jeudi 28 avril 2016
Dvořák 8,
Concerto de Grieg – Thibaudet, Tonhalle de Zürich, Bringuier
Envie d'entendre la
Huitième Symphonie de Dvořák en concert, après avoir
révisé très à la hausse mon opinion
de la Septième (par Dohnányi et l'Orchestre de
Paris). Opération de ce point de vue modérément réussie, puisque je
revois mon appréciation plutôt à la baisse (j'aime beaucoup moins les
autres symphonies de Dvořák), pas les mêmes qualités formelles ni même
thématiques.
Pour le reste, uniquement des découvertes en salle, qui contribuaient à
ma curiosité.
¶ Je n'attendais rien de
Jean-Yves
Thibaudet, et mon absence d'attente a été trompée : il m'a
toujours paru lisse et compass en retransmission et au disque, alors
qu'en salle, même de l'arrière-scène, le son revêt quelque chose
d'assez magnétique ; les accords qui devraient être les plus brutaux
demeurent d'une douceur moirée, comme éclatant en une multitude
d'harmoniques, les traits semblent toujours joués non pour eux-mêmes,
mais dirigés vers un but, vers la suite du discours. Dans ce beau
concerto plus poétique qu'héroïque, qui pastiche Schumann, le combat en
moins, le résultat était très émouvant.
¶ L'
Orchestre de la Tonhalle,
entièrement tendu vers la production de la musique, est l'un des plus
convaincants que j'aie eu l'occasion d'entendre, en voilà qui viennent
pour jouer et pas pour attendre l'heure de rentrer ! En
témoignent aussi les bis généreux (deux danses slaves de Dvořák, assez
longues), alors qu'on avait eu déjà eu un supplément de Thibaudet en
première partie.
C'était
l'un de
mes chouchous au disque, avec ses interprétations cinglantes,
sous le grand David Zinman, de Beethoven, Schumann et même R. Strauss,
des références absolues pour moi ; il se révèle à la hauteur de ses
studios :
le son de cordes y
est particulièrement impressionnant, chaque note sonnant avec la même
résonance libre que si elle était exécutée sur une corde à vide,
lumineuse, libre, tranchante. Alors tout un pupitre sur ce modèle !
Le
konzertmeister Klaidi
Sahatçi en est l'emblème fidèle, sérieusement engagé sur
chaque trait, et par ailleurs, dans ses solos, dignes des grands
solistes.
¶ Autant le résultat était extraordinaire pour le Grieg (qui aurait
fonctionné même sans un tapis de cette qualité !), autant, pour Dvořák,
le choix n'était pas forcément le plus judicieux pour faire briller
l'orchestre, que j'entendais pour la première fois hors du répertoire
strictement germanique : c'est une
symphonie
tchèque très allemande que j'ai entendue, pas très sensible à la
danse, aux appuis hors de ceux de la mesure. Je suppose que là où
Zinman aurait peut-être donné un mordant suffisant pour faire
contrepartie, la direction toujours sobre et droite de
Lionel Bringuier (qui fonctionne
très bien dans la musique française) a contribué à cette impression.
Ce n'est pas vraiment un reproche, c'est un choix
stylistique, et Dvořák se tient suffisamment, dans ses bonnes œuvres,
pour le jouer avec des logiques suffisantes ; mais en l'occurrence, je
le trouve moins opérant (et en tout cas moins à on goût), avec ses
mesures trop sûres, trop régulières, plus virtuoses que déhanchées –
mais tout le monde n'a pas envie d'entendre un orchestre aviné de
baltringue brinois dans ce type d'œuvre, j'en conviens.
Belle expérience dans les rangs intermédiaires de l'
arrière-scène de la Philharmonie :
le son est beaucoup trop réverbéré, mais on entend très bien néanmoins,
pas du tout les mêmes déformations qu'au premier balcon de face ou
qu'au second balcon sur les côtés.
À l'entracte, testé une rangée vide du premier
balcon latéral : la proximité visuelle avec les musiciens est
formidable, mais je trouve que la réverbération en profondeur de la
salle reste excessive – le second balcon de face est autrement plus
équilibré (mais on est assez loin).
En revanche, de ces deux emplacement décalés,
la vue est formidable :
l'impression de profondeur de la salle procure presque un vertige
latéral, très étrange, et superbe à regarder, l'impression
d'oxygénation est étonnante, et très agréable tandis qu'on écoute de la
musique corsetée dans une salle bondée.
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Assisté gracieusement à une répétition
au Lycée d'État Jean Zay
(extraits orchestraux et choraux), puis au concert (avec mes petits
sous)
dans la salle
néo-égyptienne de l'ancien Conservatoire de Paris.
Capté par Radio Classique et
disponible à la réécoute sur leur site.
L'ensemble
Le Palais Royal est
un objet singulier : son modèle économique est fondé sur l'ouverture
aux partenariats extérieurs, donnant des concerts de prestige dans des
cadres privés, participant à des initiatives pédagogiques. Mais,
contrairement aux autres orchestres de ce type, ce n'est pas un
ensemble de cacheton, dans la mesure où son positionnement musical est
également singulier.
Sur l'apparence d'abord : soin particulier aux
habits de scène, instrumentistes debout, chœur qui chante par cœur ;
mais aussi sur
le son, très typé,
d'une verdeur qui fait entendre à nouveau, à l'heure où les versions
sur instruments d'époque sont devenus une norme assez policée,
l'originalité de ces timbres naturels.
Par ailleurs,
Jean-Philippe Sarcos semble
assez doué pour les relations avec l'extérieur : outre ses talents
d'orateur (aisément audible sans micro dans une grande salle, capable
de présentations denses et limpides, accessibles à tous), il a tout de
même obtenu depuis trois ans la résidence dans la prestigieuse
salle de l'antique Conservatoire,
désormais au sein du Conservatoire d'art dramatique et rarement dévolue
à la musique hors quelques récitals chambristes, mais où l'on créa les
symphonies de Beethoven pour la France, ainsi que la Fantastique de
Berlioz !
Cette fois-ci, il proposait judicieusement
Die Schöpfung de Haydn, mais dans sa
traduction française de Joseph-Alexandre
de Ségur, réalisée pour sa création en France – selon le logique
vœu de Haydn, en faveur d'un texte sacré intelligible pour tous.
Le résultat a évidemment l'avantage de faire ressentir cette musique et
ces situations de façon beaucoup plus directe et naturelle, dans une
traduction élégante : un beau succès.
L'orchestre n'est pas irréprochable (les jeunes gens qui peuplent
majoritairement l'ensemble sont encore dans les études, ou partagés
entre plusieurs obligations pour payer leurs charges) sur le plan du
détail (justesse des cordes pas toujours parfaite), mais le flux
d'ensemble dénote une discipline et une générosité de premier plan :
les scories ne sont absolument pas, comme dans les ensembles de
cacheton, le symptôme agaçant d'un manque d'implication.
Quant au
chœur, constitué de
voix individuellement relativement modestes, il énonce, presque
miraculeusement,
un français parfait,
très intelligible et naturel – alors que pour certains d'entre
les chanteurs, il n'en va pas ainsi lorsqu'ils chantent tout seuls
! Belle préparation.
Côté solistes, découverte de deux chanteur étonnants :
¶
Sévag Tachdjian, copie
conforme de Jérôme Varnier (moins puissant cependant), même
physiquement ; voix profonde, grain prégnant, élocution souveraine ;
¶
Omo Bello, dont je me
demandais un peu la cause de la célébrité, considérant les
imperfections techniques qui demeurent ; son histoire est bien sûr très
touchante, et j'y vois surtout un très grand potentiel. La voix, au
naturel, me semble avoir un potentiel de largeur bien supérieur à ce
qu'on entend, équilibré mais totalement émis en bouche, si bien qu'elle
est très vite couverte, même par un ensemble sur instruments naturels :
si elle ouvrait les résonateurs supérieurs, elle ferait beaucoup de
bruit et parcourrait une tessiture encore plus grande (pour chanter
comme elle le fait avec ce handicap-là, elle a assurément de très gros
moyens qui gisent derrière).
¶
Rémy Mathieu comme
d'habitude aisé, impeccable.
Très belle soirée, un ensemble qui gère très adroitement les
événéments. La répétition pédagogique au lycée était aussi, dans son
genre, très accessible et appétissante.
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lundi 25 avril 2016
Adolphe
ADAM – Le Farfadet – Académie
des Frivolités Parisiennes
Découverte du petit Théâtre Trévise, où les Frivolités Parisiennes,
admirées pour Bazan, donnaient l'un des meilleurs Adam,
Le Farfadet, courte variation
comique en un acte (et deux tableaux) sur la mode des demeures hantées
et des créatures fantastiques.
Il s'agit bien évidemment, genre oblige, d'un mariage contre le gré des
amants, qui se résout heureusement, comme dans
La Dame blanche ou
Dinorah, par l'intervention de faux
événements merveilleux.
La partition culmine dans
deux grands
ensembles du niveau des grandes œuvres sérieuses : le quatuor
de l'orage à la fin du premier tableau, et le quatuor du moulin, où
celui-ci s'anime mystérieusement durant la nuit qui précède les noces.
On en trouve
une version (avec Lina Dachary, et le formidable
Joseph Peyron en bailli) captée par la RTF en 1970 – direction Robert
Benedetti. Sans dialogues, mais cela permet de se faire une idée assez
précise de l'œuvre, d'autant que les rôles sont bien dits.
Avec des moyens réduits (très peu de décor), les Frivolités parviennent
à donner une représentation très complète : alors qu'il s'agit de
jeunes chanteurs promus par l'association, leur fine préparation leur
permet de tenir sur leurs épaules le spectacle en permanence, jusque
dans les dialogues, très habités. Par ailleurs, ils chantent très bien,
dans un style tout à fait adéquat.
Et, à nouveau, très impressionné par l'
Orchestre
des Frivolités Parisiennes : techniquement immaculé (de
véritables professionnels très aguerris et convaincus, pas du tout un
orchestre de cacheton !), et parcouru d'un enthousiasme très audible,
un excellent orchestre, vraiment – ça change des grandes salles où le
Concertgebouw ou Saint-Pétersbourg roupillent en jouant le Sacre du
Printemps.
Dans le tout petit
Théâtre Trévise
(un seul balcon, très bas), je me fais, exactement comme pour
Don César de Bazan (Théâtre de la
Porte Saint-Martin, avec le même orchestre) la réflexion suivante :
c'est
ça, l'émotion musicale,
percevoir le grain des instruments, le détail des inflexions des
chanteurs. Ce n'est pas chercher la vaine perfection dans des hangars
où l'on ne perçoit que la moitié des choses, en courant toujours vers
la mise en place parfaite des mêmes œuvres les plus difficiles… Bien
sûr, le lendemain dans la salle égyptienne de l'ancien Conservatoire,
et le surlendemain à l'arrière-scène de la Philharmonie, je me suis
également régalé, mais il y a dans cette proximité sèche une forme de
vérité, d'immédiateté de la musique, sans cérémonies, sans initiation,
qui accède comme à un niveau supérieur.
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CNSM –
Lieder de Zemlinsky – Classe d'accompagnement vocal d'Anne Le Bozec
Autre initiative du CNSM, la même semaine, pour un concert encore une
fois gratuit, un récital tout
Zemlinsky organisé par la grande Anne Le Bozec. Faute d'une
présentation claire, j'ai pu retrouver l'identité des quelques
chanteurs que je n'avais pas vus, mais pas celle des accompagnateurs,
dont peu m'étaient familiers ; je ne pourrai donc pas leur rendre
justice, pardon d'avance…
Présenter les lieder en groupes était très judicieux, mais créditer
individuellement les chanteurs aurait été mieux. Et, surtout, même si
je conçois très bien que la maison ne peut pas offrir les textes
bilingues, laisser un minimum de lumière pour ceux qui les ont apportés
! Le lied sans le texte, c'est facilement la moitié du plaisir en
moins, ce qui est toujours dommage, même quand c'est réussi comme ce
soir-là.
Je ne suis pas fanatique des lieder de Zemlinsky
en général, ni vraiment mélodiques, ni vraiment audacieux, et ceux
présentés, à une exception près, ne figurent pas parmi mes chouchous.
Néanmoins, quel privilège de pouvoir ainsi s'immerger, en salle, dans
un univers tellement peu pratiqué (et de qualité) !
Chaque chanteur avait deux lieder à interpréter, répartis en groupes
plus ou moins par type (celui des bereuses, par exemple) ; cette petite
charge de travail leur a sans doute permis d'en préparer les détails au
plus près, car l'allemand était (sans être expressif comme les grands liedersänger, bien sûr) très
valable, et l'ensemble convaincant – à une exception près dont je ne
parlerai pas (d'une part parce que ce sont des manifestations
d'étudiants destinées à les aguerrir, pas des concerts payants ;
d'autre part parce que je l'ai toujours beaucoup aimée jusqu'ici et
qu'il n'y a aucune raison de lui faire cette mauvaise publicité).
La soirée culminait avec Wandl' ich im Wald des
Abends, d'après Heine, le plus beau lied de la soirée interprété
par le plus joli gosier du monde, Cécile
Madelin : elle évoque tout particulièrement la jeune Agnès
Mellon, une grande franchise verbale sur une voix claire et mélodieuse…
un enchantement. Sa dispute d'Atys,
donnée en récital plus tôt dans la saison, était d'ailleurs une
merveille (très différente dans l'expression de celle de Mellon, au
demeurant : tout sauf une copie !).
Je ne les ai pas tous aimés (quelques voix m'ont paru inutilement
épaisses, ou pourvu d'un « jeu » excessif pour des vingtenaires), mais
j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir la belle assurance de Guilhem Worms (avec l'accompagnement
passionnant d'Adriano Spampanato, si le programme est exact), le
fausset rond et ample de Paul-Antoine
Benos (vraiment glorieux, ses Stances
du Cid étaient formidables aussi, une sorte d'Esswood sous
amphéts…).
Apprécié également Aliénor Feix (mezzo)
et Kaelig Boché (ténor),
probes au meilleur sens du terme : simplicité et efficacité, ce qu'il
faut dans du lied (ceux retenus pour Boché étaient en outre meilleurs
que les autres).
Très belle initiative, encore une fois ! Pour la prochaine,
laissez-nous seulement les lumières si c'est du lied…
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CNSM –
Récital de la classe de direction de chant d'Erika Guiomar
Voici sept ans que je parcours les saisons franciliennes… et mon
premier récital intégralement consacré au piano ! Il faut dire
que les programmes vraiment originaux sont peu ou prou au nombre d'un
par an, et qu'ils ne tombent pas toujours au bon moment. Par ailleurs,
je trouve la plus-value en concert moindre que pour le chant,
l'orchestre, le quatuor…
Il faut dire aussi que les pièces virtuoses habituellement choisies
m'ennuient un peu, même lorsqu'elles sont de qualité : mon intérêt est
en général déclinant, à densité égale, lorsqu'on habille le tout de
gammes, arpèges, et autres ornements aussi ostentatoires que peu
substantiels.
Ce concert était donc le choix parfait : la classe de directeur de
chant forme les chefs de chant,
c'est-à-dire ces pianistes excellents lecteurs qui préparent les
chanteurs sans se produire eux-mêmes en concert – sauf si telle star
veut son chef de chant pour plus de confort, bien sûr. Au lieu de leur
faire accompagner des chanteurs qui leur auraient nécessairement volé
la vedette, ils jouent seuls, des transcriptions de pièces symphoniques
et surtout lyriques.
Si l'on retrouve quelques classiques comme la paraphrase de Tannhäuser par Lisz et La Valse de Ravel, on y entend
aussi des transcriptions moins pratiquées : le Prélude des Gurrelieder (transcrit par l'une
des élèves, Lucie Seillet), la réduction pour quatre mains de La Mer de Debussy, de la main du
compositeur, es arrangements lisztiens d'Aida, la mort de Thaïs paraphrasée
par Saint-Saëns, une paraphrase originale de Faust (Rémi Chaulet), des
variations simples sur la Flûte
Enchantée, les Danses polovstiennes, une version de l'Ouverture
du Barbier de Séville émaillée de faux pains.
Outre l'intérêt de certaines pièces (La
Mer ainsi radiographiée, ou la spectaculaire mort de Thaïs), et
la beauté de toutes (moins convaincu par le Prélude des Gurrelieder, un peu minimaliste
ainsi, presque du Glass bien harmonisé), ce concert était
impressionnant par l'audible compréhension des pianistes de ce qu'ils jouaient.
Les plans, les équilibres internes, la logique harmonique étaient
soudains mis à nus : ces gens plongent au cœur de la musique, et le
font entendre. En cela, il existe des gammes sans doute plus égales,
des arpèges plus vigoureux (au demeurant, tous d'excellents doigts,
vraiment pas le tout-venant des chefs de chant !), mais j'ai rarement
entendu des pianistes regarder aussi profondément à l'intérieur de la
musique. On ne cherche pas les petites anticipations de basse et autres
expédients du virtuose, on appuie simplement les notes qui, dans
l'accord, exaltent la tension et la logique de succession. Très
impressionnant, passionnant, grisant.
Particulièrement aimé Pierre Thibout
(rien qu'en plaquant les accords simples de la marche des pèlerins de Tannhäuser, on entendait la
causalité de chaque accord, chacun pourvu d'un relief extraordinaire…
on entendait Wagner composer !) et Nicolas
Chevereau (judicieusement servi par la superbe paraphrase sur
Massenet, d'un véritable niveau de soliste), qui officie régulièrement
avec L'Oiseleur des Longchamps – prochain concert le 11 mai, autour des
berceuses.
L'un des meilleurs concerts de toute la saison francilienne, sans hésitation.
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samedi 23 avril 2016
Sibelius 4
& Concerto pour violon de Tchaïkovski – Joshua Bell, Orchestre de Paris, Paavo Järvi
Première partie originale (Concerto pour clarinette de
Nielsen, Quatrième Symphonie de
Sibelius !), où
Järvi rend à son habitude d'une
lisibilité parfaite cette déroutante symphonie encore plus étale que le
Sibelius habituel.
Le public, considérant la politesse mesurée de l'entracte et le délire
final, venait essentiellement pour le concerto et pour le violoniste.
De mon côté, si j'aime beaucoup ce concerto (comment ne pas aimer
Tchaïkovski, tout est tellement bien
écrit…), je j'ai jamais beaucoup aimé au disque le timbre perçant ni
les manières de
Bell.
L'occasion de réviser potentiellement mon jugement, l'ayant
soigneusement évité après des expériences négatives qui commencent à
avoir une dizaine d'années.
Mais voilà, en vrai il ressemble exactement à ce qui m'en était resté :
le son est puissant, les traits hallucinants de facilité, le chant
plane sans difficulté au-dessus de l'orchestre, les doubles cordes sont
complètement timbrées, chaque fusée est réalisée au cordeau, le tout
d'une justesse immaculée. Immense technicien, assurément. Le son, lui,
reste assez acide et strident, mais ce n'est jamais qu'une question de
timbre.
En revanche, et c'est là que ce fut dur, le musicien
est beaucoup plus insupportable encore qu'il m'avait semblé (j'avais
surtout trouvé le timbre déplaisant, sans réelle contrepartie). Je dis
souvent qu'on reproche aux interprètes de dévoyer Tchaïkovski, mais que
je ne l'ai jamais entendu Tchaïkovski sombrer par manque ou par excès
de pathos – c'est une musique sentimentale, la sobriété y fait du bien
et l'emphase n'y est pas hors sujet. (En revanche, et en particulier
dans la Troisième Symphonie, le manque de sens de la danse peut être
très frustrant.)
Bell ajoute partout des
portamenti lourdissimes (façon
Corelli dans Celeste
Aida), c'est-à-dire que les notes sont reliées entre elles
par un glissement – qui pourrait être élégant, mais qui est ici aussi
lourdement articulé que les notes elles-mêmes, comme si, dès l'entrée,
on était supposé déborder d'émotions lacrymales. À cette tendance, qui
déforme déjà la ligne (finalement assez sobre dans
ce concerto), s'ajoute une façon d'exagérer le
rubato jusqu'à la nausée –
autrement dit, il change de tempo quand il veut, même pour un bout de
mesure. Ce ne serait pas si grave si ses fantaisies arrivaient à perdre
jusqu'à Järvi : les décalages sont assez nombreux, et particulièrement
dans le final, pris si rapidement que le son ne sort plus de son
instrument, que le timbre s'en abîme, et que ses ralentissements
inopinés mettent régulièrement l'orchestre dans le décor. Ce n'est non
seulement pas très intéressant (le plus vite et le plus emphatique
possible) et pas très beau (ça pleurniche beaucoup, de façon
uniforme, et les traits semblent être exécutés pour eux-mêmes, pas dans
une logique musicale d'ensemble), mais c'est même un peu déplaisant
dans le côté irrespectueux qui affleure : peu lui importe manifestement
si les musiciens peuvent suivre, il fait son phrasé, son effet, sans
écouter ce qui se passe autour.
Le pire est que ça fonctionne, triomphe aux saluts : et, de fait, si on
voulait voir un prodige, on l'a vu, incontestablement parmi les
meilleurs poignets / doigts en activité.
Je me suis de la même façon interrogé en le voyant reparaître sans son
instrument : jamais vu un violoniste revenir ainsi les mains vides,
comme pour signifier qu'il ne donnerait en aucun cas un bis (ce qui
était étrange, vu que le concerto clôturait en plus le concert)… est-ce
une clause d'assurance, pour ne pas dépasser le temps d'exposition
imparti ? L'effet, en tout cas, avait quelque chose d'un peu
impoli vis-à-vis du public, comme si la discussion n'était pas ouverte.
Personne ne l'aurait obligé à faire le bis, mais en faisant
différemment, il donnait (peut-être tout à fait involontairement)
l'impression de renvoyer tout le monde un peu grossièrement. Disons que
cela participait de l'impression générale du concert.
Au demeurant, il ne faut pas se crisper dans ces cas-là : comme il
était clair dès les premiers instants que je détesterais cette
interprétation, plutôt que de nourrir une inutile mauvaise humeur, je
me suis mis en mode « écoute œuvre », et y ai pris beaucoup de plaisir,
et à terme il était même possible de goûter la beauté des traits
parfaits pour leur seule valeur technique. Accepter le point de vue des
musiciens, même incompatible avec nos goûts, peut sauver une soirée.
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Production du CNSM sous la houlette d'
Emmanuelle
Cordoliani, qui donne régulièrement, avec la
direction-accompagnement du piano de
Yann
Molénat, de ces ateliers
très complets qui mêlent le chant à la pratique
scénique.
Pour
Notre Falstaff, le
principe (pas réellement explicité dans le programme) semble une
fantaisie assez éloignée du sujet (les élèves ont-ils participé à son
écriture ?), une petite communauté villageoise qui défile pour jouer le
rôle-titre. J'avoue ne pas avoir très bien saisi l'histoire ni le sens
de tout cela, qui débute par de longs moments parlés, costumes
d'ambiance
sixties, propos
contemporains, noms empruntés à Shakespeare (mais distribués à
plusieurs personnages, comme en familles), le tout avec des
personnalités et relations qu'on a un peu de mal à saisir : trop de
personnages qui ont trop peu de temps pour se camper, je suppose.
Musicalement, ce sont des numéros isolés, largement issus des
Joyeuses Commères de Windsor d'Otto
Nicolai. Ce sont essentiellement des jeunes chanteurs, manifestement en
début de cursus : on sent les potentiels vocaux, mais pas encore
affinés pour la plupart d'entre eux, à l'exception notable de
Sahy Ratianarinaivo, ténor d'une
rondeur maîtrisée sur toute la tessiture, même pas de durcissement, de
blanchissement, de césure au niveau du
passage, vraiment un artiste (pas
inexpressif, d'ailleurs) pleinement rompu à son art et prêt à chanter
en professionnel (beaucoup de ténors en activité auraient aimé avoir
cette technique saine au départ !).
Il me semble que tous sont assez gênés par l'allemand, qu'ils
maîtrisent mal et mâchonnent de façon à la fois inexacte et
inintelligible. Je dirais bien, suivant ma marotte, qu'ils feraient
mieux de commencer par le français, mais si l'on est au CNSM, c'est
qu'on se destine potentiellement à la carrière, et l'on ne peut pas
faire l'économie de l'allemand. Je suis d'autant plus admiratif, en
fait : les grands élèves en sortent avec un très bon niveau
linguistique, comme en témoignent les beaux Zemlinsky dont je fais état
ci-après…
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vendredi 22 avril 2016
Wagner –
Die Meistersinger von Nürnberg – Herheim, Ph. Jordan
Production précédée et suivie d'une réputation non usurpée. J'avais
délibérément attendu la dernière pour entendre l'Orchestre de l'Opéra à son meilleur
(quitte à risquer la fatigue des chanteurs), et, de fait, même si
l'option de Jordan est
toujours celle du moelleux, jamais de l'incisif ou de l'antagonique, la
tenue d'ensemble et la tension continue étaient très réussies, dans une
salle (Opéra Bastille) toujours parfaite pour entendre un orchestre –
il faudrait vraiment construire un bon opéra et la changer en salle de
concert, ça battrait la Philharmonie !
¶ L'œuvre est objectivement
trop longue : enfermé de 17h30 à 23h30 pour voir une intrigue de
mariage contrarié à peine détaillée, c'est un peu exagéré. Et pourtant,
pas la moindre impatience à l'écoute, pas la moindre impression de
superflu, en tout cas dans la musique. Malgré sa réputation itigée,
l'œuvre est d'une qualité de construction équivalente à Parsifal, et même à avis supérieure
à Tristan (qui se distingue
des autres Wagner par l'harmonie sophistiquée plus que par la
structure). Un des plus grands Wagner, assurément : une abondance de
détails en permanence renouvelés, le petit frisson de l'archaïsme
contrapuntique en sus.
¶ Stefan Herheim prend un
parti pris assez peu original, eu égard à ses habitudes : l'intrigue
est vue par Sachs en train d'en écrire le poème en chemise en nuit.
Mais visuellement, cela s'incarne de façon très appropriée pour
Bastille : le secrétaire géant figure ainsi les stalles et tribunes
d'où tous les personnages viennent chanter l'office, la rue tient dans
l'intervalle entre deux meubles, etc. Simple, mais beau et lisible. La
différence vient surtout de la direction d'acteurs fine et très active
: jamais un personnage, même lorsqu'il ne chante pas (et Wagner Dieu sait que Dieu Wagner peut abuser
des tunnels de parole), n'est en repos. Dès qu'il est sur le plateau,
chacun joue, tout le temps.
Par ailleurs, Herheim creuse l'un des endroits les plus intéressants du
livret : la tentation de Sachs, poussé par Eva elle-même, de concourir
pour remporter sa main.
¶ Vocalement aussi, c'est une belle fête.
Un peu déçu par Julia
Kleiter, merveilleuse Zdenka, mais qui peine à projeter sa voix
pharyngée dans la tessiture très centrale d'Eva – elle pourrait aller
contre sa nature dans de petites salles, plus difficilement dans
Bastille.
Gerald Finley
(Sachs), pourtant à peine convalescent, parvient à sonner
remarquablement, avec un grain (et, chose rarissime à Bastille, des
mots) immédiatement perceptible. On n'entend pas que le volume de la
voix, on en perçoit les détails (et je n'ai pas eu l'impression qu'il
était sonorisé, le son restait très localisé et cohérent) ; dire qu'il
a longtemps été considéré comme un format Mozart & lied ! Pas
la moindre difficulté dans la tessiture hybride de Sachs, ni dans la
projection, ni dans l'espression, très fine (et je n'ai pas perçu son
petit accent anglais habituel).
Très admiratif aussi de Günther Groissböck, qui évoquait ce
soir-là le halo caractéristique du timbre de Kurt Moll, pour un des
meilleurs Pogner qu'on puisse entendre et espérer. Bo Skovhus (Beckmesser) semble
inaltérable, la voix a la même rugosité et la même solidité qu'il y a
vingt ans (où il semblait fruste, alors qu'il paraît désormais tout
frais pour son âge). Quant à Niina
Keitel, elle arrivait au pied levé le jour même et se fondait en
Magdalene avec une voix claire et expressive très persuasive ; la mise
en scène semblait ne lui poser aucun problème, et pourtant je ne crois
pas qu'elle l'ait chantée ailleurs. Impressionnant, une fille sur
laquelle on peut compter.
J'attendais beaucoup de Brandon Jovanovich (Stolzing), qui
chante les grands rôles dramatiques en Amérique du Nord et en Allemagne
; le plus beau Florestan qu'on puisse entendre, un très beau José, etc.
Je craignais que le moelleux du timbre annonce une voix moyennement
projetée, mais il n'en est rien : d'une matière barytonnante, il tire
des aigus mixés et souples, tout à fait radieux, et particulièrement
bien audibles. Sur des moyens peut-être similaires, la technique comme
l'effet sont à l'inverse de Kaufmann (qui est d'ailleurs sensiblement
moins sonore, soit dit en passant) : Jovanovich devient plus flexible
et détendu en montant, ce qui lui confère un côté aisé, radieux,
victorieux, tandis que Kaufmann devient de plus en plus tendu, ce qui
crée cette impression de personnage tourmenté, sans cesse au point de
rupture sans jamais l'atteindre. Et, mystère de la notoriété,
Jovanovich n'a manifestement pas de fan-club (moi excepté, donc).
Avec ça, six heures passent comme rien. Le plus agréable étant qu'on
les sent s'écouler, sans que
l'émerveillement cesse jamais. Mais prenez une journée de congé tout de
même, parce que tenir ça après s'être levé à cinq heures et bossé les
huit subséquentes, ce doit faire mal.
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4 roulades
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Hôtel de
Soubise – Schubert 12, Cyprès
de
Dvořák, Ravel, Boutry – Quatuor Akilone
Ce quatuor,
déjà célébré en ces pages pour le meilleur premier
mouvement de Ravel de tous les temps, récidive à Soubise : les autres
mouvements ne sont peut-être pas aussi éverestiques, mais l'ensemble
est parfait, généreux ; d'un tranchant limpide, toujours tendu, jamais
forcé ni strident, c'est la fougue et l'élégance à la française.
Très beau Quatuor de Boutry qu'elles ont créé : on sent l'héritier de
Debussy, Ravel, Bartók, tout en étant de la musique du second vingtième
(du XXIe, en fait). Les motifs et harmonies, même sans le recul
d'écoutes multiples, sont identifiables, on y entend comme des échos de
divers folklores européens, mais réagencés dans un langage complexe et
structuré. De la très belle ouvrage (qui vaut largement Greif ou Bacri,
par exemple).
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silenzio
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Programme remarquablement original au Musée d'Orsay : Mélodies
Persanes de Saint-Saëns, Haï-Kaï
de Delage, Poésies de
la lyrique japonaise de Stravinski, Haï-Kaï (instrumentaux) de Jacques
Pillois, plus quelques pièces de Massenet, Pierné et Caplet.
Pour ma part, j'étais avant particulièrement ravi d'entendre les rares
et évocatrices Mélodies Persanes
(hélas incomplètes, trois sur sept, ce que ne précisait pas le
programme avant d'entrer dans la salle…), du meilleur Duparc avec des
moyens pré-Duparc… Et, bien sûr, les Delage, même s'ils sont
peut-être plus intriguants et neufs que profondément exaltants, un
privilège de les entendre en vrai.
Je m'explique mal en revanche la catégorisation en concert familial :
les pièces n'étaient pas présentées, on ne disposait même pas des
textes (contrairement à l'habitude du lieu), la musique était quand
même difficile (très peu mélodique hors Saint-Saëns, et pas très pulsée
non plus), dissonante, peut-être même inquiétante pour de jeunes
oreilles. Essentiellement des pièces assez lentes, et la diction d'Amel
Brahim-Djelloul, pas dans ses meilleures heures, n'était pas assez
nette pour suivre aisément, même pour l'oreille aguerrie.
Pas exactement un concert ludique et festif, qu'on aurait
éventuellement pu habiller pour la jeunesse avec des présentations
adaptées, de petits récits illustratifs, etc.
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silenzio
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Astucieuse idée de rendre la formation plus polyvalente… Dans une mise
en scène de
Vincent Vittoz
qui essaie de raconter une petite histoire pour chaque chanson, au
besoin assortie de quelques dialogues, les élèves-chanteurs se
produisaient à tour de rôle dans une ou deux chansons, seuls ou en
petits groupes.
Avec des bonheurs divers, évidemment, les niveaux de ces grands élèves
(qui doivent approcher, pour la plupart de la fin de leur cursus) étant
très divers, et les caractéristiques de leurs techniques propres se
fondant plus ou moins aisément dans ces contraintes nouvelles. Mais
alors que je m'attendais à des techniques lyriques un peu pâteuses,
j'ai au contraire été frappé par l'effort de chacun de domestiquer ses
moyens (ce qui n'est sans doute pas aisé lorsqu'on est tout entier
tendu vers la carrière lyrique !) pour servir au plus juste cette
musique et ces textes.
Particulièrement impressionné par
Harmonie Deschamps,
qui troque son habituelle émission moelleuse au profit du vrai
belting,
avec une netteté et une aisance confondantes. Elle a assurément le
niveau d'une double carrière, future candidate pour les productions du
Châtelet.
Les deux seuls que je n'avais pas encore entendus ont particulièrement
retenu mon attention.
–
Anaïs Bertrand (déjà
régulièrement embauchée pour des concerts indépendants du CNSM, dans de
grandes salles) est un mezzo déjà très aguerri : plein de douceur mais
pas écrasé ni pâteux ; si elle continue à choisir judicieusement son
répertoire, elle (contrinuera d') aller loin.
–
Guilhem Worms est une
véritable basse noble, aux appuis profonds : contrairement à beaucoup
de ses collègues aux graves bien dotés, sa voix ne repose pas sur son
beau naturel, et reste émise bien dans le masque, ce qui lui autorise
toutes sortes d'audaces (chant en mode métallique / non métallique, par
exemple, selon la nuance voulue). Voix exceptionnelle, maîtrisée en
profondeur, et artiste sensible, capable d'adapter (ce qui est
particulièrement rare et difficile !) son timbre au style et à
l'expression. Même sans considérer la grande pénurie de son type vocal,
il ira loin.
Pour finir, une réelle surprise avec
Axelle Fanyo,
voix ample et généreuse, dont les contours un peu flous annonçaient
plutôt un futur dramatique qu'une interprète probe de la chanson.
Détrompons-nous : elle parvient à camper, avec une approche technique
tout à fait atypique, son personnage de façon très persuasive. Ça ne
ressemble à rien de connu, mais c'est beau et ça fonctionne – et Dieu
m'est témoin que j'exècre tout ce qui ressemble à la chanson visqueuse façon Te Kanawa.
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Concert à la Cité de la Musique. En première partie, la
25e
Symphonie de Mozart et le
Concerto pour hautbois de
Richard Strauss avec
François
Leleux :
toujours beaucoup d'engagement de la part de l'orchestre et de souci
des styles. Émerveillement en découvrant de façon aussi exposée le
timbre de François Leleux : moelleux, impalpable, ses aigus ont la
douceur des médiums de flûte… sa réputation ne l'a pas précédé
fortuitement.
Je tiens la
symphonie de Bizet (pas
la seule contrairement à ce que laisse croire la numérotation : la
symphonie
Roma
mérite aussi le détour) pour l'un des plus hauts chefs-d'œuvre de la
musique symphonique, regorgeant d'événements construits de façon
ludique ou dramatique, mais jamais rhapsodique… cette variété
extraordinaire de climats s'enchaîne avec un naturel, une évidence, une
continuité constantes. Et parvenir à enchaîner ce final en fugato aux
mélismes orientalisants du hautbois, dans ce second mouvement, voilà
qui est tout sauf enseigné dans les manuels du petit symphoniste !
L'enthousiasme des musiciens et le soin de
Pappano (allant jusqu'à varier le
tempo ou l'intensité des reprises) font merveille ici dans une
interprétation à pâte légère.
Après
Lorenza Borrani (ce
n'était pas elle ce soir-là, c'était Mats Zetterqvist, je crois),
meilleure konzertmeisterin de tous les temps,
voici
Clara Andrada de la Calle,
meilleure flûte solo de tous les temps : comment est-il possible de
timbrer aussi rondement (et d'exprimer aussi bien) sur ce petit tube
dont les plus grands tirent souvent des sons lourdement empreints de
souffle !
Premier bis très original de la Séguédille de
Carmen « chantée » par les vents
! Très réussi.
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Début d'une série d'échos sur les derniers concerts vus, par la lorgnette étroite de quelques détails spécifiques.
Ciné-concert à la Cité de la Musique (que, pour la saison prochaine,
l'institution a cessé d'appeler Philharmonie 2, choix judicieux) avec
le Brussels Philharmonic,
également présent sur la BO, que je découvrais en salle.
Musique très bien écrite, roborative, farcie d'emprunts explicites (pas
seulement à Herrmann : on y entend aussi un décalque du début de l'Oiseau de Feu)
et de références aux modes musicales de la période évoquée… Le timbre
de l'orchestre n'est pas particulièrement beau (en cela, je suppose que
les plus grands solistes intègrent d'autres orchestres), mais leur
générosité et leur enthousiasme, dans tous les pupitres (on sent à quel
point les cuivres jubilent, pour une fois où ils tiennent le plus clair
de la partie thématique !), sont assez grisants. Excellent moment – et
salle bien remplie mais pas complètement pleine, étrangement.
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