Paulus de Mendelssohn par Kurt Masur au TCE
Par DavidLeMarrec, mardi 8 décembre 2009 à :: Domaine religieux et ecclésiastique - Opéra romantique allemand - Saison 2009-2010 :: #1427 :: rss
Théâtre des Champs-Elysées, samedi 5 décembre 2009.
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Le premier oratorio de Mendelssohn, sans atteindre la hauteur d'inspiration d'Elias, dipose tout de même d'une très haute qualité d'inspiration, en particulier pour ses choeurs fugués, équivalents évidents, pour ainsi dire explicites, des Passions de Bach, ici transposées à un apôtre. Les textes sont intégralement issus des Ecritures, et au premier chef bien entendu des Actes des Apôtres.
Le paradoxe étant que cette mise à disposition en langue vernaculaire, d'un principe très réformé, a été exécutée pour la première fois devant un public catholique.
L'oeuvre est très belle et se compose de deux parties : la première évoque la persécution des chrétiens depuis la lapidation d'Etienne, puis la conversion de Saul de Tarse. La seconde partie, sensiblement plus courte, s'occupe de la prédication de Paul, qui le mène très vite, dans la compilation de Mendelssohn, à l'hostilité collective, à l'échec, et à la mort délibérée. Une lecture étonnamment noire de la mission paulinienne.
Malgré la grande beauté de l'inspiration, l'écoute continue de cette superbe musique confortable crée un sentiment de lassitude, de trop plein, pour la seconde partie qui aurait presque dû être jouée un autre soir - et dont le propos musical est en outre moins original et moins captivant.
Très agréable de disposer du programme de salle gratuit avec livret, même si on mentionnera pour l'amour du sport qu'on relève un certain nombre de coquilles (surtout dans le texte allemand, et aussi 'Saül' au lieu de 'Saul' dans la présentation).
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Côté interprétation.
Choeur de Radio-France attentif à la diction, superbe prestation comme d'habitude du plus beau choeur d'enfants du monde, la Maîtrise de Radio-France.
La voix assez droite de Rainer Trost (ténor) n'émeut pas autant que dans ses Mozart, et la voix n'a pas de présence supplémentaire, néanmoins le travail est tout à fait complet et réussi.
Ruth Ziesak (soprano), voix légère rompue à tous les répertoires, y compris à Schindler, passe remarquablement l'orchestre grâce à un timbre légèrement nasal et très dense.
Matthias Goerne (basse, mais baryton tout comme le créateur du rôle, le fameux liedersänger Julius Stockhausen) semble visiblement ému de retrouver, de l'autre côté de la scène, sa découverte de jeunesse de l'oeuvre : à Leipzig, en écoutant un concert de ... Kurt Masur. En réalité, moins inspiré par la première partie plus lyrique, il ne se libère dans toute sa mesure qu'à partir de la déchéance de Paul, dans les grands récitatifs de la fin de l'oeuvre (cure des paralytiques, prêche vain aux Gentils et annonce de la mort). Là, toute la profondeur de vue de ses inflexions textuelles, son sens de la ligne aussi se révèlent de la façon la plus bouleversante.
Le pompon de l'excellence revient à Christianne Stotijn (alto, mais mezzo-soprano), malgré la très maigre portion attribuée par Mendelssohn à sa partie. Un poids des mots hors du commun, une justesse d'expression à toute épreuve, et un parfait équilibre entre vaillance, moelleux et intimisme dans la voix. La poésie était incarnée ce soir.
Surtout, comme on pouvait le craindre, Kurt Masur se révèle, comme toujours dans Mendelssohn, assez dépourvu d'arête, voire assez mou - même s'il s'est grandement soigné -, ce qui fait sans doute tenir une bonne responsabilité. L'Orchestre National de France pour lequel il a tant fait n'était d'ailleurs pas le même qu'avec Daniele Gatti, tellement la cohésion (ainsi que l'entrain) semblaient moindres, malgré le très haut niveau de jeu.
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Très bonne soirée, donc, mais on tire peut-être plus de profit à entendre ce genre d'oeuvre en tranches, au disque. Manière de s'en mettre plein la lampe, mais de façon espacée et plus intense.
Commentaires
1. Le lundi 21 décembre 2009 à , par Bajazet
2. Le mardi 22 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec :: site
3. Le mercredi 23 décembre 2009 à , par Bajazet
4. Le mercredi 23 décembre 2009 à , par DavidLeMarrec :: site
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