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Radio et télévision, soyons confiants

Fidèle à notre mission, pourfendons les assertions invérifiées et farfelues que nous servent les présentateurs d'émissions musicales spécialisées. [soupir]

Alain Duault présente les Contes d'Hoffmann (Offenbach) mis en scène par R. Carsen.

Il s'agit du seul opéra d'Offenbach.

  1. J'imagine qu'il voulait parler du seul opéra, les autres étant des opérettes.
    • Pas de chance, l'opérette n'existait pas à cette époque, il s'agit d'opéras bouffes (prévus pour son théâtre des Bouffes Parisiens) ou d'opéras comiques (calibrés pour les conventions de l'Opéra-Comique), où l'on rencontre une alternance parlé-chanté qui existait à l'origine dans les Contes. Les récitatifs chantés n'ont été écrits par Ernest Guiraud (également l'auteur des récitatifs de Carmen) que pour l'exportation du drame dans les capitales européennes, Vienne notamment, où les dialogues français n'auraient été que de peu d'intérêt.
    • Les Contes d'Hoffmann sont également créés à l'Opéra-Comique, ce qui explique la présence de dialogues, et bien qu'opéra sérieux, est garni de badinages piquants. La différence n'est donc pas si flagrante qu'on veut bien nous le dire, ou alors différente de ce qu'on nous a présenté.
  2. Admettons qu'il veuille simplement parler du seul opéra sérieux.
    • A la bonne heure, mais Offenbach a écrit d'autres ouvrages qui ne sont pas des opéras bouffes. Die Rheinnixen, drame romantique en allemand, ou Fantasio d'après Musset, histoire d'amour parfaitement romantique, c'est-à-dire émaillée de... sublime et de grotesque, comme on l'apprend à tous les étudiants de première année de lettres.
    • Bref, de toute façon, cette affirmation relayant l'idée reçue de l'opéra-testament-le-seul-sérieux est absolument faux. C'est en effet un aboutissement et un chef-d'oeure, mais il est inutile de forcer l'histoire. Alain Duault adore ces commentaires-ragots infondés sur les compositeurs.


La muse, déguisée en écolier, joue en quelque sorte le rôle de l'ange gardien.

Ici, on est simplement dans l'approximation, la paresse intellectuelle. Une formule toute faite, et hop, on caractérise un personnage. Mais, alors que je suis persuadé qu'Alain Duault connaît cet opéra[1], ce propos laisserait penser qu'il n'a fait qu'en lire en résumé.
Certes, la muse s'incarne en Nicklausse, un compagnon de route, plutôt étudiant qu'écolier, qui veille sur Hoffmann si l'on veut, mais avec un rôle très ambigu qui n'est pas celui de l'ange gardien. La muse met certes en garde le poète contre ses amours entêtées et funestes, mais elle se réjouit aussi de ses défaites qui vont le jeter dans ses bras pour produire ses oeuvres.
Le personnage est en outre volontiers railleurs, et bien plus qu'un bouclier pour Hoffmann, il est aussi un aiguillon.

L'assertion n'est donc pas fausse, mais à défaut de trahir la lettre (quoique bien approximative), elle déforme vraiment l'esprit du personnage.


Utilise la chanson populaire, c'est la chanson de Kleinzach.

Troisième citation, plus facile encore.

L'erreur est tout simplement élémentaire. Offenbach utilise, pour faire une chanson de cabaret, un air à couplets, avec des rythmes très marqués. Mais cela n'a plus rien d'une chanson populaire, ni vocalement, ni thématiquement, ni harmoniquement, sans compter l'absence rêveuse d'Hoffmann au milieu de la pièce.
Cela figure une chanson, mais n'est pas plus un emprunt à la chanson populaire que la chanson du rat ou de la puce chez Goethe-Berlioz-Gounod.

On nous vendait cela avec gourmandise pour nous dire "vous voyez combien Offenbach est en avance sur son temps, à faire de la chanson populaire", il avait tout compris, l'importance du peuple, blablablabla.
Comme si le spectateur qui attend une heure du matin ou programme son magnétoscope pour voir un opéra était sensible à ces arguments (de plus fallacieux)... En revanche, cela risque des les induire en erreur.


Une seconde note arrive, consacrée à France Musique ce soir. Ce n'est pas brillant non plus.

Essayez de croire à la compétence des dirigeants ou à l'absence de copinage, après ça.

Notes

[1] Il est familier de la musique lyrique scénique du XIXe et a commis un ouvrage de vulgarisation sur Verdi que je ne recommande pas, contenant à l'occasion le même genre d'approximations.


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