Le disque du jour - V - Thora på Rimol de Hjalmar Borgstrøm
Par DavidLeMarrec, mercredi 26 juillet 2006 à :: Le disque du jour :: #320 :: rss
Thora på Rimol de Hjalmar Borgstrøm (1864-1925).
Ouverture.
Le sujet est la fin du paganisme et la christianisation de la Norvège, la chute de Håkon Jarl, protégé par son ancienne esclave abandonnée, Thora, terrassé par Olav Trygvason, assassiné par son propre écuyer Kark. Un sujet récurrent chez les dano-norvégiens. Excellent livret en bokmål de Borgstrøm.
On conserve encore une forme à numéros, mais assez libre. La déclamation est l’une des plus belles qu’on puisse trouver, et les interventions des solistes sont ponctuées, commentées par l’orchestre, laissant respirer le drame. Une œuvre incroyablement belle, à rapprocher du Hollandais Volant de Wagner (en plus appaisé, moins dramatique et plus poétique) ou du Weber d’ Euryanthe. Le final du I rappelle d’ailleurs l’ouverture des Meistersinger (Wagner). A mon sens, une œuvre lyrique majeure du répertoire "germanique".
Thora date de 1894, et Borgstrøm a écrit un autre opéra en 1905, Fiskeren, sur un sujet semblable au Hollandais Volant. Il était l’ami de Busoni, qui faisait jouer sa musique de chambre en Allemagne. Il a également écrit des lieder en norvégien bokmål, des poèmes symphoniques…
[Deux poèmes symphoniques, Hamlet et Jesus i Gethsemane, deux opéras, Thora på Rimol (1894) et Fiskeren (1905), un prélude pour le drame d'Ibsen Johan Gabriel Borkman'', deux symphonies, un concerto pour piano, un concerto pour violon, deux quatuors à cordes, des sonates pour violon et piano, des mélodies, des pièces pour piano.]
Pourquoi est-il peu connu ? Car il était critique musical (notamment pour le fameux Aftenposten qui existe toujours), et que ses opéras n’ont jamais été exécutés de son vivant. Il avait une casquette, inutile d’aller en chercher une autre. Cela n’a donc rien à voir avec l’insuccès, puisqu’il était tout bêtement inconnu.
Il y a aussi son opposition à la philosophie de l’aîné Grieg, Borgstrøm refusant le pittoresque de la musique à programme, pour défendre l’art pour l’art. Cela a contribué à le faire percevoir par ses contemporains comme un transfuge germanique (il avait étudié à Leipzig).
Voilà longtemps que je souhaitais en parler sur ces carnets (depuis leur création), mais le sujet est ample. Ce sera donc juste une petite synthèse pour aujourd'hui en forme de « disque du jour », en attendant de plus amples développements.
Incroyable interprétation, particulièrement pour Randi Stene (mezzo-soprano, voix corsée et diseuse exceptionnelle qui a été choisie pour le disque après les représentations, sans doute car plus connue à l’étranger, ayant interprété Mahler sur le « continent »), Trond Halstein Moe (baryton lyrique qui tient tous les rôles de Don Giovanni à Scarpia à l’Opéra d’Oslo, grande maison, voix protéiforme d’un charme immédiat) et le chef Terje Boye Hansen, très engagé à la tête d’un orchestre nordique de toute beauté, l’Orchestre de Trondheim.
Cette gravure, pour la redécouverte, la qualité de l’œuvre, la belle prise de son (un peu mate) et la force de l’interprétation, est une des plus grandes réussites de l’histoire du disque, de mon point de vue.
Entrée de Thora, attacca[1] avec l'Ouverture.
Référence :
Thora : Randi Stene (mezzo-soprano)
Håkon Jarl : Trond Halstein Moe (baryton lyrique)
Olav Trygvason : Harald Bjørkøy (ténor lyrique)
Kark : Oddbjørn Tennfjord (basse bouffe)
Choeurs de l'Opéra de Trondheim & Orchestre Symphonique de Trondheim
Terje Boye Hansen
Simax CD PSC 1230
Livret fourni, avec traduction anglaise en regard.
Notes du Pr Guldbrandsen, spécialiste de Carl Hjalmar Borgstrøm (traduites en français).
Notes
[1] C'est-à-dire enchaînée sans interruption.
Commentaires
1. Le vendredi 28 juillet 2006 à , par Xavier :: site
2. Le vendredi 28 juillet 2006 à , par DavidLeMarrec
3. Le vendredi 28 juillet 2006 à , par Ouf
4. Le vendredi 28 juillet 2006 à , par DavidLeMarrec
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