Que faut-il écouter des opéras de Lully ?
Par DavidLeMarrec, dimanche 6 décembre 2015 à :: Baroque français et tragédie lyrique :: #2740 :: rss

A. État des lieux
Étrangement, en dehors de Rameau (qui n'a pas du tout les mêmes mérites dramatiques, et se situe déjà largement dans une veine plus ballettisante et décorative que la vraie tragédie en musique des deux premières générations), c'est surtout Lully, à l'autre bout du spectre donc, qu'on représente et enregistre. Ce n'est pourtant pas la musique la plus mélodique ni la plus élaborée, dans ce genre : la génération suivante, avec Desmarest, Campra et Destouches, semble considérablement plus facile d'accès aux oreilles contemporaines (plus de générosité mélodique, plus de variété harmonique, des drames plus violents…).
En dehors d'Achille & Polyxène (justement parce que les actes II à V sont de son élève Collasse), on dispose désormais, avec la parution discographique de Bellérophon en 2011, de l'intégralité des tragédies en musique de Lully – une entreprise commencée en 1983 avec la première Armide de Herreweghe (retirée de la vente sur le désir du chef et dès longtemps introuvable).
Certes, il a donc fallu près de trente ans, mais peu de compositeurs peuvent se vanter d'un tel traitement de faveur, couvrant l'intégralité de leurs ouvrages lyriques (quitte à laisser de côté certaines œuvres mixtes comme les ballets et divertissements chantés). Pour couronner le tout, la plupart sont encore disponibles dans le commerce, et un certain nombre programmés de temps à autre en Europe et en Amérique du Nord.
En ce qui concerne le baroque français, c'est même un exploit assez unique (si l'on excepte Charpentier, qui n'a composé que deux opéras, plusieurs fois enregistrés, et Rameau, dont l'ensemble des œuvres d'envergure n'a été fini de publier qu'en 2015, avec Les Fêtes de Polymnie par Vashegyi).
L'occasion de jeter un regard général vers les bijoux à ne pas manquer.
B. Liste exhaustive
… des tragédies en musique de Lully, plus deux pastorales qui s'approchent ou s'identifient au genre opéra. Avec des liens vers des notules monothématiques pour approfondir.
Sauf mention contraire, les livrets sont de Quinault. Les « hits » indiquent les passages célèbres, les « réussites » les moments qui font particulièrement honneur à Lully.
Il faut être conscient que les danses, que j'ai peu mentionnées, ont pu être de réels tubes, arrangées par les théorbistes, transcrites pour le piano au début du XXe siècle…
1672 – Les Festes de l'Amour et de Bacchus
1673 – Cadmus et Hermione
¶ Chaconne des Africains, « Suivons, suivons l'amour, laissons-nous enflammer » (acte I).
¶ Culte de Mars (fin de l'acte III).
¶ Duos comiques du triangle Charite-Nourrice-Arbas (acte II).
¶ Culte de Mars (fin de l'acte III).
¶ Dialogues comiques d'Arbas à la recherche du dragon avec Cadmus et avec les Princes (acte IV).
1674 – Alceste
¶ Duo d'adieu à Admète mourant (fin du II).
¶ Déploration sur la mort d'Alceste par un coryphée féminin et un chœur mixte (acte III).
¶ Duo de Tritons « Malgré tant d'orages » (acte I).
¶ Duo d'adieu à Admète mourant (fin du II).
¶ Chœur d'annonce de la mort d'Alceste hors scène, tandis qu'Admète se lamente sur scène (acte III).
¶ Marches funèbres d'Alceste (fin de l'acte III).
¶ Malgoire II (Montaigne 1992). Avec Colette Alliot-Lugaz, Howard Crook et Jean-Philippe Lafont. Lourd, terne et empesé, assez peu engageant à écouter.
¶ Malgoire a depuis donné, en 2007, une version assez définitive de l'œuvre (avec Véronique Gens), uniquement captée par la radio.
=> Une nouvelle gravure est donc indispensable.
1675 – Thésée
¶ [Présentation.]
¶ Il existe une bande Haïm beaucoup plus vivante.
1676 – Atys
¶ Rare cas de Prologue lullyste clairement articulé à l'histoire des cinq actes (Atys est présenté par les divinités allégoriques).
¶ [Présentation du livret à partir de la révision de Marmontel.]
¶ Danses de la Suite de Flore
¶ Airs et danses de Zéphyr « Le Printemps quelquefois est moins doux qu'il ne semble » (Prologue)
¶ Chœur « Préparons de nouvelles fêtes » (Prologue)
¶ Invocation à quatre « Allons, allons, accourez tous » (acte I)
¶ Chaconne « L'amour fait trop verser de pleurs »… « Quand le péril est agréable » (acte I)
¶ Air de Sangaride « Atys est trop heureux » (acte I)
¶ Descente de Cybèle (fin de l'acte II)
¶ Air d'Atys « Nous pouvons nous flatter de l'espoir le plus doux » (acte III)
¶ Scène du sommeil d'Atys (acte III)
¶ Air de Cybèle « Espoir si cher et si doux » (acte III)
¶ Chœur hors scène « Atys, Atys lui-même / Fait périr ce qu'il aime » (acte V)
¶ Déploration finale « Que le malheur d'Atys afflige tout le monde » (acte V)
¶ Danses de la Suite de Flore
¶ Airs et danses de Zéphyr « Le Printemps quelquefois est moins doux qu'il ne semble » (Prologue)
¶ Chœur « Préparons de nouvelles fêtes » (Prologue)
¶ Entrée de Melpomène « Retirez-vous, cessez de prévenir le Temps » (Prologue)
¶ Invocation à quatre « Allons, allons, accourez tous » (acte I)
¶ Tous les duos de l'acte I (Atys, Idas, Sangaride, Doris), dont la chaconne.
¶ Air de Sangaride « Atys est trop heureux » (acte I)
¶ Air d'Atys « Nous pouvons nous flatter de l'espoir le plus doux » (acte III)
¶ Air de Cybèle « Espoir si cher et si doux » (acte III)
¶ Dispute des amants (acte IV)
¶ Chœur hors scène « Atys, Atys lui-même / Fait périr ce qu'il aime » (acte V)
¶ Malédiction d'Atys (acte V)
¶ Déploration finale « Que le malheur d'Atys afflige tout le monde » (acte V)
¶ Bandes vidéos des représentations de 1987 dans la mise en scène de Villégier, saisissantes. [Commentaire.]
¶ CD Reyne (2010). Choix de simplicité, de nudité, très persuasif.
¶ DVD Christie (2011). Reprise et réfection de la mise en scène de Villégier. Luxuriance très italianisante du continuo, somptuosité de toute part.
1677 – Isis
¶ Chœur des Peuples des Climats Glacés (acte IV), avec son figuralisme hoquetant.
1678 – Psyché (II)
¶ De cette genèse compliquée provient sans doute le caractère moins serré de l'intrigue, entrecoupée de nombreux divertissements plus pittoresques que dramatiques, dont des lamenti italiens, un hapax dans les tragédies en musique de Lully. C'est aussi, musicalement, son opéra le moins marquant.
1679 – Bellérophon
¶ [I – Avanies d'un livret à six mains.]
¶ [II – Structure et originalités du livret.]
¶ [III – Musique.]
¶ Plaintes dans les climats dévastés par la Chimère à l'acte IV (une Napée, une Dryade, Dieux des bois), d'un style original, qui laisse sentir le vide et l'effroi avant la forme ordinaire des déplorations polyphoniques.
1680 – Proserpine
« Ingrate, écoutez-moi » (acte II),
« N'aurais-je point innocemment » (acte III),
« Pluton veut qu'avec vous nous demeurions ici » (acte IV)
« Quel cœur se peut assurer » (acte V)
1682 – Persée
¶ Air du sommeil de Mercure : « Ô tranquille sommeil, que vous êtes charmant » (acte III).
¶ Air d'Andromède : « Dieux ! qui me destinez une mort si cruelle » (acte IV).
¶ Ballet du combat aérien de Persée contre Kêtos (acte IV)
¶ Air de Méduse : « J'ai perdu la beauté qui me rendit si vaine » (acte III).
¶ Air du sommeil de Mercure : « Ô tranquille sommeil, que vous êtes charmant » (acte III).
¶ Air d'Andromède : « Dieux ! qui me destinez une mort si cruelle » (acte IV).
¶ DVD Pinkosky-Niquet (EuroArts 2005). Cyril Auvity plane (beau Mercure de Colin Ainsworth, tout de même) au-dessus d'une distribution à l'articulation très nord-américaine (en arrière), dans une mise en scène chiche en moyens mais astucieuse. Hervé Niquet ne dirige pas le Concert Spirituel, mais l'orchestre Tafelmusik de Toronto, qu'il fait sonner assez sensiblement comme le sien. Beaucoup de vie orchestrale qui permet au drame d'avancer sans faiblir.
1683 – Phaëton
¶ Autre fait inhabituel, le couple amoureux authentique, des personnages secondaires comme dans Proserpine, inclut une basse-taille au lieu de la hautre-contre ordinaire (pour des raisons évidentes d'équilibres des voix sur le plateau).
¶ [Présentation.]
¶ Réjouissances brutalement interrompue par la chute finale « Que l'on chante, que tout réponde » (acte V).
=> duo d'affrontement avec Phaëton : « Songez-vous qu'Isis est ma mère ? » (acte III) ;
=> imprécations devant le Temple d'Isis : « Vous qui servez Isis » (acte III) ;
=> air : « Vous qui vous déclarez mon père » (acte V) ;
=> second duo d'amour et d'adieu avec Lybie : « Ô rigoureux martyre »… « Hélas ! une chaîne si belle » (acte V)
¶ Réjouissances brutalement interrompue par la chute finale « Que l'on chante, que tout réponde » (acte V).
Grande réussite.
¶ CD Rousset (Aparté 2013). Belle lecture, avec un continuo très subtil au clavecin. Fort bien chanté aussi, avec des voix typées qui plairont diversement. Petite réserve sur le caractère très audible des changements de mesure, que Rousset tire vers un certain alanguissement contemplatif (ce qui peut se défendre, mais reste étrange pour du récitatif) et qui tendent parfois à freiner l'élan dramatique. [Commentaire de Beaune, de Pleyel.]
1684 – Amadis
¶ Avec Atys, l'un des très rares cas de Prologue où le héros du drame est introduit ; alors qu'Atys est présenté comme une histoire pour divertir le commanditaire, dans Amadis, on désigne (à mots maigrement couverts) le roi comme le successeur direct du héros – il faut dire que le parallèle est plus aisé avec le chevalier tendre qu'avec le prêtre châtré…
¶ Beaucoup de convergences avec Armide qu'il semble préparer : matière médiévale, structure (contredanse très proche dans le Prologue – acte I d'Armide – ; récits de victoires et de mal d'amour au I ; enchantement du héros désœuvré au II ; captivité et souffrances au III ; chaconne vocale au V, ce qui ne se faisait plus depuis Cadmus !), longues scènes comme celle d'Amadis au I.
¶ Musicalement, on est parfois étonné de la disparité entre la relative platitude du deuxième acte et la force des deux derniers (peut-être les plus beaux de tout Lully), en particulier le quatrième.
¶ [Présentation – je suis d'ailleurs beaucoup moins mitigé aujourd'hui sur les qualités de l'ouvrage.]
¶ Air d'Arcabonne : « Amour, que veux-tu de moi ? » (acte II).
¶ Air d'Amadis : « Bois épais, redouble ton ombre » (acte II). Souvent mis au programme de récitals du début du XXe siècle – étrangement, puisque très court, sans effet particulier et mélodiquement particulièrement peu marquant. Sans doute était-il un peu plus aigu que les autres et déstabilisait-il moins les ténors ? Si l'on voulait mépriser Lully, on ne choisirait pas meilleur exemple. [Parmi les versions disponibles, Rousset fait le choix avisé de le faire ornementer, ce qui lui procure un peu plus de relief.]
¶ Duo et chœur de captivité « Ciel ! finissez nos peines » (acte III).
¶ Invocation par Arcabonne : « Toi, qui dans ce tombeau n'es plus qu'un peu de cendre » (acte III).
¶ Grande scène d'Oriane (acte IV) : « À qui pourrais-je avoir recours ? »… « Que vois-je ? ô spectacle effroyable ! »… « Il m'appelle, je vais le suivre ».
¶ Intercession d'Urgande (fin de l'acte IV).
¶ Grande chaconne de quinze minutes avec les héros et le chœur « Chantons tous en ce jour » (fin de l'acte V).
¶ Scène d'Amadis (trois grandes tirades à l'acte I – entrecoupées de réponses de Florestan –, très inhabituelles dans ce répertoire, et encore plus pour un personnage masculin) :
« Je pourrais l'obtenir par la force des armes »
« Oriane, ingrate et cruelle »
¶ Invocation par Arcabonne : « Toi, qui dans ce tombeau n'es plus qu'un peu de cendre » (acte III).
¶ Grande scène d'Oriane (acte IV) : « À qui pourrais-je avoir recours ? »… « Que vois-je ? ô spectacle effroyable ! »… « Il m'appelle, je vais le suivre ».
¶ Grande chaconne de quinze minutes avec les héros et le chœur « Chantons tous en ce jour » (fin de l'acte V).
¶ Schneebeli 2010 (il existe une bande de salle partielle captée à Massy). Avec Katia Vellétaz, Dagmar Šašková, Isabelle Druet, Cyril Auvity, Edwin Crossley-Mercer, Alain Buet. Comme toujours impressionnant par le style impeccablement juste de Schneebeli, et un fort beau plateau (à part les deux méchants qui s'amusent à chanter du nez en permanence).
¶ CD Rousset (Aparté 2014). Une petite merveille d'équilibre, avec des danses d'une élégance remarquable, et soutenue par une distribution choisie parmi les meilleurs (Auvity, Arnould, Tauran, Perruche, Bennani…). [Commentaire.]
1685 – Roland
¶ C'est, je crois, l'un des opéras les plus homogènes et les plus constamment soignés de tout Lully, alors même que les endroits très typés y sont plus rares.
¶ Fureur de Roland « Je suis trahi ! Ciel ! » (fin de l'acte IV).
¶ Grand duo en chaconne « Ah ! je souffre un tourment plus cruel que la mort »… « Se peut-il qu'à ses vœux vous ayez répondu ? », puis chaconne avec chœur « C'est Médor qu'une Reine si belle » (fin de l'acte III). Une scène enivrante, un des sommets de tout Lully.
¶ Grande scène de Roland dans les bois « Ah ! j'attendrai longtemps » (début de l'acte IV).
¶ CD Rousset (Ambroisie 2004). Version peut-être un peu mesurée, mais d'une grande grâce, qui livre pudiquement ses charmes aux fil des réécoutes.
1686 – Armide
¶ Le drame, très cohérent et spectaculaire, est fortement caractérisé par ses triomphes guerriers (acte I), ses enchantements pastoraux (et aquatiques !) au II, son sommet infernal au III, et surtout son intermède étrange (deux nouveaux personnages à l'acte IV, incluant même un peu d'humour, ce qui n'était plus arrivé depuis Atys et Proserpine).
¶ [Présentations : fulgurances écrites – détails.]
¶ Scène du sommeil de Renaud, en particulier « Ah ! quelle erreur ! quelle jolie » (acte II).
¶ Grand monologue d'Armide « Enfin, il est en ma puissance » (fin de l'acte II).
¶ Invocation de la Haine « Venez, venez, Haine implacable »… « Je réponds à tes vœux, ta voix s'est fait entendre »… « Plus on connaît l'Amour, et plus on le déteste »… « Sors, sors du sein d'Armide, Amour, brise ta chaîne ».
¶ Grande passacaille avec haute-contre et chœurs « Les plaisirs ont choisi pour asile » (acte V).
¶ Monologue final d'Armide « Le perfide Renaud me fuit » (acte V).
¶ Dialogue de la Gloire et de la Sagesse « Tout doit céder dans l'Univers » (Prologue).
¶ Conseils des suivantes d'Armide « Dans un jour de triomphe, au milieu des plaisirs » (acte I).
¶ Récit du rêve d'Armide « Un songe affreux m'inspire une fureur nouvelle » (acte I).
¶ Entrée d'Hidraot « Armide, que le sang qui m'unit avec vous » (acte I).
¶ Récit d'Aronte « Ô Ciel ! ô disgrâce cruelle ! » (acte I). En neuf vers, l'un des plus forts récitatifs jamais écrits.
¶ Dialogue d'Artémidore et de Renaud « Invincible héros, c'est par votre courage » (acte II).
¶ Duo d'invocation infernale « Arrêtons-nous ici, c'est dans ce lieu fatal » (acte II).
¶ Chœur du sommeil « Ah ! quelle erreur ! quelle jolie » (acte II).
¶ Grand monologue d'Armide « Enfin, il est en ma puissance » (fin de l'acte II).
¶ Air d'Armide « Ah ! si la liberté me doit être ravie » (début de l'acte III).
¶ Invocation de la Haine « Venez, venez, Haine implacable »… « Je réponds à tes vœux, ta voix s'est fait entendre »… « Plus on connaît l'Amour, et plus on le déteste »… « Sors, sors du sein d'Armide, Amour, brise ta chaîne » (acte III).
¶ Duo d'amour de Renaud & Armide « Armide, vous m'allez quitter » (acte V).
¶ Grande passacaille avec haute-contre et chœurs « Les plaisirs ont choisi pour asile » (acte V).
¶ Monologue final d'Armide « Le perfide Renaud me fuit » (acte V).
¶ CD Herreweghe II (HM 1992). La version couramment disponible en CD, rééditée il y a peu, et formidable en tout point : beaucoup de rondeur et d'élégance, mais un drame tout à fait vivant, porté par des chanteurs-diseurs exceptionnels (Laurens, Crook, Gens, Rime, Deletré…). Seule étrange réserve, la passacaille, un peu indolente et assez peu dansante.
¶ CD Ryan Brown (Naxos 2007). L'ensemble Opera Lafayette a proposé ce qui était alors la seule alternative disponible à Herreweghe II, mais quoique correctement chanté et exécuté, tout nage dans une telle indolence (et dans des timbres si gris) qu'on parvient quasiment à s'ennuyer. À déconseiller absolument pour débuter, et probablement sans intérêt pour les habitués. Le seul disque médiocre de la discographie, en réalité.
¶ DVD Carsen-Christie (Fra Musica 2008). Une lecture visuellement marquante, et musicalement fulgurante (en particulier pour l'Armide de Stéphanie d'Oustrac, mais aussi un continuo très généreux). La chaconne est ébouriffante. Seule réserve : deux petites coupures (un vers à l'acte I, et la scène du désenvoûtement au V), assez injustifiables, même sur le plan dramaturgique (un vers orphelin et l'explication de revirement de Renaud). Le couplage avec la version Herreweghe II permet ainsi de tout avoir au meilleur niveau (intégralité et chaconne réussie).
1686 – Acis et Galatée
¶ Le livret (de Campistron) et la musique ne sont pas les meilleurs du répertoire lullyste, mais les danses sont belles, et l'œuvre présente la particularité de proposer fromage et dessert : une courte chaconne vocale et une longue passacaille vocale et chorale !
¶ Scène de Galatée et déploration « Enfin j'ai dissipé la crainte » (acte III).
¶ Grande passacaille finale de l'acte III « L'Amour veut qu'on jouisse ».
¶ Marche « Qu'à l'envi chacun se presse » (acte II).
¶ Scène de Galatée et déploration « Enfin j'ai dissipé la crainte » (acte III).
¶ Grande passacaille finale de l'acte III « L'Amour veut qu'on jouisse ».
1687 – Achille et Polyxène
¶ Préventions parfaitement infondées, Collasse est un grand compositeur et, pour l'avoir lu et joué, l'acte V d'Achille et Polyxène est, dramatique et musicalement, du niveau des grands Lully – récitatifs enflammés, chœurs d'effroi, grand récit final. Aucune raison de ne pas remonter ces ultimes mesures de Lully, en conséquence.
¶ [Présentation et extrait.]
C. Livrets
Petit tableau synoptique des évolutions. (On a mis en couleur les caractéristiques inhabituelles. Dans la dernière colonne, le rouge indique un opéra qui « finit mal », le vert un opéra dont l'issue est considérée comme joyeuse – et plus la couleur est sombre, moins la gaîté est de mise.)
Auteurs |
Humour |
Rôle-titre |
Fin |
||
1 |
Cadmus et Hermione |
Quinault. |
–
Coquette rouée. – Vieille amoureuse. – Duel de générations. (acte II) |
Couple d'amants. |
Amants heureux. |
2 |
Alceste |
Quinault. | –
Duel de rivaux (acte I). – Coquette rouée (acte I). – Chantage au mariage (acte II). – Plaintes du vieux guerrier (acte II). |
Amante. |
Amants heureux. |
3 |
Thésée |
Quinault. | Jalousie
infondée (acte I). |
Amant. |
Amants heureux. |
4 |
Atys |
Quinault. | Dispute
d'amants (acte IV). (unique cas où concerne les personnages
principaux) |
Amant. |
Amants
morts, méchants désespérés. |
5 |
Isis |
Quinault. | Badinage
entre dieux (acte II). |
Victime (vaguement amante). |
Victime
sauvée, renoncement à l'amour. |
6 |
Psyché |
Th.
Corneille, Fontenelle. |
Relatif ridicule des sœurs
jalouses (acte I). |
Amante. |
Amants heureux. |
7 |
Bellérophon |
Th.
Corneille, Fontenelle, Boileau. |
Non. |
Amant. |
Amants heureux. |
8 |
Proserpine |
Quinault. |
Vantardise
d'amant éconduit (acte II). |
Victime. |
Liberté
conditionnelle. |
9 |
Persée |
Quinault. | Non. |
Amant. |
Amants heureux. |
10 |
Phaëton |
Quinault. | Non. |
Ambitieux impudent. |
Impudent
châtié, amants partiellement sauvés. (on le suppose, mais ce
n'est pas dit) |
11 |
Amadis |
Quinault. | Non. |
Amant. |
Amants heureux. |
12 |
Roland |
Quinault. | Non. |
Amant éconduit et brutal. |
Héros
malheureux, amants heureux. |
13 |
Armide |
Quinault. | Brève
raillerie en miroir (acte IV). |
Amante ennemie, éconduite
et dangereuse. |
Magicienne
malheureuse, amant libéré. |
14 |
Achille et Polyxène |
Campistron. |
Non. |
Couple d'amants. |
Amants
morts. |
D. Le plus beau ?
La quantité de moments forts ne déterminant pas nécessairement l'intensité du flux général, et les rares versions conditionnant aussi beaucoup notre perception, il est difficile de décerner les palmes.
À partir de Bellérophon, on se situe vraiment dans la maturité lullyste, et à partir de Phaëton, la densité musicale devient particulièrement impressionnante. Néanmoins, les chefs-d'œuvre existent d'emblée : Alceste et Atys en témoignent, et même, malgré ses archaïsmes, Cadmus témoigne en maint endroit d'une inspiration de tout premier ordre.
Les LULLYstes distinguent en principe Atys et Armide, qui sont clairement les deux meilleurs livrets, et qui ménagent une quantité assez immense de moments mélodiques ou pittoresques. Mais cela tient aussi au fait que ce sont les seuls qu'on ait pu écouter et réécouter depuis trente ans, et qui ont été servis par des productions aussi exemplaires. Leur domination est justifiée (la musique d'Armide est de très haute volée, et le livret dAtys d'une force sans égale), mais on pourrait soutenir bien d'autres combinaisons.
À ce jour, je crois que je distinguerais avant tout Armide et Roland, pour le raffinement extrême de leurs équilibres et le naturel de leur déclamation, mais Cadmus, Alceste, Atys, Phäeton, Amadis, et même Bellérophon, Proserpine ou Persée méritent de grands honneurs. Je suis moins enthousiaste sur Thésée (le début de l'acte I est formidable, mais le reste vraiment peu passionnant, à commencer par le livret, et pourtant ce fut l'opéra de Lully le plus apprécié en son temps !), Psyché et Isis, dont je perçois moins la poussée générale (pourtant, le livret de Psyché est ravissant).
Quand j'aurai deux minutes, je tâcherai de confectionner une carte des chaconnes, mais pour l'heure, vous avez déjà de quoi vous amuser à redécouvrir (ou rattraper votre retard).
Commentaires
1. Le dimanche 6 décembre 2015 à , par Georg-Friedrich
2. Le dimanche 6 décembre 2015 à , par Georg-Friedrich
3. Le dimanche 6 décembre 2015 à , par Diablotin :: site
4. Le mercredi 9 décembre 2015 à , par David Le Marrec
5. Le mercredi 9 décembre 2015 à , par David Le Marrec
6. Le mercredi 9 décembre 2015 à , par Diablotin :: site
7. Le mercredi 9 décembre 2015 à , par Olivier
8. Le vendredi 11 décembre 2015 à , par David Le Marrec
9. Le mercredi 5 août 2020 à , par Louis Legrand
10. Le mercredi 12 août 2020 à , par DavidLeMarrec
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