1. Programme
(Mercredi 25 novembre.)
Direction musicale : Alain Altinoglu
Orchestre de l’Opéra National de Paris
Mise en scène : Lev Dodin
Décors et costumes : David Borovsky
Lumières : Jean Kalman
Chorégraphie : Jourii Vassilkov
Valerii Galendeev : Collaboration artistique
Salome : Camilla Nylund
Jochanaan : Vincent Le Texier
Herodias : Julia Juon
Herodes : Thomas Moser
Narraboth : Xavier Mas
Page der Herodias : Varduhi Abrahamyan
Erster Jude : Wolfgang Ablinger-Sperrhacke
Zweiter Jude : Eric Huchet
Dritter Jude : Vincent Delhoume
Vierter Jude : Andreas Jäggi
Fünfter Jude : Gregory Reinhart
Erster Soldat : Nicolas Courjal
Zweiter Soldat : Scott Wilde
Erster Nazarener : Nahuel Di Pierro
Zweiter Nazarener : Ugo Rabec
Ein Cappadocier : Antoine Garcin
--
2. Situation
Placé dans les tout premiers rangs d'orchestre grâce à un bon plan hasardeux, et heureusement (effectivement Nylund est peu sonore et Altinoglu au contraire assez volumineux).
Mais, de là à Bastille, on sent les voix, et on se plonge de ce fait bien mieux dans le drame (la première fois aussi que je dispose d'un siège, qui sont parfaitement confortables...).
--
3. Oeuvre et mise en scène
Il faut dire que dans Salome, pas un instant de répit musical ou dramatique, tout est terriblement dense ; la traduction de Hedwig Lachmann est très comparable à l'essence du texte original de Wilde, et la musique à la fois exotique, voluptueuse, riche et violente est un sommet de l'histoire musicale, un grand flot de fulgurances ininterrompues.
La mise en scène de Lev Dodin bénéficie d'un bel espace scénique. Escalier à gauche (qui n'est malheureusement employé que pour la danse de Salomé), fenêtre à droite (d'où les Cinq Juifs contemplent, horrifiés et vindicatifs, les blasphèmes d'Hérode) ; au fond des cyprès ou des pics montagneux qui évoquent de très près les peintures mythologiques de Gustave Moreau - le procédé d'emprunt aux peintres est souvent heureux, il suffit de considérer l'usage de Böcklin par Richard Peduzzi pour le Ring de Patrice Chéreau à Bayreuth.
Derrière ces formes fantastiques se tient une lune qui traverse le fond de scène de cour en jardin durant l'intrigue. Ce n'est pas tout à fait un accessoire anodin : tous les personnages lui accordent une grande importance au début, en particulier le page et Salomé. Pour cette dernière, la lune est un symbole de chasteté, et lorsque Salomé contemple Jean-Baptiste, elle se met à clignoter furieusement, comme affolée par des signaux nouveaux qui parviennent à la jeune fille. L'équilibre entre jour et nuit fluctue lui aussi au gré de l'action (l'orangé dans le bleuté du fond de scène croît ou décroît selon le sens des scènes).
La mise en scène, malgré un côté modérément mobile et pas très originale, ménage un certain nombre de ces détails signifiants qui font vraiment plaisir à goûter, qui apportent à la pensée.
Il est un peu dommage que la lecture de Dodin se limite donc, dans sa direction d'acteurs proprement dite, à l'image d'une Salomé enfant qui fait son caprice. Certes, le texte comprend cela, mais de même que Salomé n'est pas une femme aboutie, en faire une enfant capricieuse est altérer sa dimension fondamentalement ambiguë, enfant qui désire, et adulte incapable de supporter la frustration - adolescente pour tout dire. Sa folie aussi se résume à un caprice, fort bien argumenté par Dodin au demeurant, mais qui ne grandit pas tout à fait le mythe. Comme Camilla Nylund incarne à la perfection ces directives, on s'en repaît sans murmurer, mais le metteur a manifesté suffisamment d'idées par ailleurs pour qu'on reste sur sa faim sur ce choix constant, sans réelles ambivalences.
Bref, on est très loin de la catastrophe de la Dame de Pique mais on retrouve peut-être le côté réducteur du concept unique.
Il n'empêche que le résultat est tout à fait délectable, entendons-nous bien.
--
4. Interprétation
Suite de la notule.