Prose contrapuntique - [Les Joyeuses Commères de Windsor, Comédie-Française 2010]
Par DavidLeMarrec, mercredi 28 avril 2010 à :: Saison 2009-2010 :: #1526 :: rss
Peu de mots pour ces représentations, tant la beauté du résultat se passe de commentaire.
Dans des décors littéraux et assez réduits, dont la disposition à trois côtés n'est pas sans évoquer la scène du Globe, on assiste cependant à un spectacle phénoménal.
La traduction de Jean-Michel Déprats est adaptée avec beaucoup de saveur par Jean-Pierre Richard, et le tout, mêlé à la mise en scène d'Andrés Lima et à la virtuosité hallucinante des comédiens, produit un résultat à peine imaginable. (Indépendamment du ton des plaisanteries, le rythme effréné a tout du ton de Verdi / Boito, on a vraiment l'impression en permanence d'entendre de la musique parlée...)
On assiste ainsi à une comédie extrêmement prosaïque, scandée en permanence par des gauloiseries assez répétitives, mais s'exprimant sur le mode d'une fugue, toujours à coups de références, avec sans cesse diverses actions simultanées sur scène, divers jeux, et même très souvent plusieurs répliques formulées en même temps.
Tout virevolte, court, s'envole, et l'humour le plus balourdement leste se change, à coups de tours de forces scéniques, en véritables fulgurances.
Même la scène de l'outrage à Falstaff à l'acte V devient très crédible, vraiment féérique, à coups d'éclairages toujours très avisément chiches (très souvent, la scène n'est éclairée que par les bougies sur scènes et les projecteurs des coulisses, avec un effet très feutré, vraiment saisissant au commencement).
Et pour couronner le tout, de nombreux chants choraux, assez contrapuntiques, évoquant la Renaissance, avec une justesse, une mise en place et une beauté de timbres absolument remarquables. Ca ne passerait peut-être pas un orchestre, mais a cappella, ça en remontrerait à beaucoup d'ensembles constitués.
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En radicalisant profondément le texte plus mesuré de Shakespeare (accents belges ou russes, subtitutions lexicales, métathèses...), on obtient ainsi, en perdant la langue originale, un résultat qui a tout autant de valeur ajoutée.
Bref, une fugue gaillarde de trois heures, une folie théâtrale à l'adresse toujours renouvelée - et idéalement réalisée.
Doit-on préciser qu'on recommande l'expérience ?
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