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Strindberg, Mademoiselle Julie - Fisbach, Binoche, Odéon 2012


Objet bizarre, pas tout à fait convaincant.

1. Le guichet

Alors que les séances sont annoncées complètes, on découvre en entrant dans la salle que toutes les places sur le côté (à partir du deuxième rang des balcons) sont libres. Se pose la question de la gestion de la billeterie.

2. L'oeuvre

L'oeuvre en elle-même a déjà ses limites (discontinuités dramatiques et psychologiques, ressassement à l'infini des mêmes argumentations), à commencer par son vieillissement - il faut un effort de transposition mentale pour adhérer au tragique de la déchéance domestique (changer de pays, ajouter un enfant, partir dans les milieux CSP+++++...).

Et le bidouillage de la traduction de Terje Sinding ajoute du prosaïsme décalé (la mention du frigidaire ne fait que rendre davantage bizarre ce psychodrame pour une bagatelle), sans ajouter une cohérence nouvelle.

3. Dispositif

La mise en scène de Frédéric Fisbach et la scénographie de Laurent P. Berger s'appuient sur un choix visuel sobre : appartement blanc tout en baies vitrées, avec jardin sous la neige. Visuellement, rien de gênant, à part peut-être l'absence de signification du lieu - sans rapport justement avec la question du rang et la place du château dans l'imaginaire des deux protagonistes.

En revanche, la disposition sonore est extrêmement problématique. Outrageusement sonorisés (on n'entend jamais les voix des comédiens, seulement le "retour" des enceintes), les acteurs sont même retransmis de façon complètement étouffée pendant tout l'acte I, où les baies sont fermées - dans le but évident de faire plus "vrai", comme les bruitages en lever de rideau.

Plus irritant encore, les différentes séquences (dont on se demande souvent à quoi elles servent alors qu'on reste dans le même lieu durant la même nuit) sont séparées par des "fondus au noir" qui s'accompagnent de bourdonnements (quelque part entre le "bruit blanc" et le vrombissement sourd de moteur de pinasse), physiquement éprouvants lorsqu'ils se prolongent - et qu'on augmente, de scène en scène, le volume. Ces intermèdes n'apportent absolument rien et sont même tout à fait désagréables.

4. Sens

Les choix mêmes de la mise en scène n'étaient pas forcément vertigineux : en rendant trop évident le rapport de séduction physique, le metteur en scène a gommé la complexité de toute une gamme d'échanges, beaucoup plus implicites au début de la discussion après avoir rejoint Jean dans sa chambre - même si le sens se libère ensuite de toute ambiguïté, en effet.

Et côté interprètes, malgré le joli timbre de Juliette Binoche, on a vraiment l'impression d'être au cinéma (sans l'image, vu la distance !), avec les phrases murmurées mais retransmises à pleine force par les haut-parleurs. Et les cris hystérisants (heureusement occasionnels) des deux protagonistes, plus gênants (une vague impression de ridicule) qu'impressionnants.

Au passage, je suis impressionné du caractère profondément négatif qu'il peut y avoir à jouer le rôle-titre, alors que l'ambivalence de Jean est au contraire très valorisante pour un acteur.

Seule Bénédicte Cerutti (Christine) m'a réellement convaincu, maîtrisant très bien l'équilibre entre l'expression un peu simple (ellision des [ǝ]) et une forme de sage réserve. Exactement ce que tentait Nicolas Bouchaud, mais avec un succès beaucoup plus limité.

Résultat un peu mitigé, donc.


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