Carnets sur sol

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samedi 29 février 2020

Le défi 2020 des nouveautés – épisode 4


Nouveautés écoutées et commentées de ces dernières semaines (mises à jour au fur et à mesure dans ce tableau).

Du vert au violet, mes recommandations.



écouté œuvres
Cherubini Discoveries ; Orchestra Filarmonica della Scala, Chailly (Decca)
→ On profite pour une fois du son si singulier de cet orchestre (le tissu mat et chaleureux de ses cordes, inimitable, et de sacrés souffleurs vifs et colorés) à la fois dans du symphonique et du rare…
Mais.
1) Si la symphonie est convaincante, pourquoi cette enfilade de marches de circonstance, très belle démonstration érudite de la place centrale de Cherubini dans la pompe parisienne (notamment funèbre, une prochaine notule l'explorera de plus près) de la Restauration ? Ce n'est musicalement pas très nourrissant. On n'a pas forcément très envie d'y revenir, sauf pour la marche funèbre du maréchal Hoche.
2) Jouer Cherubini comme ça (façon Muti, avec beaucoup de cordes très vibrées, un tempo lent, un spectre le plus rond possible), quand on sait l'efficacité des solutions apportées par la musicologie, même sur instruments modernes, est-ce vraiment pertinent ? Chailly avait très bien réussi cette mue pour sa Saint-Matthieu avec Leipzig, pourtant !
Skalkottas: Orchestral Works ; Athens Philharmonia Orchestra (BIS)
→ Sinfonia très réussie (romantisme enrichi), Concerto pour violon & piano dans une veine néoclassique atonale, étrange image d'un Martinů sous l'influence du Schönberg des années 20 (très convaincant !). À cela s'ajoutent de jolies pièces archaïsantes (en référence à à la Grèce antique, au foklore), par un orchestre aux belles transparences (merci les ingénieurs de BIS, également !).
C.P.E. Bach: Oboe Concertos ; Akademie für Alte Musik Berlin, Xenia Löffler (HM)
→ Pas très séduit par les œuvres pour ma part : on y retrouve les couleurs harmoniques assez déprimantes du père… pour du concerto décoratif, c'est plus sérieux que roboratif. Mais pour ceux qui aiment le style concertant paternel, justement, ce doit être une très bonne opération !
Veracini, Overtures & Concerti, Vol. 2 ; L'Arte dell' Arco (CPO)
→ Musiques pour grand ensemble instrumental typiques du premier XVIIIe – les amateurs de Haendel devraient être ravis, d'autant que la veine mélodique est de très haute volée !
Interprétation pas la plus colorée, mais très allante et intense, très réussie.
Stanford: String Quartets, Vol. 3 (quatuors 1,2,6) ; Dante Quartet (Somm)
→ Beaux quatuors romantiques assez sages, mais pas dépourvus de matière. À approfondir.
Lüdig (Ouvertures, Midsummer Night), Lemba (Concerto pour piano), Kapp (Last Confession, Symphonie n°4
Estonian National Symphony Orchestra, N. Järvi (Chandos)
→ Jolies pièces d'un romantisme bon teint ; la Symphonie de Kapp, où dominent les cordes, sent ses emprunts folkloriques et sa conception russe du son. Les ouvertures de Lüdig sont très aimables, et contre toute attente, c'est le concerto pour piano de Lemba, où les couleurs harmoniques retrouvent des rêveries chopiniennes assez intéressante, qui me séduit le plus vivement.
Tõnu Kõrvits: Hymns to the Nordic Lights & Other Works Estonian National Symphony Orchestra (Ondine)
→ Très tonal avec accords enrichis, musique calmement tournoyante et contemplative, extrêmement agréable (plutôt en fond qu'à écouter statiquement sur un siège, sans doute), pas du tout pauvre, avec des boucles longues et variées et une harmonie riche.
HiKAYE : danses de Konstantinidis, Babadjanian, Erkin, Mokranjac, Galland, Bloch, Takemitsu – Işil Bengi (Fuga Libera)
→ Album extrêmement stimulant, parcourant les références folkloriques de Konstantinidis, le postromantisme de Babadjanian, la poésie d'un Takemitsu encore partiellement tonal… Un grand portrait de danses protéiformes et avenantes, avec un superbe timbre de piano, une netteté d'exécution (pédale économe !) et un entrain tout à fait communicatif !
Un grand récital de piano que j'ai eu du plaisir à trisser immédiatement.
Dohnányi: The Veil of Pierrette, Op. 18 ; ORF, Matiakh
→ Jolie Suite très conservatrice (et non un opéra, comme on aurait pu le croire dans cette série qui nous a valu une splendide Euryanthe la saison passée).
Górecki: Complete String Quartets, Vol. 2 (n°3 + duos violons); Tippett Quartet (Naxos)
→ Les duos aux élans frontaux et aux frottement exposés viennent s'ajouter au splendide fonds déjà constitué par Bartók et Berio.
En revanche, le Troisième Quatuor est écrit dans la langue du Górecki dernière manière, hypertonalité sur des thèmes pauvres qui se répètent – pas vraiment palpitant, et encore plus au format quatuor qui ne s'y prête guère.
Malipiero: Symphonie n°6, Ritrovari, Serenata mattutinata, 5 Studi ; Svizzera Italiana, Damian Iorio (Naxos)
→ Dominent surtout les cordes, pour un néoclassicisme particulièrement peu généreux en thèmes et même, pour ce que j'en ai senti, tout à fait plat. Je me suis ennuyé, je l'avoue – alors qu'il existe tout de même des Malipiero potables et des néos italiens assez stimulants.
Beethoven: Works for Piano 4-Hands (dont Große Fuge arrangée) ; Peter Hill
→ Partie mal connue du legs de Beethoven, qui se clôt par cet arrangement de la Grande Fugue du Quatuor n°13. Joli parcours.
Farrenc: Orchestral Works (s1, ouvertures, variations) ; Solistes Europeens de Luxembourg, Christoph König (Naxos)
→ La Première Symphonie soutient vraiment l'intérêt. J'avoue cependant que jouée sans un peu de la tension et de la couleur apportée par des instruments anciens ou une interprétation un peu exaltée, je reste toujours à convaincre réellement de l'intérêt supérieur de la musique de Farrenc.
The Long 17th Century: A Cornucopia of Early Keyboard Music ; Daniel-Ben Pienaar
→ Contrairement à ce que peut laisser accroire la pochette (une photo d'incunable), il ne s'agit en rien d'un récital « informé » mais d'une exploration sur piano moderne de la musique pour clavier du XVIIe siècle.
Le principe est éminemment sympathique, mais l'exécution de ces harmonies simples sur un Steinway accordé sans tempérament spécial, et sans modes de jeu informés, revient à affadir considérablement ces pièces, je le crains. Je ne suis pas passionné par le résultat en tout cas.
Shebalin: Orchestral Music, Vol. 2 (Suite 3, Suite de ballet) ; Siberian SO, Dmitry Vasiliev (Toccata Classics)
→ Du romantisme sans arrière-pensée, mais avec une qualité d'écrire souterraine qui soutient l'intérêt (l'harmonie est riche sans avoir l'air d'y toucher, comme chez Tchaïkovski). Pas du tout marqué par les harmonies déceptives soviétiques, de la musique extrêmement agréable, à l'atmosphère « positive ».
Les Suites présentées sont en outre moins pittoresques-anecdotiques que celles du volume 1.
José Serebrier: Orchestral Works Alexandre Kantorow, RTÉ, Australian ChbO, Barcelone SO (BIS)
→ B.A.C.H. sombre et combattif, Romances pour cordes assez sirupeuses, des pièces très bien écrites qui ne surprennent pas totalement mais se soutiennent très bien !
Röntgen: Works for Violin & Piano, Vol. 2 ; Christoph Schickedanz, Ernst Breidenbach (CPO)
→ Sorte de Brahms à l'évidence lyrique supérieure, vraiment splendide ; et quel son !
Mayr: Mass in E-Flat Major (Arr. F. Hauk & M. Hößl) ; Dorota Szczepańska, Simon Mayr Chorus, Concerto de Bassus, Franz Hauk (Naxos)
→ Bien plus nourrissant que ses opéras, et interprété dans un style adéquat. Une belle messe belcantiste qui mérite le détour.
Lili et Nadia Boulanger: Mélodies ; Cyrille Dubois, Tristan Raës (Aparté)
→ Hors les Quatre Chants de Lili, un disque Nadia Boulanger, enfin abondamment servie au disque (trois en un an !). La voix grêle de Dubois ne me ravit pas totalement pour mettre en valeur les couleurs harmoniques travaillées sous couvert de mélodie de salon, mais l'intelligibilité et l'implication sont exemplaires.
Knecht : Portrait musical de la Nature
Beethoven: Symphony No. 6 'Pastoral' ; Akademie für akte Musik Berlin, Bernhard Forck (HM)
→ Les parentés des premiers mouvements sont évidentes. Pour le reste, le Knecht demeure assez décoratif / descriptif, là où la symphonie (celle que j'aime le moins de Beethoven, certes) bâtit quelque chose de plus cohérent à mes oreilles, moins « musique de scène » – ce qui n'est pas un défaut, notez bien.
Exécution forcément archaïsante de la part d'un orchestre qui se consacrait largement à Bach ; intéressante dans la couleur (timbres disjoints) à défaut d'être très nouvelle dans le discours, pour une discographie déjà saturée.
Il Sud: Seicento Violin Music in Southern Italy ; œuvres de Falconieri, Montalbano, Trabaci, Pandolfi, Leoni, Mayone ; Ensemble Exit (Passacaille)
→ Œuvres rares à la veine mélodique généreuse et aux diminutions expansives, dans une interprétation pleine de couleurs (assise sur orgue positif et théorbe, remarquablement captés), avec un violon solo à la fois chaleureux et plein d'aisance. Un peu grisant.



écouté versions
Handel: Agrippina ; DiDonato, Fagioli, ,Orlinski, E. Benoit, Pisaroni, Pizzuti ; Il Pomo d'oro, Emelyanychev (Erato)
→ Version assez électrisante, grâce au Pomo d'oro, ensemble réduit en nombre, mais qui claque merveilleusement, ne cherchant pas l'effet, mais toujours animé et cinglant. Tout est tendu et échevelé ici.
Distribution splendide chez les femmes et surtout les basses, incroyables. Certes, il faut supporter deux falstettistes – qui n'ont, ni historiquement, ni physiologiquement, ni musicologiquementleur place dans ce répertoire… et cela s'entend, même au disque (à commencer par la diction). Cela dit, les gars se donnent, et tout le reste est splendide ; la version la plus excitante du marché, à mon sens.
Mascagni: Cavalleria rusticana - Leoncavallo: Pagliacci (Live) ; Kutlu, Di Toro, Grazer Philharmoniker (Oehms)
→ Remarquablement chanté par un véritable soprano dramatique large et élégant, un ténor tonique et sombre sans tricher, un orchestre d'un niveau assez supérieur à ce que réclament ces partitions… Une belle version d'aujourd'hui, en particulier pour Cavalleria (Pagliacci pouvait supporter un peu plus de subtilité, à l'orchestre en particulier).
L'Amour, la Mort, la Mer (Cras, Fauré, Satie, Poulenc, Villa-Lobos…) ; Patricia Petibon, Susan Manoff (Sony)
→ J'aime à peu près tout ce qu'a fait Petibon, et le programme donne envie, mais la captation très musiques amplifiées (tout est gonflé et écrêté, comme en gros plan lissé), la façon assez affectée de tout chanter-souffler, l'accordéon pas du meilleur goût, j'avoue ne pas avoir adhéré.
Vivaldi Violin Concertos ; Le Concert de la Loge, Julien Chauvin (Naïve)
→ Très beaux son et rebond galant !
Richard Strauss: Cello Sonatas
(et arrangements) Raphaela Gromes, Julian Riem (Sony)
→ Les lieder-tubes de Strauss fonctionnent à merveille ainsi, et la générosité de Gromes rend la naïve Sonate (présentée dans ses deux versions !) très persuasive.
Esmé SQ : Beeth 1, Bridge Noveletten, Chin Parametastring (Alpha)
→ Aplomb enthousiasmant en salle (Schubert 15 sans frémir !), virtuosité extrême, ce disque dévoile aussi la curiosité et la vastitude des ambitions de répertoire de ce tout jeune quatuor (quatre ans, je crois) de Coréennes, formé à Cologne.



écouté rééditions
Stravinsky: The Rite of Spring ; Igor Markevitch (Warner)
→ Je me souviens d'avoir été un peu déçu par la réalisation eu égard à sa réputation (et à ses accomplissements fabuleux dans d'autres répertoires difficiles), mais plus du détail…
Sibelius: Symphony Nos. 1 & 2 :
NYP, Sir John Barbirolli (Columbia / Sony)
→ Très vif, avec une réalisation qui ne correspond évidemment pas aux standards actuels.
The Last Concert At La Scala ; Georges Prêtre
→ Ouvertures italiennes, Boléro… Joli programme festif / inoffensif joué avec la fluidité habituelle de Prêtre.



Quant à la liste des nouveautés (la sélection, n'est-ce pas, pas l'intégralité des parutions !) qui restent à écouter, je vous laisse profiter pour vous-même des plaisirs du vertige :

Suite de la notule.

David Le Marrec

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