[Enquête] 'Carnets sur sol' contre le noir attentat de l'AFP
Par DavidLeMarrec, jeudi 1 novembre 2007 à :: Langue :: #760 :: rss
Où CSS traduit la presse flamande pour vous, afin de remporter la victoire finale sur l'odieux lobby de la Passion.
Réaction du traducteur de l'AFP :
Nous préparions innocemment un petit point sur des usages de la langue bien connus des lecteurs de CSS, et nous annoncions imperturbable la fin du mal, lorsque, soudain.
Jean Quatremer nous entretient de la bruyante affaire Bart De Wever. [On vous laisse à vos journaux habituels pour lire le contenu de la polémique, d'un type assez banal (en tout cas récurrent).] Un détail nous trouble... serait-il possible que là-bas aussi ? Une expression si précise, dans le contexte de querelles nationalistes, si connotée ? C'est improbable, très improbable.
CSS mène l'enquête. Le propos rapporté en toute candeur par Jean Quatremer provient d'une dépêche AFP du 30 octobre, encore visible sur l'agrégateur de contenus Romandie News. On y lit cette phrase surprenante, qu'on devine traduite du flamand :
Ceux qui dirigeaient [Anvers] à l'époque [sous l'occupation nazie] ont dû prendre des décisions délicates dans des circonstances difficiles. Je ne trouve pas très courageux de les stigmatiser maintenant, ajoutait M. De Wever, historien de formation.
Cependant que beaucoup de pages sont archivées et difficiles à retrouver, nous découvrons une autre version chez la RTBF, qui nous paraît plus probable :
Anvers n'a pas organisé la déportation des juifs, elle fut victime de l'occupation nazie. Les responsables anversois devaient prendre des décisions. Les attaquer ne me parait pas très courageux.
Au terme de notre enquête, Carnets sur sol met enfin la main sur les propos originaux, via un site de centralisation alternative d'informations en diverses langues. Contrairement au Nederlands Tagblad, les propos y sont exacts, a priori.
De bestuurders moesten onder moeilijke omstandigheden beslissingen nemen. Ik vind het niet zo moedig om nu naar die mensen na te trappen.
Ce qu'on peut traduire ainsi :
Les dirigeants ont dû prendre des décisions dans des circonstances difficiles.
Oui, l'adjectif "délicat" a disparu - oubli de saisie ou fantaisie des traducteurs, on ne sait.
Je ne trouve pas cela si courageux de donner à présent un coup de pied par derrière à ces gens. [Pardon pour notre littéralité, mais c'est le but.]
Oui, on sait, ce n'est pas exactement la même chose ! Et plus conforme à ce que l'on pouvait imaginer dans cette province et dans ce contexte. Cela ôte un certain panache à la dénonciation, voire la banalise franchement.
Impossible évidemment de deviner sur l'AFP a choisi d'épaissir la déclaration pour rehausser le propos ou par souci esthétique. On penche plutôt - et c'était précisément le sujet de la note que nous préparions - pour un réflexe conditionné. "Donner un coup de pied par derrière", en français, c'est (très globalement !) une expression de l'hostilité, de la critique, de la malveillance. Or, quel est l'équivalent en français journalistique de "critiquer" ? Vous le connaissez aussi bien que nous - c'est même notre croix commune ; nous à dresser ces notes, vous à en subir le parcours.
Il est tout de même invraisemblable qu'on puisse prendre une telle liberté avec le propos dans une traduction pour une dépêche d'agence, en donnant une couleur tout à la fois religieuse et solennelle à ce qui désignait au contraire un coup bas un peu trivial. [\De surcroît, l'expression employée par De Wever sous-entendait une intentionnalité dans la malveillance que ne suggère plus le choix du traducteur de l'AFP - on stigmatise, de façon active ou passive, par ses préjugés, mais pas dans le but essentiel de nuire.]
Contrairement à ce que nous espérions, le mot stigmatiser n'a pas repris sa vigueur, et bien qu'employé bien plus épisodiquement, demeure anesthésié sémantiquement. En réalité, on peut traduire ainsi parce qu'en français, stigmatiser n'a plus aucune singularité par rapport aux autres termes signifiant la défiance.
Requiescat in pace.
Amen.
Pour l'Amen, une fugue - une fugue, un choral !
Improvisons un morceau magistral.
Commentaires
1. Le jeudi 8 novembre 2007 à , par Morloch
2. Le jeudi 8 novembre 2007 à , par DavidLeMarrec :: site
3. Le jeudi 8 novembre 2007 à , par Morloch
4. Le jeudi 8 novembre 2007 à , par DavidLeMarrec :: site
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