé.

Mosolov – Symphony No. 5 & Harp Concerto – Taylor Ann Fleshman, Moscou SO, Arthur Arnold (Naxos 2020) !!/++ **
→ Un délice tout particulier que ce concerto pour harpe très étrange, qui échappe totalement à l'esprit habituel de dialogue et de virtuosité apparente des concertos. J'y reviens souvent.


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CHAMBRE : VENTS ET CORDES

Schubert – Octuor + Quartettsatz – Edding SQ, Northernlight (Phi) !/++ *
→ Sur instruments anciens (issus de l'Orchestre des Champs-Élysées, vu le label ?), très vivant et fluide.

Spohr, Beethoven – Nonette, Septuor – Linos Ensemble (Capriccio 1993) !/++ *

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QUINTETTES À CORDES

Gade – Chambre vol.4 : Quatuor en fam, Quintette à cordes en fam, Novelettes clar pia – MidtVest Ensemble (CPO 2019) (!/+++) *

Brahms – Quintette à cordes 1 – Budapest SQ (Sony)

Taneïev – Intégrale des Quintettes – Martinů SQ, Olga Vinokur (Supraphon) !!!/++

Schillings – Quatuor & Quintette à cordes – (CPO) (!!!/+++) ***

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QUINTETTES PIANO-CORDES

Arensky – Quatuors 1 & 2, Quintette piano – Ying SQ (Dorian Sono Luminus) !!!/++ ***
→ Le final du 2 est fondé sur le même thème russe qui sert au couronnement de Boris Godounov et au final du Septième Quatuor de Beethoven. L'intégration de la thématique populaire dans les formes sonates, variations et fugatos est vraiment réjouissante chez Arenski !

TANEYEV, S.I.: Piano Quintet, Op. 30 / Piano Quartet, Op. 20 (Yudina, Beethoven Quartet) (1953-1957) (RCD) !!!/+++ ***
→ Versions très engagée comme on pouvait s'y attendre. En particulier dans les mouvements lents (l'adagio du quatuor, avec ses contrastes volubiles, tétanisants…).

Taneïev – Intégrale des Quintettes – Martinů SQ (Supraphon) !!!/+++ ***
→ Très belle version intense, et quelles œuvres !  La marche obstinée et poétique du quintette avec piano, le premier mouvement foisonnant du quintette à deux violoncelles, l'adagio expansif très intense du quintette à deux altos… !

TANEYEV, S.I.: Chamber Music - Piano Quintet / Piano Quartet / Piano Trio (Zassimova, Breuninger, Krznaric, Heichelbech, Lörcher) (CPO) !!!/++ **
→ Version très allemande, un peu sage mais avec de beaux timbres équilibrées, et non dénuée d'intensité. Œuvres très marquantes (les mouvements lents sont absolument extraordinaires), très au-dessus des quatuors ou des symphonies, à mon sens.

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AUTRES QUINTETTES

Andreas Romberg – 3 Quintettes à flûte, violon, 2 altos, violoncelle – Ardinghello Ensemble (MDG) !/+ *

Dupuy – Quintette pour basson et cordes et la mineur « A Bassoon in Stockholm... » – Agrell (BIS 2016) !/+ *
→ Couplé avec du Berwald.

Baermann, Rejcha – Quintettes avec clarinette – Karl Schlechta, Maggini SQ (SWR Classics Archive, publication 2017) !!/+ **

Brahms – Quintette clarinette & cordes – Budapest SQ (Sony) !!!/++ *

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QUATUORS À CORDES

Haydn – Quatuors Op.1 n°1,2,3,4 – Kodály SQ (Naxos) !!/++ **
Haydn – Quatuors Op.1 n°5,6 + Op.2 n°1,2 – Kodály SQ (Naxos) !!/++ **
Haydn (ou Hoffstetter) – Quatuors Op.2 n°2,5 + Op.3 n°1,2 – Kodály SQ (Naxos) !!!/++ **
Haydn (ou Hoffstetter) – Quatuors Op.3 n°3,4,5,6 – Kodály SQ (Naxos) !!!/++ **

Haydn – Quatuors Op.20 n°5, Op.33 n°5, Op.54 n°2, Op.76 n°6, etc. – Hanson SQ (Aparté 2019) !!/++ **

Haydn – Quatuors Op. 76 n°1,2,3,4,5,6 – Takács SQ (Decca 2004) !!!/+++ ***
→ Bissé.

WOLFL, J.: String Quartets Op.4 1-3 (Authentic SQ) !/+ *

WOLFL, J.: String Quartets, Op. 4, No. 3, Op. 10, Nos. 1 and 4 (Quatuor Mosaiques) (Paladino Music) !/++ *

Beethoven – Quatuor n°8 – Takács SQ (Decca) !!!/++ **

Schubert – Intégrale des  quatuors à cordes – Quatuor Modigliani (Mirare 2022) !!!/+++ ***
→ Beaux sons boisés, élancés au point qu'on croirait presque entendre des vents ; très allant, quatuors de jeunesse traités avec beaucoup de sérieux et d'investissement.
→ Les 14 et 15 sont d'une insolence insensée. Seul le 13 m'a paru sensiblement en deçà des meilleures propositions de la discographie. Le reste saisit. Intensément.
→ Voilà une intégrale qui rejoint, dans un goût plus chaleureux et tendu, la pointe-de-diamant des Diogenes, la lumière exaltée des Leipziger, la netteté des Verdi, parmi les grandes intégrales qui prennent ce corpus au sérieux…
→ Prise de son fantastique, on entend merveilleusement le fondu mais aussi chaque voix très distinctement, ce qui est très rare, même assis au premier rang. Mirare a en outre fait le choix d'une réverbération ample et agréable, avec un petit côté cathédrale qu'on n'a jamais dans une salle de spectacle !
→ Bissé.

Schumann – Quatuors – Modigliani SQ !!/++ **

Gade – Chambre vol.4 : Quatuor en fam, Quintette à cordes en fam, Novelettes clar pia – MidtVest Ensemble (CPO 2019) (!/+++) *

Franck – Quatuor en ré – Danel SQ (CPO) !/+ *

Franck – Quatuor en ré – Petersen SQ (Phoenix) !/+ *

Franck – Quatuor en ré – Zaïde SQ (NoMadMusic) !/. .

Franck – Quatuor en ré – Ysaÿe SQ (Ysaÿe) !/. .

Brahms – Quatuors à cordes 1,2,3 – Budapest SQ (Sony)

Dvořák – Quatuor 8 – Panocha SQ (Supraphon) !!/. .
→ Un peu déçu par la petite placidité et le son pas très typé.

Dvořák – Quatuors 8 & 10 – Albion Quartet (Signum) !!/*
→ Beaucoup de douceur et de musicalité, très réussi.

Dvořák – Quatuors 8 & 11 – Vlach SQ Prague (Naxos) !!/++ **
→ Dans ce qui sont (avec le 9 et le 10) les meilleurs quatuors Dvořák (à mon gré), en tout cas ceux dont les développements soutiennent le mieux l'intérêt et surprennent suffisamment pour ne pas paraître laborieux, très belle surprise que d'entendre, sur un Naxos de cette période, la meilleure maîtrise instrumentale et le son le plus typé de ce rapide parcours discographique !

Arensky – Quatuors 1 & 2, Quintette piano – Ying SQ (Dorian Sono Luminus) !!!/++ ***
→ Le final du 2 est fondé sur le même thème russe qui sert au couronnement de Boris Godounov et au final du Septième Quatuor de Beethoven. L'intégration de la thématique populaire dans les formes sonates, variations et fugatos est vraiment réjouissante chez Arenski !

Perosi – Quatuors à cordes 1 à 3 – Ensemble L. Perosi (Bongiovanni) !!/. **
→ Ça ne joue pas tout à fait juste, et on sent que les musiciens manquent un peu de liberté technique, mais interprétations tout à fait honorables de ce très beau corpus postromantique, riche et bien écrit !

Schillings – Quatuor & Quintette à cordes – (CPO) (!!!/+++) ***

Ginastera n°1, Halffter Ocho Tientos, Bartók n°2 – « Terra » – Cuarteto Quiroga (Cobra Records 2017) !!!/+++ ***

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CHAMBRE : QUATUORS PIANO-CORDES

TANEYEV, S.I.: Piano Quintet, Op. 30 / Piano Quartet, Op. 20 (Yudina, Beethoven Quartet) (1953-1957) (RCD) !!!/+++ ***
→ Versions très engagée comme on pouvait s'y attendre. En particulier dans les mouvements lents (l'adagio du quatuor, avec ses contrastes volubiles, tétanisants…).

TANEYEV, S.I.: Chamber Music - Piano Quintet / Piano Quartet / Piano Trio (Zassimova, Breuninger, Krznaric, Heichelbech, Lörcher) (CPO) !!!/+ *
→ Version très allemande, un peu sage mais avec de beaux timbres équilibrées, et non dénuée d'intensité. Œuvres très marquantes (les mouvements lents sont absolument extraordinaires), très au-dessus des quatuors ou des symphonies, à mon sens.

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TRIOS AVEC PIANO

Beethoven, Ries, Punto, Danzi – « Horn and Piano: A Cor Basse Recital » – Teunis Van Der Zwart, Alexander Melnikov (2022) !!/+++ **
→ Délicieux, entraînant, en particulier Ries et Danzi, avec le pianoforte particulièrement savoureux de Melnikov… Les timbres naturels se fondent remarquablement.

Reinecke – Trios piano-cordes – Trio Hyperion (CPO 2022) !/+ *
→ Assez brahmsiens, en moins aventureux dans la forme et les rythmes (m'a-t-il semblé en première écoute et à l'oreille seule). Le Premier est très beau.
→ Inclut un arrangement pour trio du Triple concerto de Beethoven… on ne perd pas beaucoup en supprimant l'orchestre de toute façon, mais l'œuvre ne se révèle pas plus dense pour autant.

Reinecke – Trios pour clarinette, alto & piano, 3 Phantasiestücke pour alto & piano – Carol Robinson, Pierre Lénert, Jeff Cohen !/+ *

Ernest Moeran – Chamber Music – Fidelio Trio (Resonus Classics 2022) !!/++ **
→ Très belles pièces, très marquées par Fauré et le jeune Debussy pour le Trio, par le Debussy de maturité pour la sonate violon-piano.

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CHAMBRE : PETITS ENSEMBLES BAROQUES

Bertali – Prothimia Suavissima (Sonates à 3 ou 4) – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Arcana) !!/++ **

Aumann – Chamber Music in the Abbey of St. Florian – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Challenge Classics 2022) !!/+++ ***
→ Du baroque viennois, assez différent de ce qu'on entend d'ordinaire, et tout à fait passionnant, dans une interprétation particulièrement vivifiante !

Biber – Sonatae Tam Aris Quam Aulis Servientes (Sonates à 5 ou 8) – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor (Arcana) !/++ *

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CHAMBRE : TRIOS À CORDES

 Bernhard Romberg – Trio à cordes n°1 en mi mineur (1824) – par Christoph Dangel, Katya Polin, Stefan Preyer ./. .
→ Sur instruments d'époque.

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DUOS : FLÛTE-PIANO

Elfrida Andrée, Amanda Maier, Laura Netzel – « Breaking Waves - Flute Music by Swedish Women Composers » – Paula Gudmundson, Tracy Lipke-Perry (MSR Classics 2019) !!

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DUOS À CORDES

Polevá – Gulf Stream dans sa version alto-violoncelle – Катерина Супрун, Золтан Алмаши (YT 2012)
→ Mélange le Prélude de la Première Suite pour violoncelle de Bach avec l'Ave Maria de Gounod (prévu pour se fixer sur le Premier Prélude du Clavier bien tempéré), puis inverse les instruments (violoncelle en harmoniques pour faire l'aigu). Amusant et plaisant, mais la compositrice va autrement loin dans son quatuor piano-cordes paru l'an passé chez Naxos, et vanté ici même !

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DUOS : VIOLON-PIANO (ou continuo)

Pandolfi Mealli – Pandolfi Mealli: Sonate à violino solo (Opera terza) – Ars Antiqua Austria, Gunar Letzbor !/++ *

Koessler – Sonate violon-piano en mim, Airs hongrois… – Wallin, Smirnof (VMS Musical Treasures 2021) !!/++ **

Ernest Moeran – Chamber Music – Fidelio Trio (Resonus Classics 2022) !!/++ **
→ Très belles pièces, très marquées par Fauré et le jeune Debussy pour le Trio, par le Debussy de maturité pour la sonate violon-piano.

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DUOS : VIOLONCELLE-PIANO

Bernhard Romberg – The Complete Cello Sonatas – Hannah Holman, Réne Lecuona (Blue Griffin 2013) !!/++ **
→ Très proche de celles de Beethoven, avec une vituosité plus affichée et un sens mélodique plus séduisant (un peu plus souple, il faut dire qu'on est dans la génération d'après !).

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DUOS : 2 PIANOS

MAHLER, G.: Symphony No. 2 (arr. B. Walter for 2 pianos) (Maasa Nakazawa, Athavale) (Naxos 2016) ./. .
→ Pas grisé par la transcription (on entend le squelette, mais il manque beaucoup de détails et d'effets) ni par l'interprétation (attaques assez épaisses, un peu molles), ni par le résultat global – vraiment pas du tout le même frisson (et je ne suis pas suspect de ne pas donner crédit aux réductions !) que la symphonie d'origine.
→ Pour autant, très intéressant de l'entendre différemment, on y prend beaucoup de plaisir. Curieux d'entendre une transcription mieux faite et surtout une interprétation plus survoltée, plus engagée dans l'évocation symphonique.

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SOLOS : VIOLON

Bach – « Sei solo », 3 sonates & partitas pour violon – Kavakos (Sony 2022) !!!/+

Bach – Sonates & partitas pour violon, volume 1 – F.-P. Zimmermann (BIS 2022) !!!/++

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SOLOS : VIOLONCELLE & VIOLE DE GAMBE

Bach, Abel – Suites pour violoncelle sur viole – Lucile Boulanger (2022) !/++ *

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SOLOS : LUTH, THÉORBE, GUITARE…

R. Ballard – Premier livre de luth – Richard Kolb (Centaur 2019) !!!/+++ ***

J.S. Bach – Sonatas & Partitas For Lute – Hopkinson Smith

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SOLOS : ORGUE

ROSSI, M.: Toccate e correnti (Music for Organ and Harpsichord) (Castagnetti) (Brilliant 2015) !!/++ **
→ Folies chromatiques (et sur tempérament inégal, ça frotte !) des toccate 3 et surtout 7 !

Titelouze, Racquet, L. Couperin, Jullien, Grigny, Corrette – Œuvres pour orgue – Cathédrale de Rodez, Frédéric Muñoz !!!/+++ ***

°Pachelbel – Vol.1 : Musicalische Sterbens-Gedancken, Ciaccona in F Major (POP 15) – Christian Schmitt (CPO)

Pachelbel – Vol.2 : Chaconne en sol – Essl (CPO) !!!/+++ ***

Pachelbel – Vol.3 : 3 Ciaccone – Belotti, J.D. Christie (CPO) !!/+ *

Daquin, Dandrieu, Corrette… – Noëls français pour orgue (Aux grandes orgues de la cathédrale d'Auch) (Stereo Version) – Marie-Claire Alain (BNF) !!/++ **

Franck – 3 Chorals – M.-C. Alain (Erato 1976, réédition Apex) !!/++ **
→ Registration peu éclatante, mais très belle poussée constante, qui tient en haleine !

Franck – 3 Chorals – Saint-Ouen de Rouen, Lecaudey (Pavane Records) !!/+ *

Franck – 3 Chorals – Guillou (Dorian Sono Luminus) !!/++ **
→ Qualité de la registration qui permet une réelle progression marquante !

Franck – 3 Chorals – Latry (DGG) !!/++ **
→ Version aux timbres assez brillants, conduite avec ampleur mais véritable sens de la progression, de grandes respirations amples qui font impression.

Franck – 3 Chorals – Saint-Ouen de Rouen, Joris Verdin (Ricercar) !!/+ *
→ Vif, mais vraiment des fonds bouchés de Cavaillé-Coll, qui gâchent un peu tout…

Töpfer  – Sonate en ré mineur – Die Ladegast-Orgel der St. Johannis-Kirche zu Wernigerode, Reinhardt Menger (FSM 1992) ./¤ .
→ Me fut chaudement recommandé, mais pas beaucoup aimé. J'ai même plutôt détesté le premier mouvement. L'impression que les harmoniques sont beaucoup trop hautes dans les mutations du plein-jeu, pour commencer ?
→ Quant à l'écriture, ce ressemble vraiment à de l'orgue pour organiste, avec les grandes figures inspirées de JS ou CPE, mais lissées par un langage Mendelssohn-Merkel et une forme simple plutôt Dubois. Ça m'évoque assez ce que j'aime pas chez Bach (tous ces intervalles moches de seconde mineure), et vraiment ce que n'aime pas chez les imitateurs de Bach. Un côté pièce de démonstration pour facteur-accordeur.
→ Le mouvement lent est beau, joliment mélodique, entre Widor et Dubois, ni indigne ni très singulier.
→ Dans le dernier mouvement, mêmes problèmes que le premier (en plus je trouve l'ensemble joué très mollement, c'est pas toujours synchronisé entre les mains et les sections, ça bave un peu de partout) : l'instrument, les pseudo-bachismes, les unissons brucknériens mais moches, les résolutions téléphonées… Je retenterai, vraiment pas concluant cette fois !

°ANDRIESSEN, H.: Chorals Nos. 1-4 / Sonata da chiesa / A Quiet Introduction / Offertorio / Thema met variaties (Saunders) (Brilliant 2015) ./. .
→ Une seule pièce marquante, pas le meilleur Andriessen, comme souvent à l'orgue chez les compositeurs non spécialistes.

Karg-Elert – Intégrale de l'œuvre pour orgue vol.1 : Chorale Improvisations Op.65, Livre 6 – Stefan Engels (Proprius) !! **
→ Vraiment du choral retravaillé, très convaincant ! (Et chez certains, comme le n°39, du sacré contrepoint agité !)

Karg-Elert – Intégrale de l'œuvre pour orgue vol.11 : Chorale Improvisations Op.65, Livres 5 & 6 – Stefan Engels (Proprius) !! **
→ De petites merveilles organistiques, belles harmonies dans un style libre qui évoque en effet l'improvisation. Énormément de charme.

Karg-Elert – Intégrale de l'œuvre pour orgue vol.12 : 3 Impressions, Hommage à Haendel, Partita n°1 – Stefan Engels (Proprius 2021) !! **
→ Inclut les monumentales variations d'Hommage à Händel, qui se déploient lentement de façon assez spectaculaire.

Messiaen – Messe de la Pentecôte, Livre d'orgue (Intégrale pour orgue, vol.5) – Rudolf Innig (MDG) !!/+++ ***

Petr EBEN – Job – Howard Lee (récitant), David Titterington (orgue, David Titterington & Howard Lee (Multisonic 1992) !!!/+++ ***

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SOLOS : CLAVECIN

ROSSI, M.: Toccate e correnti – Vartolo (Naxos) !!/+ *

ROSSI, M.: Toccate e correnti (Music for Organ and Harpsichord) (Castagnetti) (Brilliant 2015) !!/ ++ **
→ Folies chromatiques (et sur tempérament inégal, ça frotte !) des toccate 3 et surtout 7 !

Haendel – Intégrale des Suites – Cuckston (Naxos) !/++ **

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SOLOS : PIANO

Beethoven – Sonate 14 (final) – Valentina Lisitsa (YT)

Moussorgski – Tableaux d'une exposition – Valentina Lisitsa (enregistrement 2019, publication YT 2021) !! / +++ ***
→ La façon de timbrer de façon symphonique, de gérer la nudité des grands accords de la Porte de Kiev, est proprement stupéfiante.

Messiaen, Takemitsu, Léon Milo – « … à Olivier Messiaen », pièces pour piano et interludes acousmatiques (« soundscapes ») – Suzanne Kessler (Oehms 2013)
→ Je n'ai pas adoré les interludes acousmatiques, mais la classe bidouillée de Messiaen autour de Pelléas était assez amusante (collages de sections qu'il joue, détournant le texte ; ou encore accord qui résonne à l'infini pendant le cours reprend…), et les trois Regards remarquablement joués !

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MÉLODIES

Mélodies populaires anonymes XVIIe-XIXe – Lefilliâtre, Goubioud, Buffière ; Poème Harmonique, Dumestre (concert Besançon, France Musique 2021) !!!/+++ ***
→ Même programme qu'Aux marches du palais, mais avec Buffière au lieu d'Horvat comme basse, ce qui change les équilibres de façon intéressante (j'aime beaucoup les deux !).

Bonis, Polignac, Holmès, Viardot, Chaminade, Folville, Béclard d'Harcourt, Faye-Jozin, Ferrari – « Ombres », Women Composers of La Belle Époque – Laetitia Grimaldi (BIS 2022) !/++ **

Hahn, Debussy – Mélodies & Chœurs (Études Latines, Damoiselle Élue) – Karg, Brower, Behle, Nazmi ; G. Huber, Chœur de la Radio Bavaroise, Howard Arman (BR Klassik 2022) !!/++ *

Fauré (Mirages), Caplet (5 ballades françaises), Debussy (Beau soir), Ravel (Don Quichotte), Honegger (Petit cours de morale, Saluste du Bartas), Poulenc (2 Apollinaire, Parisiana), Roderick Williams (Les ténèbres de l'amour) – Roderick Williams, Roger Vignoles (Champ Hill Records, 2022) !!/++ ***
→ Quel bouquet incroyable de cycles très rares !  Et de qualité. Et interprétés avec une précision d'intentions remarquable, pas simplement chantés à la volée. (L'œuvre de R. Williams est très convaincante et se fond très bien dans l'esthétique des autres cycles.)
→ Le répétiteur n'a pas bien bossé, il y a quelques mots faux (« qui g(i)eint, qui pleure »). Sinon le français est vraiment bon, et l'artiste toujours aussi marquant. (Le timbre est moins beau en français, je crois.)

Paul Delmet – Chansons – Enguerrand Dubroca, ténor ; Yuko Osawa, piano (émission France Musique 2022) !/+ *
→ Tiré d'une intégrale en cours des chansons de Paul Delmet, abordée d'un point de vue sérieux / lyrique, avec beaucoup de bonheur.

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LIEDER

Kienzl - Lieder - Dagmar Schellenberger, Peter Stamm (CPO 2000) !/++ *

Mélodies viennoises avec petit ensemble – Groissböck (Gramola 2022) !/+ *

Graener – 5 Lieder zu Gedichten von Borries von Munchhausen: No. 3. Der alte Herr – Heinrich Schlusnus, Sebastian Peschko (chez Documents, label japonais)

Graener – Der Rock (d'un cycle de Morgenstern) – Prey (DGG)

Graener – Neue Galgenlieder von Christian Morgenstern, Op. 43b – Herman Wallén, Kristjan Randalu (chez Antes)

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MÉLODIES D'AUTRES NATIONS

Carafa – Calipso (dans il salotto vol.2) – Enkelejda Shkosa, David Harper (Opera Rara)

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CHANSON

« Nénufar, t'as du r'tard » – (Marche officielle de l'Expo coloniale de 1931) !!/++ **
→ Le racisme le plus franc, mais dans sa version souriante, peut-être même pas conscient de lui-même. Au demeurant, j'aime beaucoup cette chanson musicalement, très entraînante (le chœur !)… fascinante aussi : chaque vers mènerait aujourd'hui à de la prison ferme (et non sans fondement !).

album « Germaine Montero chante, vol.1 : Béranger, Bruant, Ducreux » !!/++ **

« Te souviens-tu » – Éric Amado (BNF) ***

album Éric Amado, succès & raretés **

« Ulysses » de Cristina Branco !!/+++ ***

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FOLK

Simon & Garfunkel – « Live From New York City, 1967 » !/++ *
→ Beaux effets du chant à deux en homorythmie, sur accompagnement très sobre.

Bert Jansch – album Bert Jansch !/++ *
→ Sobre et plutôt mouvant et personnel.

Bruce Springsteen – Nebraska !/+ .
→ Un peu rauque et américain mainstream.

Anne Briggs – album Topic ./+
→ Belle voix typée et pincée, mais un peu homogène dans les accompagnements et répétitif. Parties a cappella un peu longues.

Comus – album First Utterance ./.

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ACOUSMATIQUE

Léon Milo, Messiaen, Takemitsu – « … à Olivier Messiaen », pièces pour piano et interludes acousmatiques (« soundscapes ») – Suzanne Kessler (Oehms 2013)
→ Je n'ai pas adoré les interludes acousmatiques, mais la classe bidouillée de Messiaen autour de Pelléas était assez amusante (collages de sections qu'il joue, détournant le texte ; ou encore accord qui résonne à l'infini pendant le cours reprend…), et les trois Regards remarquablement joués !

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lattès

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__Nouveautés à écouter :__
Shostakovich – String Quartets No. 3 & No. 8 – Novus Quartet (Aparté 2022)
philippe pierlot hume meditation
ancerl live
R. Strauss & Reger: Lieder mit und ohne Worte, Georg Michael Grau
Handel: Semele, Choeur de Chambre de Namur, alarcon
Gloria Dresdensis, Dresdner Barockorchester
D'Agincour: Pièces de clavecin, 1733 - Vol. 1, Stéphane Béchy
Araja: Capricci; Pellegrini: Sonatas ; Enrico Bissolo
Pohádka - Tales from Prague to Budapest ; Laura van der Heijden
Beethoven: Rondino & Wind Octet - Mozart: Serenade ; MIB Wind Ensemble
A London Symphony, Lynn Arnold (pour pianos 4M et orgue)
Chapí: String Quartets Nos. 3 & 4 ; Cuarteto Latinoamericano
Arcadelt: Sacred Works ; Josquin Capella
Baroque Christmas Cantatas from Central Germany II ; Anne Stadler
kenins symphonies

__À écouter :__
Ginastera mélodies Milena, Toccata terza de Michelangelo Rossi par francesco cera (tempéraments), Quiroga disco, karg elert piano, Sonate Op. 25 n° 2 (« Vent de nuit »)  de Medtner, Koechlin basson 3 pièces opus 34, dialogos dalmatica & josaphat, töpfer & merkel, rhorer brahms 1, hillborg beast sampler,
Martinů, Foerster & Novák: Cello Concertos par Jiri Barta, Jakub Hrusa, Prague Philharmonia
KODALY: String Quartets Nos. 1 and 2 Label    Hungaroton
chausson concert faust melnikov
- GADE: Echoes of Ossian / Hamlet Overture / A Summer's Day in the Country / Holbergiana Suite
- gade chœurs sacrés chandos 
- gade schiotz https://www.nml3.naxosmusiclibrary.com/catalogue/item.asp?cid=DACOCD456&workId=37665
- gade vilhelm herold https://www.nml3.naxosmusiclibrary.com/catalogue/item.asp?cid=NI7880&workId=37665
- Messe en ut : Beecham, Wand, Corboz, Marriner, Rilling, Tilson-Thomas, Hickox,  Gardiner, Chailly, Gielen…
- octuor schubert nvelles vsns : hoeprich, linos, nordic, Academy of Ancient Music Chamber Ensemble…
- wand
- elming, rorholm, cold, schonwandt, dausgaard…
- bliss marie magdala
- haendel cuckston
- kirchschlager heggie
- Ernst Bacon, Trio avec piano n°2 - Lincoln Trio
- intégrale lalande
- intégrale grétry (messe)
- disco zilliacus
- disco Ragin Wenk-Wolf

__À réécouter :__
- kuhlau, réécoutes Bru Zane, nielsen commotio flamme, toch, brahms quats, messiaen livre,
- SINIGAGLIA, L.: String Quartet Works (Complete), Vol. 1 - String Quartet, Op. 27 / Brahms Variations / Hora Mystica (Archos Quartet), Messiaen: Complete Organ Works Vol. 5
- gade symphs
https://www.nml3.naxosmusiclibrary.com/catalogue/item.asp?cid=CHAN9767&workId=148371
- gade comala
- ROMANTIC HARP CONCERTOS
- Harp Music - REINECKE, C. / SAINT-SAËNS, C. / GERVAISE, C. / PIERNÉ, G. (Middle Ages to the 20th Century) (Michel, Mildonian, Jamet, Storck, Polonska)
- lambert mauillon




lattès




Cette masse de belles parutions récentes ou anciennes devrait vous permettre de patienter quelques semaines avant une prochaine livraison de ce genre ! 

dimanche 3 octobre 2021

Le grand tour 2021 des nouveautés – épisode 7 : Brixi, Wölfl, Florence Price, Miaskovski, Marais à l'opéra, tout Schumann, Mahler bricolé, Lipatti compositeur…


Un mot

Comme pour les précédents épisodes : petit tour des nouveautés que j'ai écoutées – et j'en profite pour partager les autres disques entendus durant cette période, parce qu'il n'y a pas que le neuf qui vaille la peine.

Un mois et demi (de calme été, en plus) s'est seulement écoulé, mais la somme accumulée est à nouveau assez considérable – alors même que j'ai passé beaucoup plus de temps au concert, et pas encore écouté bon nombre de nouveautés… que de disques à parcourir !  Je vous fais la visite ?

Parmi les trouvailles de la période, vous rencontrerez des versions extraordinaires d'œuvres déjà connues : Alcione de Marais, le Quintette à cordes de Schubert, (tous) les lieder de Schumann, La Princesse jaune de Saint-Saëns, ses Quatuors, son Second Trio, Roméo & Juliette de Tchaïkovski, Le Sacre du Printemps, Mahler relu de façon grisante par le Collectif9… mais aussi des portions mal connues du répertoire (quoique de très haute volée !), comme la musique sacrée (pragoise) de Brixi, les concertos pour piano de Wölfl, les pastiches et arrangements de Karg-Elert, les symphonies de Florence Price, les mélodies de Miaskovski ou celles de Dinu Lipatti !

Tout ceci se trouve aisément en flux (type Deezer, gratuit sur PC ; ou sur YouTube) et en général en disque. Il faut simplement pousser la porte.

(Pardon, mes présentations de titres ne sont pas toutes normalisées, il faut déjà pas mal d'heures pour mettre au propre, classer et mettre un minimum en forme toutes ces notes d'écoutes. Il s'agit vraiment de données brutes, qui prennent déjà quelques heures à vérifier, réorganiser et remettre en forme, je n'ai pas le temps de tout peaufiner si je veux aussi écrire d'autres notules un peu plus denses côté fond.)

miaskovski


La légende

Les vignettes sont au maximum tirées des nouveautés. Beaucoup de merveilles réécoutées ou déjà parues n'ont ainsi pas été immédiatement mises en avant dans la notule : référez-vous aux disques avec deux ou trois cœurs pour remonter la trace.
(Un effort a été fait pour classer par genre et époque, en principe vous devriez pouvoir trouver votre compte dans vos genres de prédilection.)

Cette fois-ci, j'ai regroupé et encadré les nouveautés au début de chaque section, pour faciliter le repérage sans briser la disposition par genre.

♥ : réussi !
♥♥ : jalon considérable.
♥♥♥ : écoute capitale.
¤ : pas convaincu du tout.

(Les disques sans indication particulière sont à mon sens de très bons disques, simplement pas nécessairement prioritaires au sein de la profusion de l'offre.)

Le tout est classé par genre, puis par ordre chronologique très approximatif (tantôt la génération des compositeurs, tantôt la composition des œuvres, quelquefois les groupes nationaux…) au sein de chaque catégorie, pour ménager une sorte de progression tout de même.




alcione




A. Opéra


nouveautés
♥  Monteverdi – L'Orfeo – Ensemble Lundabarock, Höör Barock, Ensemble Altapunta, F. Malmberg (BIS 2021)
→ Belle version, douce, bien dite, pas très typée.

♥♥ Monteverdi – L'Orfeo – Contaldo, Flores, Bridelli, Quintans, Salvo Vitale ; ChbCh de Namur, Cappella Mediterranea, García Alarcón (Alpha 2021)
→ Des choix originaux, beaucoup de vie, mais un certain manque de voix marquantes. J'aime beaucoup les chanteurs, mais ils manquent un peu de charisme dans une discographie saturée de propositions très fortes (seule Quintans s'élève nettement au-dessus de ses standards habituels).
→ Orchestralement en revanche, de très belles trouvailles d'alliages, de tempo, de phrasé... quoique le tout soit un peu lissé par une prise de son avec assez peu de relief et de couleurs.
→ Aurait pu être très grand, et mériterait en tout cas grandement d'être entendu en salle !

♥♥♥ Marais – Alcione – Desandre, Auvity, Mauillon ; Le Concert des Nations, Savall (Alia Vox 2021)
→ Issu des représentations à l'Opéra-Comique, enregistrement qui porte une marque stylistique française très forte : dans la fosse, sous l'étiquette Concert des Nations propre à Savall, en réa:lité énormément de musiciens français issus des meilleures institutions baroques, spécialistes de ce style), et un aboutissement déclamatoire très grand – en particulier chez Auvity et Mauillon (qui est proprement miraculeux de clarté et d'éloquence).
→ Le résultat est donc sans rapport avec l'équipe catalane du fameux enregistrement des suites de danses tirés de cet opéra (1993), non sans qualités mais pas du tout du même naturel et de la même qualité de finition (instrumentale comme stylistique).

Paer – Leonora – De Marchi (2021)
→ Musique d'opéra bouffe encore très marquée par les tournures de Cimarosa et Mozart. Pas nécessairement de coups de génie, mais l'ensemble est constamment bien écrit, bien chanté et exécuté avec chaleur : il mérite le détour.

Bellini – I PuritaniCoburn, Brownlee, Zheltyrguzov, Kaunas State Choir, Kaunas City Symphony, Orbelian (Delos 2021)
→ Brownlee toujours impressionnant, mais moins d'éclat en vieillissant évidemment. Coburn très virtuose, voix bien ronde et dense, un peu lisse et égale pour moi (où sont les consonnes ?), mais objectivement très bien chantée. Le reste m'impressionne moins, même mon chouchou Orbelian, assez littéral et au rubato pas toujours adroit.

Wagner – Tristan und Isolde – Flagstad, Suthaus, Covent Garden, Furtwängler (Erato, resmatering 2021)
→ Bonne version, très studio (donc comme toujours vraiment pas le meilleur de Furtwängler, d'une toute autre farine sur le vif avec Schlüter, et Suthaus en feu), où l'on peut surtout se régaler du Tristan de Suthaus, remarquablement ample et solide, mais aussi beau diseur.

♥♥♥ Saint-Saëns – La Princesse jaune – Wanroij, Vidal ; Toulouse, Hussain (Bru Zane 2021)
+ Mélodies persanes (Constans, Fanyo, Pancrazi, Sargsyan, Boutillier…)
→ Ivresses. Des œuvres, des voix.
→ Révélation pour ce qui est de la Princesse, pas aussi bien servie jusqu'ici, et délices infinies de ces Mélodies dans une luxueuse version orchestrale, avec des chanteurs très différents, et chacun tellement pénétré de son rôle singulier !

Debussy – Pelléas & Mélisande – Skerath, Barbeyrac, Duhamel ; Querré, Baechle, Varnier ; ONBA, Dumoussaud (Alpha 2021).
→ Lecture très traditionnelle, plutôt « épaisse » de tous les côtés : orchestre un peu ample et tranquille, interludes en version courte, voix très lyriques (Skerath comme toujours ronde, en-dedans, opaque ; Barbeyrac chante à pleine voix ; Duhamel expressif mais un peu monochrome), j'ai surtout aimé Querré en Yniold, l'illusion de l'enfant est assez réussite avec cette petite voix droite.
→ Belle version dans l'ensemble, mais très opératique, peu de finesses textuelles ou de coloris nouveau à se mettre sous la dent.

Holst – The Perfect Fool – R. Golding, P. Bowden, M. Neville, Mitchinson, Hagan, BBC Northern Singers and Symphony, Ch. Groves (réédition Lyrita 2021)

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

Landi – La morte d’Orfeo – Elwes, Chance, van der Meel, van der Kamp ; Tragicomedia, Stubbs (Accent, réédition 2007)
→ Dans la veine des premiers opéras, assez statiques harmoniquement, mais beaucoup d’ensembles (chœurs homorythmiques, duos ou trios plus contrapuntiques…) viennent rompre la monotonie.
→ Plateau vraiment délicieux de voix claires, délicates, mélancoliques.

Marais – Alcione – Minkowski (Erato)

Campra – Tancrède – Schneebeli (Alpha)
→ Déçu à la réécoute, vraiment sage et même un peu terne. (Malgoire c'était bien mieux, malgré le vieillissement du style !)

Desmarest – Vénus & Adonis – Rousset (Ambroisie)

♥♥ Francœur & Rebel – Pirame & Thisbé – Stradivaria, D. Cuiller (Mirare)

Berlioz – Les Troyens (en italien), entrée d'Énée – Del Monaco, La Scala, Kubelik (Walhall)
→ Oh, « marque » l'aigu de « le dévorent ». Et essentiellement métallique, pas très impressionnant / insolent / expressif. Orchestre pas ensemble, solistes non plus, prosodie italienne qui oblige à quelques irrégularités de ligne.

Berlioz – Les Troyens, entrée d'Énée – Giraudeau, RPO, Beecham (Somm)
→ Chant léger et impavide, très étonnant (comme un personnage secondaire de Cocteau…), et le RPO à la rue (bouché, la peine).

¤ Berlioz – Les Troyens (actes I, II, V) – Davis I (Philips)

♥♥♥ Verdi – Stiffelio (acte II) – Regio Parma, Battistoni (C Major)
→ La version sans faute de ce bijou trop peu joué. Comme Traviata, un drame de mœurs contemporain (l'adultère de la femme d'un pasteur).

♥♥♥ VERDI, Rigoletto (en allemand) (Coertse, Malaniuk, De Luca, Metternich, Frick, Vohla, Cologne Radio Chorus and Symphony Orchestra, Rossi) (1956) (Walhall édition 2007)

♥♥♥ Verdi – Il Trovatore (I,II) – Bonynge

♥♥♥ Verdi – Il Trovatore (I,II,III) – Muti 2000

Verdi – Le Trouvère (en français) – Martina Franca

♥♥ Verdi – Un Ballo in maschera (en allemand) – Schlemm, Walburga Wegner, Mödl, Fehenberger, DFD (libre de droits)
→ Günther Wilhelms en Silvano, remarquable. Voix franches et bien bâties, orchestre très investi et aux inflexions très wagnériennes.

♥♥ VERDI, G.: Otello (Sung in German) [Opera] (Watson, Hopf, Metternich, Cologne Radio Chorus and Orchestra, Solti) (1958)
→ Hopf en méforme, Solti pas aidé par l'orchestre non plus.

♥♥ Foroni – Elisabetta, regina di Svezia – Göteborg (Sterling)
→ Démarre doucement, mais des élans conspirateurs remarquables !

Gounod – Romeo et Juliette (en suédois) –  Björling, Allard, d'Ailly ; Opéra de Stockholm, Grevillius (Bluebell)

♥♥♥ Nielsen – Saul og David (acte IV) – Jensen (Danacord)

♥♥♥ Nielsen – Saul og David – N. Järvi (Chandos)
 
Peterson-Berger – Arnljot – Brita Ewert, Bjorck, Einar Andersson, Ingebretsen, Gösta Lindberg, Leon Björker, Sigurd Björling, Sven Herdenberg, Sven d'Ailly ; Royal Swedish Opera, Nils Grevillius
→ Un peu sec-discursif pour de l'opéra essentiellement romantique. Pas bouleversé. Mais quelle équipe de chanteurs !




gens




B. Récital d'opéra

Une très belle livraison de nouveautés sur le mois écoulé, avec des propositions de répertoire très originales et construites !

nouveautés
♥♥♥ Lully, Charpentier, Desmarest – extraits d'Armide, Médée, Circé… – Gens, Les Surprises, Camboulas (Alpha 2021)
→ Formidables lectures, de très grandes pièces (cet air-chaconne de Circé de Desmarest, dans l'esprit de l'entrée de Callirhoé, mais en plus long !), Les Surprises à leur meilleur, un chœur de démons nasal à souhait (les individualités de ce chœur de 8 personnes sont fabuleuses, de grands chanteurs baroques y figurent !), le tout agencé de façon très variée et vivante, et servi par la hauteur de verbe et geste de Gens… un récital-merveille !

« Jéliote »Mechelen, A Nocte Temporis, Mechelen (Alpha 2021)
→ Encore une belle réussite de Mechelen et son ensemble, autour d'une autre haute-contre historique – programme et exécution peut-être un peu moins originaux et marquants que pour le premier, mais vraiment recommandé.
→ Approche musicologique intéressante de se fonder sur un interprète précis, comme tant de récitals d'opéra seria l'ont fait, et renouvellement (même si moindre cette fois) des airs habituellement enregistrés.

Destouches (Marthésie), Philidor (Les Amazones), Cavalli, Viviani, Vivaldi, Schurmann… – « Amazone » – Léa Desandre (+ Gens, Bartoli), Ensemble Jupiter, Thomas Dunford (Erato 2021)
→ Beau récital vivant, d'où se détachent surtout pour moi, sans surprise, les pièces françaises (notamment les généreux extraits de Marthésie, qu'on est très heureux d'entendre pour la première fois !).
→ J'ai mainte fois dit que je trouve le timbre très fondu pour une voix aussi peu fortement projetée, et que j'aime davantage de franchise dans le verbe, mais la maîtrise du coloris et l'agilité sont irréprochables et l'interprète très engagée.

♥♥ Mozart, Méhul, Spontini, Rossini, Adam, Verdi, Offenbach, Wagner, Leoncavallo, Lehár, Ravel, Orff, Korngold… – « Baritenor »Michael Spyres, Philharmonique de Strasbourg, Marko Letonja (Erato 2021)
→ Déception partagée par les copains geeks-de-musique : ce n'est pas un récital de répertoire spécifique à cette catégorie vocale – selon les époques et les lieux, peut désigner aussi bien des ténors sans aigus (Licinius de La Vestale), que des barytons à aigus (Figaro du Barbier de Séville) ou des ténors aigus et agiles disposant d'une inhabituelle extension grave (Zampa d'Hérold, absent de ce disque). Dans cet album, on entend donc énormément de tubes des répertoires pour ténor aussi bien que pour baryton, pas nécessairement écrits pour baryténor.
→ Cette réserve formulée (on a tout de même Ariodant de Méhul et Lohengrin dans la traduction de Nuitter), le tour de force demeure très impressionnant (le véritable timbre de baryton saturé d'harmoniques pour la cantilène du Comte de Luna !) et ménage quelques très heureuses surprises, comme les diminutions aiguës dans l'air du Comte Almaviva de Mozart (tirant vraiment parti de la tessiture longue pour proposer quelque chose de différent mais tout à fait cohérent avec le style) ou pour le Figaro du Barbier (l'imitation des différentes voix qui appellent Figaro, de la femme à la basse, quelle amusante jonglerie !). Et tout de même beaucoup de rôles de barytons aigus (Danilo, Carmina Burana), ainsi que de ténors graves (Lohengrin), mais aussi, pour bien prouver que la voix n'est pas ternie, de ténors aigus (Le Postillon de Longjumeau).
→ Autre atout, le parcours (certes arbitraire puisque mélangeant ténors et barytons…) est construit de façon chronologique, on fait une petite balade temporelle au spectre très large, ce qui est très rare dans les récitals.
→ À écouter, donc, pour les amateurs de voix (qui seront très impressionnés) plutôt que pour les défricheurs de répertoire.
→ Partiellement bissé.

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

Gabrielli – extrait de S. Sigismondo, re di Borgogna – Bartoli, Andrés Gabetta, Sol Gabetta, Cappella Gabetta (Decca)
→ Quadrissé.
→ Avec instruments solistes. Pas très marquant, mais tout ce qu'on a au disque de ses opéras…

♥♥♥ Schlusnus dans Don Pasquale, Onéguine, Prince Igor (tout en allemand)
→ Chante Onéguine avec des nuances de lied… délectable ! Igor pas très épique.
→ Bissé

♥♥♥ Josef Metternich, « Rare and Unreleased Recordings (1948-1957) » (Andromeda)
→ Tout en allemand : Onéguine, Trovatore, Otello, Lortzing, Traviata, Arabella, Parsifal…
+ https://www.youtube.com/watch?v=v-WmSm50Nd8 (la perfection vocale…)




berners




C. Ballet & musiques de scène


nouveautés
♥♥ Arenski (Arensky) – Nuits égyptiennes (Ėgipetskiye nochi, Egyptian Nights), Op. 50 – Moscou SO, Yablonsky (Naxos réédition 2021)

Lord BernersBallet de Neptune, L'uomo dai baffi – English Northen Philharmonia, Lloyd-Jones (Naxos 2021)
+ arrangements pour orchestre de Philip Lane : 3 Valses bourgeoises, Polka (avec le Royal Ballet Sinfonia)
→ Toujours cette belle musique excentrique de Berners, quelque part entre la musique légère et la sophistication, comme une rencontre improbable entre Minkus et Schulhoff, le tout dans un esprit très proche de la musique légère anglaise.
→ Trissé.

♥♥♥ Stravinski – Feu d'artifice, Scherzo fantastique, Scherzo à la Russe, Chant Funèbre, Sacre du Printemps NHK SO, Paavo Järvi (RCA 2021)
→ Splendide version très vivante, captée avec beaucoup de relief physique, contenant quelques-uns des chefs-d'œuvre de jeunesse de Stravinski (parmi ce qu'il a écrit de mieux dans toute sa carrière, Feu d'artifice et le Scherzo fantastique…), ainsi qu'une version extrêmement charismatique et immédiatement prenante du Sacre du Printemps.
→ Järvi semble avoir tiré le meilleur de la NHK, orchestre aux couleurs peu typées (même un brin gris, ai-je trouvé en salle), mais dont la discipine et la solidité permettent ici une insolence et un aplomb absolument idéaux pour ces pages.
→ Bissé le Sacre, trissé les ouvertures.

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

Franck – Hulda, Op. 4 : le ballet allégorique – OP Liège, Arming (Fuga Libera 2012)
→ Du Franck plutôt décoratif, marqué par des modèles absolument pas wagnériens (le ballet à la française, avec un côté rengaine quasiment britannique dans le rondeau final !). Le reste de l'opéra n'est pas non plus le plus audacieux de Franck, mais il sera bientôt donné et enregistré dans les meilleures conditions par Bru Zane !
→ Couplé avec une très belle version tradi de la Symphonie.

♥♥ Stravinski – Petrouchka, Les Noces – Ančerl
→ Avec Žídek et Toperczer notamment !

Stravinski – Les Noces (en français) – Ansermet (Decca)




anniversaires




D. Cantates profanes


nouveautés
♥ Purcell – Birthday Odes for Queen Mary – Carolyn Sampson, Iestyn Davies… The King's Consort, Robert King (Vivat 2021)
→ Excellentes versions, très bien captées, qui valent en particulier pour les instrumentistes très vivement engagés. Joli plateau vocal également.
→ (Pour autant, je ne suis pas trop certain de vouloir vous encourager à financer le label autoproduit d'un abuseur d'enfants. J'ai longuement hésité avant d'écouter moi-même ce disque, alors que j'ai toujours énormément aimé le travail artistique de R. King. La séparation entre l'homme et l'œuvre me paraît problématique lorsque l'homme est vivant et en activité : on promeut le talent au-dessus d'être un humain décent, on excuse la destruction de vies au nom de ses qualités pour nous divertir, on remet potentiellement l'agresseur en position de prestige, d'autorité et de récidive. Bref : c'est un bon disque, mais si vous voulez l'écouter volez-le s'il vous plaît.)
→ [Tenez, je commettrai sans doute un jour une notule où je partagerai mon sentiment d'homme blet sur cette affaire de séparation de l'homme et de l'œuvre, sous un angle différent de la traditionnelle opposition « il est méchant il faut détruire son œuvre  » / « il est bon dans son domaine c'est tout ce qui m'intéresse ». Mon opinion a grandement évolué sur le sujet depuis ma naïve jeunesse, et je me pose quelques questions sur nos réflexes mentaux en la matière, que je partagerai à l'occasion.]




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E. Sacré


nouveautés
Zácara da Teramo – Intégrale (Motets, Chansons édifiantes) – La Fonte Musica, Michele Pasotti (4 CDs, Alpha 2021)
→ Musique du XIVe siècle, dont la langue me paraît hardie pour son temps (ou sont-ce les restitutions?), mais trop loin de mes habitudes d'écoute pour que je puisse en juger – j'ai beau faire, je me retrouve un peu comme les wagnériens devant LULLY, je n'entends que le nombre limité de paramètres expressifs et pas assez les beautés propres de ces musiques à l'intérieur de leur système. Pas faute d'avoir essayé.
→ Belles voix, assez originales, ni lyriques, ni folkloriques, vraiment un monde à part très intéressant et avec des timbres très typés (mais pas du tout clivants / étranges).

♥♥♥ Brixi – Messe en ré majeur, Litanies – Hana Blažiková, Nosek Jaromír ; Hipocondria Ensemble, Jan Hádek (Supraphon 2021)
→ Alterne les chœurs d'ascèse, finement tuilés, très beau contrepoint qui fleure encore bon le contrepoint XVIIe, voire XVIe… pour déboucher sur des airs façon Messie (vraiment le langage mélodique de Haendel !).
→ Splendides voix tranchantes et pas du tout malingres, orchestre fin et engagé, Blažiková demeure toujours aussi radieuse, jusque dans les aigus de soliste bien exposés !

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

♥♥♥ Grégorien : Chants de l'Église de Rome VIe-XIIe s. – Organum, Pérès (HM)
→ Quelle sûreté de réalisation ! (et toujours ces beaux mélismes orientalisants)

♥♥♥ Dufay – Motets isorythmiques – Huelgas (HM)

Allegri – Miserere – A sei voci (Naïve)

♥♥ Titelouze – Messe – Les Meslanges, van Essen (Paraty 2019)

♥♥ CAPUANA, M.: Messa di defonti e compieta / RUBINO, B.: Messa di morti (Choeur de Chambre de Namur, García Alarcón) (Ricercar 2015)
→ bissé Capuana, trissé Rubino
→ Pas du niveau des Vêpres du Stellario, mais riche et stimulant !

♥♥♥ Du Mont – Cantica sacra – Boterf, avec Freddy Eichelberger à l'orgue Le Picard de Beaufays (1742) (Ricercar)

♥♥♥ Mendelssohn : Te Deum in D Major, MWV B15 ; Stuttgart KmCh, Bernius (Hänssler 2021)
→ Nouveau de cette année, génial (du Mendelssohn choral à un par partie !), mais déjà présenté la semaine de sa sortie lors d'une précédente livraison. Je n'encombre donc pas cette notule-ci.

♥♥♥ Danjou, Kyrie & Gloria // Perne, Sanctus & Agnus Dei // Boëly, pièces d'orgue – Ens. G. Binchois, F. Ménissier (Tempéraments 2001)
Danjou !!  J'étais persuadé que ça n'existait pas au disque. Passionnant de découvrir ça.

Saint-Saëns, Oratorio de Noël ; Ziesak, Mahnke, James Taylor, Deutsche Radio Philharmonie, Poppen (YT 2008)
→ Très épuré, sulpicien, contemplatif. Joli, et dans une interprétation de tout premier choix (quels solistes !).

♥♥ Braunfels : Große Messe – Jörg-Peter Weigle (Capriccio 2016)
→ D'ample ambition, une œuvre qui ne tire pas Braunfels vers du Bruckner complexifié comme son Te Deum, mais vers une véritable pensée généreuse et organique, dotée en outre de fort belles mélodies.

♥♥ Milhaud – Psaume 121 – RenMen





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F. A cappella profane


nouveautés
Hutchings, Meadow, Hopkins, Sigurdbjörnsson, Jóhannsson, Owens, Arnalds, Lovett, Rimmer, Gjeilo, Barton, Desai, Guðnadóttir, O'Halloran, L.Howard – « Infinity » Voces8 (Decca 2021)
→ Bascule toujours plus profonde dans la musique atmosphérique, avec ces pièces (elles-mêmes des arrangements) qui pour beaucoup ressemblent à du Whitacre en plus gentil. Mais réussi dans son genre, et particulièrement concernant les quelques pièces qui excèdent un peu ce cadre avec des harmonies plus recherchées (Sigurdbjörnsson).





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G. Symphonies


nouveautés
Saint-George – Symphonie en sol, Symphonies concertantes – CzChbO Pardubice, Halász (Naxos 2021)
→ Plutôt mieux que d'habitude, assez charmant même, mais toujours aussi aimable et peu marquant, vraiment de la musique décorative, réutilisant exactement les tournures de son temps. Ni plus ni moins.
→ Amusant : Naxos écrit Saint-Georges à la française, alors que son nom s'écrit Saint-George – tandis que le Wikipédia anglais écrit aussi Saint-Georges, en référence à son probable père.
→ Bissé. (Parce que j'étais occupé pendant ma première écoute, pas parce que c'est génial.)

♥♥ (Cipriani) Potter – Symphonie n°1, Intro & rondo « à la militaire », Ouverture Cymbeline – BBCNO Wales, Howard Griffiths (CPO 2021)
→ Très belles œuvres du jeune romantisme britannique, l'ouverture pour Cymbeline de Shakespeare en particulier !
→ Trissé.

♥♥ Bruckner – Symphonie n°4 (les trois versions) – Bamberg SO, Hrůša (Accentus Music 2021)
→ Passionnant choix de confronter les différentes versions, dans une lecture assez traditionnelle (contrastes limités, couleurs assez fondues, transitions plutôt lissées) mais détaillée, lisible et toujours vivante.
→ Parmi les belles choses à repérer : dans la première version, 1874, l'écriture est beaucoup plus continue (les grands unissons sont ici harmonisés, avec un aspect beaucoup plus continu et brahmsien que j'aime beaucoup, moins étrange en tout cas), en particulier dans le premier mouvement. Et dans le final, amusante marche harmonique sur figures violonistiques arpégées qui fleure bon sa Chevauchée des Walkyries.
→ Dans le premier mouvement de la deuxième version, 1878, bel éclat majeur très lumineux, plus du tout dans l'esprit majesté-de-voûtes-romanes, très réussi. La progression vers le dernier climax du final est aussi très réussie, implacable apothéose.

♥♥ Tchaïkovski – Symphonie n°6, Roméo & Juliette – Tonhalle Zürich, Paavo Järvi (Alpha 2021)
→ Beaucoup plus proche de la rectitude de leur Cinquième que du fol engagement de leurs 2 & 4.
→ Le développement du premier mouvement reste impressionnant (et le timbre pincé du hautbois solo délectable), mais le reste manque un peu de pathos à vrai dire, cette musique en a d'ordinaire suffisamment, mais tout paraît un peu peu germanisé et distancié ici, malgré l'investissement audible de toutes les parties.
→ La marche-scherzo n'est absolument pas terrifiante mais danse avec sourire et délectation, culminant dans le très bel éclat (purement musical) de son climax. Surprenant, mais assez convaincant.
→ Roméo et Juliette absolument pas russe non plus, mais la netteté au cordeau, la différenciation des timbres y a quelque chose de tout à fait grisant – purement musical ici encore, plutôt que passionné ou narratif. J'aime beaucoup, bien plus proche des qualités des 2 & 4.

Saint-Saëns – Symphonie n°1, Concerto pour violoncelle n°1, Bacchanale – Astrig Siranossian, Philharmonique de Westphalie méridionale, Nabil Shehata (Alpha 2021)
→ Pas très emporté par ce disque : soliste pas particulièrement charismatique (et capté un peu en arrière), orchestre peu coloré, plutôt opaque, très tradi… la Symphonie est jouée avec vie, mais rien qui change nos vies, je le crains.

Saint-Saëns – Symphonies Urbs Roma & n°3 – Liège RPO, Kantorow
→ À nouveauté pour cette intégrale Kantorow, pas de révolution dans la perception des œuvres, mais une exécution de bonne tenue – un peu épaisse pour ce que peuvent réellement produire ces symphonies, néanmoins.

♥♥♥ Mahler – Symphonie n°8 – Howarth, Schwanewilms, Fomina, Selinger, Bardon, Banks, Gadd, Rose ; LPO Choir, LSO Chorus, Clare College Choir, Tiffin Boys Choir ; LPO, Jurowski (LPO Live)
→ Quel bonheur d'avoir des sopranos de la qualité de timbre de Schwanewilms et Fomina pour cette symphonie où leurs aigus sont exposés en permanence !  Barry Banks aussi, dans la terrible partie de ténor, étrange timbre pharyngé, mais séduisant et attaques nettes, d'une impeccable tenue tout au long de la soirée.
→ Par ailleurs, le mordant de Jurowski canalise merveilleusement les masses – très beaux chœurs par ailleurs.
→ Trissé.

♥♥ Florence Price – Symphonies 1 & 3 – Philadelphia O, Nézet-Séguin (DGG 2021)
→ Symphonies d'un compositeur qui cumulait les handicaps de diffusion, et cumule à présent les motivations de programmation : femme et afro-américaine !
→ Le langage de la Première se fonde largement sur des thèmes issus du gospel et utilisés comme motifs qui se diffractent et évoluent à travers l'orchestre, au sein d'une orchestration aux couleurs variées, d'un beau lyrisme qui ne cherche jamais l'épanchement, d'une construction qui ne suspend jamais le plaisir d'entendre de belles mélodies, jusque dans les transitions.
→ La Troisième m'a paru moins vertigineuse : plus lisse et continue, moins motorique et générative, davantage tournée vers les mélodies (qui sonnent un peu plus populaires que gospel cette fois). Très beau dans son genre postromantique, très bien écrit, mais moins neuf et saisissant.
→ Avec la fluidité propre à Nézet-Séguin et les timbres miraculeux de Philadelphie, c'est un régal absolu, qui rend justice à un corpus réellement intéressant et riche musicalement, et simultanément très accessible !  Qu'attendons-nous pour programmer ces œuvres en concert, surtout avec la mode de la réhabilitation des minorités culturelles ?  Sûr que ça plairait d'emblée à un vaste public.
→ Trissé.

(Malcolm) Arnold – Concerto Gastronomique, Symphonie n°9  – Anna Gorbachyova-Ogilvie, Liepaja Symphony Orchestra, John Gibbons (Toccata Classics 2021)
→ La Symphonie n°9, véritable épure, n'est pas sans charme, et interprétée avec charisme (quels magnifiques solistes !).
→ Le Concerto Gastronomique aurait pu être amusant, mais il reproduit surtout des formules à la Arnold (les accords de cuivres à l'harmonique décalée et enrichie pour le Fromage, vraiment rien de figuratif ou de propre à son objet…).


Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :


1) Baroques & classiques

Wilhelm Friedmann Bach – Symphonies (fk 67 « dissonante » et fk 66 avec ricercar) & Harpsichord Concertos – Ensemble Arcomelo, Michele Benuzzi (La Bottega discantica 2008)

♥♥ Corrette – Symphonies de Noëls – La Fantasia, Rien Voskuilen (Brilliant)
→ Réjouissant de bout en bout !


2) Classiques

♥♥ Richter – Symphony No. 53 in D Major, "Trumpet Symphony"
London Mozart Players - Orchestra ; Bamert, Matthias - Conductor (Chandos 2007)

Johann Stamitz – Sinfonia Pastorale – Hogwood (Oiseau-Lyre)
+ symphonie en ré Op.3 n°2
→ Avec les thèmes plein de parentés.
→ Bissée.

♥♥♥ Gołąbek, Symphonies / Kurpiński, Concerto pour clarinette – Lorenzo Coppola, Orkiestra Historyczna (Institut Polonais)
→ Absolument décoiffant, des contrastes qui évoquent Beethoven dans une langue classique déjà très émancipée.


3) Deuxième romantisme

♥♥♥ Tchaïkovski – Symphonies n°2,4 – Tonhalle Zürich, Paavo Järvi (Alpha 2021)
→ La Cinquième par les mêmes ne m'avait pas du tout autant ébloui qu'en salle (avec l'Orchestre de Paris) – un peu tranquillement germanique, en résumé. Hé bien, ici, c'est étourdissant. D'une précision de trait, d'une énergie démentielles !
→ On entend un petit côté « baroqueux » issu de ses Beethoven, avec la netteté des cordes et l'éclat des explosions, mais on retrouve toute la qualité de construction, en particulier dans les transitions (la grande marche harmonique du final du 2, suffocante, qui semble soulever tout l'orchestre en apesanteur !), et au surplus une énergie, une urgence absolument phénoménales.
→ Gigantesque disque. Ce qu'on peut faire de mieux, à mon sens, dans une optique germanique – mais qui ne néglige pas la puissance de la thématique folklorique, au demeurant.
→ (bissé la n°2)

♥♥ Tchaïkovski – Symphonie n°3 – Göteborg SO, Neeme Järvi (BIS)
→ Bissé.


4) XXe siècle

Schnittke – Symphony No. 1 – Tatyana Grindenko, Lubimov, Russian StSO, Rozhdestvensky (Chandos)
→ Atonal libre pas très beau.

Schnittke – Symphony No. 3 – Radio Berlin-Est, V. Jurowski (Pentatone)
→ Proche de la 4 (que j'aime énormément), en plus morne. Pas palpitant.




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H. Poèmes symphoniques


nouveautés
E. von Dohnányi – Ouverture de Tante Simona, Suite en fa#m, American Rhapsody – ÖRF, Paternostro (Capriccio 2021)
+ Leo Weiner – Serenade pour petit orchestre en fam
→ Belles œuvres, très consonantes et confortables dans leur postromantisme peu retors. Capriccio continue aussi bien de documenter les grandes œuvres ambitieuses du répertoire germanique chez Rott, Braunfels ou Schreker que d'explorer des œuvres moins mémorables, mais très bien bâties malgré leur ambition moindre.

♥♥♥ Stravinski – Feu d'artifice, Scherzo fantastique, Scherzo à la Russe, Chant Funèbre, Sacre du Printemps NHK SO, Paavo Järvi (RCA 2021)
→ Splendide version très vivante, captée avec beaucoup de relief physique, contenant quelques-uns des chefs-d'œuvre de jeunesse de Stravinski (parmi ce qu'il a écrit de mieux dans toute sa carrière, Feu d'artifice et le Scherzo fantastique…), ainsi qu'une version extrêmement charismatique et immédiatement prenante du Sacre du Printemps.
→ Järvi semble avoir tiré le meilleur de la NHK, orchestre aux couleurs peu typées (même un brin gris, ai-je trouvé en salle), mais dont la discipine et la solidité permettent ici une insolence et un aplomb absolument idéaux pour ces pages.
→ Bissé le Sacre, trissé les ouvertures.

Takemitsu – A Way a Lone II, Toward the Sea II, Dreamtime, « 1982 historic recordings) – Sapporo SO, Iwaki Hiroyuki (1982, DGG 2021)
→ Pour mesurer à quel point les orchestres japonais ont progressé… On peut trouver interprétations bien plus avenantes de ces belles œuvres (ou chef-d'œuvre, pour Toward the Sea II).
→ Complété par une heure de discours de Takemitsu, en japonais.

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

Weber – Ouvertures – Hanover Band, Roy Goodman (Nimbus 2000)
→ Assez décevant : capté de très loin, plans peu audibles, pas beaucoup de gain de timbres ou d'énergie avec les instruments d'époque.

Humperdinck – Rhapsodie mauresque – Gewandhaus Leipzig, Abendroth (réédition numérique Naxos)

Marx – Eine Frühlingsmusik, Idylle & Feste im Herbst – Radio-Symphonieorchester Wien, Wildner (CPO)
→ Comme la symphonie, en plus simple.




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I. Lied orchestral


nouveautés
♥♥♥ Saint-Saëns – La Princesse jaune – Wanroij, Vidal ; Toulouse, Hussain (Bru Zane 2021)
+ Mélodies persanes (Constans, Fanyo, Pancrazi, Sargsyan, Boutillier…)
→ Ivresses. Des œuvres, des voix.
→ Révélation pour ce qui est de la Princesse, pas aussi bien servie jusqu'ici, et délices infinies de ces Mélodies dans une luxueuse version orchestrale, avec des chanteurs très différents, et chacun tellement pénétré de son rôle singulier !

Vladigerov – Mélodies symphoniques – Bulgarie NRSO, Vladigerov (Capriccio 2021)
→ Moins séduisant et singulier, pour moi, que ses concertos ou symphonies, mais encore une fois du très beau postromantisme, très bien écrit, qui mérite d'être enregistré, réécouté, programmé en concert…

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

♥♥ Mahler – Das Lied von der Erde Kaufmann,Vienna Philharmonic, Nott (Sony 2017)
→ Kaufmann chante ténor et baryton à la fois. Les deux sont très bien, et Nott fait frémir Vienne plus que de coutume, avec des couleurs particulièrement fines et évocatrices, que l'orchestre se donne peu souvent la peine de produire !





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J. Concertos


nouveautés
♥♥♥ WÖLFL, J.: Piano Concertos Nos. 2 and 3 / Concerto da camera (Veljković, South West German Chamber Orchestra Pforzheim, Moesus) (CPO 2021)
→ Déjà beaucoup aimé, sorte de Mozart un peu plus tardif, dans ses Sonates (disque de Bavouzet par exemple), Wölfl confirme ici une véritable personnalité, et soutient remarquablement l'intérêt dans un genre d'essence décoratif – à l'oreille, le n°2 en mi, on dirait vraiment un Mozart perdu écrit pendant la série des concertos post-n°20 !
→ Bissé.

SPERGER, J.M.: Double Bass Concertos Nos. 2 and 15 / Sinfonia No. 30 (Patkoló, Kurpfälzisches Kammerorchester, Schlaefli)
→ Chouette, mais pourquoi toujours privilégier l'aigu pour un concerto d'instrument se distinguant au contraire par son extension grave ?

Saint-Saëns – Pièces rares pour violon et orchestre – Laurenceau, Orchestre de Picardie, Benjamin Lévy (Naïve 2021)
→ Essentiellement des Romances très lyriques, pas très passionné par leur contenu musical pour ma part, mais j'admire beaucoup le travail de pionnière de Geneviève Laurenceau (ancienne konzertmeisterin du Capitole de Toulouse), au service de compositeurs comme Magnard, Durosoir, Smyth, R. Clarke… Son très robuste et plein, pas du tout typé français, solidité et élan à toute épreuve.

Rubinstein: Piano Concertos Nos. 2 & 4 – Schaghajegh Nosrati, Radio-Symphonie-Orchester Berlin, Róbert Farkas (CPO 2021)
→ Un peu déçu en réécoutant ces œuvres, du concerto pour piano romantique très tourné vers le piano, qui perpétue un modèle post-chopinien, même si l'orchestre n'est pas sans intérêt.

Saygun, Işıközlü, Erkin, Kodallı… TURKISH PIANO MUSIC (THE BEST OF) (Biret, Güneş, Saygun, G.E. Lessing, Şimşek, Tüzün) (Idil Biret Archive 2021)
→ Œuvres vraiment pas fabuleuses sur la première œuvre du coffret : des concertos pour piano très difficiles à jouer, mais musicalement, un mélange d'orientalismes et de musique classique très formelle (quoique complexe), pas très mélodique ni riante. Le disque de trios piano-cordes turcs sorti cette année (chez Naxos) était autrement stimulant sur la production locale !

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

1) Pour piano

Hummel: Piano Concerto No. 2 in A Minor – Hough, B. Thomson (Chandos)
→ Très sympathique, là aussi vraiment un cousin chopinien ; j'en retiens surtout le beau solo de clarinette du final et son beau thème secondaire (le soin mélodique échappe toujours à l'automatisme, chez Hummel, tout de même l'immortel auteur du plus beau final de concerto pour basson de tous les temps !), mais ce reste globalement du concerto pour piano brillant, où le contenu musical n'entre qu'en seconde ligne par rapport à un quatuor ou une symphonie.

Thalberg – Concerto pour piano – Ponti
→ Assez formellement Thalberg, pas de grande surprise.

♥♥♥ Liszt – Totentanz – Berezovsky, Philharmonia, Wolff (Teldec)
→ Totalement fulgurant, parfait, surnaturel… le jeune Berezovsky était incroyable, d'une insolence proprement démoniaque.

♥♥♥ Henselt – Concerto pour piano Op.16 en fa mineur – Michael Ponti, Philharmonia Hungarica, Othmar Mága (VOX, réédition Brilliant Classics)
→ Très proche de Chopin dans les formules pianistiques, mais doté d'un orchestre très généreux, très bien écrit, qui puise à une tradition beaucoup plus luxuriante (Meyerbeer ?). Splendide et grisant, dans son genre lyrique mais travaillé !

Pierné – Concerto pour piano – Ponti
→ Très virtuose évidemment, de la musique très sérieuse qui contraste avec son final fondé sur la répétition inlassable de « Mets tes deux pieds en canard » de La Chenille qui redémarre.

♥♥♥ d'Albert – Concerto pour piano n°2Ponti
→ Quel beau lyrisme décidément !

Roussel – Concerto pour piano – Ponti

Sinding – Concerto pour piano – Ponti

BORTKIEWICZ, S.: Piano Concertos Nos. 2 and 3, "Per aspera ad astra" (Doniga, Janáček Philharmonic, Porcelijn) (Piano Classics 2018)

SCHNITTKE, A.: Piano Concerto / Concerto for Piano and String Orchestra / Concerto for Piano 4-hands and Chamber Orchestra (Kupiec, Strobel) (Phoenix 2008)
→ Version dotée d'un équilibre singuier du piano, plus intégré / symphonique. Pas celle que j'aime le plus, mais très belle, dans cette sélection de concertos considérables du XXe siècle !


2) Pour violon

♥♥ Tchaikovsky – Violin Concerto in D Major – Gitlis, Vienne SO, Hollreiser (VOX)
→ Impressionnant et ébouriffé, et l'orchestre est vraiment très bien, dynamique, présent, précis (contre toute attente vu la date, le chef et les conditions de non-répétition).
→ En revanche Gitlis, ce son très appuyé, ces effets qui bifurquent dans tous les sens, le rubato qui déborde en avant en arrière, j'entends trop que c'est du violon, ça me distrait de la musique.
→ Mais impressionnant d'insolence (la qualité parfaite du timbre avec un suraigu pas du tout tiré, surnaturelle), à connaître !
→ Orchestre splendide, ça ne ressemble pas du tout à un son viennois d'ailleurs, de l'excellente charpente à l'allemande, pas très coloré mais limpide sur tout le spectre, et avec vie et précision.

♥ Tchaïkovski – Concerto pour violon – Dumay, LSO, Tchakarov (EMI)
→ Beau, simple, un peu lent.

♥♥ Tchaïkovski – Concerto pour violon – Julia Fischer, Russie NO, Kreizberg (PentaTone 2006)
→ Sobre, doux, net, voilà qui tire davantage vers la poésie de la page. Et la culture russe de l'orchestre (quoique l'un des moins typés du pays) facilite les bonnes couleurs environnantes.

Tchaïkovski – Concerto pour violon – Hahn, Liverpool PO, V.Petrenko (DGG 2011)
→ Assez affirmatif, mais sobre, réussi ! Tempo très retenu.

Tchaïkovski – Concerto pour violon – Hudeček, S. de Prague, Bělohlávek (Supraphon)
→ Un peu gras pour ce que j'espérais d'un son tchèque au violon, pas mal de rubato quand même, et Bělohlávek toujours plutôt mou…
→ Est très bien, mais ne répond pas à mon espérance de netteté un peu acide en allant me tourner vers Supraphon !

¤ Tchaïkovski – Concerto pour violon – Radulović, Borusan Istanbul PO, Sascha Goetzel (DGG 2017)
→ Puisqu'on m'en a dit le plus grand mal, j'écoute. Je l'avais adoré avant la notoriété, dans une vidéo de rue où il était pris en train de livrer une insolente et hautement pensée Chaconne de la Partita n°2 de Bach… Peu écouté depuis ses grands succès, vu son positionnement cross-over sur des tubes un peu retravaillés, ce qui m'intéresse moins.
→ Je découvre qu'il est carrément passé chez DGG, chez certains ça va la vie !
→ L'orchestre n'est pas le meilleur du monde (je trouve d'ailleurs qu'il sonne très oriental, comme s'il jouait du Saygun ou plutôt du… Say, ça n'aide pas ;
→ Côté goût, ce n'est pas affreux, mais en effet ça s'alanguit dans tous les sens, le tempo et le phrasé bougent sans cesse, c'est sur-interprété en permanence, je ne suis pas fan.
→ Et côté son, un peu tiré, oui, comme une voix qu'on voudrait pousser trop fort, il y a plus précis et plus timbré sur le marché – j'entends chaque année les plus aguerris jouer ça à la Philharmonie, je suis un peu blasé côté virtuosité extrême.
→ En somme pas horrible du tout, mais clairement je ne vois pas trop l'intérêt d'écouter ça vu l'offre délirante sur ce concerto.

Tchaïkovski – Concerto pour violon – Ehnes, Sydney SO, Ashkenazy (Onyx)
→ Très policé et propre, pas très palpitant, et pas assez effacé pour être seulement poétique.
→ Impression persistante que le violon sonne fort tout le temps.

♥♥ Tchaïkovski – Concerto pour violon – Sarah Christian, Bremen KmPh, Rhorer
→ Accompagnement très net, interprétation très réussie (quoique, comme souvent, beaucoup de rubato superflu pour moi).

+ Borgstrøm – Concerto pour violon – Eldbjørg Hemsing, Wiener Symphoniker, Olari Elts (BIS 2018)


3) Pour autre chose

Telemann – Concertos pour vents (TWV 44:43, 51:D2, 51:D7, 52:d1, 52:e1, 53:D5) – Hoeprich & friends, Musica Antiqua Köln, Goebel
→ Joli son d'orchestre, de la première (deuxième) génération d'ensembles baroques, pour des compositions peu trépidantes.

♥♥♥ P. Vranický, Haydn – Concertos pour violoncelle en ut – Enrico Bronzi, Orchestra di Padova e del Veneto, Enrico Bronzi (Concerto Classics)
→ Meilleure version du Haydn ! Cet orchestre, qui s'est imprégné de modes de jeu musicologiques au moins depuis Maag, propose des sonorités capiteuses tout en conservant le moelleux des instruments traditionnels. L'insolence, les trépidations de joie, la rêverie y sont portées au plus beau degré.

♥♥♥ Gołąbek, Symphonies / Kurpiński, Concerto pour clarinette – Lorenzo Coppola, Orkiestra Historyczna (Institut Polonais)
→ Absolument décoiffant, des contrastes qui évoquent Beethoven dans une langue classique déjà très émancipée.

Bacewicz – Concerto pour alto – Kamasa, Varsovie PO, Wisłocki (LP sur YT)
→ Un peu trop soliste pour mon goût. Atmosphère tourmentée.





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K. Musique de chambre

nouveautés
♥♥ Beethoven – Quatuors 12 & 14 – Ehnes SQ (Onyx 2021)
→ Version très aboutie, aux timbres superbes, issue d'un cycle en cours autour des derniers quatuors de Beethoven.
→ Bissé.

♥♥♥ Schubert – Quintette à cordes – Tetzlaff, Donderer... (Alpha 2021)
→ Couplé avec le Schwanengesang de Julian Prégardien que je n'ai pas encore écouté.
→ Lecture d'une épure assez fabuleuse : absolument pas de pathos, cordes très peu vibrées, des murmures permanents (quel trio du scherzo ! ), et bien sûr une très grande musicalité.
→ Très atypique et pudique, aux antipodes de la grandiloquence mélodique qu'on y met assez naturellement.

Hummel & Schubert: Piano Quintets – Libertalia Ensemble (CPO 2021)
→ Très beau quintette (avec piano et contrebasse) de Hummel, énormément de très belles choses là-dedans.
→ La version de la Truite n'est pas du tout le plus exaltante du marché, un peu grise par rapport aux versions très engagées et typées qu'on peut trouver par ailleurs (Kodály-Jandó, Immerseel, etc.).

PAGANINI, N.: String Quartet No. 3 / Duetti Nos. 1, 2, 3 (Pieranunzi, Falasca, Fiore, Leardini, Carlini) (CPO 2021)
→ Jolies œuvres aimables, bien jouées.

♥♥ Saint-Saëns, Rameau, LisztTrio piano-cordes n°2, Pièces de clavecin en concert (Suites 1 & 5), Orpheus (arrangement) – Trio Zadig (Fuga Libera 2021)
→ Un des tout meilleurs trios en activité (probablement le meilleur que je connaisse moi), avec en particulier des cordes d'un charisme extraordinaire.
→ Lecture assez traditionnellement lyrique-germanique de Saint-Saëns, avec un son très peu français, misant davantage sur une sorte d'audace virtuose, où chaque motif à chaque instrument est ciselé et immédiatement présent et mélodique. Cette attitude dynamise beaucoup cette page, déjà très belle.
→ Étonnante association avec un Rameau version trio romantique (très réussie) et cette transcription du poème symphonique de Liszt.
→ Trissé pour le Saint-Saëns, bissé pour le reste.

♥♥♥ Saint-Saëns – Quatuors 1 & 2 – Tchalik SQ (Alkonost Classic)
→ Lecture très consciente stylistiquement, et ardente, de ces quatuors magnifiant à la fois la contrainte formelle et la beauté de l'invention… ce jeune quatuor a évolué de façon assez fulgurante ces dernières années. (Son intégrale Hahn est fabuleuse aussi.)

(réédition)
♥♥♥ Mahler, Bertin-Maghit & Hersant – « No Time for Chamber Music » (extraits arrangés de Mahler) – Collectif9 (2018, réédition Alpha 2021)
→ Réédition de cet album d'une formidable inventivité, réutilisant dans des contextes nouveaux (et pour effectif chambriste comme l'indique le nom de l'ensemble !) des thèmes issus de l'œuvre de Mahler. Fascinant de contempler ces mélodies connues se mouvoir selon des chemins imprévus, et le tout exécuté à un niveau instrumental assez hallucinant, recréant un orchestre complet rien qu'avec leurs textures de cordes.
→ Totalement jubilatoire.
→ Trissé.

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

GabrielliSonate con trombe e violini  – Cappella di San Petronio, Sergio Vartolo (Tactus)

♥♥ Schubert – Quintette piano-cordes en la – Anima Eterna Brugge, Immerseel (ZZT)

Hummel, Bertini – Quintette piano-cordes, Sextuor piano-cordes (MDG)
→ Hummel bissé.
→ Très belle version très bien captée. Meilleure que celle qui vient de sortir chez CPO (et couplage Bertini plus intéressant qu'une version moyenne de Schubert, évidemment…).

Wyschnegradsky - String quartet №2
→ Intéressant, à défaut de réellement séduisant.




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L. Violon

(solo ou accompagné)

nouveautés
Saint-Saëns – Pièces de caractère pour violon & piano – Fanny Clamagirand, Vanya Cohen (Naxos 2021)
→ On y retrouve les grands standards (Danse macabre, Rondo capriccioso, Havanaise…) et des pièces rares, où l'on peut profiter du son extraordinairement capiteux et flûté (produire un timbre aussi chantant, aussi peu « frotté » avec un violon relève du petit miracle) et de la musicalité de Clamagirand, qui impressionne beaucoup depuis quelques années déjà.
→ Pas de révélations particulières parmi les pièces moins célèbres, à mon sens.

♥♥ E. Andrée, Bonis, SmythSonates pour violon, « First Ladies » – Annette-Barbara Vogel, Durval Cesetti (Toccata Next 2021)
→ Décidément, quelques figures féminines commencent à solidement émerger, au moins dans le domaine de la mélodie et de la musique de chambre (et plus simplement du piano d'intérieur) !
→ Trois grandes compositrices… je n'ai pas été aussi impressionné par Bonis que par sa Sonate violoncelle-piano, mais Smyth me frappe à nouveau par sa typicité, sa façon de tisser le matériau folklorique dans les formes savantes… Très réussi.
→ De surcroît très bien joué, par une spécialiste de ce genre de bizarrerie – plusieurs disques Hans Gál à son actif !

Kreisler + divers arrangements et pièces virtuoses ou de caractère – « 12 Stradivari » – Janine Jansen, Antonio Pappano (Decca 2021)
→ Surtout intéressant pour son projet : réunir pendant 10 jours 12 stradivarius, dont certains plus joués depuis des années, ou jamais enregistrés, et concevoir un programme qui mette en valeur leurs caractéristiques ou le lien avec leurs possesseurs historiques. Le tout par une seule interprète.
→ Le projet est excitant mais le résultat, comme je pouvais m'y attendre (considérant ma sensibilité), reste assez peu exaltant : 1) on perçoit certes des nuances de timbre, mais le son d'un violon dépend avant tout de la personne qui joue sur le violon ; 2) le répertoire de pièces pittoresques n'est franchement pas passionnant si l'on n'est pas passionné du violon en soi, si l'on ne le regarde pas comme une épreuve d'athéltisme à travers des haies et balses obligées ; 3) le son adopté par Janine Jansen est uniformément très intensément vibré et assez dégoulinant, très loin de la sobriété légère qui fait son intérêt en tant qu'interprète – elle refuse en général les soulignements excessifs et les effets de manche, tandis que ce disque semble (un peu artificiellement) renouer avec cette tradition.

Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

(réécoute nouveauté)
♥♥♥ Il Sud: Seicento Violin Music in Southern Italy ; œuvres de Falconieri, Montalbano, Trabaci, Pandolfi, Leoni, Mayone ; Ensemble Exit, Emmanuel Resche-Caserta (Passacaille 2020)
→ Œuvres rares à la veine mélodique généreuse et aux diminutions expansives, dans une interprétation pleine de couleurs (assise sur orgue positif et théorbe, remarquablement captés), avec un violon solo à la fois chaleureux et plein d'aisance. Un peu grisant.

Messiaen – Thème & Variations – Alejandro Bustamante, Enrique Bagaria (Columna Music)
→ Accords réguliers très marqués dans le style harmonique Messiaen, soutenant un violon plus lyrique.




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M. Violoncelle

(solo ou accompagné)

Frescobaldi, Ortiz, Vitali, Galli, Degli Antoni – Canzoni pour violoncelle(s) et basse continue – Cocset, Les Basses Réunies, Cocset (Alpha)
→ Quel son, quels phrasés !

♥♥ Gabrielli – Ricercari – Cocset (Agogique)
+ Vitali – Passacaglia

Bach – Suites pour violoncelle 1, 3 – Bruno Cocset (Alpha)
→ Vraiment différent, très vif et très droit. Manque de danse et de saveurs harmoniques pour moi, mais dans son genre fulgurant et droit au but, convaincant !




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N. Orgue

nouveautés
♥♥ Karg-Elert – Intégrale pour orgue, vol.12 : 3 Impressions, Hommage à Haendel, Partita n°1 – Steinmeyer de la Marienkirche de Landau/Pfalz, Stefan Engels (Priory 2020)
→ Les Impressions sont d'un postromantisme très conservateur et peu saillant, mais la Partita tire au contraire le meilleur du pouvoir des atmosphères.
→ Quant aux variations-hommage à Haendel, elles montrent une maîtrise ludique d'organiste pour tout ce qui est des diminutions et de la registrations.
→ Superbe orgue riche et généreux, superbement registré et capté.


Et les écoutes / réécoutes hors nouveautés :

1) Baroque XVIIe & louisquartorzien

Arauxo – Libro de tientos y discursos de musica practica, y theorica de organo (extraits) – Francesco Cera (Brilliant Classics 2018)

♥♥♥ Titelouze, Buxtehude, Pachelbel, Marchand, Boyvin, Corrette, Dandrieu… – Livres d'orgue sur les orgues du Jura franco-suisse  vol.1 – Delor, Baillot, Béraza, Meylan (Phaïa 1999)
→ Très belles orgues baroques françaises (Dole, Champagnole, Orgelet) ou suisse (Le Sentier), très typées. Et l'archaïsme de Titelouze, le grandiose de Marchand, le lyrisme de Boyvin, la fantaisie de Corrette & Dandrieu… Aussi des pièces d'Allemands, dont Buxtehude et (Georg) Böhm.
→ Un coffret totalement jubilatoire pour les amateurs d'orgue français, à connaître absolument !

Pachelbel – Œuvres pour orgue – Saint-Bonaventure de Rosemont à Montréal, Bernard Lagacé (Arion)
→ Captation très crue, pas très agréable.

♥♥ Pachelbel – Orgue vol. 2 – Essl & friends (CPO)
→ (Dont l'incroyable chaconne en sol, ♥♥♥.)

Pachelbel, Froberger, Muffat – « Organ Music Before Bach » – Kei Koito (DHM)

♥♥♥ Boyvin – Premier and Second livre d'orgue : Suites Nos. 1-8, « French Organ Music from the Golden Age, Vol. 6 » –  Bolbec, Ponsford (Nimbus)
→ Toujours aussi opératique ce Boyvin !

♥♥ André Raison  – Livre d'orgue – Ponsford à Saint-Michel en Thiérache (Nimbus)
→ Volume 3 de son anthologie française.

♥♥ Grigny, Lebègue – Orgue, motets – Ensemble Gilles Binchois, Nicolas Bucher (Hortus)
→ Sur l'orgue de l'abbatiale Saint-Robert de La Chaise-Dieu.

♥♥ Grigny – Les Hymnes – Lecaudey (Pavane)
→ Sur l'orgue Tribuot de Seurre.
https://www.deezer.com/fr/album/5407331

♥♥♥ Grigny – Le Livre pour orgue, avec alternatim – Vox Gregoriana, Mikkelsen

¤ Muffat – Œuvres pour orgue vol. 1 & 2 – Haselböck (Naxos)
→ Orgue blanc terrible.


2) XVIIIe siècle

♥♥♥ Dandrieu – Laissez paître vos bêtes – Maîtrise du CMBV, Jarry (CSV 2019)
→ Tube personnel, sur l'orgue de la Chapelle Royale de Versailles avec cet alternatim de la Maîtrise du CMBV !  (Il figure sur plusieurs notules de CSS.)

♥♥♥ Daquin – Nouveau Livre de Noëls – Gellone, Falcioni (Brilliant Classics)
→ (Première écoute intégrale du Livre ? Variations en réalité.)
→ Saveur extraordinaire, très pincée, acide, colorée, de l'orgue de Saint-Guilhem.

♥♥ Daquin – Nouveau Livre de Noëls – Bardon & St-Maximin

♥♥ Daquin – Nouveau Livre de Noëls – Baumont & Thiérache

♥♥ Daquin – Nouveau Livre de Noëls – Dom Bedos & Mouyen

♥♥ CorretteOffertoire La St François sur l'orgue Dom Bedos / Quoirin de Sainte Croix de Bordeaux (YT 2012)
09 - Dialogue sur les grands jeux - Paul Goussot (YT 2018)
→ Quel orgue !

♥♥ Balbastre – Noëls & pièces formelles – Rabiny-Maucourt-Puget (1781-1869-1953) de Saint-Félix-Lauragais, Pauline Koundouno-Chabert (Psalmus)
→ Pas la plus mobile des interprétations (pour cela, il y a Chapuis & Tchebourkina à Saint-Gervais !), mais le programme est très intelligemment conçu, avec son alternance de pièces formelles et de Noëls, qui évite toute lassitude… et l'orgue a des couleurs à la française réjouissantes !
→ Il existe de toute façon peu de grands recueils Balbastre, et celui-ci est l'un des plus plaisants !


3) XIXe siècle

♥♥♥ Schumann – Esquisses, Études, Fugues (orgue) – Rothkopf (Audite)
→ Trissé. (cf. notule sur ce disque)

♥♥ LISZT, F. / SCHUMANN, R. / MENDELSSOHN, Felix, Blanc, Albert Alain (Orgues du Jura Franco-Suisse, Vol. 2) (M.-C. Alain, Camelin, Champion, Lebrun, Leurent)
→ La Procession prise sous l'orage, quelle chose étonnante (figurative et réjouissante), à défaut d'être profonde musicalement !  Albert Alain est en revanche particulièrement ennuyeux, appliqué, sinistre.
→ Sur ces orgues aux timbres très typés français, les Mendelssohn-Schumann-Liszt prennent une saveur extraordinaire !


3) XXe siècle

Reger : Introduction, Passacaille et Fugue en mi mineur, Op. 127 – Gerhard Weinberger (CPO)
→ Quelle œuvre de la pleine démesure : l'élève (fantasmatique) de Fauré et de Wagner écrivant de la musique tonale (ce qu'il en reste) à l'époque de Wozzeck… Quelque chose dans cet esprit : vagabondage harmonique, certains accords très riches et dissonants, ambiance très sombre et pesante, Passacaille qui évoque davantage Berg que Brahms… le contrepoint, l'enharmonie et les errances tonales partout.
→ C'est monumental – quoique un peu sérieux et discipliné pour être réellement jubilatoire, me concernant. Mais très intéressant, effectivement au bout de la logique de Reger !
→ Très bien capté et phrasé.,

KARG-ELERT, S.: Organ and Piano Music - Poesien +  Silhouetten + arrangement de la Suite de Pelléas de Sibelius – Konttori-Gustafsson, Lehtola (Toccata Classics 2017)
→ La Suite de Pelléas fonctionne vraiment bien (l'orgue enveloppant, le piano mordant).
→ De belles choses dans les Silhouetten, quoique vraiment tradis.

REUCHSEL, E.: Promenades en Provence, Vols. 1-3 / Bouquet de France (extraits) – cathédrale St Louis (Missouri), Simon Nieminski
→ Les progressions figuratives sont beaucoup plus frappantes en vrai, mais ce disque sans éclat particulier a au moins le mérite rare de documenter un florilège de ce catalogue tout à fait digne d'intérêt. Je ne garantis cependant pas l'émotion à l'écoute de l'objet disque – je n'y suis pas parvenu.

Messiaen – L'Ascension – Innig (MDG)
→ Un peu sombre pour le lyrisme et les couleurs de cet opus.

♥♥ Messiaen – Livre saint Sacrement– Innig (MDG)
→ Très sobre et sombre, marche vraiment bien.

♥♥ Messiaen – Messe de la Pentecôte, Livre d'orgue – Innig (MDG)
→ Lecture très accessible, le Livre d'orgue (que je n'avais pas encore essayé dans cette intégrale) est même franchement réussi et échappe tout à fait au formalisme moche que j'y percevais d'ordinaire… !

♥♥ Florentz – Laudes, Prélude de l'Enfant noir, Debout sur le soleil, La Croix du Sud – Roquevaire, Thomas Monnet (Hortus 2014)
→ Très beau dans le style Messiaen, et assez sobre.
→ Trissé.




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O. Piano·s


(quatre mains)

nouveautés
(réédition)
SCHUMANN, R.: Arrangements for Piano Duet, Vol. 3 - Manfred (excerpts) / Symphony No. 3 / Overtures (Eckerle Piano Duo) (Naxos 2015, réédition 2021)
→ Intéressant (Manfred en particulier !), mais exécution vraiment molle. À retenter en d'autres mains.

Chausson, Ropartz, Massenet, Alkan, Chaminade, Godard – Pièces françaises à quatre mains, « Four Hands for France » – Stephanie McCallum, Annie Helyard (Toccata Classics 2021)
→ On retrouve Stephanie McCallum, déjà sur un de mes disques de l'Île Déserte (Dans l'ombre de la Montagne etles Préludes à danser pour chaque jour de la semaine de Ropartz), pour un programme qui, comme l'on pouvait s'y attendre, reste plutôt léger. Même Chausson, le tourmenté et modulant Chausson écrit de la bluette bien consonante, qui évoque davantage un décalque très assagi des Jeux d'enfants de Bizet que le langage d'Arthus ou de ses Maeterlinck… Les Ropartz aussi sont en deçà, à mon sens, du legs pianistique du compositeur. [Tout l'inverse des Allemands, donc, qui sont souvent meilleurs dans les configurations quatre mains / deux pianos.]
→ Très beau projet, mais je n'y ai trouvé rien d'essentiel pour ma part, je ne me sens pas de le recommander spécifiquement dans l'abondance de parutions…

KARG-ELERT, S.: Organ and Piano Music - Poesien +  Silhouetten + arrangement de la Suite de Pelléas de Sibelius – Konttori-Gustafsson, Lehtola (Toccata Classics 2017)
→ La Suite de Pelléas fonctionne vraiment bien (l'orgue enveloppant, le piano mordant).
→ De belles choses dans les Silhouetten, quoique vraiment tradis.


(deux mains)

Schumann, R.: Pedal Piano Music (Complete) - Studies, Op. 56 / 4 Sketches, Op. 58 / 6 Fugues On B-A-C-H (par Martin Schmeding, sur piano d'époque)
→ Rare disque sur un piano-pédalier d'époque. Pas forcément un plaisir au demeurant : piano limité (et peu fiable, d'après le pianiste).
→ En sus, jeu très carré, pas très poétique.

♥♥ Liszt – Vallée d'Obermann – Bolet
→ Toujours pas bouleversé par l'œuvre (souvent un peu univoque, le piano de Liszt).

Peterson-Berger – Improvisations au piano, mélodies – Peterson-Berger
→ Décoratif.

♥♥ Langgaard: Afgrundsmusik (Music of the Abyss), BVN 169 – Berit Johansen Tange
→ Ces inclusions soudaines de motifs brefs complètement dans le langage de Messiaen sont assez folles !




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P. Airs de cour, lieder & mélodies…


nouveautés
STROZZI, B.: Ariette a voce sola / Diporti di Euterpe / Sacri musicali affetti (La voce sola) (Dubinskaitė, Canto Fiorito) (Brilliant 2021)
→ Pas le plus édifiant corpus de son siècle, mais joliment écrit et très bien chanté.

♥♥♥ Schumann – Alle Lieder – Gerhaher, Huber, Rubens, Landshammer, Kleiter, Lehmkuhl… (Sony 2021)
→ Magnifique somme regroupant les cycles Schumann de Gerhaher, parmi les tout meilleurs qu'on puisse entendre et/ou espérer, et permettant de tout entendre, avec bon nombre de nouveautés (tout ce qui n'avait pas été enregistré, et même une nouvelle version de Dichterliebe). Il manque une poignée de lieder présents dans l'intégrale Hyperion, mais sinon, même les lieder en duo et les liederspiele à 4 y sont, tous !
→ Verbe au cordeau, variation des textures, mordant, tension, nuances, c'est la virtuosité d'une expression construite qui impressionne toujours autant chez lui !
→ Les artistes invités, ce n'est pas n'importe qui non plus, ces dames figurent parmi les meilleures liedersängerin de leur génération (Rubens, n'est-ce pas !). Les lieder prévus pour voix de femme sont ainsi laissés aux interprètes adéquates.
→ De surcroît le livret contient des introductions, un classement clair (même une annexe par poètes !) et les textes (monolingues, certes, mais c'est toujours une base de départ confortable pour ceux qui veulent ensuite des traductions).

Duparc, Saint-Saëns, Fauré, Chausson, Ibert, Ravel – Mélodies « Aimer à loisir » – Boché, Durham, Fanyo, Timoshenko (B Records 2021)
→ Issus de leur résidence Royaumont (interrompue par certain perturbateur microscopique de votre connaissance), quatre mini-récitals de duos piano-chant de jeunes artistes, où se distingue particulièrement, sans surprise, Kaëlig Boché, exceptionnel diseur – même si la voix est hélas peu phonogénique par rapport à son intérêt en salle !  Pour entendre Axelle Fanyo à son meilleur, allez d'abord entendre sa dernière Mélodie persane qui vient de paraître en couplage avec La Princesse jaune !

♥♥ (Dinu) Lipatti, Enescu, (Violeta) Dinescu – « Hommage à Dinu Lipatti  », Cycles de mélodies françaises (+ un lied de Dinescu) – Markus Schäfer, Mihai Ungureanu (Drever Gaido)
→ Quelle belle surprise que ce disque, qui documente pour la première fois les mélodies (on dispose que de quelques autres œuvres du disque) de Lipatti ! 
→ Je croyais à une réédition de ses interprétations de Chopin, j'ai failli passer mon chemin et puis j'ai vu le nom de Markus Schäfer, interprète vivant… Bien m'en a pris !
→ Les Marot d'Enescu (remarquablement naturels et riches à la fois) sont couplés avec les Verlaine de Lipatti (un peu plus ouvertement complexes et appliqués, prosodiquement moins exacts, mais très intéressants musicalement). Très belle découverte !
→ Hélas, sur le plan de la réalisation, il faut se contenter d'un français à très fort accent, Schäfer fait ce qu'il peut avec générosité, mais ce n'est clairement pas équivalent à un grand disque de mélodiste aguerri.
→ La longue pièce de Dinescu qui conclut est beaucoup plus ancrée dans le contemporain, mais très vivante et d'une expression assez naturelle malgré les effets. Une belle réussite.

♥♥♥ Miaskovski (Myaskovsky)– « Œuvres vocales vol. 1 » : Livre Lyrique, 12 Romances d'après Lermontov, Sonate violon-piano – Barsukova, Pakhomova, Dichenko, Solovieva (Toccata Classics 2021)
→ Quelle belle surprise que ce corpus, dans le goût généreux, d'un postromantisme enrichi, de ses premiers quatuors (on peut penser au langage traditionnel mais évolué des 4 & 5 !), et très bien servi. → Un très beau jalon du répertoire russe (soviétique en l'occurrence, mais ce sonne plutôt russe).

♥♥♥ Hahn – Trois jours de vendange – Théruel (YT)
→ L'idéal de la mélodie, l'idéal du chant aussi.

Debussy – Mandoline, Le Tombeau des Naïades – Fleming, Thibaudet (Decca)
→ Très intensément dits (comme peu l'osent !), avec un style étrange (plein de changements de timbre, du glissando à tout va…).

Peterson-Berger – Improvisations au piano, mélodies – Peterson-Berger
→ Décoratif.




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Si vous suivez mon exemple, je devrais vous tenir occupés quelques jours encore, le temps que je fournisse une notule digne de ce nom. D'autant que beaucoup de ces disques (à 2 ou 3 cœurs) méritent amplement d'être écoutés plus d'une fois !  Ainsi que ceux des épisodes précédents.

Puissiez-vous, estimés lecteurs, jouir des beautés de la musique retrouvée, tandis que l'Automne – et peut-être les Variants – s'empare doucement de nos vies en extérieur.

mardi 17 août 2021

Le grand tour 2021 des nouveautés – épisode 6 : Glazounov, Sibelius, Messiaen, des Polaks radieux aux Fridolins inconnus, femmes fugueuses, crincrin archaïque du mezzogiorno


Un mot

Toujours la brève présentation des nouveautés (et autres écoutes et réécoutes) de la dernière période écoulée : juin, juillet – et le plus clair d'août.

Pendant ces deux mois et demi, beaucoup de Glazounov, de Sibelius, de Messiaen et de compositrices (découverte émerveillée de Charlotte Sohy, largement du niveau de Chausson, ou de Louise Adolpha Le Beau, réévaluation franche de Lombardini Sirmen, Jaëll et Bonis…) – mais aussi des cycles « musiques de scène de Sullivan », « violon sud-italien du XVIe s. » (écouté tous les disques contenant du Montalbano, le plus souvent une piste par disque…), « germains inconnus qui font de la musique de chambre passionnée ».

Tout cela se trouve aisément en flux (type Deezer, gratuit sur PC ; ou sur YouTube) et en général en disque. Il faut simplement pousser la porte.

(Pardon, mes présentations de titres ne sont pas toutes normalisées, il faut déjà pas mal d'heures pour mettre au propre, classer et mettre un minimum en forme toutes ces notes d'écoutes. Il s'agit vraiment de données brutes, qui prennent déjà quelques heures à vérifier, réorganiser et remettre en forme.)

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La légende

Les vignettes sont au maximum tirées des nouveautés. Beaucoup de merveilles réécoutées ou déjà parues n'ont ainsi pas été immédiatement mises en avant dans la notule : référez-vous aux disques avec deux ou trois cœurs pour remonter la trace.
(Un effort a été fait pour classer par genre et époque, en principe vous devriez pouvoir trouver votre compte dans vos genres de prédilection.)

J'indique par (nouveauté) ou (réédition) les enregistrements parus ces dernières semaines (voire, si j'ai un peu de retard, ces derniers mois).

♥ : réussi !
♥♥ : jalon considérable.
♥♥♥ : écoute capitale.
¤ : pas convaincu du tout.

(Les disques sans indication particulière sont à mon sens de très bons disques, simplement pas nécessairement prioritaires au sein de la profusion de l'offre.)

Le tout est classé par genre, puis par ordre chronologique très approximatif (tantôt la génération des compositeurs, tantôt la composition des œuvres, quelquefois les groupes nationaux…) au sein de chaque catégorie, pour ménager une sorte de progression tout de même.




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A. Opéra

(nouveauté)
♥♥ LULLY, J.-B.: La naissance de Vénus [Ballet] (Cachet, Tauran, Bré, Auvity, Estèphe, Les Talens Lyriques, Rousset) (Aparté 2021)
→ Peu de chant, pas d'action, pas non plus le LULLY le plus vertigineux, mais les interprètes y font des merveilles : élégance suprême des danses, et quelle distribution incroyable, la tendresse de Cachet, l'astringence de Tauran, le mordant incroyablement savoureux d'Estèphe…

Haendel – Rinaldo – Mallon
→ Un peu tranquille à l'usage. Mais beau.

Haendel – Giulio Cesare in Egitto – Esswood, Murray, Harnoncourt
(airs de César, Sextus)
→ Vraiment carré et métronomique. Couleurs « authentiques », mais beaucoup moins souple que Leitner… !

♥♥♥ HANDEL, G.F.: Giulio Cesare in Egitto [Opera] (Sung in German) (Popp, Ludwig, Berry, Bavarian Radio Chorus, Munich Philharmonic, Leitner)
(airs de César, Ptolémée & Sextus)
→ Version tradi pleine de mots et de vie, je l'adore celle-ci.

♥♥♥ Haendel – Giulio Cesare in Egitto – Murray, Karnéus, Robson ; Bavarian State Orchestra ; Bolton (Farao Classics)
(airs Cesare, Sesto & Tolomeo)
→ Remarquablement vif, et chanteuses merveilleuses (Karnéus !). Murray a vieilli mais s'en tire très adroitement !
→ Trissé la sélection !

Haendel – Serse – Murray, Kenny, Robson, Chiummo ; Bavarian State Orchestra ; Bolton (Farao Classics)
(airs choisis, 1h)
→ Plus sec et figé.

♥♥ Haendel – Serse – Fagioli Kalna Genaux Aspromonte… ; Il Pomo d'oro (DGG)

♥♥♥ Carl Heinrich Graun (c.1703 - 1759).Cleopatra & Cesare. Jacobs (HM)
→ Du seria hypertrophié avec grands airs de 10 minutes, dont certains d'une inspiration grisante !

♥♥♥ Rameau – Castor & Pollux (version 1737) – Christie

♥♥ Rameau – Castor & Pollux (version 1754) – Pichon

Mozart – Don Giovanni, final acte I – Bonynge
→ Dans cette veine moelleuse orchestralement et luxueusement chantée, j'avoue que, pour ma part, ce n'est vraiment pas la version qui me convainc le plus. (Je serais plutôt du côté de Solti LPO 78, malgré Weikl et Sass qui ne sont pas la grâce même.)
→ Lecture tout de même globalement très lente, avec un orchestre qui surexpose les cordes (l'English Chamber n'a toujours été chambriste que de nom…), une prise de son fortement réverbérée et qui repousse tout le monde un peu en arrière (si vous parvenez à entendre les lignes individuelles dans l'Engloutissement, je vous admire…), et bien sûr des chanteurs très « globaux » dans leur approche musicale et verbale.
→ Ce n'est même pas Sutherland qui est la pire (au moins elle s'investit expressivement) : Lorengrar ne fait vraiment pas d'efforts de ce point de vue, étalant sa splendide voix homogène avec, à mon sens, beaucoup moins de sens dramatique qu'à l'ordinaire, et d'une manière générale, le sens précis du mot et la situation n'est pas particulièrement souligné – non que ce soit du tout mauvais, mais dans une discographie aussi pléthorique, quitte à distinguer une version, j'attends une qualité d'engagement / de prégnance particulière.
→ À cela s'ajoute l'incongruité de certaines associations : les duos Bacquier-Horne, où la seconde (malgré toute la qualité de timbre et la féminité soulignées par Francesco) semble vouloir dévorer le premier, dont le timbre et les manières un peu trop franches évoquent davantage un pauvre bougre des rues qu'un aristocrate manipulateur et enjôleur, finit par verser dans une veine de comique probablement imprévue.
→ J'aime cependant beaucoup Krenn, dans un grand jour d'élégance, et Monreale, Masetto très charismatique !
→ Et puis je sais que ça intéresse peu en général, surtout pour Mozart (j'ai l'impression que c'est davantage un critère pour Verdi en général), mais l'italien n'est vraiment pas très bon… Sutherland, Lorengrar, Gramm, c'est assez terrible de faire ça…
→ Pour autant, j'aime bien cette version, très bien chantée (si l'on met de côté la question, pas négligeable du tout, de la langue), avec des personnalités fortes. Mais elle ne m'apporte pas autant qu'à vous, clairement. Dans ce genre un peu tranquille, j'aime bien davantage Lombard avec la Radio Suisse Italienne (Forlane 98) : les chanteurs y sont moins proméminents, mais la qualité de langue et le frémissement fin autour du texte et des situations y est, de mon point de vue, davantage réussi.

♥♥ Mozart – Don Giovanni, final acte II – Currentzis (Sony)
→ Très rapide et furieux, à défaut d'être creusé.

Mozart – Don Giovanni, final acte II – Malgoire (Auvidis 98)
→ Vraiment sec, voix courtes. Sans lieto fine.

♥♥ Mozart – Don Giovanni, final acte II – Radio Suisse Italienne, Lombard (Forlane 98)
→ Assez lent et doux, mais finement articulé par les chanteurs (Kotcherga formidable).

(nouveauté)
Beethoven – Fidelio – Davidsen, Elsner, Kränzle, Zeppenfeld ; Landshammer, Groissböck ; Ch Radio Leipzig, Dresden PO, Janowski (PentaTone 2021)
→ Lecture très tradi, pas aussi ardente que les meilleurs Janowski. L'ensemble me paraît un brin épais considérant ce qu'on peut attendre de ce chef à la tête d'un excellent orchestre (mais dont les spécificités ont peut-être baissé pendant les 30 ans où il a peu enregistré?).
→ Vocalement, solide, mais ce n'est pas non plus la fête : Davidsen, Elsner et Landshammer ne sont pas très expressifs. Les trois clefs de fa crèvent les baffles par leur présence et leur inspiration, et le Chœur de la Radio de Leipzig (le meilleur au monde, devant la Radio de Berlin ex-Est ?) ravit absolument. Mais au sein de l'offre très riche, ce n'est pas l'enregistrement à découvrir prioritairement.

♥♥♥ Verdi – Luisa Miller – Moffo, Bergonzi, MacNeil, Cleva (RCA)
→ La version la plus extraordinaire qui soit – mais l'œuvre reste assez moyenne, malgré le tournant qu'elle affirme dans l'esthétique verdienne.

♥♥♥ Verdi, Stiffelio, Battistoni (C Major)
→ La grande version d'un Verdi majeur (le plus mal connu peut-être des Verdi majeurs…).

♥♥♥ Verdi – Il Trovatore – Frittoli, Urmana, Licitra, Nucci ; La Scala, Muti (2000)
→ Orchestralement, fabuleuses atmosphères, finition et pensées extrêmes – de très loin le meilleur disque de Muti, avec son antique Sacre du Printemps où il dirige Philadelphie !

(nouveauté)
♥♥♥ Verdi – Simone Boccanegra – Amarillli Nizza, Fraccaro, Gezim Myshketa, Frontali, F. Furlanetto ; Palermo, Philippe Auguin (Dynamic 2021)
→ Frontali toujours aussi miraculeux de tenue vocale et de verbe haut, plus de vingt ans que ça dure ! Très bel entourage (Fraccaro toujours fruste, mais ça marche bien, et la vaillance est là !).
→ Extraordinaire Paolo de Myshketa, mordant et mordoré…
→ Prise de son Dynamic pour une fois décente, on sent la prise faite dans le théâtre, mais le confort d'écoute reste tout à fait valable.
→ Une grande version !

SULLIVAN: Macbeth / King Arthur / Merry Wives of Windsor – RTÉ, Penny (Naxos 1992)

♥♥ Sullivan – The Pirates of Penzance – Sinclair, R. Lewis, Pro Arte Orchestra, Sargent (EMI)
→ Sinclair rules !  (Richard Lewis aussi.)

♥♥ Massenet – Werther – Etcheverry, actes II & III

(nouveauté)
♥♥ Messager – Passionnément – Gens, Santon, Car, Huchet, Noguera ; É. Dupuis ; Münchner Rundfunkorchester, Stefan Blunier (Bru Zane 2021)
→ Délicieuse suite de couplets (il manque le texte parlé, hélas), qui parle parfois sans détour du corps (« J'ai lu, dans la sainte Écriture » traite largement de la gravité et des seins…), sur une musique élégante et charmante, du chic français. Musicalement un peu interchangeable, sans doute, mais toujours très agréablement mélodique.
→ Très belle équipe, même si les voix féminines sonnent un peu « grand », manquant peut-être un peu de malice dans l'expression.

♥♥♥ NIELSEN – Saul og David – Jenseni (Danacord)
→ Très belle veine épique, remarquablement chantée, voilà un opéra qui frémit, palpite, s'épanche, et dans une langue musicale riche mais calibrée pour le drame – on ne reconnaît les bizarreries de Nielsen qu'à quelques doublures de bois et tournures harmoniques, sans quoi le compositeur s'efface vraiment au profit du drame !
→ Voix incroyables, franches et riches, orchestre très mobile et habité comme toujours avec Jensen, un très grand nielsenien malgré son âge !
→ Bissé.

♥♥♥ Stephan – Die ersten Menschen – Ronge, Nimsgern, Rickenbacher (CPO)
→ Œuvre considérable, interprétation fulgurante.

(nouveauté)
♥♥♥ Marcel Lattès – Le Diable à Paris – Tassou, Dubroca, Laulan, Mossay, P.A. Dubois, Les Frivolités Parisiennes, Dylan Corlay (B Records 2021)
→ Réjouissante loufoquerie qui mêle la bluette, les intrigues d'infidélité et le pacte diabloque, dans une musique d'opérette chargée de clins d'œil (à Berlioz, Gounod…), vivement mélodique et très entraînante. Belle réussite qui avait été préparée pour la scène avant la Fin du Monde – cela s'entend !
→ Une fois de plus, Tassou, Dubroca et P.A. Dubois sont miraculeux, et l'orchestre de toute première qualité, extrêmement engagé et convaincu.

(nouveauté)
Spyridos SAMARA .: Mademoiselle de Belle-Isle [Opera] (Simos, Christoyannis, Maropoulos, Kontos, Kaval Choir of Sofia, Pazardzhik Symphony, Fidetzis) (Naxos 2021)
→ Opéra en français, très conservateur et aimable, dans le goût du romantisme très mesuré et à flux continu de La Carmélite de Hahn.
→ Intrigue à la Cour de France, autour de la figure de Richelieu.
→ Bons chanteurs, orchestre clairement pas dans les premiers de la classe.

(nouveauté)
Abdi – Hafez – Mohammad Motamedi, Babak Sabouri
Haleh Seyfidazeh, NSO Ukraine (Naxos 2021)
→ Malgré l'usage de l'instrumentarium occidental, c'est bel et bien un opéra en arabe, et chanté avec une technique d'émission et une ornementation mélismatique typiques d'une toute autre culture que celle de l'opéra europée. Je n'ai pas été très touché, faute de repère sans doute – ou est-ce un moyen terme intrinsèquement peu convaincant ?
→ Bravo en tout cas, une fois de plus, à Naxos qui documente courageusement ces raretés qui peineront probablement à trouver leur public !

Adès – Powder Her Face – Almeida Ensemble, Adès (EMI)




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B. Récital

♥♥♥ Haendel – « Svegliatevi nel core » de Giulio Cesare – Bolton, Leitner, Jacobs, Minko…

♥♥♥ Gounod – Air du poison – Barrabé

♥♥ Vocal Recital : Berglund, Joel - RANGSTRÖM, STENHAMMAR, WAGNER  / MUSSORGSKY, M.P. / BRAHMS / ROSSINI, G. / MOZART (Recordings) (1937-1961) (Bluebell 2007)
→ Tout chanté en suédois.

♥♥♥ Opera Arias : Björker, Leon - MOZART, W.A. / WAGNER, R. / VERDI, G. / RANGSTROM, T. / ATTERBERG, K. (Great Swedish Singers) (1934-1959)
→ Voix splendide et naturelle, encore plus que Berglund !  Et tout est chanté en traduction suédoise !
→ (Bissé.)

♥♥ Korngold – Pierrots Tanzlied – Hampson

♥♥♥ Orff – Carmina Burana, « Dies, nox et omnia »
versions Gerhaher-Rattle, Ormandy, Cognet-Kuentz, Tézier-Shanghaï…
→ La tessiture extrêmement haute permet d'entendre les barytons sans cravatage, quel plaisir… devraient chanter tout le temps ainsi… on s'aperçoit qu'ils en ont la technique, en plus !




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C. Ballet & musiques de scène

Mozart – Ouverture Lucio Silla – Harnoncourt

Hervé – Ouverture de Mam'zelle Nitouche (version Fernandel)

(réédition)
♥♥ SULLIVAN, A.: Incidental Music - Merchant of Venice (The) / Henry VIII / The Sapphire Necklace: Overture (RTÉ Concert Orchestra, A. Penny) (Naxos 1992, réédition 2021)
→ Remarquablement réussi, et vraiment nourrisant pour de la musique de scène. De beaux pastiches (celui de Donizetti dans la Barcarole du Marchand de Venise !), et servi par la Radio Irlandaise au sommet – les solos de clarinette sont incroyables !

(réédition)
♥♥ SULLIVAN, A.: Île Enchantée (L') [Ballet] / Thespis: Ballet Music (RTÉ Concert Orchestra, Penny) (Marco Polo, réédition Naxos 2021)
→ Quelle remarquable veine mélodique !  Et rien de vulgaire, malgré la simplicité. Orchestre ici encore magnifique.

(nouveauté)
♥♥♥ Thrane, Udbye, Haarklou, Ole Olsen, Apestrand, Elling, Borgstrøm, Eggen – « Ouvertures d'opéras norvégiens » – Opéra National de Norvège, Ingar Bergby (LAWO 2021)
→ Écume d'un patrimoine enfoui où se révèlent de véritables personnalités mélodiques et dramatiques (toutes sont de style romantique) – et enfin une seconde version de l'ouverture de Thora på Rimol, le chef-d'œuvre tétanisant de Borgstrøm ! 
Que ne rejoue-t-on cela sur les scènes de Norvège, puis partout ailleurs, fût-ce en traduction !

Nielsen: Moderen (The Mother), Op. 41, FS 94 (version for choir and orchestra) – Odense Symphony Orchestra; Delfs, Andreas (Dacapo)

(réédition)
♥♥ Stravinski – Ballets russes – Les Siècles, Roth (Actes Sud, réédition HM 2021)
→ Très belles versions très précises et animées, sur les instruments de facture française de l'époque !
→ On gagne un peu en grain, mais à cette date, la différence de timbre et d'équilibre n'est plus très spectaculaire par rapport aux entreprises musicologiques opérées sur le XIXe siècle.




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D. Sacré

(nouveauté)
♥♥♥ Montigny – Grands motets : « Surge propera », « Salvum me fac Deus » – Ensemble Antiphona, Rolandas Muleika (Paraty 2021)
→ Beaucoup de couleurs instrumentales et harmoniques, du beau contrepoint, et une exécution qui a le sens de la danse !

♥♥♥ Haendel – Te Deum & Jubilate d'Utrecht – Rademann (Carus)

(nouveauté)
Verdi – Messa da Requiem – Várady, Milcheva, Cupido, Ghiuselev ; ÖRF, Segerstam (1980, Orfeo 2021)
→ Direction assez calme, exagérant peu les contrastes. Superbe chœur de radio, délicat et expressif. Solistes moins plaisants, en particulier les hommes peu gracieux – quand aux femmes, l'émission paraît parfois légèrement poussée, ce n'est pas leur meilleur soir.
→ Très bonne version, mais dans une mer d'excellentes…

Borgstrøm – Jesus in Gethsemane, Die Nacht der Toten – Norrlandsoperaen, Terje Boye Hansen (Simax 2010)

♥♥♥ Schmitt – Psaume 47 + Salomé – ORTF, Martinon

♥♥ Poulenc – Stabat Mater – Petersen, Cambreling




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E. A cappella

(nouveauté)
♥ DESENCLOS, A. / LANGLAIS, J.: Gregorian Meditations, Requiem, Messe solennelle… (University of Southern California Thornton School of Music Chamber Singers, Scheibe) (Centaur 2021)
→ Motets de Desenclos et une nouvelle version de son méditatif requiem post-fauréen (post-ropatzien ?)  et très marqué par le grégorien.

(nouveauté)
♥ Schnittke – Concerto pour chœur, Trois Hymnes sacrées – Chœur National d'Estonie, Putninš (BIS)
→ Voix un peu rauques (à la finnoise si l'on veut, mais les chœurs finlandais ne sont justement pas comme cela…), belle interprétation énergique bien captée dans ces tons de brun un peu homogènes. (J'aimerais des voix plus colorées / typées ou au contraire plus diaphanes.)
→ L'œuvre de Schnittke, assise sur toute une tradition de chant orthodoxe (quoique le compositeur soit catholique, que la composition date des années 1980 en Russie soviétique et que ses poèmes soient profanes…), s'augmente de frottements harmoniques et de modulations soudaines assez fabuleux – une très belle œuvre du XXe choral !

♥ Bo Holten : chœurs de Macfarren et d'aujourd'hui.




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F. Symphonies


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1) Baroques & classiques

(nouveauté)
♥♥ J.S. Bach: Orchestral Suites Nos. 1-4, BWV 1066-1069 (versions d'origine) – Concerto Copenhagen, Lars Ulrik Mortensen (CPO 2021)
→ Très colorées et affûtées, ces lectures rehaussent d'ardeur et de chatoyance ces suites monumentales. Encore une éclatante réussite de Mortensen !

(nouveauté)
♥♥ Haydn – Symphonies 6,7,8 « Les heures du jour », volume 10 de l'intégrale « Haydn 2032 » – Il Giardino Armonico, Giovanni Antonini (Alpha 2021)
→ Début incroyable du lever du jour !  Ce voile brumeux déchiré par la lumière crue et réchauffante… assez incroyable de suggérer si bien cela en musique.
→ Pour le reste, parmi les grandes versions de ces trois symphonies, cinglantes mais sans sécheresse, colorées sans excès d'effets.

♥♥ Mozart – Symphonies 19 à 30 – Pinnock
→ Mentions spéciales aux 19 (vraiment du très bon Mozart) et 29 !

Mozart – Symphonie n°35 – Brüggen

♥♥ Mozart – Symphonies 35,39,41 – RPO, Beecham (50 à 55, domaine public)
→ Adoré la 35, c'est vif, net, avec un son ample et confortable qui manque parfois aux ensembles sur instruments d'époque. On sent bien dans les traits que les cordes n'ont pas le même niveau qu'aujourd'hui, mais l'ensemble est propre et très vivant.
→ Dans les 39 et 41, ça sentait davantage son âge ai-je trouvé : structures moins sensibles, lenteurs, épaisseurs. Et pas le même wit.

(nouveauté)
♥ Pavel Vranický / Paul Wranitzky: Orchestral Works, Vol. 2 : Ouverture, Symphonies – Cz Chb PO, Pardubice, Marek Stilec (Naxos 2021)
→ Jolies œuvres où l'on sent un peu de la force mélodique de Vranický, et bien interprétées sur un orchestre tradi pas très colorées… Mais je n'ai pas eu l'impression d'être confronté aux œuvres qui font sa grandeur.


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2) Premier romantisme

(nouveauté)
C. Stamitz – Symphonies, dont « Le Jour variable » – Die Kölner Akademie, Michael Alexander Willens (CPO 2021)
→ Cette symphonie à titre est en effet très marquée par le style français, et permet de replacer (comme Knecht !) la Pastorale de Beethoven dans un environnement stylistique naturel & figuraliste contemporaion.
→ Entrée pastorale réutilisant les mêmes ponctuations ornithologiques que Beethoven, orage peu paroxystique, nuit suspendue, chasse très figuratives (avec sections de cors autonomes très imitatives), joli ensemble.

♥♥ Orchestral Music - BEETHOVEN, L. van / BRAHMS, J. / GLINKA, M.I. / GLUCK, C.W. / MUSSORGSKY, M.P. (Dresden Philharmonic, H. Kegel)

(nouveauté)
Beethoven – Symphonie n°3, Coriolan – Ensemble Cristofori, Arthur Schoonderwoerd (Cavi 2021)
→ Avec son ensemble à un par partie qui avait révolutionné les équilibres des concertos pour piano de Beethoven (que j'avais adorés ainsi acides, secs, nerveux, colorés), Schoonderwoerd s'attaque à l'Héroïque. Moins convaincu par le résultat : par rapport aux autres versions sur instruments anciens, moins de prise de risque dans le tempo et d'originalités dans les effets. Le manque d'ampleur des cordes à 1PP se fait sentir aussi pour l'ambitus expressif face aux vents. Plaisant, mais pas du tout neuf / essentiel.

Ries – Symphony No. 5 in D Minor, Op. 112 – Zürich Chamber Orchestra, Howard Griffiths (CPO)
→ Avec motif type Beethoven 5.

(nouveauté)
Schacht: Symphonies, Vol. 2 – Evergreen Symphony Orchestra, Gernot Schmalfuß (CPO 2021)
→ Toujours réjouissant orchestre, dans ces symphonies d'un classicisme finissant. Le menuet de la symphonie en sol est absolument ravissant, un bijou qui pépie si joliment !

♥♥ Frøhlich: Symphony in E-Flat - Gade: Symphony No. 4 National  de la Radio Danoise, Hogwood (Chandos 2013)

(nouveauté)
♥♥ Kurpiński, Dobrzyński & Moniuszko – Élégie, Symphonie n°2, Bajka – Wrocław Baroque O, Jarosław Thiel (NFM)
→ Jeune romantisme fougueux de haute qualité, interprété sur instruments d'époque, avec un feu exemplaire… Jubilatoire de bout en bout !

♥♥ Gade – vol. 3, Échos d'Ossian, Symphonies – Radio Danoise, Hogwood (Chandos)

(nouveauté)
♥♥ FARRENC, L.: Symphonies Nos. 1 and 3 (Insula Orchestra, Equilbey)
→ Lecture très dramatique sur instruments d'époque, l'occasion de réévaluer sérieusement le legs symphonique de Farrenc, jusqu'ici mal servi par des orchestres & chefs qui n'en maîtrisaient pas nécessairement le style.
→ On n'y découvre pas, à mon sens, une œuvre de tout premier intérêt comme le sont les symphonies de Dobrzyński ou Macfarren, mais il s'agit d'œuvres de belle facture, davantage dans l'air du temps que celles que nous avons l'habitude d'écouter, et qui ont tout pour contenter l'auditeur – hors, peut-être, la veine mélodique immédiate et la surprise.
→ L'avantage de mettre à l'honneur les compositrices est de forcer, mécaniquement, à

♥♥♥ Macfarren – Symphonies 4 & 7 – Queensland PO (int-1), W.A. Albert (CPO)
→ Écriture qui doit encore beaucoup à Beethoven et Weber, d'un très beau sens dramatique, trépidant !
→ Orchestre un peu casserole (timbres de la petite harmonie vraiment dépareillés), mais belle écriture romantique.
→ (Quadrissé.)


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3) Deuxième romantisme

Sullivan – Pineapple Poll (arr. C. Mackerras) + Symphonie en mi « Irish » – Royal Liverpool Philharmonic Orchestra, Lloyd-Jones (Naxos 2007)
→ Réorchestration de la matière d'un opéra, pour en faire un ballet.
→ Symphonie pas forcément passionnante sur le plan de la forme ou de l'orchestration, mais quelles belles mélodies, à nouveau !  (le final en particulier)
→ Ici aussi, très bel orchestre (hautbois !), bien capté.

(nouveauté)
Boëllmann – Symphonie en fa majeur, Variations symphoniques & Quatre pièces brèves – Henri Demarquette, Mulhouse SO, Patrick Davin (Fuga Libera 2021)
→ Symphonie romantique, avec des doublures alla Franck ajoutées. Plaisant.
→ (Bissé.)

(nouveauté)
Bruckner – Symphonie n°3, version originale de 1873 – Bergen PO, Dausgaard (BIS 2021)
→ Très vif à nouveau, minimisant le vibrato mais aussi les ruptures, Dausgaard file – amenuisant peut-être les contrastes cette fois. Pas totalement convaincu par le résultat : certes le spectre est allégé et les grands thèmes du I prennent bien vie, mais l'absence de ruptures audibles brouille un peu l'appréhension du fonctionnement même de ces symphonies (juxtaposition / contamination de thèmes disjoints et encyhaînés sans transitions).

(réédition)
♥♥ Bruckner – Symphonie n°6 – Radio de Berlin-Est, Rögner (Eterna, Berlin Classics, réédition 2021)
→ Fidèle à ses conceptions très allantes et naturelles, pleines de clarté de lisibilité, Rögner livre ici un Bruckner particulièrement fluide et avenant, pas du tout menaçant, mais toujours tendu vers l'avant – il tient remarquablement la tension, témoin sa Troisième de Mahler quasiment sans égale de ce point de vue, arche unique ininterrompue…

Mayer: Symphony No. 5 - Mendelssohn-Hensel : Hero und Leander - Le Beau: Piano Concerto, Op. 37 – Katia Tchemberdji, Berlin ChbSEns, Jurgen Bruns (Dreyer Gaido 2010)
→ Hors Mendelssohn-Hensel, courte cantate plutôt bien faite, des œuvres pas forcément enthousiasmantes, assez lisses. (Déçu que Le Beau, géniale dans la musique de chambre, me laisse tomber comme cela !)

Tchaïkovski – Symphonie n°4,5,6 – Sanderling & Mravinski (DGG mono)
→ Assez raide, surtout Mravinski, sans la tenue implacable de la version stéréo plus célèbre.

Tchaïkovski – Symphonie n°6 –  Karajan 77 (DGG)
→ Pour les timbales de son scherzo-marche… La version tient par ailleurs assez bien !

♥♥ Tchaïkovski – Symphonie n°6 – Moravian PO, Lawrence Golan (Albany)
→ De très loin la version la plus rapide du final. Je l'aime beaucoup.

Glazounov – Symphonie 1 – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)
→ Vraiment pas passionnant, surtout par rapport aux 5 & 6, comme œuvres, même avec Fedoseyev !

♥♥ Glazounov – Symphonies 2,3 – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)
→ La 2 vraiment plus marquante et animée, avec en effet des influences allemandes spécifiques !
→ Son scherzo est incroyablement proche du I de Saint-Saëns 3 !

♥♥♥ Glazounov – Symphonies 4,5,6 – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)
→ Les bijoux de la série, avec des thèmes russes typés irrésisitibles (notamment la 4, mais le sommet de générosité lyrique est contenu dans la 5 !). Version totalement électrique, qui sublime l'orchestration très traditionnelle de Glazou.
→ 4 bissée

♥♥♥ Glazounov – Symphonies 5,6,7 – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)
→ Incroyable de transformer à ce point ce corpus un peu lisse en une telle générosité mélodique pleine d'urgence !

Glazounov – Symphonie 7 – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)


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4) Postromantisme & décadents

¤ Mahler – Symphonie n°9 – OPRF, Haenchen (Vidéo France Mu)
→ Je n'ai pas noté de commentaire, je suis surpris de ne pas avoir aimé à ce point… Erreur de mise en forme peut-être.

♥♥♥ Magnard – Symphonies 1,2,3,4 – Ph. Fribourg Suisse, Bollon (Naxos)
→ Réécoute des Magnard de Bollon. Toujours la même révélation – la forme germanique peut-être, mais ici éclate la dette envers le folklore français !

♥♥ Sibelius – Symphonies 1 & 4 – LSO, Collins (Decca)

Sibelius – Symphonie n°2 (en entier) – LSO, C. Davis (RCA)
→ Belle prise de son et des bois superbes (en effet, un petit côté distancié émotionnellement, mais non sans chaleur pour autant). Je ne suis pas sûr que ce ne soit pas la version qui m'ait laissé dubitatif il y a quelques années, d'ailleurs (les cordes y sont d'une articulation parfois un peu large).
→ Un peu lourd sur la durée, malgré les qualités exceptionnelles de la petite harmonie et du timbalier !

Sibelius – Symphonie n°2 (mvt I) – Boston, C. Davis (Philips)
→ Un peu hiératique, mais beau creusé des contrebasses.

¤ Sibelius – Symphonie n°2 (mvt I) – LSO, C. Davis (LSO Live)
→ Les défauts de la précédente version y semblent plus accentués (moins belle prise de son, bois moins séduisants, tempi apparemment plus lents, et cordes vraiment baveuses). La moins bonne des trois versions Davis.

♥♥♥ Nielsen – Symphonie n°2 – Tivolti Concert Hall SO, von Garaguly
→ Électrisant !  Mais seulement trouvé le premier mouvement, dans un coffret…

♥♥♥ Nielsen – Symphonies 2 & 6 – Stockholm RPO, Oramo (BIS)

Sibelius – Symphonies 2,5 – Rai Torino & Cleveland ; Rodzinski
→ Belles lectures, assez dynamiques pour leur époque – mais l'on a eu plus coloré, ardent et en place depuis.

♥♥ SIBELIUS, J.: Symphonies Nos. 3 and 5 (Kajanus Conducts Sibelius, Vol. 3) (1928, 1932)

♥♥ Sibelius – Symphonies 3,6 – Pittsburgh SO, Maazel (Sony)

♥♥♥ SIBELIUS, J.: Symphonies Nos. 4 and 6 / The Swan of Tuonela (Leipzig Radio Symphony, Kegel, Berlin Radio Symphony, Berglund) (Berlin Classics)

Sibelius – Symphonie n°6 – LSO, C. Davis (RCA)

Bax – Symphonie n°2 – BBCSO, Goossens (Lyrita)
→ Lyrita, décidément les meilleures prises de son / restaurations pour la musique symphonique britannique. Rien ne se compare à leur naturel et leur présence physique !

¤ Stravinski – Sacre du Printemps – OPRF, Franck (Vidéo France Mu)
→ Vraiment lisse, dommage, Mikko Franck ne semble plus beaucoup proposer de challenges à son orchestre (répertoire comme recherche esthétique).

RIISAGER, K.: Symphonic Edition, Vol. 1 (Aarhus Symphony, Holten) - Symphony No. 1 / Danish Pictures (Da Capo)

♥♥ Rubbra – Symphonie n°6 – Philharmonia, Norman Del Mar (Lyrita)
♥♥ Rubbra – Symphonie n°8
→ Remarquablement bâties et persuasives.

Rubbra – Symphonie n°2 – Handley  (Lyrita)
Rubbra – Symphonie n°7 – Boult (Lyrita)
→ Beaucoup plus sombres.

Rubbra – Symphonie n°3 – Philharmonia, Norman Del Mar (Lyrita)
Rubbra – Symphonie n°4 – Philharmonia, Norman Del Mar (Lyrita)
→ Moins marqué. Accumulation ?

(nouveauté)
Furtwängler: Symphonie n°1 en si mineur – Württembergische Philharmonie Reutlingen, Fawzi Haimor (CPO 2021)
→ L'interprétation et la prise de son permettent enfin de rendre justice aux compositions de Furtwängler, de façon favorable. Moins brucknérien et confus qu'il y paraissait, malgré la vastitude de dimensions et la disparité des attitudes (parfois Bruckner, parfois R. Strauss…) : il manque une inspiration mélodique pour séduire, certains mouvements paraissent l'application un peu formelle de grands principes sans contenu dont l'urgence frapperait, mais l'ensemble n'est pas dépourvu de qualités (en particulier le grand premier mouvement généreux et plein de climats divers et mêlés).

Barber – Symphonies n°1 & 2 – Detroit SO, N. Järvi (Chandos)
→ Bonnes œuvres, pas particulièrement prégnantes, mais moins grises que dans mon souvenir (il faut dire que Bruno Walter & Columbia, pour le relief et la chatoyance…).

(nouveauté)
♥♥ Maliszewski – Symphonies 1,2,3,4, ouvertures et poèmes symphoniques – (DUX 2021)
→ Postromantisme très sobre et lumineux, mais garni d'arrières-plans (on songe beaucoup aux 3 & 4 de Sinding), d'une tension et d'un renouvellement remarquables. Interprétation trépidante, totalement au niveau.
→ Délectable et enthousiasmant, chaleureusement recommandé… encore un carton pour DUX !


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5) Autres écoles du XXe siècle

♥ Bo LINDE –  Symphonies Nos. 1 and 2 / Pensieri sopra un cantico vecchio – « Orchestral Works, Vol. 3  » – Gävle SO, Peter Sundkvist (Swedish Society)




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G. Poèmes symphoniques

♥♥ Holmès – Polonia, interlude de Ludus pro Patria (Naxos)

♥♥♥ Glazounov – Marche en mi bémol – RTV Moscou, Fedoseyev (Denon)
→ Petit bijou roboratif !

Sibelius – Suite de Pelléas, Rakastava, Tapiola, Luonnotar… – Davidsen, Bergen PO, Gardner (Chandos 2021)
→ Jolie lecture un peu lisse. Rien à voir avec la palpitation de leur Troisième Symphonie ! (vidéo de concert aisément trouvable)
→ Je recommande plutôt N.Järvi-Göteborg pour la suite, et Vänskä-Lahti pour la musique de scène intégrale.
→ Pas encore écouté Tapiola et Luonnotar.

♥ Adolphe Biarent (1871-1916) – Poème Héroïque, Rapsodie Wallonne, Contes d'Orient (Diane Andersen : piano ; Pierre Bartholomée) (Cyprès 2009)

(réédition)
♥♥♥ Holst – The Planets – Chicago SO, Levine (DGG, réédition 2021)
→ La version la mieux captée, et l'une des plus abouties sur le plan de la tension, des textures, de la lisibilité. Que vous désiriez du cinéma ou de la haute vue musicale, la proposition répond à toutes les attentes !

Delius –  « Orchestral Works, Vol. 3 » – Brigg Fair (An English Rhapsody w. orch de studio) // Koanga, Act II: La Calinda (arr. E. Fenby) // Delius: Hassan, Act V: Closing Scene: We take the Golden Road to Samarkand // Irmelin Prelude // Delius: Appalachia (Variations on an Old Slave Song) – LPO, Beecham (1928, 1938, remastering Naxos)
→ Plaisant. Son un peu ancien. Œuvres pas forcément saillantes.

(nouveauté)
Goldmark: Symphonic Poems, Vol. 2 – Bamberger Sphkr, Fabrice Bollon (CPO 2021)
→ Beaux épanchements postromantiques, en particulier le Prélude de Götz von Berlichingen.
→ (Bissé.)

(nouveauté)
R. Strauss – Eine Alpenfinsonie – Radio de Berlin (ex-Est), V. Jurowski (Pentatone 2021)
→ Une nouvelle belle version (où l'on retrouve le travail des bois à la russe de Jurowski).

♥♥ Riisager – Le paradis des fous (et autres) – Hardenberger, Helsingborg Symphony, Dausgaard (Dacapo)

♥♥♥ Bo LINDE –  A Merry Overture / Musica concertante / Suite variee / Suite boulogne – « Orchestral Works, Vol. 2  » – Gävle SO, Peter Sundkvist (Swedish Society)
→ La Musica concertante, quel Chosta exubérant, sur un versant riant et jubilatoire !
→ Tout bissé.
→ Trissé Musica concertante.
→ Suite Boulogne, néoclassicisme de la meilleure eau !

Messiaen – Chronochromie – Muraro, SWR-FBB, Cambreling
Messiaen – La Ville d'En-haut – Muraro, SWR-FBB, Cambreling
Messiaen – Le Réveil des oiseaux – Muraro, SWR-FBB, Cambreling
♥♥♥ Messiaen – Oiseaux exotiques – Muraro, SWR-FBB, Cambreling

Messiaen – Un Vitrail et des Oiseaux – Yvonne Loriod, Radio-Symphonie-Orchester Berlin, Karl Anton Rickenbacher (DGG)

♥♥♥ Márquez – Danzón n°2 – Simón Bolivar O, Dudamel (YT)




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H. Lied orchestral

(nouveauté)
♥♥♥ Wagner, Berg, Mahler: Orchesterlieder – Anja Harteros, Münchner Philharmoniker, Valery Gergiev (Münchner Philharmoniker 2021)
→ Alors que je ne tiens pas Harteros en haute estime : jeu impavide, timbre légèrement poisseux, projection limitée, sens des mots minimal… aussi bien en retransmission que sur le vif, j'ai rarement été conquis.
→ Et pourtant ici, superbement capté, sertie dans un orchestre chatoyant mais que la science de Gergiev maintient aéré, elle semble se couler avec un naturel incroyable dans le lied décadent, avec une jutesse de l'expression et une aisance vocale qui me stupéfient. Peut-être les plus belles versions que j'aie entendues pour les Wesendonck (Delunsch exceptée évidemment) et les Frühe-Lieder !
→ Les Rückert sont plus étranges, mais intéressent par leurs options vocales originales, eu égard au pas de côté y proposant une voix de soprano. Um Mitternacht irradie remarquablement !

♥♥ H. Andriessen: Miroir de peine - Berlioz: Symphonie fantastique – Stotijn, Zuidnederland PO, Dmitri Liss (Fuga Libera)
→ La plainte d'Andriessen sur ses grands aplats de cordes est très impressionnante, et jouée avec une présence vibrante par tous les interprètes.
→ La Fantastique a l'air très belle aussi, mais j'avoue ne pas avoir eu la fantaisie de l'explorer sérieusement cette fois-ci.

(nouveauté)
♥ H. Andriessen – Miroir de peine, variations orchestrales, concertos – Roberta Alexander, PBChbO, Porcelijn ; Th. Fischer (Brilliant 2021)
→ Hors le Miroir remarquablement chanté, encore mieux que dans la version Stotijn, œuvres vraiment pas parmi les plus brillantes d'Andriessen.




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I. Concertos

Haendel – Concerti Grossi Op.3 – Minkowski
→ Superbe son, très vivant, plus intéressant que l'opus 6 plus formel (plein d'arrangements d'opéras ou d'imitations du style dramatique).

Haendel – Concerti Grossi Op.6 – Il Giardino Armonico, Antonini
→ La version la plus vivante de ce corpus, qui reste assez formel et empesé à mon gré… Rendez-nous Vivaldi !

Haendel – Concerti Grossi Op.6 – Harnoncourt
→ Vraiment œuvre pas du tout réjouissante.

♥♥ Vivaldi – 8 Concertos sur instruments anciens – I Musici di San Marco, Alberto Lizzio (BCD / Arabesque / Vienna Master Series 1988…)
→ Enregistrement frauduleux sous pseudonyme très diffusé pour les budget labels… (J'aime cependant beaucoup la sélection, et l'exécution, par un ensemble croate j'ai l'impression, est très réussie, surtout pour la date !)

Vivaldi: Concerti per oboe (Concerti per strumenti a fiato, Vol. 2) – par Ensemble Zefiro, Alfredo Bernardini (Naïve)

♥♥ VIVALDI, A.: Bassoon Concerto, RV 495 / Cello Concerto, RV 416 / Nisi Dominus / We Are the Ocean (Jupiter, Dunford) (Alpha 2018)

Vivaldi – Concerti grossi (RV 571…) 
♥♥ Les Ambassadeurs / Kossenko
♥♥ Ancient Music / Hogwood
♥♥ Fioritura (Centaur)

♥♥♥ Du Puy, Weber, Mozart – Concertos pour basson – van Sambeek, SwChbO, Ogrintchouk (BIS)
→ On peut donc faire ça avec un basson ! Cette finesse (changeante) de timbre, cette netteté des piqués, cette perfection du legato, j'ai l'impression de découvrir un nouvel instrument. J'aurais aimé la Chambre de Suède un peu moins tradi de son (comme avec Dausgaard), mais je suppose que le chef russe a été formé à un Mozart plus lisse (ça ploum-ploume un peu dans les basses…).
→ Quand au du Puy, c'est une petite merveille mélodique et dramatique qui sent encore l'influence du dramatique gluckiste dans ses tutti trépidants en mineur, une très grande œuvre qui se compare sans peine aux deux autres !  Le thème B du premier mouvement (d'abord introduit à l'orchestre par un duo clarinette basson), quelle émotion en soi, et quel travail de construction au sein du mouvement – l'emplacement formel, l'effet de contraste des caractères…
→ (Bissé.)

♥♥♥ Hummel – Concerto pour basson – Kuuksmann (Estonian Record Productions 2015)
→ Grande version, assez roots, du génial concerto de Hummel.

Hertel – Concertos pour harpe – Kurpfalzisches ChbO, Kevins Griffiths (CPO 2017)

(nouveauté)
♥♥ Hertel – Concertos pour violoncelle, orgue ; Symphonies – B. Messerschmidt, Merseburger Hofmusik, Michael Schönheit (CPO 2021)
→ Belle veine mélodique et bel élan (en particulier dans le concerto pour violoncelle en la mineur, à essayer !

Beethoven – Concertos 1,4,5 – Lubin, Ac Ancient Music, Hogwood (Oiseau-Lyre / Decca)
→ Captation étrange avec le piano très audible et décorrélé du spectre (les ingénieurs ont eu peur que l'équilibre soit différent de d'habitude ?). Orchestre qui ne sonne pas si typé que cela.
→ Jolie lecture pas très originale.

Beethoven – Concertos 1,4,5 – Levin, ORR, Gardiner (Arkiv)
→ Piano là aussi assez aigrelet, mais très belle finition orchestrale très vivante.

♥♥♥ Beethoven Concerto piano n°3,4,5,6 : Schoonderwoerd, Cristofori (Alpha 2014)
→ Toujours aussi surprenant et exaltant !

♥♥ Beethoven Concerto piano n°5 : Bellucci
→ Beaucoup d'effets de décorrélation agogiques, un peu sophistiqués pour l'époque ?  Très beau, mais un peu poseur par moment, à la réécoute.

(nouveauté)
Beethoven – Concertos pour piano – Zimerman, LSO, Rattle (DGG 2021)
→ Certes musicologiquement informé, mais plongé dans une sorte d'impavidité un peu uniforme. Très joliment décoratif, mais il me semble que l'impact émotionnel de ces œuvres mérite davantage.

(nouveauté)
Beethoven – « Fiedelio », extraits de Fidelio arrangés pour violon & orchestre par Franz Hummel – Elena Denisova, Russian NO, Alexei Kornienko (Sony 2021)
→ Bien vu, les doubles cordes pour les émissions en force au début de « Gott ! welch dunkel hier » ou « Abscheulischer ! wo eilst du hin ? ».
→ Sinon, vraiment pas le même panache qu'avec des voix, et orchestre très lisse. Pas prioritaire.

♥♥♥ Offenbach – Concerto pour violoncelle – Moreau, Les Forces Majeures

Le Beau:  Piano Concerto in D Minor, Op. 37 + Mendelssohn-Hensel:  Hero und Leander – Tchemberdji, Katia; Berlin Chamber Symphony Ensemble; Bruns, Jürgen  (Dreyer Gaido 2003)

Borgstrøm – Concerto pour violon – Eldbjørg Hemsing, Wiener Symphoniker, Olari Elts (BIS 2018)
→ Une jolie œuvre de l'immense compositeur d'opéra romantique.

(nouveauté)
KAPRÁLOVÁ: Waving Farewell / Suite en Miniature / Piano Concerto (Phan, Amy I-Lin Cheng, University of Michigan Symphony, Kiesler) (Naxos 2021)

Chostakovitch – Concerto pour violon n°1 – Eldbjørg Hemsing, Wiener Symphoniker, Olari Elts (BIS 2018)
→ Aucun souvenir de ce concerto-là.
→ Oh, mais pas mal, dans l'esprit du premier trio, très lyrique et passionné, beaucoup moins tourmenté.

♥♥♥ Bo LINDE –  Concertos pour violon & violoncelle – « Orchestral Works, Vol. 1  » – Karen Gomyo, Kliegel, Gävle SO, Peter Sundkvist (Swedish Society)
→ Musicalité fabuleuse du concerto pour violon. Celui pour violoncelle un peu en deçà, comme toujours…
→ Bissé.

(nouveauté)
Nikolai Kapustin – Concerto pour piano n°4, Double Concerto – Frank Depree, Kammerorchester Heilbronn, Scaglione (Capriccio 2021)
→ Emprunts massifs au jazz discursif (et à Chopin pour le reste).

(nouveauté)
Anna Clyne, DANCE // Elgar, Cello Concerto – Inbal Segev, LPO, Marin Alsop (Avie 2020)
→ Écouté seulement Clyne. Une fois de plus, autant c'est très bien écrit en sonne bien en salle, autant l'art de Clyne paraît comme réduit par le disque, perdant en détails et en impact : essentiellement mélodique, très tradi-planant, agréable musique de fond peu nourrissante.  Les parties rapides mobilisent davantage l'héritage « technique », comme ces doubles cordes redoutables du II.




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J. Musique de chambre


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1) Formations diverses

(réécoute nouveauté)
♥♥ Michl – Quatuors basson-cordes – Hoadley, The Hall String Trio (Naxos 2020)
→ Contribution très inspirée à ce format galant : de véritables progressions, et une veine mélodique de grande qualité !

(nouveauté)
♥♥ Dubois – Musique de chambre avec hautbois ou quatuor à cordes : Quintette hautbois-piano-cordes, Méditation, Quatuor en mi bémol, Méditation-pière, petits rêves d'enfants (Lajos and Leo Lencsés, Surgik, Dubois, Váradi, Renie Yamahata, Parisii Quartet, Budapest Strings) (Toccata  2021)
→ Reprise les pièces pour Quatuor par les Parisii déjà publiées par la SWR. Nouvelle version du Quintette pour hautbois, bien réussie, avec le son très nasillard de Lencsés.
→ La Méditation-prière est très « Méditation de Thaïs » (en mieux, avec cette fausse simplicité diatonique inimitable, typique de Dubois).
→ Le Quatuor n'est pas mémorable, mais le Quintette est absolument à connaître – je recommande pour ma part la version du Trio Hochelaga & Friends, chez ATMA, mais ce disque fait très bien l'affaire !

(nouveauté)
LANGGAARD, R.: Music of the Abyss (Asmussen, Esbjerg Ensemble) (Da Capo 2021)
→ La Musique des Abysses, pièce pour piano arrangée par A.G. Madsen pour effectif de chambre, avec son xylophone obstiné en mode 2 (on nage vraiment dans le Messiaen !), est un objet chambriste et répétitif, de dimension symphonique, d'une insolence assez impensable.
→ Pour le reste du disque, de la musique de chambre assez plaisante et décorative (quoique toujours étrange), comme le ravissant Septuor que la précédente version Da Capo avait illustré par un portrait champêtre académique de jeune fille devant des blés…
→ Les timbres ne sont d'ailleurs pas magnifiques (cor pâteux notamment) – j'avais un meilleur souvenir de la version antérieure.
→ Les mélodies avec chanteuse sont assez réussies (et très bien chantées). Le reste du corpus, plus néo , moins touchant à mon gré, mais les cheminements lents et retors de l'Humoreske ne manquent pas d'intérêt.


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2) Sextuors & quintettes, à cordes

Brahms – String Quintet No. 2 in G Major, Op. 111 – Quatuor Voce, Berthaud (Alpha)

Brahms – String Quintet No. 2 in G Major, Op. 111  – P. Fouchenneret, Okada, Berthaud, Boisseau, Salque, Levionnois (B Records 2018)

Brahms: Clarinet Quintet in B Minor, Op. 115 (version for viola and string quartet) – David Aaron Carpenter, membres Berliner Phkr (Ondine)
→ Pas convaincu, alto sonne malingre(ment ?). Belles cordes douces.

♥♥ KÖSSLER, H.: String Quintet in D Minor / String Sextet (Frankfurt String Sextet) (CPO 2007)
→ Très bien écrit ! Riche contenu d'un romantisme assumé, qui peut rivaliser avec les grands représentants de second XIXe !
→ (Bissé.)

♥♥♥ Arnold Krug – Sextuor à cordes, Quatuor piano-cordes – Linos Ensemble (CPO 2018)
→ Sextuor lumineux et enfiévré, une merveille ! Entre le dernier quatuor de Schoeck et le Souvenir de Florence de Tchaïkovski !
→ Quatuor piano-cordes tout aussi intensément lyrique, avec quelque chose de plus farouchement vital, d'un romantisme qui ne se cache pas. Splendidement tendu, une autre merveille qui vous empoigne, tendu comme un arc dans le plus grand des sourires !
→ Une des mes grandes découvertes chambristes récentes !  (Une notule y a même été consacrée en début d'année…)
→ (Bissé.)



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3) Quatuors à cordes


LOMBARDINI SIRMEN, M.L.: String Quartets Nos. 1-6 (Accademia Della Magnifica Comunità)
→ Quatuors de 1769, et déjà très aboutis.
→ Grande chambriste, il faut absolument connaître ses duos pour deux violons, dans le goût français, absolument enthousiasmants et roboratifs !
→ (Bissé.)

♥♥♥ Bacewicz – Quatuor 4 violons – Kinetic (YT 2016, à Houston)
→ Ces rémanences folklorisantes adaptées dans la manière la plus hardies et complexe qui soit, quelle merveille !
→ https://www.youtube.com/watch?v=RaEcs1ZQoVk

(nouveauté)
♥♥ Jurgis Karnavičius: String Quartets Nos. 3 & 4 – Vilnius String Quartet (Ondine 2021)
→ Les 1 & 2 ont paru récemment, et ont été très favorablement commentés ici même. (Je les ai, comme souvent, davantage aimés que les suivants.)
→ Postromantisme tantôt sombre tantôt lumineux, avec un sens mélodique fort et de jolis effets de structure (violoncelle solo en mineur vs. quatuor complet en majeur, etc.).


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4) Quintettes piano-cordes

Saint-Saëns (1835-1921) – Piano Quintet in A minor, Op.14 – Take 5 Piano Quintet (YT 2016)
Widor (1844-1937) – Piano Quintet in D major, Op.68 – Take 5 Piano Quintet (YT 2016)

Widor (1844-1937) Piano Quintet in D major, Op.68, final – Fine Arts SQ (Naxos)

Bacewicz – Quintettes piano-cordes, Sonate piano n°2 – K. Zimerman (DGG)
→ Quintette 1 assez sinistre, pas forcément très distinctif dans son catalogue. Sonate 2 plus originale, là aussi très tourmentée.
→ Quintette 2 beaucoup plus défragmenté et expressif, qui a passé une bascule stylistique !

♥♥♥ Pejačević:  Piano Quintet in B Minor, Op. 40 – Sine Nomine SQ, Triendl


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5) Quatuors piano-cordes

♥♥♥ Louise Adolpha Le Beau - Piano Quartet Op.28 -  Irina Puryshinskaja (pno), Berit Cardas (vl), Klaus Christa (vla), Björg Vaernes Lewis (cl) – (YT 2020)
→ Du grand beau romantisme allemand, remarquablement bâti !
→ À écouter ici.

Fauré – Piano Quartets – Mozart Piano Quartet (MDG)
→ Très fondu, un peu mou.

♥♥♥ Fauré – Piano Quartets – Quartetto Fauré di Roma
→ Merveilleuse énergie directrice qui ne dédaigne pas les halos colorés…

♥♥♥ Arnold Krug – Sextuor à cordes, Quatuor piano-cordes – Linos Ensemble (CPO 2018)
→ Sextuor lumineux et enfiévré, une merveille ! Entre le dernier quatuor de Schoeck et le Souvenir de Florence de Tchaïkovski !
→ Quatuor piano-cordes tout aussi intensément lyrique, avec quelque chose de plus farouchement vital, d'un romantisme qui ne se cache pas. Splendidement tendu, une autre merveille qui vous empoigne, tendu comme un arc dans le plus grand des sourires !
→ Une des mes grandes découvertes chambristes récentes !  (Une notule y a même été consacrée en début d'année…)
→ (Bissé.)

Bonis – Piano Quartets – Mozart Piano Quartet (MDG 2008)

♥♥ Dora Pejačević: Piano Quartet in D Minor – Quatuor Sine Nomine; Triendl, Oliver (CPO)
→ (Bissé.)


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6) Trios piano-cordes

♥♥ Le Beau –  « Kammermusik » : Trio, sonate violon, sonate violoncelle – Bartek Niziol, Denis Severin, Tatiana Korsunskaya (MDG 2014)
→ La densité, le naturel !

(nouveauté)
♥♥ Piano Trios (Russian) - DYCK, V. / STERNBERG, C.von / YOUFEROV, S. (History of the Russian Piano Trio, Vol. 5) (Brahms Trio)
→ Nouveau (et apparemment dernier) volume de la série, tellement surprenante et fertile en découvertes, pour un trio qui a pris le nom de Brahms…
→ Un peu hiératique Vladimir Dyck. Sternberg regarde lui du côté de Beethoven. La découverte exaltante est vraiment du côté de Youferov, aux affects bouillonnants.
→ Aucun ne m'a ébloui sur la forme, je remarque un goût appuyé chez les trois pour des formules un peu massives plutôt que le contrepoint, mais l'ensemble de ces découvertes produit un tableau assez charmant.

♥♥ Magnard – Piano Trio in F Minor / Violin Sonata in G Major – Laurenceau, Hornung, Triendl (CPO)
→ Merveille, et à quel niveau ! (lyrisme de Laurenceau, et comme Hornung rugit !)

TURINA: Piano Trio No. 2 / LINDE: Sonata a 3 / BEN-HAIM: Variations on a Hebrew Melody / Chosta Trio 2 – Garcia Trio (Caprice 1998)





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K. Bois solos

(réédition)
♥♥ Corrette, Boismortier, Devienne, Ozi – Sonates pour basson – Danny Bond (Accent réédition 2021)
→ Parution en coffret de cette somme du basson français XVIIe-XVIIIe par Danny Bond, merveille sur merveille (avec un petit moins pour Ozi, pédagogue mythique mais compositeur moins marquant).

Koechlin – Œuvres pour flûte et clarinette (sonate 1, album de Lilian…) – (Hänssler)

♥♥ Koechlin – Œuvres pour flûte et clarinette (sonate 1, album de Lilian…) – (Koch)
→ La Première Sonate est très touchante, vraiment le Koechlin modal et lumineux de la sonate pour violon !




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L. Cordes grattées

(nouveauté)
Da Milano – « Nobilissimo Istromento : Virtuoso Lute Music of the Italian Renaissance » – Luca Pianca (2021)
→ Pianca merveilleux toujours, dans ce beau corpus d'Italie du Nord !

(nouveauté)
Heitor Villa-Lobos – Tristorosa, Préludes pour guitare… – Günter Herbig
→ Le célèbre chef d'orchestre joue ici de la guitare… électrique. Pas très convaincu par l'intérêt ni le résultat, mais c'est amusant.




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M. Violon

(solo ou accompagné)

(réécoute nouveauté)
♥♥♥ Il Sud: Seicento Violin Music in Southern Italy ; œuvres de Falconieri, Montalbano, Trabaci, Pandolfi, Leoni, Mayone ; Ensemble Exit, Emmanuel Resche-Caserta (Passacaille 2020)
→ Œuvres rares à la veine mélodique généreuse et aux diminutions expansives, dans une interprétation pleine de couleurs (assise sur orgue positif et théorbe, remarquablement captés), avec un violon solo à la fois chaleureux et plein d'aisance. Un peu grisant.

(nouveauté)
♥♥ Montalbano – Sinfonia 2  "Zambiti" – Jérôme van Waerbeke,  Arnaud De Pasquale (HM 2021)
→ Waerbeke épatant. Et cette musique fulgurante aussi.
→ Tiré de « Organ Recital: De Pasquale, Arnaud - CAVAZZONI, M.A. / PASQUINI, E. / STROZZI, G. / VINCI, P. (Organs of the World, Vol. 1: Orgues de Sicile) »
→ Le reste de l'album (sauf le Frescobaldi avec violon & cornet à bouquin et la villanelle de D'India avec Perrine Devillers) est assez lisse, du fait de l'orgue aux timbres blancs et de la registration essentiellement en plein-jeu. Un peu déçu. Il n'y avait pas d'orgue sicilien plus typé à disposition ?

Montalbano – Sinfonia Prima: Arezzo //  Sinfonia Quarta: Geloso, in « EARLY ITALIAN CHAMBER MUSIC - Works for Recorder and Basso Continuo » – Dan Laurin, Masaaki Suzuki (BIS)
→ Sonne clairement mieux au violon qu'à la flûte à bec soprano… Mais toujour belle matière musicale.

(nouveauté)
Sénaillé & Leclair – « Générations », Sonates pour violon et clavecin – Langlois de Swarte, Christie (HM 2021)
→ Œuvres un peu sombres et plaintives pour nourrir ma (faible) inclination pour le genre. On admire néanmoins l'enrichissement du répertoire discographique, le sens du style souverain de Langlois de Swarte et l'aisance aristocratique de Christie sur chaque note !

♥♥ Beethoven – Sonate violon-piano n°10 – Pierre Fouchenneret, Romain Descharmes (Aparté 2016)
→ Superbe son de violon, d'un tissu magnifique. Pour le reste, il y a plus abouti dans la conception, mais je ne trouve pas ces sonates vertigineuses de toute façon : je suis mauvais juge.

(nouveauté)
♥♥♥ Couperin (Barricades mystérieuses) // Liszt-Wagner (Liebestod) // Chopin (Prélude n°15) // Fauré (Sonate n°1, Après un rêve, Nocturne n°6) // Hahn (À Chloris)… – « Proust, le concert retrouvé » – Théotime Langlois de Swarte, Tanguy de Williencourt (HM 2021)
→ Inclut des transcriptions de mélodies. Très beaux instruments d'époque, belle ambiance de salon. Je n'ai pas eu accès à la notice pour déterminer la proportion de musicologie / d'érudition pertinente dans le propos – souvenirs trop parcellaires de la Recherche pour le faire moi-même.
→ Langlois de Swarte « chante » remarquablement À Chloris ou Après un rêve, tandis que le surlié feint de Willencourt fait des miracles dans Les Barricades Mystérieuses. La Sonate de Fauré est menée avec une fraîcheur et un idiomatisme que je ne lui connaissais pas, aussi loin que possible des exécutions larges et poisseuses de grands solistes plutôt aguerris à Brahms et aux concertos.

(nouveauté)
GADE, N.W.: Violin Sonatas Nos. 1-3 (M.-E. Lott, S. Speidel)
→ Accompagnements vraiment personnels !

(nouveauté)
Respighi, Dohnányi, Szymanowski, Brahms – « Incandescence », Sonates pour violon (n°3 Brahms) – Stéphanie Moraly, Romain David (Aparté 2021)
→ J'adore ces deux artistes (Moraly est peut-être la violoniste que je porte le plus au pinacle…), mais j'avoue ne pas avoir adhéré, moins à cause de l'interprétation que des œuvres, typique de violon romantique-larmoyant-abstrait qui me touche très peu. J'ai redécouvert le genre de la sonate violon-piano avec les compositeurs français (dont Ropartz, grâce à Stéphanie Moraly précisément !) ou francophiles, et je ne parviens toujours pas à adorer ces sonates de Brahms, même par ces artistes d'exception – qui, me semble-t-il, ne renversent pas non plus la table ici. Navré. :(




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N. Violoncelle

(solo ou accompagné)

♥♥♥ GABRIELLI, D.: Cello Works (Complete) (Hidemi Suzuki, E. Balssa, Naoya Otsuka)
→ Une des rares versions de ce momument de la naissance du violoncelle, très inspiré en soi et formidablement exécuté.

♥♥ LE BEAU, L.A.: 4 Pieces for Cello and Piano / 3 Pieces for Viola and Piano / Cello Sonata (U. Koch, Blees, M. Bergmann) (SWR Music)

Kapustin: Works for Cello – Christine Rauh (SWR Music 2016)
→ À nouveau très (soft) jazz, duos avec du xyolophone. Des allures d'improvisation permanente. Réussi sans être très marquant – vraiment du jazz standard, auquel je suis plus sensible dans le flux de l'improvisation.




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O. Orgue & clavecin

(réédition)
♥♥ Louis, François, Armand-Louis Couperin – Pièces pour le clavecin – Leonhardt (Philips, réédition Decca 2021)
→ Proposition très différente de son album tardif chez Alpha (d'une ascèse presque raide, propice aux rêveries), Leonhardt aborde ici le répertoire français avec une forme de franchise qui voisine à la fulgurance, osant les traits les plus affûtés et les phrasés les plus dégingandés, le tout tenu par cette absence audible de sourire. Très étrange et très convaincant.

(réédition)
¤ Bach, J.S.: Organ Works – The Mono Cycle 1947 - 1952 – Helmut Walcha (Archiv, réédition 2021)
→ Voilà bien un disque que je n'aime pas : les articulations vieillies sur un orgue blanchâtre, pour ne pas dire gris béton, tout est figé dans une lumière blafarde… Je sais que beaucoup y sont attachés, mais n'ayant pas d'attaches émotionnelles particulières avec la musique d'orgue de Bach, je me soucie peu d'y entendre des obstacles supplémentaires.
Il existe beaucoup d'excellentes intégrales, même en restant dans le tradi (Preston ou Vernet par exemple).

Bonis: L'œuvre pour orgue – Georges Lartigau (Saint-Amans de Rodez) (Ligia)
→ Toujours travaillé, mais masqué par une certaine pudeur. Ressemble beaucoup à l'orgue de son temps, mais outrepasse clairement l'académisme.

♥♥♥ Messiaen, L'Ascension pour orgue, Thiry (La Dolce Volta)




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P. Piano·s

(deux pianos)

(nouveauté)
Cecil Coles, Gustav Holst: – « Piano Music » – James Willshire (Delphian 2021)
→ Gentil. Très bien joué en revanche, beau son et phrasés vivants !

(nouveauté)
Maciejewski (& Bach) – Transcriptions for 2 Pianos, Vol. 2 (Organ Concerto in A Minor, BWV 593, etc.) – Rajs & Kepinski (Accord 2021)
→ Chouettes transcriptions riches, denses, naturelles, qui respirent bien !

(un piano)

(nouveauté)
Chopin – Nocturnes – Planès
→ Le Pleyel d'époque sonne fort tout le temps, le manque de nuance qui en découle me frustre assez. Dommage, il existe beaucoup de versions sur de bons instruments, et Planès est un grand artiste rompu à l'exercice…

(nouveauté)
♥♥♥ Chopin, Polonaise-Fantaisie ; Schumann, Davidsbündertänze – Severin von Eckardtstein (Artalinna 2021)
→ Pour un Chopin façon diamant – avec un très beau travail sur les résonances, particulièrement pertinent pour la Polonaise-Fantaisie !
→ La prise de son permet d'entendre la résonance de la salle, très belle expérience.
→ Usage particulièrement intelligent du rubato, fabuleux dans le Chopin – il m'apparaît davantage superflu et contourné dans le Schumann (que j'aime plus droit).

Messiaen – Les offrandes oubliées + Fantasie Burlesque + Pièce pour le tombeau de Paul Dukas + Rondeau + Prélude + La fauvette des jardins – Austbø (Naxos 2002)

Messiaen – Préludes – Håkon Austbø (Naxos 1999)
+ Études de rythme
+ Cateyodjaya
→ Préludes très debussystes !

(réédition)
♥♥♥ Messiaen – 20 Regards sur l'Enfant Jésus – Peter Serkin (RCA, réédition 2020)
→ Comme toujours avec Serkin, pas forcément les timbres les plus intelligents, mais une fine inelligence du discours assez passionnante à suivre, toujorus tendue vers l'avant.

♥♥♥ Messiaen – 20 Regards sur l'Enfant Jésus – John Ogdon (Decca)
→ Douceur et émotion contenue, dans cette lecture très aboutie.

♥♥♥ Messiaen – 20 Regards sur l'Enfant Jésus – Håkon Austbø (Naxos)
→ Assez lente et moelleuse, mais très différenciée, l'intégrale la plus agréable à écouter sur la longue durée.

♥♥♥ Messiaen – Visions de l'Amen – Ralph van Raat, Håkon Austbø (Naxos 2012)

♥♥♥ Messiaen – Catalogues d'oiseaux – Håkon Austbø (Naxos)

Boulez – Prélude, Toccata & Scherzo – Ralph van Raat (Naxos 2020)
+ d'autres œuvres de jeunesse : fragment, psalmodies, etc.

♥ Ronald Stevenson – Fugue on Chopin – Ronald Stevenson (archive son inédite, YT)
→ Thème liminaire de la Quatrième Ballade.

(nouveauté)
Grigori FRID – Œuvres pour piano – Elisaveta Blumina (Grand Piano 2021)
→ Surtout des pièces très tonales et décoratives (il faut dire que le disque contient essentiellement des extraits de son Album pour les Enfants), pas de hauts chefs-d'œuvre à en attendre… et en tout cas assez éloignée de sa manière moins tonale (quoique très polarisée et accessible) et uniment légère, dans ses œuvres de plus vaste ambition.




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Q. Airs de cour, lieder & chanson jazz…

(nouveauté)
♥ Sigismondo d’India: Lamenti & sospiri – Mariana Flores, Julie Roset, Cappella Mediterranea, Leonardo García Alarcón (Ricercar 2021)
→ Enfin des nouveautés pour ce compositeur majeur du tournant du XVIIe siècle, toujours d'une éloquence élancée et d'un sens mélodique très supérieur à la norme du temps !
→ Servi par les princes du genre…

N. Boulanger, Holmès, Viardot, Malibran, Vieu… – mélodies « From a Woman's Perspective) – Katherine Eberle
→ Diction peu claire, mais programme particulièrement intéressant !

♥ N. Tcherepnin – mélodies (japanese lyrics, oceanic suite, fairy tales… – Elena Mindlina, David Witten (Toccata Classics 2014)

Messiaen – Vocalise-Etude – Nathalie Manfrino, Marie Vermeulin (DGG)
→ Très mélodique et consonant-lyrique, presque du Rachmaninov ou du Glière…

(réédition / réassemblage)
♥♥♥ Midnight Jones (Norah Jones)

(réédition / réassemblage)
♥ Late Night Jones
→ Pas passionnantes reprises, même si la versatilité de la voix impressionne grandement.

(réédition / réassemblage)
Classic Jones
→ Pas passionnantes reprises, même si la versatilité de la voix impressionne grandement.

(nouveauté)
♥ Lou Tavano : album « Uncertain Weather » (2020)
→ Très belle voix en technique soufflée, compositions joliment intimes et planantes, mais un peu répétitives dans chaque morceau (même cellule à l'infini).




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Une très belle livraison, en deux mois de demi, que de mondes parcourus, que de découvertes, que de nouveautés qui changent notre vision de l'histoire de la musique et de l'état du répertoire ! 

L'aventure se poursuit, prochainement, que ce soit en compagnie de la Bible musicale, de la découverte discographique du répertoire par décennies, de la programmation des opéras du monde – ou peut-être, prochainement, une notule sur la technique vocale !

Puissiez-vous échapper, estimés lecteurs, aux folies de ce Crépuscule de la Civilisation – qu'elles ne soient pas pour vous une Fin du Monde.

mercredi 2 juin 2021

Le grand tour 2021 des nouveautés – épisode 5 : opéras et symphonies des Pays-Bas, du Danemark et de Russie


Un mot

Toujours la brève présentation des nouveautés (et autres écoutes et réécoutes) du mois écoulé. Je laisse une trace pour moi, autant vous donner des idées d'écoutes…

J'attire ce mois-ci votre attention en particulier sur les symphonies de Dobrzyński, Gade, Dopper, Zweers, Vermeulen, Miaskovski (dont viennent de paraître coup sur coup deux très grandes interprétations)… et sur les opéras danois de Kunzen, Kuhlau, Heise et Nielsen !

Tout cela se trouve aisément en flux (type Deezer, gratuit sur PC ; ou sur YouTube) et en général en disque. Il faut simplement pousser la porte.

(Pardon, mes présentations de titres ne sont pas toutes normalisées, il faut déjà pas mal d'heures pour mettre au propre, classer et mettre un minimum en forme toutes ces notes d'écoutes. Il s'agit vraiment de données brutes. J'espère reprendre les notules de fond bientôt, pour l'instant le travail, les concerts, les musées et l'exploration du territoire me prennent un peu trop de temps.
Néanmoins, je thésaurise à propos des opéras du monde et des programmations locales, pour vous emmener vers de nouvelles contrées sonores !)

piboule

La légende


Rouge : œuvres du cycle danois
Orange : œuvres du cycle néerlandais
Bleu : œuvres du cycle russe

* : Nouveauté (paru en 2021 ou depuis moins d'un an)
♥ : réussi !
♥♥ : jalon considérable.
♥♥♥ : écoute capitale.
¤ : pas convaincu du tout.

(Les disques sans indication particulière sont à mon sens de très bons disques, simplement pas nécessairement prioritaires au sein de la profusion de l'offre.)

Le tout est classé par genre, puis par ordre chronologique très approximatif (tantôt la génération des compositeurs, tantôt la composition des œuvres, quelquefois les groupes nationaux…) au sein de chaque catégorie, pour ménager une sorte de progression tout de même.



piboule



A. Opéra

♥ *Monteverdi – Orfeo – D. Henschel, Schiavo, Prina, Auvity, Sabata, De Donato, Abete… Arts Florissants, Christie (Dynamic, Madrid 2008)
→ Extrêmement vif, avec une belle distribution (mais Prina a vraiment vieilli, les tubages et la justesse sont devenus un peu trop audibles), pas la version la plus vertigineusement poétique, mais une belle réussite pour les Arts Flo qui n'ont pas toujours été à leur meilleur dans les opéras de Monteverdi.

♥ “La Clémence de Titus” de Mozart par l'Opéra Royal de Wallonie (YT)

♥♥♥ Kunzen – Holger Danske – (Dacapo)
→ Une œuvre très parente de l'Oberon de Pavel Vranický, une sorte de Flûte enchantée réussie, qui annonce le ton des chefs-d'œuvre de Kuhlau. Petite merveille.

¤ Gouvy – Iphigénie en Tauride – La Grande Société Philharmonique, Joachim Fontaine (CPO)
→ Livret galant décevant, et distribution impossible (français et style) qui ne permet pas de profiter de l'œuvre.

Rejcha – Lenora –  Magdalena Hajossyova, Vladimír Doležal, Věnceslava Hrubá-Freiberger, Pavel Kamas ; Ch Philharmonie Tchèque, Prague ChbO, Lubomi Matl (Supraphon 2000)
→ Écriture assez épaisse, longue, et peu spectaculaire (hors le début de la cavalcade) inspirée de la Lénore de Bürger.

*Bellini – Il Pirata – Irina Kostina, Dmitry Korchak, Pavel Yankovsky ; Victoria Agarkova, Novaya Opera, Andrey Lebedev (Operavision 2021)
→ Temporalité lente, pas de couleur locale. Beaux ensembles en guise de final qui apportent un peu de relief. Belle distribution, plus robuste qu'électrisante, mais belles voix bien faites.

Kuhlau, Elverhøj – National de la Radio Danoise, Frandsen.
→ Nettement moins bien que Lulu, mais cool quand même, et puis considéré comme un point de départ historique de la musique nationale danoise (assez arbitrairement, il y a pléthore d'excellente musique danoise avant ça !

♥♥ Kuhlau – Lulu – Danish NSO, Schønwandt (Radio danoise via YT)
→ Toujours une merveille que ce jeune romantisme passionné et exceptionnellement inspiré. Un des très très grands opéras du début du XXe siècle.

*Verdi – Attila – Plamen Kartaloff ; Radostina Nikolaeva, Daniel Damvanov, Ventselav Anastasov, Orlin Anastasov ; Opéra de Sofia, Alessandro Sangiorgi (Operavision 2021)
→ Représentation très tradi en plein air. Mixage façon pop, voix captées de très près. Pourtant, on sent bien la projection limitée (les aigus ne claquent pas), les voix ne claquent pas (malgré la beauté des graves), même les Bulgares sont donc affectés par le changement de placement (les aigus de la soprane et des clefs de fa sont assurés sans difficulté mais poussés, voilés, sans impact).

♥♥ Gade – Baldurs drøm, Op. 117 – Rørholm, Elming, Hoyer ; Helsingborg SO, Frans Rasmussen (ClassicO 2004)
→ Sorte d'oratorio au sujet païen. Romantisme dépouillé, assez réussi. Rørholm vraiment déclinante (un peu aigre). Elming splendide. Helsingborg alors un peu opaque.

♥♥♥ Bruch – Die Lorelei – Kaune, Mohr, Rootering ; Ch Ph de Prague, Radio de Munich, (CPO)
→ Véritable sens dramatique (finals schumanniens épatants), et splendide distribution, de ce qui se fait de mieux pour ce style dans cette génération.

♥ *Moniuszko – Halka – Chmura (Naxos 2021)
→ Versant sérieux du legs de Moniuszko (son autre œuvre la plus célèbre, Le Manoir hanté, étant un opéra comique dans le style d'Auber).
→ Livret hautement tragique, d'une fille trompée et abandonnée qui sombre au plus profond de l'outrage subi et du désespoir.
→ Meilleure distribution que celle (au sein de la même production) proposée sur Operavision, mieux captée aussi. Belle version au bout du compte, même l'orchestre paraît sensiblement plus avenant.

♥♥ Heise – Drot og marsk – DR TV 1988 (YT)
→ Splendide opéra romantique, plein de sublimes épanchements (sobres), dont j'ai déjà parlé lors de la récente parution de la version Schønwandt :
→ Superbe drame romantique, dans la veine de Kuhlau, remarquablement chanté et joué. Tout est fluide, vivant, inspiré, œuvre à découvrir absolument !  (il en existait déjà une version pas trop ancienne chez Chandos)
→ Ici, version de la (radio-)télévision danoise.

♥♥ Peter HEISE – Tornerose + Bergliot –  Helle Charlotte Pedersen, Michael Kristensen, Milling + Rørholm ; Helsingborg SO, Frans Rasmussen (Dacapo 2000)
→ Cantates dramatiques très réussies et nourrissantes, et très bien chantées (Milling majestueux, Rørholm très expressive).
→ Bissé.

♥ *Verdi – Otello – Stoyanova, Kunde, C. Álvarez ; Liceu, Dudamel (UER via France Musique, 2021)
→ Très belle version parfaitement chantée (la voix de Kunde a blanchi, mais le panache et l'assurance restent là !) et dirigée avec beaucoup de fluidité et d'insolence.

♥♥♥ *Wagner / Hugo Bouma – Parsifal, acte III – Marc Pantus (Amfortas, Gurnemanz), Marcel Reijans (Parsifal), Merlijn Runia (Kundry + synthétiseur + guitare électrique), Daan Boertien (piano), Dirk Luijmes (harmonium), direction Andrea Friggi (NPO Radio 4, 2021)
→ L'acte III de Parsifal, joué le Vendredi Saint, avec harmonium, piano, synthétiseur et guitare électrique. Parmi les chanteurs, le merveilleux et charismatique Marc Pantus.

♥♥♥ Wagner – Parsifal, acte III – Meier, Hofmann, Estes, Sotin ; Bauyreuth 1985, Levine (Philips)

♥♥♥ *Rimski-Korsakov – Les opéras – diverses versions historiques (réédition Hänssler 2021)
→ Des versions merveilleuses de l'Âge d'or, très bien restaurées, pour un panorama complet des opéras disponibles au disque…

♥♥ *Rimski – Pskovityanka – Pirogov, Shumilova, Nelepp, Pirogov ; Bolshoi, Sakharov (Profil)

♥ Saint-Saëns – Samson & Dalila – Ludiwg, King, Weikl ; Radio de Munich, Patanè (RCA)
→ Étonnament bien chanté et sobre, et ampleur des prises RCA avec le feu et les couleurs de Patanè !
→ King parvient à ouvrir ses voyelles à la française de façon très convaincante ; Ludwig, quoique trop couverte, conserve une ductilité et une distinction assez rares dans ce rôle.
→ Ce n'est pas très français, mais ce n'est pas du tout difforme, c'est vraiment très bien.

*Puccini – Tosca – Stockholm (vidéo Operavision 2021)
→ Sacristain allemand excellent, joli ténor suédois assez clair, doux et élégant, baryton polonais totalement cravaté, impossible.

♥♥♥ Debussy – Pelléas & Mélisande – Devieilhe, Andrieux, Alvaro ; Pelléas O, Benjamin Lévy (TCE 2018, captation pirate)

♥♥♥ *Debussy – Pelléas & Mélisande – Santoni, Todorovitch, Behr, Duhamel, Teitgen ; Les Siècles, Roth (Operavision 2021)
→ Lecture orchestrale assez inédite, même par rapport aux autres versions sur instruments anciens : que de grain, de couleurs, ces cordes très peu vibrées mais très intenses, qui offrent une tout autre vision du spectre orchestral !  Dirigé avec esprit de surcroît, Roh n'a pas son pareil pour se servir des parties intermédiaires d'ordinaire peu audibles, les faire évoluer et bâtir de véritables progressions.
→ Vocalement, superbe. Santoni s'adapte très bien à un répertoire moins héroïque qu'à son habitude, Behr (dont l'émission paraît souvent embarrassée) n'a jamais chanté avec autant de naturel, Duhamel trouve dans Golaud un terrain qui favorise davantage ses atouts d'artiste que ses limites de projection.
→ Une grande version, donc, qui paraîtra en CD et qui viendra la saison prochaine à Paris (Théâtre des Champs-Élysées) !

♥♥♥ NIELSEN: Saul and David – Gjevang, Lindroos, Augland, Danish NSO, N. Järvi (Chandos 1990)
→ Très belle veine épique, remarquablement chantée, voilà un opéra qui frémit, palpite, s'épanche, et dans une langue musicale riche mais calibrée pour le drame – on ne reconnaît les bizarreries de Nielsen qu'à quelques doublures de bois et tournures harmoniques, sans quoi le compositeur s'efface vraiment au profit du drame !
→ Splendidement chanté.

♥ *Nielsen – Maskarade – Schønwandt (Dacapo 2015, réédition 2021)
→ Belles voix graves, direction un peu lisse pour une œuvre qui n'est pas du tout du Nielsen d'avant-garde.

♥♥♥ *Schreker – Der ferne Klang – Holloway, Koziara ; Frankfurter Museumorchester, Weigle (Oehms 2021)
→ Couleurs orchestrales et virtuoses impressionnantes, les deux héros admirablement chantés ; Schreker a rarement été servi avec un tel éclat, pour son opéra le plus réussi après Die Gezeichneten !

♥ Bartók – Le Château de Barbe-Bleue (en français) – Gilly, Lovano, Ansermet (bande de 1950, Malibran)
→ Très étrange élocution, malgré le charisme de Lovano. La musique aussi, mal captée, perd beaucoup de ses couleurs, de son étrangeté, seuls les tutti sont véritablement impressionnants. (Et pour les glottophiles, le contre-ut est remplacé par un petit cri.)

♥ WILLIAM GRANT STILL: "Highway One, USA" (1963) (Albany 2005)
→ Histoire familiale afro-américaine, aux récitatifs très simples et aux jolis chœurs, pas de l'immense musique, mais un petit drame très opérant !  (J'en parlerai plus en détail.)

♥♥ Rybnikov – Juno & Avos (1979) – (vidéo Rostov 2009)
→ Très varié (chœurs contemporains, cordes lyriques, mélodrames, guitares électriques et batteries…), très réussi pour cette histoire d'amour simple et tragique entre un explorateur russe et une quasi-infante californienne, inspirée d'un grand poème de Voznesensky (puisant librement au journal de bord du personnage, réel).
→ Donné cette saison à Ioshkar-Ola.

♥♥ *Dashkevich – Revizor – Opéra d'Astrakhan (vidéo du théâtre de 2020)
→ Très conservateur et consonant, d'après l'histoire de Gogol où la population d'une petite ville de Russie croit reconnaître le contrôleur de l'Empereur dans un jeune homme exigeant arrivé à l'auberge, et le couvre de faveurs. Joli opéra très accessible, production reprise encore ces jours-ci à Astrakhan. (J'en parlerai bientôt plus en détail.)

♥♥♥ *Connesson – Les Bains macabres – Buendia, Hyon, Dayez, Buffière ; Frivolités Parisiennes, van Beek – Compiègne 2020 (diffusion France Musique 2021)
→ Toujours une merveille de naturel, sur un livret passionnant d'Olivier Bleys, et réussissant le rendu choral de l'armée de spectres… À la fois amusant, riche musicalement, très fluide, et plein de surprises. Chef-d'œuvre d'aujourd'hui, que j'espère voir tourner longtemps sur les scènes.



B. Récital

♥♥♥ *Certon, Janequin, Cambefort, Lully, Destouches, Vivaldi, Rameau, Gluck, Grétry, Cherubini, Rossini, Ginestet, Comte de Chambord, Madoulé, Debussy – extraits : « 500 ans de musiques à Chambord » – Karthäuser, Gens, Richardot, Gonzalez-Toro, Bou, Boutillier ; Vanessa Wagner, Parnasse Français, Doulce Mémoire, Les Talens Lyriques, Rousset (France 3)
→ Vaste répertoire (entrecoupé d'éléments historiques sur la présence de la musique à Chambord !), dont des raretés (Destouches) voire des inédits (Ginestet), avec une ardeur folle et des chanteurs de première classe…

♥♥♥ *Sainte-Hélène, La légende napoléonienne – Sabine Devieilhe ; Ghilardi, Bouin, Buffière,  Marzorati  ; Les Lunaisiens, Les Cuivres Romantiques, Laurent Madeuf, Patrick Wibart, Daniel Isoir (piano d'époque) (Muso 2021)
→ Chansons inspirées par la fièvre et la légende napoléoniennes, instrumentées avec variété et saveur.
→ Beaucoup de mélodies marquantes, de pastiches, d'héroï-comique (Le roi d'Yvetot bien sûr), et même  d'hagiographie à la pomme de terre… Le meilleur album des Lunaisiens jusqu'ici, aussi bien pour l'intérêt des œuvres que pour la qualité des réalisations vocales.

YT Gwyn Hughes Jones  Nessun Dorma 2008, Che Gelida Manina 1996
→ Tôt dans sa carrière, timbre très blanc et voix manifestement peu puissante : ne promet pas trop pour son Calaf la saison prochaine à Bastille…



C. Sacré

♥♥♥ *Castellanos, Durón, García de Zéspedes, Quiros, Torres – « Archivo de Guatemalá » tiré des archives de la cathédrale de la ville de Guatemalá – Pièces vocales sacrées ou instrumentales profanes – El Mundo, Ricahrd Savino (Naxos 2021)
→ Hymnes, chansons et chaconnes très prégnants. On y entend passer beaucoup de genres et d'influences, des airs populaires plaisants du milieu du XVIIe jusqu'aux premiers échos du style de l'opéra seria (ici utilisé dans des cantiques espagnols).
→ Quadrissé.

*Jacek Różycki: Hymns – Wrocław Baroque Ensemble (Accord 2021)
→ Zut, je croyais qu'il s'agissait de l'excellent postromantique décadent Ludomir, et j'avais hâte de découvrir ces motets a cappella… À la place, du joli baroque un peu standard, façon grands motets (alternance solistes vocaux et chœur), dans des harmonies post-monteverdiennes… petit choc déceptif évidemment.

♥♥♥ Charpentier – Méditations pour le Carême – García, Candela, Bazola ; Guignard, Galletier, Camboulas (Ambronay)
→ Avec Médée, le fameux Te Deum et le Magnificat H.76, on tient là la plus belle œuvre de Charpentier, inestimable ensemble de dix épisodes de la passion racontés en latin (et s'achevant au miroir du sacrifice d'Isaac, sans sa résolution heureuse !) par des chœurs tantôt homorythmiques tantôt contrapuntiques, et ponctués de récitatifs de personnages (diversement sympathiques) des Écritures. Merveille absolue de l'harmonie, de la prosodie et de la poésie sonore.
→ Ce que font Les Surprises est ici merveilleux, sens du texte et des textures hors du commun, d'une noirceur et d'une animation dramatique inhabituelles dans les autres versions de cette œuvre, et servi au plus suprême niveau de naturel chanté. Un des disques majeurs du patrimoine sacré français.

Charpentier – Méditations pour le Carême
version MIDI de CaRpentras →
Christie → splendeur (vrai travail verbal)
Jeune Chœur de l'Abbaye → choix intéressants (tempo ajustable !), beaux solos
Niquet →

♥♥ Purcell – Come Ye Sons of Arts Away + Funérailles + Hail Bright Cecilia – Gardiner (Erato)
→ Œuvres brillantes et poignantes (ces Funérailles, à la hauteur de leur réputation !), interprétées d'une façon qui a vieilli (beaucoup de cordes et de fondu tout de même, peu de nerf et et de couleur), mais qui conserve un pouvoir de conviction considérable !

♥ *Pavel Vranický – Symphonie en ut Couronnement, Symphonie en si bémol, Ouvertures « Orchestral Works, Vol. 1 » –  CzChbPO Pardubice, Marek Štilec (Naxos 2021)
→ Belles œuvres, mais pas les plus fulgurantes de P. Vranický (il y a vraiment des merveilles du niveau de Mozart…), dans une interprétation tradi réussie mais qui n'offre pas nécessairement le plein potentiel de vitalité de ces pages. Curieux de la suite de l'exploration, vu comme on a peu de ce corpus. En espérant des résurrections plus nombreuses et par des ensembles plus spécialistes.

♥♥ Kunzen – Alleluia de la Création, Symphonie en sol mineur, Ouverture sur un thème de Mozart –  Radio Danoise, Peter Marschik (Dacapo)
→ Très belle célébration que cet Alleluia, aux contours assez personnels.
→ Symphonie un peu plus banale, du Mozart en mineur (mais plutôt ses moments les moins électrisants), peut-être en raison de l'interprétation tradi qui manque un peu de relief.

Paisiello – Musiche per la settimana santa – Mi-Jung Won (Bongiovanni 2016)
→ Pas particulièrement poignantes pour leurs sujets, mais bien écrites et variées.

Paisiello – Requiem (Missa defunctorum) – Zedda (VM Italy 2001)
→ Chœur moyen (amateur assez bon ou pro pas bon ?), mais œuvre intéressante, assez distanciée, comme une véritable Messe, hors de sa clausule recueillie et pathétique.

♥ Paisiello – Messe en pastorale pour le premier consul – Prague SO, Chœur de la Radio Tchèque (Multimedia San Paolo 2008)
→ Superbes dialogues hautbois / clarinette et voix (Tectum Principium !). Et les ensembles de solistes magnifiques aussi. Tout cela navigue entre classicisme et jeune romantisme d'une pièce à l'autre, entre Mozart et le style Empire…

♥♥ Berlioz – Messe Solennelle – Donna Brown, Viala, Cachemaille, Monteverdi Choir, ORR, Gardiner (Philips 1994)
→ La folie pure de ce Resurrexit.

HALLÉN, A.: Missa solemnis (Forsström, Helsing, Olsson, Thimander, Erik Westberg Vocal Ensemble, Westberg)
→ Longue (65 minutes) et sobre (accompagnement d'orgue seul) messe, très consonante mais dotée d'une réelle personnalité, épousant réellement les caractères de la messe sans sacrifier la tendreté mélodique. Recommandé !

♥♥ Puccini  – Messa di Gloria – Carreras, Ambrosian Singers, New Philharmonia, Scimone
→ Version chouchoute !

Puccini  – Messa di Gloria – Alagna, LSO Ch, LSO, Pappano
→ Chœur vraiment lointain et flou, malgré la belle lancée (et trompette très très en avant du spectre).

Puccini  – Messa di Gloria – Gulbenkian O, Corboz
→ Chœur un peu épais et césuré.

♥♥ Diepenbrock – Missa in Die Festo, « Anniversary Edition, Vol. 8 » – Men of the Netherlands Radio Choir / Deniz Yilmaz / Leo van Doeselaar (Etcetera 2012)
→ Pour ténor, chœur masculin et orgue.
→ Splendide Agnus Dei final, avec intervention poignante et jubilatoire du ténor.

♥ *(Rudolf) Mengelberg – Magnificat – Annie Woud, Concertgebouworkest, Jochum (Philips, réédition Decca 2021)
→ Très bel alto ; composition un peu sérieuse par rapport au délicieux Salve Regina enregistré par (Willem) Mengelberg.
→ (couplé avec une réédition de la Création de Haydn par Jochum)

♥ Poulenc – Gloria, Litanies Stabat – Petibon, OP, P. Järvi (DGG)

♥ Poulenc – Gloria, Stabat – Battle, Tanglewood, Boston SO, Ozawa (DGG)

♥♥ Hendrik Andriessen (1892-1981) – De Veertien Stonden : voor strijkorkest, koor en declamatie (1941-1942) – Gerard Beemster
→ Un chemin de croix dépouillé et prégnant.



D. A cappella

♥♥♥ *Mendelssohn – Te Deum à 8, Hora Est, Ave Maria Op.23 n°2 – Kammerchor Stuttgart, Bernius (Hänssler)
→ Bernius réenregistre quelques Mendelssohn a cappella ou avec discret accompagnement d'orgue, très marqués par Bach… mais à un chanteur par partie !  Très impressionnante clarté polyphonique, et toujours les voix extraordinaires (droites, pures, nettes, mais pleinement timbrées et verbalement expressives) du Kammerchor Stuttgart.
→ Bissé

(Daniël) De Lange – Requiem – PB ChbCh, Uwe Gronostay
→ Requiem for mixed double choir, and double quartet of soloists, written in 1868, quand à Paris se passionne pour Palestrina et Sweelinck.
→ Dépouillement impressionnant, mais aussi chromatisme intense.

♥ *Escher – Concerto pour orchestre à cordes, Musique pour l'esprit en deuil, Tombeau de Ravel, Trio à cordes, Chants d'amour et d'éternité (pour chœur a cappella), Le vrai visage de la Paix, Ciel air et vents, Trois poèmes d'Auden – Concertgebouworkest, Chailly ; PBChbCh, Spanjaard (Brilliant 2020)
→ Vaste anthologie (essentiellement des rééditions, je suppose), avec quelques belles inspirations d'un postromantisme assez simple.

♥♥ *De Wert, Rihm – chœurs a cappella, dont 7 Passion-Texte : « In umbra mortis » – Cappella Amsterdam, Reuss (PentaTone 2021)
→ Quelle délicieuse idée que de tisser la polyphonie franco-flamande du XVIe siècle avec l'œuvre la plus rétro- du Rihm choral : entrelacement de techniques et d'esprits similaires, deux très grands corpus chantés avec la clarté immaculée qu'imprime volontier Reuss à ses chœurs.

♥ Caplet, Botor, Gouzes, Szernovicz, Dionis du Séjour, JM Vincent, Kedrov, du Jonchay Perruchot, anonymes…–  Chœurs liturgiques a cappella « Misericordias in Aeternum » – Chœur du Séminaire Français de Rome, Hervé Lamy (Warner 2016)
→ Ce n'est vraiment pas mal chanté (dans son genre de voix semi-naturelles). Essentiellement psalmodié, donc sans doute plutôt à destination d'un public catholique fervent, mais très beau, un peu la version francophone de la liturgie de saint Jean Chrysostome…
→ Peu de compositions ambitieuses en réalité, malgré le nom de Caplet glissé au milieu.

♥♥ *Zaļupe, Dzenitis, Vasks,  Ešenvalds, Milhailovska, Pūce, Marhilēvičs, Šmīdbergs, Einfelde, Ķirse, Aišpurs, Sauka Tiguls, Jančevskis – Chœurs a cappella «  Aeternum : Latvian Composers for the Centenary of Latvia » – State Choir Latvija, Māris Sirmais (SKANI 2021)
→ Superbe parcours parmi le fin du fin des compositeurs choraux lettons du second XXe siècle, en général des atmosphères plutôt planantes avec de jolies tensions harmoniques.
→ L'ensemble du disque est magnifique, en particulier Mihailovska et Aišpurs – juste un brin trop d'homogénéité sur la durée, peut-être.




E. Ballet

♥♥♥ *Adam – La Filleule des Fées (ballet complet) – Queensland SO, Andrew Mogrelia (Marco Polo 2001, réédition Naxos 2021)
→ Œuvre très généreuse et jouée avec beaucoup de style, beaucoup de matière musicale et de veine mélodique, sans la facilité de numéros uniquement conçus pour la cinétique, un des ballets les plus homogènes musicalement et les plus propres à être enregistrés – vraiment une œuvre à découvrir ! 

♥♥ FRANCK, C.: Psyché (version for choir and orchestra) / Le Chasseur maudit / Les Éolides (RCS Voices, Royal Scottish National Orchestra, Tingaud)

♥♥ *N. Tcherepnin:  Le pavillon d'Armide, Op. 29 – Moscow Symphony Orchestra; Henry Shek (Naxos 2021)
→ D'une générosité très tchaïkovskienne.

♥♥♥ TCHEREPNIN, N.: Narcisse et Echo [Ballet] / La princesse lointaine (Ein Vokalensemble, Bamberg Symphony, Borowicz) (CPO 2020)
→ Bissé.



F. Symphonique

♥♥♥ *Kurpiński, Dobrzyński & Moniuszko – Élégie, Symphonie n°2, Bajka – Wrocław Baroque O, Jarosław Thiel (NFM)
→ Jeune romantisme fougueux de haute qualité, interprété sur instruments d'époque, avec un feu exemplaire… Jubilatoire de bout en bout !
→ (Quadrissé.)

♥♥ *Beethoven – Symphonie n°3 – Les Siècles, Roth (HM 2021) ♥ Méhul ouverture Les Amazones
→ Comme pour la Cinquième, spectre sonore très vertical, on y entend véritablement un orchestre français postgluckiste, avec ses grands accords dramatiques – et des timbres particulièrement saillants et savoureux, quoique la prise de son soit un peu froide.
→ Cette approche se réalise inévitablement un peu au détriment de l'architecture, à mon sens, mais d'une part Roth souligne remarquablement la thématique, d'autre part son soin des parties intermédiaires (dont les nuances dynamiques évoluent sans cesse !) est tel que tout palpite et passionne en permanence.
→ De surcroît, la gradation d'intensité est très pensée et construite, si bien que la récapitulation et la coda du premier mouvement atteignent un degré de tension inédit par rapport à l'ensemble des développements antérieurs.
→ Travail très important sur les détachés, qui conservent l'esprit de danse de la contredanse variée finale, quitte à casser le flux enveloppant de cordes et à fragmenter le spectre.
→ Les Amazones sont marquantes, jouées avec une crudité et une stridence qui impressionnent (acoustique très différente de la symphonie, on entend que ça n'a pas été enregistré au même endroit !).

♥♥ *Beethoven – Symphonie n°7 – MusicAeterna, Currentzis (Sony 2021)
→ Lecture très linéaire et vive : elle exalte, comme leur Cinquième, davantage la poussée cinétique que la structure générale.
→ Le résultat est très convaincant, plein de vivacité, mais ressemble tout à fait à la norme actuelle des interprétations vives et sèches des ensembles sur instruments anciens, sans personnalité supplémentaire particulièrement visible.
→ On retrouve en outre les manques de couleur du côté des bois, très effacés la plupart du temps – alors que d'autres versions « post-baroqueux », sans disposer de moins d'énergie, parviennent aussi à exalter structure et couleurs.
→ Petite réserve aussi dans la construction de l'Allegretto: le climax est réussi mais se trouve parasité par l'exagération des figures d'accompagnement (assez mécaniques de surcroît) qui, au lieu d'agiter le thème, semblent prendre sa place : soudain l'on entend les « coutures » au lieu du propos, c'est un peu étrange à ce degré.
→ À l'inverse, les effets de crescendo-zoom sur les sforzando du final sont plutôt réussis, de même que les volutes d'alto forcenées avant la reprise finale du thème sur secondes mineures de contrebasses.
→ Au demeurant, version énergique, élancée, réjouissante, je ne me suis pas ennuyé un seul instant !  (La réserve provient surtout de la discordance entre le niveau de la prétention du chef / de l'objet d'une part, celui du résultat d'autre part : car on n'y trouvera rien de subversif / neuf / définitif, juste une remarquable version dans l'immensité d'autres.)
→ Du coup vous pouvez plutôt choisir une version plus contrastée, avec des couleurs en sus, ou simplement avec couplage d'une seconde symphonie…

♥♥ Beethoven – Symphonie n°7 – SwChbO, Dausgaard (Simax)
& Egmond ouv & msq de sc très réussi !

♥♥ Beethoven – Symphonie n°7 – ORR, Gardiner (Archiv)

♥♥♥ Romberg, B.H.: Symphonie n°3 (Kolner Akademie, Willens) (Ars Produktion 2007) → Symphonies contemporaines de Beethoven (1811, 1813, 1830), qui en partagent les qualités motoriques et quelques principes d'orchestration (ballet des violoncelles, traitement thématique et en bloc de la petite harmonie, sonneries de cor qui excèdent Gluck et renvoient plutôt à la 7e…).  → Je n'avais encore jamais entendu de symphonies de l'époque de Beethoven qui puissent lui être comparées, dans le style (et bien sûr dans l'aboutissement). En voici – en particulier la Troisième, suffocante de beethovenisme du meilleur aloi !
→ Bissé.
→ (Voir la notule correspondante dans la série « Une décennie, un disque ».)

♥♥ GOUVY, L.T.: Symphonies Nos. 1 and 2 – German Radio Saarbrücken-Kaiserslautern Philharmonic Orchestra, Mercier (CPO)
→ Même genre, très réussi, toujours animé (on entend bien le contemporain de Schubert et Verdi).
→ Bissé.

♥♥ Gouvy – Symphonie n°2, Paraphrases Symphoniques, Fantaisie Symphonique – Württembergische Philharmonie Reutlingen, Thomas Kalb (Sterling 2014)
→ Bissé.

♥♥ GOUVY, L.T.: Symphonies Nos. 3 & 5 – German Radio Saarbrücken-Kaiserslautern Philharmonic Orchestra, Mercier (CPO)
→ Bissé.

♥♥ GOUVY, L.T.: Symphony No. 4 / Symphonie brève / Fantaisie Symphonique (German Radio Saarbrücken-Kaiserslautern Philharmonic, Mercier) (CPO 2013)
→ Romantisme remarquablement domestiqué, Onslow en mieux.
→ Bissé.

♥♥♥ Gade – Symphonies 1 & 5 (vol.4) – Danish NSO, Hogwood (Chandos 2002)
→ Très belle lecture nerveuse de ces bijoux de sobre romantisme élancé !

♥♥ Gade – Symphonies 7 & 4 (vol.2) + Ouv. Op.3 – Danish NSO, Hogwood (Chandos 2002)
→ Très belle lecture nerveuse de ces bijoux de sobre romantisme élancé !

♥♥♥ Gade – Symphonies 2 & 8 (vol.1) + Allegretto + In the Highlands – Danish NSO, Hogwood (Chandos 2002)
→ Très belle lecture nerveuse de ces bijoux de sobre romantisme élancé !

♥♥♥ Gade – Symphonies 3 & 6 (vol.3) + Echos d'Ossian – Danish NSO, Hogwood (Chandos 2002)
→ Très belle lecture nerveuse de ces bijoux de sobre romantisme élancé !
→ Bissé.

Gade – Symphonie n°1,8 – Stockholm Sinfonietta, Neeme Järvi (BIS)

♥♥♥ Bruch – Symphonie 1 (vo) – Bamberger Symphoniker, Trevino (CPO 2020)

♥♥ Richard Hol (1825-1904) ; Symphony No. 1 in C minor (1863)
Den Haag Residentie Orkest ; Matthias Bamert
→ Contrasté et farouche, du très beau second romantisme !

Richard Hol (1825-1904) ; Symphony No. 4 in A minor (1889)
Den Haag Residentie Orkest ; Matthias Bamert
→ Plaisant, sombre sans être très tendu, pas excessivement marquant en première écoute.

♥ *Brahms – Symphonie n°2, Ouverture Académique – Gewandausorchester Leipzig, Blomstedt (PentaTone 2021)
→ Comme pour la Première, interprétation très apaisée, lente et creusée, de ces symphonies. Ceci fonctionne moins bien, à mon sens, pour cette Deuxième, dont les difficultés intrinsèques ne sont pas vaincues en secondant ses aspects les plus tranquilles – et l'on perd en éclat jubilatoire du côté du final.

BRUCKNER, A.: Symphony No. 4 in E-Flat Major, WAB 104, "Romantic" (1888 version, ed. B. Korstvedt)  (Minnesota Orchestra, Vanska)     (BIS)

♥ Bruckner 6 BayRSO Eichhorn

Bruckner 7 BayRSO Eichhorn

♥♥ Tchaïkovski  – Suites n°1, n°4 – Tchaikovsky NO, Fedoseyev (Blue Pie 2014)
https://www.deezer.com/fr/album/557141

Tchaikovsky:  Suite No. 2 in C Major – Białystok Symphony Orchestra, Marcin Nałęcz-Niesiołowski (DUX 1999)
→ Audiblement slave, mais sans la souplesse et le moelleux des ensembles russes.

♥♥♥ *Tchaïkovski  – Symphonies n°2,4  – Tonhalle Zürich, Paavo Järvi (Alpha 2021)
→ La Cinquième par les mêmes ne m'avait pas du tout autant ébloui qu'en salle (avec l'Orchestre de Paris) – un peu tranquillement germanique, en résumé. Hé bien, ici, c'est étourdissant. D'une précision de trait, d'une énergie démentielles ! 
→ On entend un petit côté « baroqueux » issu de ses Beethoven, avec la netteté des cordes et l'éclat des explosions, mais on retrouve toute la qualité de construction, en particulier dans les transitions (la grande marche harmonique du final du 2, suffocante, qui semble soulever tout l'orchestre en apesanteur !), et au surplus une énergie, une urgence absolument phénoménales.
→ Gigantesque disque. Ce qu'on peut faire de mieux, à mon sens, dans une optique germanique – mais qui ne néglige pas la puissance de la thématique folklorique, au demeurant.
→ (bissé la n°2)

Dvořák:  Holoubek (The Wild Dove), Op. 110
Netherlands Philharmonic Orchestra; Kreizberg, Yakov
(PentaTone)
→ Pas particulièrement passionné, malgré l'article qu'on m'en fit. Belle œuvre rhapsodique un peu discrète. (Tapiola version Dvořák ?)

*Saint-Saëns: Symphony No. 1 in E-Flat Major + Symphonie en la
Liège Royal Philharmonic; Kantorow, Jean-Jacques (BIS)
→ Petite déception : malgré la qualité habituelle de ces artistes, pas extraordinairement distinctif – le potentiel de ces symphonies, réel mais difficile à mettre en valeur, n'est pas véritablement révélé.
https://www.francemusique.fr/emissions/le-concert-de-20h/stravinsky-concerto-pour-piano-et-vents-bertrand-chamayou-et-l-orchestre-national-de-france-95316

♥ *Saint-Saëns – Symphonies – Malmö SO, Soustrot (Naxos, réédition 2021)
→ Parmi le choix discographique, le meilleur possible, mais les œuvres demeurent un peu lisses dans cette lecture… ces symphonies attendent encore d'être pleinement révélées, elles sont, malgré les doublures schumanniennes qui les rendent peu avenantes au disque, un potentiel considérable.
→ Autre avantage de Soustrot : inclut la symphonie non numérotée en la, et celle sous-titrée « Urbs Roma » !

♥♥♥ Kalinnikov – Symphonie n°1 – Ukraine NSO, Kuchar (Naxos)
→ Quel emploi extraordinaire du folklore ukrainien, dans une forme évolutive et tendue de bout en bout malgré ses tendances rhapsodiques !
→ Bissé.

Rimsky-Korsakov:  Fantasia on Serbian Themes, Op. 6 (second version, 1887)
Rimsky-Korsakov:  Symphony No. 3 in C Major, Op. 32 (second version, 1886) – Malaysian PO, Bakels (BIS)
→ Pas ébouriffant côté œuvres, et interprétation aussi peu slave que possible, bien tranquille et posée.

Rimski-Korsakov – Suite tirée de Kitège – Russian NO, Pletnev (PentaTone)

♥ Paine – Symphonie n°2

♥♥♥ Liadov, poèmes symphoniques / N. Tchérépnine, La Princesse lointaine + Prélude du Palais enchanté / Rimski, Suite du Coq d'or – Russian NO, Pletnev (DGG 1996)
→ Liadov déjà bien riche, mais Tchérépnine, rencontre entre Rimski, Ravel et Stravinski !  (Et Rimski a aussi des aspects de l'Oiseau de feu ici…)
→ Très belle interprétation très engagée, plus typée que ce qu'est devenu cet orchestre !

♥ N. Tcherepnin – Le Royaume enchanté – Saint Petersburg Academic Symphony Orchestra, Victor Fedotov

Tcherepnin, N.: Tati-Tati / Janssen, W.: Symphonic Paraphrases On Chopsticks (Columbia Symphony, Janssen) par Werner Janssen (1951, publié par Naxos)
→ Gentilles pièces décoratives, jouées un peu en déchiffrage de façon pas très idiomatiques.

Tcherepnin: Le Pavillon d'Armide, Op. 29 - Enchanted Kingdom, Op.39 - Rimsky-Korsakov: The Golden Cockerel – Saint Petersburg Academic Symphony Orchestra, Victor Fedotov
→ Belle version idiomatique, qui n'exalte pas nécessairement les raffinements de l'œuvre (mais plutôt ses mélodies).

♥♥ N. Tcherepnine Palais Enchanté – Russian NO, Pletnev

♥ Pierné – Suites de Ramuntcho – Philharmonique de Lorraine, Houtman (BIS 1988)
→ Très plaisant.
& Concerto pour piano (avec son joli thème de final « la chenille qui redémarre »)

*Mahler – Symphonie n°9 – Berliner Philharmoniker, Haitink (Berliner Philharmoniker 2021)
→ Lecture un peu séquentielle, son très vibré, de l'adagio final, où j'aime davantage de poussée organique et moins d'apprêt de son. (Mais je ne suis pas un grand amateur de Haitink pour cette raison…) Les basses manquent vraiment de poids dans la progression chromatique pour me saisir tout à fait (prise comme ouatée, de quand est la prise ?  je n'ai pas accès à la notice), et elles ne parviennent pas à imprimer de couleur nouvelle face à ce mur de cordes très vibrées…
→ Joli élan (éphémère) du climax.

Mahler 9 – Düsseldorf, Ádám Fischer
    → Très beau et fluide mais peu de mystère.
& Boston SO, Ozawa
    → Cordes un peu épaisses…
& Solti Chicago
    → Aucun mystère, très rentre-dedans d'emblée.
& Masur NYP
    → Son d'orch un peu brillant, brise de son en zoom peu agréable
& Barshai / Moscou SO
    → Fin et souple, beaucoup d'atmosphère, superbe prise de son.

Suk – Fantastické scherzo, Op. 25 (arr. G. Sebesky for wind ensemble) (excerpt) Douglas Anderson School of the Arts Wind Symphony; Shistle, Ted (Mark Records)

♥ SUK, J.: Fantastické scherzo (Prague Philharmonia, Hrůša) (Supraphon)

♥♥♥ Suk – Zrani  – Komische Oper, K. Petrenko (CPO 2008)
→ Quels déferlements de vagues décadentes, tellement ardent et tourmenté, une merveille absolue très inattendue décidément (et cette version en exalte la tension et la modernité). Le V (« Résolution ») est une merveille d'une densité à peine soutenable.

♥♥ Johan Wagenaar - Sinfonietta : for orchestra in C Major, Op. 32 (1917) Radio Symphony Orchestra ; Conductor: Eri Klas
→ Commence comme du postromantisme assez naïf, et soudain cet adagio, c'est plus le Ruhevoll ou l'Adagietto de Mahler que du Brahms !

♥♥♥ Zweers, (Daniël) De Lange – Symphonies n°1 –  (Sterling)
→ Beaucoup plus naïf et romantique-lumineux que les deux symphonies suivantes de Zweers.
→ De Lange est vraiment étonnant, avec des couleurs qui évoquent le début d'Antikrist de Langgaard, tout en restant parfaitement tenu dans du romantisme qui évoque plutôt les héritiers de Schubert que le XXe siècle !  Très belle symphonie, au demeurant !

♥♥ Zweers – Symphony No. 2, Suite from the Incidental Music for Vondel's "Gijsbrecht van Aamstel" ; Ouv Saskia – Radio Filharmonisch Orkest Holland / Netherlands Radio Symphony Orchestra, Hans Vonk (Sterling)
→ Beau postromantisme simple mais frémissant.
→ Marche harmonique du duo d'amour de Vertigo présente dans le premier mouvement de la Suite de Vondel !
→ Bissé.

♥♥ Sibelius: Symphony No. 2 – BBC Philharmonic Orchestra; Storgårds (Chandos)

♥ Sibelius: Symphony No. 3, Yevgeny Mravinsky/Leningrad P.O. 1965
→ Assez rude, comme une symphonie soviétique de guerre…

Sibelius – Symphonie n°5 – Islande SO, Sakari (Naxos)
→ Prise de son hélas un peu lointaine blanchissante pour cette belle version, pas très urgente mais fort bien construite. (C'est surtout la Septième qu'il faut absolument découvrir dans cette intégrale !)

Sibelius – Symphonie n°5 – SWR Fribourg & Baden-Baden, Rosbaud (SWR Klassik)
→ Lecture très germanique, un peu carrée, qui manque à mon sens un peu de flou et de plans – le final manque même l'effet de l'appel de cors, rejeté au loin… Méritoire de jouer du Sibelius en ce temps et en ces contrées, mais pas du grand Rosbaud, je le crains.

♥ *Sibelius – Symphonies & œuvres orchestrales – Hallé O, Barbirolli (Warner, réédition 2021)
D'après mes souvenirs :
→ Orchestre clairement peu familier de ce type d'écriture, à une époque où le niveau instrumental n'était pas du tout comparable à ce qu'est l'essentiel de la discographie… mais Barbirolli y fait des propositions qui, musicalement, peuvent être passionnantes et très fines (n°3 par exemple). À découvrir pour ouvrir des horizons, à défaut du produit fini.

*Sibelius – Hallé Orchestra; Barbirolli, John (Warner réédition 2021)
En réécoutant :
→ Lent, son assez sale, pas convaincu non plus par la construction.

♥♥ Sibelius: Symphony No. 7 - Royal PO, Beecham (Angel / EMI / Warner)
→ Beaucoup de finesse et de saveur dans la gestion des épisodes.

♥♥ Sibelius: Symphony No.7, Yevgeny Mravinsky  Leningrad P.O. 1977 à Tokyo
→ D'une netteté d'articulation, d'une puissance de construction absolument admirables. Beaucoup plus stable et lisible que le Sibelius vaporeux habituel – c'est écrit ainsi, il faut dire ! 

♥♥♥ Sibelius: Symphony No.7, Yevgeny Mravinsky  Leningrad P.O. concert de 1965 à Leningrad
→ Même conception, mais capté de façon bien plus proche et détaillée, encore meilleur !

*Richard Strauss: Eine Alpensinfonie, Op. 64 / Tod und Verklärung, Op. 24 // par Vasily Petrenko, Oslo Philharmonic Orchestra (Lawo 2020)
→ Pas ébloui : très bien, mais il existe beaucoup mieux capté, beaucoup plus urgent ou coloré, etc.

♥♥♥ R. Strauss – Eine Alpensinfonie – São Paulo SO, Shipway (BIS)
→ Hallucinante image sonore d'une ampleur et d'un détail qui étreignent immédiatement. On entend énormément de contrechants, et quelle tension permanente !  Gigantesque, et tellement approprié ici, quel livre d'images !
→ bissé le début
♥ Fantaisie Symphonique sur Die Frau ohne Schatten

♥♥ R. Strauss – Eine Alpensinfonie – SWR BB & F, Roth (PentaTone)
→ On entend remarquablement les détails, en particulier les lignes de bois dans les tutti et de harpe, rarement audibles. Image assez frontale au demeurant, mais l'énergie et le détail l'emportent !
→ Bien plus impressionné qu'en première écoute il y a quelques années.

Scriabine  Symphonie n°1  Oslo PO, V. Petrenko
→ Encore ces splendides couleurs acidulées, mais l'œuvre paraît hésiter entre beaucoup de chemins sans jamais se décider.

♥♥♥ Hausegger – Natursymphonie – WDR, Rasilainen (CPO)

♥♥ Hausegger – Barbarossa & Hymnen an die Nacht – Begemann, Norrköping SO, Hermus (CPO)
→ Barbarossa toujours pas fabuleux, hymnes très beaux, Begemann splendide.

♥♥♥ Hausegger – Ausklänge, Dionysische Fantasie, Wieland der Schmidt – Bamberg SO, Hermus (CPO)

♥♥ Diepenbrock – Die Vögel, Suite Marsyas, Hymne violon-orchestre, Electra, Die Nacht (Linda Finnie), Wenige wissen (Homberger), Im grossen Schweigen (Holl) – Den Haag RO, Vonk (Chandos 2002)
→ Les lieder orchestraux sont tellement plus intéressants que ses poèmes symphoniques (un peu lisses) !

*Braunfels – Don Gil (Prélude), Divertimento, Ariels Gesang, Sérénade en mib – ÖRF, Bühl (Capriccio 2021)
→ Postromantisme plutôt standard, pas très marquant. Pas du tout le grand Braunfels de la Messe ou le plaisantin subversif des Oiseaux…
→ Plaisante Sérénade toutefois.

♥♥♥ Dopper – Symphonie n°2 – La Haye RO, Bamert (Chandos)
→ Enthousiasmante suite d'airs populaires très exaltants. Répétitions un peu simple des thèmes, mais des fugatos réguliers pour pimenter et le tout est très entraînant… ce serait parfait pour une première écoute en salle !
→ Interprétation vive et généreuse, une surprise venant de Bamert qu'on a connu plus mesuré !

Dopper – Symphonie n°3 « Rembrandt », Symphonie n°6 « Amsterdam » – La Haye RO, Bamert (Chandos)
→ Sympa, mais ni grande forme ni grands thèmes.

♥♥ Dopper:  Ciaconna gotica
R. Mengelberg:  Salve Regina
H. Andriessen:  Magna res est amor 
Röntgen:  Altniederlandische Tanze, Op. 46
    & Franck:  Psyche, M. 47, Part III: Psyche et Eros
Jo Vincent, Concertgebouworkest, Mengelberg (réédition Jube Classic 2014)

♥♥♥ Matthijs Vermeulen (1888-1967) ; Symphony No. 1 'Symphonia carminum' (1914) ;  Rotterdam, Roelof van Driesten
→ Grand postromantisme très coloré et boisé, lumineux et intense. Grande profusion de plans, de grains, langage foisonnant dans être oppressant, une très grande réussite.
→ Trissée.

♥♥ *Walton – Symphonie n°1 – LSO, Previn (RCA, réédition 2021)
→ Grande version de cette symphonie grisante, où se retrouvent les qualités habituelles de Previn à son meilleur : fluidité, beauté mélodique, naturel, élan.
→ (Mes références personnelles restent cependant plutôt Ed. Gardner, Bychkov et C. Davis.)

♥♥♥ Walton – Symphonie n°1 – LSO, C. Davis (2006)
→ Plutôt que la pure motricité (impressionnante !) de cette pièce, Davis y exalte la couleur, et le climat. On y gagne formidablement sur tous les plans !  (quels solos de hautbois, de cor anglais…)  On suit ainsi bien mieux la logique interne de l'œuvre.

♥♥ Cecil Coles – Fra Giacomo, 4 Verlaine, From the Scottish Highlands, Behind the lines – Sarah Fox, Paul Whelan, BBC Scottish O (Hyperion)
→ Belle générosité (Highlands à l'élan lyrico-rythmique réjouissant, qui doit pas mal à Mendelssohn), remarquable éloquence verbale aussi dans les pièces vocales. Bijoux.
→ Bissé.

♥♥♥ Graener – vol. 1 : Comedietta, Variations sur thème populaire russe, Musik am Abend, Sinfonia breve – Hanovre RPO, W.A. Albert

♥♥♥ Graener – vol. 2 : Symphonie, Aus dem Reiche des Pan, Variations sur Prinz Eugen – Hanovre RPO, W.A. Albert
→ Trissé.

♥♥ Pejačević –: Symphony in F-Sharp Minor, Op. 41 / Phantasie concertante (Banfield, Rheinland-Pfalz State Philharmonic, Rasilainen)
→ Symphonie expansive et persuasive, riche !  Pas du tout une musique galante.

(Jan) Koetsier – Symphonie n°2 (avec voix) – Concertgebouworkest
→ Sorte de louange entre Mahler 8, Martinů 4, les concertos de Poulenc et le Te Deum de Bruckner.

Voormolen – Arethuza – Concertgebouworkest (série anniversaire de l'orchestre)

Voormolen – Sinfonia – Concertgebouworkest, Mengelberg

Voormolen – Eline – La Haye, Bamert (Chandos)

Hendrik Andriessen (1892-1981) – Ballet-suite : voor orkest (1947) – Netherlands SO (Enschede), Porcelijn

(Hendrik) Andriessen – vol. 2 – PBSO (Enschede), Porcelijn (CPO)

♥♥ *Escher – Concerto pour orchestre à cordes, Musique pour l'esprit en deuil, Tombeau de Ravel, Trio à cordes, Chants d'amour et d'éternité (pour chœur a cappella), Le vrai visage de la Paix, Ciel air et vents, Trois poèmes d'Auden – Concertgebouworkest, Chailly ; PBChbCh, Spanjaard (Brilliant 2020)
→ Vaste anthologie (essentiellement des rééditions, je suppose), avec quelques belles inspirations d'un postromantisme assez simple.

♥♥♥ Myaskovsky: Symphony No. 6 in E-Flat Major – Göteborg SO, Neeme Järvi (DGG)
→ Très belle symphonie, jouée avec la générosité de N. Järvi, toujours à son meilleur avec Göteborg et dans le répertoire russe et soviétique… Il y réussit le ton épique avec une réelle élégance dans la grandeur. Le final qui développe de façon conjointe les thèmes de la Carmagnole et Ça ira est particulièrement jubilatoire !
→ Final dans sa version avec chœur (trissé).

Myaskovsky: Symphony No. 6 in E-Flat Major – Orchestre Académique d'État de l'URSS, Svetlanov (Melodiya)
→ Hélas, ici les cuivres masquent terriblement le spectre sonore, on y perd toute la beauté des trames secondaires, et le final se change en chanson paillarde assez univoque.

Myaskovsky: Symphony No. 6 in E-Flat Major – Slovaquie RSO, Stankovsky (Marco Polo)
→ Orchestre souvent employé en cacheton, dont on sent le déchiffrage (le tempo prudent, la fébrilité de ces aigus qui sortent trop fort à la flûte), mais le tout est réalisé avec honnêteté et entrain. À choisir, j'y entends mieux les détails que chez Svetlanov.

Myaskovsky: Symphonies 1 & 13 – Orchestre des Jeunes de l'Oural (Naxos)
→ Bien écrites, décemment exécutées, mais rien ne m'a saisi ici. Du postromantisme modernisé qui apparaît, a moins dans cette interprétation, beacoup plus interchangeable.

♥♥♥ *Miaskovski (Myakovsky), Symphonie n°21 // Prokofiev,  Symphone n°5 – Oslo PO, Vasily Petrenko (LAWO novembre 2020)
→ Symphonie de Miaskovski à mouvement unique, flux continu très naturel d'influences très diverses, moments étales mais aussi ultralyrisme post-tchaÏkovskien (presque du R. Strauss russisé), cors pelléassiens, ineffable clarinette façon Quintette de Brahms, qui plane soudaine seule…
→ Je n'avais jamais remarqué ainsi les parentés de la Cinquième de Prokofiev avec la Symphonie de Franck (et un peu le Poème de l'Extase, ce qui est mieux documenté), frappant au milieu du premier  mouvement !  La thématique cyclique est marquante également.
→ Impressionnant son de corde au vibrato irrégulier, terriblement soviétique !  De même pour les vents qui sifflent et les cuivres d'une acidité qui outrepasse la tradition nordique… on croirait entendre une bande moscovite des années soixante. Quel pouvoir sur le son ! 
→ Bissé Miaskovski.

♥♥ MYASKOVSKY, N.: Symphony-Ballad No. 23 / Symphony No. 23 (1941-1945: Wartime Music, Vol. 1) (St. Petersburg State Academic Symphony, Titov) (Northern Flowers 2009)
→ Très accessible Symphonie-Ballade, et beau folklore convoqué dans la Symphonie n°23, d'un style assez rétro-, plutôt Glazounov (en bien plus saillant) que soviétisant ! 

Miaskovski (Myaskovsky), Symphonies n°24 & 25 – Moscou PO, Yablonsky (Naxos)
→ La 24 légèrement sombre, la 25 au contraire marquée par des chorals de folklore !
→ Lecture assez vivante, mais la prise de son relègue le détail un peu loin (Naxos d'il y a un certain temps), cordes et bois pas toujours justes (!), on peut magnifier mieux ces partitions.

MYASKOVSKY, N.Y.: Symphonies Nos. 15 and 26 / Overture in G Major (Kondrashin, Nikolayev, Svetlanov)
→ Final de la 26 d'une simplicité sautillante et sans arrière-plan désespéré, absolument ravissant !

♥♥♥ *Miaskovski (Myaskovsky), Symphonie n°27 // Prokofiev, Symphonie n°6 – Oslo PO, V. Petrenko (LAWO 2021)
→ Saveur très postromantique (et des gammes typiquement russes, presque un folklore romantisé), au sein d'un langage qui trouve aussi ses couleurs propres, une rare symphonie soviétique au ton aussi « positif », et qui se pare des couleurs transparentes, acidulées et très chaleureuses du Philharmonique d'Oslo (de sa virtuosité aussi)… je n'en avais pas du tout conservé cette image avec l'enregistrement de Svetlanov, beaucoup plus flou dans la mise en place et les intentions…
→ Frappé par la sobriété d'écriture, qui parle si directement en mêlant les recettes du passé et une forme d'expression très naturelle qui semble d'aujourd'hui. L'adagio central est une merveille de construction, comme une gigantesque progression mahlérienne, mais avec les thématiques et couleurs russes, culminant dans un ineffable lyrisme complexe.
→ Bissé Miaskovski.

Miaskovski (Myaskovsky), Symphonie n°27 – Moscou StSO, Polyansky (Chandos)
→ Belle lecture, mais les détails sont bien moins audibles, les cordes gagnent, pas du tout la finesse de diamant et l'intensité de V.Petrenko-Oslo !   L'adagio paraît même ici un brin sirupeux / filmique / complaisant, alors que les harmonies et les figures complexes de bois sont audiblement riches.

♥ *(Marcel) Poot – Symphonies 1,2,3,4,5,6,7 – Anvers PO, Léonce Gras + Belgian RT NPO, Hans Rotman + Moscou PO, Frédérice Devreese + Belgian NRSO, Franz André (Naxos, réédition en coffret en 2021)
→ (Mis en couleur, mais il est en réalité flamand, précisons.)
→ Joli corpus, la 1 d'un postromantisme aux brusques simplicités néoclassiques, la 4 très marquée par l'orchestration et l'esprit de Chostakovitch, la 7 d'une bigarrure tourmentée assez persuasive…
→ Bissé la 7.

♥ *Skalkottas – 36 Dances grecques, The Sea Suite, Suite Symphonique n°1 – Athènes StO, Stefanos Tsialis (Naxos 2021)
→ Danses polytonales étonnantes, Suite néoclassique, Mer figurative et généreuse, mais tout en pudeur, sans chercher l'emphase, très réussie.
→ (Privilégiez cependant le précédent volume Skalkottas, plus essentiel.)

♥ *Takemitsu – Requiem pour cordes, Far Calls, How Slow the Wind, A Way a Lone II, Nostalghia in Mémory of Andrei Takovskij… – Suwanai, NHK, P. Järvi (RCA 2020)
→ Une bonne version (pas très colorée : pas le point fort de Järvi, ni surtout de cet orchestre, ni de ces œuvres précises de Takemitsu) d'œuvres pas parmi les plus chatoyantes ni passionnantes de Takemitsu (œuvres pour cordes essentiellement), à part How Slow the Wind (qui n'est pas son meilleur, mais contient les jolies échelles modèles de Tree Line ou Rain Coming).

♥ *Gerald BARRY – The Eternal Recurrence – Britten Sinfonia, Thomas Adès (Simax 2021)
→ Couplé avec les 7,8,9 de Beethoven que je n'ai pas essayées (les autres volumes étaient très bien, mais la concurrence est telle que…). En revanche le couplage avec des œuvres de Barry tout au long du cycle est vivifiant !
→ On retrouve le goût de Barry pour ces accords tonals utilisés sans réelle fonction, en forme de gros blocs un peu errants tandis que la ligne vocale de la soprano semble traditionnelle, presque sucrée. Très plaisant. (Je n'avais pas le texte pour suivre, je ne peux pas dire pour l'instant si c'était simplement joli ou vraiment saisissant.)

Dalbavie – Concertate il suono – OPRF (Densité-21 RF 2007)

♥ Dalbavie – Ciaccona – OP, Eschenbach (Naïve)

♥ *Dalbavie – La source d'un regard  – Seattle SO, Morlot (Seattle SO Media 2019)
→ Très belle évolution progressive d'étagements sonores.



G. Lied orchestral

♥♥ Hausegger – Barbarossa & Hymnen an die Nacht – Begemann, Norrköping SO, Hermus (CPO)
→ Barbarossa toujours pas fabuleux, hymnes très beaux, Begemann splendide.

♥♥♥ Diepenbrock – « Anniversary Edition, Vol. 2 » (Etcetera 2012)
Die Nacht – Janet Baker / Royal Concertgebouw Orchestra
Hymne an die Nacht 'Gehoben ist der Stein' – Arleen Augér / Royal Concertgebouw Orchestra
Hymne an die Nacht 'Muss immer der Morgen' – Linda Finnie / The Hague Philharmonic
Im grossen Schweigen – Robert Holl / The Hague Philharmonic
→ Splendides pièces généreuses, variées, lyriques, tourmentées, persuasives. Du décadentisme encore très romantique, petites merveilles.
→ Trissé.

♥♥♥ Diepenbrock – Reyzangen uit Gysbrecht van Aemstel (extraits) + Hymne aan Rembrandt + Te Deum + Missa in die festo – Westbroek (Etcetera 2013)

♥♥ Diepenbrock – Reyzangen uit Gysbrecht van Aemstel (intégral) + Hymne aan Rembrandt – Westbroek (Composers Voice 2005)
→ Première écoute du Aemstel intégral.
→ Bissé.

Diepenbrock – Die Vögel, Suite Marsyas, Hymne violon-orchestre, Electra, Die Nacht (Linda Finnie), Wenige wissen (Homberger), Im grossen Schweigen (Holl) – Den Haag RO, Vonk (Chandos 2002)
→ Les lieder orchestraux sont tellement plus intéressants que ses poèmes symphoniques (un peu lisses) !

DIEPENBROCK, A.: Orchestral Songs (Begemann, St. Gallen Symphony, Tausk) (CPO 2014)
→ Moins séduit, à la réécoute (et malgré le charisme de Begemann), par rapport aux autres lieder enregistrés par Chandos avec Finnie, Homberger et Holl.

♥♥ Cecil Coles – Fra Giacomo, 4 Verlaine, From the Scottish Highlands, Behind the lines – Sarah Fox, Paul Whelan, BBC Scottish O (Hyperion)
→ Belle générosité (Highlands à l'élan lyrico-rythmique réjouissant, qui doit pas mal à Mendelssohn), remarquable éloquence verbale aussi dans les pièces vocales. Bijoux.
→ Bissé.



H. Concertos

♥ *Vivaldi – Concertos pour basson – Azzolini (Naïve 2021)
→ Basson savoureux, très bel ensemble spécialiste, superbe veine mélodique aussi, de l'excellent Vivaldi !

♥ Antonín Vranický Concerto pour deux altos, Rejcha « Solo de Cor Alto », Vorišek Grand Rondeau Concertant pour piano violon violoncelle, Beethoven concerto pour violon en ut (fragment), dans la série « Beethoven's World » – Radio de Munich, Goebel (Sony)
→ Suite de l'incroyable parcours de Goebel qui documente des compositions concertantes et orchestrales de contemporains de Beethoven, avec des pépites (Clément, Romberg, Salieri…). Ici, très beau double concerto de Vranický, grandes pièce de Rejcha aux belles mélodies…

♥♥ Reicha Symphonie concertante pour 2 violoncelles, Romberg Concerto pour deux violoncelles, Eybler Divertisment – ( série « Beethoven's World ») – Deutsche Radio PO, Goebel (Sony)
→ Très beau, programme hautement original (dans la collection où j'avais déjà loué les Concertos pour violon de Clément et qui vient de publier Salieri-Hummel-Vořišek), mettant en valeur des jalons considérables du patrimoine.
→ Un Reicha virtuose : un violoncelle faisant des volutes graves, l'autre énonçant de superbes mélodies – celle du premier mouvement évoque beaucoup Credeasi misera.
→ Un Romberg au mouvement lent plus sombre, inhabituellement tourmenté (sans agitation pourtant), se terminant dans un rondeau aux rythmes de cabalette et dont la mélodie invite à la danse. 
→ Un Eybler trompettant, musique de fête.
→ Interprété avec une finesse de timbre et un élan absolument délectables.

Romberg (Bernhard) – Concertos pour violoncelle 1 & 5 – Melkonyan (CPO)
→ Le 5 a un côté symphonies de Mozart en mineur. Mais tout ça n'est pas particulièrement passionnant en soi.

♥♥ Bruch – Doubles concertos (2 pianos + alto & clarinette), Adagio apassionato, ouv Lorelei – ÖRF, Howard Griffiths (Sony 2019)

♥ PIERNÉ, G.: Orchestral Works, Vol. 2 - Fantaisie-ballet / Scherzo-caprice / Poème symphonique (Bavouzet, BBC Philharmonic, Mena)
→ Belle version de ces œuvres plaisantes.

♥ Pierné – Suites de Ramuntcho – Philharmonique de Lorraine, Houtman (BIS 1988)
→ Très plaisant.
& Concerto pour piano (avec son joli thème de final « la chenille qui redémarre »)

♥♥♥ van Gilse – Tanzskizzen – Triendl, PBSO Eschede, Porcelijn (CPO)
→ Bissé.

♥♥ Graener – vol. 3 : Concerto pour piano.  – Triendl, Radio de Munich, Alun Francis (CPO 2015)

Chostakovitch – Concerto pour violoncelle n°2 – Arto Noras, Radio Norvégienne, Rasilainen (Finlandia / Apex)
→ Tellement mieux que le Premier Concerto, dans version élancée et très bien jouée, mais demeure assez peu exaltant pour ma sensibilité…

Voormolen – Concerto pour deux hautbois – La Haye, Bamert (Chandos)
→ Néoclassique sympa.

♥ Klami : The Cobblers on the Heath (Ouverture) / Thème, 7 Variations & Coda Op.44 avec violoncelle solo – J.-E. Gustafsson, Lahti SO, Vänskä (BIS)
Et aussi : Kalevala Suite (sombre mais pas la plus fluide et colorée)

♥♥♥ Klami : Cheremissian Fantasy, Sea Pictures, Kalevala Suite ; Noras, Helsinki PO, FinRSO (Finlandia 1992)
→ Atmosphères entre Sibelius et Ravel assez mereilleuses. Très belles interprétations typées et savoureuses. (Découverte pour la Fantaisie.)

♥ Nyman, Piano Concerto – Lenehan, Ulster Orchestra, Yuasa (Naxos)
→ Vraiment beau dans ses consonances, ses ondoiements et ses jolies évolutions harmoniques. Mais tout le temps pareil – et identique à ses autres œuvres également.

Khodosh – Concerto pour piano & orchestre
→ D'un néoclassicisme aux éclats un peu circassien, assez amusant. Son opéra comique d'après L'Ours de Tchekhov, représenté en ce moment même à Donetsk, fait envie – n'étaient les obus.




I. Quatuors

*Józef Elsner –  « Trois quatuors du meilleur goût polonois » Op. 1  – Mikołaj Zgółka & friends (NFM, Accord 2021)
→ Première parution de ces beaux quatuors de style encore classique, dans une exécution avec cordes en boyaux – ce qui rend souvent, à mon sens, l'audition moins confortable, et distraite par les inégalités de timbre.
→ Même si la veine mélodique n'est pas la plus immédiate par rapport à nos références Haydn-Mozart, de soudaines bifurcations harmoniques font assurément lever l'oreille en de nombreuses occurrences.
→ Je serais très curieux de réentendre ce corpus interprété selon différentes autres options (plus de structure, plus de chair ou plus d'élan), je suis convaincu de son potentiel.

♥ *Hérold, d'Ollone, Rabaud – Quatuors – Hermès SQ (Chaîne YT de Bru Zane 2021)
→ Trois rarissimes quatuors, d'où se détachent en particulier les affects généreux du Rabaud, assez éloigné de son style orchestral plus hardi – alors qu'Hérold est y au contraire sur son version le plus sérieux et ambitieux.
→ Son très peu typé français de ce jeune ensemble, un peu trop de fondu et de vibrato pour moi, peut-être.
→ Super entreprise en tout cas que de jouer ces raretés, et de surcroît de les diffuser – le Palazetto n'étant pas l'endroit le plus commode d'accès au monde.

♥ Anton Reicha: Trois quatuors – Quatuor Ardeo (2014 | L'empreinte Digitale)
→ bissé

♥♥ GADE, N.W.: Chamber Works, Vol. 5 - String Quartet in D Major / String Quintet in E Minor / Fantasiestücke clarinette piano (Ensemble MidtVest) (CPO)

♥ *La Tombelle – Quatuor en mi – Mandelring SQ (Audite 2021)
→ Gloire aux Mandelring qui ont pris l'habitude d'enregistrer des quatuors rares en complément des œuvres (ou cycles d'œuvres) célèbres qui enregistrent !  Œuvre de salut public, d'autant que ce sont des quatuors entiers qu'ils gravent, très bien choisis, et exécutés au plus haut niveau !
→ De surcroît, ici, Bru Zane n'avait pas gravé, dans on anthologie de 3 CDs, ce quatuor (juste celui avec piano).
→ Pas bouleversé par la pudeur de cet opus : ni très mélodique, ni très sophistiqué, une sorte de Ravel en sourdine. Peut-être joué avec moins de transparence et une plus franche véhémence ?  Car il existe des moments franchement passionnés qui pourraient peut-être se trouver davantage mis en valeur avec un jeu plus « à l'allemande ».
→ (couplé avec le Ravel, pas écouté)

Bosmans Strijkkwartet (1927) , Utrecht SQ
→ Très français… et très court.

♥♥ KUNC, B.: String Quartet, Op. 14 / LHOTKA, F.: Elegie and Scherzo / SLAVENSKI, J.: String Quartet No. 4 (Sebastian String Quartet) (CPO)
→ Bissé.



J. Chambre

♥♥ *Sommer (1570–1627)  Der 8. Psalm // Fontana (1571–1630) Sonata 16 // Buonamente (1595–1642) Sonata seconda // Pachelbel (1653–1706) Canon & Gigue // Torelli (1658–1709) Sonata a 3 violini // Fux (c1660–1741) Sonata a 3 violini //  Louis-Antoine Dornel (1685–1765) Sonate en quatuor // Giovanni Gabrieli (c1555–1612) Sonata XXI con 3 violini // Purcell Three parts upon a ground & Pavane // Schmelzer (1620–1680) Sonata a 3 violini // Baltzar (c1631–1663) Pavane // Hacquart (c1640–a1686)  Sonata decima –
« Sonatas for three violins », Ensemble Diderot, Johannes Pramsohler (Audax 2021)
→ Je n'avais pas été enthousiasmé ni par les œuvres, ni par le son des principaux albums (très originaux) de l'ensemble, mais ici, ces sonates à violons multiples se révèlent remarquablement fascinantes !
→ bissé.

♥♥♥ *Jacchini, Gabrielli, Lulier, A. Scarlatti, Bononcini – Sonates pour violoncelle « The Italian Origins of the Violoncello » – Lucia Swarts +  Zomer , Richte van der Meer (cello), Siebe Henstra (harpsichord) (Mountain Records 2015-2021)

♥♥♥ *Roncalli – Intégrale de la musique pour guitare (baroque) : les 9 Sonates – Bernhard Hofstötter (Brilliant 2021)
→ Superbe massif très vivant, des suites de danse en réalité, dont la mobilité séduit grandement, en particulier la Passacaille en la mineur de la Cinquième Sonate, reprenant des basses connues des LULLYstes.
→ Interprétation très allante, prise de son confortable.

♥ Ritter – Quatuors avec basson – Paolo Cartini, Virtuosi Italiani (Naxos 2007) → Très joliment mélodique. Moins riche et virtuose que Michl.

♥ *ROMBERG, B.: Sonatas for Harp and Cello, Op. 5, Nos, 1, 2, 3 (Aba-Nagy, Szolnoki) (Gramola 2020)
→ Existe aussi en violoncelle-piano et en violon-piano, avec approbation du compositeur. Beaux thèmes séduisants, presque opératiques, du violoncelle, souple élégance de la harpe, très belles pièces de salon.
→ Captation avec un petit déséquilibre en faveur du violoncelle (la harpe est un peu retranchée vers l'arrière), probablement monté en boyaux considérant le timbre un peu plaintif.

♥ *Rejcha –  Octet, Op. 96 and Variations for Bassoon & String Quartet – Consortium Classicum (CPO 2000)

♥ *Onslow – Quintettes à cordes n°23 & 31 (vol.4) – Elan Quintet (Naxos)
→ Beaux quintettes sobres et touchants, du bon Onslow bien joué.

♥ Bruch: String Octet in B-Flat Major, String Quintet in A Minor & Piano Quintet in G Minor – par Ulf Hoelscher Ensemble (CPO)

♥ *Saint-Saëns – Sonates violoncelle-piano, violon-piano, Suite violoncelle-piano, piécettes, arrangements… –  Tanaka, Fouchenneret, Bartissol, Wagschal (3 CDs Ad Vitam 2021)
→ Clairement pas le sommet du legs de Saint-Saëns (quelle distance par rapport à l'ambition des quatuors à cordes ou avec piano !), mais de plaisantes œuvres très peu jouées, servies par des interprètes rompus à ce répertoire.

♥♥♥ *Stanford  – Quintette piano-cordes, Fantasies – membres de la Radio de Berlin, Nicolaus Resa (Capriccio 2021)
→ Une des grandes œuvres les plus inspirées du (très inégal) Stanford.

♥♥ *Labor – Sonates violon-piano, violoncelle piano, Thème & variations (cor-piano) – Karmon, Mijnders, Vojta, Triendl (Capriccio 2021)
→ Nouveau volume Labor, qui confirme le chambriste considérable qu'il est !  Plus lumineux et apaisé que son fascinant Quatuor piano-cordes.
→ Trissé.

♥ *BEACH, A. / PRICE, F.B.: Piano Quintets / BARBER, S.: Dover Beach (American Quintets) (Kaleidoscope Chamber Collective)
→ Très belles pièces tradis, avec des épanchements traditionnels des mouvements lents pour ces formations, d'une très beau métier !

♥ Koechlin – Sonate à sept – Lencsés, Parisii SQ (CPO 1999)
→ Sorte de pièce concertante pour hautbois. Pastoralisme un peu lent et bavard, sorte de Milhaud réussi.

♥♥ *Escher – Concerto pour orchestre à cordes, Musique pour l'esprit en deuil, Tombeau de Ravel, Trio à cordes, Chants d'amour et d'éternité (pour chœur a cappella), Le vrai visage de la Paix, Ciel air et vents, Trois poèmes d'Auden – Concertgebouworkest, Chailly ; PBChbCh, Spanjaard (Brilliant 2020)
→ Vaste anthologie (essentiellement des rééditions, je suppose), avec quelques belles inspirations d'un postromantisme assez simple.

♥♥ *Klami –  Quatuor piano-cordes, Sonates violon-piano &  alto-piano – Essi Höglund, Ero Kesti, Sirja Nironen, Esa Ylonen (Alba 2021)
→ Beau corpus, très pudique (que d'aération, de respirations, de silences à tour de rôle dans ce Quatuor !), très beaux timbres et phrasés (le violon d'Essi Höglund en particulier).



K. Flûte solo

♥ *Koechlin – Les Chants de Nectaire – Nicola Woodward (Hoxa 2021)
→ Ni aussi nette et virtuose que Balmer, ni aussi poétique et souplement articulée que de Jonge, cette quatrième intégrale du monumental chef-d'œuvre universel de la flûte solo (4h), inspiré d'un jardinier musicien (un ange caché dans La Révolte des Anges d'Anatole France…), ne change pas nécessairement la donne. Je recommande vivement d'écouter Leendert de Jonge dans ces pages – la famille Koechlin le recommande également pour son respect des nuances écrites et de l'esprit général.
→ Mais, il est formidable de pouvoir comparer les lectures, et quitte à écouter n'importe quelle version, plongez-vous, oui, dans ce chef-d'œuvre incroyable !



L. Théorbe

♥♥♥ Visée : Chaconne en la mineur, Monteilhet

♥♥♥ Bach – Suites 1,2,3 pour violoncelle (version théorbe) – Monteilhet 1 (EMI 2000)
→ Tellement de mordant et de résonance ici (rien à voir avec les suites 4 à 6 chez ZZT, plus ouatées et lisses).



M. Harpe

♥♥ *Casella Sonate pour harpe // D  Scarlatti Kk 135 // Bach toccata ut mineur // Debussy Ballade pour piano // Zabel fantaisie sur Faust –  « Ballade » – Emily Hoile, harpe (Ars Produktion 2021)



N. Violoncelle·s

♥♥♥ Bach – Suites pour violoncelle 3,1,4,6… – Lucia Swarts (Challenge Classics 2019)
→ De (très) loin la version la plus enthousiasmante que j'aie entendue sur instrument ancien !  Du grain en abondance, de la couleur partout, et un mordant exceptionnel…
→ Possiblement la version qui soutient le plus mon intérêt sur la durée, aussi, alors que je fatigue assez vite avec ces Suites, que je trouve moins nourrissantes que son corpus pour violon…

Bach, Bourrée de la Suite n°3 pour violoncelle : Swarts, Maisky DGG, Maisky live w. Argerich, Monteilhet

♥ B. Romberg – Sonata for 2 Cellos in C Major, Op. 43, No. 2 – Ginzel & Ginzel (Solo Musica)



O. Piano·s

♥ *Brillon de Jouy – The Piano Sonatas Rediscovered –  Nicolas Horvàth (Grand Piano 2021)
→ Très plaisant classicisme finissant / premier romantisme, pas particulièrement personnel, mais écrit sans aucune fadeur (et finement joué).
→ (Je découvre a posteriori qu'il s'agit d'une compositrice.)

Gouvy – L'œuvre pour deux pianos – (Bru Zane)
→ Agréable. Rien de très saillant en première écoute.

♥♥ Kurtág – Játékok à quatre mains – M. & G. Kurtág (DVD)
→ Une autre vision (que le disque, le concert et mes propres doigts, jusqu'ici) avec cette version vidéo de ces délectables miniatures !

♥♥ *Griffes, Crumb, Carter, Glass, Shimkus – « America 1 » – Vestard Shimkus (Artalinna 2021)
→ Panorama à la vaste diversité de langages et de touchers. L'impressionnante Sonate de Griffes conserve beaucoup de gestes (de structure, de virtuosité, même de tonalité) issus du patrimoine, et donne une très belle occasion à Shimkus de montrer l'étendue de sa palette d'attaques et de textures.
→ Le sommet de l'interprétation se révèle sans doute dans l'incroyable diversité d'inflexions et de phrasés dispensés dans (l'insupportable) Glass, tout en trémolos lents de tierces mineurs, d'une pauvreté emblématique – mais le pianiste y impressionne.
→ Récital très original et cohérent, un petit monde à parcourir.



P. Clavecin

♥♥ *J.-Ph. Rameau, Claude Rameau, Claude-François Rameau, Lazare Rameau, J.-F. Tapray – Pièces pour clavecin « la famille Rameau » – Justin Taylor (Alpha 2021)
→ Inclusion du frère, du fils et du neveu Rameau, ainsi que de variations brillantes des années 1770 de Tapray sur Les Sauvages. Parcours passionnant au cœur du temps et des proximités.
→ Frémissante interprétation, très discursive et vivante, pleine de replis et d'inaglités sans la moindre affèterie, sur un clavecin remarquablement choisi et réglé…



Q. Orgue

♥♥ *Casini, Casamorata, Maglioni – « Florentine Romantic Organ Music  » – orgues de Corsanico et Sestri Levante, Matteo Venturini (Brilliant 2021)
→ Musique de pompe assez festive et extravertie (les clochettes intégrées !), de la musique rare, où l'on retrouve des tournures mélodiques typiquement italiennes, et jouée avec beaucoup de générosité et de clarté. Pas le sommet du bon goût, mais un aspect rare de la musique italienne à découvrir dans de très bonnes conditions !

*Edvard Grieg: Alfedans – arrangements des Danses norvégiennes & Pièces lyriques – Marco Ambrosini (Nyckelharpa), Eva-Maria Rusche (orgue) (DHM 2021)
→ Très amusante couleur locale et jolies danses, bien réadaptées aux instruments !



R. Airs de cour, lieder…

♥ *Rasi, Del Biado, Da Gagliano, Caccini, Peri, Falconieri, Gesualdo, D'India, Monteverdi – Soleil Noir – Gonzalez Toro, I Gemelli (Pierrard, Dunford, Papadopoulos), Gonzalez Toro (Naïve 2021)
→ Beau parcours intimiste dans le répertoire d'un ténor historique du premier baroque.

♥♥ *Schubert – Die Winterreise – DiDonato, Nézet-Séguin (DGG)
→ Grande et belle surprise : DiDonato utilise ici la partie la plus colorée de sa voix, trouvant de très belles textures qui échappent à l'aspect « opéra ». Le vibrato rapide et la beauté du phrasé entretiennent une véritable atmosphère expressive, digne des grandes lectures d'un cycle pourtant conçu (et plus facile à chanter) pour voix d'homme.
→ L'allemand n'est pas tout à fait naturel, la couverture vocale reste importante sur certaines voyelles… cependant l'expression (davantage, finalement, que la beauté bien connue de la voix) l'emporte sans hésiter – et sans la mollesse qu'on pouvait redouter d'un instrument conçu pour des répertoires réclamant davantage de largeur et de fondu d'émission.
→ En fin de compte, une lecture vraiment différente, qui ne m'est pas apparue comme une jolie version d'une chanteuse d'opéra, mais véritablement comme une proposition singulière et aboutie du cycle.

♥ *Gisle Kverndokk – Så kort ein sommar menneska har (mélodies en bokmål et anglais) – Marianne Beate Kielland, Nils Anders Mortensen (Lawo 2021)
→ Belles mélodies simples et prégnantes, incluant un cycle Shakespeare en VO. Toujours belle et douce voix de mezzo de Kielland.

♥ *Mozart-Spindler – Arrangements pour hautbois et orchestre : Concerto pour flûte et harpe, airs de concert, Exsultate jubilate – Albrecht Mayer, Kammerphilharmonie Bremen, Albrecht Mayer (DGG 2021)
→ Disque-démonstration pour Albrecht Mayer, l'emblématique hautboïste solo du Philharmonique de Berlin

♥♥ *Wagner, Pfitzner, R. Strauss – lieder « Im Abendrot » – Matthias Goerne, Seong-Jin Cho (DGG 2021)
→ Goerne a vieilli et la prise de son très rapprochée et réverbérée cherche à créer un effet d'ampleur qui correspond assez mal à celle (réelle) qu'il manifeste en salle. Elle souligne les défauts, les sons légèrement blanchis, les petites gestions du détimbrage sur certaines voyelles… Très étrange spectre sonore très brouillé, assez déplaisant.
→ En revanche, programme original et interprétation prenante, avec la « longueur d'archet » impressionnante et le legato infini de Goerne, son sens de l'atmosphère…
→ Cho est comme toujours assez froid, et ne déploie pas exactement des moirures symphoniques (pour autant, ça s'écoute très bien).
→ Malgré l'amoindrissement de l'instrument, c'est donc un disque marquant, une fois que l'on a surmonté l'étrangeté de la prise de son.

♥♥ *Wiéner, Chantefleurs // Milhaud, Catalogue des fleurs // Satie, Honegger, Lili Boulanger – « Fleurs » – Loulédjian, Palloc (Aparté 2020)
→ Délicieuse adaptation musicale des miniatures de Desnos par Wiéner, servie avec une versatilité et une grâce rares.



S. Chanson

♥ *Horace Silver, Duke Elligton, Norah Jones… – « Midnight Jones » – Norah Jones (UMG, réédition 2020)

♥♥♥ Norah Jones – Comme Away With Me – Norah Jones (Blue Note 2002)

♥♥♥ Norah Jones – Don't Know Why – Norah Jones (Blue Note 2002)
→ Bissé.

♥♥ Cocciante-Plamondon, Notre-Dame de Paris « Belle » (versions française, grecque, russe, italienne, coréenne, espagnole, néerlandaise, polonaise)
→ Seul moment de valeur dans cette pièce particulièrement peu exaltante (intrigue, versification, musique, rien ne réussit), le trio des soupirants réussit une forme poétique originale et une thématique musicale très prégnante. Un des plaisirs de ce genre de production à succès est de pouvoir en explorer les versions en diverses langues, de découvrir les choix de re-versification (particulièrement difficile ici, ça joue beaucoup de mots-outils français !), d'observer les différences d'émission vocale selon les langues… 
→ L'italienne trouve des alternatives vraiment stimulantes à la VF. (et particulièrement bien chantée par les deux ténors graves)



guatemala



Beaucoup de notules un peu plus ambitieuses avaient empêché la publication, ces derniers mois, des disques écoutés récemment… C'est chose faite.

Un peu épais sans doute, mais en naviguant entre les astérisques des nouveautés, les parcours nationaux colorés et les petits ventricules palpitants de mes recommandations, vous devriez attraper quelques pépites que j'ai été très impressionné de pouvoir découvrir, après tant d'heures d'écoutes au compteur !

vendredi 29 novembre 2019

« N'aimez-vous pas les œuvres davantage pour leur rareté que pour leur qualité ? »


Variante un peu plus intimement intrusive (mais sensiblement plus courtoise) que « Parce que deux écoutes de L'Art de la Fugue, ça vous a suffi ? ».
CSS avait déjà abordé cette question, notamment sous l'angle du concert.

Cette fois, je réponds plutôt à l'enjeu, non pas de la répétition du répertoire et de la largeur de choix, mais de ce qui fait la qualité d'une œuvre, de ce qui la rend indispensable à enregistrer ou à connaître.

langgaard musique des sphères partition
Page choisie dans la Musique des Sphères de Rued Langgaard, pièce particulièrement originale écrite en nuages alla Ligeti… et composée avant sa naissance !
Est-elle importante car novatrice, car personnelle, car bien écrite, ou au contraire une curiosité non prioritaire, c'est ce à quoi cette notule (ni grand monde) ne peut répondre.




Selon les attentes intimes de chacun, il existe plusieurs lignes de fracture possibles au moment du choix d'une œuvre à écouter.


a) L'importance historique

J'ai toujours reconnu que les compositeurs les plus célèbres étaient tous parfaitement à leur place. On peut excepter les plus récents, où le tri ne s'est pas encore fait, où la notoriété conjoncturelle joue son rôle, comme pour Boulez et Glass, qui sont fort célèbres l'un en raison de son importance comme fondateur d'institutions, chef d'orchestre et polémiste, l'autre parce qu'accessible et rassurant bien que pauvre ; ils occupent vraisemblablement (je peux me tromper) une place disproportionnée dans les concerts, disques et conversations par rapport à leur importance réelle dans l'histoire de la musique.

Monteverdi, Bach, Beethoven, Wagner, Debussy sont des géants, des génies dont l'histoire a peu d'exemples. Ils ont de surcroît servi de modèle aux suivants et constituent donc, en plus de leur mérite propre, des matrices dont on peut difficilement se passer pour comprendre l'évolution musicale.
D'autant plus que la musique, par rapport aux autres arts, suit une grammaire stricte (un accord mal écrit est une catastrophe qui ruine tout, pas du tout comparable à une main ratée ou un bout de perspective contradictoire dans un tableau), et évolue lentement – voyez par exemple le décalage entre la langue du roman Werther et de sa première adaptation musicale dans un style très XVIIIe… L'impact des modèles sur la substance même du langage y est beaucoup plus fondamental que pour n'importe quelle autre forme d'expression, à ce qu'il m'en semble.



b) La qualité d'écriture

Pour autant, dès qu'on observe dans le détail leur production, on peut trouver meilleur chez des compositeurs moins célèbres. Tout Mozart n'est pas au même degré de génie, et Vranický, Cannabich, Vaňhal ou Baermann ont leurs très grands moments.



c) La tournure d'esprit individuelle

Le débat s'est développé sur Classik à partir de la liste de proposition réduite de 10 disques de piano également proposée sur CSS : n'y a-t-il pas, chez les mélomanes un peu goulus, une prime indue à la rareté ?

Je crois qu'il peut y avoir, lorsqu'on a beaucoup écouté les grands classiques, une sensibilité particulière à la nouveauté (c'est clairement mon cas), à la découverte d'univers nouveaux, de façons différentes de penser le piano. Et inversement, pour d'autres personnes, le fait de pouvoir revenir à une œuvre-doudou, d'avoir baigné dedans depuis toujours, de se sentir approuvé par des siècles d'exégèse, va apporter davantage de plaisir. D'où les différents types d'attitude, ceux qui vont réécouter l'Opus 111 chaque dimanche soir, et ceux qui vont faire la moue sur un disque Chopin non parce qu'ils ne l'aiment pas (moi en tout cas, j'adore et admire Chopin, pas de doute !), mais parce qu'ils ont un peu épuisé leurs émotions en sa compagnie, ou souhaitent simplement être encore surpris et séduits par de nouvelles propositions aussi singulières que les siennes.

Donc à intérêt égal, ou même inférieur, oui, certains mélomanes peuvent avoir envie d'insister sur ce qui est plus rare. Parce que ces œuvres ont davantage besoin d'être distinguées que Vivaldi, Brahms ou Mahler, parce qu'on peut aussi ressentir qu'elles font davantage partie de notre identité que ces grands compositeurs que tout le monde a écouté, sur lesquels les grands esprits ont déjà écrit tant de choses essentielles jusqu'à en lessiver la matière…
Cela ne veut évidemment pas dire que ces représentants obscurs soient négligeables ni mêmes secondaires ; tout le monde s'accordera à dire que si l'on débute ou qu'on a peu de temps à y consacrer, il faut commencer par Beethoven 5 et le Sacre du Printemps plutôt que par les publications de CPO – du moins si l'on n'a pas d'indices sur les goûts de la personne, cf. d infra. En revanche chez certains mélomanes une découverte d'une œuvre moindre peut procurer de plus intenses émotions que la réitération d'un chef-d'œuvre déjà familier.

Cela dépend vraiment, je crois, de la structure interne des individus, et ne me semble pas appeler de jugement particulier. (Moi je trouve plus intéressant d'élargir son horizon, mais c'est aussi parce que ça me procure des satisfactions… et tout le monde n'a pas le temps de le faire !)



d) La sensibilité personnelle

Peut-être le plus intéressant : le corpus canonique ne couvre pas toutes les nations ni toutes les esthétiques !  Or chaque individu peut être sensible, c'est un truisme, à des écoles différentes… pas toutes représentées dans le panthéon officiel.

Dans cette liste de piano, j'ai proposé ce qui était le plus proche de ma sensibilité, et qui couvre un répertoire totalement distinct de la musique formelle à l'allemande, des Sonates disons. Si l'on n'est pas touché par le piano de Beethoven, Chopin ou Brahms, il existe d'autres univers qui peuvent nous satisfaire davantage – et qui échappent d'ailleurs à la comparaison, leur projet n'étant pas du tout le même.
On peut toujours se demander si les Nocturnes de Mossolov sont moins bons que ceux de Chopin, mais je crois qu'on peut s'accorder pour dire qu'il est difficile de trouver des critères communs pour évaluer ces deux musiques.

La quête du rare peut donc aussi débloquer l'accès à certains genres. On n'aime pas l'opéra parce qu'on croit que c'est Haendel-Donizetti-Verdi-Puccini, et l'on découvre LULLY / Rimski / Debussy… c'est une tout autre histoire. Il en va de même pour les répertoires dont la face célèbre est plus étroite, comme le piano, l'orgue, les concertos, les symphonies…



Conclusion morale

La hiérarchie en art est de toute façon à peu près impossible. On peut quantifier à la rigueur l'originalité (Mozart « nous fait des trucs que les autres ne font pas pour nous », dans Don Giovanni ou même La Clemenza), la nouveauté (Beethoven, Wagner et Stravinski ont bien mis le bazar dans la conception du geste créateur, clairement), mais pour ce qui est de l'intérêt, de la valeur… Chacun a ses critères – même au delà de l'émotion brute, est-ce la mélodie qui prime ? l'harmonie ? la forme ?

En ce qui me concerne, je m'en moque un peu : j'écoute ce qui me plaît. Et aussi ce qui ne me plaît pas, pour connaître. Et lorsque je découvre des choses étonnantes, stimulantes, ou simplement belles, j'essaie de partager.

J'adore les compositeurs les plus célèbres (un peu moins Bach, quand même, mais je ne peux nier qu'il est fortiche), je les écoute très souvent… mais je n'éprouve pas le besoin d'affirmer qu'ils sont plus ou moins grands que d'autres ; les jours où j'ai envie de les écouter alternent avec ceux où d'autres moins cotés me tentent davantage. Si je conteste la récurrence abusive des grands noms, c'est que j'aime avoir le choix. Quand je ne vois que les 15 mêmes pianistes-compositeurs germaniques donnés en concert, je n'ai pas le sentiment qu'on me laisse libre. (Ce qui n'enlève rien au fait qu'on ne jouera jamais trop Beethoven !  Mais on pourrait le faire un peu moins et ouvrir la place à d'autres modes de pensée.)

--

Il existe donc possiblement, oui, un biais du rare et du bizarre. Pour autant, je ne vois pas l'intérêt de se poser la question d'une hiérarchie absolue : la musique reste là pour apporter un supplément à nos vies, elle n'est pas une bataille, et la coexistence de styles différents ne retranche rien à ceux qui ne veulent pas les écouter. Si je suis partisan de la variété et du renouvellement, c'est pour laisser une liberté de choix, une possibilité de continuer toujours à découvrir, ou bien de trouver le genre avec lequel nous entrons le mieux en résonance. De ne pas passer à côté de la musique classique parce qu'on n'en voit qu'une face, certes considérable, mais absolument pas unique.

Tout cela pour livrer cette clausule profonde : je vous enjoins fermement à écouter… ce qui vous chante.
(Navré, CSS est gratuit, je ne puis vous rembourser.)

vendredi 2 août 2019

2019-2020 : opéras à découvrir en France et en Europe


Sans reprendre l'ambitieux parcours (que j'avais cependant beaucoup aimé constituer) autour des opéras rares donnés dans le monde, et présentés un par un (saison 2017-2018), car il y a d'autres séries à achever (une décennie un disque, débuts de symphonie…), voici une petite sélection de titres qui donnent envie de se déplacer.



opéras à l'étranger et en province 2019 2020 illustration
Cliquer sur l'image permet d'ouvrir le tableau.



a) Organisation

Quelques remarques méthodologiques :

♦ Contrairement à la précédente instance, je n'ai pas cherché à donner un panorama de tout ce qui était donné hors de l'ordinaire ; j'ai effectué une sélection personnelle de ce qui me paraissait – à moi – tentant. On y retrouve tout de même l'essentiel des titres rarement donnés, mais je n'y ai pas inclus les titres pour lesquels le voyage me semblait moins justifié : œuvres courtes (je suis fan du Maestro di cappella de Cimarosa, mais 20 minutes de musique…), légères (beaucoup de petits Offenbach), contemporains inconnus de moi, Philip Glass. J'admets que ce soit moins intéressant que le vrai panorama, mais il existe une différence significative en temps : voyez-le comme un recueil de conseils pour aller voir quelque chose, plutôt qu'en tant que document encyclopédique sur l'état de la programmation mondiale.

♦ Il a fallu effectuer un classement : j'ai choisi celui qui fait le plus sens pour moi, par langue puis par ordre chronologique approximatif des compositeurs. En accédant au tableau, vous pourrez effectuer votre propre classement par compositeur, ville, pays… selon vos priorités.

♦ Je tiens à préciser qu'étant issu d'un recensement à but personnel, vous trouverez des incohérences : j'ai relevé des dates à Tel-Aviv et Montevideo alors qu'il ne s'agit supposément que d'Europe, ajouté quelques opéras (Clemenza di Tito, Pikovaya Dama) très régulièrement donnés mais que j'ai envie de revoir cette saison… Je ne les ai pas retirés du relevé, ça n'y retranche rien. Mais je suis conscient de ces distorsions, oui.

♦ À cela s'ajoute que beaucoup de saisons n'ont pas encore paru sur mes radars (notamment aux Pays-Bas, en Europe Centrale…), et que je n'ai évidemment pas pu tout surveiller et relever. Beaucoup de petites pièces (théâtres secondaires moscovites !), notamment pour enfants ou à destination locales, ont ainsi dû, hélas, m'échapper.



b) Quelques immanquables

Dans la vastitude de la proposition, quelques pistes (en gras, en rouge).

Nadia Boulanger, La Ville morte, Göteborg.
Très grande compositrice, éclipsée par le destin tragique de sa petite sœur Lili – et arrêtant la composition à sa mort –, elle a laissé un opéra. Non pas d'après Rodenbach mais d'après D'Annunzio (hé oui), elle achève en réalité l'œuvre de Raoul Pugno (qui nous est resté comme compositeur de plaisantes mélodies). On ne dispose pas d'enregistrement, ce sera une grande découverte.

… j'ai finalement fait le choix d'inclure, pour plus de clarté, de brefs commentaires directement en face des titres. En sélectionnant la case, le texte apparaît dans la barre du haut (et en double-cliquant, il apparaît en entier).

Évidemment, je suis très tenté par les opéras contemporains tchèques, lituaniens, lettons, grecs ou hongrois (toute une série en janvier-février à Budapest !) que je ne connais pas !



c) Tableau

L'original, qui comporte davantage de colonnes (dont les pays et commentaires !), qui peut être importé dans votre propre tableur et sera potentiellement complété, figure ici.

Suite de la notule.

mardi 7 août 2018

[Carnet d'écoutes n°121] – les tubes de l'été : Volkmann, Kalinnikov, Andriessen, quatuors, Kitayenko, Currentzis…


Contrairement aux apparences, Carnets sur sol est en pleine effervescence, accaparé par la préparation de quelques notules qui s'élaborent doucettement depuis des mois.

Cependant, comme il ne s'agit pas de vous laisser sans soutien à votre bon goût naturel, en cette période de Grand Désœuvrement, vous trouverez ici quelques impressions, laissées en vrac, sur certaines de mes écoutes de ces derniers mois. Manière d'avoir trace, pour celles à qui je n'ai pas encore eu le loisir de consacrer une notule bien méritée (Andriessen !), de certaines figures intéressantes. Évidemment, quand c'est pour dire que j'ai écouté les quatuors de Mendelssohn ou les symphonies de Beethoven, ça revêt un peu moins d'intérêt – mais précisément, c'est du vrac.

À propos de la cotation :
Les binettes se lisent comme les tartelettes au citron ou les putti : elles ne concernent que les œuvres, pas les interprétations (en général choisies avec soin, et détaillées le cas échéant dans le commentaire). Ces souriards ne constituent en rien une note, et encore moins un jugement sur la qualité des œuvres : ils indiquent simplement, à titre purement informatif, le plaisir que j'ai pris à leur écoute. Je peux avoir modérément goûté l'écoute de chefs-d'œuvre et jubilé en découvrant des bluettes, rien de normatif là-dedans.
1 => agréable, réécoute non indispensable
2 => à réécouter de temps en temps
3 => à réécouter souvent
4 => œuvre de chevet
5 => satisfaction absolue
Un 2 est donc déjà une bien bonne note, il ne s'agit pas de le lire comme une « moyenne » atteinte ou non.



Lundi

¶ Méhul, La Chasse du jeune Henri, ouverture 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Tamberg, Symphonie n°1 Very Happy Very Happy 
¶ Tamberg, Symphonie n°2 Very Happy Very Happy 
Du soviétisme gentil associé d'églogues façon Comodo-de-la-3-de-Mahler. Mignon.

¶ Offenbach, Grande-Duchesse, version Lafaye 
Very Happy
(mais le Trio des Conspirateurs, c'est Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy )


Mardi

¶ Schoeck, Venus, Venzago (Musiques Suisses) 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 

¶ Zavaro, Manga-Café, Les Apaches, Masmondet 
Very Happy Very Happy
Livret qui peine à trouver son ton (et sans tension), mais ambiance sympa.

¶ Bernstein, Trouble in Tahiti, Les Apaches, Masmondet 
Very Happy Very Happy Smile


Mercredi

¶ Trios de Mendelssohn, Estrio (Decca) 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Bonne version. J'ai eu une épiphanie récente avec le final du 2 dans la version J.Fischer/Müller-Schott.

¶ Trios 1 & 2 de Schumann, Trio Karénine (Mirare, je crois) 
Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Petits jeunes, appréciés en vrai en juillet dernier. Apparemment ils font leur trou même au disque. 

¶ Autres Trios de Schumann, Trio Brahms de Vienne (Naxos) 
Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Dont les transcriptions des pièces pour piano-pédalier !

¶ Nocturnes de Fauré, intégrale Jean-Michel Damase (Accord)
Very Happy Very Happy
Assez sec, vraiment scolaire au niveau des articulations. Pas la même auteur de vue qu'en tant que compositeur.


Jeudi

¶ Stenhammar, Quatuor 3 (intégrale Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Stenhammar, Quatuor 2 (intégrale Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ Stenhammar, Quatuor 4 (intégrale Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
L'intégrale du Quatuor Stenhammar est meilleure, mais j'ai celle-ci (très bien aussi) sous la main. Quelles œuvres, bon sang !


Vendredi

¶ Szymanowski, Concerto pour violon n°1 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Steinbacher / Radio Berlin ex-Est / Janowski, chez PentaTone.
Superbe orchestre, mais Steinbacher sonne vraiment tirée dans cet enregistrement.

¶ Szymanowski, Concerto pour violon n°1 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Anna Akiko Meyers, Philharmonia, Kristjan Järvi (chez Avie)
Orchestre logiquement plus vif, mais là aussi, l'œuvre met à l'épreuve la violoniste, son pas très agréable.

¶ Szymanowski, Concerto pour violon n°1 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Tasmin Little, BBCSO, Gardner (chez Chandos)
Bien mieux côté violon, et belle direction, mais même s'il s'agit d'un Chandos relativement récent, je trouve la prise de son de l'orchestre un peu trop lointaine et floue pour l'œuvre.

Il faudra que j'essaie, dans ce cas, Skride-V.Petrenko et Jansen-Gergiev, les deux adorés en salle, mais pas testé le rendu sur disque. Il faut dire que c'est l'une des œuvres que j'adore en vrai (peut-être parce qu'elle m'épargne l'écoute d'un véritable concerto ?), mais que je vais spontanément moins écouter en choisissant un disque.


Samedi

¶ Gounod, Faust, version originale et traditionnelle, Rousset et annexes chez Plasson 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Beethoven, intégrale symphonique 
Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
1,2,3,4, Ouvertures par Solti 74.
5,9, Musiques de scène, Wellington par Dausgaard & Chambre de Suède. 
Le reste est en cours.

¶ Nowowiejski, Symphonie n°2, OP Poznań, Borowicz (chez DUX) Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Nowowiejski, Symphonie n°3, OP Poznań, Borowicz (chez DUX) Very Happy Very Happy Very Happy
Tradi, quelque part entre du postromantisme à ostinatos et du présoviétisme gentil. Sympa.

¶ Grigori Frid, Das Tagebuch von Anne Frank 
Very Happy Very Happy Very Happy Smile
L'opéra d'une heure de Grigori Frid mélange de façon très étonnante les styles du XXe siècle… le Prélude est d'une atonalité acide, avec des stridences et des agrégats hostiles, tandis que le chant s'apparente bien davantage à l'univers des lieder de Max Reger, du jazz, en tout cas de la tradition. Tout cela se mélange, alterne, avec un résultat qui peut ressembler à du Berg de jeunesse comme à de l'atonalité libre du second XXe… assez séduisant en réalité, d'autant que dans la représentation que j'ai vue, Nina Maria Edelmann chante avec un timbre, une diction et une éloquence magnétisants.

¶ George Stephănescu, Cântecul fluierașului, Gheorghiu, Jeff Cohen. 
Very Happy Very Happy
Très naïf, typé jeune romantique même si plus tardif (Flotow…).
¶ Tiberiu Brediceanu, Cine m-aude cântând, Ruxandra Cioranu, Ecaterina Barano  
Very Happy Very Happy Smile

 David DiChieraCyrano ; Opéra de Detroit Very Happy Very Happy
→ Il s'agit du véritable texte (coupé et parfois arrangé – « hanap » devient « coupole »), mis en musique par David DiChiera (né en 1935) dans une langue complètement tonale, et simple (beaucoup d'aplats, pas particulièrement virtuose). L'accent porte évidemment davantage sur le texte (d'ailleurs les facéties de l'acte I sont conservées, pas seulement l'histoire d'amour), mais je trouve cependant le résultat moins prégnant musicalement que chez Tamberg, clairement.

¶ Battistelli, Richard III ; Opéra de Genève Very Happy Very Happy Very Happy
→ Dans un langage quelque part entre l'atonalité polarisée et la tonalité élargie, Battistelli écrit dans une langue non dépourvue de lyrisme… Il fait un grand usage des chœurs, notamment dans la scène finale, où ils flottent en beaux agrégats, impalpables, au-dessus de la scène jonchée des cadavres que foule le nouveau roi. Mérite d'être entendu.

¶ Schoeck, Besuch in Urach ; Harnisch, Berne, Venzago Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Corigliano, The Ghost of Versailles, air du Ver ; Brenton Ryan, Plácido Domingo Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
https://www.youtube.com/watch?v=AhebF07M4lY (page de l'artiste)

¶ Rihm, Das Gehege Very Happy
Très monotone pour du monodrame. C'est tiré de Botho Strauß : une femme rêve de se faire déchirer [sic] par un aigle, ouvre sa cage, mais comme il est vieux et impuissant, elle le tue. 
Cool.
Mais la musique est tout sauf vénéneuse et tourmentée ou paroxystique, assez poliment ennuyeux. 

Et à présent, une petite pause légèreté : 

¶ Langgaard, Fortabelsen ; Dausgaard Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
bounce

¶ Liszt, La Légende de la sainte Élisabeth ; Opéra de Budapest, Joó Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Très étonnant tout de même : surtout orchestral, des aspects wagnériens, et quand le chœur arrive ça ressemble à du Elgar. scratch

¶ Reimann, L'Invisible, sur trois pièces de Maeterlinck Very Happy Smile
L'opéra réunit trois courtes pièces de Maeterlinck, L'Intruse, Intérieur et La mort de Tintagiles ; on y retrouve la langue postberguienne de Reimann, peut-être moins aride que dans Lear. Je trouve personnellement la langue musicale de Reimann (à la fois grise et très dramatique) assez incompatible avec l'univers de Maeterlinck, mais les critiques ont été dithyrambiques. Il faut dire que la distribution, réunissant le délicieux Thomas Blondelle et la miraculeuse Rachel Harnisch, magnifie tout ce qui peut l'être dans cette partition.

¶ Riisager, Études (ballet) ; National du Danemark, Rozhdestvensky Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Des orchestrations de pièces pédagogiques de Czerny. Contre toute attente, c'est réjouissant ; quel sens de la couleur ce Knudåge !

¶ Gordon Getty, Usher House ; Elsner, É. Dupuis, L. Foster (PentaTone) Very Happy Very Happy Smile
Dans un langage qui évoque l'atonalité romantique (héritage revendiqué de Schönberg), un peu gris, mais avec un certain sentiment de naturel et de liberté, une variation autour de la nouvelle de Poe. Getty parle de la prévalence de sa propre nécessité intérieure sur le fait de faire de la nouveauté. (pour autant, cela ressemble bien à de l'opéra du second XXe)

¶ Beethoven, Missa Solemnis ; Popp, Minton, Mallory Walker, Howell, Chicago, Solti Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Je n'aurais jamais cru que Solti ni Decca puissent commettre ça. Ce chœur pléthorique semi-amateur, cette prise de son solide… pale (j'en parle plus en détail dans le fil)

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J'ai entendu la semaine passée la première exécution de l'Ode à la France, la dernière œuvre de Debussy – inachevée, certes, la dernière achevée restant Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon (remerciement à son fournisseur en 1918).

Il s'agit d'une cantate avec soprane et chœurs (laissée à l'état d'accompagnement avec piano), représentation des derniers moments de Jeanne d'Arc, sur un assez méchant poème de Louis Laloy.

La musique hésite entre le dépouillement du Debussy « national » qui regarde vers Couperin et Rameau et les harmonies complexes d'Usher… 
Je ne trouve pas le résultat très heureux, quelque chose du Noël des enfants qui n'ont plus de maison, mais qui se prendrait très au sérieux (et sans du tout le même caractère direct des mélodies : je parle de l'esprit, pas du style musical à proprement parler très différent). Plutôt Jeanne d'Honegger-Claudel, le prosaïsme en moins.

Il n'empêche qu'entendre un Debussy de maturité aussi ambitieux (il nous en reste un quart d'heure, sauvé par Emma après la mort de Claude Achille), qui n'a jamais été gravé (et guère représenté hors de la soirée de création, en 1928), voilà qui constitue une réelle expérience !

(Le reste du concert, avec des inédits de Caby, Ladmirault, Cartan, Auric, Ropartz… était autrement plus nourrissant musicalement, ai-je trouvé. Mais celui-ci occupe une place particulière, puisqu'on pourrait croire tout avoir entendu de Debussy…)

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Cette semaine.

¶ Riisager, Études, ballet d'après des orchestrations de Czerny. 
Beaucoup plus intéressant que supposé, grâce au talent de coloriste de Riisager. A ses faiblesses bien sûr, sur 40 minutes.

Quelques opéras donnés cette saison.

¶ (David) Little, JFK
→ Reprise d'une commande pour Fort Worth et l'American Lyric Theater. Assez étrange matériau musical : des boucles d'arpèges en accompagnement (qui évoquent presque plus les musiques de séries DC Comics que l'influence minimaliste, d'ailleurs), et une écriture mélodique qui sent l'influence du musical, sans être particulièrement évidente. Toutefois, ça a l'air de fonctionner avec une certaine fluidité, en tout cas musicalement – je n'ai pas réussi à bien suivre en audio seul (et je n'ai pas le livret).

¶ (Avner) Dorman, Wahnfried 
→ Opéra satirique protéiforme, tantôt atonal post-bergien, tantôt cabaret grinçant, qui met en scène l'univers domestique des Wagner. Chamberlain (le théoricien racialiste) y fait un discours sur fond de défilé de walkyries, et à l'exception du Maêêêêêtre, tous sont là : Cosima, Siegfried, Winifred, Isolde, Bakounine, Hermann Levi, l'Empereur… et même un Wagnerdämon !

¶ Bryars, Marilyn Forever 
→ Créé à au Long Beach Opera il y a deux ans, je crois – en tout cas pas une création. Le projet est de montrer Monroe dans l'intimité plutôt que dans la gloire publique, et utilise des styles musicaux assez variés, ça se déhanche comme du jazz blanc, les voix ne sont pas toujours purement lyriques. Joli (malgré le sujet qui m'intéresse très peu), mais je n'en ai entendu que des extraits.

¶ Reimann, L'Invisible 
→ L'opéra réunit trois courtes pièces de Maeterlinck, L'Intruse, Intérieur et La mort de Tintagiles ; on y retrouve la langue postberguienne de Reimann, peut-être moins aride que dans Lear. Je trouve personnellement la langue musicale de Reimann (à la fois grise et très dramatique) assez incompatible avec l'univers de Maeterlinck (ici traduit en allemand), mais les critiques ont été dithyrambiques. Il faut dire que la distribution, réunissant le délicieux Thomas Blondelle et la miraculeuse Rachel Harnisch, magnifie tout ce qui peut l'être dans cette partition.

(Jack) Heggie, Moby-Dick 
→ L'opéra de Jack Heggie est manifestement un succès (puisqu'il aussi été donné, ces dernières années, à San Francisco et Adelaide, au minimum), et il faut dire que sa veine tonale mais riche, lyrique mais variée ne manque pas de séduction. Le texte du livret, simple et sans façon, la place efficace des chœurs, permettent d'entrer aisément dans cette veine épique, très directe.

Puis grosse crise quatuors.

Schumann 3, Ébène SQ (bande) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Voilà qui me rajeunit… je les avais entendus dans cette œuvre au début des années 2000 (2004, 2005 ?) la donner en concours (où ils avaient terminé deuxièmes ex æquo avec le Quatuor Aviv, pas de premier prix cette année-là…), et je n'avais pas alors adoré ce qu'ils faisaient (assez rugueux). Ils ont combien affiné leur discours (ou moi éduqué mon oreille, possible aussi) depuis cette époque ! Vraiment devenu un quatuor important, indépendamment de leur place médiatique privilégiée (Mathieu Herzog est incroyable dans ses solos).

Mendelssohn 1, Ébène SQ (bande) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 2, Ébène SQ (bande) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 2, Ébène SQ (studio Virgin) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 6, Ébène SQ (bande) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Fanny Mendelssohn, Ébène SQ (bande) Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 1, Emerson SQ (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 2, Emerson SQ (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 4, Emerson SQ (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 5, Emerson SQ (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy
Mendelssohn 6, Emerson SQ (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

Dvořák 12, Escher SQ (BIS) Very Happy Very Happy Smile
Tchaïkovski 1, Escher SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy
Tchaïkovski 1, Atrium SQ (Sony) Very Happy Very Happy Very Happy

Stenhammar 2, København SQ (Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Stenhammar 3, Gotland SQ (Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Stenhammar 4, Gotland SQ (Caprice) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Stenhammar 1, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy
Stenhammar 2, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Stenhammar 3, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Stenhammar 4, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Stenhammar 5, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Stenhammar 6, Stenhammar SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

Schubert 14, Haas SQ Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

Et pour élargir : 

Schubert, Quintette à cordes, Haas SQ Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Schubert, Quintette avec piano, bande amateur Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile

Haydn, Trio n°44, Trio Sōra Very Happy Very Happy Very Happy
Brahms, Trio n°1, Trio Sōra Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
(actuellement en résidence à Verbier, dont elles ont remporté le prix spécial… j'en ai dit à plusieurs reprises le plus grand bien, vraiment un des symptômes du dynamisme musical dans le domaine chambriste, où l'on fait aujourd'hui infiniment mieux, techniquement, stylistiquement, et même en matière d'ardeur, qu'hier.

Mozart, La Clemenza di Tito, Nézet-Séguin Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
J'ai commencé à écouter ce matin (le premier tiers). C'est bien sûr excellent, avec quelques réserves par rapport à la discographie (qui de sinistrée dans les années 90, où les seules versions réellement convaincantes étaient Hogwood et Harnoncourt, est devenue pléthorique en grandes versions, avec Wentz, Mackerras, Steinberg, Jacobs, De Marchi, Rhorer !) : malgré toute l'animation et la poésie dont Nézet est capable, ça reste un peu tradi, il me manque le grain des orchestres sur instruments d'époque, ou alors fouettés par Harnoncourt, Mackerras ou Steinberg, les violons sont vraiment lisses. Sinon, vents superbes et très belle distribution.

En audio seul, ce n'est pas non plus la version la plus incarnée – Villazón paraît tellement chanter autre chose qu'un empereur romain… on dirait plutôt Aleko en version ténor… (pas tant au niveau du style à proprement parler que du caractère de la voix, des inflexions de la diction)

Bref, excellent, mais pour l'instant pas une version à laquelle j'aurai envie de beaucoup revenir, considérant l'offre hallucinante de ces dernières années.

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Cinq œuvres à recommander ?

Cinq œuvres parmi d'autres, de genres différents, dont j'entends peu parler, et qui me paraissent tellement grisantes. 

Buonaventura RUBINO, Vespro per lo Stellario della Beata Vergine di Palermo
Milieu du XVIIe, une sorte de récapitulation générale de tous les genres du siècle dans cette cérémonie d'une heure, constituée d'une multitude de cantates, de cinq à dix minutes, dont de nombreuses chaconnes (certaines à 4 temps !). Jubilatoire en diable, si j'ose dire.

Antonio Casimir CARTELLIERI, Symphonie n°1
Au tournant du XIXe siècle, un compositeur qui tire toutes les conséquences de Mozart tout en absorbant les tempêtes romantisantes du dernier Haydn, d'une séduction mélodique et dramatique hors du commune – il faut aussi entendre la Troisième, ou les nombreux concertos pour clarinette.

Antonín DVOŘÁK, Armida
Alors qu'il s'agit du grand Dvořák de maturité, on ne le donne jamais (mais on le trouve au disque, avec Šubrtová et Blachut) ; le compositeur y tempère son style habituel par échos de fanfares archaïsantes qui changent assez radicalement l'équilibre général de sa musique par rapport à ses œuvres folklorisantes (ou plus wagnérisantes, comme Rusalka). Et une très belle réussite, d'un style différent.

Hermann von WALTERSHAUSEN, Oberst Chabert
Compositeur au destin singulier, amputé de ses deux membres droits pour le sauver d'un cancer dans son enfance, mais pianiste-gaucher virtuose, chef d'orchestre loué et, avons-nous pu découvrir récemment, compositeur éminent. 
Sur le sujet hautement porteur du Colonel Chabert de Balzac, un opéra plein de réminiscences et de poésie, dans un langage à la fois sensible à la simplicité des élans romantiques et à la complexité de l'écriture « décadente ». Un grand bijou, remonté récemment par Jacques Lacombe, documenté par CPO, et qui sera repris à Bonn le 13 juillet.
Plus d'infos : http://operacritiques.free.fr/css/index.php?2018/01/10/2991-waltershausen-la-difformite-et-la-gloire .

Robert STILL, Quatuors 1,2,3,4
Les quatuors de Still évoluent au fil du des styles du XXe siècle, et, ce qui est très fort, chacun présente un visage très abouti et avenant à la fois des langages successifs qu'il y aborde. (Un peu comme Bacewicz, mais ici chaque quatuor ne constitue pas une évolution, vraiment un style distinct).

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Dichterliebe et Karłowicz par Beczała à Garnier

Le ballet est 
sold out à Garnier toute la semaine, mais pour le lied, ça ne se bouscule pas !

Pourtant, Piotr Beczała y chantait Dichterliebe de Schumann-Heine, et des mélodies délicieuses de Dvořák, Rachmaninov, même Karłowicz ! I love you

Grosse glotte et raretés.

Le cas de Beczała est très intéressant : la voix est à la fois en arrière (placement polonais, malgré ses études autrichiennes) et riche en résonances hautes (surtout dans les aigus). 

De même, pas très expressif, mais sa sobriété met en valeur les mots et les langues. Je n'en attendais rien et j'ai été bouleversé par son (sa) Dichterliebe : rien de singulier, d'une grande sobriété, et justement il ne fait jamais primer la ligne sur le naturel de la diction… Dans « Hör' ich das Liedchen » ou « Allnächtlich », c'est toute la saveur brute de l'œuvre de Heine-Schumann qui nous frappe, sans truchement d'interprète… l'œuvre toute nue (et quels beaux graves, très timbrés !).

J'ai moins aimé le reste : le timbre reste très blanc, et les œuvres sont moins marquantes. Le gentil romantisme du jeune Karłowicz de fin d'études, le folklore tsigane convenu de Dvořák
Les Rachmaninov (en particulier les stances de « Ne poj, krasavica » et les figuralismes fluviaux de « Vesennije vodi ») sont beaucoup plus entraînants, pour finir !

Un véritable festival linguistique ; 1h30 de récital, 4 bis très expansifs (zarzuela, Zueignung de Strauss, Werther, Catarì) et… 7 langues ! Allemand (très bon, malgré des « -en » pas tout à fait exacts), polonais (savoureux), tchèque (très en arrière et… polonais), russe (polonais aussi, asséché, sans les mouillures…), espagnol (avec une belle gouaille !), français (blanchâtre, mais c'était son emblématique Werther !), italien (généreux et expansif, avec Catarì)…

Impressionnés (avec mon accompagnateur, lecteur occasionnel de ce forum), dans Werther, par sa capacité (la voix était un peu prise dans le centre de gravité plus bas et la moindre projection des lieder) à changer totalement le placement *en cours d'émission* pour faire sortir glorieusement les aigus lorsqu'ils semblaient bloqués…

Amusant : rien qu'à l'entendre jouer, je me doutais que Sarah Tysman n'était pas principalement une cheffe de chant (plus de doigts, moins de logique) ni une soliste (peu de relief). De fait, elle semble beaucoup faire carrière comme accompagnatrice. Très agréablement fluide, mais sans grand relief aussi. Souplesse réelle, sans être totalement à son aise : sans être passionnant, c'était suffisant au plaisir de la soirée.

En fin de compte, outre le parcours original, on en retire un Dichterliebe très émouvant, et une générosité remarquable pour un artiste qui est en cours de répétitions au pied levé pour son second Lohengrin et son premier Bayreuth !

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Hjalmar BORGSTRØM, Thora Paa Rimol – Stene, Bjørkøy, Moe, Trondheim SO, Terje Boye Hansen

Un de mes opéras fétiches. I love you C'est le même langage que le Vaisseau fantôme (avec quand même quelques harmonies tout à fait locales), sur un sujet inspiré de Sturluson et Oehlenschläger, certes écrit un demi-siècle plus tard, mais d'une maîtrise incroyable. Écoutez au moins l'ouverture, même si vous n'aimez pas l'opéra en général, il faudrait donner ça au concert, ça vaut (largement) les Weber ! Cette vague d'imitations savoureuses…

Pour ne rien gâcher, c'est joué par le Symphonique de Trondheim, le plus bel orchestre du monde connu. bounce


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Cycle opéra contemporain (suite) 

=> Battistelli, Richard III, bande vénitienne de cette année Very Happy Very Happy Very Happy 
Dans un langage quelque part entre l'atonalité polarisée et la tonalité élargie, Battistelli écrit dans une langue non dépourvue de lyrisme… Il fait un grand usage des chœurs, notamment dans la scène finale, où ils flottent en beaux agrégats, impalpables, au-dessus de la scène jonchée des cadavres que foule le nouveau roi. Mérite d'être entendu. 

=> (Gordon) Getty, Usher House ; Elsner, É. Dupuis, Foster (PentaTone) Very Happy Very Happy 
Évoque l'atonalité romantique (héritage revendiqué de Schönberg), un peu gris, mais avec un certain sentiment de naturel et de liberté, une variation autour de la nouvelle de Poe. Getty parle de la prévalence de sa propre nécessité intérieure sur le fait de faire de la nouveauté. (pour autant, cela ressemble bien à de l'opéra du second XXe) 

=> (Gordon) Getty, The Canterville Ghost ; Gewandhaus, Foremny (PentaTone) Very Happy Very Happy 
Ce versant plus comique du legs de Wilde a aussi été capté chez PentaTone, avec le Gewandhaus de Leipzig (direction Foremny, le chef de la monographie Oskar Fried). La déclamation est évidemment plus à nu, sans être particulièrement savoureuse, mais cela s'écoute sans grand effort, même si l'absence de séduction particulière du langage renforce un peu le côté braillard inhérent à l'opéra post-1800 en général. 

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Cycle Kalinnikov

=> Kalinnikov, Symphonie n°1, O de l'URSS, Kuchar (Naxos) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Je découvre à ma honte l'existence de Kalinnikov, protégé de Tchaïkovski à la santé fragile (réfugié vers le climat de Crimée alors que sa carrière portait ses premiers fruits…), et cette Première Symphonie, baignant dans les grands espaces et le folklore, splendide. Un mouvement lent avec cor anglais et cordes suspendues qui scintillent. Le final ressasse certes son thème (modérément) varié, mais les relances harmoniques de la coda sont splendides (on songe vraiment au Tchaïkovski de la Première Symphonie !). 
=> Kalinnikov, Symphonie n°1, Philharmonique de Moscou, Kondrachine (Melodiya) 
Interprétation lourdement cuivrée, on passe vraiment à côté des subtilités que j'ai entendues dans ma découverte avec Kuchar. 
=> Kalinnikov, Symphonie n°1, Philharmonique de Malaisie, Bakels (BIS)
Bonne lecture, très occidentale.
=> Kalinnikov, Symphonie n°1, Symphonique de Russie (lequel ?), Veronika Dudarova (Olympia)
Là tout le contraire, un son et une verve tellement russe ! I love you

=> Kalinnikov, Symphonie n°2, Écosse RNO, N. Järvi (Chandos) Very Happy Very Happy 
=> Kalinnikov, Symphonie n°2, O de l'URSS, Kuchar (Naxos) 
Järvi est vraiment mou et Kuchar toujours remarquable là-dedans, mais la symphonie m'a paru d'un romantisme plus convenu, sans les saillances de la première. 

=> Kalinnikov, Suite orchestrale, Orchestre d'État de l'URSS, Svetlanov (Melodiya) Very Happy Very Happy Smile
Quelque part entre la suite de caractère et la grande pièce plus ambitieuse… je suis partagé, dépend vraiment de langle sous lequel on le regarde. 

=> Kalinnikov, Tsar Boris (musique de scène), Budapest SO, Jancsovics (Marco Polo) Very Happy Very Happy Very Happy 
Très réussi, vraiment de l'atmosphère. 
=> Kalinnikov, Poème épique, Budapest SO, Jancsovics (Marco Polo) Very Happy Very Happy Smile 
=> Kalinnikov, Le Cèdre et le Palmier, Budapest SO, Jancsovics (Marco Polo) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
=> Kalinnikov, Le Cèdre et le Palmier, Orchestre d'État de l'URSS, Svetlanov (Melodiya)
=> Kalinnikov, Bilina , Orchestre d'État de l'URSS, Svetlanov (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy

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Cycle (Friedrich Robert) Volkmann 

=> Volkmann, Richard III (ouverture), Philharmonique de la NDR de Hanovre, Werner Andreas Albert (CPO)  Very Happy Very Happy    Very Happy Smile 
Oh, intense !
=> Volkmann, Symphonie n°1 en ré mineur, Philharmonique de la NDR de Hanovre, Werner Andreas Albert (CPO) 
Final étrangement naïf en comparaison du reste. Very Happy Very Happy Smile
=> Volkmann, Symphonie n°2 , Philharmonique de la NDR de Hanovre, Werner Andreas Albert (CPO) 
Tout de suite en majeur, globalement plus cohérent avec son style. Very Happy Very Happy Smile
=> Volkmann, Concerto pour violoncelle, Philharmonique de la NDR de Hanovre, Werner Andreas Albert (CPO) 
Très beau (quoique bref, 16'), dans le goût des concertos de Dvořák ou Röntgen. Very Happy Very Happy Very Happy
=> Volkmann, Ouverture posthume en ut majeur, Philharmonique de la NDR de Hanovre, Werner Andreas Albert (CPO) Very Happy Very Happy Smile

=> Volkmann, Quatuor à cordes n°1, Mannheimer SQ (CPO)  Very Happy Very Happy
=> Volkmann, Quatuor à cordes n°4, Mannheimer SQ (CPO)  Very Happy Very Happy Smile
=> Volkmann, Quatuor à cordes n°2, Mannheimer SQ (CPO)  Very Happy Very Happy
=> Volkmann, Quatuor à cordes n°5, Mannheimer SQ (CPO)  Very Happy Very Happy Smile
J'étais peut-être trop occupé lorsque je les ai découverts. Du bon romantisme du rang, rien de particulièrement saillant de remarqué, même si quelques moments retiennent l'attention dans le 4 et le 5. 

=> Volkmann, Trio piano-cordes n°1, Ravensburg Beethoven Trio (CPO)  Very Happy Smile
=> Volkmann, Trio piano-cordes n°2, Ravensburg Beethoven Trio (CPO)  Very Happy Very Happy
Sympa, pas très marquant non plus, même si le final du deuxième est assez dense et réjouissant. 

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Cycle Cras (et assimilés)

=> Cras, Quatuor n°1, Louvigny SQ (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Je n'avais jamais mesuré à quel point c'est un bijou, plus encore que le trio ou le quintette, je crois. 

=> Cras, Quintette piano-cordes, Louvigny SQ, Jacquon (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
=> Cras, Sonate violoncelle-piano, Khramouchin, Jacquon (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
=> Cras, Trio piano-cordes (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
=> Cras, Largo violoncelle-piano, Khramouchin, Jacquon (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 

=> Cras, Chœurs sacrés a cappella ou avec orgue (Timpani) Very Happy Very Happy Very Happy 
Délibérément archaïsant, très agréable, mais pas son sommet. 

=> Lekeu, Quatuor en sol, Camerata SQ Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
=> Lekeu, Molto adagio, Camerata SQ Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
Chefs-d'œuvre. 

=> Fauré-Messager, Messe des Pêcheurs de Villerville, Herreweghe Very Happy Very Happy Very Happy 
Adorable, très touchant. 

=> Chausson, Concert, Jansen, Stott & friends (bande de la radio néerlandaise) Very Happy Very Happy Very Happy Smile 

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Cycle transcriptions d'orgue (suite)

=> Vivaldi, Les 4 Saisons, Hansjörg Albrecht Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
=> Wagner, extraits du Crépuscule des dieux, Hansjörg Albrecht Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Très chouette, même si Albrecht demeure toujours d'un maintien assez raide pour ce type d'exercice. 

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Cycle Kitayenko 

=> Grieg, Holberg, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
=> Respighi, Antiche danse ed arie per liuto, Suite n°3, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Smile
=> Puccini, Missa di Gloria, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
=> Brahms, Deutsches Requiem, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
=> Chostakovitch, Symphonie n°10, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
=> Donizetti, Miserere, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy
=> Rachmaninov, Cloches, Larin, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy
=> Prokofiev, Symphonie n°1, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
=> R. Strauss, Suites de danses d'après Couperin, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy
=> Tchaïkovski, Fantaisie de concert, Philharmonique de Moscou, Kitayenko (Melodiya) Very Happy Very Happy

Tout est intéressant, évidemment les pièces archaïsantes traitées avec un gros son paraissent un peu à côté du sujet. Étrange Miserere de Donizetti aussi, qui veut manifestement imiter le grégorien et qui est chanté comme l'Obikhod. Mais partout, quelle verve des timbres (ces bassons !).
Deutsches Requiem insolite, très belles Cloches, Missa di Gloria parmi les plus intenses (au disque, j'ai une faiblesse pour Morandi-Palombi, Pappano-Alagna et Scimone-Carreras, mais celle-ci est du même tonnel, quoique pas du tout dans le même univers), tandis que la Dixième de Chosta est au contraire remplie d'une étrange plénitude. Très beau coffret.

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Symphonies 

=> Mendelssohn, Symphonie n°3 ; COE, Nézet-Séguin Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
=> Mendelssohn, Symphonie n°4 ; COE, Nézet-Séguin Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Splendide, limpide, cursif, vraiment parfait. 

=> Holst, Symphonie en fa « Cotswolds » (1900), Ulster O, Falletta. Very Happy Very Happy Very Happy 
Très mignon, avec un effet très rétro des trompettes. 

=> Sgambati, Symphonie n°1, La Vecchia (1880) Very Happy Smile 
Rien à faire, ça ne me passionne pas. Orchestration chiche, pas de mélodies, je m'ennuie assez, surtout qu'elle est longue. Un peu marri que ce soit Benedictus qui me fasse la leçon sur les symphonies gentilles pour cette fois. Confused 

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Opéra légers 

=> Mozart, Clemenza ; Nézet-Séguin Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Confirme les impressions de l'acte I : très bien, mais reste tradi, on est habitué à mieux dans cette œuvre désormais, ainsi que de la part de Nézet. 

=> Donizetti, Don Pasquale, Opéra de Paris, Pidò 2018 (CultureBox) Very Happy 
J'ai tenu un quart d'heure en avance rapide, qui m'a confirmé qu'hors de l'air « Pura siccome un'angelo » au tout début, cet opéra m'ennuie atrocement. Au passage, Sempey continue de progresser, il devient réellement intéressant. Et Pidò tire comme toujours le meilleur de ces partitions en les faisant claquer avec esprit. I love you (pas trop aimé le reste, Sierra et Pertusi assez gris, Brownlee manifestement un peu fatigué) 

=> Boito, Mefistofele (tout), Marinov avec Ghiuselev (Capriccio) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Que de trouvailles mélodiques, et puis ces simples chœurs célestes bien conjoints mais progressant par chromatismes, quel régal !

=> Boito, Mefistofele (prologue), Poggi, Neri, Capuana 
=> Boito, Mefistofele (prologue), Del Monaco, Siepi, Serafin 
=> Boito, Mefistofele (prologue), Poggi, Siepi, Votto 
=> Boito, Mefistofele (prologue), Pavarotti, Ghiaurov, De Fabritiis 
=> Boito, Mefistofele (prologue), La Scola, Ramey, Muti 

=> Boito, Mefistofele (épilogue), Poggi, Neri, Capuana 
=> Boito, Mefistofele (épilogue), Christoff, Gui 
=> Boito, Mefistofele (épilogue), Del Monaco, Siepi, Serafin 
=> Boito, Mefistofele (épilogue), Pavarotti, Ghiaurov, De Fabritiis 
=> Boito, Mefistofele (épilogue), Vargas, Abdrazakov, Luisotti 

=> Offenbach, Grande-Duchesse, trio des conspirateurs, Minkowski Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Tout le reste de l'opéra, je m'en passe très volontiers, mais ce moment est délectable. Very Happy 

=> Wagner, Rheingold, Nimsgern, Soffel, Jung, Wlashiha, Jerusalem ; Bayreuth, Solti 83 (bande radio) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Cette version est absolument parfaite en plus, comme sa Walkyrie-surœ. 

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Divers 

=> Spohr, Messe en ut mineur Op.54, Radio de Berlin (CPO) Very Happy Very Happy
Agréable.
=> Spohr, Psaumes Op.85, Radio de Berlin (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Là, beaucoup plus sérieux, avec de beaux mouvements fugués, une ambition musicale autrement intéressante !

=> Puccini, Missa di Gloria, Morandi (Naxos). Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
Avec Palombi en solo. Une des toutes meilleures versions (avec Pappano et Scimone), pour ne pas dire la meilleure, fonctionne très bien, chœurs d'opérette (!) hongrois inclus. 

=> Puccini, Preludio sinfonica, Morandi (Naxos). Very Happy Very Happy Very Happy Smile 
Très réussi dans son genre planant ! 

=> Szymanowski, Demeter, Ewa Marciniec, Philharmonique de Varsovie, Wit (Naxos) Very Happy Very Happy
Profusion d'une chatoyance paradoxalement grise, pas vraiment touché, vraiment le Szyma qui ne m'est pas très accessible. 

=> Szymanowski, Penthesilea, Iwona Hossa, Philharmonique de Varsovie, Wit (Naxos) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
=> Szymanowski, Penthesilea, Iwona Hossa, Philharmonique de Varsovie, Wit (Naxos) 
=> Szymanowski, Penthesilea, Iwona Hossa, Philharmonique de Varsovie, Wit (Naxos) 
Trissé. bounce Un Szyma étonnant, différent de l'ordinaire, d'un lyrisme plus franc, beaucoup plus proche de l'élan des décadents germaniques – ce ressemble beaucoup à Besuch in Urach de Schoeck, en réalité ! Et Iwona Hossa est d'une plénitude merveilleuse ici.

=> Szymanowski, Stabat Mater, Philharmonique de Varsovie, Wit (Naxos) Very Happy Very Happy Very Happy
Un des Szymanowski auxquels je reviens le plus volontiers (avec les concertos pour violon, les trois premières symphonies, le Roi Roger, les Mythes…), ce qui veut dire pas si souvent, en réalité…

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Je réécoute Le Bourgeois gentilhomme (avec la musique de scène de LULLY. Il y a beaucoup d'allusions aux genres d'époque (on explique à Jourdain ce qu'il faut pour faire de la musique de chambre, notamment, côté évident drolatique, comme si on expliquait à quelqu'un qu'il faut des violons et des trompettes dans un orchestre), et même des choses assez subtiles pour l'oreille d'aujourd'hui.

Lorsque Jourdain dit à ses maîtres « il y a du mouton là-dedans » (sa ridicule chansonnette qui contient une comparaison ovine), on joue évidemment pour les spectateurs d'époque sur l'équivoque avec « il y a du Mouton là-dedans » (donc l'inspiration d'une grande figure de la musique de cour).

Pour une fois que la musique permet de frimer dans les dîners en ville, ne croyez surtout pas que je vais m'en priver.
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Joseph Ermend BONNAL – 1860-1944


Un compositeur bordelais (mais monté à Paris) qui a étudié avec les grandes figures du temps : Bériot au piano, Fauré en composition, Guilmant-Tournemire-Vierne à l'orgue (il a même fait des remplacements de Widor à la tribune !), successeur des plus grands (il prend la suite d'Ollone et de Tournemire), bardé de prix (même plus grand public, comme le Grand Prix du Disque pour son trio à cordes). Il composait également des chansons populaires (sous le pseudonyme de Guy Marylis).

J'ai compté deux disques chez Pavane (musique de chambre, orgue), un disque chez Arion (Quatuors).

Les Quatuors (1927 et 1938) sont vraiment écrits dans un langage ravélien, c'en est frappant. Avec moins de facéties rythmiques et d'effets, un Ravel proche de celui du Quatuor, en plus mou. C'est vraiment bien écrit. 

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=> Debussy, Faune / extraits de Saint Sébastien / Mer, Philharmonia, Heras-Casado
On entend vraiment l'ardeur et la finesse du chef qui affleure, le rendu est splendide, le Philharmonia a rarement aussi bellement et finement joué. Superbes versions de ces pages. (On me signale en revanche une hénaurme erreur de lecture : il y a une erreur de clef pour les violoncelles sur le matériel d'orchestre, qui déplace leur ligne d'une quinte, et Heras-Casado ne bronche pas malgré les dissonances.)
La Mer m'a beaucoup moins impressionné : très bien, mais plus épais et terne que ce qui précède, on retrouve ici davantage le son du Philharmonia que les fulgurances du chef…

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Francesco Malipiero : Impressions d'après nature (1914-1922)

Pas vraiment bouleversé, mais effectivement, on est dans le haut de la production de Malipiero, avec quelques très beaux alliages (
Mélomaniac n'a pas parlé au hasard d'impressionnisme, un vrai sens du coloris). 

De vrais beaux moments, étonnants comme les superpositions de cloches (figurées d'une façon assez différente de ce que j'ai entendu chez les autres musiciens, plus une recherche de reproduction de l'effet musical que timbrale), réjouissants comme le bal champêtre ; d'autres plus platement illustratifs, voire pénibles comme le Festival du Va d'Enfer qui est une boucle quasi-minimaliste pas vraiment inspirée.

Toujours pas convaincu que Malipiero soit un compositeur de première farine (dans le genre chatoyant, Riisager m'étonne et me réjouit davantage), mais ce sont de belles pièces qui méritaient en effet d'être distinguées et découvertes !

(le couplage avec les Pause del silenzio, assez redoutablement ennuyeuses, met encore plus en lumière l'inspiration de Malipiero dans ce cycle !)

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Erkki Melartin : Symphonie N°5 "Sinfonia brevis" (1915-1916) 


Donc, écoute de cette Symphonie n°5 (tirée de l'intégrale Tampere PO / Leonid Grin). Très séduit par le début : thème très identifiable, ton très lumineux, fugato dès l'exposition… Jusqu'au début de l'Andante (II), néanmoins, je trouve que les cordes dominent beaucoup, dans un goût lyrique-romantique qui m'a évoqué (certes, avec une veine mélodique plus marquante) ses autres symphonies. 

Et puis, au milieu de l'andante, d'étranges interventions babillardes de bois, comme un plot twist… j'attends de voir si ça va effectivement évoluer, c'est en cours d'écoute.

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¶ Caplet – Épiphanie
Je me demande s'il n'y a pas erreur d'étiquetage sur mon disque… j'avais plus l'impression d'entendre les Strophes de Sacher que du Caplet, vraiment très hardi m'a-t-il semblé… (Pourtant, j'ai passé les plages Dutilleux. Il faudra que je survole à nouveau tout le disque pour en avoir le cœur net.)

¶ RVW – Songs pour ensemble (dont les 4 Hymnes) – Partridge Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Quel mélodiste, décidément !
¶ Warlock – Capriol Suite Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Que j'aime cet archaïsme sans façon ! bounce
¶ Warlock – Songs pour ensemble (dont The Curlew) – Partridge Very Happy Very Happy Very Happy 

¶ Caplet – Le Miroir de Jésus – version Saphir Very Happy Very Happy Smile
Le chœur n'est pas très joli.
¶ Caplet – Le Miroir de Jésus – version Accord (avec Schaer) Very Happy Very Happy Smile
Moins précisément articulé, mais beaucoup plus agréable (et Hanna Schaer, quoi).
¶ Caplet – Mélodies (Le vieux Coffret, Paul Fort, etc.) – Schaer Very Happy Very Happy 

¶ Dvořák – Rusalka – Neumann, Vienne live (Orfeo) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Ils ont coupé des choses, dont le délectable cuistot. Surprised
¶ Dvořák – Rusalka – Neumann, Philharmonie Tchèque studio Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Nettement plus proprement joué (Vienne en mode routine, hein…) et plutôt mieux chanté, en outre. Super version, immense œuvre.

¶ Tchaïkovski – Onéguine – Levine (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Quelle version enthousiasmante ! Levine joue sa vie à chaque mesure, avec une impétuosité rare (et jamais clinquante), tout le plateau parle un russe fort décent, avec des timbres tellement savoureux ; même Ghiaurov est plus en mots que jamais, avec un russe aux mouillures très gourmandes. bounce 

¶ Tchaïkovski – Pikovaya Dama (extraits) – Orbelian (Delos) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
De loin la meilleure version, sauf que ce ne sont que des extraits. Regrets d'autant plus éternels que certains des protagonistes sont morts maintenant…
¶ Tchaïkovski – Pikovaya Dama (tout) – Opéra de Belgrade, Baranovich (Classical Moments) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
En intégrale, la version que j'aime le plus, de loin. Pourtant, l'Opéra de Belgrade en 1955, ça ne fait pas rêver. Il n'y a pas beaucoup de Lisa pas trop pénibles, pour commencer, et puis la typicité de l'orchestre (avec ces vents pincés à la tchèque, ces cordes tranchantes et un brin acides) ajoute au relief. Très propre pour l'époque aussi, son comme exécution, et chanteurs sans faiblesses.

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¶ Toch – Symphonie n°3 – Pittsburgh SO, Steinberg Very Happy

¶ Hindemith – « Symphonie » Mathis der Maler – Pittsburgh SO, Steinberg Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Bloch – Concerto Grosso n°1 – Pittsburgh SO, Steinberg

C'était ma contribution au cycle « musiques sinistres ». Bon bon bon bon… Le Toch m'a assez ennuyé (pas vraiment de qualité, mais que c'est gris), le report très filtré que j'écoute massacre assez le grain et les couleurs (certes des dégradés de gris) de Mathis, et je ne sais pas si j'aurai la force de réécouter le Bloch, que je n'avais pas adoré la dernière fois, après ça…
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¶ Wildhorn – Dracula – Graz 2017 Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
J'aime décidément beaucoup. L'intrigue suit de très près le roman, à ceci près que le nœud des enjeux ne réside pas dans la conquête du monde par Dracula, mais dans son amour pour Mina – et une certaine réciprocité de la part de ses victimes. Wildhorn a de toute évidence beaucoup écouté les Miz, on y retrouve beaucoup de points communs musicaux. Très chouette.

¶ Büsser – Marche de Fête – Paradell Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Boëllmann – Toccata (de la Suite Gothique) – Paradell Very Happy Very Happy
¶ Usandizaga – Pieza sinfónica (tripartite) – Paradell Very Happy Very Happy Smile
¶ Bélier – Toccata – Paradell Very Happy Very Happy Smile
Qu'est-ce que ça emprunte à Bach (les marches harmoniques assez vivaldiennes…). Mais du coup c'est joli.
¶ Torres – Impresión teresiana – Paradell Very Happy Very Happy
Inclut des thèmes tirés de chants d'enfants donnés à Avila en l'honneur de Thérèse.
¶ Franck – Choral en la mineur – Paradell Very Happy Very Happy Very Happy
Vraiment pas celui que j'aime le plus des trois derniers chorals (je suis devenu fou du premier), mais ça se tient quand même plutôt bien, il n'y a pas à dire.

¶ Tchaïkovski – Le Voïévode – Kozhukar Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Encore une merveille de jeunesse, quelque part entre l'épopée permanente d'Opritchnik et les grands numéros de Mazeppa (mais plus palpitant que ce dernier, je trouve). Du niveau de ses grandes œuvres de maturité, pour moi. (Quelle partie écrasante de ténor, au passage…)

¶ (Ronald) Corp – The Ice Mountain (Naxos) Very Happy Smile
Gentiment planant et plein de petits braillards. Instrumentation et harmonique de musical theatre, étrange.

¶ Bach – Prélude & Fugue BWV 546 – Hurford (Decca) Very Happy Very Happy
Le jeu, quoique un peu droit, n'est pas inintéressant, mais ces prises sèches et ce plein-jeu blanc et strident, c'est pas possible pour moi. (Déjà que je fais l'effort d'écouter du Bach, le moins est de m'offrir un peu de couleur.) Je retourne écouter mes Hinsz des Bovenkerk et Martinikerk…    

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¶ La Tombelle – Toccata en mi mineur – Willem van Twillert (Hinsz de Bolsward) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Oh, il y a vraiment de la matière musicale pour une toccata (pourtant sur le patron Widor / Dubois / Boëllmann) !
¶ Stanford – Postlude en ré mineur – Willem van Twillert (Hinsz de Bolsward) Very Happy
Très fade, pas le grand Stanford du Stabat Mater.
¶ Bach-Dupré – Sinfonia de la Cantate BWV 29 – Willem van Twillert (Hinsz de Kampen) Very Happy Very Happy
¶ Reger – Ein feste Burg Op.27 – Willem van Twillert (Deakons-Marcussen de Goes) Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Suppé – Requiem– Corboz Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Vraiment étonnant, même les chœurs sont assez vindicatifs !

¶ Pierné – Étude de concert – Wagschal (Timpani) Very Happy Very Happy Smile
(C'est la Passacaille qui est géniale, là c'est sympa mais pas indispensable.)

¶ Messiaen – Ascension – Hakim (Trinité) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ Messiaen – Ascension – Katowice, Wit (Naxos) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Messiaen – Turangalîla – Katowice, Wit (Naxos) Very Happy Smile
(Tout de même, autant de complexité harmonique et contrapuntique pour obtenir un résultat comparable au jazz blanc des années 50, ça me laisse sacrément admiratif.)

¶ Gossec, La Marseillaise, Garde Républicaine, Dondeyne (BNF) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Version très boisée, mais clairement pas le meilleur arrangement.

¶ traditionnel, Légendes sacrées, Les Têtes de Chien Very Happy
J'aime pas les arrangements, ça cherche à faire un truc cool et ça ressemble pas à grand'chose au bout du compte. Déçu.

¶ van Gilse, Symphonie n°2, Symphonique des Pays-Bas, Porcelijn Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Brahms, Concerto n°2, Egorov, Symphonique des Pays-Bas Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Croyez-le si vous voulez, je l'écoutais pour l'orchestre (très bien), mais alors Egorov, quel aplomb incroyable ! Je crois que c'est pianistiquement la meilleure version que j'aie entendue, loin devant Pollini, Barenboim, Richter ou Gilels… Shocked

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 [Proms] – Beethoven 2 & 5, MusicAeterna, Currentzis (28 juillet)

C'était donné hier, on peut le réécouter aujourd'hui.
https://www.bbc.co.uk/radio/play/b0bck31y

C'est du pur Currentzis, pour le meilleur (tous ces contrechants électrisants qu'on n'entend jamais comme dans son DG, bien sûr l'énergie) et pour le pire (son d'orchestre assez blanc – où sont les bois ? –, sorte de hâte un peu impavide comme dans son Sacre…).

La 2 m'a paru assez fade : rapide mais très peu dramatique. En revanche la 5 fonctionne très bien, même si le final est tout sauf grandiose / exaltant / triomphal / tragique, avec d'étonnantes baisses de tension.

Le plus amusant reste que ça me paraît une lecture assez peu originale (proche de ce que faisait Hogwood dans son intégrale pour l'Oiseau-Lyre, un label que je suis trop jeune pour avoir connu dans les bacs…), vraiment dans le (beau) standard des baroqueux percussifs / secs.

Et je vois que ça s'écharpe d'un peu partout sur la question du génie de l'imposture… Moi ça me paraît juste une très belle version (un peu hystérisante mais) pas très originale. Qui me plaît beaucoup au demeurant, parce que le baroqueux qui claque, ça sied très bien à Beethoven.

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¶ (Roger) Boutry – Variations sur un thème imaginaire, pour piano et orchestre d'harmonie – Handelsman (bande vidéo) Very Happy Very Happy Very Happy
Très bien écrit, comme toujours avec Boutry – quel dommage qu'on ne le joue pas plus (son très beau quatuor ravélo-berguien – en beaucoup plus simple, hein ! – en particulier.) Et que son legs soit assez largement des solos pour vents ou des pièces pour orchestre d'harmonie.

¶ Bellini – Norma, « Casta diva » – Sumi Jo (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy
Entendu ça en fond d'un reportage… Je me demandais qui cela pouvait être : voix très franche, assez peu converte, tout en conservant un moelleux magnifique… J'ai assez vite trouvé, parce qu'il y a assez peu d'artistes avec ces caractéristiques (Scotto, à côté, c'est Polaski : la voix n'est pas lourde mais toujours très couverte). Tiré d'un de ses récitals tardifs, où elle essaie des choses plus larges. J'ai adoré ça, et bien que je sois conscient, pour l'avoir entendue en scène, qu'on ne l'y entendrait guère, le résultat sur disque est absolument merveilleux.

¶ Beethoven – Symphonie n°2 – MusicAeterna, Currentzis (bande BBC3) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Beethoven – Symphonie n°5 – MusicAeterna, Currentzis (bande BBC3) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Interprétation pas très originale en réalité, mais pleine de vigueur, et quelles œuvres ! (voir le fil dédié en rubrique « Concerts », Adalbéron y était)

¶ Magnard – Guercœur – Donostiarra, Toulouse, Plasson (EMI) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Belle révélation à la réécoute. (cf. fil concerné)

 Bruckner – Symphonie n°4 – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas (Hilversum), van Zweden (Challenge Classics) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Version très cursive, ce qui fonctionne très bien dans leurs Brahms, mais vraiment trop peu tendue pour Bruckner. Un peu lisse et pas passionnant. À chaque fois que je réécoute, j'ai un espoir (troisième tentative, au moins), mais non.

¶ Britten – War Requiem – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas (Hilversum), van Zweden (Challenge Classics) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Version très sobre et lumineuse, un peu à rebours, mais très réussie !

¶ Respighi – Belfagor – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas (Hilversum), Ashkenazy (Exton) Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Respighi – Belkis, reine de Saba – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas (Hilversum), Ashkenazy (Exton) Very Happy Very Happy Smile
¶ Respighi – Vetrate di chiesa – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas (Hilversum), Ashkenazy (Exton) Very Happy Very Happy Very Happy
Mélange de choses spectaculaires et colorées et d'autres moins marquantes. Mais globalement l'une des œuvres les plus intéressantes de Respighi.
¶ Respighi – Metamorphoseon modi XII – Philharmonia, Goeffrey Simon (Chandos) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
… Mais son chef-d'œuvre absolu, ce sont ces Métamorphoses symphoniques… Soudain mâtiné de Hindemith (pour la richesse musicale, parce que pour les couleurs et la chaleur, ce sont celles du triptyque romain, un côté folklorisant de pâtre des Abruzzes et archaïsant néo-monteverdien en sus. I love you ), avec des touches orchestrales du meilleur Korngold !
Cette version a plus de couleurs et d'élan que Rome SO & La Vecchia qui plus studieuse, je trouve.

¶ Gurlitt – Wozzeck, le meurtre et le couteau – Scharinger, DSO Berlin, G. Albrecht (Capriccio) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Berg – Wozzeck, le meurtre et le couteau – Schwanewilms, Trekel, Graf (Naxos) Very Happy Very Happy Smile
Un des meilleurs moments de l'œuvre, chez les deux (et superbe version Graf, contre toute attente – je n'avais pas adoré sa version avec l'ONBA et déjà Schwanewilms, vue en salle en 1999).

Cycle Hendrik Andriessen

¶ H. Andriessen – Symphonie n°1 – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO forever) Very Happy Very Happy Very Happy
¶ H. Andriessen – Suite de ballet – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn Very Happy Very Happy Very Happy Smile
 H. Andriessen – Étude symphonique – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Variations et Fugue sur Kuhnau – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn Very Happy Very Happy Very Happy Smile
L'Étude est vraiment superbe. Quel orchestre, quel chef, quelle prise de son, aussi. (Sinon c'est la Symphonie Concertante qui m'impressionne le plus chez Andriessen.)

¶ Joline (Dolly Parton) 

¶ H. Andriessen – Symphonie n°2 – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Ricercare – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ H. Andriessen – Mascherata – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
 H. Andriessen – Rhapsodie Wilhelmus – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Le Prisonnier de Hollande (Olivia Chaney) 

¶ H. Andriessen – Ricercare – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ H. Andriessen – Mascherata – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
 H. Andriessen – Rhapsodie Wilhelmus – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Nénufar, t'as du r'tard (chanson raciste pour l'exposition coloniale de 1931) 

¶ H. Andriessen – Ricercare – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ H. Andriessen – Mascherata – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
 H. Andriessen – Rhapsodie Wilhelmus – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Ce n'est pas une erreur, j'ai trissé les trois pièces. Non pas que ce soient des œuvres à ce point exceptionnelles, mais je les ai beaucoup aimées cette fois, j'avais envie de m'en imprégner. Les mouvements contraires rétro du Ricercare me font craquer ; et le doux côté épique de Wilhelmus…

¶ Something Just Like This (adaptations multiples des Chainsmokers)

¶ H. Andriessen – Symphonie n°3 – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Quant à la Troisième Symphonie, c'est la meilleure des quatre à mon sens, beaucoup plus directe, jubilant plus ouvertement de sa propre musique au lieu de s'astreindre à une sorte de sérieux presque sinistre. Plus proche de van Gilse 2 que de Pijper, en somme.


¶ H. Andriessen – Symphonie Concertante – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy
Finalement, j'aime davantage les symphonies 3 & 4 : un petit côté pastiche par endroit, plus accessible mais un peu moins nourrissant. Très chouette néanmoins, ce n'est pas comme s'il existait par ailleurs des symphonies concertantes intéressantes (Szymanowski à la rigueur, mais Mozart, Langgaard ou Prokofiev, bof quand même).
¶ H. Andriessen – Chantecler – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile

¶ H. Andriessen – Symphonie n°4 – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Début sombre, mais de beaux moments de lyrisme ensuite !
 H. Andriessen – Libertas venit – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Commande de l'Orchestre du Brabant pour célébrer les dix ans de la libération de la province. Une lente marche, qui se pare d'échos menaçants (Dies iræ inclus), se charge de chants de guerre, et exprime avec lyrisme la fin de l'oppression. Quelque part entre le 1812 de Tchaïkovski et le Chant funéraire de Magnard, mais beaucoup moins spectaculaire que l'un et l'autre.
¶ H. Andriessen – Capriccio – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Canzona – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile

¶ H. Andriessen – Intégrale pour orgue – Benjamin Saunders (Brilliant) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Corpus très homogène, pas forcément à écouter d'une traite comme je l'ai fait, mais de toute beauté : d'une subtilité sans ostentation, sorte de Tournemire batave. I love you

Et réécoutes : 

¶ H. Andriessen – Symphonie n°4 – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Libertas venit – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ H. Andriessen – Capriccio – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Canzona – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
¶ H. Andriessen – Libertas venit – Symphonique des Pays-Bas (Enschede), Porcelijn (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

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Cycle Holst

¶ Holst – Les Planètes– Chicago SO, Levine (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy
Oh !  Après tant de tentatives infructueuses, j'y ai enfin pris du plaisir !  Ce n'est pas très subtil, mais extrêmement neuf (et vraiment pillé par la musique de film épique américaine, de Williams à Horner).
¶ RVW – Fantaisie Greensleeves– Chicago SO, Levine (DGG) Very Happy Very Happy
¶ RVW – Fantaisie Tallis– Chicago SO, Levine (DGG) Very Happy Very Happy Very Happy
J'aime bien ces œuvres, mais c'est juste parce que j'étais trop occupé pour changer le disque que je les ai entendues aujourd'hui. Mr. Green

¶ Holst – Mars pour orgue– arrangement et exécution par Stangier (Acousence) Very Happy Very Happy
Beaucoup plus raide, forcément.
¶ Holst – Les Planètes pour quatre mains– ZOFO Duet (Dorian Sono Luminus) Very Happy Very Happy Very Happy
Change totalement le visage de ces pièces, et on y entend le lien direct avec Debussy, dans Venus ; ainsi que d'autres filiations ailleurs.

¶ Holst – Symphonie en fa– Ulter O, Falletta (Naxos) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Vraiment très sympathique, couleurs locales et médiévalisantes !  Pas un chef d'œuvre, mais roboratif !

¶ Holst – A Fugal Overture– LPO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Profusif (mais assez peu fugué), très sympathique.
¶ Holst – A Somerset Rhapsody– LPO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy
Jolie cantilène.
¶ Holst – Beni Mora– LPO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy Smile
Hit absolu dans l'histoire de se forum. Très sympa dans le genre de la caricature coloniale (moi j'aime bien ces trucs bigarrés qui ne ressemblent à rien). Sa caractéristique majeure est son final, avec le motif de flûte qui se répète en boucle sans moduler, pendant toute la pièce !
¶ Holst – Hammersmith– LPO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Très méditatif, ample et sombre, puis pépiant de façon farouche, assez riche.


¶ Holst – Scherzo – LPO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy Smile
¶ Holst – Japanese Suite – LSO, Boult (Lyrita) Very Happy Very Happy


Cycle orchestres de Radio des Pays-Bas


¶ (Yves) Ramette –Symphonie n°5– Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Jan Stulen (Navona) Very Happy Very Happy Very Happy 
♪♪ Quoique du second XXe, complètement tonal – c'était un organiste… –, et on y entend beaucoup d'effets reçus de Beethoven et Mahler, quoique l'harmonie soit clairement du (début du…) XXe siècle. Anachronique, mais assez bien fait.


¶ Diepenbrock – Lieder orchestraux (anniversaire vol.3) – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, London Promenade O, Residentie Den Haag, Otterloo, van der Berg et autres Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Diepenbrock – Lieder orchestraux (bissé)
♪♪ De très belles mises en musique de poèmes célèbres en néerlandais, allemand (Heine, Brentano, Novalis) et français (Baudelaire, Verlaine), d'un beau lyrisme calme, de beaux miroitements orchestraux, et une très belle poésie, français inclus – on peut songer, en particulier dans la Bonne Chanson, à une sorte de Fauré qui aurait un talent d'orchestrateur beaucoup plus diaphane et irisé, plus rural aussi.
♪♪ Évidemment, Otterloo procure un relief tout particulier à ses participations, et pour ne rien gâcher, les poèmes français sont interprétés par Bernard Kruysen ! Vraiment un disque à entendre.

¶ (Benjamin) Wallfisch – Speed – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, B. Wallfisch (Quartz) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
♪♪ L'occasion de vérifier la considérable maîtrise technique de l'orchestre (j'en vois de plus haute renommée, comme la Radio du Danemark ou le Royal Philharmonic, qui auraient probablement un peu plus de peine à tenir ce type de stress test), avec des sur-suraigus impeccablement justes, des articulations rythmiques complexes parfaitement nettes, des timbres inaltérés par l'effort.
♪♪ Cette pièce de 13 minutes explore des atmosphères très différentes et assez figuratives. Rien d'original, on retrouve les cliquetis en nuage, les rafales de cuivres varésiens, des suspensions plus chostakovitcho-herrmannien… car tout en utilisant les outils de l'orchestre du XXe siècle, Wallfisch écrit une musique complètement tonale, une sorte de Connesson qui aurait pris en compte Ligeti et Murail. Et cela fonctionne assez bien, à défaut de révolutionner quoi que ce soit.

¶ Michael Torke (1961-) – Livre des Proverbes – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, de Waart (Ecstatic Records & Decca) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
♪♪ Quelque part entre l'atmosphère déhanchée de Bernstein et quelque chose de plus minimalisme, pas si éloigné des harmonies pures de Gregory Spears (Fellow Travelers, pour ceux qui ont le tort de ne pas lire CSS), très simple, très agréable, doucement dansant.

¶ Wagner-Vlieger – Suite des Meistersinger– Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, de Waart (Challenge Records) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Wagner-Vlieger – Deux entractes tragiques– Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Otto Tausk(Challenge Records) Very Happy Very Happy Very HappySmile
Ça ressemble beaucoup à Rosamunde de Schubert…

¶ Wagner-Vlieger – Suite des Meistersinger – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, de Waart (Challenge Classics) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Bissé.
¶ Wagner-Vlieger – Suite de Tristan– Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, de Waart (Challenge Classics) Very Happy Very Happy Smile
Déçu en réécoutant : franchement, les Appels sans la ligne mélodique, et cet enchaînement d'accompagnements, bof. Mais je crois que j'aime moins Tristan, aussi, tout simplement.

¶ Herman Strategier – Rapsodia elegiaca – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Haitink (Etcetera) Very Happy Smile
¶ Herman Strategier – Musique pour faire plaisir – Chambre Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Krol (Etcetera) Very Happy Very Happy
¶ Herman Strategier – Concerto pour accordéon – Chambre Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Krol (Etcetera) Very Happy Very Happy
¶ Herman Strategier – Sextuor – Hexagon Ensemble (Etcetera) Very Happy Very Happy 
¶ Herman Strategier – Partita in modi antichi – Chambre Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Spruit (Etcetera) Very Happy Very Happy Smile
¶ Herman Strategier – Præludium en Fuga – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Fournet (Etcetera) Very Happy Very Happy Very Happy
Ces deux orchestres ont une histoire totalement distincte (le premier est celui de Hilversum, jamais fusionné, le second le fruit de nombreuses fusions et dissout depuis 2014). Pour l'anecdote, le Philharmonique est le premier orchestre que Haitink ait dirigé en concert public, en 1954 (il en a pris la tête en 1957, avant que Fournet ne lui succède, ce qui ne le rajeunit pas exactement).
Sinon, des pièces assez délibérément archaïsantes de ce compositeur local ; je n'ai rien trouvé de bouleversant là-dedans, sauf le Prélude & Fugue très sympathique.

¶ Joep Franssens – Roaring Rotterdam – Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, G. Albrecht (Etcetera) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Tonal mais d'une écriture « globale », par blocs, atmosphérique, alla Corigliano. Très séduisant au demeurant.
¶ Joep Franssens – Harmony of the Spheres – Chœur de la Radio des Pays-Bas, G. Albrecht (Etcetera) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Splendide écriture planante, dans la veine de ce que font les meilleurs nordiques.
¶ Joep Franssens – Magnificat – Chœur & Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, G. Albrecht (Etcetera) Very Happy Very Happy Very Happy
Très réussi aussi, dans ce genre.

¶ Badings – Scherzo symphonique – Orchestre de la Radio des Pays-Bas, Henrik Schaefer (Etcetera) Very Happy Smile
¶ Badings – Concerto pour violoncelle n°2 – Chambre Philharmonique de la Radio des Pays-Bas, Michael Müller, Henrik Schaefer (Etcetera) Very Happy Smile
¶ Badings – Symphonie n°2 – Orchestre de la Radio des Pays-Bas, Henrik Schaefer (Etcetera) Very Happy Very Happy
L'Orchestre de la Radio des Pays-Bas a lui été fusionné (lui-même fruit de fusions), dans le Philharmonique de la Radio que vous voyez dans le reste de la playlist. Il n'est pas directement lié non plus à la Chambre Philharmonique de la Radio. Je vous ferai un petit schéma dans le bon fil le moment venu, car le Philharmonique des Pays-Bas, le Symphonique des Pays-Bas, le Phliharmonique de la Radio des Pays-Bas, le Philharmonique de Chambre des Pays-Bas, l'Orchestre de la Radio des Pays-Bas, l'Orchestre de l'Omreop (Radio des Pays-Bas) et le Symphonique de la Radio des Pays-Bas sont tous des orchestres différents, même pas tous dans les mêmes villes. hehe 
Sinon, Badings ? Du Badings : du postromantisme XXe tardif bien fait, mais pas particulièrement palpitant.

¶ Per August Ölander – Symphonie en mi bémol – Symphonique de Västerås, Harry Damgaard (Sterling) Very Happy Very Happy 
¶ Bengtsson – Vettern – Symphonique de Gävle, Liljefors (Sterling) Very Happy Very Happy
¶ Weyse – Sovedrikken (Ouverture) – Orchestre Royal Danois, Hye-Knudsen (Sterling) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Du beau classicisme tardif, plein d'entrain !
¶ Olsson – Symphonie en sol mineur – Symphonique de Gävle, Liljefors (Sterling) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Tellement Alfvén, dans le début de l'adagio !

¶ R. Strauss – Salome (entrée de Salomé jusqu'à sortie de Jibé) – Bumbry, Wixell, RAI Torino 1979, Dohnányi (bande radio) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Le son est vraiment défavorable, on entend surtout les défauts de l'orchestre, et assez mal les chanteurs ; par ailleurs peu de mots chez Bumbry, et Wixell qui essaie d'épaissir de façon absurde, un peu décevant par rapport à l'idéal promis par l'affiche. 

¶ Lyapunov – Symphonie n°1 Very Happy Smile
Très gentil, plutôt agréable, mais absolument inoffensif ; on retrouve les thèmes russisants qui affleurent chez Tchaïkovski, sauf qu'ici il ne se passe à peu près rien. 

¶ Schumann – Genoveva – G. Albrecht (Orfeo) Very Happy Very Happy Smile
Autant cette œuvre me grise avec Masur, autant à chaque fois dans les autres contextes, même en concert, j'y entends surtout sa faible veine mélodique, son statisme, ce qu'elle veut tenter sans y réussir. 

¶ James Carr – The Dark End of the Street (& album) Very Happy Very Happy Very Happy

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Cycle Engegård SQ

Je découvre cet ensemble récent (fondé en 2006) et le mets à l'épreuve. Arvid Engegård, le premier violon, lui donne son nom, et il arrive, de fait, après une carrière particulièrement accomplie : nombreux enregistrements comme soliste, ancien konzertmeister de la Camerata de Salzbourg sous Végh, ancien premier violon du Quatuor Orlando…

¶ Schumann – Quatuor n°3 (scherzo) – Engegård SQ (BIS) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy 
Ce scherzo est un bon test, et BIS y confirme sa clairvoyance en matière de choix de quatuors à cordes : non seulement personne ne les capte mieux, mais comme pour le Stenhammar SQ, on a ici du tout premier choix. J'ai rarement entendu un son aussi fin et un discours aussi étagé et engagé dans du Schumann. Le scherzo a proprement parlé est encore plus ardent chez d'autres, mais l'ensemble du corpus de Schumann est en revanche porté à un degré d'intelligence rare, alors qu'il n'est pas forcément très avenant ni coloré. 

¶ Haydn – Quatuor Op.77 n°1 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Finesse, énergie, hauteur de vue… encore plus fort que les Alcan, avec un son splendide (très typé norgévien, on croirait entendre Trondheim, où Engegård a étudié et débuté !).
¶ Haydn – Quatuor Op.76 n°3 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Et ici, ça égale tout à fait les Takács, soit l'absolu absolu de ce qu'il est possible de faire en structure et en chaleur. Grand, grand ; et ceux qui y parviennent dans Haydn sont excessivement rares.

¶ Bartók – Quatuor n°5 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy 
Vraiment pas celui que j'aime le plus, mais joué avec cette finesse de trait, cette aération, cette lisibilité, on sent davantage la jubilation musicale que les affects oppressants qui s'y bousculent !

¶ Haydn – Quatuor Op.76 n°5 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

¶ Grieg – Quatuor – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy Smile

¶ Schumann – Quatuor n°1 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Schumann – Quatuor n°2 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy
¶ Schumann – Quatuor n°3 – Engegård SQ (2L) Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy
Grande, grande référence ! 

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¶ Weingartner – Septuor pour piano et cordes – Ensemble Acht, Triendl (CPO) Very HappyVery Happy Very Happy
¶ Weingartner – Octuor pour piano, vents et cordes – Ensemble Acht, Triendl (CPO) Very Happy Very Happy Very Happy Smile
Très agréable, sans qu'il y a là d'exceptionnellement marquant. Autant j'ai adoré le pastoralisme trop classique pour ne pas être un peu décadent (sorte de Mozart romantique qui sait secrètement que Schreker existe) de la Première Symphonie, et beaucoup goûté la sobriété des guatuors, autant je n'ai pas complètement senti la nécessité de l'exhaustivité des publications (j'ai écouté les six symphonies parues, et elles se ressemblent vraiment beaucoup, sans apporter de couleurs nouvelles).
Il en va un peu de même avec ces pièces de chambre, surtout le Septuor : beau mouvement lent, belle Danza funebre (pas du tout solenelle ni terrible ni funèbre) finale, mais mobiliser un septuor pour tenir le propos d'un trio du milieu du XIXe siècle, pourquoi ? L'Octuor va chercher des alliages de couleurs un peu plus originaux grâce aux vents (grosse place de la clarinette et du cor) ; on a un peu l'impression d'entendre du post-Czerny, mais comme pour la Première Symphonie, l'œuvre conserve sa verve et son charme propres.




À bientôt pour de nouvelles aventures – tout aussi exotiques, mais je l'espère plus ordonnées et consistantes !

mercredi 3 janvier 2018

Concerts franciliens : les prismes de janvier


La sélection du mois. La dernière fois ayant été particulièrement chronophage, je vous lance le planning PDF où vous pourrez retrouver les dates, les lieux, et quantité de petits concerts (ou au contraire de concerts très en vue) dont je ne parle pas ci-dessous.

N'hésitez pas à réclamer plus ample information si les abréviations (c'est tiré de mon planning personnel, destiné au maximum de compacité) ou les détails vous manquent.
(Les horaires indiqués le sont parfois par défaut par la logiciel, vérifiez toujours !)



J'attire en particulier votre attention sur quelques perles.

(En rouge, les œuvres rarement données – et intéressantes !)
(En bleu, les interprètes à qui je ferais confiance, indépendamment du seul programme.)


A. Musique symphonique

La Deuxième Symphonie de George Onslow par le Philharmonique de Radio-France qui propose tout un cycle fin XVIIIe à milieu XIXe avec des compositeurs importants mais très peu proposés dans les salles : Devienne, Farrenc…
Cette symphonie n'atteint pas l'aboutissement de la Quatrième (dommage de ne pas avoir choisi celle-là, vraiment la meilleure du corpus), mais elle est belle est bien faite, dans la veine de ce premier romantisme qu'illustre bien Onslow.
(Il y aura aussi Leonskaja dans le Quatrième Concerto de Beethoven, mais ça, c'est juste un agréable bonus.)

♦ La Troisième Symphonie de Louise Farrenc par le Philharmonique de Radio-France. Farrenc n'est pas une compositrice majeure à mon sens, mais en tant que rare figure féminine à avoir gagné le respect de ses pairs de son temps (sans être la sœur ou l'épouse d'un compositeur important, ni la protégée directe de gens influents, comme Louise Bertin), elle occupe une place à part.
La Troisième Symphonie n'est pas un chef-d'œuvre, mais elle remplit agréablement son office. Bizarrerie, alors qu'on ne donne généralement que les œuvres de chambre de Farrenc, et de loin en loin, elle est également programmée à la Seine Musicale, quelques semainesplus tard !

♦ La Deuxième Symphonie de Bruckner (la meilleure avec la Nullte, j'ose dire ce que tout le monde vous cache) par Dausgaard. Depuis l'ère de ses danois rares (intégrales Langgaard ♥ et Hamerik ♥♥ !), sa personnalité peu anguleuse s'est abreuvée aux sources baroqueuses, et ses derniers disques avec la Chambre de Suède sont tout de même ébouriffants, presque trop secs et rapides pour moi (des Schumann, une Bruckner 2, un Tchaïkovski 6 vraiment extrêmes) – mais ses Beethoven et Schubert sont tout simplement ce qui se fait de mieux (assez proche de l'esprit Venzago, d'ailleurs). Très curieux d'entendre, avec l'Orchestre de Chambre de Paris, qui ira dans le même sens, sonner cette vision pour petit orchestre et dans une acoustique sèche d'un Bruckner aux phrasés brefs, pas du tout fondé sur la résonance. Ce devrait être déroutant mais très sympathique.

♦ La Symphonie d'instruments à vent de Gounod, par le Philharmonique de Radio-France. Aisément trouvable au disque, mais là encore, pas l'impression qu'on la programme si souvent en salle.

♦ La Symphonie Roma de Bizet, sa seconde symphonie en ut, très peu jouée et enregistrée contrairement à l'autre, est donnée par l'enthousiaste ONDIF à la Cité de la Musique (couplage avec grands Debussy souvent enregistrés mais rarement programmes au concert : Printemps et La Damoiselle Élue), direction Ceccherini. Cette symphonie est un véritable bijou, qui irradie de lumière comme l'autre, sous des atmosphères très variées.

♦ Un programme à la Cité de la Musique incluant la suite de Pelléas de Debussy par Marius Constant : autant la version Leinsdorf, usuellement donnée, n'est qu'un sinistre collage des préludes et interludes, autant la version Constant inclut de la musique des scènes chantées et réussi de superbes ponts – le final est celui de l'acte IV, une merveille.

Rachmaninov, Symphonie n°2 (par l'ONF). Je trouve l'œuvre mal fichue, avec une matière qui pourrait être celle d'un trio avec piano, au maximum, mais qui s'épaissit inutilement dans une grosse structure orchestrale assez visqueuse, sans que la veine mélodique ou les surprises ne soient présentes pour animer le discours. Mais ce n'est pas souvent donné (deux fois cette saison, alors il ne faudra pas vous plaindre si vous ne la revoyez jamais !), et j'en connais qui l'estiment beaucoup.

Rachmaninov, Les Cloches. Une œuvre vocale et chorale tout à fait spectaculaire, dans une veine épique très proche de son Prologue de Francesca da Rimini (si vous n'avez pas essayer, on pourrait parler de démesure hugolienne dans un langage sonore tout à fait russe). Assez irrésistible. [Et ce sera avec le meilleur chœur symphonique du monde, le Chœur de l'Orchestre de Paris, avec Lungu, Popov, Vinogradov, Noseda !]
Couplage avec une rareté : des portions symphoniques de La Donna serpente de Casella… (Certes, je trouve cet opéra très mauvais – caricature d'écriture italienne fade malgré ses parentés avec Moussorgski et Prokofiev… –, mais ça change.)

Chant funèbre de Stravinski : courte œuvre de jeunesse, pas du tout révolutionnaire mais bien faite et séduisante, qui vient d'être retrouvée – et donnée partout en ce moment par Chailly (y compris en disque avec Lucerne). En venant à Paris (concert du Philharmonique de sa Scala), il l'emporte dans ses bagages (avec Tchaïkovski n°2 et Petrouchka).

♦ Classe de direction A&B (les débutants) du CNSM. J'aurai le programme en début de semaine prochaine.



B. Musique sacrée

Œuvres polychorales du XVIIe italien à la Seine Musicale (Daucé) ; malgré l'acoustique, est très tentant – Benevoli spécialiste de la messe « spatialisée », Merula trop peu joué, et c'est un autre Cavalli que Francesco…

Requiem de Cherubini – le grand en ut mineur, avec solistes, a priori, même si le programme n'annonce pour l'instant qu'un ténor, comme dans le second, plus intime, en ré mineur, avec chœur d'hommes. Une petite merveille, prosodie comme mélodie, un des plus beaux Requiem jamais écrits à mon sens. Accentus & García-Alarcón, ce devrait être très, très bien.

Le Christ au Mont des Oliviers de Beethoven. Un Beethoven très contemplatif et inhabituel, tendre comme un Schubert. Néanmoins une merveille, une de ses grandes œuvres, et aussi l'une de ses moins jouée. Avec Santoni, Behle, Bou, Rhorer et la Vocalakademie Berlin !



C. Musique de chambre

Œuvres pour serpent et clavecin (avec notamment du Louis Couperin…) avec Marie van Rhijn, à Saint-Louis, c'est gratuit.

♦ La version pour quatuor à cordes du Requiem de Mozart, par le Quatuor Debussy – qui l'a enregistrée (un arrangement du début du XIXe siècle), et manifestement popularisée, on en trouve beaucoup de versions à divers degrés de professionnalisme sur YouTube !  Et, comme les arrangements de Don Giovanni pour Quatuor et d'une manière générale des Da Ponte pour vents, cela fonctionne tout aussi bien que les originaux.

Pièces pour piano de Chabrier, Chausson et Debussy (rare attelage !) par Ismaël Margain.

♦ Le Quinzième Quatuor de Chostakovitch par les Borodine, même si l'effectif et l'identité ont changé depuis leur première gravure, une rencontre particulièrement émouvante – et une œuvre exigeante, assez peu donnée en fin de compte malgré sa popularité chez les mélomanes (du moins ceux qui aiment les trucs crapoteux désespérants dans le genre Wozzeck-Mtsensk-Soldaten, bien sûr).

♦ Hommage au bebop de la classe de jazz du CNSM.

♦ Œuvres pour piano américaines : Gottschalk, Gershwin, Ives, Barber, Carter, Bolcom !  (Et trois Beethoven pour compléter bien sûr, dont « Mondschein » et « Waldstein ».)  Inhabituellement hardi pour la salle Gaveau.

♦ Œuvres pour orgue de Messiaen, Ligeti, Florentz et Guillou, par Loriane Llorca (du CNSM) : une soirée qui promet d'être spectaculaire !

♦ Musique contemporaine (avec notamment Grisey et les 12 Notations de Boulez) par l'Orchestre du Conservatoire et celui de la Hochschule Eisler de Berlin. Goethe-Institut.

♦ La biennale de quatuor à cordes dans les deux salles de la Cité de la Musique donne l'occasion d'entendre quelques-unes des plus belles formations : l'audace des Voce, la science des Danel, la maturité des Ébène, le nouveau visage très musicologiquement habité des Belcea, la belle personnalité des jeunes du Quatuor Arod (déjà signalé par ici, et qui en l'espace de deux ans est passé du CNSM aux fondations prestigieuses, pour à présent signer chez Néo-Erato – c'est-à-dire EMI-Warner ! –, avec un Mendelssohn assez original et complètement enthousiasmant), et celui que je recommanderais de découvrir en priorité, les Brentano, quatuor américain qui ne se produit que peu sur notre continent, et qui a produit les derniers Beethoven les plus saisissants que je connaisse… d'une épure, d'une intensité incroyables.
    Et puis quantité d'autres grands noms historiques (Arditti, Borodine) ou très en vue (Artemis, Debussy, Hagen, Asasello, Casals, Diotima, Modigliani, van Kuijk…). Programme moins cohérent et original que d'autres années (on eut une intégrale Vainberg la dernière fois, tout de même !), mais avec des interprètes de ce niveau on aura de quoi se faire plaisir.



D. Lieder & mélodies

♦ Airs de Hume / Jones / Purcell par Anaïs Bertrand (du CNSM, déjà une belle carrière en cours) et Nicolas Brooymans (la basse, formidable, de l'Ensemble Correspondances), accompagnés par Thibaut Roussel (un des meilleurs théorbistes du marché) et Robin Pharo (que j'aime moins, mais il faut dire que lorsque je l'ai vu, il se débattait avec une viole qui ne tenait pas l'accord !).

Liederspiele de Schumann : des cycles de lieder à quatre chanteurs, chantant séparément ou ensemble, avec une logique d'ensemble quoique sans intrigue à proprement parler (même s'il semble y avoir des personnages), et qui incluent quelques-unes des plus belles pages de Schumann (l'entrée du ténor dans « In der Nacht », les ensembles à quatre…). Par une compagnie issue de grands élèves du CNSM fraîchement sortis ou en cours de masterisation (Marianne Croux, Fiona McGown, Mathys Lagier, Edwin Fardini) – pas mes chouchous pour cette musique, mais de solides techniciens pour ces pièces rares. (J'y vais à chaque fois, et en neuf ans de concerts parisiens, je ne l'ai vu programmé que deux fois, et encore, une seule fois les trois liederspiele…)

♦ Lieder & mélodies de Wolf, Albéniz, Mompou, Dussaut par Adriana González (issue de l'Atelier Lyrique de l'Opéra) à Herblay.

Roth reprogramme les stupéfiants Haï-kaï de Delage, cette fois avec Piau (après Devieilhe en décembre !), couplé à des mélodies russes et japonaises de Stravinski, notamment. (Mais c'est un peu cher, le tarif unique au Musée d'Orsay.)

Classe d'accompagnement vocal d'Anne Le Bozec… toujours des programmes passionnants (et des artistes phénoménaux, comme Célia Oneto-Bensaïd, déjà une grande), très originaux. Je disposerai du programme en début de semaine prochaine, mais je ne saurais trop vous conseiller de réserver votre soirée.



E. Conférences

Influence de Chopin sur les compositeurs russes et français pour piano. Un pianiste du CNSM jouera en contrepoint Chopin, Liadov, Debussy, Szymanowski – vous avez dit russe ?  ne quittez pas,… – , Messiaen. (Odéon de Tremblay, gratuit.)

Le modèle et l'invention : Olivier Messiaen et la technique de l'emprunt (présentation du livre de Thomas Lacôte et Yves Balmer), médiathèque du CNSM.

Masterclasses de Christie, Coin, Ébène, Berrod… au CNSM (souvent en journée, mais quelques cours publics du soir).



F. Théâtre

♦ Outre la Tempête par Carsen chez les Français, quantité de patrimoine à parcourir, dont une soirée Büchner/Lenz rare : Les Bacchantes (dans deux mises en scène, à la Cartoucherie et à Colombes), Les Soldats (Malakoff), Une maison de poupée (Châtillon, Vélizy), Lulu (Malakoff) !  Pas encore fait mon choix, mais il y a des offres vraiment intéressantes sur Billetreduc (10€ au lieu de 27 pour Büchner/Lenz…).



G. Glotte

♦ Demi-finale et finale du concours Voix Nouvelles à l'Opéra de Massy. Considération la bonne médiatisation du concours et les prix habituels de l'Opéra (peu subventionné, avec des prix exorbitants plus proches des coûts réels), je ne suis pas sûr que ce soit accessible, mais pour entendre des glottes assez vastes dans de grands airs du répertoire, c'est le moment.
Le concours est plutôt orienté vers la promotion de solistes déjà installés, à la vérité, mais qui leur donne l'impulsion nécessaire pour passer dans les grands circuits – Karine Deshayes (qui faisait déjà le Marmiton de Rusalka à Bastille, tout de même…) est un peu leur étendard, elle est devenue une quasi-vedette après sa Cenerentola en finale (à une époque où le bruit courait que seule Bartoli pouvait chanter cela).
Je crois que les étapes régionales sont visibles en ligne en vidéo, je n'ai pas encore eu le temps (ou le courage : toujours les mêmes airs, et pour voir triompher les esthétiques que je n'aime pas…) de m'en occuper. Le monde devra survivre quelque temps encore avant que je donne mon avis.



Bonne chasse à vous ! 

(tout retour bienvenu, évidemment)

dimanche 6 août 2017

[Carnet d'écoutes n°108] – Moitié d'été


Liste (pas du tout exhaustive) d'écoutes, avec de rapides commentaires publiés à l'origine sur Classik ou Twitter (voir par exemple le fil du mois). Pas du tout soigné ni détaillé, mais un bon moyen de donner envie d'écouter des choses dont je n'ai pas forcément le temps de faire état ici.

Une fois que tout le monde aura ces deux lieux dans ses habitudes, je pourrai arrêter les reports ici.

En rouge, je signale les nouveautés discographiques.



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Porter la mitre et lorgner sous les jupes.
François LEMOINE, Ricordo de la coupole de la chapelle de la Vierge à Saint-Sulpice (années 1730)
Conservé au presbytère de Saint-Sulpice.
 


Baroque et classique

Peu d'écoutes de ce côté, ce mois-ci.

Ottone de Haendel.
Assez déçu par l'œuvre très peu saillante (en tout cas le premier tiers : je me suis lassé). Par Petrou aussi, étonnamment terne. Et vocalement, très beau mais assez uniforme (Čenčić, Hallenberg, Sabata). Quitte à écouter du seria, il y a de grandes œuvres disponibles chez Haendel, ou des raretés de Hasse ou Porpora autrement avenantes (noms sur demande), voilà.




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Claude-Guy HALLÉ, Ricordo du tableau Saint Paul à Lystre pour Saint-Germain-des-Prés (1717)
Conservé au Musée Carnavalet
Néanmoins :
Ce n'est pas lui, mais seulement
Le petit page avec la lampe.



Romantisme allemand


¶ Début d'une nouvelle intégrale des Sonates de Beethoven, par mon #chouchou Giovanni Bellucci (ma référence dans Schubert ou Liszt).
    Netteté d'articulation, soin de l'ornementation, science précise du rubato, un beau fondu presque sans pédale, sens du chant… on retrouve tout cela. Peut-être que pour Beethoven, l'enjeu est un peu grand sans pédale, et j'entends quelques apprêts un peu sophistiqués ou une petite froideur / dureté en enfilant les Sonates à la suite. Mais l'une des plus belles propositions pour ces premières sonates !

Beethoven, 6 Quatuors Op.18, Takács SQ.
    Le son est large, certes, mais la précision de trait et la finesse d'esprit sans égales.
    Depuis que j'ai découvert leur opus 76 de Haydn, je ne parviens pas, dans l'immense discographie, à en écouter d'autres sans frustration.

Intégrale Eisenlohr-Naxos des lieder de Schubert, volume 9 (Eiche, Fuhr).
    Beaucoup de belles pièces pas très données. Lorsque je rencontre celles que j'ai jouées et chantées, le texte se déroule immédiatement, et je sens encore les gestes vocaux dans ma bouche, la résistance du piano sous mes doigts.Pax vobiscum, An die Leier, Jägers Liebeslied, et bien sûr Schiffers Scheidelied, un de ceux dont on se demande pourquoi ils ne sont pas des tubes !
    Belle voix de Markus Eiche, mais transposé un peu grave, l'expression est étouffée. Un des rares volumes sans Eisenlohr.

¶ Échanges autour de versions récentes du Winterreise (Padmore-Lewis, Finley-Drake, Bauer-Immerseel,  Bauer-Mauser, Harvey-G.Cooper, Rose-Matthewman…) et des versions pour basse (Holl-Grubert, Moll-Garben, Talvela-Gothóni, Polgár-Schultsz, Bastin-Kneihs, Vogel-Dunckel, Gmyria-Ostrin…).

¶ Et la grosse claque du soir : reconstitution de l'Inachevée de Schubert par Venzago (arrangement et direction).
    Je me suis plongé dans ses notes explicatives : reconstruction narrative fantaisiste, mais sens très fin des nécessités musicales.    
    J'ai déjà publié une notule à ce sujet, l'écart entre le propos et le résultat est fécond.
    Il affiche une tranquille satisfaction quand même étonnante, jugeant son mouvement récrit « le plus exaltant de la symphonie »,
    et affirmant, à propos de son patchwork schubertien, que « Mahler aurait été enchanté » !  #MrGuéridon #BerliozStyle

Schubert – Quatuor n°15 – Kremer, Ma & friends.
Supra-mou, une collection de solistes qui n'ont pas dû beaucoup répéter, alors que l'un et l'autre peuvent être de magnifiques chambristes.

Norbert Burgmüller – Quatuor n°4
Petit bijou tempêtueux du premier romantisme, comme ses symphonies.

Liszt – Orpheus – Phiharmonique de Berlin, Mehta
Version très généreuse et voluptueuse, on perçoit encore mieux le côté piano-orchestré, mais aussi les grandes beautés de la pièce.

Mendelssohn – Symphonie n°3 – Freiburger Barockorchester, Heras-Casado (HM)
Mendelssohn – Symphonie n°4 – Freiburger Barockorchester, Heras-Casado (HM)
Cette version atypique (Mendelssohn par un orchestre en principe spécialiste du cœur du XVIIIe italo-germanique) se réécoute vraiment très bien !  Le choral du début de la 3 est un peu dépareillé, certes, mais sinon, ces couleurs comme ravivées par abrasion, un régal. Il y a peut-être mieux (pour la 4 en particulier, assez vive pour sonner très vive et fine sur instruments modernes – Dohnányi-Cleveland, Ashkenazy-DSOB, Tennstedt-Berlin !), mais ce demeure tout à fait exaltant et revivifiant !

Mendelssohn – 3 Psaumes – Chœur de la Cathédrale d'Oslo, Kvam (Nimbus)
Dans ces pièces en majesté, un certain manque de fermeté ici… d'ordinaire j'apprécie considérablement la grandeur douce de ce chœur, pas du tout opératique (amateurs de haute volée ? spécialistes du chant sacré ?), mais ici, on perd beaucoup en impact dramatique – or, Richte mich Gott… !

¶ Écouté le Parsifal d'Elder avec Hallé, donné aux Proms il y a quelques années, dans la prise de son toujours phénoménale du label de l'orchestre.
    Vision très hédoniste, assez lente, comme contemplant ses propres timbres, qui serait un premier choix, avec une bonne distribution (Dalayman et Cleveman juste après leur faîte), n'était Tomlinson qui ne peu plus lier ses notes, et seulement pousser ses aigus.
    Vu la quantité de texte à dire, malgré un résistance au temps pas si mauvaise, tout de même une réserve sérieuse si on ne collectionne pas les Parsifaux !

Brahms – Sérénade n°1 – Capella Augustina, Spering
Décevant, lecture décente mais assez terne pour une version HIP, et du Spering en particulier. J'en reste donc à Boult-LPO et Chailly-Gewandhaus. Mais il m'en reste encore plein à essayer (le problème est que je réécoute Boult à chaque fois…) : Bertini, McGegan (Philharmonia Baroque !), Jaime Martín avec Gävle, Ticciati-Bamberg, Kertész-LSO (j'ai dû écouter ça il y a très longtemps), Haitink-Concertgebouworkest (idem), Abbado avec les jeunes Mahler, Bongartz avec la Philharmonie dresdoise…



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Putto chirurgien, très appliqué.
Jacques BLANCHARD, Saint Sébastien (années 1620-1630).
Musée Bossuet.
 

Romantisme français

¶ Le Freischütz version Berlioz, tellement meilleur que l'original. Quels récitatifs (de la même couleur que les airs), quelle fluidité !

¶ Réécoute de La Reine de Chypre d'Halévy, le V enfile vraiment les tubes (voir explication un peu plus macrostructurelle sur CSS) : « Malgré la foi suprême », « S'arrête la victime », « Guerre à Venise » !.
    Le reste n'est pas vilain non plus ! Je confirme mon impression, de loin le meilleur Halévy (avec les parties de Noé qui ne sont pas de Bizet – non pas que celles de Bizet soient laides, au contraire, mais elles ne sont pas d'Halévy !).

¶ Réécouté Proserpine de Saint-Saëns aussi, débat sur Classik.

Saint-Saëns – La Muse et le Poète
Ressemble assez aux vilaines caricatures qu'on peut lire sur lui dans les Histoires de la Musique. Pas fabuleux : peu de matière musicale (et pas très originale), une dimension concertante un peu didactique (dialogues…), sans vraiment être très évocateur. J'aime passionnément quasiment tout Saint-Saëns, mais la maison ne fait pas de miracles non plus.

¶ Dans l'album romantique-français-tardif-rare de Gens et Niquet, très intéressé par le sens dramatique de Niedermeyer (promis par Bru Zane en intégralité).
    En revanche, les airs isolés (sulpiciens de surcroît), malgré la beauté de la voix, je salue mais n'y reviendrai pas souvent.
    Rares sont les récitals d'opéra auxquels je reviens, les airs étant en général les parties moins intéressantes musicalement, dramatiquement.
    À quand un récital de quintettes, sextuors et finals ?
    (Déjà, de duos, comme Thébault-Pruvot-Talpain, c'est autrement mieux !)
    Parmi les beaux exemples, le récital de Skovhus-Conlon, parcours qui raconte quelque chose.



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Putto-atlante assez herculéen.
Plaque funéraire de Lazzaro Doria (notable gênois), attribué à Giovanni Gagini (1486).



Romantisme italien

Verdi – Nabucco – Mariotti (C Major)
    Avec Theodossiou, Ribeiro, Nucci, Zanellato.
    Remarquable, ébouriffant, très finement dirigé, très bien chanté. Je n'ai pas mieux en magasin.
    Et l'œuvre, quel bijou – l'orchestration n'est pas fabuleuse, mais pour le reste, les concertatos incroyables, la veine mélodique ininterrompue, le drame qui calvalcade !

Verdi – Nabucco – Santi, Paris 1979 (Arthaus)
    La mise en scène est très… tradi (tous les bras en croix face à la scène dans leurs grandes robes satinées de dorures), mais le plateau fait toute l'impression : Bumbry, Cossuta, Raimondi !  J'aime un peu moins Milnes, aux portamenti très appuyés (et qui a moins de graves que son partenaire ténor Cossuta), mais tout ça est remarquable, et bien qu'épais, l'accompagnement vit très bien.
    Je l'avais déjà écouté il y a longtemps (sans le visuel), et c'est ce qui se faisait de mieux avant que n'arrive la nouvelle génération de chefs raffinés dans ce répertoire.

Verdi – Attila – Rinaldi, Christoff
Verdi – Attila – De Biasio, Battistoni
Opéra qui a toujours ses fulgurances (les clefs de fa, passionnantes) et ses longueurs. Pour une fois, déception avec la version parmesane : les voix graves sont vraiment ternes, et ce ne peut pas passer dans un opéra qui repose complètement sur leurs tempéraments !

Verdi – Il Corsaro – Montanaro (C Major)
Un des meilleurs Verdi, pourtant un des moins donnés. Comme Oberto ou Stiffelio, c'est pourtant du premier choix (je trouve ça nettement plus abouti que Macbeth et un peu plus trépidant que Luisa Miller, par exemple). Version exemplaire aussi, avec quatre chanteurs exceptionnels et un chef intéressant.

Verdi – Stiffelio – Qiu, Aronica, Battistoni
Verdi – Stiffelio – Chelsea Opera Group
    Quel opéra ébouriffant ! Et cette fin totalement inattendue… Quel sujet, aussi : l'adultère de la femme d'un pasteur contemporain !
    Battistoni est ma référence habituelle, mais la bande de cette compagnie de Chelsea est épatante. Miricioiu est certes déclinante, mais le ténor Peter Auty est une révélation étourdissante… on se demande pourquoi on embauche les vedettes actuelles quand on a des gens comme lui. Une voix mixte ronde, égale, glorieuse sur toute l'étendue… la diction est un brin enveloppée, sans doute, mais le charisme vocal et la poésie de l'instrument sont incroyables. Comment se fait-il qu'on ne se l'arrache pas, à l'heure où les grandes maisons se contentent en général de ténors vaillants mais aux timbres frustes ou aux aigus blanchis ?

Verdi – Luisa Miller – Martínez, Vargas, Zanetti, Paris 2008
L'œuvre, malgré ses faiblesses (dramatiques en particulier – il ne faut pas avoir honte de se réclamer de Schiller !), ne manque pas de beautés musicales, et Zanetti y est particulièrement passionnant. Netteté, articulations expressives… l'orchestre dit beaucoup ici.



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Au pied d'une statuette ornementale de satyre en laiton doré, trois putti font de la musique sylvestre.
Objet étrange, puisqu'il est associé par l'orfèvre-vedette de l'Empire, Odiot, à une coupe « sein » (à la forme non équivoque), et qu'il récupère les putti de sa base de vases à parfum qu'il avait fournis à l'impératrice Marie-Louise neuf ans plus tôt, en 1810. (Une des spécificités du métier de fondeur est qu'on peut effectivement réutiliser des modèles ou des fragments pour tout type d'objet.)




Décadents germaniques

¶ (Karl) Weigl – Symphonie n°6 – Radio de Berlin-ex-Est, Thomas Sanderling (BIS)
Comme la 5, pas ultime, certes, mais du beau postromantisme bien fait, plutôt sombre mais pas sophistiqué, qu'on aurait du plaisir à entendre en plusieurs versions et au concert.

¶ (Karl) Weigl – Symphonie n°5 « Apocalypse » – Radio de Berlin (ex-Est), Thomas Sanderling (BIS)
    Effectivement, le premier mouvement est difficile à encaisser (ces instruments qui s'accordent platement au début, et ces trombones étiques supposément menaçants, vraiment pas à la hauteur de son ambition). Et les Quatre Cavaliers sont assez déroutants – une large part du mouvement est écrit dans le mode majeur avec une orchestration légère qui fait la part belle aux flûtes…
    En revanche, l'adagio évoquant le Paradis Perdu réussit remarquablement son projet extatique, rien que pour ce quart d'heure il faut écouter la symphonie, autrement un peu frustrante.
    La Sixième est beaucoup plus régulière et convaincante.

¶ (Karl) Weigl – Phantastisches Intermezzo – Thomas Sanderling (BIS)
Ça virevolte comme le Scherzo fantastique de Stravinski, ça mérite l'écoute.

Hausegger – Aufklängen, Dionysische Fantasie – Bamberg, Hermus. Ça vient de sortir chez CPO.
    Il y a aussi Wieland der Schmied (mais lui plusieurs fois gravé), le thème de l'opéra que Wagner n'a pas écrit…
    C'est du du Schmidt en plus plus straussien, plus lumineux, moins ronchon, du superbe romantisme tardif élancé et diapré.

Mahler – Symphonie n°7 – Concertgebouworkest, Chailly (Decca)
Limpide et coloré, bien bâti, j'aime beaucoup cette version. (Sans atteindre mes plus chères, Jansons-Oslo, Stenz-Gürzenich…)

Jan van Gilse – Symphonie n°2 – Symphonique des Pays-Bas (sis à Enschede), Porcelijn (CPO)
Peut-être bien la symphonie que j'aime le plus de tout le XXe siècle.

R. Strauss – Capriccio – Prêtre
    Version avec Della Casa et Vienne, moins intéressante que celle qu'il fit avec Lott (ma référence).
    Un peu figé, voix que je ne trouve pas très typées : Ch. Ludwig, Kmentt, Kerns, Berry… Vienne vraiment sur la réserve aussi, comme souvent.
    Je crois que ça a été publié il y a relativement peu de temps, ça n'existait pas il y a deux ou trois ans dans la discographie.

Diepenbrock – Zum grossen Schweigen – Hagegård, Concertgebouworkest, Chailly
    Belle balade orchestrale (sans valoir ses fresques plus ambitieuses).

¶ Je trisse la Verklärte Nacht d'Oskar Fried. S'il y a bien une œuvre qui ferait un tabac en salle… Bouleversant à chaque fois.
    (Parce que les Vier dramatische Gesänge de Gurlitt, ça vaut bien les Vier letzte Lieder, mais je me doute que peux aller me brosser.)
    On ne l'entend pas très bien sur le disque (l'orchestre est capté un peu en arrière et vaporeux), mais il y a de très belles choses en matière d'orchestration, des échos entre les différentes parties, des contrechants de cor magnifiques, des moments où les vents sont seuls pendant l'exultation finale. Encore plus impressionnant que l'impression globale, en y regardant de plus près. J'ai prévu d'enrichir la notule en conséquence, ou d'en faire une autre. Dans quelque temps.
    J'ai découvert qu'une intégrale des lieder de Fried existait (par les mêmes chanteurs, Landshammer et Rügamer), et qu'une énorme cantate devrait bientôt paraître, mais je ne trouve pas trace de ces disques.

Ben-Haim – Quatuor n°1 – Carmel SQ (Toccata)
Ben-Haim – Quintette à deux altos – Carmel SQ (Toccata)
Très bien. Pas aussi saillant que ses meilleures œuvres symphoniques, mais j'y reviendrai pour approfondir.

Ben-Haim – Symphonie n°2 – Philharmonique de la Radio de Hanovre, Yinon (CPO)
    Beaucoup plus lumineuse que la Première, proche de la 2 de van Gilse, des 2 et 4 de Nielsen.
    Dans les deux cas, les mouvements lents sont extraordinairement prégnants.
    Et le concerto grosso est encore meilleur, pas du tout archaïsant d'ailleurs.

Paul Ben-Haim – Symphonie n°1 – Philharmonique de la NDR, Yinon (CPO)
Paul Ben-Haim – Fanfare pour Israël – Philharmonique de la NDR, Yinon (CPO)
Paul Ben-Haim – Métamorphoses symphoniques sur un choral de Bach – Philharmonique de la NDR, Yinon (CPO)
    Rien à voir ici, les trois œuvres sont très sombres, beaucoup plus « modernes » que la Deuxième Symphonie. Le mouvement lent de Première Symphonie est, comme pour la Deuxième, particulièrement prégnant. Les Variations sont vraiment très diverses, quoique toujours tourmentées (pas tant musicalement qu'expressivement) et la Fanfare pour Israël résonne plutôt comme une marche funèbre – assez peu éclatante, même dans la douleur.



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Dans les tableaux mariaux de Largillière (les deux vers 1730) tout le monde, même les putti, a les mêmes traits : ceux d'Anita Cerquetti.



XXe français

¶ Confidence : le disque de mélodies que j'ai, de loin, le plus écouté. (Gabriel Dupont par Peintre & Girod, chez  Timpani.) tartelettetartelettetartelettetartelettetartelette

Mélodies de Fauré par Lenaert et (Ph.) Riga. tartelettetartelettetartelettetartelette
    Du Fauré aux [r] très roulés, avec piano d'époque, très belle diction posée sur le timbre franc de Lenaert. Je n'avais jamais remarqué le côté très aulnisant de Fleur jetée !
    Attention, le timbre (que j'aime) n'est pas voluptueux, c'est plutôt de la taille/ténor baroque, il faut écouter pour l'équilibre général !

¶ Très belle réussite du disque Schindler-Debussy avec l'Orchestre de Franche-Comté : la « Symphonie Pelléas » de Constant, dont on n'a que deux exemples au disque (Märkl éloquent et élancé, Baudo plus sucré et fondu), sonne très bien ! 
    Seul détail qui donne l'avantage à Märkl et le National de Lyon : le final du IV n'est pas aussi ardent. Grandes lectures orchestrales de Pelléas dans les deux cas !
    (Contrairement à l'infâme collage Leinsdorf d'interludes, souvent joué, le montage Constant inclut d'autres moments importants et cohérents, pas seulement les interludes – dont une large partie du final du IV, donc. Par-dessus le marché, les ponts sont beaucoup plus adroits et ne semblent pas des tunnelets flottant sur une mer de Debussy.)
    Le reste est moins intéressant : les Maeterlinck ne sont pas le meilleur de Zemlinsky, la voix de Druet n'est guère séduisante, et Le Bozec est pour la première fois de sa vie en petite forme. Pour les quelques Alma Schindler, on dispose d'aussi bons disques, et procurant l'intégralité des lieder.

Mariotte – Impressions urbaines tartelettetartelettetartelettetartelettetartelette
    Un chef-d'œuvre du figuralisme mécaniste, du niveau de Meisel… mais au piano !
    Contrairement aux autres œuvres de cette veine, d'ailleurs, c'est la poésie qui prévaut ! 
    (existe par Blumenthal chez Timpani)
    Là aussi, le disque de piano que j'ai, d'assez loin, le plus écouté depuis sa parutition

Honegger – Concerto pour violoncelle – Johannes Moser, Radio de Saarbrücken, Poppen
Très beau celui-là aussi, j'y reviens souvent.

¶ Pour le reste, quelques opéras fétiches (L'Étranger de d'Indy, Monna Vanna de Février, L'Aiglon d'Ibert-Honegger dans la reprise de Marseille avec d'Oustrac). Et puis Lazzari, même si ce n'est pas La Lépreuse : La Tour de feu, prise assez inaudible (que ce soit chez Cantus Classics ou Malibran), impossible de percevoir ce que fait l'orchestre.

d'Indy – L'Étranger – Foster
Ce mélange de motifs et harmonie wagnériens et de chants populaires français, qu'est-ce que c'est fabuleux !

Février – Monna Vanna – Rennes 1958
(Quel dommage qu'il manque les dernières répliques sur la bande Malibran !)

Ibert-Honegger – L'Aiglon – Dervaux
Un des opéras que j'ai le plus écoutés, je crois, mais je n'avais pas encore exploré cette version historique (Boué, Despraz, Bourdin). Je croyais pourtant avoir entendu de grandes versions orchestrales avec Lacombe, Nagano et Ossonce, mais je suis frappé par la précision des climats campés par Dervaux, que je tenais plutôt pour solide qu'inspiré. Vraiment épatant, il n'y a que Boué, un peu aigrelette, qui soit en dessous des autres versions (il faut dire que face à Cousin, Gillet et d'Oustrac, qui pourrait en mener large !).

Lazzari – La Tour de feu – Ruhlmann 1944
Le son est vraiment trop défavorable (voix très en avant, orchestre fort mais parcellaire) et le français trop mauvais (génération où la diction était lâche, façon Lubin) pour pouvoir en tirer quelque chose. Mais comme j'aime énormément La Lépreuse, je réessaie périodiquement.


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Putto très grognon.
Clément BELLE, La découverte de la profanation des saintes hosties à Saint-Merri (1759)
Commémoration très expressive de cet événement survenu en 1722.
Peint et conservé à l'église Saint-Merri de Paris.



Fleurs scandinaves

Horneman – Quatuors 1 & 2 
    Du romantisme simple et lumineux, mais pas fade comme du Gade (ou même les quatuors de Langgaard). Pas grand comme Larsson plus tard, qui est beaucoup plus personnel, mais très beau de tout de même.
    Christian Horneman était un contempteur de Niels Gade, qu'il jugeait trop germanisant – de fait, Gade composait souvent en allemand (des lieder, ou bien grande cantate Comala), et pas nécessairement sur des sujets danois. Tandis que Horneman a écrit une Ouverture de concert pour l'Aladdin d'Oehlenschläger, la grande figure qui importe le romantisme de Schiller, de Goethe et des Schlegel dans la langue danoise (c'est l'œuvre pour laquelle Nielsen a écrit sa musique de scène).

Horneman – Suite de Gurre – National du Danemark, Johannes Gustavsson (Da Capo)
    Toujours dans cette veine, qui refuse tout à fait les expressions tourmentées. Mais pas sans expression, loin de là ! – je trouve ça plutôt mieux que les suites de Peer Gynt de Grieg…
    Sur le même disque, on trouve Le Combat des Muses, avec parties vocales, tout aussi réussi, et Kalanus. Il existe un autre disque qui reprend partiellement le même programme, par Schønwandt et la Radio Danoise. Je crois qu'avec le disque de quatuors, ce sont les trois seules monographies discographiques disponibles pour Horneman.

Hamerik, Symphonie n°2. tartelettetartelettetartelettetartelettetartelette
    Hamerik fait du Mendelssohn dans les années 1880, mais les deux premières ne manquent certes pas de personnalité !
    Probablement les deux symphonies auxquelles le mot « poétique » s'appliquent le mieux, et tout en simplicité.
    La façon dont le calme thème B du I de la 2 devient une marche altière, c'est rien, mais c'est beau. Ou le bucolisme de la 1, partout.

Hamerik, Symphonie n°7. tartelettetartelette
    Qu'est-ce que le niveau baisse…J'adore pourtant les deux premières, bien les 3-4-5, mais la fadeur de la dernière !  Je n'ai pas réécouté le Requiem en couplage, mais il est de la même farine.

Hamerik – Quartetto
    On dirait que Hamerik a cru que le suffixe en « -etto » avait ici un sens diminutif ! Minuscule pièce d'une dizaine de minutes, très jolie, mais beaucoup moins marquante, dans le genre paisible-souriant, que les Horneman (son aîné de trois ans seulement).

Stenhammar, Symphonies. Assez ternes sur tous les aspects, même si le final de la 2 (un peu) plus folklorisant est sympa.
    Tellement loin du charme naïf de la sérénade simili-mozartienne ou de la densité d'écriture des quatuors (fabuleux) !
    À tout prendre, ses concertos pour piano font de bien meilleures symphonies !
    (même les zébrures sibéliennes de la 2 ne sonnent pas très hardies ; certes Neeme Järvi ne semble pas dans un jour de grande nervosité)
    … Bien, en réécoutant les concerts, le Deuxième Concerto est quand même bien fade… et la Deuxième Symphonie par Westerberg, ça change tout, superbe !

Stenhammar – Sérénade – Chambre d'Uppsala, Mägi
Jouée avec cette verdeur, ça devient passionnant.

Et un véritable cycle Hagegård (qui a occasionné une récente notule).

Grieg – 4 Psaumes – Hagegård Chœur de la Cathédrale d'Oslo, Kvam (Nimbus)

Rangström – 5 Poèmes de Bergman, La Fleur sombre et autres cycles. Svendén, Hagegård, Schuback (chez Musica Sveciæ).  De très belles atmosphères traitées dans la langue locale, ce qui n'est finalement pas si évident chez les compositeurs nordiques. tartelettetartelettetartelette

¶ Hagegård, tubes d'opéra (Pagliacci, Faust, Rigoletto, Così, Tannhäuser, Don Carlo) et airs suédois. Une belle grâce là où on ne l'attend pas, et touours ce vibratello charmant.
La Romance à l'Étoile est l'une des plus belles que j'aie entendues, dans un secteur pourtant fort chargé (DFD, Blanc, Mattei, Gerhaher…). On sent la parenté d'école avec Mattei d'ailleurs, l'aisance du mixage et des nuances en sus…

¶ (August) Söderman – Tannhäuser – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)
Une vaste ballade dont les divers climats sont assez réussis. Elle commence par des appels qui font écho aux trompes vascellaires de la fin de Tristan.

¶ (August) Söderman – Kung Heimer och Aslog – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)

Aulin – Poèmes de Tor Hedberg – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)
Comme toujours dans les mélodies d'Aulin, délicatement coloré.

¶ (Ragnar) Althen – Land du välsignade – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)
Très beau chant patriotique, simple et élancé.

¶ (Andreas) Hallén –  Junker Nils Sjunger till Lutan (av Gustaf Wasas saga) – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)
Autrement dit : l'aristocrate Nils joue du luthn extrait de saga.

Alfvén – Skogen sover (La forêt repose) – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)

Stenhammar – Suède – Hagegård, Radio Suédoise, Kjell Ingebretsen (Caprice)
Ce sont là les couleurs délicates du Stenhammar de la Sérénade.




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Putti qui attirent l'attention du photographe tandis que Jésus, au-dessus, est un peu déchiré.
Noël COYPEL, une Crucifixion étrangement intitulée Le Christ pleuré par les anges.
(ce qui paraît tout sauf évident, garnements)
Musée Bossuet.



Britanniqueries

Stanford – Stabat Mater tartelettetartelettetartelettetartelette
    (conseil de Gilles Lesur)
    Très inhabituel, une vision très dramatique et extravertie de ce texte. J'aime beaucoup.

Elgar– Quatuor – Villiers SQ tartelettetartelette
    Bien joué comme cela !  Son calme un peu étale fonctionne très bien ainsi, beaucoup mieux qu'à l'ordinaire.

Delius – Quatuor – Villiers SQ tartelettetartelettetartelettetartelette
    Très ravélien en réalité, mais un Ravel pas du tout frénétique comme celui du quatuor. Très, très beau.

York Bowen, Symphonies n°1 & 2 (BBCPO, Andrew Davis). De très beaux morceaux de postromantisme généreux !  tartelettetartelettetartelettetartelette

Robert Still – Quatuor n°1 – Villiers SQ (Naxos)
Robert Still – Quatuor n°2 – Villiers SQ (Naxos)
Robert Still – Quatuor n°3 – Villiers SQ (Naxos)
Robert Still – Quatuor n°4 – Villiers SQ (Naxos)
    Du jeune Schönberg au vieux Chosta, un corpus très réussi dans un style évolutif mais homogène.
    Du premier, complètement tonal même si « avancé », on parcourt toute une évolution stylistique : le 2 évoque plutôt le jeune Schönberg ou les quatuors de Korngold, le 3 plutôt le jeune Chostakovitch, le 4 plutôt le dernier Chostakovitch, tout cela en restant dans une couleur qui lui est propre. Par goût, j'apprécie particulièrement le deux premiers, mais les quatres sont remarquables. (Et le Quatuor Villiers est, ici, encore, absolument parfait.)



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Jean-Baptiste PIERRE, Renaud dans les jardins d'Armide.
Musée municipal de Meaux.
Dans cette version, on ne voit pas le bouclier aux mains d'Ubalde. Est-ce ce que tient le putto dissimulé ? 
Ou bien un tambour de basque ?  Un miroir ?



Slaves

¶ Présentement, les deux petits accordéons de la Deuxième Suite de Tchaïkovski ! tartelettetartelettetartelettetartelette
    On joue très peu ses Suites, qui valent pourtant les symphonies !
    Beaucoup plus de mouvements fugués, de couleurs, de danse surtout. Ça se vaut, vraiment !

Tchaïkovski – Symphonie n°1 – St. Luke's, Heras-Casado (HM)
Tchaïkovski – The Tempest – St. Luke's, Heras-Casado (HM)
Vision allégée et sobre, comme on pouvait s'y attendre, sans être fondamentalement différente en conception de la tradition.

Taneïev – Quintette à deux altos – Taneyev SQ (Northern Flowers)
    L'une des meilleures œuvres de chambre de Taneïev (le sommet restant plutôt le Quatuor avec piano, à mon sens), beaucoup plus intéressante que les quatuors un peu académiques.

Martinů – Concerto pour violoncelle n°1 – Johannes Moser, Radio de Saarbrücken, Poppen tartelettetartelettetartelettetartelette
    Splendide concerto (j'ai ai parlé plusieurs fois ici même, sur CSS) – l'orchestre y dit beaucoup.
    Et Moser est, à mon sens, le meilleur violoncelliste soliste actuel, d'assez  loin… aussi bien maîtrise que son ou expression, ébouriffant.

Pawel Łukaszewski, chœurs sacrés. Très tradi, mais les chuintantes des Chants Funéraires Kurpiens (en polonais ou dialecte afférent), les quintes dures, les petits agrégats suspendus à la mode traditionnelle sont réellement délicieux. Le legs latin est plus insignifiant. Et ne me dites pas que c'est introuvable, ça vient d'être édité (ou réédité) chez Warner. Si vous aimez Tormis, même veine.

Avet Terterian – Symphonie n°3 (chez ASV).
    L'usage des percussions seules et des effets de cordes (glissando) est assez ludique, et ce devrait bien fonctionner en salle avec un public néophyte; en revanche, côté matière musicale, c'est comme chez Say, il faut chercher.
    Mais j'ai peut-être manqué des choses au delà du premier mouvement : j'ai dû m'interrompre, et j'avoue humablement ne pas avoir (étrangement) trouvé de temps pour m'y remettre.



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Nous sommes peut-être aux Invalides, mais les putti sont bien portants.
(Vous noterez le front napoléonien du second.)



Et aussi

¶ Propositions d'enregistrements du Sacre du Printemps.

¶ Moisson du jour un peu moins exigeante.
    Mendelssohn baroqueux, Verdi fin, Tchaïkovski allégé, postromantisme carinthien, pop coréenne 2000's
    Dont :
    ¶¶ Davichi – Hot Stuff
    ¶¶ Narsha (avec Miryo) – 나 언제나 그대곁에 있어요

¶ Je découvre avec un disque Bernstein par Minnesota-Oue (pas Berlin-Abbado quand même !) l'existence de ce modeste label. |:-o
Reference Recordings

Diodet-Lamareille, Ce que c'est qu'un drapeau.
    Qu'est-ce que ça fonctionne bien !
    Versions Thill, Dona, Patard et puis Mestral, Noté…
    Plutôt que Thill que tout le monde connaît, Dona
    (Patard est seul à faire le couplet central et ne fait que celui-là, étrangement – le moins intéressant, dans un ton un peu négatif pas très congruent avec le principe de la chanson patriotique.)

Luis FonsiDespacito
Faut bien se cultiver.


¶ J'ai aussi écouté, un peu incrédule, les chansons racistes de l'Expo coloniale de 1931.
    Nénufar est particulièrement frappant (la reprise en chorus « Nénufar — Nénufar ! — T'as du r'tard — T'as du r'tard ! — Mais t'es un p'tit rigolard »…).
    [texte complet]
    Oui, quand même.
    (On notera avec intérêt la fortune pré-1990 de l'orthographe « nénufar ».)
    (Possiblement un autre sous-entendu raciste, d'ailleurs.)



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Jean-Baptiste PIERRE, Renaud dans les jardins d'Armide.
Musée municipal de Meaux.
Quelle est la femme ?



Concerts

♫ J'avais déjà mentionné quelques mots sur Le Timbre d'argent de Saint-Saëns. En voici une autre version, un peu plus lisible. La bande est disponible sur France Musique. L'Opéra-Comique en publiera une version vidéo, je crois (ou était-ce Alcione ?), et Bru Zane devrait le publier en CD.

Lamento della Pazza de Giramo et canzoni de Kapsberger et Strozzi par les Kapsber'girls, un programme un peu plus vert que le précédent (et à mon avis des œuvres moins intéressantes), mais qui promet beaucoup lorsqu'il sera rodé !

♫ Encore une fois le Trio Zadig, cette fois dans Ravel et Schubert (et aussi conversation sur Classik).

Quintettes à vent de Barber, Ligeti, Arnold, et (arrangé de) Debussy.

♫ Déjà mentionné le mois dernier, mais c'était un concert de juillet, et il mérite bien une seconde mention : Chœurs de Saint-Saëns, d'Indy, Schmitt, Poulenc –  Chœur Calligrammes, Estelle Béréau (Notre-Dame-du-Liban). Quand des post-wagnériens comme d'Indy et Schmitt se passionnent simultanément pour le folklore français… jubilatoire et très riche à la fois, un répertoire qui n'est pas du tout documenté par le disque. Témoignage très précieux, et dans le top 10 des concerts de la saison…

… et j'ai encore pour la troisième fois manqué le Trio Sōra (Tchaïkovski et Chosta 2, j'avais ma place d'ailleurs…), que je languis de réentendre !


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Putto courant sans pieds ailés.
Daniel SARRABAT, L'Enlèvement d'Europe (comme vous pouvez le deviner à senestre).
Musée Bossuet.



Quelques balades illustrées

► Voyage à Enfer.
Méry-sur-Oise, exploration nocturne conceptuelle.

►Atmosphères prégnantes de Saint-Laurent à Beaumont-sur-Oise.
► Visite de la cathédrale de Meaux. Espace extraordinaire. [récit en cours]
► Visite de Dourdan. [récit partiel, je vois que je n'ai pas mentionné l'église en particulier, ni l'histoire du restaurateur viollet-le-ducal…]

► Exposition 1870 aux Invalides, plus didactique qu'artistique, mais avec un superbe Doré en cadeau.
Détails de l'exposition Baroque des Lumières (tableaux d'églises françaises aux XVIIe et XVIIIe siècles) au Petit-Palais.
► Le musée Bossuet dans l'ancien palais épiscopal de Meaux. Superbe fonds de peintures françaises XVIIe-XVIIIe. [récit en cours]


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L'Amour sans bandeau ne fera pas grâce à la nymphe qui s'enfuit.
Une autre vision, beaucoup plus déterministe.
(Cratère d'ornement à l'extérieur de l'hôtel de ville de Meaux; seconde moitié du XIXe.
)



Quelques lectures citées

Fil Byron : relecture du Corsair, citations d'extraits. En cours.

→ Extraits et citations tirés de la seule biographie d'Eugène Scribe – par Jean-Claude Yon, historien. Où je n'ai pas trouvé les réponses à mes questions sur l'absence de scandale de Robert le diable ; comme souvent dans ce type de biographie, Yon cherche surtout à réhabiliter le sérieux, l'humanité, la paternité des œuvres de son chouchou, plutôt qu'à expliquer les raisons littéraires de sa place, et y parle assez peu des contenus des œuvres, très peu d'opéra. Le contexte de sa production, ses rapports avec les autres écrivains ou les directeurs de théâtre sont très précisément documentés, mais ne laisse pas de place pour répondre à ce qui m'intéressant – d'autres monographies seraient à écrire. Ici aussi, exploration en cours.



putti_clef_coeur_lemoine_vierge.png   
Les Clefs du cœur.
François LEMOINE, Ricordo de la coupole de la chapelle de la Vierge à Saint-Sulpice (années 1730)
Conservé au presbytère de Saint-Sulpice.



Annexe : Les tartelettes ?

Les tartelettes sont une cotation purement personnelle que je n'ai pas retirée lorsqu'elle figurait déjà. Elles n'ont aucun lien avec la qualité objective ou l'audace des œuvres, elles témoignent uniquement de mon intérêt subjectif à les écouter.

Elles ne tiennent pas compte des interprétations (sinon ce devient trop complexe, aussi bien pour moi que pour celui qui veut écouter l'œuvre et n'a pas forcément le même disque).

Il ne faut donc pas les lire comme les étoiles « objectives » des magazines (ou des webzines qui se prennent au sérieux) qui servent à donner ou pas la moyenne aux enregistrements. Pas mon univers.



Pas déplaisant, mais pas nécessaire à réécouter.
Exemples : Certaines symphonies mineures de l'ère classique. (Plutôt Stamitz que Vaňhal ou Cannabich, mais ce dépend vraiment des opus.) Les lieder de Brahms. Messagesquisse de Boulez.


Agréable, à  réécouter de temps à autre.
Exemples : Les lieder strophiques de jeunesse de Schubert. Tannhäuser de Wagner. Domaines de Boulez.


Très belle œuvre, à réécouter souvent. [Concerne donc une très large part du répertoire.]
Exemples : Die Dichterliebe de Schumann, Lohengrin de Wagner.


Un œuvre particulièrement enthousiasmante, à réécouter le plus souvent possible.
Exemples : Parsifal de Wagner. Il Trovatore de Verdi. Les lieder d'Alma Schindler-Mahler. Dialogue de l'ombre double de Boulez.


La poignée des œuvres de chevet, celles qui parlent le plus immédiatement et le plus intimement.
Exemples : la Première Symphonie de Czerny, le Via Crucis de Liszt, le dernier tableau de Das Rheingold de Wagner, Arabella de R. Strauss, les lieder en duo Op.14 de Reger, Die verklärte Nacht de Fried…

Ainsi, à part la tartelette seule qui est un peu mitigée (agréable mais oubliable, proche de l'indifférence), la seule présence de tartelettes indique que j'ai aimé. Un Tx3 n'est donc pas une note « moyenne », mais au contraire déjà la marque des grandes œuvres – la différence avec les deux degrés supérieurs relevant de ma plus arbitraire inclination.

Exceptionnellement, dans les cas graves, il arrive que je distribue des tartelettes au citron meringué, qui sont à la vraie tarte au citron ce qu'est Bachar el-Assad à Gandhi.


Je n'ai pas aimé du tout, du tout. Ça ne me parle pas / c'est moche.
Exemple : L'œuvre orchestrale d'Olga Neuwirth.


C'est insupportable, grotesque, scandaleux. Et surtout ça fait mal.
Exemple : L'œuvre pour orgue de Philip Glass.


Je suis mort.

Je mets ces diverses tartelettes quand je suis sur Classik parce que ça m'amuse, que ça fait un repère visuel, que ça permet de provoquer gentiment, mais ça n'a pas grande utilité : ce ne témoigne que des déviances de mes goûts, et ne garantit rien sur vos propres dilections. D'où l'intérêt des mots, qui permettent de caractériser plutôt que de noter…

mercredi 8 mars 2017

La Tragédie de Salomé de Florent Schmitt – l'histoire de la version originale


    Je profite d'avoir entendu la version originale intégrale d'une heure hier, en concert (gratuit !), pour opérer un petit bilan sur la question.

    Ne pleurez pas si vous ne l'avez pas vu passer, c'est bien fait pour vous, j'ai pris le temps de l'annoncer, comme chaque mois, dans le planning musical des concerts occultes d'Île-de-France (section « raretés symphoniques », on ne fait pas plus clair).

    On ne joue à peu près jamais Schmitt, mais il reste assez puissamment installé dans l'imaginaire collectif. Il est vrai qu'entre l'ampleur de l'orchestration de ses grandes œuvres (qui limite leur diffusion aux grandes salles et aux concerts à vaste effectif) et sa réputation politique peu avenante, on le documente de loin en loin au disque (on n'a pas tout, mais on trouve tout de même un assez grand nombre de choses), très rarement au concert.

    Avant qu'on n'émette des hypothèses purement politiques à son absence, je place en annexe quelques éléments sur cet aspect.



[[]]

La fin de la version originale la Tragédie de Salomé par le Philharmonique de Rhénanie-Palatinat dirigé par Patrick Davin (chez Naxos). L'encore meilleure jeune version parisienne devrait paraître par des canaux officiels prochainement, je l'espère (voir informations ci-après).



1. La commande de Salomé

L'objet même de cette Salomé de Schmitt est un sujet de curiosité.

¶ L'époque adore le sujet : le sujet de Salomé a été au moins mise trois fois au théâtre musical français entre 1907 et… 1908 !  Création française de celle de Richard Strauss au Châtelet en 1907 (sur le texte littéral de Wilde, contrairement à la version de la création de 1905 à Dresde, en traduction allemande) ; création de celle d'Antoine Mariotte à Lyon, également inspirée de Wilde. Enfin, celle de Florent Schmitt, composée en quelques semaines en 1907, pour une création en novembre.

Robert d'Humières, traducteur renommé de Kipling, souhaitait monter un mimodrame sur le sujet de Salomé (quelque part entre le ballet et la pantomime) avec la danseuse Loïe Fuller dans le premier rôle. Admiratif du Psaume XVLII , qu'il avait entendu en concert (créé l'année précédente), il souhaitait précisément la collaboration de Schmitt, qui accepte immédiatement. En deux mois, la partition est écrite.

¶ La création prévue au Théâtre des Batignolles, à peine renommé Théâtre des Arts par Maurice Landay qui vient d'en prendre la direction. C'est l'actuel Théâtre Hébertot, boulevard des Batignolles dans le XVIIe arrondissement – 630 places.
[Attention, il existe quantité d'autres théâtres parisiens ayant porté ce nom, à commencer par l'Académie ci-devant royale de Musique, sous la Convention, mais aussi le Théâtre Antoine, le Théâtre Verlaine / Music-Hall de Montmartre ou le Théâtre d'Application…]

¶ Contrairement au gigantesque Psaume et aux tropismes habituels de Schmitt, l'orchestration fut conditionnée par l'exiguïté du théâtre : les cordes étaient réduites, les bois par 1 (c'est par 2 dans un orchestre du début du romantisme, et régulièrement par 4 ou 5 chez les contemporains de Schmitt), 1 trompette, 2 cors (là aussi, plutôt 4 chez Brahms et Tchaïkovski, davantage encore après), 2 trombones (en général par 3, même chez Mozart), 1 harpe, timbales et quelques percussions (tambour de basque, tam-tam chinois, grosse caise, cymbales).
Lorsque Schmitt en tire en 1910 la Suite qui est la seule qu'on enregistre et joue désormais, il étend considérablement son orchestre : bois par 2 (mais avec 1 piccolo, 1 cor anglais, 1 clarinette basse et 1 sarrusophone en sus, jouables ou non pas les mêmes instrumentistes), 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, 1 tuba, 2 harpes, et davantage de percussions (dont caisse claire, timbale et glockenspiel). Créée aux Concerts Colonne en 1911, il disposait de la place nécessaire pour étendre son orchestre. [anacoluthe cadeau]



hébertot
État actuel de l'intérieur du Théâtre des Arts – désormais Théâtre Hébertot.



2. La Tragédie de Salomé intégrale

    Schmitt n'a donc jamais réorchestré l'ensemble de l'œuvre d'origine, destinée à soutenir une action dansée (pas exactement du ballet, c'était plutôt de la danse dramatique ou du mime agile). Pourtant, les plus beaux moments sont précisément, comme souvent (les récitatifs à l'opéra !), les pas d'action, tandis que la Suite, plus courte de moitié (une demi-heure), conserve essentiellement les danses – auxquelles s'ajoutent le Prélude et la fin.

    Le plus dramatique, le moins répétitif aussi, est donc perdu dans la version révisée – qui, honnêtement, ne sonne pas très différemment malgré la richesse de son instrumentarium (et je le dis après avoir entendu non seulement les deux, mais les deux en concert à six mois d'intervalle !). Y restent trois des six Danses, effectivement impressionnantes et déjà très dramatiques (j'étais en délire de pouvoir entendre ça en salle, en septembre…), ainsi qu'une partie de leur environnement, mais il faut, vraiment, écouter l'œuvre intégrale. Il en existe une version au disque, une seule, celle de Patrick Davin avec le Philharmonique de Rhénanie-Palatinat, chez Naxos.

    Musicalement, on y entend passer les gammes debussystes et le lyrisme schrekerien (Prélude), la Mer de Debussy (flagrant autour de la Danse des Serpents), des prémices du Sacre du Printemps (vers la Danse de l'Effroi) et bien sûr des motifs récurrents issus de l'école wagnérienne (quoique très peu mutants, vraiment ressassés).
    Le tout dans une sorte de décadence tranquille, de poème symphonique à la française, sensible au détail du climat plus qu'à la structure ou à l'urgence dramatique, et sans paraître emprunter, dans un ton très homogène et naturel malgré sa sophistication. Et l'extraordinaire diversité des épisodes. Les différentes danses font comme les Portes de Barbe-Bleue chez Dukas ou Bartók, autant d'univers s'ouvrent.

    Pour autant, le meilleur se trouve dans les parties intermédiaires qui décrivent les lieux ou les actions, en particulier tout ce qui a trait aux interpositions (et à l'exécution, à couper le souffle !) de Jean-Baptiste.



tragédie salomé
Affiche de la création.



3. L'argument

    La Salomé de Robert d'Humières est la moins redoutable de toutes : simple objet de l'admiration d'Hérode, elle provoque involontairement la mort de Jean-Baptiste – c'est Hérode, excédé de l'interposition du Prophète, qui le remet au bourreau. Et loin de jouir de son butin, Salomé, entendant des voix terrifiantes, la jette dans la mer – embrasant toute la nature, mer et volcans alentours (le mont Nébo est une colline de 800m absolument pas sis sur une quelconque faille).

    Chez Matthieu 14;1-11 et Marc 6;14-29, Salomé n'est certes ni une manipulatrice ni une lascive nécrophile comme chez Wilde, mais elle est tout de même celle qui ordonne la mort de Jean, fût-elle influencée par sa mère adultère et incestueuse.

    Tout l'argument est rythmé par les apparitions de Salomé en accord avec sa découverte sensuelle et les atmosphères successives du jour déclinant :
Danse des Perles (fascination enfantine aux flambeaux),
Danse du Paon (prise de conscience de sa beauté, mise en scène en haut des degrés par Hérodiade),
Danse des Serpents (avec ceux trouvés dans un recoin, qui épouvantent le couple royal),
Danse de l'Acier (baignée d'orgueil, reflets lumineux sur l'eau dans la nuit),
Danse des Éclairs (il fait nuit, Salomé apparaît dans des vapeurs lascives, c'est à l'issue de cette danse qu'Hérode se jette sur Salomé),
Danse de l'Effroi (après la mort de Jean, avant l'éclatement de l'orage final).

    Après le Prélude qui constitue la première scène, chacune des danses s'articule au milieu d'une scène complète. D'où l'intérêt de ne pas se limiter à la Suite – les trois danses centrales (Paon, Serpents, Acier) y sont supprimées, on perd la progression ainsi que tout leur matériau environnant.

    Je laisse le texte complet d'Humières, décrivant en détail les scènes, très beau, en annexe.



tragédie salomé
Grand succès, l'œuvre est demandée par d'autres théâtres.
Estampe de Lev Samuilovič Bakst pour un décor lors de représentations au Théâtre des Champs-Élysées en 1913 (chorégraphie de Boris Romanov).



4. 30 jeunes musiciens, 3 jeunes chanteuses, 6 jeunes chefs


    Outre le disque de Patrick Davin avec le Philharmonique de Rhénanie-Palatinat, chez Naxos, il devrait être prochainement possible de l'écouter en haute qualité sur le site du CNSM, puisque capté par les étudiants en métiers du son, une initiative récurrente de la maison qui permet déjà de découvrir de très belles choses, ou de suivre des cours publics, comme le font massivement les institutions anglophones.

     Et c'est une excellente nouvelle, parce qu'à la réécoute du disque Davin aujourd'hui, où l'orchestre paraît assez sur la réserve (c'est souvent le cas dans les enregistrements de cette formation pour la série Patrimoine de Naxos…), la version entendue hier n'était pas moins maîtrisée, et sensiblement plus ardente.

    Alain Altinoglu (professeur de la classe de direction du CNSM) avait habilement isolé des moments suspendus (notes tenues douces d'un quasi-solo, souvent) où les chefs pouvaient se succéder dans une œuvre sans interruption, et qui recoupaient assez bien les différentes sections : le chef en action quitte la scène, les musiciens soutiennent leur note le temps que le chef suivant batte une mesure entière, et puis tout le monde enchaîne sans heurt, un travail d'orfèvre qui ne s'entendrait même pas à l'oreille, sauf à être très familier de la durée de la mesure en question.
    On voit ainsi passer William Le Sage, Jordan Gudefin, Nikita Sorokine, Mikhaïl Suhaka, Gabriel Bourgoin et Romain Dumas, certains que j'avais beaucoup admirés en janvier dans la Deuxième Symphonie de Schumann.
    Dans une musique aussi « écrite » que celle de Schmitt, la différence de conception est évidemment moins flagrante – plus on avance dans le temps, moins l'invention personnelle prévaut ; néanmoins, même s'il a évidemment la partie la plus valorisante (les deux dernières danses), la gestion de la tension de Romain Dumas m'a beaucoup impressionné, celle-ci enflant, sans rien précipiter ni brailler, mais sans paraître connaître de limite, jusqu'à la fin… C'est enthousiasmant pour l'auditeur, et aussi révélateur d'un savoir-faire très sûr dans une musique qui est pourtant assez séquentielle, voire fragmentée, surtout dans ces derniers épisodes où l'agitation va et vient en segments assez brefs.

    Le toujours excellent Orchestre des Lauréats du Conservatoire mérite aussi de hauts éloges, pour tenir une partition aussi difficile avec une cohésion qui n'est pas identique à celle des ensembles permanents, mais qui est néanmoins de très haute volée… aucune défaillance, alors que dans cette formation très resserrée, chacun a une heure de musique très technique à assumer, sans interruptio : cordes en 9-3-3-2, trois sopranos pour faire le chœur et le solo, plus la nomenclature décrite à la fin du §1 (flûte, hautbois / cor anglais, clarinette, basson, 2 cors, trompette, 2 trombones, harpe, timbales, percussions).
    L'occasion de féliciter Paul Atlan (partie écrasante de hautbois et cor anglais, excellent aux deux), Arthur Bolorinos dans les très nombreux solos (onctueux et limpides…) de clarinette, ou encore David Busawon à la trompette – les trompettistes se plaignent souvent d'avoir peu de choses exaltantes à jouer, ici énormément d'accompagnants subtils et de contrechants, voire de thèmes… une quantité de jeu très inhabituelle, et qu'il tient remarquablement (avec un beau son, d'ailleurs).

    Quand on a dit que c'était gratuit, franchement, qui a dit que la vie culturelle parisienne était dispendieuse pour être exaltante ?

    Juste une remarque : il y a souvent un délai de transmission entre les professeurs et le service de communication, si bien que les programmes sont donnés tard, et pas toujours complètement. J'ai découvert dans la salle que j'allais entendre non pas la Suite (déjà une excellente nouvelle), mais le mimodrame intégral (un événement considérable) !  Je suis sûr qu'il y aurait eu davantage de monde dans la salle (assez bien remplie au demeurant, mais il n'y avait pas la queue dehors…) en mettant en avant le côté quasiment inédit d'une exécution publique de l'œuvre intégrale.
    J'abuse souvent de la bonté sans limites du responsable communication, qui me transmet en temps réel les informations dont j'ai besoin, mais les professeurs ont forcément en réserve les détails de ce type de grand projet assez en amont, il y aurait vraiment un effort de coordination à faire en interne, très profitable au rayonnement du CNSM.

    La presse musicale couvre très peu également (même Cadences…) ces manifestations, alors qu'elles sont, même indépendamment des programmes, d'un niveau égal ou supérieur aux grands concerts des grandes salles.

    Cette saison, entre les meilleurs jeunes chambristes en concert gratuit, les soirées lyriques et la découverte d'inédits absolus (Puig-Roget, Roland-Manuel, le cycle des Angélus de Vierne, cette Salomé…), le CNSM était vraiment le lieu où il fallait être !

    Refaites-nous cela souvent !



5. Annexes

En cliquant ci-dessous, ouvrez la notule pour accéder aux deux annexes :
► Florent Schmitt en politique (puisque le sujet revient sans arrêt) ;
► l'argument complet de la plume de Robert d'Humières pour son « drame muet ».

Suite de la notule.

mercredi 12 octobre 2016

Les plus beaux quatuors – les nouveautés commentées


Du nouveau dans notre petite liste de conseils en matière de quatuor. Cette fois-ci, pour qu'elle soit davantage utile, un petit bilan sur chaque corpus ajouté ou enrichi.

Avantage considérable dans ce répertoire : tous se trouvent en disque (et, l'exploration méthodique du répertoire étant chose récente, à peu près tous disponibles). L'originalité est déjà rare dans les concerts de quatuor, alors des corpus entiers, cela n'arrive à peu près jamais – sauf manifestation exceptionnelle, comme lorsque la Biennale de Quatuor de Paris propose une exploration minutieuse Chostakovitch-Vainberg !  Mais il faut de grands moyens et beaucoup de volonté.
        On ne rencontrera jamais, en dehors de ces circonstances très particulières, de concerts consacrés à un seul compositeur ; comme partie d'intégrale Beethoven éventuellement, et peut-être occasionnellement un tout-Mozart, mais le concert de quatuor est particulièrement codifié, on se doit de mélanger trois compositeurs d'esthétiques différentes. Et, pour arriver à remplir les jauges, en général des choses pas trop interlopes – le concert de quatuor étant déjà, en lui-même (à tort, d'ailleurs), la chose des initiés.


montgeroult cimetière
Le quatuor, occulté et inaccessible comme un ossuaire montgeroldien. Alors qu'il suffit d'en pousser la porte mal scellée.


Sont ainsi ajoutés ou complétés dans la liste constituée depuis octobre 2011 (dernière mise à jour en janvier 2015) :

Luigi Boccherini, considéré comme le créateur du quatuor avec Haydn, et chez qui l'on trouve quelques très jolies choses à condition de se donner le temps de chercher dans un corpus foisonnant.

Luigi Cherubini, qui ne se limitait nullement à l'aimable compositeur d'opéras-comiques moyens ou aux grandes fresques sacrées très impressionnantes de ses deux Requiem. Les quatuors centraux, en particulier, sont d'un enthousiasme et d'un panache très aboutis pour cette époque, lorgnant déjà vers le caractère des Mendelssohn.

Allors que ce sont surtout ses pièces pianistiques (très directes, d'un beau caractère mais pas toujours profondes) qui ont conservé leur réputation, les symphonies et les quatuors de Norbert Burgmüller témoignent d'un tempérament exceptionnel – n'eût-il pas été fauché si tôt, on tenait peut-être l'une des grandes figures du siècle.

♦ J'ai déjà dit à de nombreuses reprises mon admiration effrénée pour certaines œuvres du legs à Carl Czerny (la Première Symphonie il y a déjà longtemps pour un des premiers Carnet d'écoute, le Nonette plus récemment dans les Instants ineffables). Il figurait déjà dans la liste pour ses quatuors en ré mineur et mi mineur, à mon sens du niveau des derniers Schubert (ceux de Bruch peuvent y ressembler, mais ceux de Czerny ont, de surcroît, une qualité de facture assez équivalente) ; et voilà que je découvre il y a peu (un Carnet d'écoute en a parlé) que Capriccio a publié non seulement ceux-là dans une nouvelle interprétation, mais y a adjoint deux autres quatuors jamais captés !  Un brin moins superlatifs, mais deux disques de quatuors de Czerny, quelle orgie !

♦ Dans la veine assez archaïsante (au sens d'attardé) du romantisme danois, les quatuors de Christian Frederik Emil Horneman sont parmi les rares à mériter réellement le détour (même ceux de Langgaard, encore plus tard peuvent paraître ternes – alors Gade !). Le final tout de bon mozartien du deuxième quatuor est complètement hors de l'action artistique européenne de son temps (tard dans le XIXe…), mais on y trouve ce charme franc, dépourvu de tout souci de recherche, du compositeur qui fait de la musique pour elle-même, sans aucune velléité de laisser son empreinte dans le système musical. Un peu l'attitude d'Asger Hamerik.
Le reste de son catalogue n'est pas dépourvu d'attraits non plus.

♦ Gros coup de cœur pour les quatuors d'Eugen d'Albert, décidément plein de surprises – surtout célèbre pour ses opéras, et essentiellement Tiefland, sa Symphonie en fa est une merveille du postromantisme élancé, ses concertos pour piano laissent la part belle à un orchestre éloquent et poétique, et ses quatuors, donc, ménagent, comme les meilleurs moments des symphonies de Franz Schmidt, un équilibre spectaculaire entre ambition structurelle germanique et simplicité d'accès avec des thèmes très simples et directs.
Il en existe au moins deux versions, Sarastro SQ et Reinhold SQ, je recommande la seconde, beaucoup plus ardente (même si le dernier mouvement du 1 y est moins primesautier) ; néanmoins les deux sont très belles et n'occultent en rien les qualités de ces pages.

♦ Complété mon écoute des quatuors de Joseph Suk, très différents selon les interprétations (folklorisme du Quatuor Suk, concentration germanique du Quatuor Minguet – contre toute attente, je suis beaucoup plus convaincu par la seconde approche), mais en tout cas d'une densité et d'une finition digne des meilleurs représentants de la discipline en cette fin du XIXe siècle. Le Deuxième, moins évident, explore une veine un peu plus retorse qu'on n'associe pas d'ordinaire à Suk – quasiment autant décadent que postromantique. Voilà un compositeur, assez bien servi au disque, particulièrement mal au concert, qui ménage sans cesse des surprises si on se limite à l'image du gentil post-Smetana qui semble primer dans les consciences, et ne reflète qu'une part limitée de son legs – Zrani !

♦ Le quatuor en la mineur de Fritz Kreisler constitue une agréable surprise : son romantisme simple, dépourvu des vanités de la virtuosité, séduit avec beaucoup de douceur.

Volkmar Andreae, fameux comme chef brucknérien (rapide, extrême, cassant, ardent, exaltant la cursivité et la discontinuité, à l'opposé de ce qu'est devenue depuis la tradition brucknérienne mystico-hédoniste, assez contemplative et enveloppante), révèle des qualités très différentes comme compositeur : d'une simplicité presque néoclassique (en tout cas d'un romantisme très apaisé et consonant), son deuxième quatuor nourrit une forme de plénitude modeste, assez délectable. Le reste de sa musique de chambre (deux disques complémentaires ont paru chez Guild, mais Chandos a aussi commis au moins un disque) déroule les mêmes qualités, même si ce second quatuor en est le plus bel accomplissement.

♦ Autre figure faussement connue, Ottorino Respighi : ses trois cycles orchestraux tape-à-l'œil, son Tramonto, son opéra La Fiamma tracent un portrait commun, ou facile, qui ne rendent pas justice à tous les aspects du compositeur. Son intérêt pour les musiques des siècles précédents et sa perméabilité aux esthétiques plus décadentes ont nourri des œuvres beaucoup plus inattendues – Metamorphoseon modi XII ne ressemble à rien d'autre et constitue, je crois, une réussite assez saisissante.
Sans être forcément très atypiques, ses quatuors (en particulier celui en ré mineur, le moins intéressant étant le plus célèbre, le Quartetto dorico) disposent d'une intensité certaine et explorent de belles couleurs sombres et intenses, pas dénuées de personnalité (sans ressembler au Respighi habituel).

♦ Les quatuors de Kurt Atterberg, sans révéler la face la plus spectaculaire du compositeur (qu'il faut chercher dans les deux premières Symphonies, ou dans son poème symphonique Le Fleuve, sorte de miroir augmenté de l'Alpensinfonie, concis et discursif au lieu d'étalé et contemplatif), se distinguent, dans le répertoire, par leur calme intensité.

♦ Chez Darius Milhaud, si le Premier Quatuor évoque la qualité de celui de Ravel, les suivants versent davantage dans le contrepoint un peu cursif et filandreux, de ce Milhaud qui peut écrire à l'infini des choses variées, sans qu'on perçoive bien le message ou la direction. Mais j'étais passé à côté du Deuxième, qui sans valoir le premier, explore plutôt les mêmes franges.

George Gershwin a commis une délicieuse Berceuse pour quatuor, un type de miniature peu courant pour cette forme où les compositeurs ont en général à cœur de prouver leur métier et leur solidité d'écriture (témoin les quatuors de Donizetti, très accomplis, jamais pauvres comme peuvent l'être certaines portions de ses opéras). Aucune influence jazz ici, mais une brève gourmandise complètement accessible tout de même.

♦ Les très courts quatuors d'Alan Rawsthorne (dix à quinze minutes, pour une esthétique encore romantisante !) explorent une langue à la fois consonante et un peu tourmentée qui évoque assez l'atmosphère de ceux de Schoeck – en particulier le Premier. Le « Quatrième », resté inédit, s'approche davantage d'un Quinzième de Chostakovitch vif. Moins enthousiaste des deux autres (et des Variations), que je n'ai pas inclus (mais qui méritent l'écoute).
Belle découverte, qui se trouve en plus par l'excellent Maggini Quartet – mais la version des Flesch chez ASV, eux spécialistes des décadents plus que des anglais, est très bonne aussi.

Le corpus de Lars-Erik Larsson figurait déjà parmi les chouchous de CSS, mais je précise au passage que les Intima minatyrer , la part la plus délectable du corpus, sont en réalité une sélection du compositeur, tirées de l'ensemble plus vaste des Senhöstblad (« Feuilles de fin d'automne ») inspirées des poèmes d'Ola Hansson. Ce dépouillement serein, un brin aphoristique aussi, se pare de remarquables vertus contemplatives.

♦ L'ensemble des quatuors de Grażyna Bacewicz (prononcé Grajéna Batsévitch) documente une évolution stylistique passionnante de 1938 à 1965 : car, si elle évolue (assez logiquement) d'un style tonal sombre (dans l'esprit des opéras de Schmidt, Pfitzner ou Hindemith) vers une atonalité de fait, et de plus en plus libre, la qualité des œuvres ne semble pas du tout corrélée à l'esthétique. D'ordinaire, on se prend à regretter les expérimentations radicales qui ont peu cassé la puissance des ressorts de l'ancienne manière ; ou on trouve au contraire superflue la documentation d'œuvre écrites avant que le compositeur n'ait trouvé le style qui fait sa gloire… Ici, au contraire, les réussites semblent assez également réparties. J'aime en particulier la veine plus traditionnelle du 1 et les explorations du 4, mais chacun se dirige dans une direction légèrement différente des autres.
Après de longues années d'obscurité, deux intégrales ont paru quasiment simultanément (chez Naxos et chez Chandos). Une fois n'est pas coutume, je suis davantage séduit par celle de Chandos (les timbres de l'intégrale Naxos étant un peu gris, comme dans les prises de son de leurs débuts), mais les quatuors exaltés ne sont pas exactement les mêmes dans les deux séries, qui méritent donc de toute façon le coup d'oreille.
Bacewicz a aussi écrit un quatuor pour quatre violoncelles et, plus original, un autre pour quatre violons (assez réussi !).

♦ Dans le même domaine de l'atonalité douce, le quatuor de Bo Linde mérite le détour : très expressif, et sans recourir à aucun expédient auquel on associe souvent le quatuor contemporain. Simplement de la musique bien faite, qui regarde sans doute un peu vers le passé (je vois que j'avais parlé de « Schoeck souriant » à son sujet)

♦ J'avais déjà confié mon exultation à la parution des quatuors de Georg Katzer, chouchou de longue date. Je vous renvoie donc à la notule correspondante.

♦ Au fil de ma découverte (récente, en août dernier) de la musique de chambre (hors piano, déjà écouté) de Charles Wuorinen, rencontre avec les quatuors, forcément. Ils ne sont pas aussi intuitifs que le généreux Sextuor à cordes ou que le genre de Zemlinsky sériel du Second Quintette avec piano, mais ils en partagent les qualités de directionnalité et de lisibilité. Intéressant pour varier les plaisirs. [Alors que le second XXe siècle, prodigue en quatuors, s'est à mon sens heurté mécaniquement aux dominantes de langages dont l'intérêt perceptible, pour le public, est davantage l'originalité du coloris que le discours musical à proprement parler – Boulez en étant l'archétype.]

♦ Le troisième quatuor de Daniel Börtz m'avait assez fortement séduit en l'écoutant, mais c'était il y a déjà dix-huit mois, il faudrait en toute honnêteté que je le remette pour en dire quelque chose d'un minimum pertinent. Néanmoins je l'avais mis de côté pour une liste de recommandations – assez pauvre en second vingtième pour les raisons évoquées à l'instant dans le paragraphe Wuorinen, je me permets donc de souligner son inclusion et d'inviter à la découvrir… et vais m'empresser de suivre mon propre conseil après la fin de mon intégrale Saint-Saëns.


montgeroult parc
L'âme de l'auditeur de quatuor, après avoir suivi les conseils de CSS.


Aussi découvert, dans cette période qui nous sépare de la dernière mise à jour (oui, vous les avez assurément comptés !), de beaux quatuors d'Elgar, Delius, ou bien les Deux pièces de Copland. Mais pas marquants au point de les inclure dans ce qui devait être une sélection serrée, et est devenu une sorte d'archive des quatuors à écouter et réécouter…

Pour bien faire, il faudrait commenter tous les autres corpus mentionnés, mais on voit bien la difficulté que cela poserait en temps et en format – ce serait quasiment plus un dictionnaire qu'une notule qu'il faudrait… et tant qu'à faire, avec plus de factuel et moins de subjectivité. Les dates de composition, la tonalité, les mouvements, le langage, la structure musicale interne, éventuellement la postérité… Mais pour cela, il existe déjà les volumes de Fournier – que je n'ai pas suffisamment lus pour mesurer s'ils incluent largement les titres que je suggère (ce ne serait pas une faute, une large part a paru durant notre récent âge d'or discographique, avec profusion de petits labels explorateurs, il aurait donc fallu dégoter toutes ces partitions, là aussi difficilement accessibles avant l'ère numérique absolue).

Dans l'attente, retrouvez ici la guirlande complète des conseils en quatuor.

jeudi 26 mai 2016

Aux origines : l'autre Cinquième Symphonie de Sibelius


Réécoute récente de la première version (1915) de la Cinquième Symphonie de Sibelius après une longue période à parcourir très régulièrement le reste du corpus.

Vous pouvez l'écouter en flux (il s'agit des quatre premières pistes du troisième disque).

On joue donc partout cette symphonie dans sa version définitive de 1919, amendée après la création ; le matériau thématique est le même, mais son traitement a considérablement varié – pas au point des deux Cinquième de Langgaard (totalement deux œuvres distinctes, les convergences sont même difficiles à déceler), mais d'une économie tout de même très différente.

Je suis d'abord frappé par la lisibilité de la version de 1915 : là où les « ponts » de la version définitive sont assez complexes (en particulier dans le premier mouvement, mais aussi dans les mutations du dernier), ici tout coule de source. À partir de la même matière de motifs, l'effet produit change considérablement : l'ordre et l'importance des thèmes, leur instrumentation, la gestion des plans, et surtout les transitions, tout cela a transmuté ; plus qu'un autre version, c'est une autre symphonie.

Comme je viens de vous entendre poser la question tout bas à vous-même et que c'est tout frais dans mon oreille (lu la partition et vu en concert la version de 1919 assez récemment, viens de réécouter les deux versions), je fais un point sur ce que j'ai entendu. Bien sûr, c'est de la généralité, davantage pour informer ceux qui ne l'ont pas écoutée (ou qui n'en sont que peu familiers) que pour livrer une étude instructive – tout ce que je vais dire saute assez bien aux oreilles, vous pouvez simplement cliquer sur le lien d'écoute et vous dispenser de me lire (pour cette fois).

sibelius 1915
Partition du début de la Cinquième Symphonie de Sibelius, dans sa version définitive (1919).

Au I, parfois élusif dans la version définitive, l'organisation thématique paraît limpide, presque une forme sonate, avec ses deux thèmes identifiables et leurs répliques, assez nettement organisés. Je suis très séduit par l'inversion du thème A et du choral d'entrée : au lieu d'une entrée simple et majestueuse, trompeuse sur les entrelacs retors qui suivent, on ouvre sur ce thème ascendant, malingre aux bois, qui s'épanouit un peu plus tard dans le choral (un peu comme pour l'appel de cors dans le dernier mouvement). D'une manière, générale, j'y trouve les équilibres plus séduisants, quelque chose de plus mordant, et de formellement beaucoup plus lisible, au lieu des longs ponts bizarres de la version définitive.

Le II, qui disparaît en 1919, est réalité joué attacca au I, et son caractère faussement cursif pourrait faire croire à un mouvement-pont, comme pour le III de la Sixième. Pourtant, il laisse entendre très nettement la transformation thématique, de façon beaucoup explicite : le thème folklorique du I y bruisse joyeusement avec des figures en trémolo qui annoncent le développement du dernier mouvement. Le fil logique y est tissé de façon beaucoup moins dissimulé, ce qui est agréable dans une symphonie aussi subtile – a fortiori quand on hérite d'un mouvement léger et radieux comme celui-ci, véritable pause d'allégresse douce, comme dans le II de la Deuxième de Mahler, et ce malgré son tempo rapide. Sa fin dévisse en revanche vers des chromatismes très riches et surprenants, et particulièrement chatoyants.

Le III est le même Andante mosso (Sibelus y adjoint quasi allegretto en 1919), mais au lieu d'une forme variation assez régulière, et qui tire vers l'évocation folklorique, la version originale reste, à l'inverse des autres mouvements, totalement dans l'allusion : les bois sont très audibles mais peu thématiques, et le thème de la variation est en réalité assez caché, discrètement énoncé par les cordes, en sous-main, et en l'évoquant, le contournant. Beaucoup moins mélodique et facile, beaucoup plus intéressant que la version finale.
De surcroît, placé ainsi au milieu de trois autres mouvements qui exploitent les mêmes motifs, ce mouvement apparaît davantage comme le seul moment d'alternance et de respiration, cerné de thèmes tous identiques (alors qu'ici, on se trouve davantage dans une logique de parenté).

Le IV est le point faible de la version de 1915 : bâti sur une série d'ostinati qui prennent l'exact même matériau que la version définitive, le discours manque toute la progression majestueuse. Le grand palpitement de cors, par exemple, ressemble à une marche harmonique au cœur de la pièce, contribuant à son évolution, alors qu'elle marque une forme de couronnement à chaque apparition dans la version de 1919.

Je tends à aimer davantage la version de 1915, donc, malgré le dernier mouvement moins abouti. Quelque chose de moins étale, de plus brut – sonne plus radical alors même qu'est moins complexe : c'est aussi un effet d'orchestration, plus acide, moins fondue, alors que la forme est considérablement plus simple (sauf à la fin du II et dans le mouvement lent).

sibelius 1915
Recueil Vänskä-Lahti des Symphonies.

Elle n'a été gravée, semble-t-il, que dans l'intégrale Vänskä / Lahti – c'est en tout cas le fruit de mes recherches et le verdict de quelques discophiles, mais je vous en prie, faites-moi la divine surprise de me démentir, même pour une version sous le manteau ; Rumon Gamba vient par exemple de la donner, et même si son geste assez global, lyrique et lisse ne me tente pas trop ici, je serais curieux de varier les plaisirs. L'intégrale de Vänskä, très applaudie par la critique française à sa sortie, comme « authentique » (sans que je perçoive nettement les fondements de cette appréciation, je dois dire), a l'avantage de sa contemplation poétique, mais ne brille ni par son nerf, ni par ses couleurs, ce qui favorise évidemment le désir d'aller essayer des lectures alternatives.

La partition doit être une édition critique sous droits, ce qui la rend moins aisément disponible, et en tout cas chère – ce n'est de toute façon qu'une maigre consolation lorsqu'il s'agit de répertoire symphonique.

Considérant la quantité considérable d'intégrales Sibelius qui ont fleuri ces vingt dernières années, je m'explique mal pourquoi une Huitième (Neuvième…) Symphonie n'aurait pas sa place dans les coffrets.
Quand on se rend compte qu'il existe désormais des versions vidéos des éditions alternatives des symphonies de Bruckner (où la question de l'édition n'a tout de même pas le même impact fondamental, l'œuvre restant sensiblement la même), et jusqu'à des vidéos de la Symphonie en mi de Rott, une intégrale des lieder de Loewe ou des symphonies de van Gilse… tout espoir est permis à terme raisonnable pour un petit supplément discographique.

mercredi 8 octobre 2014

Claude DEBUSSY, auteur de 12 opéras — IV — Le monde sonore de Segalen : Orphée-Roi


On a vu que Debussy, très motivé par les propositions de son admirateur Segalen, l'avait engagé à une collaboration inspirée de son drame Siddhârta… avant de s'en retirer, vu la difficulté immobile du sujet (et, apparemment, le caractère très « écrit » du poème de Segalen).

Je ne connais pas de musique capable de pénétrer cet abîme. […] Je ne prétends pas à impossibilité, très simplement… cela me fait peur.

L'écrivain fut semble-t-il très déçu, mais Debussy lui propose immédiatement, dans la même lettre contenant son refus, de s'inspirer de sa nouvelle récemment publiée, Dans un monde sonore, pour façonner un opéra sur le thème d'Orphée — projet connu (si l'on peut dire) sous le nom d'Orphée-Roi.


La LYRE triomphante de la Tragédie, dans le premier Orphée composé : Euridice de Jacopo Peri — version Cetrangolo (chez Pavane).


(Les trois versions du livret intégral nous sont parvenues. Des extraits en sont reproduits ci-après.)

1. Le monde sonore de Segalen

Dans un monde sonore fait intervenir un narrateur à la première personne qui, dans le style blanc propre à la littérature de Segalen (sensiblement meilleur ethnologue qu'écrivain, à mon sens — je n'ai pas testé le médecin), rapporte (avec un assez grand nombre de dialogues) l'histoire d'un esthète des sons qui veut récupérer sa femme, partie aux Enfers (dans le monde vulgaire de la vue et du toucher), et la ramener dans la chambre sonore où il se berce de voluptés auditives.

— Tu vas me répondre étourdiment que c'est là une infirmité avec laquelle on peut vivre, et, sinon s'aimer d'enthousiasme, au moins se tolérer sans trop de contrainte… Eh bien ! non. Cette perversion dans son être sensoriel a tout bouleversé de ses manifestations affectives. D'abord nos goûts ont divergé, même les plus insignifiants. Et ces petits discords ne sont pas, je te l'assure, négligeables ; elle s'est mise à chercher partout la lumière, à se réjouir grossièrement quand il fait soleil, à s'égayer de couleurs vives, comme un enfant, ou… un sauvage.

[André se confie au narrateur.]

Je suis sans doute mauvais juge, n'ayant jamais été un enthousiaste (pour le dire avec mesure) de Segalen littérateur — sa postérité tient d'ailleurs davantage, et non sans raison, à son œuvre ethnologique.

Ce mélange de parole quotidienne légèrement relâchée et de jargon philosopheux a quelque de chose de poseur, maladroit ou un peu infatué, je ne sais, mais qui m'évoque un peu les prétentions des étudiants en lettres qui écrivent leurs premiers textes. En réalité, c'est surtout cette absence de sensation de rythme, l'impression de formules et de syntaxes qu'on pourrait indifféremment remplacer par d'autres, qui me donnent cette impression de « style blanc » (sans rechercher la simplicité cependant), et m'empêchent de m'immerger dans le propos ; on dirait davantage un texte de commentaire philosophique qu'une fiction, en réalité.

Il est possible que je passe tout à fait à côté, donc je ne m'attarde pas ici et passe à la collaboration avec Debussy.

2. Trois livrets

Il existe trois livrets rédigés par Segalen.

¶ Le premier est transmis acte par acte au fil de sa rédaction (novembre 1907 – avril 1908).

¶ Le deuxième, achevé en octobre 1908, prend en compte les remarques de Debussy.

¶ Le troisième, réalisé de 1915 à 1917, est largement détaché des contingences de la composition, après l'abandon de Debussy (pas complètement formel, Segalen le relançant jusqu'en 1916). Publication en 1921.

Debussy est initialement à nouveau enthousiasmé :

J'y vois précisément ce que je veux faire en musique… quelque chose de plus… ce serait ainsi mon testament musical.

Il continue très poliment à féliciter Segalen après réception du premier livret :

Les deux actes que vous m'avez envoyés me semblent presque définitifs. Il n'y aura plus qu'à les dégager des phrases parasites ; quelquefois aussi, le rythme est plus littéraire que lyrique. Pour mieux m'expliquer, je vous citerais – si j'en avais la patience – des pages de Chateaubriand, V. Hugo, Flaubert que l'on trouvait flamboyantes de lyrisme, et qui ne contiennent – à mon avis – aucune sorte de musique. C'est un fait que les littérateurs ne voudront jamais admettre, puisqu'il est plein d'un mystère qui ne s'explique pas.

Segalen se prête au jeu et fournit rapidement un second livret amendé.

Néanmoins, Debussy reste circonspect. Une conversation rapportée entre les deux hommes exprime assez bien ces réserves, qui sans s'accroître, demeurent sans cesse les mêmes :

DEBUSSY — Il y a dans ce quatrième acte trop de… trop de… (Les mains achèvent l'idée)
SEGALEN — Trop de matière ?
DEBUSSY — Oui… Non, pas trop de lyrisme. Il y en a beaucoup, et de bon. Mais je ne vois pas quelle oreille pourrait jamais supporter ça. J'ai d'abord lu d'un bout à l'autre, en me disant « c'est très beau ». Et c'est à la longue, en imaginant la réalisation, que j'en ai vu la surabondance.
SEGALEN — Mais c'est destiné à être raccourci, tassé.
DEBUSSY — Oui, mais c'est très malheureux, très embêtant d'enlever quelque chose, parce que la plupart est bien.

Finalement, Segalen part pour la Chine, Debussy traverse une relative crise créatrice, la guerre éclate, Debussy tombe malade… Le projet n'atteindra pas, ici encore, sa phase musicale.

On ne peut vraiment pas blâmer Segalen, qui tenait la porte grand ouverte :

J'ai nettement posé à Debussy qu'Orphée prime tout dans la mesure où Orphée aura vraiment besoin de moi. Et d'ailleurs, jusqu'à la veille de mon départ en Chine, je me réserve tous les droits à demeurer. Simplement : je vais comme si je partais.

Quand on considère l'importance de ce voyage dans la carrière de Segalen, cela ne peut que laisser rêveur sur l'importance qu'il attachait à devenir le librettiste de Debussy plus que tout autre chose.

3. Quelques raisons de l'échec

À l'origine, en 1907, Debussy voyait un Orphée non chanté (on retrouve là le même désir de procédé alternatif que pour le Diable dans le Beffroi, où Debussy souhaitait à l'origine faire seulement siffler le diable), et semble regretter le chemin suivi par Segalen :

Quant à la musique qui devait accompagner le drame je l'entends de moins en moins. D'abord, on ne fait pas chanter Orphée, parce qu'il est le chant lui-même – c'est une conception fausse, il nous restera d'avoir écrit une œuvre dont certaines parties sont très belles.

Le « nous » est assez significatif de l'implication de Debussy dans ses livrets, se considérant co-auteur de textes dont il n'a pourtant fourni que le sujet et les orientations dramaturgiques.

Les autres problèmes, signalés par les auteurs, tiennent au caractère ambitieux, totalisant, wagnérien du poème de Segalen. Et, de fait, son écriture se révèle très descriptive, souvent auto-commentatrice : Debussy souhaitait de l'espace pour créer ses atmosphères, là où Segalen précise tout (avec une dimension contingente assez prosaïque à mon sens).

Segalen, plus tard, admettra lui-même avoir profité de cette expérience pour chercher plus d'épure et de maîtrise dans dans son style.

Tout cela explique que Debussy ait laissé, au fil des remaniements et des propositions de Segalen, ses refus s'accumuler — quel degré d'enthousiasme, quel degré de conscience de l'incompatibilité stylistique avait-il, c'est difficile à dire ; mais on voit bien que ce projet était finalement assez peu avancé du côté musical, Debussy n'ayant jamais vraiment décidé ce qu'il voulait y faire.

4. Segalen dans le texte

Orphée-Roi, comme Siddhârta, a été publié séparément, mais émanant directement de la commande de Debussy, et non d'un projet antérieur, il nous donne une meilleure idée de ce que pouvait être le livret à venir — même si, lors de l'achèvement de 1917, l'auteur s'est sûrement permis de l'étoffer, n'étant plus contraint par la musique ni par la scène.

Voyez par exemple le début du premier acte :

Suite de la notule.

lundi 17 octobre 2011

[Sélection lutins] Les plus beaux quatuors à cordes


1. Principe

Sur le modèle des symphonies, une liste d'oeuvres que les farfadets de céans ont trouvé particulièrement intéressantes. Avec des astérisques pour les oeuvres les plus remarquées, soit au sein du corpus du compositeur, soit vis-à-vis de l'ensemble du répertoire.

Liste subjective bien sûr, dont l'intérêt ne porte pas tant sur la mention des "grands noms" (difficile de décider où ils s'arrêtent, mais ils avaient quelque peu monopolisé l'attention lors des réactions sur la publication autour des symphonies) que sur les suggestions de découverte. Suggestions qui suivent en l'occurrence uniquement mon goût personnel, mais qui peuvent mener, je crois, sur des veines assez richement pourvues.

Comme pour les symphonies, on remarquera aussi que ce n'est pas là - de mon point de vue - que s'est le mieux réalisée la créativité du second vingtième siècle, bien plus féconde dans les formes libres pour ensemble.

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2. Présents et absents

Suite de la notule.

mercredi 10 août 2011

[Sélection lutins] Les plus belles symphonies


De façon tout à fait subjective bien sûr, une sélection de symphonies que je trouve particulièrement enthousiasmantes. Bien sûr, ce n'est une garantie de rien du tout, mais si cela peut attirer l'attention sur des pièces spécifiquement intéressantes et consciencieusement peu données... Les plus célèbres peuvent servir d'étalon pour les lecteurs les plus récents.

La double astérique indique les oeuvres qui m'enthousiasment sans réserve, l'astérique simple indique les symphonies qui (me) sont particulièrement notables chez un compositeur.

Une présentation globale de ces titres est en cours dans les ateliers de CSS. Certains figurent déjà dans ces pages, et vous pouvez les retrouver par la boîte de recherche à droite (ou en saisissant « Carnets sur sol Untel » dans un moteur de recherche généraliste).

Liste :

Suite de la notule.

mercredi 19 janvier 2011

Quelles raretés manquent sur scène ?


On souhaite souvent, sur Carnets sur sol, que des raretés soient jouées. Mais de quoi parlez-vous, à la fin ?

Voici une petite liste de souhaits, limitée au domaine de l'opéra (sinon, c'était la mort du petit cheval) ; loin d'être exhaustive évidemment, mais elle peut donner une idée de certains pans totalement négligés du répertoire, alors même qu'on ne joue que quelques titres dans une période ou un style.

Les lutins locaux sont évidemment tout disposés à préciser la raison de leurs choix aux habitués comme aux visiteurs de passage.

LEGENDE :
| * : disponible au disque
| ** : il existe des enregistrements, hors commerce, auxquels j'ai eu accès
| *** : je n'ai aucun enregistrement, mais j'ai lu ou joué la partition
| **** : totalement indisponible, bandes sonores comme partitions (j'ai en revanche pu lire le livret dans certains cas)

Evidemment, il est toujours possible que la disponibilité d'enregistrements nous ait échappé... On peut opportunément nous le préciser en commentaire ou par courriel.

Suite de la notule.

mercredi 29 décembre 2010

Histoire de l'opéra allemand : essai (raté) de schéma


Contrairement aux développements de genres et styles parallèles dans l'histoire de l'opéra français ou aux ruptures dans l'histoire de l'opéra italien, l'opéra allemand suit en réalité un chemin assez linéaire, qui ne se complexifie qu'à l'orée du XXe siècle.

Toutefois, à cette date, les courants et les langages deviennent si riches, si complexes, s'entrecroisant et se contredisant jusque chez un même compositeur, et quelquefois menant deux courants idéologiquement antagonistes à des résultats sonores similaires... qu'il est assez difficile de proposer cela sous forme synthétique. On serait incomplet, ou bien allusif et obscur, ou au contraire trop détaillé.

En l'occurrence, le résultat sera trop touffu pour les lecteurs plus néophytes.

Bref, le résultat de cette tentative n'est pas satisfaisant, mais on le livre tout de même, à titre de repère (un tiens valant mieux...)

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1. Exception hambourgeoise : un seria local

L'opéra allemand n'existe pas au XVIIe siècle en tant que genre. Il existe peut-être des partitions expérimentales enfouies, mais je n'en ai jamais vu, et elles resteraient de toute façon marginales.
On cite une Dafne de Schütz (1627), dont seul le livret subsiste, mais rien qui puisse permettre de documenter un genre en tout cas.

Il faut attendre le XVIIIe siècle pour voir apparaître des exceptions locales. On jouait alors l'opéra italien partout en Europe, sauf en France, et plus précisément cet opéra seria. Ce genre opératique était né en Italie de la fascination croissante pour la voix comme instrument, au détriment du projet original d'exalter un poème dramatique par la musique. On y trouvait des airs clos (dits "à da capo", c'est-à-dire de forme ABA') très virtuoses, entre lesquels l'action avançait rapidement par des "récitatifs secs" (une écriture rapide et peu mélodique, calquée sur la prosodie italienne et uniquement accompagnée par la basse continue).

Il a cependant existé, pendant des périodes plus ou moins restreintes, des exceptions locales en Europe (cour de Suède par exemple), et spécialement dans certaines villes d'Allemagne. On y écrivait aussi du seria, avec les mêmes recettes... mais en langue allemande.

Quelques compositeurs célèbres se produisirent à Hambourg : Haendel (son premier opéra, Almira, Königin von Kastilien, était en allemand sur un livret adapté de l'italien) et Telemann, mais aussi Reinhard Keiser, qui produisit près de 70 opéras, et quasiment tous pour Hambourg. On trouve aussi mention de Philipp Heinrich Erlebach, Georg Caspar Schürmann ou Johann Christian Schieferdecker, dont certaines oeuvres sont disponibles au disque, mais qui n'ont pas, aujourd'hui encore, de grande renommée.
L'Orpheus de Telemann, comble du syncrétisme, mêle même des airs en italien et des choeurs en français, selon le caractère recherché, à une trame allemande.

L'opéra hambourgeois est un opéra virtuose, bien écrit, qui adopte certaines tournures harmoniques spécifiquement germaniques, et dont les récitatifs sont par la force des choses assez différents des italiens... mais il ne s'agit que d'une adaptation limitée géographiquement d'un genre qui vient de l'étranger. On est très loin d'un opéra proprement national.

2. Le Singspiel, première forme originale

Au milieu du XVIIIe siècle, apparaît une forme nouvelle, une version comique de l'opéra, qui s'apparente à l'opéra comique français : des "numéros" musicaux (airs, ensembles, parfois pièces d'orchestre...) clos sont entrecoupés de dialogues parlés, le tout étant en langue allemande.

La forme trouve probablement son origine avec les miracles du XVIIe siècle, mais on considère que ses "inventeurs" sont Hiller & Weisse, qui collaboraient ensemble vers le milieu XVIIIe siècle.

C'est le genre dans lequel sont écrits les opéras allemands de Mozart : Bastien und Bastienne, Die Entführung aus dem Serail, Die Zauberflöte. Peu d'oeuvres d'autres compositeurs de l'époque sont disponibles au disque : Holzbauer par exemple, qui est extrêmement intéressant ; ou (Paul) Wranitzky dont l'Oberon, König der Elfen (1789) est un bijou déjà très romantique, bien plus moderne que la Flûte Enchantée (1791) par exemple.

Ainsi, la naissance d'un opéra réellement attaché à la langue allemande se fait sous la forme comique et hybride du parlé et du chanté. Ce qui n'aura pas une conséquence durable sur son évolution.

3. Développement sérieux du Singspiel

Suite de la notule.

samedi 20 novembre 2010

[Atmosphères] Wilhelm Stenhammar : la paix mélancolique


Il arrive fréquemment, chez l'un ou l'autre auditeur, de se trouver à la recherche d'atmosphères particulières, qui ne se rencontre pas nécessairement en priorité chez les "grands compositeurs", dont les écritures très typées ne correspondent pas forcément à certaines émotions simples.

C'est pourquoi CSS se propose, de temps à autre, de cibler une émotion et de proposer des musiques qui la suscitent ou la secondent. Il existe évidemment une part non négligeable de subjectivité dans l'entreprise, mais c'est aussi un moyen intéressant de brasser du répertoire un peu différemment.

Aujourd'hui, je m'attacherai à un compositeur dont je pense depuis ma première écoute qu'il aurait sa place dans les salles de concert auprès d'un large public. Non pas que ce soit à proprement parler un génie méconnu, mais il occupe un créneau émotionnel prisé du grand public et qu'on trouve finalement assez peu dans les oeuvres du "grand répertoire".

Suite de la notule.

jeudi 20 août 2009

Découvrir le lied : essai de discographie réduite et essentielle

Lied et lieder, une discographie essentielle (essential discography)

(Remarques pratiques : Si le texte vous paraît trop petit, vous pouvez utiliser sous Windows la commande "Ctrl" + "+". Ou bien le zoom de votre butineur préféré. Par ailleurs, cet article se trouve également ici pour que vous puissiez, si cela vous paraît plus pratique, le télécharger sur votre disque dur pour consultation ultérieure... ou impression pour faire les courses ! Il apparaît en pleine page, beaucoup plus agréable à lire.)

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Pour prolonger notre série d'initiation au lied, on tente ici un essai de discographie très sélective, équilibrée autant que possible entre les époques, différents types de voix et d'interprétation, et tâchant de recouvrir aussi bien les incontournables célébrités du répertoire que les raretés souvent encore plus passionnantes.
Avec ces quelques disques, on peut estimer bien connaître l'essentiel du lied et bon nombre de ses meilleurs interprètes, chanteurs et pianistes. 

On a fait le calcul : si vous utilisez notre guide au plus serré, vous disposez de l'essentiel en 23 disques !


Quelques remarques formelles :

1) On a séparé les oeuvres que tout amateur de lied doit connaître de celles que nous estimons incontournables, mais qui ne sont pas forcément très connues (voire extrêmement peu, comme les lieder de Reger et Holl ou le cycle de Gurlitt...).

2) Le fond jaune indique qu'il s'agit d'un cycle de lieder avec orchestre (ou d'une interprétation avec orchestre). Cela n'a rien à voir avec une quelconque mise en valeur : souvent, les cycles orchestraux de lieder sont quasiment plus des poèmes symphoniques avec voix, plus musicaux que réellement une mise en musique d'un texte révéré.

3) On a essayé de diversifier les interprètes recommandés pour couvrir un spectre d'interprétations à la fois irréprochable et varié.

4) On adopte l'ordre chronologique d'exercice des compositeurs. (Entre parenthèses figurent les poètes et les labels.)

5) Lorsqu'on propose le choix entre plusieurs interprétations assez différentes et difficiles à départager, on essaie de placer la référence qui nous paraît la plus recommandable en premier.

Poèmes et traductions :

Dans le cas où il manquerait les textes (indispensables pour apprécier pleinement le genre), pas de panique, il faut consulter le site formidable d'Emily Ezust qui en contient énormément de traduits. Et s'ils y figurent non traduits, Google Traduction dégrossit un peu l'affaire. On essaie de préciser tout cela, mais nous n'avons pas tous ces disques sous la main à l'instant où nous rédigeons ces lignes...

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Compositeur

Oeuvre

Version

Commentaires

Indispensables célèbres

Première période : romantisme

Schubert

Die Winterreise

« Le Voyage d’Hiver »

(Müller)

Fischer-Dieskau / Moore

Prades 1955 (INA)

- Cycle fondamental, une marche dans et vers l'anéantissement.
- DFD dans ses meilleures années et dans un bon son, avec Moore concerné, la quadrature du cercle entre lyrisme et expression. Attention, pas de livret, il faut utiliser le site d'Emily Ezust, ou alors acheter plutôt la version Goerne / Johnson (Hyperion) avec traduction anglaise, ou pour une traduction française Fischer-Dieskau / Demus (très, trop lyrique). Goerne / Brendel, peut-être préférable à cette dernière, devrait logiquement comporter une version française.

Schubert

Intégrale

G. Johnson (Hyperion)

Une somme immense, à pricorer au gré des volumes disponibles séparément à la vente (l'intégrale existe d'un seul tenant, mais présentée de façon moins pratique - en mélangeant les interprètes et les sujets au profit de la chronologie - et surtout en ôtant les commentaires musicologiques et littéraires remarquables des notices de Graham Johnson). Traductions anglaises des textes allemands.

Schubert

Lieder (épiques et antiques)
(Schiller, Mayrhofer...)

Rolfe-Johnson / Johnson (Hyperion)

Deux volumes particulièrement aboutis de l'intégrale. Ils ont l'avantage d'être extrêmement convaincants tant au niveau des pièces que des interprètes, de ne pas être contemporains du Winterreise pour changer un peu les atmosphères, et de ne comporter qu'un nombre réduit de tubes, ce qui laisse ensuite toute latitude ensuite pour écouter ses interprètes favoris dans les standards dont on ne parvient pas à se débarrasser dans les récitals les plus courants... 

Schubert

Lieder (nocturnes)
(Goethe, Schiller, Ossian...)

Hampson / Johnson (Hyperion)

 

Schumann

Liederkreis Op.39

« Cycle de lieder » (Eichendorff)

Goerne / Schneider (Decca)

- Une sorte d'idéal romantique, sur des poèmes parmi les plus beaux de langue allemande, avec des teintes crépusculaires et mélancoliques, jubilatoires parfois aussi...
- Si l'on privilégie une version féminine, peut-être moins prenante mais tout aussi bien dite (quelques petites imperfections ici ou là, notamment au niveau de l'accent gallois), M. Price / Johnson chez Hyperion est également un excellent choix.

Schumann

Dichterliebe Op.48 

« L’amour du poète »

(Heine)

Fassbaender / Reiman (EMI)

- Une suite de miniatures ironiques sur l'amour déçu. 

- Fassbaender en accentue particulièrement la dérision amère ; le disque RCA, lui, contient en complément l'opus 90 et plusieurs lieder majeurs de Schumann. Enfin, la version disponible sur Carnets sur sol est tout aussi bonne et légalement gratuite, puisque ses droits d'auteur patrimoniaux et voisins sont arrivés à expiration.

 

ou Gerhaher / Huber (RCA)

ou libre de droits disponible sur CSS : Souzay / Cortot

Deuxième période : romantisme tardif
 

Wagner

Wesendonck-Lieder

« Lieder sur des poèmes de Mathide Wesendonck »

Minton / Boulez (Sony)

- Cycle de lieder sur les poèmes de la maîtresse de Wagner, épouse de son mécène d'alors. Ce sont largement des esquisses de Tristan und Isolde, également inspiré par leur relation. Le dernier lied a été orchestré seulement pour une sérénade d'orchestre de chambre sous les fenêtres de Mathilde, à l'occasion de son anniversaire. Les autres orchestrations (pas bien meilleures...) sont dues à Felix Mottl (l'assistant de Hans Richter pour la création du Ring). Cependant, l'oeuvre sonne mieux avec orchestre - au piano, on entend des silences et des redondances, un déséquilibre voix-piano aussi.
- Le problème réccurent est que la diction est totalement incompréhensible, ou alors avec peu de relief, chez la plupart des interprètes. La notre y échappe tout à fait, même s'il y a plus précis (Crespin / Prêtre chez EMI) ; la direction de Boulez fait de surcroît de l'orchestration là où il n'y en pas vraiment d'écrite.
- Le disque Sony est couplé avec de bons Rückert-Lieder, qui ne dispensent peut-être pas d'une version plus frémissante.

Brahms

Volkslieder

S. Genz / Vignoles (Apex)

Parmi les oeuvres très homogènes de Brahms (entre elles, et même à l'intérieur de chaque pièce), c'est là sans doute le corpus le plus avenant. Version très bien dite et chantée.

Troisième période : les mouvements décadents (postpostromantiques ou novateurs violents ou raffinés)

Wolf

Lieder
(Mörike)

Bär / Parsons (EMI)

- Les lieder les plus célèbres de Wolf, interprétés par une voix très claire (qui tient depuis des emplois parfois voisins du baryton dramatique, voire du baryton-basse !), très raffinée, idéal équilibre entre la simplicité et la sophistication. C'est précisément cette simultanéité bizarre qui est le propre de Wolf.
- Epuisé ou en voie d'épuisement, auquel cas on peut adopter le disque Goethe-Mörike de Kirchschlager / Deutsch Anakreons Grab (paru sous forme de livre-CD et sous forme CD).

Wolf

Spanisches Liederbuch

« Livre de lieder espagnol »

(Heyse & von Geibel)

von Otter / Bär / Parsons (EMI)

- Deux heures de lied sous sa forme populaire et joyeuse, mais toujours très travaillée chez Wolf. Sans doute le plus accessible de son corpus.
- Ce disque, un petit bijou vocal et verbal, est aussi épuisé ou en voie d'épuisement, auquel cas le disque Schwarzkopf / Fischer-Dieskau / Moore (EMI) est excellent... sauf en ce qui concerne les interventions de Schwarzkopf, pourtant d'habitude plutôt à son aise dans Wolf.

Mahler

Des Knaben Wunderhorn

« Le Cor merveilleux de l’enfant »

(Arnim & Brentano)

Bonney, Goerne (Fulgoni, Winbergh) / Chailly (Decca)

- Des Knaben Wunderhorn, fondé sur le recueil de poèmes populaires d'Arnim & Brentano, est aussi un recueil de chants au ton badin ou insolent, écrits et orchestrés brillamment par Mahler.
- Cette version est la plus complète du marché (car aucune ne contient absolument tous les numéros), soit un lied de plus qu'Abbado. C'est aussi l'une des plus spectaculaires orchestralement et des plus vivantes tout court. 

Mahler

Trois cycles :
- Lieder eines fahrenden Gesellen

« Chants d’un compagnon errant » 

(Mahler)

 - Rückert-Lieder 

« Lieder sur des poèmes de Friedrich Rückert »

(Rückert)
- Kindertotenlieder 

« Chants sur les enfants morts » (Rückert)

Hampson / Bernstein

(DG, existe également en DVD)

- Trois éléments indispensables de l'histoire du lied orchestral, conçu comme tel dès l'origine, même si Mahler est passé par une particelle (= version piano non destinée à publication), alors que la plupart des exemples précédents sont des orchestrations a posteriori, une fois la carrière des partitions faite en piano / voix.
- Il y a de surcroît quantité d'anecdotes attachées à leur composition dans la vie personnelle de Mahler, ce qui contribue d'autant plus à leur célébrité.
- Interprétation extrêmement incarnée, difficile de trouver beaucoup mieux.
- Moins cher, Henschel / Nagano, assez dans le même genre et avec le même programme, a paru chez Apex. Les petites budgets peuvent y aller voir aussi (sans attendre les textes qui sont chez DG...). On peut aussi citer, dans des cycles dépareillés, Siegfried Lorenz, Waltraud Meier, Dietrich Fischer-Dieskau, Brigitte Fassbaender, etc. Mais on préfère s'en tenir au plus petit nombre de disques possible, pour constituer cette discothèque 'essentielle'.
Mahler Das Lied von der Erde
"Le Chant de la Terre"
(Poètes chinois massacrés)
Thorborg / Öhman (parfois graphié Öhmann) / Schuricht
(domaine public, disponible sur CSS)
- Mahler rechignait à écrire une dixième symphonie, du fait de l'image de la malédiction qui pesait dessus depuis Beethoven et Schubert ; aussi, après sa Huitième, il imagine de présenter autrement sa prochaine grande fresque chantée, sous le titre de Lied, alors qu'il s'agit bien dans son esprit d'une symphonie - c'est au demeurant amplement autant une symphonie que la Huitième (pas moins en tout cas...).
Il utilise l'adaptation allemande de poèmes chinois assez méconnaissables, pour certains à partir d'une traduction française... avec de surcroît des ajouts de sa propre fantaisie ici et là.
- La version Schuricht dispose d'une atmosphère extraordinaire,  et le son est tout à fait bon pour l'époque (à part pour l'incident fameux de l'exaltée néerlandaise probablement nazifiante qui vient prononcer un petit slogan près du micro avant de sortir : on l'entend à peine, ce n'est absolument pas une gêne à l'écoute).
Pour les oreilles sensibles ou les âmes délicates, Klemperer, dans un tout autre genre, plus charnu mais sans sa lourdeur coutumière, est un enchantement.
[pour ceux qui n'aiment pas les versions anciennes :
Ludwig / Wunderlich / Klemperer (EMI)]
R. Strauss Vier Letzte Lieder
« Quatre derniers lieder »
(3 Hesse et 1 Eichendorff)
Te Kanawa / Soli (Decca) - Dans le versant ultralyrique et assez sirupeux du Chevalier à la Rose et d'Arabella, le grand classique du lied orchestral. D'une beauté hors du commun, il faut bien le reconnaître.
- Parmi les pléthoriques excellentes versions (Grümmer / R. Kraus, Stemme / Pappano, Janowitz / Karajan, Norman / Masur, Popp / Tennstedt, Della Casa / Böhm, Mattila / Abbado, Fleming /  Thielemann, Pollet / Weise, etc.), on a choisi celle-ci comme le meilleur équilibre entre la diction (secondaire mais appréciable), l'expression, la ductilité - et la présence de l'orchestre. De surcroît, le couplage avec d'autres lieder orchestrés de Strauss (nettement moins essentiels) correspondait mieux à notre projet que les autres couplages. Mais chacun peut aller voir ses chouchous et ne manquera pas de le faire s'il en a.
Berg Sieben Frühe Lieder
« Sept lieder de jeunesse »
(divers poètes)
von Otter / Forsberg (DG)
(version piano)
- Les Frühe Lieder sont encore dans un ton très décadent à la façon de Schreker ou du jeune Webern, tarabiscoté mais tout à fait dans une logique tonale. On préfère recommander la version piano, pour mieux goûter les délicieuses alternances tension-détente de l'harmonie, et tout l'intimisme sophistiqué de leur ton, mais ils ont été orchestrés par Berg vingt ans plus tard (très belle chose également).
- Les Altenberg-Lieder, eux, sont déjà du côté des recherches d'avant-garde de Berg, et appartiennent vraiment au coeur du vingtième siècle (les strates alla Schreker se font de plus en plus libres et inquiétantes). Le texte chanté est très bref, et l'orchestre tient la première place (souvent l'introduction, les ponctuations et la conclusion sont plus longues cumulées que la partie chantée...). Le travail orchestral tient véritablement de l'orfèvrerie, mais l'on n'est finalement plus dans le lied. [C'est d'ailleurs une constante : après Wolf, le texte, même s'il est très soigneusement choisi, devient de plus en plus prétexte à une expression essentiellement musicale. C'est aussi lié aux langages musicaux de plus en plus libres qui s'accommodent mal des inflexions naturelles de la voix parlée. Et à la prédominance au fil du temps du lied orchestral - un contresens d'une certaine façon par rapport à la nature initiale du lied.]
- On a choisi deux versions superlatives, mais qui ont le défaut d'être séparées, pour deux cycles assez court. Il est donc possible, pour économiser, d'acquérir en un seul volume Banse (Frühe) / Marc (Altenberg) / Sinopoli  (Teldec, avant que ce soit épuisé...), avec une direction extraordinairement précise et intense de Sinopoli, mais Marc vraiment en difficulté vocalement (ça criaille, même si ce n'est pas grave ici - mais on est loin de la magie de Price) ou Balleys / Ashkenazy (Decca), très détaillé, assez sombre et un peu froid (mais peut-être plus préférable car plus équilibré). Tout cela est excellent et, pour le coup, ce sont les versions orchestrales des Frühe Lieder, moins essentielles, on l'a dit, mais c'est une économie possible.
Berg Altenberg-Lieder
« Lieder sur des poèmes de Peter Altenberg »
M. Price / Abbado (DG)
Quatrième période : modernités et contemporanéité
Cycles contemporains Il existe bien sûr des cycles intéressants plus récents (en particulier Rihm), mais ils nous paraissent moins essentiels, aussi bien du point de vue de la célébrité que de leur intérêt intrinsèque. Il faudrait plutôt aller chercher du côté de la mélodie française symphonique : Poèmes pour mi de Messiaen, La Geôle & Deux Sonnets de Jean Cassou de Dutilleux, Pli selon pli (voire Le Soleil des eaux) de Boulez pour rencontrer des choses vraiment indispensables. Et qui, esthétiquement, doivent bien plus au lied que de la mélodie française. 
Au moins aussi indispensables, mais moins connus et commentés
(donc moins utiles pour nourrir la conversation, et peut-être moins urgents pour le néophyte qui voudrait pouvoir échanger)
Première période : romantisme
Wieck-Schumann Lieder Högman / Pöntinen (BIS) - Entre Schubert et Schumann, et certainement pas inférieure, inspiration et poésie au sommet. - Version superlative pour l'investissement des deux partenaires, la poésie et l'évidence du tout : peut-être le plus beau disque de lied du marché. Couplé avec d'autres indispensables de Fanny Mendelssohn-Hensel et Alma Schindler-Mahler, donc très économique.
- Pour aller plus loin : intégrale Gritton / Loges / Asti (Hyperion) ou  Craxton / Djeddikar  (Naxos). 
Deuxième période : romantisme tardif
On pourrait sans doute parler des lieder de Liszt, mais faute de disques vraiment monographiques (il n'y en a presque pas !), et surtout faute que le corpus soit totalement majeur (même s'il est passionnant !)... on s'abstiendra, en le mentionnant simplement pour mémoire.
Troisième période : les mouvements décadents (postpostromantiques ou novateurs violents et raffinés)
Reger Duos Op.14
(divers poètes dont Eichendorff)
Klepper / M. Borst / Deutsch (Capriccio) - Attention, cela dure à peine un quart d'heure, mais c'est un sommet de délicatesse, le cycle de duos à connaître dans le répertoire du lied.
- Version remarquable avec pianiste remarquable. Couplé avec d'autres duos (intéressants) dans le domaine du lied également.
Reger Lieder May / Renzikowski (Arte Nova) - Ce disque parcourt l'ensemble de la production de Reger, de puis la jeunesse jusqu'à la maturité, et révèle un raffinement décadent dont on n'imaginerait pas capable l'auteur des poèmes symphoniques rondement et tristounettement postromantiques. Un corpus majeur, tout un monde ; dans le même goût que Wolf si l'on veut, mais infiniment plus travaillé et personnel.
- Excellente interprétation, sobre mais habitée.
Schindler-Mahler Lieder
(dont
Novalis et Dehmel)
Högman / Pöntinen (BIS) - Un corpus vertigineux, dont on ne connaît malheureusement que très peu de titres, ceux publiés par Alma de son vivant (on se rappelle que son mari lui avait défendu la composition). C'est véritablement l'une des fulgurances les plus étonnantes de l'histoire de la musique, en pointe de la modernité et de l'invention chez les décadents, bien plus moderne (et, disons-le, plus génial) que Mahler dans les mêmes années, par exemple. A connaître absolument, quasiment tous ceux qui l'ont découvert ont été conquis... 
- Disque superlatif décrit plus haut (Clara Wieck-Schumann) et qui contient aussi du Fanny Mendelssohn-Hensel, donc un véritable achat économique et forcément enthousiasmant.
- Pour aller plus loin : intégrale (de ce qui était alors publié) Ziesak / Vermillion / Elsner / Garben chez CPO.
Langgaard Lieder Dahl / Stærk (Da Capo) - Un corpus étrange, avec une sorte d'hypertophie du discours, quelque chose d'assez véhément et épique, dans un langage qui reste relativement postromantique. Assez insolite, cette manière de traiter la petite forme avec les moyens de la grande, y compris sur la durée assez étendue des pièces.
- Belle interprétation pour pas cher (la seule au disque).
Webern Intégrale Oelze / Schneider (DG) - Dans le coffret de la seconde intégrale Boulez de Webern, la véritable intégrale qui contient (à peu près) tout en deçà des numéros d'opus, on trouve cette intégrale des lieder, par un couple de rêve (ductilité et naturel... surnaturels d'Oelze dans cette musique si difficile, et rondeur très assurée chez Schneider). Les premières oeuvres sont les plus intéressantes, de la tonalité stricte des Frühe Lieder à l'atonalisme libre des autres premiers cycles. Le sens de l'atmosphère de Webern, sans s'attacher plus que cela au mot en tant qu'unité, est proprement exceptionnel. Peut-être l'ensemble le plus émouvant, le plus prenant depuis Schubert... Rien de sombre dans ces premières pièces, juste une sorte de lassitude chaleureuse, comme accablée sous un été gorgé de soleil. A connaître absolument.
Gurlitt Vier dramatische Gesänge
« Quatre chants dramatiques »
(Hardt, Goethe, Gerhart Hauptmann)
Oelze / Beaumont (Phoenix) - Ici aussi, peut-être l'exemple le plus réussi de lieder orchestraux, car le texte est au coeur du traitement de Gurlitt, qui choisi quatre extraits fondamentaux du théâtre allemand pour en faire un traitement relativement récitatif, mais toujours lyrique.
- Oelze participe bien entendu largement à la réussite de l'entreprise par la justesse de son ton mélancolique mais détaillé. (On se souvient qu'Antony Beaumont avait écrit une fin alternative à celle de Philipp Jarnach pour le Doktor Faust de Busoni...)
Schreker Vom ewigen Leben
« De la vie éternelle »
(sur traduction allemande de Whitman)
Barainsky / Ruzicka (Koch) - Dans le versant purement instrumental du lied avec orchestre, un complément très bienvenu au Vier Letzte Lieder, bien plus sinueux et sophistiqué, moins direct aussi. Une orgie orchestrale du meilleur Schreker. [Il s'agit en réalité de l'orchestration de ses deux derniers lieder.]
- Peu de versions disponibles (déjà rares) sont satisfaisantes, celle-ci l'est pleinement.
Korngold Lieder Kirchschlager / Deutsch (Sony) - Beaucoup de poèmes anglais en VO (y compris du Shakespeare) dans les deux cycles proposés dans ce disque, mais Korngold mérite tout de même d'être mentionné, vu son esthétique, en tant que compositeur de lied. Extrêmement tonal, se fondant sur la plénitude des harmonies et des tensions-détentes, il serait assez à comparer à Mahler sans les grincements ou à R. Strauss sans le sirop, pour ces oeuvres-là.  (Leur date de composition est très tardive - années 40, et la conception de ces cycles a donc eu lieu en Amérique où Korngold s'installe comme compositeur de film dès 1934.)
- Magnifique interprétation, ronde, fruité, très dite, très maîtrisée aussi ; avec un piano présent et inspiré.  Il s'agit du premier récital discographique de Kirchschlager - son meilleur au demeurant, et d'une audace programmatique plus que notable, puisque ces Korngold sont couplés avec le premier cycle d'Alma Schindler-Mahler et des extraits de Des Knaben Wunderhorn de Gustav Mahler en version piano. 
Quatrième période : modernités et contemporanéité
Holl Lieder Holl / Jansen (Sonder) Robert Holl est surtout connu comme chanteur (encore en activité), mais son inspiration comme compositeur apparaît bien supérieure à celle de sa (bonne) qualité d'interprète. C'est une lecture très noire du lied, extrêmement tourmentée et qui reste cependant tonale ; cela se rapproche beaucoup de la couleur de Křenek (en mieux), ou du Berg des pièces orchestrales Op.6 et des Altenberg. En réalité, il s'agit d'un héritage direct de la décadence radicale, et ce n'est pas véritablement de la musique typée XXIe siècle que l'on entend là (encore qu'il y ait aujourd'hui beaucoup de courants postmodernes, néotonals ou syncrétiques - majoritaires d'ailleurs sur la stricte atonalité). Il n'empêche que pour le coup, on dispose d'un traitement étroit du texte et non pas de volutes abstraites ou d'une succession d'effets, et par conséquent, cela marche bien mieux pour le lied.
En tout état de cause, il s'agit d'un très bel ensemble. On peut s'en faire une idée sonore sur son site personnel (les CDs ne sont de toute façon pas faciles à trouver dans le commerce) ; et pour en savoir plus... on peut lire CSS. Ceci, par exemple.
Jalons historiques
(Pour comprendre les origines du lied, mais pas majeur du tout.
On s'est limité aux très célèbres, mais C.P.E. Bach, Zelter et Loewe peuvent permettre de comprendre également des choses.)
Mozart Intégrale Ameling (Philips) - Des miniatures très naïves, vraiment sous forme de romances. On se trouve vraiment au moment où la chanson populaire fusionne avec la bluette de salon (ou plutôt juste avant, puisqu'on est encore dans quelque chose de galant).
- Très belle interprétation souple et gracieuse d'Ameling, mais la version de l'intégrale Brilliant Classics (avec Claron McFadden pour moitié), de surcroît pour partie avec pianoforte (ce qui devrait procurer un brin plus de relief) devait tout à fait faire l'affaire, inutile de se mettre en dépense.
Beethoven An die ferne Geliebte
(Jeitteles)
Goerne / Brendel (Decca) - La première oeuvre expérimentale du lied : le ton est très simple, sans affèteries, mais il s'agit d'un cycle continu où chaque lied s'enchaîne directement aux autres (la partition ne marque d'ailleurs aucune discontinuité), comme un tout. De surcroît, le travail malicieux (mais pas drôle non plus, entendons-nous bien, c'est Beethoven), presque expérimental, sur le matériau musical, le retour de thèmes, la manière de variations sur les motifs déjà énoncés, l'unité générale, tout cela fait véritablement de la chanson légère une oeuvre à part entière, destinée à ceux qui sont capable de l'apprécier - et non plus l'importation de thématiques populaires, même s'il en est encore question.
L'oeuvre en elle-même n'est pas d'une beauté bouleversante, mais sa modernité presque insolente est vraiment impressionnante - et fondamentale pour la suite.
- On propose une excellente version, profonde et intériorisée, couplée qui plus est au Schwanengesang de Schubert, autre morceau majeur du répertoire - une économie de plus !

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Mais... à part l'allemand ?

On a  délibérément écarté les autres langues germaniques, scandinaves et nordiques du corpus, pour des raisons de vastitude de l'entreprise, de documentation disponible moindre... et surtout de nature. Le ton des mélodies nordiques est extrêmement différent du lied ; on parle d'ailleurs de mélodies scandinaves...  Et à juste titre, car il s'agit plus de miniatures rondes et un peu populaires. On pourrait presque parler de chansons (en conservant la mélodie pour le salon poétique à la française). 

Pour ceux qui sont intéressés, on peut déjà indiquer quelques pistes, comme Toivo Kuula pour la part finnoise et la remarquable anthologie Aulin / Rangström / Nystroem / Alfvén / Larsson (et accessoirement Alqvist /  Frumerie / Linde) d'Anne Sofie von Otter et Bengt Forsberg, extrêmement représentative de la meilleure école suédoise (récital « Watercolours  » chez DG). Grieg et Sibelius nous paraissent moins urgents. 

Il manque bien entendu, au sein même des compositeurs de langue allemande, un nombre important de corpus, mais nous les détaillerons plus volontiers dans un autre tableau en préparation, qui tentera de rassembler tous les excellents enregistrements de lieder de notre connaissance, tous compositeurs confondus, destiné donc à ceux qui connaissent déjà le répertoire, ou qui veulent partir à l'aventure, collectionner, etc. 

On a aussi remarqué non sans une indicible horreur, à l'heure de publier ce petit récapitulatif, qu'il nous manquait Erwartung et Pierrot Lunaire de Schönberg. Faute d'avoir été séduits par le premier en quelque circonstance que ce soit, les lutins ne citeront pas de versions pour l'heure, et chercheront. Pour Pierrot Lunaire, la version DeGaetani / Weisberg (Nonesuch) s'impose absolument : les autres versions, trop parlées, trop chantées, trop minaudées, ne nous ont jamais convaincu, alors qu'ici tout prend évidence et poésie.
On tâchera de mettre le tableau à jour en conséquence, mais pour l'heure, il se peut que nous n'en ayons pas le loisir.

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La recommandation des lutins ?

Voici à  à notre gré, sans considération de célébrité, les corpus les plus intéressants, par ordre chronologique : Schubert / Schumann / Wieck / Reger / Schindler / Gurlitt / Webern  / Holl. 


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Pour aller plus loin qu'une discographie ?

Un certain nombre de ces oeuvres et la plupart de ces compositeurs ont été abordés sur Carnets sur sol ;  on peut y accéder : 

- par l'index (pratique, mais encore incomplet) ; 

- dans la série d'introduction au lied

- dans la catégorie indépendante, consacrée à la mélodie et au lied

- en effectuant une recherche dans le petit moteur de la colonne de droite ('Fouiner').

N'hésitez pas, parce qu'il y a très probablement du matériel autour du corpus qui vous intéressera. Et amusez-vous bien. 

jeudi 12 février 2009

Nielsen, les trois premières symphonies

Pourquoi en parler ?

Les symphonies de Nielsen sont très peu fêtées, du moins jusqu'à une date récente, en France, et leur connaissance se limite très souvent aux plus modernes (et très intéressantes) Quatrième et Cinquième, fascinantes, qui se défendent très bien d'elles-mêmes. Mais qui éclipsent un début de corpus d'intérêt tout à fait majeur, pour d'autres raisons. Peut-être plus attachantes et séduisantes, les premières symphonies font valoir un élan, une forme de spontanéité très travaillée, si ce n'est tarabiscotée ; elles ont pour elles les vertus de la surprise et de la poussée roborative, elles réjouissent et tiennent émerveillé tout à la fois.
C'est pourquoi on pense qu'il faut peut-être en parler un petit peu. Et de façon plus urgente que les trois dernières, car elles ne trouveront pas aussi facilement défenseurs - elles sont nettement moins novatrices.

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Nettement moins connues que les 4 et 5, les trois premières symphonies de Nielsen portent encore le sceau de la musique scandinave romantique, dans un ton, particulièrement pour les deux premières, encore commun à ses prédécesseurs Grieg et Borgstrøm (l'un représentant la musique à programme et l'autre la musique 'pure'), même si les innovations formelles sont déjà indéniables. Par exemple dans les tournures mélodiques peu évidentes des deux premiers mouvements de la Deuxième. La préoccupation première de Nielsen étant souvent le rythme.

Dans ces premières symphonies, l'influence du folklore nordique tisse le lien avec toute une parenté qui débute à Berwald et va jusqu'à un mimétisme assez poussé entre la Première et celle d'Asger Hamerik - qu'on considère la parenté de ton entre le premier, le troisième mouvements de Nielsen et le scherzo du II de Hamerik. L'usage généreux des bois est également en commun - et ces cuivres en accents répétés, typiques d'une conception postclassique de l'orchestre, qui se trouve encore chez Schumann.
L'élan intarrissable - pour ne pas dire inextinguible -, lui, est très proche du meilleur Grieg et du meilleur Borgstrøm, ceux des ouvertures de Peer Gynt ou de Thora på Rimol, urgents, poétiques et dansants. Il parcourt les quatre mouvements, dans une délicieuse fièvre qui rapproche sans doute plus l'esprit de l'oeuvre des Quatrième de Mendelssohn et Schumann que du vingtième siècle explorateur des trois dernières symphonies de Nielsen.


Le début du deuxième mouvement de la Première Symphonie d'Asger Hamerik par Thomas Dausgaard et le Symphonique de Helsingborg - voir la note de CSS sur le sujet.

Le début du premier mouvement de la Première Symphonie de Carl Nielsen par Herbert Blomstedt à la tête de l'Orchestre Symphonique de San Francisco, pour sa seconde intégrale.

On pourra remarquer que la même tonalité n'unifie plus la symphonie, mais dérive d'un pôle à l'autre de l'oeuvre, sans que le compositeur ne se soucie de ce type d'équilibre tout théorique.

Le désordre thématique de la Deuxième, plus dans la mélodie même que dans la forme générale, parcourt les déséquilibres des caractères - les Quatre Tempéraments du titre : ainsi le premier mouvement allegro collerico fait-il succéder des états d'excitation, tandis que le deuxième mouvement au contraire (allegro comodo e flemmatico) collectionne les manques, avec ces rythmes décalés et ces instruments muets.
Cela se lit fort bien dans la partition :

I : en sept mesures, trois états se succèdent (rebonds, lignes frététiques, lyrisme démesuré) ;

II : un mouvement ternaire plutôt optimiste mais claudicant.
Le troisième mouvement, lyrique et distendu, aurait quelque chose du Ruhevoll de la Quatrième de Mahler... sans tension. Quelque chose de très spécifique, une mélancolie... flegmatique en quelque sorte. Enfin, la 'sanguinité' du dernier mouvement se caractérise par un rebond assez joyeux en fin de compte.
Il est vrai que ces Tempéraments ont été inspiré par une suite picturale comique à Nielsen, et qu'il n'y a finalement pas d'intention programmatique forte, surtout un clin d'oeil batti autour des indications de tempo et de caractère qui forment un tout.

La Troisième, bien surnommée Espansiva, se caractérise tout de suite par un ton beaucoup plus brahmsien (mais la Deuxième était déjà très personnelle et bien de son temps), à la fois dans une exubérance musicale qui confine à la profusion et dans une profondeur de ton accrue. Ainsi, tandis que le premier mouvement semble déborder de musique, le deuxième, en écho à la Quatrième de Brahms, débute sur un cor solo qui annonce un mouvement très introspectif. La danse reprend ensuite ses droits sur les deux derniers mouvements, très dansants, plus légers.
L'une des particularités de cette oeuvre est la présence, à l'exemple de la Deuxième de Langgaard qu'elle précède d'un peu plus d'une dizaine d'années, d'une brève intervention lyrique - d'une soprane et d'un baryton, sans texte, à la fin du deuxième mouvement qui prend alors une tonalité pastorale et suspendue, le tournant de la symphonie qui s'éclaire alors nettement. [Les deux chanteurs sont parfois remplacés pour économie respectivement par une clarinette et un trombone.]

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Quelles versions ?

Suite de la notule.

jeudi 5 juin 2008

Le disque du jour - XXII - Asger HAMERIK, Symphonie n°1

Asger Hamerik (1843-1923) appartient à cette catégorie de compositeurs nordiques qui ont perpétué jusqu'à une période très tardive un langage totalement romantique et consonant, souvent doté de programmes et de sous-titres.

Pour cette raison, ils sont considérés comme sans influence (avec quelque raison) dans l'histoire de la musique, dont ils participent pourtant, et méprisés, valeurs du progrès et de l'originalité obligent [1].
D'une certaine façon, leur classement dans la catégorie easy listening est tout à fait justifiée, ce qui n'enlève rien, au demeurant, à leurs qualités intrinsèques. A recommander chaleureusement aux néophytes.

Lire la suite et écouter les extraits.

Notes

[1] Des valeurs toujours primordiales aujourd'hui dans les modes d'évaluation de l'art. Le fait d'avoir énoncé la chose en premier ou d'avoir eu de l'influence est un critère fort pour juger de la qualité d'un compositeur - sauf pour Meyerbeer, ce qui est profondément injuste.

Suite de la notule.

jeudi 10 mai 2007

Magie du verbe

La parole a ceci de fabuleux qu'elle crée le réel. C'est pourquoi la découverte du pouvoir du mensonge par les enfants est toujours une grande expérience : ce qui n'est pas vrai peut être tout aussi convaincant que le vrai, et pas seulement dans le domaine de la narration fictionnelle[1].

Or, les capacités cognitives limitées de l'être humain lui demandent, afin d'être informé de la marche du monde, de recourir à une médiation, que ce soit via le bouche à oreille ou les médias. Ces médiateurs, même en les supposant à la fois fiables et de bonne foi - ce qui n'est pas nécessairement évident -, créent de la vérité à partir de leur seule parole : si on leur accorde crédit, ils créent ce qu'ils énoncent, démiurges nouveaux.

On l'avait déjà relevé lors d'une réalisation particulièrement audacieuse de ce nouveau paradoxe du menteur, dont les implications sont tout à fait maîtrisées par le personnel politique : ce que je dis est vrai du fait même que je l'énonce, même si c'est faux.
Plus récemment, nous revenions aussi sur plusieurs de ces usages, notamment autour du changement et de la fiction institutionnelle.

A présent, un petit exercice très simple sur l'actualité.

Suite de la notule.

Notes

[1] Comme on l'apprend depuis pas mal d'années, via Maupassant "l'illusionniste", aux collégiens.

Suite de la notule.

dimanche 8 avril 2007

Carnet d'écoutes - Les quatuors de Rued Langgaard - Kontra Quartet

Réécoute ce soir de ces étranges choses.


Le quatrième et dernier mouvement du Cinquième Quatuor.

J'aurai l'occasion de revenir sur Langgaard (prononcez "Lèngôr"), c'est pourquoi je me contente de commencer par le rappel de ce que j'avais pu écrire en guise d'introduction, il y a bien longtemps :

Suite de la notule.

dimanche 18 mars 2007

Exercice pratique

Nous avons récemment rappelé l'existence du cours théorique, passons à la pratique.

Et incidente sur le Noé de Halévy/Bizet.

Illustrations musicales idoines.

Suite de la notule.

mercredi 17 janvier 2007

Robert HOLL - liedersänger, liederkomponist

Plus le temps passe, et plus je m'attache à Robert Holl. Je me suis longtemps demandé - et je persiste à le faire - pourquoi, sans cesse distribué dans les rôles de basse les plus prestigieux de l'oratorio et du répertoire wagnérien à Vienne et Salzbourg, il rencontrait un tel succès auprès des plus grands chefs (Abbado, Harnoncourt, Boulez, Barenboim...), à part pour son étonnante solidité. La voix reste très ingrate, même si on s'aperçoit en regardant le texte, au lieu de contempler sa rustique barbe, que l'interprétation n'est pas dénuée d'intérêt.

Et au fil du temps, la familiarité, l'attachement naissent pour ce chanteur qui ne fascinera jamais les magazines par la brillance de son timbre et l'éclat de son aigu[1]. Une certaine musicalité, avec l'accoutumance, se révèle. Et aussi, lorsqu'on y regarde de plus près, une caractéristique assez admirable : il est l'un des seuls wagnériens aujourd'hui a pouvoir chanter correctement le lied, sans l'écraser sous un volume immense, un timbre dur et des flots d'approximations dans l'intonation. Sans être l'interprète ultime du lied[2], il y développe des qualités de musicalité tout à fait estimables, et son Winterreise que je louais abondamment pour l'accompagnement de Naum Grubert, n'est pas dénué de vertus, à défaut d'être fortement séduisant.[3] A défaut d'être séduisant, peut-être ; il s'agit cependant d'une valeur sûre en termes de musicalité.

Mais je découvre qu'il est également compositeur de musique pour piano et... de lieder ! Et quels lieder ! Dans la droite lignée des viennois décadents de la première moitié du vingtième, une engeance qu'on croyait disparue avec Krenek. On sent bien que la Seconde Ecole de Vienne est passée par là dans certaines discontinuités, certains sauts d'intervalles généreux, certaines 'antithèses' radicales d'accords successifs ; toutefois, le discours demeure tout à fait tonal et lisible, sombre mais juste raisonnablement sinistre. Très bien écrit pour la voix, à ce que l'on devine (je ne dispose pas encore des partitions), mais avec un piano d'une éloquence qui rappelle Medtner, Langgaard ou les meilleurs Korngold et Schreker. Robert Holl ose de superbes interludes au coeur même de cycles (mis à part le prélude et postlude des Poèmes de l'Intermezzo de Heine par Ropartz, je ne connais guère d'audaces de ce type dans un genre où le texte commande) ; il ne s'agit vraiment pas d'un chanteur qui écrit, mais bien d'un compositeur en tant que tel.

Je vous livre celui-ci, qui m'a particulièrement enthousiasmé :

Suite de la notule.

mardi 9 janvier 2007

Index thématique

Chocs esthétiques, Emerveillements et langue, Oeuvres et genres (Opéra), Oeuvres et traductions (Lied), Oeuvres (Musique intstrumentale), Oeuvres (Littérature), Oeuvres (Pictural), Portraits (Compositeurs), Portraits (Interprètes), Discographie, Comptes-rendus, etc.

On peut également se reporter à l'index alphabétique.

Complété petit à petit. N'est donc pas constamment à jour.

Suite de la notule.

jeudi 28 décembre 2006

Charles TOURNEMIRE


1870 (Bordeaux) – 1939 (Arcachon)


Charles Tournemire est surtout connu pour sa musique pour orgue, et pourtant, il a réellement écrit, et dans un volume a peu près égal, pour tous les genres. [mode biographique on] Contemporain de Louis Vierne et de Guillaume Lekeu, il a été l’élève de César Franck et a succédé comme organiste a Gabriel Pierné. [/mode biographique]


1. Musique pour orgue

L’œuvre pour orgue est en effet écrasante, et a pour mérite non négligeable, dans le recueil L’Orgue Mystique, de proposer la musique des 51 messes de la liturgie catholique.

Ces œuvres ont un parfum mystérieux, mues par quelque force intérieure, regorgeant de surprises, de petites voix incidentes qui apparaissent et disparaissent. Véritablement de la belle musique.

Cette œuvre a été enregistrée en nombre, et je recommande l’intégrale de Georges Delvallée (label Accord, 10 disques à tarif honnête), qui fait par ailleurs référence, ou les anthologies du même qu’on doit trouver.



2. Musique de chambre (piano seul, petits ensembles)

Beacoup de pièces pour piano, des pièces caractéristiques aux noms évocateurs, des feuillets d’album.
De la musique de chambre où, à part « Pour une épigramme de Théocrite » (trois flûtes, deux clarinettes et harpe), les effectifs sont tout à fait traditionnels.

La musique pour piano seul (peut-être d’un intérêt limité), n’a à ma connaissance guère été enregistrée. Impossible de l’affirmer avec certitude, une pièce est si vite glissée dans un programme, et je pense bien que cela doit exister, mais je n’ai jamais pu mettre repérer de musique de chambre de Tournemire (piano solo compris), contrairement à Franck ou Vierne, en dehors du disque INA-Mémoire vive, épuisé depuis longtemps.




3. Musique vocale (hors symphonies)

De nombreuses mélodies un peu pittoresques, beaucoup de Samain (l'auteur de Polyphème, repris et coupé pour façonner l’opéra de Jean Cras) et de Verlaine.

Aussi l’étrange Fresque du Saint Graal pour orchestre et chœur de femmes invisible. Plusieurs opéras : Le Sang de la Sirène, Nittetis, Les Dieux sont morts, Trilogie mi-orchestrale Faust/Don Quichotte/Saint François d’Assise (vers l’Idéal, naturellement), La Légende de Tristan.

Il y a bien sûr la partie plus franchement religieuse : un Pater noster dédié à Widor, la mise en musique des Psaumes LVII et XLVI, une Apocalypse de saint Jean (triologie sacrée en trois partie), La Douloureuse Passion du Christ (oratorio pour chœur, sept coryphées, grand orgue et orchestre), Il Polverello di Assisi (« Le petit pauvre d’Assise », cinq épisodes lyriques en sept tableaux), sans parler de sa Sixième Symphonie sur laquelle je m’empresse de revenir plus loin.

En dehors de la mélodie « Sagesse » Op.34 sur texte de Verlaine (par Bernard Plantey et Henriette Puig-Roget, disque épuisé INA-Mémoire Vive), aucune de ces œuvres n’a jamais été enregistrée.


4. Musique symphonique

Quelques poèmes symphonies en dehors des huit symphonies qui sont elles aussi mal connues. 1ère « Romantique », 2e « Ouessant », 3e « Moscou », 5e « De la Montagne », 7e « Les Danses de la Vie », 8e « Le Triomphe de la Mort » (titre ambigu, tout de même !). Elles ont été, comme en attestent les numéros d’opus, composées dans une quasi-continuité.

Toutes ont été enregistrées par Antonio de Almeida et l’Orchestre Symphonique d’Etat de Moscou (label Marco Polo), en dehors de la Sixième, dont il existe une version dirigée par Pierre Bartholomée à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Liège, le Chœur Symphonique de Namur, le Chœur Polyphonia de Bruxelles et le Chœur de Chambre de Namur (ces deux derniers dans la notice, et ces trois derniers dirigés par Denis Menier).
Avec Daniel Galvez-Vallejo en soliste et Luc Ponet à l'orgue : chez Valois (difficile à trouver, du moins à prix honnête), et une réédition plus récente, dont je m’aperçois seulement de l’existence, chez Naïve.

Incontestablement, ces œuvres ne jouent pas dans la même catégorie que leurs contemporaines de Roussel ou Ropartz ; celles de Tournemire sont beaucoup plus inventives quant à l’orchestration, beaucoup plus complexes du côté des textures.

Je ne les commente pas toutes, aussi je le précise en début de paragraphe pour les Première, Troisième, Sixième et Huitième que j'aborde.


    4.1. La Première Symphonie, « Romantique » Op.18


Commentaire DLM

Composée en 1900, bien plus tôt que les autres, elle est sans doute la plus séduisante, en quatre parties traditionnelles (le deuxième mouvement étant le Scherzo) avec des miroitements qui laissent entendre la filiation debussyste, mais aussi des rythmes plus déhanchés comme pouvaient en écrire Bizet ou Ravel, et une charpente qui dans les tutti paraît plus nettement bruckerienne.
Pour autant, cette variété est d’une grande grâce. Au fond, on peut penser assez nettement à Weingartner, mais la symphonie me semble mieux construite et plus riche dans le cas de Tournemire, avec des couleurs tout à fait imprévues. Chaleureusement recommandé.


Couplée avec la Cinquième dans le disque Marco Polo.


    4.2. La Deuxième Symphonie, « Ouessant »

L'oeuvre est dédiée « A Mme Charles Tournemire ». Déjà une grande forme de cinquante minutes, composée de 1908 à 1909 ; le compositeur en explique la genèse (c'est le cas de dire) : « Cette oeuvre a été inspirée par le fantastique d'Ouessant. Elle tend à la glorification de l'Éternel. »


    4.3. La Troisième Symphonie Op.43, « Moscou »


Commentaire DLM

Cette symphonie en mouvement continu (1912-1913, inspirée par la tournée de concerts en Russie de Tournemire) exploite, comme celle de Franck, un motif unique qui parcourt longuement toute l’œuvre. Avec le même risque de lassitude (ici évité), elle réussit à mon sens mieux que Franck, ne serait-ce que par l’invention de l’orchestration, pas très orthodoxe et sans doute inspirée par sa pratique d’organiste plus que par les traités en vigueur. Belle œuvre.


Couplée avec la Huitième dans le disque Marco Polo. Voir plus bas.


    4.4. La Quatrième Symphonie Op.44

Vous percevez à présent à quel point tous ces numéros d'opus sont proches. Composée exactement à la même époque que la Troisième, cette oeuvre est conçue comme une collection de « Pages Symphoniques », censées « exlater la poésie de la Bretagne ».


    4.5. La Cinquième Symphonie Op.47

1913-1914. Sans précision sur le programme, on s'accorde pour y reconnaître des éléments alpestres et c'est pourquoi elle est parfois surnommée « De la Montagne ». Dans la tonalité significativement bucolique de fa majeur (je ne vous fais pas l'outrage de vous rappeler Vivaldi, la Pastorale & Cie), elle est dédiée, comme la Deuxième, à sa femme.


    4.6. La Sixième Symphonie Op.48

Il s’agit, de son propre aveu, de « la première de mes œuvres de guerre ». Composée de 1915 à 1918 (oui, longuement car nécessairement entre deux séances d’organiste si pas de mobilisation). Elle emploie un ténor solo, des chœurs en grand nombre, un grand orgue et un grand orchestre.

Commentaire DLM

L’œuvre se fonde très largement sur les chœurs, et le ténor n’intervient que dans la seconde moitié de la seconde partie de l’œuvre, peu avant la conclusion. Les deux parties cumulées durent un peu moins d’une heure.
Le livret est rédigé par Tournemire lui-même, d’après les psaumes de Jérémie, Esaïe, Osée et Jean. Toute l’œuvre est conçue en tension autour de ces textes, avec de grandes ponctuations orchestrales dans le goût d’un Déluge de Saint-Saëns un peu plus instable harmoniquement. La couleur de l’ensemble rappelle considérablement, en réalité, les cantates du Prix de Rome de Ravel. A la fois cette limpidité encore romantique du propos, et une forme d’intranquillité latente, qui peut se déchaîner à tout instant – exactement comme lorsque le Barde porte-glaive interrompt le badinage insensé de Braïsyl. On y retrouve le même ton, le même lyrisme – et même des accents de Daphnis, lorsque, au terme de l’œuvre, le chœur perd le langage, ne poussant plus que des « a » extatiques dans le tonnerre de décibels de la fin.

Les deux parties, chacune divisée en plusieurs sections, telle une symphonie, mais sans aucune interruption à l’intérieur de chacune d’elles, développent comme souvent dans la musique symphonique de Tournemire des motifs répétés cycliquement et déformés, à la manière de César Franck, mais avec une subtilité et une grâce tout autres – et pas seulement du côté de l’orchestration. Quelques interludes déploient des miroitements debussystes saisissants qui attestent du cheminement (certains motifs sont même proches de Petrouchka, mais c’est à Daphnis qu’on pense le plus volontiers) vers la Huitième Symphonie, de ton bien plus spécifiquement français que les précédentes
La première partie contemple la dévastation du pays, tandis que la seconde emploie une traduction française du célébrissime psaume De profundis clamavi, où l’espérance en ce Dieu qui sauva déjà Israël est proclamée. Passée la moitié de la seconde partie, le ténor entre pour confirmer cette espérance en prononçant des paroles du Christ : « Je suis venu dans le monde, moi qui suis la lumière », et achevant ainsi : « Je vous donne la paix, je vous donne ma paix », le tout ponctué (et conclu) par des glossolalies en « a » du chœur.

L’œuvre, si on passe sur des mesures finales tonitruantes qui évoquent du Mahler mal compris, est très bellement orchestrée, avec des recherches de couleur, dans les modes de jeu des cordes (beaucoup de surprises écrites en pizzicato), dans l’usage colorant des bois, dans la présence très important des cuivres pour des configurations dynamiques piano. Au milieu de la seconde partie, une impressionnante apparition subito de l’orgue alors que l’orchestre se réduit et que semble s’ouvrir un abîme – ou s’illuminer le Ciel.
Le ton est farouchement épique, avec la déploration collective et combattive de la première partie « Nous souffrons au dedans de nos cœurs », mais aussi les interludes passionnés de Seconde Partie, qui disposent, avec un langage plus « moderne » cependant, du souffle des meilleurs passages du Roi Arthus de Chausson – un Chausson qui a entendu Richard Strauss.
Le mélange d’affliction et de combattivité – plus que de religiosité – qui parcourt l’œuvre lui donne une saveur toute particulière, et le relief procuré par l’ajout des chœurs et du sens est tout à fait délectable. Les interludes orchestraux, eux aussi, tirent toute leur force de ce contexte en exploitant un lyrisme qui, paradoxalement, transparaît moins dans les parties chantées.

Côté interprétation, on est surtout stupéfait par la clarté de la diction d’un chœur épique aux voix presque naturelles, peu vibrées, mais parfaitement en ton. L’intelligibilité, sur un texte pourtant arrangé par Tournemire, est quasiment totale, et c’est là un tour de force qu’on se plaira à louer encore et encore.
L’enthousiasme insufflé par Pierre Bartholomée est tout à fait communicatif, et nous lui en rendrons grâce, surtout que l’Orchestre Philharmonique de Liège semble parfois un peu prudent dans une partition totalement méconnue et manifestement difficile pour lui.
Comme Daniel Galvez-Vallejo a vite perdu sa voix à la douceur inimitable ! Ici, le timbre est assez nasal, un peu aigre, mais on retrouvera toujours la fraîcheur de ton qui le caractérise immanquablement.
Résultat parfaitement enthousiasmant. Chapeau et grand merci à la curiosité des interprètes !


(chez Valois)


(chez Naïve)


La suite.

Suite de la notule.

David Le Marrec

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