Friedrich WITT — Symphonies d’Iéna et « Ah ça ira »
Par DavidLeMarrec, samedi 18 octobre 2025 à :: Portraits :: #3412 :: rss

Je découvre tout à la fois le compositeur, qui écrit dans la veine d’un tout premier romantisme encore très largement marqué par la langue et les formes classiques (structure des thèmes, menuets…), simplement un peu plus versatile du côté des coloris harmoniques (et donc des émotions)… et le fait que sa Symphonie en ut « Iéna » a été un temps attribuée à Beethoven ! Autant la chose paraît envisageable pour les symphonies de Ferdinand Ries, voire Bernhard Romberg, autant le point commun avec Witt me semble se limiter à celui d’un style qu’on sent à la fois héritier et postérieur à Haydn.
Pour situer Witt : contemporain de Beethoven (1770-1836 !), né dans le Württemberg et officiant une bonne partie de sa carrière à la Cour de Würzburg.
Il existe en réalité, de l’Orchestre de la Ville de Winterthur (1956) à la Kölner Akademie (2015, davantage marquée par les mouvements musicologiques), il existe un assez respectable nombre d’enregistrements des quatre symphonies les plus connues de Friedrich Witt (ut « Iéna », la majeur, la mineur, ré mineur).
La présente version, dirigée par l’excellent flûtiste explorateur Patrick Gallois, se détache pour son naturel ; pourtant les timbres du Sinfonia Finlandia Jyväskylä ne sont pas du tout colorés (le même type de pureté très « blanche » que le Tapiola Sinfonietta, pour situer) et leur manière d’articulation reste plus tradi qu’informée ; mais l’épure de leur geste, la légèreté de touche, l’intelligence des phrasés rend cette interprétation particulièrement délectable – par rapport à toutes les autres, elles met davantage en lumière les jubilations thématiques (final de la Symphonie en la majeur) et les beaux glissements harmoniques (adagio cantabile de la Symphonie en ut), qui passent plus inaperçus dans les autres versions.
[Pour situer, la ville de Jyväskylä se situe au milieu de la partie Sud de la Finlande, en droite ligne au Nord de Helsinki – en plein dans la région des grands lacs au Nord de Lahti.]
Le bonus, c’est ce final de la Symphonie en la majeur, qui se fonde sur le thème de la chanson révolutionnaire Ah ça ira !, mais avec beaucoup de grâce et de gaîté naïve, sans aucune effusion politique – je l’ai toujours entendu utilisé de façon assez sauvage, même dans les œuvres du temps qui ne sont pas des brûlots anti-Terreur.
Outre la beauté des thèmes, vraiment d’une évidence folle (on pense au naturel de Mozart, à un Haydn légèrement romantisé, un peu en deçà du Beethoven de la Première Symphonie, et plus ponctuellement aux poussées de mélancolie d’Édouard du Puy…), je suis frappé par les trouvailles harmoniques, une ambiance d’opéra comique français dans l’adagio cantabile de la Symphonie Iéna. L’atmosphère générale est vraiment très belle et pénétrante, en particulièrement dans cette version.
Le Concerto pour flûte en couplage fait également partie des meilleurs que je connaisse – là aussi, on peut penser à celui de Dupuy.
Chaleureusement recommandé pour ceux qui veulent renouveler leur écoute des symphonistes du début du XIXe siècle !
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