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Franz SCHUBERT - Die Schöne Müllerin D.795 (La Belle Meunière) - Stutzmann, Södergren (Bordeaux 2008)

Lutins ! Lutins ! Sylvie est de retour !

Bordeaux, Grand Théâtre, samedi 26 janvier 2008, 20h.
Récital, Franz Schubert : Die schöne Müllerin D.795 (« La Belle Meunière »)
Nathalie Stutzmann : contralto ; Inger Södergren : piano.

Compte-rendu de Sylvie Eusèbe.


Ce matin du 26 janvier, dans le TGV qui m’emmène à Bordeaux, je suis entourée par une équipe de handballeuses. Elles parlent avec animation, les réflexions sur leurs professeurs sont drôles et bien senties. Pourtant, à peine ai-je lu les premiers vers de la « schöne Müllerin » que le monde extérieur n’existe plus et me voici immergée dans les poèmes de Müller.
C’est exactement ce qui se passe quelques heures plus tard dans le Grand Théâtre de Bordeaux. Devant une salle remplie de spectateurs de tous les âges (je remarque avec plaisir des enfants d’une dizaine d’années), Inger Södergren donne un vigoureux départ à ce cycle schubertien. Je n’ai même pas le temps d’avoir le trac pour les musiciennes qui d’ailleurs n’ont pas l’air de l’avoir : la fermeté du piano m’entraîne immédiatement avec l’eau du ruisseau, ou plutôt dans l’eau du ruisseau. Nathalie Stutzmann s’y lance à son tour avec une fougue qui éclabousse d’une joie juvénile, celle de l’apprenti meunier.

Pour la première fois lors d’un récital de N. Stutzmann et I. Södergren dans ce théâtre, des surtitres en Français sont projetés sur la toile peinte derrière les musiciennes. La traduction est due à André Tubeuf, tout comme d’ailleurs les notes de programme. J’apprécie vraiment cette initiative indispensable pour que tous puissent profiter pleinement non seulement du talent du compositeur et de son poète, mais aussi de celui des interprètes.

Contrairement au « Winterreise » ou au « Schwanengesang », je me demande d’une manière un peu instinctive comment la « schöne Müllerin » permet des interprétations différentes. Nous devinons très vite que cette histoire d’amour va mal finir et que Schubert soulignera d’une manière de plus en plus poignante les sentiments de l’amant malheureux. Alors comment les musiciennes de ce soir nous racontent-elles cette romance sans surprise, même si les poèmes de Müller offrent une admirable description des états d’âme changeants du meunier amoureux ?
C’est précisément de ces multiples états d’âme dont s’empare l’extraordinaire expressivité de Nathalie Stutzmann en nous montrant ses revirements avec une stupéfiante variété. La précision et la justesse de ses descriptions sont inscrites dans son chant et dans son attitude d’une manière tellement complémentaire qu’il est difficile de les séparer. Il est également très difficile de scinder le chant et le piano, leurs ondes se mélangent et frémissent d’une même voix.

Cependant, je détaille toujours avec autant de plaisir la voix de la contralto. Ses magnifiques intonations si personnelles sont un peu plus « classiques » que lors de son « Schwanengesang » ici même la saison passée, et cette retenue sied parfaitement à ce cycle de composition plus traditionnelle. Les pianissimi tenus s’entendent jusqu’au bout et donnent le vertige, les forte ne sont jamais poussés avec exagération, ils sonnent avec justesse et ne se détimbrent pas. Le vibrato est léger et j’avoue ne pas avoir fait beaucoup attention à son utilisation : c’est sans doute qu’elle était parfaite ! Je remarque les phrasés limpides entre lesquels l’ample respiration se fait naturellement et sans précipitation, la souplesse de la ligne musicale est admirable, l’aisance et la sécurité de la voix sont totales.

Ce qui m’enthousiasme particulièrement dans ce récital ce sont les variations d’ambiance et les contrastes que recèle chaque lied.
Le lied qui me parait le plus riche est « Tränenregen » - Pluie de larmes. Les musiciennes le débutent très calmement, le bonheur amoureux se perçoit ensuite, puis pointe l’inquiétude, et enfin la tristesse est vite masquée par l’interrogation, par l’espoir contenu dans le doute. Mais la fin prémonitoire est nettement dramatique, et le fameux « ade, ich geh nach Haus » est dit le sourcil levé, le regard jeté de haut en bas sur le meunier encore assis au bord du ruisseau. L’attitude et le ton sont un mélange de mépris, de dureté, d’agacement et de tristesse, très loin de l’« ade » espiègle de Genève l’été dernier. En l’espace de quelques minutes, j’ai ressenti l’étendue terrifiante et prodigieuse des sentiments humains !

Si les contrastes se manifestent à l’intérieur du lied, ils peuvent aussi être très nets entre les lieder. Par exemple, la fin de « Tränenregen » m’ayant laissée abattue et admirative, « Mein ! » (Mienne !) me secoue par sa joie proche de la frénésie : le meunier ne croyait plus à sa victoire, alors tout étonné, il masque son inquiétude sous une sûreté qu’il n’arrive finalement pas à ressentir.
Et si je prends encore un peu de recul et considère l’ensemble du cycle tel que je viens de l’écouter, je ressens l’évolution progressive qui nous mène du début radieux et insouciant à la fin dépassant le désespoir puisqu’elle trouve l’apaisement dans la mort.

Le dynamisme joyeux, la rapidité des tempi et la vivacité des premiers lieder font rapidement place à des mélodies plus recueillies. Déjà des moments de sérénité (« Danksagung an den Bach » - Merci au ruisseau) ou même de prière (« Der Neugierige » - Le Curieux) apparaissent. Des lieder aux sentiments nettement extériorisés (le véritable jeu d’actrice de N. Stutzmann dans « Am Feierabend » - A la veillée -, le lyrisme et l’énergie de « Ungeduld » - Impatience) alternent avec d’autres où l’expression est gracieuse (élégance et malice de « Des Müllers Blumen » - Les Fleurs du meunier). Après une « Pause » au piano méditatif, le reste de légèreté et d’insouciance disparaît à la fin de « Mit dem grünen Lautenbande » - Avec le ruban vert du luth -, le regard noir lancé au rival introduit « Der Jäger » - Le chasseur. Le staccato est superbe, les notes magnifiquement articulées de la pianiste répondent à la diction nette mais ni dure ni trop détachée de la chanteuse. La fin du lied tout à la fois chantée, criée et parlée est chargée de la colère qui anime d’une impressionnante tourmente le très contrasté « Eifersucht und Stolz » - Jalousie et fierté.
Ici à nouveau un contraste important avec le lied suivant : « Die liebe Farbe » - La couleur aimée - est sobre et recueillie, la note répétée au piano traduit d’abord l’immobilité puis l’obsession ; amère puis triste, la fin est très dramatique. Le visage aux yeux fermés de la contralto s’anime encore d’un pâle et douloureux sourire lorsque lentement revient le « mein Schatz » fatal, mais les larmes sont proches. La puissante émotion dégagée par ce lied plane sur un public qui ne respire plus, un long silence est nécessaire à la chanteuse avant de retarder encore un peu l’inexorable. Et en effet, dès « Trockne Blumen » - Fleurs séchées -, nous sommes replongés dans une douloureuse et merveilleuse apnée : le piano répète des accords de marche funèbre, les ultimes échos de la passion mourante résonnent.

Avec les deux derniers lieder de la « schöne Müllerin », les musiciennes atteignent à mon avis une intensité exceptionnelle. Nous sommes en-dehors des sensations habituelles, les sentiments qui nous baignent sont d’un autre monde que celui dans lequel nous évoluons couramment. Elles traduisent parfaitement cet enlèvement, ou cette élévation, grâce à une simplicité et une beauté sans affectation. Les sourires pleins de bonté aux roses épineuses et aux anges aux ailes coupés rendent « Der Müller und der Bach » - Le meunier et le ruisseau -, si tendre ! La fin est si douce que les yeux fermés et le visage sérieux mais reposé de la contralto annoncent « Des Baches Wiegenlied » - La berceuse du ruisseau. Beaucoup de générosité dans cette berceuse, le ruisseau protecteur et affectueux éloigne avec force mais sans haine les échos du cor de chasse et le souvenir de la meunière. Insensiblement, le chant se retire comme une mer qui emporte l’eau du ruisseau et son dormeur. La fascination exercée par ce dernier lied au balancement hypnotique (Gute Ruh, gute Ruh / Repose en paix, repose en paix) m’emmène hors de la conscience, dans cet état intermédiaire entre réalité et songe. Mais soudain, le lied est fini, le récital est fini. Derrière moi, un spectateur à la gorge serrée murmure pour lui seul un « bravo » ; immobile, N. Stutzmann est partie très loin. Inger Södergren et le public ému respectent son silence, nous profitons tous de ces quelques secondes pour reprendre pieds à la surface du quotidien.

Les applaudissements longtemps retenus éclatent avec d’autant plus de force, les musiciennes affermissent peu à peu leurs sourires et leurs « merci », un dernier rappel, et les voilà disparaissant ensemble dans l’ombre des coulisses.

Le lendemain, je me réveille comme je me suis endormie : avec la douce répétition de Gute Ruh dans la tête. Au petit déjeuner, je feuillette le journal Sud-Ouest Dimanche : pas un mot de la soirée d’hier alors que tous les résultats du handball féminin sont donnés.
Le retour dans le train est aussi animé que l’aller, des personnes parlent tout fort à leur voisin ou à leur téléphone portable et des enfants s’impatientent. Je me concentre, et comme la veille, les poèmes de Müller font revivre les souvenirs déjà presque oubliés de cet intervalle entre rêve et réalité que bien peu de musiciens me font apercevoir.
Je me sens plus riche qu’hier mais ne sais qu’en faire, et tout en me demandant comment cette brèche dans la perception a été possible, je pressens que je la retrouverai.

S. Eusèbe, 27 janvier 2008.


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Commentaires

1. Le lundi 28 janvier 2008 à , par sk†ns

Si je fais un compte rendu de la fanfare de FCG-Agen, tu me publies ?

2. Le lundi 28 janvier 2008 à , par Jean-Charles

A Bordeaux vous n'avez peut-être pas grand chose mais vous avez des récitals de Stutzmann et ce n'est pas rien... :-)

3. Le mardi 29 janvier 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

@ sk†ns : Chiche ! Mais attention, si ça n'a pas le raffinement de Sylvie, la pénitence sera dans le Diaire infamant.

@ Jean-Charles : Ce n'est pas rien... pour ceux qui y vont ! Une fois de plus, pour du Schubert très joué, j'ai passé mon tour. J'aurais accouru pour ses Mahler, ou les Fauré et Chausson qu'elle ne chante plus, hélas, depuis bien longtemps.
Mais dans Schubert, il y a quelques tics qui contrastent avec l'écriture très directe, de façon un peu gênante à mes oreilles. Peut-être que dans du Wolf...

Mais je ne me plains pas, j'étais la veille à un récital délicieux Touchais / Melton / Marcuz.

4. Le mardi 29 janvier 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Tsss, Tsss, cher David, comment cela : elle ne chante plus la mélodie française "depuis bien longtemps" ? La dernière fois en France, c'était en 2005, et à l'"étranger", je ne sais plus exactement, mais je crois que c'était l'année dernière... Alors je n'appellerais pas cela "depuis bien longtemps" ;-) !
Et puis je ne comprends pas les "quelques tics qui contrastent avec l'écriture très directe" : son chant, son interprétation sont très "directes" et tout à fait naturels, cela me semble donc aller parfaitement bien avec l'écriture "directe" de Schubert. Et encore ceci : certes, mon texte ci-dessus donne une idée de l'ambiance du récital et il peut éventuellement laisser supposer que la soirée ressemblait parfois à une pièce de théâtre (ce qui n'a pas été le cas). La "faute" m'en revient, c'est certain, mais je trouve un peu... comment dire... un peu "exagéré" d'en tirer la conclusion que la "schöne Müllerin" de N. Stutzmann a été "très jouée"... alors que vous aviez déclaté "forfait" (et non un forfait... heureusement ;-) !) puisque vous n'étiez pas dans la salle !!!
Bon, cela mis à part, sincèrement merci pour votre mise en valeur :-) !

5. Le mardi 29 janvier 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Tsss, Tsss, cher David, comment cela : elle ne chante plus la mélodie française "depuis bien longtemps" ? La dernière fois en France, c'était en 2005, et à l'"étranger", je ne sais plus exactement, mais je crois que c'était l'année dernière... Alors je n'appellerais pas cela "depuis bien longtemps" ;-) !


En tout cas elle ne l’enregistre plus… ni ne la chante à Bordeaux. Ce que je déplore profondément.

Et puis je ne comprends pas les "quelques tics qui contrastent avec l'écriture très directe" : son chant, son interprétation sont très "directes" et tout à fait naturels,


Nous en avions devisé à propos de Winterreise : ses interprétations du lied me paraissent un peu systématiques, avec des maniérismes un peu récurrents (les sons droits sur les tenues ou l’interruption du legato dès qu’un son vibré est émis, notamment).

Ensuite, oui, sa conception d’ensemble n’est pas intellectuelle, mais très proche du premier degré du texte. Ce peut être intéressant, je me souviens avoir été conquis par un Einsamkeit absolument dépourvu d’ironie, très inhabituel.

Je n’ai pas beaucoup aimé le Schwanengesang. Maintenant, nous verrons avec le disque de la Meunière.

Et encore ceci : certes, mon texte ci-dessus donne une idée de l'ambiance du récital et il peut éventuellement laisser supposer que la soirée ressemblait parfois à une pièce de théâtre (ce qui n'a pas été le cas). La "faute" m'en revient, c'est certain, mais je trouve un peu... comment dire... un peu "exagéré" d'en tirer la conclusion que la "schöne Müllerin" de N. Stutzmann a été "très jouée"... alors que vous aviez déclaté "forfait" (et non un forfait... heureusement ;-) !) puisque vous n'étiez pas dans la salle !!!


Quand je disais « du Schubert très joué », c’est que le cycle est souvent donné à travers le monde, donc qu’on l’a un peu dans l’oreille et qu’on peut aller y assister aisément ici ou là. Ce qui explique que je me sois dispensé d’aller voir une interprétation qui, à ce que je devine de façon assez probable, ne m’aurait pas enchanté.
Eût-ce été un programme de lieder d’Alma Schindler-Mahler, je m’y serais rendu, fût-ce avec le pire chanteur de la Création. :)

Evidemment, je ne parle pas du spectacle puisque je n’y étais pas. ;)

6. Le mardi 29 janvier 2008 à , par sk†ns

Si, tant que j'y pense, j'ai vu les Pražák Fantastic čtyři samedi dernier :

- Haydn (Op.76 Nr.4) : ƒƒƒƒƒƒ (superbe)
- Schubert (Streichquartett Nr.14 D810) : ƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒƒ (mortel, la folie)

En première partie, le Arditti Gang Bang :

- Ruth Crawford-Seeger (Quatuor ?) : ƒƒ (bonne déocuverte)
- Carter (Quatuor à cordes n° 4) : ♭ (œuvre chiante, enfin plus que le n°2 au disque par les mêmes, seul opus « connu de nos services ».)

7. Le mardi 29 janvier 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

On se croirait sur Télérama ici. Et moi qui dois parler du disque des Victoires de la Musique... (sur DSS, il ne faut pas exagérer non plus !)

Pour quoi allons-nous passer, les lutins et moi, je vous le demande !

Tiens, pourtant Carter, c'est intéressant d'habitude. Et les Pražák n'étaient donc pas aussi désinvoltes qu'ils le sont parfois en concert... Des souvenirs très mitigés pour moi, avachis sur leurs sièges, avec beaucoup d'impropretés dans un répertoire qu'ils connaissaient pourtant fort bien. J'ai soupçonné une certaine indifférence au public de province qui ne fait pas l'opinion, d'autant plus que lors d'un autre concert, enregistré celui-là, le ton était plus polissé.

8. Le mardi 29 janvier 2008 à , par sk†ns

Comme tu dis Carter, ça doit être « intéressant ». Pour ce qui est de nos amis, eh bien, c'est vrai qu'ils étaient plutôt avachis, mais ça doit être une forme de chic bohémien (les Arditti, eux, ont joué raide de la musique raide : c'est d'ailleurs étonnant comme ils ne bougent pas de leur chaise, des vrais robots)… Il y a chez Pražák, que je n'avais jamais vus, un côté "informel" (et peut-être désinvolte), en sorte qu'ils font aussi plaisir à voir. En tous cas, s'il y a eu des impropretés, je pense ne pas les avoir décelées (un avantage l'innocence de l'oreille) !

9. Le mardi 29 janvier 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Dans ce que j'avais entendu, c'était assez flagrant, les coups d'archets un peu à la louche, les sons qui se filaient... Surtout chez le premier violon.

Mais il est possible qu'ils aient fait mieux, il paraît que c'est très variable selon leurs apparitions, et que la province n'est pas un critère.

En tout cas, ils en sont tout à fait capables, puisque leur intégrale Beethoven atteint, aux dires de tous - et des lutins - une forme d'idéal.
C'est cela qui est troublant, un tel décalage. Leurs Beethoven en salle ne m'avaient pas non plus ébloui outre mesure (mais c'était avant la publication de l'intégrale, peut-être même un peu avant l'enregistrement).

10. Le mercredi 30 janvier 2008 à , par sk†ns

Ah bah, je vais tâcher de me procurer leur intégrale Bétove, que j'avais fuie à cause de… la laideur des pochettes (je suis très visuel, comme garçon).

11. Le mercredi 30 janvier 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Aïe, aïe, aïe ! Dans mon ardeur à pourfendre les lutins infidèles j'ai mal "interprété" votre "Schubert très joué" ! Mille et une excuses...
Bon décidément, il va falloir que j'aille faire une petit tour du côté d'Alma ;-).

12. Le mercredi 30 janvier 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Vous avez raison, mille et une excuses suffiront, on ne va pas en faire un opéra (pour ça, il en faut impérativement mille et trois). :-))

Pas le moindre problème, Sylvie : vous savez comme moi que l'écrit de connivence est un genre où l'on fait facilement des mésinterprétations. Et les lutins ne sont pas toujours bon conseillers. ;)


@ Skoteinos : Les pochettes laides ? Ah tiens, je me souvenais de quelque chose d'agréablement sobre.
C'est probablement la meilleure intégrale qu'on puisse trouver, oui. Et pourtant, je ne suis pas particulièrement un fervent ni des manières ni du son Pražák. Là, néanmoins, tout y est, la beauté du son, l'engagement sans faille, la lisibilité, la danse, la structure, l'élan du trait.
Dans mon oreille, ça a écrasé la concurrence pourtant fort fournie. Du moins au disque ; en salle, il en va tout autrement, et pas seulement à cause de leur attitude irrégulière : je pense en particulier à de [jeunes formations|http://operacritiques.free.fr/css/index.php?Concours-international-de-quatuor-a-cordes-de-bordeaux] capables du meilleur.

13. Le vendredi 1 février 2008 à , par Joséphine

Vos textes sur Nathalie Stutzmann ne servent à rien :elle est la plus intéressante chanteuse dans sa tessiture, point. Tout le monde le sait désormais ! Parlez de la relève !!!

14. Le vendredi 1 février 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Mais, chère Joséphine, comptez-vous pour rien le plaisir que nous avons à lire la prose toujours aussi précise et évocatrice de Sylvie ?

Sans me faire son porte-parole, je ne puis que vous engager, puisque vous semblez porter quelque intérêt à ses textes, à lire ceux-ci, où Nathalie Stutzmann n'apparaît pas :
- Scuola Grande dei Carmini ;
- Matthias Goerne avec Christoph Eschenbach.

Sans compter les nombreux textes où elle décrit avec le même soin les partenaires de Nat'.


Je ne me vois pas d'autorité pour lui intimer l'ordre de changer ses loisirs, mais en tout état de cause, je ne puis que joindre mes prières aux vôtres pour l'inviter, si elle en a le temps, à ajouter hardiment à ses passionnants compte-rendus stutzmanniens d'autres plaisirs pour les lecteurs de Carnets sur sol.

15. Le vendredi 1 février 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Je n'ai hélas pas beaucoup le temps d'aller au concert, et je dois "choisir" qui je vais écouter. C'est dur, alors j'ai décidé de suivre une chanteuse en particulier, celle qui me touche le plus. Je n'ai hélas pas beaucoup de temps pour l'écriture en général, ni pour celle que je destine à CSS en particulier.
Je reconnais bien volontier que me consacrer à une seule musicienne freine mes possibilités de découverte de nouveaux artistes. C'est pour cela que je serais heureuse si d'autres passioné(e)s dans mon genre pouvaient me faire découvrir, par exemple, la relève chère à Joséphine.
Et puis, je ne crois pas que mes comptes-rendus ne servent pas à N. Stutzmann. Quelque soit l'artiste dont on parle, plus on parle de son art (pas en trop mal, bien sûr ;-)), plus cela le sert, ça ne fait aucun doute !

16. Le vendredi 1 février 2008 à , par Joséphine

Je crois que vos écrits sont lus par eux comme par nous car il ne faut pas les croire naïfs et non accompagné d'internet pour leurs carrières, et comme j'ai l'occasion de les entendre se moquer de vous, de votre vocabulaire souvent non justes sur leur art, je ris souvent des sarcasmes de David. Il est évident que cela vous occupe mais c'est pathétique. Comme disait Voltaire : "bien heureux ceux qui parlent d'un génie pour se croire leur égal puisque qu' écrire sur un bel esprit c'est se croire soit même important".

17. Le vendredi 1 février 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Bien sûr, ne parlons de personne ni de rien, ça ira mieux comme ça. :-)

Ce serait bien la première fois que j'entendrais les artistes railler le vocabulaire des profanes... Je ne vois pas trop l'intérêt, à vrai dire, de critiquer si vivement un compte-rendu positif - d'expérience, il font très souvent plaisir aux artistes, c'est aussi un plaisir du métier.
Par ailleurs, je ne comprends pas bien ce que vous dites :

Je crois que vos écrits sont lus par eux [...] et comme j'ai l'occasion de les entendre se moquer de vous

, je ne saisis pas bien d'où vous cherchez à émettre cette critique.

Quoi qu'il en soit, je peux vous répondre très simplement : ce site perso n'est jamais que mon bac à sable personnel, conçu pour me divertir, et la présence des textes de Sylvie Eusèbe m'y agrée. Aussi, avec son autorisation (et celle de nul autre), je me fais un plaisir de les publier.

La question n'est même pas de savoir si c'est utile, CSS n'est pas une association, ni même une revue.

Et si l'on me demande mon avis, j'aimerais que les critiques musicaux, fussent-ils professionnels, égalent tous le savoir-faire littéraire et la précision des textes de Sylvie.


Mais de grâce, Joséphine, laissez-donc Voltaire où il est, ses phrases ne sont que trop souvent sorties comme des épouvantails ; le trait est plaisant, mais peut-on en faire une maxime, c'est-à-dire refuser à quiconque n'a pas de génie de parler du génie, à quiconque n'est pas boulanger d'émettre un avis positif sur un pain, à quiconque n'est plombier de remarquer avec satisfaction que la fuite n'est plus ?

De surcroît, vous donnez vous-même dans ce travers en commentant un compte-rendu sans nous en proposer vous-même.


Allons, oublions ces vaines acrimonies, nous vous écouterons volontiers.

18. Le samedi 2 février 2008 à , par Morloch

Je serais intéressé par une présentation de la relève qui se moque par Joséphine. Qui sont les contraltos qui vont nous impressionner dans la décennie à venir ?

19. Le samedi 2 février 2008 à , par Joséphine

Nous adorons vous énerver car vous êtes excellent dans la répartie : un vrai français avec sa liberté de penser et d'écrire. Je continuerai de temps en temps à vous contrarier car je me demande si ce n'est pas là alors que vous êtes le meilleur. Défendre Eusèbe et parler de ses "savoirs littéraires" est bien exagéré à moins que vous n'ayez une conversation parallèle car son chemin est encore bien long.En tous les cas il y a la scène visible, la scène virtuelle mais il y a aussi la scène musicale mondiale. Mon conseil : voyagez plus !

20. Le samedi 2 février 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Mais croyez bien, Joséphine, que nous pourfendons avec un plaisir non dissimulé la mauvaise foi qui se drape dans le mystère. :)

Il n'en demeure pas moins qu'il est très vilain de jouer au détriment de Sylvie Eusèbe qui ne mérite pas ces indignités-là.


Ca ne nous dit toujours pas quels sont ces contraltos merveilleux. Nous n'avons pas tous les moyens ni la disponibilité pour voyager, mais on peut imaginer qu'avec les radios du monde, nous pourrions peut-être sauver une ou deux onces du profit extraordinaire que vous nous promettez ?

21. Le lundi 4 février 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Waou !!! C'était chaud ici ce week-end ! Je n'aurais jamais imaginé que mes modestes écrits puissent engendrer une telle ire vengeresse ! Cher David, merci pour votre patiente défense et... désolée pour le "dérangement" ;-) !

22. Le lundi 4 février 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Bonjour Sylvie !

Le nombre et la violence de ses ennemis n'est pas toujours mauvais comptable de la gloire. :)

Quant à moi, à défaut de vous pourfendre, je m'en vais vous fournir les réactions que je vous dois - à l'aveugle, comme d'habitude.

Tout d'abord, félicitations au Grand-Théâtre d'avoir pris cette initiative de surtitrage, même si, j'en ai bien conscience, elle ne sera vraisemblablement appliquée que pour les grands cycles, ce qui me sera assez peu profitable en fin de compte. Mais pour tout un chacun, c'est une chance, ils devraient le préciser sur les programmes. Je me chargerai en tout état de cause de le faire savoir autant que possible.
Evidemment, pour les programmes moins rebattus, ce n'est pas aisément envisageable : il faut déjà trouver les traductions (pas toujours évident), s'acquitter des droits en différentes parties, se synchroniser avec le chanteur, éviter les changements de programme, etc. Mais pour un début, c'est un excellent début, une vraie plus-value !

Contrairement au « Winterreise » ou au « Schwanengesang », je me demande d’une manière un peu instinctive comment la « schöne Müllerin » permet des interprétations différentes. Nous devinons très vite que cette histoire d’amour va mal finir et que Schubert soulignera d’une manière de plus en plus poignante les sentiments de l’amant malheureux. Alors comment les musiciennes de ce soir nous racontent-elles cette romance sans surprise, même si les poèmes de Müller offrent une admirable description des états d’âme changeants du meunier amoureux ?

Oui, la ligne narrative est sans doute plus claire que pour le Winterreise ou les Faust-Lieder.

dans son chant et dans son attitude d’une manière tellement complémentaire qu’il est difficile de les séparer.

Oui, j'avais remarqué ça d'emblée, le désir de suggérer par le jeu, comme un théâtre imaginaire. J'avoue préférer un investissement moins descriptif, plus abstrait, plus lié aux affects (comme ce que nous a fait Jonas Kaufmann tout récemment), mais c'est un travail louable et assez original. Je la vois encore chercher la corneille du regard à la fin de Die Krähe.


Les pianissimi tenus s’entendent jusqu’au bout et donnent le vertige, les forte ne sont jamais poussés avec exagération, ils sonnent avec justesse et ne se détimbrent pas.

Ah, tant mieux, mais j'ai surtout le souvenir des piani dont le son se déchirait un peu souvent. Je ne vous demande pas si la voix est tassée comme d'habitude dans ce répertoire, vous me maudiriez une bonne fois pour toutes...

Le vibrato est léger et j’avoue ne pas avoir fait beaucoup attention à son utilisation : c’est sans doute qu’elle était parfaite !

Vous me faites peur. :-)


Merci encore pour ce parcours toujours si précis parmi les choix des interprètes, on prend vraiment plaisir à serpenter avec vous dans les possibles de ce cycle.

23. Le mardi 5 février 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Humm, je me permets de vous demander (ou de vous redemander, je ne sais plus) ce qu'on entend par "une voix tassée"... ;-)
Quant au vibrato, si je n'y ai guère fait attention, c'est qu'il était discret (normal pour ce répertoire). Je regrette simplement de ne pas avoir remarqué son évolution, par exemple : début de note pas vibrée, puis fin de note progressivement vibrée ou inversement, ce qui est plus rare mais que j'ai déjà entendu chez N. Stutzmann.

24. Le mardi 5 février 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Humm, je me permets de vous demander (ou de vous redemander, je ne sais plus) ce qu'on entend par "une voix tassée"... ;-)

C'est assez simple, ça s'entend fort bien (sauf pour les fans :-) : la voix semble comprimée vers le bas, comme en surpression. Concernant Nat', l'écouter me donne toujours l'impression, peut-être trompeuse, qu'elle aurait pu travailler ses aigus et chanter des rôles de mezzo raisonnables.
Plus je l'écoute, plus je conviens qu'elle n'est sans doute pas un mezzo standard, mais il n'empêche que la voix sonne contrainte et tassée de mon côté. L'impression plusieurs fois décrite ici que sa voix reste à l'intérieur.

Quant au vibrato, si je n'y ai guère fait attention, c'est qu'il était discret (normal pour ce répertoire).

Gloups. Oui, c'est ce que j'ai deviné. Je n'ai rien contre le peu vibré, mais pas du tout, ça tient de l'affectation dans Schubert, surtout lorsqu'il y a autant de systématisation expressive autour de cette question. C'était précisément ce qui m'avait un peu incommodé (voire agacé) dans Winterreise. Les longues tenues étaient systématiquement "non résolues", toutes droites, particulièrement lorsqu'elles étaient à des moments-clefs.


Pardon de jouer au Crépuscule des idoles (en philosophant à coups de pelleteuse), mais votre question me contraint à préciser ma pensée. :-s

25. Le mardi 5 février 2008 à , par Sylvie Eusèbe

Tsss, tsss, dire que NS dit elle-même dans je ne sais plus quel interview qu'elle a beaucoup travaillé ses aigus pendant qu'elle était encore assez jeune pour les faire "grimper le plus possible", parce qu'il parait que plus le temps passe, plus la voix a tendance à descendre... Eh oui, vous dites souvent à propos de sa voix que vous trouvez ses graves « contraints », « engorgés », voire « artificiels »… alors que c’est précisément dans le médium et le grave que son timbre est le plus impressionnant. Bon, mais ici mes oreilles de « fan » n’entendent en effet pas comme les vôtres ;-) !

Ah, je n’ai pas écrit qu’elle ne faisait pas de vibrato dans sa schöne Müllerin ;-) : dans mon souvenir, il était léger mais pas absent. C’est vrai que je ne raffole pas du vibrato en général, alors ça ne me déplait pas du tout quand mon idole absolument pas crépusculaire n’en use qu’avec parcimonie !

Quant à « la philosophie à coups de pelleteuse »… vous ne pouviez pas mieux dire pour que je me sente dans mon élément : ça me rappelle mon milieu professionnel, c’est-à-dire l’archéologie préventive !!! Sérieusement, je vous remercie comme toujours pour vos précieuses précisions !

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David Le Marrec

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