Sandrine :
Concernant Netrebko , il me semble qu´elle a fait la Lucia en italien, est-ce que vous ne confondez pas avec Dessay qui l´a chanté en francais ?
Je faisais simplement allusion à sa prononciation des langues étrangères. Son italien est singulièrement opaque et informe, même si sa simplicité vocalique la protège des ravages qu'elle a pu faire en français. Ca reste quand même considérablement moche si on regarde les choses sous cet angle. :)
Autrement dit : je trouve Netrebko très convaincante, mais il est très dommage qu'elle abîme autant les langues... Avec l'image, ses talents d'actrice et de ballerine compense sans problème, même pour quelqu'un de particulièrement sensible à ce paramètre, dans mon genre. Au disque ou en retransmission radio, en revanche, c'est souvent assez douloureux.
Effectivement, soprano colorature ne désigne pas forcément un soprano qui monte tres haut et qui a un timbre tres clair mais un soprano doué pour
l´ornementation : elle peut être aigue ( la Reine de la Nuit) ou plus grave ( Leonora du Trouvere, ainsi que vous le citez ) et avoir n´importe quelle couleur .
La colorature concerne juste l´agilité .
Tout à fait, mais par raccourci, on l'utilise souvent comme abréviation pour "soprano léger colorature" ; et en plus de cela, le soprano léger colorature a toujours un répertoire plus aigu (du fait des rôles) que le soprano léger standard... D'où les confusions.
Si Gruberova chante dans le ton original , pourquoi la Casta Diva de Callas me semble plus bas ?Parce que c'était la tradition de chanter cet air plus bas (et que Callas n'aurait pas plus le faire un ton plus haut). Il existe de toute façon plusieurs états de la partition, plus ou moins hauts, et dans l'édition Ricordi "officielle", Casta diva est bel et bien en fa...
Enfin ! une notule tout entière consacrée à Mme Gruberovà ! C'est Noël ! Ou bien serait-ce parce que son anniversaire se profile à l'horizon ?
N'étant ni particulièrement adorateur de Gruberová (mais si j'aime beaucoup certaines choses avec elle, une majorité d'ailleurs), ni suffisamment pourvu en temps, je ne peux pas faire état de tout. Surtout que, ne l'ayant jamais entendue en salle, je crois que je passe à côté de la vérité de cette voix qui a, de l'avis unanime, une présence particulièrement spectaculaire, qui compense son niveau de jeu scénique (régulièrement catastrophique).
Concernant les différents qualificatifs de la voix (légère, dramatique, lyrique etc.), j'ai toujours l'impression que chacun a ses propres repères. Le jour où je suis tombé sur une classification des rôles selon leurs tessitures (laquelle sert, m'a-t-on dit, pour les théâtres allemands), j'ai parfois été un peu surpris... notamment dans la catégorie Dramatische Koloratur qui englobe à la fois la Leonora du Trouvère et la Reine de la Nuit.
Ah oui, la Fach ! C'est un truc hallucinant en effet, on regroupe les voix par caractère, et de façon transversale aux répertoires.
Par exemple, le mezzo lyrique, c'est pour Arianna de Monteverdi (comme si n'importe quelle voix ne pouvait pas tenir cette tessiture, selon l'orchestre, la salle et la couleur souhaitée !), Dido, Dorabella, Sesto, Carmen, Suzuki et Octavian, autant de rôles qui réclament des qualités de projection, d'agilité et de cantabile totalement différentes. On peut avoir un soprano léger avec une superbe ligne dans Dido, pour Carmen aussi bien un mezzo léger qu'un mezzo dramatique (pas forcément puissant), alors qu'Octavian réclame une projection extrêmement performante. Sans parler des caractéristiques timbrales attendues !
Certes, c'est utile pour faire travailler en troupe, mais c'est vocalement et stylistiquement parlant, une aberration complète.
Je profite de ma roulade pour dire que Nice et Paris auront, d'ici deux à trois semaines, la chance d'entendre Norma avec Gruberovà : l'occasion de constater qu'elle possède des moyens vocaux et une présence dans le rôle tout à fait extraordinaires.
La question n'est pas celle des moyens, mais du style. C'est très... personnel. En Rosine du Barbier, ou dans les Tudor, je fonctionne totalement : affecté et maladroit, mais tellement vivant qu'elle permet d'animer toutes les séquences un peu lisses de la partition.
En revanche, dans Norma qui se soutient parfaitement seule, je suis beaucoup moins convaincu. On est très loin de mériter les anathèmes qu'on lit souvent, mais je ne suis pas complètement enthousiaste, ça reste plus amusant qu'exaltant, en ce qui me concerne.