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Carl LOEWE – Gutenberg & les archevêques zombies


Je poursuis ma documentation à base de captation de déchiffrages. L'idée étant de passer au stade supérieur de la notule, celle qui inclut le son (et même l'image).

Oratorio étonnant, débordant de chorals et de thèmes archaïsants qui sous-tendent le discours. Gutenberg y débat avec Faust (Johann Fust), qui dans l'histoire véritable fut son investisseur, puis celui qui le dépouilla de son invention. Ici, au sein d'une guerre (réelle, avec des soldats et des batailles) entre archevêques, Fust dirige une milice qui détourne l'imprimerie pour produire des pamphlets politiques et religieux… et sa fille, Maria, est bien sûr le 𝑙𝑜𝑣𝑒 𝑖𝑛𝑡𝑒𝑟𝑒𝑠𝑡 de Gutenberg.

C'est à nouveau un déchiffrage – je ne l'avais lu qu'une fois, il y a quelques mois. Et j'en avais témoigné dans la série qui en rendait compte.

Cette vidéo contient donc, enchâssés comme le bâton de saint Boniface, mes traductions, commentaires musicaux et contextuels. Je les reproduis ci-après pour ceux qui voudraient écouter en faisant autre chose, ou qui, sait-on jamais, ne voudraient que lire.



[[]]

 

𝔊𝔲𝔱𝔢𝔫𝔟𝔢𝔯𝔤

Un oratorio de Carl Loewe

(1837)


                     Comme dans cette Ouverture, partout beaucoup d'effets
                     de chorals, de contrepoint ancien, pour suggérer l'atmosphère
                     de la Mayence de la Renaissance. Cet oratorio dispose vraiment
                     d'une couleur propre.
                     Par ailleurs, la partie vive de l'Ouverture, très différente, davantage
                     post-classique ou jeune-romantique, est particulièrement réussie.


    Le poème de la pièce est dû à Ludwig Giesebrecht, qui fut un de
    ces jeunes enthousiastes de Napoléon, engagé volontaire, avec
    son frère, dans les hussards du Mecklembourg-Strelitz.

    L'action se déroule à Mayence, alors que la machine de Gutenberg
    a déjà été inventée et développée.

    L'atmosphère est celle de guerres religieuses ; pas encore les
    guerres entre catholiques et luthériens, mais une lutte entre
    deux archevêques. De 1461 à 1463 – à la fin, donc, de la vie
    de Gutenberg, deux archevêques mènent une lutte pour le
    pouvoir.
   
    Thierry d'Isembourg est élu archevêque de Mayence en 1459
    avec peu de voix d'avance sur Adolphe de Nassau. Mais il
    refuse de payer l'impôt sur les bénéfices dû au Pape à chaque
    succession, se retrouve ainsi excommunié, et se fâche avec
    l'Empereur.

    La guerre est perdue sur le terrain militaire par Adolphe, mais
    avec l'aide des bourgeois de Mayence, il s'introduit dans la ville
    et, au termes de combats qui font 400 morts, s'en empare,
    laissant quantité d'habitations (et un cloître) incendiés.

    Après négociations, Thierry laisse la place à Adolphe victorieux
    contre quelques fiefs. C'est à cet archevêque excommunié que
    fait référence Gutenberg, je pense, dans la première scène de
    l'oratorio.

    Faust, décrit comme le meneur des citoyens de Mayence, est
    manifestement une version de Johann Fust, l'investisseur qui,
    après avoir financé l'invention de Gutenberg, en a obtenu
    la propriété auprès du tribunal –

    Gutenberg avait été obligé de tout reprendre à zéro.

    Ici, Faust est aussi le meneur d'hommes violents, et le père de
    Marie, que nous découvrirons plus tard.

    C'est donc tout le grand contexte de la vie de Gutenberg et
    de la Mayence du XVe siècle qui passe dans cet oratorio.

    Ces épisodes étaient-ils si bien connus du public d'oratorio
    du XIXe siècle, y compris de la région ? 

    (Que ce soit un sujet d'oratorio, c'est-à-dire d'opéra sacré
    à visée édifiante, ne laisse pas d'étonner, également.)

    Les sujets en sont en général plutôt tirés de l'écriture,
    mais le genre connaît un vif succès dans l'Allemagne d'alors
    et certaines œuvres deviennent plutôt des opéras sans mise
    en scène.

    [vers la fin de l'Ouverture]
    Thème de choral archaïsant à la basse – je n'ai pas
    vérifié s'il s'agissait d'un pastiche écrit par Loewe
    ou d'un emprunt (c'est le plus probable, et le texte
    du Psaume est sans doute en relation avec l'intrigue).

Première scène : introduction et scène d'ensemble

                                      GUTENBERG
    « Ô Mayence lumineuse, dont les forêts ont fourni le bâton
       de saint Boniface, qui apporta la foi de la Croix aux Allemands »


                                      GUTENBERG
             Comme la nuit autour de toi déploie ses ailes,
             Et les torches vacillantes et incertaines
             Apportent la guerre civile, qui a brisé
             L'ordre de la cité au moyen du sacrilège.

       Ô Mayence lumineuse, dont les forêts ont fourni le bâton
       de saint Boniface, qui apporta la foi de la Croix aux Allemands »

                               
    Un groupe de citoyens armés, menés par Faust    
    (pas Georg Faust, a priori, l'alchimiste qui donne naissance à la légende), remonte la rue et     chante :

    CHŒUR DES CITOYENS ARMÉS
        Ô fière Mayence, fondée par Rome,
        Fille intrépide de la vertu romaine,
        Tu as proclamé à nouveau ta liberté
        Et chassé la cohorte des tyrans !


    GUTENBERG, en même temps que le chœur
    Ton évêque, tes chanoines se détournent
    De toi en frémissant —
        Et dans les mains d'un prêtre banni,
    Le bâton sacré de saint Boniface !


    CHŒUR DES CITOYENS ARMÉS
    Une voix ne résonne-t-elle pas ici ?
    N'y a-t-il pas quelqu'un dans l'ombre ?

    FAUST
    Halte, qui es-tu ?
    Nomme-toi !
   
    GUTENBERG, avec calme
    Gutenberg. Tu me connais, Faust.


Le duo Gutenberg-Faust et tout le reste de l'acte sont déjà captés, il faut à présent continuer de les traduire et de les monter !


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