Au festival du matrimoine Un Temps pour Elles, expérience d'art total dans la grange dîmière de l'abbaye de Maubuisson : ces Contes de Jane Vieu (dont je viens de découvrir à l'instant qu'elle publiait régulièrement sous le pseudonyme de Pierre Valette, dont les chœurs liturgiques sont encore donnés de loin en loin !) offrent une aventure musicale et poétique dont le mélange donne le vertige.

Musique traditionnelle (élève de Massenet, cela s'entend), mais pas sans relief, ici arrangée pour septuor (quatuor + alto + contrebasse + piano) si j'ai bien suivi – puisqu'il existe une version orchestrale –, prévue pour accompagner des projections (à partir de dessins sur plaques de verre illuminées), cette fois-ci remplacées par des dessins réalisés sur des décors amovibles pré-réalisés et diffusés en vidéo sur les murs. Et à tout cela se superpose à deux textes (remarquablement incarnés par Marie Oppert, qui quitte le belt pour un chant legit, le versant plus lyrique de l'émission de comédie musicale) d'une grande qualité poétique, les récits d'Aladin et de la Belle au bois dormant, qui glissent sur les actions et insistent surtout sur les atmosphères et descriptions – ce qui est idéal pour une mise en musique.
Si Aladin décrit les richesses accumulées avec une gourmandise digne de Salammbô (la préciosité du lexique en moins), la Belle au bois explore une jolie idée, celle d'un « prince moderne », à bicyclette, et s'attache à évoquer le monde industriel, la stupeur devant la densité humaine, le bruit des nouvelles machines... avant que la Belle ne choisissent d'aller se rendormir sous la ramée où le Prince l'avait trouvée (version du conte garantie sans agression sexuelle).

Ces deux comptes étaient couplés avec le Septuor de Rita Strohl, plus conservateur que d'autres de ses œuvres , mais d'un élan romantique jamais démenti, en particulier dans les trois derniers mouvements, sortes de parangons des beaux mouvements chambristes du XIXe siècle.