Concert sur sol n°127.

À nouveau une formidable production par Oya Kephale, troupe amateur de très bon niveau réunissant chœur et orchestre, dévolue à l'opéra comique – et depuis plusieurs années plus spécifiquement à Offenbach.

Je tenais déjà l'œuvre, peu jouée, pour l'un des meilleurs grands formats comiques d'Offenbach : elle n'a pas les mêmes sommets musicaux que Le roi Carotte ou Barbe-Bleue, pour autant l'inspiration y est d'une belle égalité, pour des ariettes et ensembles très courts, mais frappants, chacun doté de sa propre couleur, sans trop de cadences offenbachiennes stéréotypiques. Et surtout, l'articulation de la vivacité de la musique et de l'inventivité du théâtre, s'appuyant sur un livret virtuose additionnant travestissements, vastes quiproquos bien bâtis et scènes de théâtre dans le théâtre, procure une jubilation constante.

Quelques grivoiseries assez hardies (pas du niveau du roi Carotte, certes), des jeux autoréférentiels (avec prise de conscience des personnages qu'ils sont prisonniers d'un « vaudeville », au sens XIXe), des portraits plaisants… qui sont portés par une mise en scène d'Emmanuel Ménard, particulièrement riche (les choristes sont sans cesse mis à contribution pour des scènes d'arrière-plan particulièrement expressives, bien pensées, cohérentes), et tout le monde joue en se donnant à fond… Résultat, j'ai été largement plus convaincu que pour la production pro de haut niveau de l'Opéra-Comique (que j'avais pourtant énormément aimée).

Les solistes étaient remarquables aussi, belles voix bien projetées, abattage… et en particulier Amandine Lavandier dans le rôle-titre : timbre riche et projeté, diction impeccable, et une expressivité scénique exceptionnelle, parvenant au plus grand degré d'art – on parvient à différencier à l'œil nu les moments où elle joue la femme, ceux où elle joue la comédienne, et ceux où elle joue la comédienne qui joue un rôle qui n'est pas le sien. Elle habite la scène d'une façon très impressionnante, tout en chantant magnifiquement – pour le coup à un niveau professionnel, avec une sorte de timbre de soprano lyrique dans une tessiture de mezzo (avec la patine due à la tessiture plus grave). C'est très impressionnant – et même techniquement plus abouti qu'un assez grand nombre de chanteuses du circuit pro entendues dans ce répertoire.

Sur tous les plans, cette soirée est une griserie.

Il reste des places ce soir et demain. Et les bénéfices vont à des œuvres caritatives.

https://www.oyakephale.fr/productions/madame-favart/