Diaire sur sol

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mardi 29 juillet 2008

Mozart - DON GIOVANNI - Östman

Ecoute in progress. Etat de nos notes au cours de la première écoute, limitée pour l'instant à l'acte I.

C'est un peu le jeu de CSS : des instantanés. Nous sommes assez certains de réviser notre avis, peut-être radicalement, à la fin de l'écoute et surtout à la réécoute, en intégrant le principe de traiter l'oeuvre comme de la musique légère et secondaire, antidramatique, qui n'est pas notre goût mais qui est peut-être très réussi lorsqu'on l'a accepté.
Comme nous ne parlons pas de choses négatives et ne nous permettons guère de critiquer vertement les artistes lorsqu'il en est question, ce sera une exception potentiellement intéressante pour voir les coulisses de CSS, lorsque nous portons les premières impressions brutes sur papier, avant de comprendre le parti pris des interprètes. Le gros avantage étant que vu l'ancienneté de l'enregistrement et l'absence d'artistes francophones, il y a peu de chances de les blesser, ce qui fait partie de notre cahier des charges...

Commentaire au fil de l'écoute.

Ouverture.

Nous n'avons jamais beaucoup aimé Arnold Östman et son orchestre, qui sonne petit, étriqué et surtout avec un son aux cordes absolument égal entre l'attaque (plate) et le sostenuto [1] de la note (malingre). Comme chez Hogwood, sauf que l'orchestre de Hogwood a de belles sonorités, voluptueuses au besoin.

Gilles Cachemaille (Leporello) entre. Le français est moins mauvais qu'avec Harding à Aix, et la voix se tient mieux, mais ce n'est pas fameux pour autant. La lecture se veut gouailleuse, avec pour résultat des traits un peu gras et des accents un peu vulgaires.

Entrent Don Giovanni et Donna Anna. Tempo extrêmement vif, mais sans aucune urgence, tout est léger et froid. Une romance vive débitée en pensant à autre chose. Pour nous, voilà qui est totalement rédhibitoire, nous avons immédiatement envie de passer à autre chose (et cet état de fait se confirme au fil de l'écoute). Au moins, Kuijken - également très froid et peu dramatique - tentait une forme d'hédonisme, voire de poésie. Même si ça ratait, ça se défendait.

Pour notre part, l'impression persiste d'une recette appliquée pour vendre le nom Drottningholm, avec des tempi très vifs et des sons droits et très allégés, pour bien montrer qu'on est un authentique pionnier. En fait, à cette date (1990), c'est d'un conformisme affligeant.

On continue ?

Håkan Hagegård entre donc, et malgré quelques excès sur la ligne, pas forcément indispensables, le personnage est campé avec beaucoup de clarté et de fougue. Engageant.
Par la suite, son mordant et son expression le rendent proprement passionnant.

Las ! Son Commandeur, Kristinn Sigmundsson, qu'on entend à peine à ce tempo-là (le trio de la mort est expédiée en un instant, avec une indifférence proche du ridicule, il nous a fallu le remettre pour comprendre ce qui se passait), sonne extrêmement frêle. Et cette rupture de l'orchestre, suspendue comme un disque interrompu, mécanique, froide, n'arrange rien pour dramatiser sa mort - ou à tout le moins en respecter la solennité.

Mais ce ne serait rien s'il n'y avait Arleen Augér, absolument perdue. Qu'est donc devenue la déclamation tragique, millidoles ! Une telle indifférence à la situation dramatique est-elle concevable ici ? Témoin Ah, l'assassin mel trucidò ! ("Ah, l'assassin me l'a tué !"), d'une mollesse difficile à justifier.

A la réécoute, on finit par trouver quelque chose, mais en réalité, cette Anna tient plus de l'hystérie superficielle que du désespoir tragique qui plombe en principe tout le Don Giovanni. Ce que corrobore assez ce très joli cri d'entrée :

.

Et tout à l'avenant. Nous éprouvons d'autant plus de peine à le confesser que nous aimons beaucoup Mlle Arleen Augér, dans une veine à la réflexion sans doute plus sulpicienne...

Faut-il qu'en plus nous évoquions ces récitatifs ? Certes, ils ne sont pas le meilleur de Mozart, mais par rapport aux Noces, ils sont concis et très efficaces - drôles aussi. Ici, leur lenteur et l'indifférence du continuo dynamitent pour partie les efforts des interprètes.

La voix de Bryn Terfel (Masetto), déjà très solide et impeccablement placée, n'a pas encore acquis sa couleur si spécifique, et lorgne un peu ici vers les harmoniques de la basse standard (avec un vrai bonheur, mais peu d'expression). Dans ces années, il est de façon générale assez peu intéressant eu égard à ce qu'il est devenu. L'italien en revanche est déjà excellent (cette formation était inclue dans ses études, avec notamment l'escrime...).

Barbara Bonney propose une Zerlina légère, très lyrique, un peu maniérée. Il faut dire que la doctrine d'appoggio [2] d'Östman n'aide pas franchement au naturel. Pas très concernée par son texte non plus, mais suffisamment pour que le personnage vive. A l'époque, son accent américain reste tout à fait raisonnable.

Heureusement qu'on trouve Della Jones (Elvira) dans le coin, pas du tout intense et violente comme on aurait pu le penser, mais au contraire toujours tendre, et avec un vrai bonheur. En voilà une qui a des mots et une voix parfaitement au service de son personnage !

L'Ottavio de Nicol van der Meel aussi est un bon point, avec une belle couleur de haute-contre, légèrement élimée, mais gracieuse et noble. Un des rares à profiter de l'esthétique d'Östman.

Enfin, nous ne pouvons que rejoindre les éloges sur la fête paysanne tout à fait dans le caractère, lente et un peu pesante, voire pataude. Très réussi et amusant, cela s'impose comme une évidence.
Autre satisfaction, Là ci darem la mano qui s'impose à titre personnel comme une référence, avec son élan léger et pressant, et un Hagegård redoutablement enjôleur. Splendide, j'ai même pu écouter cette scie en entier - et avec plaisir !

Le final du I semble plus travaillé, avec de beaux changements de couleur, même si tout est toujours pressé (et les passages les plus rapides traditionnellement, ralentis, de façon à sembler toujours au même tempo...). L'orchestre semble gagner en épaisseur et en urgence.

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Nous n'aimons pas être dur, mais c'est là tout de même un sacré gâchis : avec une réalisation technique parfaite, nous entendons le seul Don Giovanni (devant Kuijken) qui n'ait absolument rien produit en nous, alors que même mal joué, le résultat est toujours magnifique. Du sabotage pour en faire un épigone du pire Martin y Soler.

De ce naufrage, nous sauvons tout de même quelques prestations exceptionnelles comme l'Elvira de Della Jones (mais nous sommes assez inconditionnels de sa voix et de son expression, quoi qu'elle fasse, et elle se montre ici sous un jour assez pâle) et Hagegård, qui forment un couple-passerelle buffo-serio assez idéal. Nicol van der Meel représente aussi une belle friandise.

Nous sommes surtout très agacé par ce traitement en surface, sans aucun impact dramatique, réalisant minutieusement chaque appoggiature, mais rejetant toute expression textuelle comme un manque de goût, au point de rendre l'un des opéras les plus urgents du répertoire d'une jolie fadeur assez inférieure à la valeur de la partition.
En l'acceptant, il doit être possible de passer un excellent moment, car la réalisation technique est parfaite. [3] Une fois de plus, tout dépend des critères de chacun...

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Notes

[1] C'est-à-dire le 'soutien' de la note, le coeur de celle-ci, après l'attaque.

[2] On parle ici de l'attaque surélevée de la première de deux notes égales en hauteur, chez les chanteurs, une appoggiature non écrite, mais exécutée à l'époque.

[3] Sur le plan de la qualité sonore, on entend tout de même une rupture très audible entre Fin ch'han dal vino et le récitatif qui précède.

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vendredi 18 juillet 2008

Divertissement sur sol

Une adorable caricature en vidéo de la présidentielle américaine.

Deux précisions sur la traduction française :

  • un jeu de mots sur le containment vietnamisant d'Al-Qaida (scène du porte-avions) n'a pas été traduit ;
  • on entend très bien l'accumulation absurde de mots creux autours du change chez Barack Bambi, ne pas se laisser abuser par le texte français à peu près sensé.

mercredi 9 juillet 2008

La jungle perdue

Si même les habitants de la forêt équatoriale américaine (certains malgré eux sont très présents ces derniers jours) se mettent à parler de forêt tropicale indienne pour causer d'eux-mêmes, le sens premier est définitivement perdu...

Requiescat in pace.

mardi 8 juillet 2008

Votez Hulot

Etrangement, la Bacchanale de Chopin (oui, ça existe) a résonné à mes oreilles.

Chouette.

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N.B. :
Tao-Lseu a dit : il faut savoir pour comprendre.

dimanche 6 juillet 2008

Maurice OHANA, guitare intégrale (Stephan Schmidt)

Beaucoup de simplicité dans cette lecture fortement consonante et avenante, mais sans volonté néo-, réellement contemporaine. Sans nulle surcharge, des climats poétiques, où la répétition, voire le silence ont aussi bien leur place que la recherche de textures ou d'harmonies.

Exécution aux caractères très variés de Stephan Schimdt, dont le son (de pair avec Ohana, de toute façon) est un peu gris, à mi-chemin entre le métal et la rondeur, mais dont l'interprétation bénéficie d'un certain degré d'évidence.

vendredi 4 juillet 2008

Valeureux sénateurs

En ce moment même, depuis vingt minutes, se déroule un débat autour de l'insertion d'une virgule dans un article du projet de loi sur la modernisation de l'économie. Respect.

mercredi 2 juillet 2008

Parangon du mauvais goût

On parle régulièrement ces temps-ci, dans nos fréquentations inavouables, d'Albert Ketèlbey, compositeur britannique qui symbolise ce que le mauvais goût a produit de plus redoutable.

C'est un mélange entre pittoresque de pacotille, assez drôle, comme on en trouve en abondance dans les opéras français du XIXe siècle (avec des démons qui dansent la valse ou des tamouls avec la pureté de langue de Diderot), et pour 90% du dégoulinage anglais qu'on retrouve essentiellement désormais en musique de film (mais ici à dose très condensée).

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La pochette la plus conforme à l'art de Ketèlbey.

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Réputation méritée. Ca a du charme, mais tous ces poèmes symphoniques (la seule chose qu'il ait commise) sont dans un style totalement identique, parfaitement interchangeables. Attention : à doses trop rapprochées, Ketèlbey favorise l'acquisition d'un diabète de type 2.

Je penche tout de même pour un peu de second degré, si j'en crois mes oreilles pour le texte du _bazar persan_ :
Bak-chich, bak-chich A-allah !
Bak-chich, bak-chich A-allah !

Humour anglais...