Musique, domaine public - XLII - Yves (Nat) spielt auf
Par DavidLeMarrec, mardi 5 août 2008 à :: Musique, domaine public - Portraits - Domaine symphonique - Domaine chambriste - Musique romantique et postromantique :: #1012 :: rss
Aujourd'hui, pour reprendre le fil de nos enregistrements du domaine public, une petite collection de piano solo par Yves Nat.
Il faut recommander la fougue et la plénitude sonore (paradoxale, vu la saleté relative de son jeu) de sa Première Sonate de Beethoven, ou bien la folie poétique de sa Première Rhapsodie de Brahms, assez inapprochable, mais nous n'en disposons pas présentement.
Au programme, donc, par l'ordre alphabétique selon lequel les pièces apparaissent sur le serveur :

Beethoven, Quatorzième Sonate
Celle sous-titrée Clair de Lune par l'éditeur. Evidemment, la rondeur du son fait merveille dans la rêverie ratiocinante du premier mouvement. Le deuxième, sorte de Fanfarinette modérément grotesque, une feste galante raisonnablement claudicante, gagne en plastique captivante ce qu'elle perd en exactitude rythmique (précieuse ici, pour le rebond dansant).
La course à l'abîme du dernier mouvement, loin des chevauchées de la Lenore, demeure largement méditatif, bien plus que déchaîné, en évitant les paroxysmes et en profitant de chaque temps de pause pour s'étendre tout à loisir.
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Beethoven, Vingt-troisième Sonate
L'Appasionata trouve ici un interprète très en relation avec son propos. Excessif jusqu'aux pains parfois généreux, souvent brouillon dans les traits ou ingénu dans la structure, mais fiévreux, toujours concerné à l'extrême. Et un son extraordinairement chaleureux. Toutes choses qui semblent, en fin de compte, parfaitement convenir à cette pièce.
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Chopin, Deuxième Sonate
Le même feu se retrouve ici, particulièrement dans un premier mouvement très bousculé, mais habité de bout en bout, dans le moindre recoin exalté de la partition. Pas un motif n'est ignoré ou négligé. Sans équivalent - les sonates de Chopin, plus massives que le reste du corpus, réclament cet engagement.
Le scherzo en revanche souffre de ce manque d'arrogance technique, les martèlements n'y sont pas libres, et les pains parfois omniprésents. Amusant de percevoir cette conception quasiment démiurgique de la musique, où l'interprète n'est pas tant attaché aux notes qu'à se trouver possédé par l'esprit du compositeur, sa Pythie en quelque sorte.
Le fait est que le niveau technique a bien augmenté et qu'on ne tolèrerait plus cela aujourd'hui jusque dans les conservatoires.
La marche funèbre est monumentale, presque beethovenienne ou... wagnérienne. Epouvantable, tellurique, une colère à la façon d'Inbal. On avoue la préférer délicate, plus une prémonition sourde qu'une certitude panique, mais dans son parti pris, Nat est assez inapprochable. La reprise du cortège après le trio [1] est à faire bondir d'horreur. Ses trilles sont des tambours voilés de crêpe. Sa pédale généreuse enveloppe les phrasés du voile d'une tristesse insondable et violente.
La fin sèche débouche sur le tourbillon final, noyé sous la pédale, pas toujours exact, mais débordant de terreur. On admirera le visionnaire ou on exècrera le tricheur.
Faut-il préciser que nous sommes plutôt à situer dans la première catégorie ?
[Le public semble conquis également. On notera au passage la plaisanterie assez spéciale de jouer une sonate funèbre au profit d'un centre chirurgical pour enfants... Mais pourquoi pas, tant qu'ils ne sont pas dans la salle.]
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Franck, Variations symphoniques
Dirigées par Gaston Poulet.
Ici, les flottements aussi bien chez le soliste que chez l'Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire - pas tant au niveau des notes que de la direction des phrasés - nous font préférer recommander la version Hengeveld / Beinum / Concertgebouw que nous proposions au mois d'avril dernier, parfaite d'équilibre et de beauté sonore.
Ici, malgré les désirs poétiques du pianiste, le résultat, prise de son aidant, ressemble plutôt à un déchiffrage collectif.
Nous le fournissons tout de même à titre de document.
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Liszt, Deuxième Rhapsodie hongroise
Etrange choix, pour un pianiste approximatif, que cette pièce hautement brillante.
Le résultat intéressant, avec des jaillissements imprévus et lumineux, et aussi beaucoup de lourdeurs de trait, peut-être faute de liberté (et en raison d'une pédale parfois oubliée en position active). Mais, à la façon de Samson François, on rencontrera toujours chez Nat des fulgurances, qui même passagères, suscitent un sincère intérêt. Ici, la manière des extinctions avant le début d'une autre section est toujours divinement délicate.
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Schumann, Fantaisie
On y rencontrera les mêmes qualités d'investissement (un peu moins de qualité sonore) que dans ses Beethoven, et le même aspect structurellement brouillon et digitalement incertain. Le résultat, sans être totalement un modèle, est intéressant.
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Schumann, Kinderszenen (« Scènes d'enfants »)
Dans ces pièces assez modesques techniquement, Yves Nat peut déployer pleinement son art. Toucher extrêmement plein et chaleureux, phrasés très pianistiques (guère lyriques !) mais toujours inspirés, tendance au rubato [2] poétique, sens du climat, délicatesse rêveuse...
Idéal ici, un monde enchanté.
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Pour charger les pistes du domaine public :
Commentaires
1. Le mardi 5 août 2008 à , par DavidLeMarrec
2. Le mardi 5 août 2008 à , par DavidLeMarrec
3. Le mardi 11 avril 2017 à , par Roderick
4. Le vendredi 14 avril 2017 à , par DavidLeMarrec
5. Le dimanche 16 avril 2017 à , par DavidLeMarrec
6. Le lundi 17 avril 2017 à , par Roderick
7. Le mardi 18 avril 2017 à , par DavidLeMarrec
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