Le baryton - I - une définition sommaire
Par DavidLeMarrec, mardi 14 avril 2009 à :: Pédagogique - Glottologie :: #1200 :: rss
Un baryton, probablement joué par un baryton.

De même que nous avions procédé pour le ténor, on se propose de se pencher sur une histoire qui est souvent documentée par fragments, et qui nécessite parfois un abord assez global du répertoire pour être mise en ordre.
Le baryton représente une catégorie vocale étrangement récente, puisqu'il n'apparaît sérieusement qu'au cours du XIXe siècle.
Pourtant, le baryton est la voix d'homme la plus courante, et certains chanteurs soutiennent même de façon intéressante qu'elle s'opposerait à la voix de ténor, forcément fabriquée.
Mais débutons par le commencement.
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1. Etymologie, Nature et confusions
βαρύτονος peut être associé à l'adjectif grave, qu'il qualifie au sens 1 une accentuation ou au sens 2 une voix. Pourtant, le baryton n'est pas caractérisé par sa voix grave.
Le baryton est le type de voix masculine qui se situe entre la basse (voix grave) et le ténor (voix aiguë). Par glissement assez logique, il peut servir à désigner le chanteur lui-même qui porte cette voix.
Le baryton se caractérise par sa position centrale avant tout. A l'état naturel, une voix de basse descend plus bas et monte aussi haut, parfois plus, que le baryton. Le ténor ne descend pas forcément beaucoup moins bas, et dispose incontestablement de plus d'aisance dans l'aigu.
Bref, le baryton est la voix de la médiocrité, au sens du juste milieu.
C'est pour cela qu'elle fascine beaucoup le dix-neuvième siècle, dont l'art lyrique quitte les sphères du sublime exclusif pour se rapprocher des affects humains de tout un chacun, et le vingtième siècle qui en fait la voix de la plupart de ses héros, toujours perclus de fêlures.
C'est aussi pour cela qu'on a pu entendre certains connaisseurs de la voix théoriser l'idée que le ténor était ou une voix extrêmement rare, ou une voix créée de toutes pièces. Un ténor naturellement grave comme Roberto Alagna, dont le maintien aigu est toujours une lutte technique, déclare ainsi, un peu excessivement, mais avec une véritable intuition, que « le ténor n’existe pas dans la nature », c'est-à-dire que l'état naturel d'une voix parlée non chauffée a la plupart du temps bien plus à voir avec le baryton qu'avec le ténor.
J'ajoute à cela que l'augmentation spectaculaire de la taille moyenne des générations récentes favorise statistiquement le nombre de cordes vocales longues (cela ne va immanquablement pas de pair, mais c'est en général plutôt proportionnel à la taille du corps) ; or la vibration d'une corde longue est plus grave que celle d'une corde courte. [C'est pour cela que les violonistes mettent leurs doigts sur les cordes, pour la raccourcir la longueur du matériau en vibration, et ainsi obtenir des notes plus aiguës que la corde à vide.] D'où, sans doute, une raréfaction physiologique accrue des ténors.

Jérôme Corréas, le plus grand baryton de tous les temps.
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2. Le baryton
Le baryton est une catégorie un peu étrange, on l'a vu, puisqu'on a essentiellement parlé de ténor pour le définir.
Pis encore, à notre sens, il n'existe pas de différence technique fondamentale entre la basse et le baryton dans le grand répertoire : les modes d'émission sont assez semblables.
Evidemment, cela ne vaut pas pour les domaines du lied et de la mélodie, mais sur le gros des scènes internationales, il n'est pas toujours aisé d'opérer la distinction entre un baryton qui soigne son grave (très à la mode, baroque aidant sans doute, chez les jeunes artistes français, de Bertrand Chuberre à Thomas Dolié) et une basse un peu sèche (on en rencontre beaucoup aussi). La différence s'entend bien sûr selon la réaction de la voix aux tessitures, et assez bien en salle (l'impact vocal d'une bonne basse ne ressemble pas à un baryton), mais sur un extrait central au disque, cela peut induire en erreur pendant un petit moment.
C'est que le baryton est avant tout, contrairement au ténor et à la basse qui s'opposent nettement dans leurs manières techniques, une tessiture, c'est-à-dire un ensemble de notes dans lesquelles ce type de voix est à l'aise (indépendamment de son étendue totale). Le principe fondateur du baryton est bien, quelle que soit sa technique, d'être entre la tessiture du ténor et la tessiture de la basse. D'où la bizarrerie de son étymologie.
Ce caractère un peu flottant, cette distinction parfois ténue, cette parenté avec les basses se lisent très bien dans l'histoire du baryton.

Matthias Goerne, le plus grand baryton de tous les temps.
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A suivre.
Commentaires
1. Le mercredi 5 octobre 2011 à , par fred
2. Le mercredi 5 octobre 2011 à , par DavidLeMarrec
3. Le lundi 5 décembre 2011 à , par Sandrine
4. Le mercredi 7 décembre 2011 à , par DavidLeMarrec
5. Le mardi 3 juillet 2012 à , par Antoine :: site
6. Le mercredi 4 juillet 2012 à , par DavidLeMarrec
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