Voyez le traquenard.

La vieille Europe qui ânonne son mandarin face à la jeune Chine, bien plus identifiable et nettement plus à son aise (jeunesse de la voix, style...).

Malgré le caractère toujours un peu identique de sa prononciation des différents idiomes, on ne peut que saluer cependant le courage et la bonne volonté linguistiques de Domingo qui, à défaut d'excellence, sont sans limites.

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Musicalement, on se trouve en plein coeur du sirop à la chinoise selon le goût de la Chine de Mao, qui reprend les recettes de l'opéra puccinien et de la musique de film américaine postkorngoldienne. Dégoulinant au delà du raisonnable, mais souvent très efficace, quelques très beaux thèmes existent.

On entend ici en introduction le thème du choeur d'éloge à l'Empereur dans Turandot de Puccini. Clin d'oeil à la civilisation européenne (ou plutôt à l'influence de la Chine sur l'Europe), reprise précise par Puccini de thèmes folkloriques existants (ce qui serait relativement étonnant), ou simple proximité plus ou moins fortuite, il faudrait vérifier.
Mise à jour du 20 septembre : Renseignement pris, il s'agit d'un air chinois authentique, Moo-Lee-Wha, réutilisé parmi d'autres par Puccini dans Turandot, et connu en Europe dès le XVIIIe, « un air mentionné à la fois dans un guide de voyage anglais et dans un livre allemand sur l’histoire de la musique de la même époque » (dixit Elvira).


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Ce qui est en revanche véritablement intéressant réside dans la possibilité de mieux cerner quelque chose qu'on pouvait pressentir, mais qui se constate immédiatement ici : la tessiture d'un interprète traditionnel chinois.

Considérant que Domingo ne tient plus le sol 3 sans difficulté, la tessiture apparaît nécessairement comme celle d'un ténor grave (voire d'un baryton), ce qui correspond plutôt à un mezzo ou un alto côté féminin qu'à un soprano. Malgré l'usage de techniques d'endurance, on peut en déduire que l'opéra chinois utilise des tessitures nettement moins spinte ("poussées") que l'opéra européen - il est vrai plus complexe musicalement et plus divers stylistiquement.

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Quelle conclusion en tirer ? Outre qu'il faut se méfier des symboles pour éviter les stigmates, peut-être le souvenir du triomphe de l'anglais international - amateurs de poires mixées s'abstenir.