Diaire sur sol

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dimanche 22 février 2009

Bach - Variations Goldberg - Catrin Finch, harpiste

Autre disque récent.

Juste pour montrer que la DGG n'investit pas seulement sur des entreprises sans profondeur. Non pas que Bach à la harpe soit du domaine du bon goût absolu - et d'autant que l'interprète en question livre une lecture assez sucrée de l'oeuvre -, mais c'est à ma connaissance une première. Et Bach, et en particulier les Goldberg, se prêtent si bien aux transcriptions diverses...

On peut rappeler nos références personnelles et très subjectives des Goldberg, en commençant par les plus essentielles pour nous :

  • Kurt Rodarmer, avec une guitare au son assez métallique, qui frotte et danse incroyablement.
  • Murray Perahia, pour la poésie de son piano et de ses nuances - évidemment.
  • Glenn Gould 1955, pour le rebond et l'articulation remarquable de chaque voix.


Pas de clavecin, car pour Bach dans ses oeuvres qui ne sont pas des suites, c'est pour nous une épreuve : comment faire vivre cette musique à la régularité rythmique déjà potentiellement étouffante si l'on ne dispose pas de nuances dynamiques ? Se pose aussi la question des silences, le plus souvent absents des partitions, mais dont la respiration permet de faire vivre la musique de Bach (et distingue les grands interprètes), plus difficile à obtenir sur clavecin du fait de l'absence d'étouffoirs (la résonance ne peut pas être maîtrisée aussi 'injonctivement' qu'au piano).

Le Temple du bon goût

Rien que pour le plaisir, la pochette merveilleuse du dernier album de Domingo dont je découvre à l'instant l'existence :

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(On notera le très habile collage entre une photo déjà vue - même série que celle du Tristan ou bien de l'intégrale des airs de Verdi ? - et l'image estompée du saint homme disparu.)

A bien y réfléchir, j'avais dû en entendre parler, mais je n'avais pas souvenir que Domingo était de la partie...

Il aura décidément tout fait. Entre les siruposités pucciniennes (mais orchestrées comme du Donizetti et harmoniquement restées à Cannabich) et les jolis slows avec boîte à rythme, c'est décidément très amusant, d'autant qu'à son habitude son aptitude idiomatique est assez... espagnole. Même pour le français que je suis, son italien ressemble assez peu à de l'espagnol.

Sa voix calibrée pour être sonore et large, qui n'a jamais été facile, et accessoirement vieillie, a qui plus est des difficultés à se prêter à l'exercice.

On a eu la bonne idée de le flanquer de chanteurs plus spécialistes de ce répertoire, qui s'en tirent mieux et mettent surtout en évidence son exotisme linguistique. Bocelli, dans ce répertoire léger, capté de plus près par les micros et dont la voix plus ténue mais plus franche n'est pas réverbérée par les arrangeurs, rayonne, de même que le délicieux filet gracieux de Katherine Jenkins (qui vaut bien Kirkby). Il est vrai que l'anglais ne flatte pas le volapük occidental qui semble son mode d'expression le plus naturel.

On s'épargnera le commentaire sur la qualité littéraire des chefs-d'oeuvre de Wojtyła, naturellement - ce serait mesquin, d'autant que repris par le choeur de séraphins, qui résisterait ? [Et par ailleurs, c'est plutôt de la jolie prose, pas vraiment des poèmes, des sortes de pensées joliment agencées.]

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C'est simplement de l'amusement, qu'on ne se méprenne pas, sans condescendance ni sarcastiqueries : il existe un public pour ce type de musique, par ailleurs très agréable à écouter. Et qui n'a pas de quoi être méprisé, ça ne répond tout simplement pas aux mêmes besoins que les Variations opus 31 de Schönberg - et je ne suis pas tout à fait sûr de ce que je préfèrerais écouter des deux, à dire vrai.

Mais il est vrai que l'association entre la dévotion un peu idolâtre à une figure humaine, le surf mercatique sur la disparition d'un personnage populaire, la maladresse de la confection de la pochette et le caractère suprêmement kitsch du contenu (poèmes gentillets et musique conçue pour être facile et sentimentale) et du mélange entre les intervenants fait immanquablement sourire par toutes les caricatures qu'elle assemble d'un seul coup.

Et vous pouvez rire gentiment avec nous en écoutant les généreux extraits fournis par Deutsche Grammophon Gesellschaft.

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Dans le genre, on peut tout de même plutôt se tourner vers des valeurs sûres (assez roboratives). Et plus à même de satisfaire l'amateur de lyrique du fait de leur son nettement moins trafiqué (les boursouflures et raccommodages des plans sont tout de même épouvantables dans Amore infinito).

En premier lieu du lyrique dégoulinant mais terriblement convaincant, avec un effet psychostimulant très efficace pour donner du coeur à l'ouvrage sur un travail un peu fastidieux.

Et puis, tout récemment, un disque moins à mon goût, mais qui force l'admiration. Les arrangements, pourtant par le même auteur que pour le disque d'hommage à Mariano (où ils étaient assez terrifiants), sont très colorés et assez savoureux, tandis qu'Alagna adapte avec bonheur son émission à un genre semi-lyrique. Et puis ses talents de bateleur sont connus, et éclatent enfin sans retenue. [Ce qui donne sans doute une petite idée du type de Pelléas qu'il disait vouloir chanter.]

Manqué !