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CSS au secours des faibles

Aujourd'hui, Vladimir Poutine.

Faute d'avoir le temps de produire un texte un peu soigné et étayé, ce sera dans l'arrière-boutique.

Le Putin-basching [1] actuel est un peu lassant. Les experts cinq étoiles [2] défilent en boucle dans les médias pour expliquer que, décidément, les conditions de la démocratie ne sont pas réunies, que le régime est autoritaire, que le Федера́льная слу́жба безопа́сности [3] possède le pays tout entier, que le chantage aux hydrocarbures est inadmissible, la rhétorique nationaliste pénible, son application inquiétante. Soit.

Et pourtant ces imbéciles de russes sont toujours fascinés par le pouvoir fort, les pauvres fous. Certes.




Il me semble qu'il manque une petite perspective dans ce raisonnement. Celle vue par les Russes.

Car le régime de Poutine est sans grand doute possible le meilleur qu'ait connu le pays. Du moins si l'on ne remonte pas en deçà du tsarisme :

  • tsarisme, régime autoritaire, esclavage (aboli en 1861 seulement) ;
  • on passe sur les très courtes tentatives parlementaires de 1917 ;
  • communisme, régime tout de bon totalitaire, et toujours miséreux ;
  • libéralisation sauvage, peut-être par hâte de rendre tout retour de manivelle impossible, peut-être par opportunisme : libertés retrouvées, mais situation économique catastrophique et misère noire ;
  • retour à un certain équilibre, avec un ordre retrouvé ; demeurent de plus grandes libertés publiques, mais si elles se sont beaucoup restreintes, et une meilleure donne économique pour une bonne partie de la population.


En somme, ce qui est inconcevable pour un occidental qui ne fait pas l'effort intellectuel du décentrage, le régime de Poutine peut représenter, aux yeux de celui qui a toujours vécu en Russie, un moyen terme plein de sagesse entre libertés et prospérité. Jamais la Russie n'a connu un régime aussi équilibré.




C'est pourquoi ces anathèmes sont un peu fatigants, et ne donnent pas véritablement à comprendre ce qui est en jeu dans cette popularité. Oui, un personnage infréquentable, un régime corrompu, le culte du chef, le nationalisme belliqueux, les élections truquées, les opposants écrasés. Cependant tout cela à un degré moindre qu'auparavant, parenthèse libérale exceptée, et cela avec une prospérité économique jamais aussi forte (ni aussi bien "redistribuée").

On pourrait peut-être mentionner ces choses, manière de comprendre pourquoi tous les défauts qu'on relèvera à juste titre par la suite sont tolérés sur place. Le contexte, le relativisme culturel, ce peut parfois être utile.




Et, de grâce à nos amis journalistes : merci de varier les formules, surtout lorsqu'elles se parent inopportunément de fausse objectivité.

l'homme fort du Kremlin

Un de plus qui porte des stigmates.

Notes

[1] Existe dans sa déclinaison sportive de chambre : le Putin-ball.

[2] Vous aussi, commandez le vôtre dans la Boutique de CSS et étonnez vos amis !

[3] Ou FSB, héritier du KGB entre autres joyeusetés.


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Commentaires

1. Le jeudi 6 mars 2008 à , par sk†ns

Tu es bien un garçon sensé en presque toutes choses. Poutine est un authentique poète, comparé à notre NS, en ce sens qu'il sait dire le fond de sa pensée avec la plus grande vérité lexicale ("buter", "chiottes" etc.). De plus, il est balaise en judo, au tir et à la pêche (et il paraît qu'il écoute Чайкoвский dans son walkman).

2. Le jeudi 6 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Je ne suis pas pleinement persuadé que l'écoute de Tchaïkovsky soit véritablement à son avantage, cela dit.

3. Le jeudi 6 mars 2008 à , par sk†ns

Même si l'on devine ce qui pouvait exciter H.H. chez Wagner et chez Bruckner (quand ça pétarade, j'aime bien aussi, ce qui me fait un deuxième point commun avec H.H., en plus de notre goût pour les vues dégagées en montagne), on ne saurait leur reprocher, à lui et à Poutine, leur discernement en matière musicale.

Mais du point de vue moral, nous sommes d'accord je crois : le mal, ce n'est pas bien.

4. Le jeudi 6 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Mais du point de vue moral, nous sommes d'accord je crois : le mal, ce n'est pas bien.

Bof, et encore...

5. Le jeudi 6 mars 2008 à , par Morloch

Oui, la posture française de grands donneurs de leçons.

Depuis quelques jours dans les médias français, une autre personne politique mériterait qu'on nuance un peu les propos à son sujet : Alvaro Uribe.

6. Le jeudi 6 mars 2008 à , par DavidLeMarrec

... je ne te le fais pas dire. Je gardais le gardais comme poire pour la soif depuis longtemps. Certes, il est manifestement corrompu et proche (au moins par le passé) de terroristes d'extrême-droite. Il n'empêche qu'on lui reproche de lutter contre une armée de terroristes vendeurs de drogue, sous prétexte qu'une femme politique française s'est promenée sur des routes risquées en toute connaissance de cause.

L'empathie des soutiens de la pauvre femme pour la guérilla me laisse profondément perplexe - plus qu'un Stockholm par procuration, on dirait bien, parfois, une prise de position vraiment idéologique qui mêle un peu juste préoccupation familiale et pensée politique. [A nuancer cependant : j'ai aujourd'hui entendu pour la première fois un membre de la famille reconnaître que c'étaient "les FARC les méchants".]

Après, je suis vraiment très impressionné par le savoir-faire rhétorique de la petite, du très grand art. Si elle n'a pas négligé ses études en parallèle (ça n'a pas l'air le genre de la maison), elle est promise à un bel avenir dans une profession de parole et de persuasion.


Je serais tout de même curieux de savoir ce que l'opinion française penserait si l'Italie demandait à la France de vider le PACA de toute présence étatique pour causer avec le FLNC (qui n'opère pas sur son territoire)...

Non, vraiment, je trouve qu'il y a erreur dans la distribution des cartes : Uribe vaut ce qu'il vaut, mais ce n'est pas précisément lui le grand méchant loup. Et à présent on pleure sur le pauvre "guerillero progressiste" qui était bien sûr sur le point de libérer la poule aux oeufs d'or, comme par hasard... Evidemment, ce n'est pas le président élu qui fait des otages, donc c'est lui qui est le plus à même de céder sous la pression amicale, mais ça reste injuste comme tu le soulignes.


Cela dit, je ne suis pas certain d'être de bon conseil sur le sujet : à mon humble avis, pour limiter le phénomène, un Etat devrait toujours refuser de négocier contre des otages. Ils n'auraient plus de valeur et ne seraient plus une marchandise courue. Bien sûr, ça nécessite de commencer par en sacrifier un ou deux. Et de s'affronter à son opinion publique (qui sait toujours gré aux gouvernements pour les lieto fine). Mais si ça sauve les autres, le sacrifice est peut-être astucieux.

Tant d'argent et d'énergie qui pourraient être employés de façon si efficace...


Et, nous convergeons, c'est par la même myopie (pas du tout exclusivement française) qu'on condamne Poutine et Uribe en manquant singulièrement du sens de la nuance. On oublie que ces pays sont souverains et ont leurs impératifs propres, qui valent bien nos positions de principe vues de loin. Surtout dans le cas de la Colombie où l'on explique que la démocratie doit faire des concessions aux terroristes dans l'intérêt d'une otage française...

7. Le jeudi 6 mars 2008 à , par Morloch

Oui, je ne voudrais pas paraître politiquement malsain en disant qu'il faut nuancer sur Uribe, ce n'est pas une position idéologique pour un sou. J'ai la chance (?) de fréquenter une petite communauté colombienne exilée, ce qui n'est d'ailleurs pas un exploit : toute ce qui reste de la classe moyenne colombienne a envoyé, ou tenté d'envoyer, ses enfants étudier en Europe ou aux Etats Unis, devant la spirale de violence incontrôlable qui a frappé le pays ces dernières décennies.

Quels que soient leurs opinions politiques "de base", ils sont tous derrière Uribe, ils ont le sentiment, justifié ou injustifié, qu'il s'agit enfin d'un véritable homme d'Etat, au sens strict du terme, c'est à dire un homme qui se bat pour la reconquête par l'Etat du territoire de son propre pays, la police et les services publics. Il est parvenu à rétablir une certaine possibilité de circuler dans le pays (il y a moins de 10 ans, il était impossible de sortir d'une ville en voiture), a obtenu le dépôt des armes par les paramilitaires, ce qui n'est pas simple et pose encore des problèmes, certains paramilitaires étant "nés" paramilitaires et ayant des soucis de reconversion, et ne semble avoir jamais fait obstruction à la justice même quand elle enquêtait contre ses supposés amis politiques. Il en est à son second mandat et a annoncé qu'il respecterait la constitution colombienne qui interdit trois mandats, alors qu'il serait élu dans un fauteuil et que la population se demande qui aura la carrure de lui succéder.

Il ne s'agit pas non plus d'en faire un saint. Mais de comprendre le contexte de son action.

Quant aux préoccupations des médias français pour notre otage nationale, le plus étonnant est leur sélectivité. Une autre franco-colombienne a été enlevée et séquestrée par les FARC depuis 2001, Aïda Duvaltier. Malgré les efforts de sa famille, on en a peu parlé. Quand sa soeur a appelé la Mairie de Paris pour savoir s'il serait possible de mettre son portrait sur la façade de l'Hôtel de Ville, comme pour Ingrid Bétancourt, il lui a été répondu qu'on ne voyait pas pour quelle raison, Aïda Duvaltier n'était pas citoyenne d'honneur de la ville de Paris. Ce n'est plus très important d'ailleurs, elle a été exécutée par les FARCs en 2006 dans une quasi-indifférence médiatique hexagonale.

On a aussi perdu un jeune professeur d'histoire-géographie bag-packeur dans la forêt colombienne. Il est présumé mort accidentellement. Son sac a dos a été retrouvé par l'armée colombienne dans un campement des FARCs, mais sa mort, si elle a eu lieu, ne serait très probablement pas de leur fait. Enfin, cela dit, c'est encore moins important, je ne suis même pas parvenu à retrouver son nom en cherchant un peu. La diplomatie française a d'autres chats à fouetter.

Selon que vous serez puissant ou pauvre, etc...

Tu connais l'histoire du commando français dépêché par Villepin pour libérer Ingrid en 2003, j'espère ? Un des hauts faits d'armes de l'armée française.

8. Le vendredi 7 mars 2008 à , par sk†ns

Et malheureusement, on ne pourra plus compter sur Said Mustapha Mahdjoub.

9. Le vendredi 7 mars 2008 à , par DavidLeMarrec

Oui, je ne voudrais pas paraître politiquement malsain en disant qu'il faut nuancer sur Uribe, ce n'est pas une position idéologique pour un sou.

Je crois que personne n'en doute. Pas moi en tout cas. :-)

Il y a de toute façon des tas d'hommes politiques sous nos contrées convaincus de corruption et ayant derrière eux un passé (plus ou moins passé) extrémiste ou mafieux. Et qui sont considérés comme respectables, et qui peuvent d'ailleurs faire du bon boulot.

Il n'est pas question de tresser des couronnes à Uribe (et encore moins à Poutine), simplement de fixer une juste mesure dans les critiques. Je suis pour le faire y compris pour les réprouvés de l'Histoire, mais qui plus, concernant Uribe, je ne dirais pas qu'il soit forcément du mauvais côté... Les paramilitaires sont rentrés dans le rang, suivent des procès. Il a été démocratiquement élu. Ce n'est pas le cas de l'armée 'révolutionnaire'.


Quels que soient leurs opinions politiques "de base", ils sont tous derrière Uribe, ils ont le sentiment, justifié ou injustifié, qu'il s'agit enfin d'un véritable homme d'Etat, au sens strict du terme, c'est à dire un homme qui se bat pour la reconquête par l'Etat du territoire de son propre pays, la police et les services publics.

Ca me paraît évident. Je ne suis donc pas du tout étonné de la popularité que tu décris, même une fois quitté le pays. Effectivement, la criminalité s'est réduite de beaucoup, et le nombre d'enlèvements a été divisé par un facteur spectaculaire (je n'ose le répéter de peur que ma mémoire me joue des tours).

Quant aux préoccupations des médias français pour notre otage nationale, le plus étonnant est leur sélectivité. Une autre franco-colombienne a été enlevée et séquestrée par les FARC depuis 2001, Aïda Duvaltier. Malgré les efforts de sa famille, on en a peu parlé. Quand sa soeur a appelé la Mairie de Paris pour savoir s'il serait possible de mettre son portrait sur la façade de l'Hôtel de Ville, comme pour Ingrid Bétancourt, il lui a été répondu qu'on ne voyait pas pour quelle raison, Aïda Duvaltier n'était pas citoyenne d'honneur de la ville de Paris. Ce n'est plus très important d'ailleurs, elle a été exécutée par les FARCs en 2006 dans une quasi-indifférence médiatique hexagonale.

C'est bien simple : je n'en avais jamais entendu parler.

Il y a tout de même un voile de pudeur qui s'est opportunément abaissé sur tout cela : maintenant on parle d'Ingrid... et des otages. Tout en ne visant, d'un point de vue stratégique, que sa libération.
Formidable opération marketing tout de même, pour parvenir à faire d'un drame familial ou politique isolé (surtout qu'elle a été enlevé par une imprudence volontaire) une cause internationale prioritaire.

Bien entendu, il va de soi que tout un chacun lui souhaite une libération prompte tant qu'il est temps, et en tout cas pas sa mort, qui serait une catastrophe pour les otages restants qui n'intéresseraient alors plus personne.


Tu connais l'histoire du commando français dépêché par Villepin pour libérer Ingrid en 2003, j'espère ? Un des hauts faits d'armes de l'armée française.

Ca ne me dit rien du tout, je t'écoute.


Merci pour toutes ces précisions...


@ Sk†ns : Il aurait pu en être, c'était avant son procès quoi qu'il en soit. C'était donc le cas ?

10. Le vendredi 7 mars 2008 à , par Morloch


Non non, Bob Denard n’en était pas.

C’est dommage, je ne retrouve pas l’article du Monde et celui du Pais qui avaient fait un résumé de l’opération, c’était des morceaux d’anthologie.

En juillet 2003, le quai d’Orsay avait été tuyauté sur Ingrid Bétancourt : elle était dans la forêt colombienne non loin de la frontière brésilienne, au fin fond de l’Amazonie. La position donnée était paraît-il fiable et précise. On savait où la trouver.

Immédiatement, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, décide qu’il faut agir avec force, discrétion et subtilité, comme il sait faire. Est constitué un commando d’élite surentraîné d’une dizaines d’agents de la DGSE, les meilleurs des meilleurs. Le chef de cabinet de Villepin sera aussi du voyage, comme chef négociateur. C’est une alliance de l’intelligence, de la parole, de la virtuosité et du muscle, les FARC vont voir à qui ils ont affaire. Inutile d’avertir les colombiens et les brésiliens : c’est de la pure perte de temps et contre-productif. Pour ce type d’opérations, il faut des pros, des vrais.

La première qualité d’un commando d’élite surentraîné, c’est la discrétion. Savoir passer inaperçu en toutes circonstances. C’est donc un Transall aux couleurs de l’armée française qui atterrit sur l’aéroport de Manaus au Brésil. En sortent une dizaine d’hommes en civil avec des lunettes de soleil et des sacs. Les contrôleurs brésiliens sont un peu étonnés, mais se contentent d’un petit compte rendu à leur hiérarchie qui suit son chemin des mes méandres administratifs.

Le commando d’élite surentraîné a de la ressource tactique. Il a été décidé de se séparer en deux groupes. Le premier groupe, dirigé par le directeur de cabinet louera les services d’un petit avion de tourisme privé qui les conduira jusqu’au point de récupération de l’otage. Le second groupe, uniquement militaire, aura comme mission de créer un effet de surprise : arriver par le fleuve en bateau puis à travers la forêt à pied jusqu’au même point. Les FARCs ne pourront qu’être déstabilisés par un tel sens stratégique. Ingrid est sauvée.

Trèves de bavardages. D’ailleurs personne dans le commando ne parle portugais, à quoi bon ? Quelques baragouinements en espagnol et en français suffiront amplement.

Le premier groupe va donc chercher un avion type CESSNA. Ca tombe bien, sur l’aéroport de Manaus il y a une petite zone réservée à ce type d’appareils, avec des pilotes qui font faire des ronds en l’air au dessus de la forêt aux touristes désoeuvrés qui le souhaitent. Le commando d’élite surentraîné, après avoir inspecté minutieusement et en plein jour chaque appareil jette son dévolu sur un pilote. Les hommes de la DGSE l’abordent donc en hispano-français, tout en faisant bien entrevoir entre les dialogues un armement important, s’agirait bien qu’il comprenne qu’il n’a pas affaire à des plaisantins. On lui montre ensuite le point à atteindre : la zone frontalière avec la Colombie, une des zones les plus importants au monde en matière de livraison de drogue, bien entendu, le vol ne sera pas signalé aux autorités, c’est secret et on le paiera bien pour cela. Le pilote, ayant enfin compris quelques mots de ce qu’on attendait de lui, répond que bien sûr, il peut les conduire à cet endroit sans problèmes et qu’on peut partir quand ils le souhaitent. Mais que, avant, il doit aller aux toilettes ou quelque chose comme ça.

En nage et tremblant de peur, le pilote élu se rue dans les locaux administratifs de l’aéroport de Manaus, demande un téléphone. Il appelle en urgence la brigade anti-stupéfiants locale et leur explique qu’il a eu affaire a des étrangers armés jusqu’aux dents et qui veulent aller clandestinement en pleine zone de narco-trafic. Ce sont sûrement des trafiquants de drogue étrangers, des gros bonnets, il supplie la police de venir le sortir de ce mauvais pas et vite, car s’ils apprennent qu’il a appelé il l’abattront sans hésiter, c’est sûr, ils ont des têtes de tueurs impitoyables et il a peur car il a une femme et des enfants, s’il vous plait venez vite. Il les attend enfermé dans les bureaux.

La police de Manaus arrive quelques minutes plus tard. Les étrangers armés sont neutralisés, et emmenés comme il se doit dans les locaux de la brigade des stupéfiants où ils vont être interrogés sur leurs activités suspectes.

Nous allons quitter quelques instants ce premier groupe de commandos d’élite surentraînés, pour dire quelques mots du second groupe. Celui-ci, d’une efficacité redoutable, c’est quand même un commando d’élite surentraîné dont il s’agit, a déjà quitté Manaus et se dirige à grande vitesse vers la zone d’exfiltration, comme on dit. A grande vitesse, car, initiative brillante et improvisée (improviser en action, c’est la clé du succès), ils ont volé une embarcation puissamment motorisée à quelques autochtones qui n’ont pas eu le temps de réagir. Le portugais c’est vraiment une langue compliquée, ces indigènes ne comprenaient rien à rien et il sera bien temps de rendre des comptes quand Ingrid sera sauvée.

Pendant ce temps, dans les locaux de la police de Manaus, les interrogatoires n’avancent pas. Des sacrés durs à cuire que ces trafiquants. En particulier celui qui ne paie pas de mine mais résiste à toutes les séances d’interrogatoires en répétant sans cesse des propos incohérents en espagnol et en français, comme quoi il est le directeur de cabinet de Monsieur de Villepin, ministre des affaires extérieures français, qu’il faut le relâcher, parce qu’il va sauver Ingrid. En voilà une que l’on ne leur avait jamais faite aux policiers de Manaus. Pourtant leurs interrogatoires virils et musclés mais infiniment respectueux des droits de l’homme, comme ils savent si bien les faire, donnent de bons résultats avec les pires caïds de la drogue. Depuis plusieurs heures que ça dure, il aurait dû craquer. C’est curieux.

Et décidemment, c’est la journée des débiles : la brigade fluviale annonce à l’instant l’arrestation rapide d’un groupe d’étrangers, des français, qui avaient volé un bateau sur le fleuve. Ils n’ont pas été très durs à arrêter, ils semblaient errer complètement perdus en longeant les rives.

(…)

Bon je passe rapidement sur la suite. La police a trouvé suspecte cette concentration de personnes se déclarant militaires français armés jusqu’aux dents et ayant l’air totalement à l’ouest, s’est interrogée sur la présence du Transall et a averti Brasilia. A Brasilia, ce fut la surprise ; personne n’étant au courant de rien, il a fallu appeler le quai d’Orsay. Au Quai d’Orsay, il a bien fallu bredouiller quelques mots d’explications sur le commando secret et remercier les autorités brésiliennes de donner enfin de « bonnes » nouvelles du chef de cabinet dont on était sans nouvelles depuis plusieurs jours.

S’en est suivie une petite tension diplomatique entre la France et le Brésil, vexé d’avoir été considéré comme un théâtre d’opération de la Françafrique, et une énorme crise de rire à Bogota.

Cette opération, considérée au quai d’Orsay comme un succès relativement mitigé, n’a sans doute pas eu que de bonnes conséquences dans l’affaire Bétancourt, les FARC en ont entendu parler et, quand ils ont pu s’arrêter de rire, ont commencé à comprendre qu’une de leurs otages avait un valeur particulière, qu’il ne s’agissait pas de la lâcher comme cela.

11. Le vendredi 7 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Merci pour ce grand moment ! J'avais eu vent d'une tentative avortée plus récente, dans le même genre (par hélicoptère), mais sans détails non plus. Même type de heurts diplomatiques.

Tu as toujours ce talent de conteur légèrement persifleur, c'est un régal à lire.

12. Le dimanche 9 mars 2008 à , par Morloch

Amusant, j'ai été témoin ce soir d'un décalage culturel entre deux ethnies.

Un gentil assistant d'université en sciences humaines confronté à une bande de colombiens en goguette, et voulant bien faire, se met à dire d'un air contrit que c'est bien triste les évènements des derniers jours pour ce pauvre pays victime de la violence de son gouvernement, et se retrouvant confronté à une hilarité euphorique lui rétorquant que les nouvelles venant de Colombie n'avaient pas été meilleures depuis au moins dix ans.

Il est resté frappé de stupeur, le pauvre.

Je suis un peu hors sujet, mais je crois qu'Uribe m'inspire plus que Poutine, et il y a une actualité plus spectaculaire ces derniers jours.

13. Le dimanche 9 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Non, non, ce n'est pas hors sujet, comme je te le disais, je comptais justement aborder le sujet dans la même perspective que pour le (petit) père Poutine.

Effectivement, le pays lui-même, tu le disais, va bien mieux en termes de sécurité (criminalité diverse et bien sûr enlèvements). Mais comme Bettancourt (dont personne n'envie le sort, c'est entendu - à part les otages dont personne ne parle) va, assez logiquement hélas, de mal en pis, on se dit qu'il y a le feu au lac.

Personnellement, j'ai accueilli l'élimination du chef en second comme une bonne nouvelle. Pour les négociations, il sera remplacé, et si cela pouvait faire une petite crise de régime lors de la succession, ce serait merveilleux. Alors ce n'est pas bien de violer l'intégrité territoriale des voisins, mais enfin, je n'ai pas non plus été extraordinairement choqué de l'élimination des terroristes basques laissés en paix sur le sol français par les services espagnols. Il faut le condamner sur le plan des principes, mais en fin de compte, on y gagne.

De ce point de vue, le traitement français (et apparemment dans pas mal de pays) était assez hallucinant, puisqu'il s'agissait d'une catastrophe, paraît-il. Et en plus, juste au moment où ils allait délivrer la seule garantie de visibilité qui est là leur. Je crois, moi, qu'il vont l'user jusqu'à la corde, leur pauvre otage.

J'incline à penser comme toi qu'elle serait peut-être en liberté si sa cause n'avait pas été affichée de façon aussi volontaire.


Et bien sûr, si des colombiens sont en France, c'est pour fuir les exactions d'une dictature militaire, il croyait bien faire...

Anecdote amusante en effet !

Et tu as assisté à tout ça au moment du Tournemire ? :-)

14. Le dimanche 9 mars 2008 à , par Morloch

Non, malheureusement j'ai été intercepté au téléphone au moment de partir vers l'horizon Tournemiresque, et j'ai décidé de sacrifier la découverte à la vie sociale.

Musicalement, le bilan de la soirée n'a pas été si nul, pas de Tournemire mais des gitans bosniaques, des vrais, dans un bar et d'un très bon niveau. On fait ce qu'on peut. Le problème est que j'étais le seul que ça avait l'air d'intéresser.

Sur le traitement français de l'actualité colombienne, un autre élément est étonnant : on nous explique que si l'armée colombienne a décidé de frapper "el secretariado de las FARCs" en ce moment précis, c'est dans le but bien évident de faire capoter les négociations sur la libération d'Ingrid Bétancourt.

C'est possible après tout, je ne sais pas ce qui se dit dans l'Etat-major colombien, mais il faut aussi jeter un œil sur l'actualité des derniers mois : le gouvernement colombien se vante de très importantes victoires militaires contre les FARCs, qu'il décrit comme très fortement déstabilisés, avec des désertions massives, y compris de militants de la première heure et des lignes de front entières anéanties. D'après ces comptes-rendus, les forces des FARCs auraient été diminuées de moitié en quelques mois.

Comme le gouvernement colombien a tendance à se vanter, par exemple de contrôler 100 % de son territoire, ces déclarations étaient accueillies avec un certain scepticisme par les journalistes sud-américains. La question qui était régulièrement posée était : " si vous comptez de si grands succès militaires contre les FARCs, comment se fait-il que vous ne soyez pas capable de toucher "el secretariado" " ?

Avec deux membres (sur sept) tués en moins d'une semaine, l'armée colombienne vient de répondre à cette question.

La mort d'Ivan Rios, chef militaire, est également révélatrice de l'ambiance qui semble régner chez les FARCs en ce moment. Il a été tué d'une balle dans la tête par son garde du corps. Ils étaient encerclés par l'armée colombienne, et selon le garde du corps, Ivan Rios paraissait devenu fou et refusait de se rendre. Le garde du corps aurait donc spontanément décidé de tuer son chef pour sauver ses camarades. Ceci dit, une récompense de plusieurs millions de dollars était promise pour la tête du guerillero, elle sera versée.

Je peux continuer mon petit bistrot du commerce colombien sur la bonne ambiance chez les FARCs. Déserter n'est pas une chose facile, les guerilleros qui y parviennent doivent traverser seuls des centaines de kilomètres de foret. Isolés en petite cellules combattantes, ils se surveillent les uns les autres. D'après les témoignages de FARCs déserteurs, quand on sent que les convictions d'un camarade vacillent, la procédure usuelle est de l'envoyer en mission suicide contre l'armée colombienne. Les déserteurs sont ceux qui ont senti approcher ladite mission suicide, qui sont parvenus à tromper la vigilance de leur camarades pendant quelques heures pour avoir une avance suffisante et qui ne se sont pas perdus dans la forêt.

La nouveauté serait que des unités entières se débandent. Un autre élément de mauvaise ambiance serait la question des salaires : les guérilleros FARCs sont salariés par "el secretariado" et touchent un fixe mensuel assez misérable. Or, il se dirait dans les rangs des FARCs que les chefs de la rébellion qui se finance par le narco-trafic, se seraient attribués des sommes d'argent colossales. Beaucoup de conditionnels, je n'y suis pas dans cette forêt.

Un autre phénomène gênerait les FARCs dans les zones qu'ils contrôlent : les tribus indiennes. Les FARCs ont comme habitude de faire des campagnes de recrutement dans les villages indiens en forçant les jeunes hommes à partir de 16-17 ans à rejoindre leurs rangs. Les indiens sont longtemps restés désemparés devant ces actions qui ruinaient leurs villages, or, depuis peu, se sont constituées de nouveaux groupes d'autodéfense exclusivement indiens qui luttent contre les FARCs. Un nouveau type de milice paramilitaire en Colombie (qui n'en avait peut-être pas besoin).

Quant au fameux échange humanitaire qui serait proposé par les FARCs et refusé par Alvaro Uribe, il pose tout de même deux problèmes : d'abord une partie des prisonniers FARCs dont "el secretariado" demande la libération ne veulent pas être libérés. Il préfèrent la prison à Bogota à la guerilla dans la jungle, d'autant que certains qui se sont rendus ont peur d'un comité d'accueil spécial. Ensuite, la zone d'échange réclamée par les FARCs est une zone peuplée de 100.000 personnes qui seraient livrés aux guérilléros. Il y a eu un antécédent en 2001 (date à vérifier, sous la présidence Pastarna en tout cas) qui s'est soldé par un bain de sang. Le gouvernement colombien n'est pas emballé emballé pour renouveler l'expérience. Il propose une autre zone, non peuplée, que les FARCs refusent.

Tout cela est indicatif, et je ne prétends pas donner une image exacte de la situation en Colombie, qui est d'une complexité incroyable et que je ne connais pas suffisamment. Mais je voulais juste signaler qu'une autre lecture des évènements en cours est possible que celle des médias français qui me paraît très unilatérale.

Je comprends la détresse de la famille Bétancourt, qui cherche par tous moyens des interlocuteurs et ne souhaite pas froisser les FARCs pour ne pas mettre Ingrid Bétancourt en danger. Est-ce une bonne stratégie ? seul l'avenir le dira. Il n'y en a peut-être pas d'autre.

Pour en finir avec cette actualité, est-ce une bonne idée de la mère d'Ingrid Bétancourt d'accompagner Hugo Chavez à la Havane pour rencontrer Raul Castro (dernière péripétie en date) ? J'ai peur que cela n'aide pas à de bonnes relations avec le gouvernement colombien.








15. Le dimanche 9 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Non, malheureusement j'ai été intercepté au téléphone au moment de partir vers l'horizon Tournemiresque, et j'ai décidé de sacrifier la découverte à la vie sociale.

Ton abnégation te fait honneur.


Musicalement, le bilan de la soirée n'a pas été si nul, pas de Tournemire mais des gitans bosniaques, des vrais, dans un bar et d'un très bon niveau. On fait ce qu'on peut. Le problème est que j'étais le seul que ça avait l'air d'intéresser.

:-))


Sur le traitement français de l'actualité colombienne, un autre élément est étonnant : on nous explique que si l'armée colombienne a décidé de frapper "el secretariado de las FARCs" en ce moment précis, c'est dans le but bien évident de faire capoter les négociations sur la libération d'Ingrid Bétancourt.

Oui, c'est vraiment la figure du méchant fou furieux qui veut absolument mettre en échec le Bien.


Comme le gouvernement colombien a tendance à se vanter, par exemple de contrôler 100 % de son territoire, ces déclarations étaient accueillies avec un certain scepticisme par les journalistes sud-américains. La question qui était régulièrement posée était : " si vous comptez de si grands succès militaires contre les FARCs, comment se fait-il que vous ne soyez pas capable de toucher "el secretariado" " ?

Avec deux membres (sur sept) tués en moins d'une semaine, l'armée colombienne vient de répondre à cette question.

Ou du moins d'équilibrer ses déclarations optimistes passées par des actes. :)


Le garde du corps aurait donc spontanément décidé de tuer son chef pour sauver ses camarades. Ceci dit, une récompense de plusieurs millions de dollars était promise pour la tête du guerillero, elle sera versée.

Oui, il y a peut-etre une forme d'investissement sur l'avenir, manière d'avoir une pension à sa retraite.


La nouveauté serait que des unités entières se débandent. Un autre élément de mauvaise ambiance serait la question des salaires : les guérilleros FARCs sont salariés par "el secretariado" et touchent un fixe mensuel assez misérable. Or, il se dirait dans les rangs des FARCs que les chefs de la rébellion qui se finance par le narco-trafic, se seraient attribués des sommes d'argent colossales. Beaucoup de conditionnels, je n'y suis pas dans cette forêt.

J'ignore également si ça se sait ; en revanche, si l'on en juge par les autres pères petits communistes, il y a de bonnes chances, cru ou pas, que ce soit le cas dans les faits.


Un autre phénomène gênerait les FARCs dans les zones qu'ils contrôlent : les tribus indiennes. Les FARCs ont comme habitude de faire des campagnes de recrutement dans les villages indiens en forçant les jeunes hommes à partir de 16-17 ans à rejoindre leurs rangs. Les indiens sont longtemps restés désemparés devant ces actions qui ruinaient leurs villages, or, depuis peu, se sont constituées de nouveaux groupes d'autodéfense exclusivement indiens qui luttent contre les FARCs. Un nouveau type de milice paramilitaire en Colombie (qui n'en avait peut-être pas besoin).

C'est bien, ils vont bientôt pouvoir faire un cricket.

Effectivement, la question de l'enrôlement de force, pourtant connue depuis toujours, ne semble pas autant émouvoir les observateurs étrangers des enfants lorsqu'ils évoquent "les raisons" de cette guérilla qui ne se survit que par inertie institutionnelle : plus d'idéologie, plus d'enjeu, et aucune perspective de prise de pouvoir vu la force de frappe de l'armée officielle.


d'abord une partie des prisonniers FARCs dont "el secretariado" demande la libération ne veulent pas être libérés. Il préfèrent la prison à Bogota à la guerilla dans la jungle, d'autant que certains qui se sont rendus ont peur d'un comité d'accueil spécial.

D'ailleurs, parmi les précédents libérés, tous ne sont pas rentrés au bercail...


Ensuite, la zone d'échange réclamée par les FARCs est une zone peuplée de 100.000 personnes qui seraient livrés aux guérilléros. Il y a eu un antécédent en 2001 (date à vérifier, sous la présidence Pastarna en tout cas) qui s'est soldé par un bain de sang. Le gouvernement colombien n'est pas emballé emballé pour renouveler l'expérience. Il propose une autre zone, non peuplée, que les FARCs refusent.

Je ne sais pas, moi, mais il me paraît évident que le "juste une zone démilitarisée" ne pose pas simplement un problème de mauvaise volonté, mais que c'est perdre le contrôle de toute une partie du territoire, et que les 'révolutionnaires' comptent sur cela pour faire passer de la drogue, recruter, voire prendre possession des lieux...

Encore une fois, aucun Etat n'accepterait cela, et je trouve déjà les Colombiens singulièrement ouverts de ne pas objecter de refus catégorique et éternel...


Tout cela est indicatif, et je ne prétends pas donner une image exacte de la situation en Colombie, qui est d'une complexité incroyable et que je ne connais pas suffisamment. Mais je voulais juste signaler qu'une autre lecture des évènements en cours est possible que celle des médias français qui me paraît très unilatérale.

Oui, bien sûr, et moi non plus je n'en suis pas. Sur la Russie, j'ai bien quelques échos un peu plus précis, mais sur la Colombie, je ne connais personne, même pas par ouï-dire. Mais avec les éléments dont je dispose, je vois tout de même quelques biais logiques dans la hiérarchisation qui nous est proposée. La vie d'une franco-colombienne, de plus engagée dans la politique et bravant sciemment les guérilleros, vaut-elle vraiment la vie de tous ceux qui seront enlevés ou massacrés lors de la démilitarisation ?

Et qui, de surcroît, sont potentiellement totalement étranger à cette lutte politique...

De même, le fait de blâmer le seul démocrate du lot - certes, la pression sur Uribe est sans nul doute plus efficace que celle sur Marulanda. J'ai même beaucoup de mal à m'expliquer comment les puissances étrangères obtiennent ainsi gain de cause sur tant de points ayant trait à la souveraineté colombienne.


Je comprends la détresse de la famille Bétancourt, qui cherche par tous moyens des interlocuteurs et ne souhaite pas froisser les FARCs pour ne pas mettre Ingrid Bétancourt en danger. Est-ce une bonne stratégie ? seul l'avenir le dira. Il n'y en a peut-être pas d'autre.

Il n'y a pas beaucoup de solutions dans la mesure où ce type d'otage ne réclame pas une rançon. Pour éviter qu'elle ne soit oubliée (ce qui était probable), ils ont fait le choix de la médiatisation forcenée.
Avec un vrai talent, mais aussi un peu d'idéologie qui ne les aide sans doute pas à se faire entendre là-bas.
D'autant qu'elle était une candidate "poil à gratter", qui ne devait donc pas avoir les faveurs des partis institutionnels qu'elle attaquait sans ménagement.




Merci encore pour toutes ces informations précises, ça remplace avantageusement beaucoup d'articles franchement vagues.

Je recommande, sinon, pour se tenir informé, outre Morloch sur CSS, l'hebdomadaire Semana, qui brasse de façon assez synthétique toutes ces problématiques. Courrier International en traduit parfois quelques (intéressantes) pages sur les enjeux les plus emblématiques vus de France.

16. Le mardi 11 mars 2008 à , par Morloch

Précises, précises, j'étais quand même vague sur certains points précis.

Pour la précédente zone de démilitarisation : il s'est agi d'une initiative du Président conservateur Andres Pastrana, qui avait voulu œuvrer dans le sens de la paix avec les FARC. Il a concédé aux FARC une zone de 42.000 km² (la Suisse fait 41 285 km²) depuis le 9 octobre 1998 jusqu'au 20 février 2002, date à laquelle Pastrana a résilié la concession du "Farclandia". 300 otages avaient été libérés par les FARC qui dans le même temps en capturaient un nombre supérieur. Les FARC ont bien pris soin de miner au maximum les zones qu'ils abandonnaient.

La récompense pour la livraison d'Ivan Rios est de 1.8 millions d'euros, et il y a débat pour savoir s'il est élégant de la verser ou pas. Le meurtrier, un brin rustique, a appliqué une procédure FARC et à coupé la main d'Ivan Rios pour prouver ses dires.

Ce meurtrier Pablo Montoya alias Rojas a donné une conférence de presse le 10 mars, dans laquelle il pronostique qu'Ingrid Bétancourt ne sera jamais libérée.

Pendant ce temps, le contenu supposé des ordinateurs personnels de Raul Reyes - l'autre dirigeant FARC mort - est livré à la curiosité des colombiens et du monde et semblent donner des informations précises sur le soutien d'Hugo Chavez aux FARC et d'autres informations délirantes sur le mode de fonctionnement des FARC. Lesdits ordinateurs sont en partance pour Interpol à Lyon, le gouvernement colombien est tout frétillant de cette trouvaille et veut qu'elle soit corroborée par une organisation jugée indépendante.

Pfiou ! Il y a trop de choses à ce passer à la fois, je n'aurais jamais dû accepter ce poste d'envoyé spécial pour CSS. La prochaine fois, je choisirai les Iles Feroe.

17. Le mardi 11 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Précises, précises, j'étais quand même vague sur certains points précis.

Tu ne lis donc jamais la presse française ? Paraît-il la meilleure du monde, d'ailleurs... Enfin, surtout meilleure que la britannique.


Pour la précédente zone de démilitarisation : il s'est agi d'une initiative du Président conservateur Andres Pastrana, qui avait voulu œuvrer dans le sens de la paix avec les FARC. Il a concédé aux FARC une zone de 42.000 km² (la Suisse fait 41 285 km²) depuis le 9 octobre 1998 jusqu'au 20 février 2002, date à laquelle Pastrana a résilié la concession du "Farclandia". 300 otages avaient été libérés par les FARC qui dans le même temps en capturaient un nombre supérieur. Les FARC ont bien pris soin de miner au maximum les zones qu'ils abandonnaient.

Je ne suis pas président de Colombie (oui, je sais, vos fantasmes à tous s'évanouissent d'un coup, et surtout ceux de Madame Inactuel si elle s'aventure jusque dans la forêt vierge des commentaires de CSS), mais il me semble que j'aurais peu ou prou anticipé la chose...
Enfin, il me semble logique, de la part d'une guérilla, de procéder ainsi, même si c'est infâme, etc.


Ce meurtrier Pablo Montoya alias Rojas a donné une conférence de presse le 10 mars, dans laquelle il pronostique qu'Ingrid Bétancourt ne sera jamais libérée.

C'est hélas l'évidence même - raison de plus pour ne pas sacrifier les principes et la sécurité des populations.


Pendant ce temps, le contenu supposé des ordinateurs personnels de Raul Reyes - l'autre dirigeant FARC mort - est livré à la curiosité des colombiens et du monde et semblent donner des informations précises sur le soutien d'Hugo Chavez aux FARC et d'autres informations délirantes sur le mode de fonctionnement des FARC. Lesdits ordinateurs sont en partance pour Interpol à Lyon, le gouvernement colombien est tout frétillant de cette trouvaille et veut qu'elle soit corroborée par une organisation jugée indépendante.

Oui, parce qu'en ce moment, on lui fait dire un peu ce qu'on veut, à ce joujou rouillé par l'humidité tropicale (et qui fonctionne à l'énergie solaire ?). Même la famille Bettancourt assertionne que l'ordinateur dit ceci ou cela qui les arrange (... qu'elle était sur le point d'être libérée).

Moi je dis, ils sont forts quand même de faire sauter le campement et de récupérer l'informatique en état. Avec cette maîtrise invraisemblable, on se demande comment ils n'ont pas encore éradiqué toute résistance. [C'est bon, j'ai suffisamment d'éléments suspicieux pour écrire un livre meyssianique.]

Bon, sinon, on découvre avec candeur et stupéfaction l'implication de l'histrion pétrolifère dans le financement des passeurs de drogue vaguement communisés. Alors là, on est franchement surpris, hein. Voire même en plus de sucroît un peu étonnés.


La prochaine fois, je choisirai les Iles Feroe.

Attention, le coin est plus dans mes cordes, tu risques essuyer plus de questions encore. 8o)


Je te lis avec plaisir en tout cas : ta peine n'est pas perdue !

18. Le mercredi 12 mars 2008 à , par Morloch

Et pour compléter la revue de presse commencée avec Semana, il est aussi possible de s'informer avec El Tiempo et Radio Caracol.

Pour les Iles Feroe, c'est plus délicat. Je propose Sosialurin pour s'informer en temps réel des derniers développements de l'actualité.

19. Le mercredi 12 mars 2008 à , par Morloch

Pour l'information complète des habitués des lutins, Semana est plutôt centre gauche, proche de l'opposition, et El Tiempo et Radio Caracol, centre droit, plus proche du gouvernement.

Cela dit, ce sont trois sources considérées comme sérieuses.

20. Le mercredi 12 mars 2008 à , par Morloch

Sosialurin, je ne sais pas, je ne comprends pas un mot. Il y a de petites images qui décorent avantageusement mon écran, c'est mieux que rien.

21. Le mercredi 12 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

... mais lorsque tu dis opposition, c'est naturellement la vraie, pas les fous de la forêt.

Rien d'ordurier, d'ailleurs, dans leurs propos. Je veux dire par là qu'ils évoquent les difficultés judiciaires d'Uribe, mais n'hésitent pas à dire qu'il se tire d'affaire ensuite - pas d'appel à la désobéissance civile, au meurtre ou au soutien des FARC du tout, dans ce que j'ai lu jusqu'à présent... De la vraie opposition, en somme (il vallait mieux le souligner, parce qu'en France, on n'en a pas forcément conscience, vu le traitement un peu binaire de cette actualité).

22. Le mercredi 12 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Sosialurin, je ne sais pas, je ne comprends pas un mot.

Si, forcément des mots, ça reste du fonds nordique commun, donc il reste des racines repérables par rapport aux autres langues germaniques. Maintenant, oui, c'est archaïsant, et encore plus que le Nynorsk.

Je suis sûr que ce sont plus les jolies lettres à l'islandaise qui te troublent qu'autre chose. Le « ð » (eth), c'est simplement une fricative dentale voisée, l'équivalent du « th » anglais devant voyelle, ou de certains « d » danois (gade, c'est-à-dire "rue", qui se prononce approximativement "guève"). Pas de quoi en faire une montagne.

23. Le mercredi 12 mars 2008 à , par Morloch

Oui, l'opposition a présenté un candidat crédible, Carlos Gaviria. Il a obtenu 22 % des voix d'une élection 2006 marquée par l'abstention. Uribe a récolté 62 % des voix, et se maintient dans les sondages aux alentours des 70 % d'opinions positives.

Cette opposition de gauche a une image plombée par des attitudes équivoques dans le passé vis-à-vis des FARC et de l'ELN (autre guérilla d'extrème gauche qui a déposé les armes et accepté de négocier avec le gouvernement Uribe), et il se pourrait que cette image reste ternie un bon moment aux yeux des colombiens avant qu'ils estiment de nouveau qu'il est prudent de voter pour la gauche classique.

L'opposition démocratique espère une usure du pouvoir Uribe. Cependant, l'euphorie actuelle de la population colombienne après les morts de Raul Reyes et d'Ivan Rios ne les aidera pas sur ce point. Il est à craindre pour eux que la cote de popularité d'Alvaro Uribe grimpe encore auprès de colombiens qui cherchent désespérément des motifs de fierté pour leur pays.

Le président Uribe joue de ce sentiment nationaliste, profitant également d'un sentiment de retour à la sécurité ressenti par la population et de chiffres présentables vis-à-vis de la communauté internationale : un rapport de l'ONU de 2007 estime que la superficie cultivée de coca est passée de 145.000 hectares en 2001 à 86.000 hectares en 2003 puis 78.000 hectares en 2006.

Dans la mémoire collective colombienne, les années Pastrana, marquées par la volonté de négocier et par des concessions unilatérales accordées aux uns et aux autres, resteront comme le cauchemar de l'anarchie, du retour à une forme de féodalité et surtout comme une spirale de violence incontrôlable, illustration caricaturale de la phrase selon laquelle " l'enfer est pavé de bonnes intentions ".

Bon, je vais m'arrêter sur le sujet, qui m'intéressait à l'origine surtout en raison du traitement médiatique français de cette actualité.

Personne n'a rien dit sur le (pauvre) Poutine...

24. Le mercredi 12 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Dans la mémoire collective colombienne, les années Pastrana, marquées par la volonté de négocier et par des concessions unilatérales accordées aux uns et aux autres, resteront comme le cauchemar de l'anarchie, du retour à une forme de féodalité et surtout comme une spirale de violence incontrôlable, illustration caricaturale de la phrase selon laquelle " l'enfer est pavé de bonnes intentions ".

De même pour le plus souple Carter aux Etats-Unis... L'URSS s'est plus effondrée à cause de la course dure menée par Reagan, même si ça fait du mal de l'admettre. (Bien sûr, je passe les facteurs internes au régime soviétique, on est bien d'accord...)


Bon, je vais m'arrêter sur le sujet, qui m'intéressait à l'origine surtout en raison du traitement médiatique français de cette actualité.

Ma foi, pour quelque chose qui ne t'intéresse pas, tu ne te débrouilles pas trop mal. :-))


Personne n'a rien dit sur le (pauvre) Poutine...

On se croirait dans la chambre de Buoso, ici...

25. Le mercredi 12 mars 2008 à , par Morloch

De toutes façons, même après le départ du povero Poutine, la Russie pourra compter sur son fameux bataillon de chanteurs d'opéra pour maintenir l'ordre :



La menace du chaos est définitivement écartée.

26. Le mercredi 12 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Oui, je m'étais interrogé sur le sens de cette photo.

Enfin, cela dit, il y a des Etats qui ont Arnaud Klarsfeld pour de vrai sur les bras, alors Netrebko pour de faux, ma foi, ça me paraît une excellente alternative, non ? :)

27. Le mercredi 12 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

La menace du chaos est définitivement écartée.

Sauf pour la diction et le style français, je crois.

28. Le mardi 18 mars 2008 à , par Morloch

Aaaaaaaaaaaaaah enfin ! j'ai trouvé ce que je cherchais, un éditorial qui reflète exactement l'état d'esprit en Colombie aujourd'hui tout en décrivant la perception des évènements actuels par la population.

Je ne dis pas que c'est la vérité, je dis que c'est représentatif. Un sondage a mesuré 84 % d'opinions positives sur l'action d'Uribe, il semble même que les instituts de sondages aient minimisé leur chiffre tant il est délirant. Ce qui les surprend, en revanche, ce sont les 71 % d'opinions positives d'Ingrid Bétancourt dans le même sondage. Si elle s'en sort, elle va peut-être pouvoir la faire, la carrière politique dont elle rêvait.

Ah oui, pour comprendre l'ambiance, il s'agit d'un éditorialiste de l'opposition à Uribe dans Semana.
http://www.semana.com/wf_InfoArticulo.aspx?idArt=110300
Un lien vers le blog, peut-être plus durable :
http://rafaelguarin.blogspot.com/2008/03/el-mito-de-que-las-farc-no-son.html

Et un essai de traduction pour les non-hispanophones (c'est de la traduction maison, hein, soyez indulgents) :

Rafael Guarín :
La pérennité des Farc pendant plus de quarante ans s’explique, entre autres choses, par la construction calculée de mythes destinés à légitimer leur existence. L’un d’eux est l’idée selon laquelle la guérilla est invincible et que la seule « sortie du conflit armé » est la « négociation politique ».
A « l’invincibilité » des Farc s’ajoute un autre mythe : celui de la “résistance”. La littérature révolutionnaire s’efforce de présenter le groupe armé comme une réponse à l’oppression de deux autres mythes : l « Etat terroriste » et les « crimes d’état ». Ainsi, l’usage de la violence n’est pas une option, elle est imposée par l’ennemi, « le problème des moyens ne dépend pas des révolutionnaires mais des réactionnaires ».
Mais ces discours n’ont jamais été innocents. Encore moins aujourd’hui. « Tirofijo » essaie de mettre en place un imaginaire collectif capable de mettre en déroute l’action de l’Etat. Son expérience lui a appris que la guerre ne se fait pas seulement avec les fusils et dans les montagnes. Il a découvert qu’il existe des ressources plus mortelles et efficaces, quand les armes sont les croyances et le champ de bataille les mentalités des citoyens.
En 1983, lors d’une interview avec le magazine Semana, Jacobo Arenas a décrit cette stratégie : le trève unilatérale des Farc « ne s’est pas faite autour de la paix mais autour des élections de mars et de mai 1982 ». Le résultat fut de mettre à l’ordre du jour la « sortie négociée ». Alfonso Lopez Michelsen s’était dépêché de déclarer que « la paix est libérale » et Belisario Betancur de répondre que « la paix est nationale ». Le dénouement fut un processus de paix qui donna de la visibilité à la guérilla, délégitima l’état qui adopta le discours des « causes objectives de la violence » et participa à renforcer les mythes justifant la criminalité. La formule s’est répétée avec succès en 1998.

La leçon a été bien apprise. En profitant des contradictions de ceux qui jouent les règles du jeu démocratique, ils espèrent placer la négociation en première place des préférences des citoyens lors des élections de 2010 et tourner la page de la sécurité démocratique. Les documents trouvés sur l’ordinateur de Reyes le démontrent et dévoilent cet objectif dans les multiples déclarations et mouvements tactiques des Farc, avec l’excuse de « l’accord humanitaire » et l’aide décisive du camarade Hugo Chavez.

C’est l’application Farc de la logique gouvernementale qui cherche à neutraliser la volonté de lutte de la guérilla par une asphyxie militaire et politique. Le secrétariat des Farc va dans ce sens en s’investissant à fond pour renforcer ces deux aspects. Le premier, donner du crédit au mythe de l’invincibilité en épuisant la force publique, en se repliant chaque fois dans des lieux plus inhospitaliers et en faisant des actes terroristes qui visent à frapper la population de stupeur.

L’invincibilité supposée est liée à la politique qui vise à obtenir une légitimité internationale et à casser la volonté de lutte de l’Etat dans les urnes. Ambitionnant l’élection d’« un nouveau gouvernement comprenant la nécessité de la paix », c’est-à-dire, dont la priorité serait la « négociation politique », qui « prenne la décision de renvoyer les troupes dans leurs casernes » et « exige que les troupes et conseillers étasuniens quittent le pays » comme le prévoit le « Manifeste des Farc » du 1er octobre 2007.

Ce qu’ils n’avaient pas prévu, parce que cela ne faisait pas partie des chapitres précédents, ce sont les effets adverses de la combinaison d’une politique de fermeté et des conséquences de son appropriation citoyenne. Le mythe de l’ « invicibilité » disparaît pendant que l’étau se resserre chaque jour un peu plus autour des Farc. La guérilla n’a pas la capacité d’exercer le moindre contrôle territorial, est confrontée à une avalanches de désertions qui atteint le chiffre de record de 2480 pour la seule année 2007 et à la chute de chefs auparavant intouchables.

La très grave désarticulation du commandement est corroborée par l’assassinat des onze députés otages, sans parler des problèmes de communication et de coordination dévoilés par l’affaire Emmanuel et par l’isolement d’Ivan Rios. La décomposition interne est le résultat très spectaculaire de la pression des Forces Militaires, de la politique des récompenses et du remplacement des convictions politiques par une soif de richesse. La démoralisation doit régner dans les bivouacs.

Bien qu’ils aient comme alliés des gouvernements de la révolution bolivarienne, les replis sur le territoire de ces pays, jusqu’ici peu sûrs, tendent à se restreindre du fait de la pression internationale et du risque de se faire traiter comme des Etats soutenant le terrorisme. Leur neutralisation, question difficile en ce qui concerne Chavez, réduira les Farc à leur véritable dimension. Celle-ci n’est amplifiée qu’à travers son activité sur Internet et par les otages, lesquels, bien qu’ils leur permettent de continuer à avoir une fenêtre internationale, renforcent leur identité de criminels contre l’humanité et de terroristes.

Mais le plus fatal pour les Farc est que les citoyens ont transformé une politique gouvernementale en politique d’Etat. Au dessus des dirigeants, des partis et des divisions que ces sujets génèrent, les colombiens ont déjà choisi le chemin de la fermeté, avec lequel le scénario prévu en 2010 s’éloigne chaque fois un peu plus.

Au train où vont les choses, les mythes de “résistance” et d’ “invincibilité” sont déjà brisés. Comme celui de la « négociation » à n’importe quel prix. Aucune guérilla ne peut résister sans combattre quatre, sinon douze ou seize, années, si la politique de sécurité démocratique est maintenue. Ce qui au début a été un repli organisé pour conserver des forces, est aujourd’hui l’incapacité physique de lancer une « offensive générale ». Les Farc continueront à s’affaiblir et à se fissurer tant que se maintiendra le fermeté contre le terrorisme. Le plus tôt sera le mieux, ils ne feront plus partie que de cette histoire que nous n’aurions jamais dû vivre.

29. Le mercredi 19 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Merci beaucoup pour ce beau travail ! :)

Je réagis un peu plus tard, il y a beaucoup à se mettre sous la dent, mais je ne sais pas dans quelle mesure il est possible de prolonger ces riches considérations.

Juste une chose, concernant ta remarque sur Betancourt : le chrétien a toujours de l'empathie pour le souffrant. Voter pour lui lorsqu'il ne le sera plus, ce sera une autre affaire.

30. Le mardi 25 mars 2008 à , par Morloch

Bon sang, je viens de trouver un article génial et tout, bien polémique comme il faut, écrit par un professeur de sciences politiques de Caracas dans El Tiempo colombien.

Il est trop bien cet article, je ne résiste pas. Mais si cela t'ennuie, n'hésite pas à le retirer, on ne se rapproche pas de Poutine et tu n'as pas forcément vocation à héberger ce type de discussions. Je n'avais pas anticipé que ce sujet aurait une telle actualité... En cas d'intervention d'un commando Farc à Bordeaux, je promets de participer au versement de la rançon, à hauteur de mes moyens (heu, 20 euros et un ticket restaurant, ça ira ?)

L'article (éditorial indépendant) est ici

Et je tente à nouveau une traduction maison...

Aníbal Romero :


Le propos de cette note est d'accuser l'Etat français, représenté par les gouvernements de Sarkozy et Chirac, d'arrogance, d'hypocrisie et d'irresponsabilité dans sa politique à l'égard de la Colombie et du président Uribe.

Après que "Raul Reyes" ait été abattu le samedi précédent, le gouvernement français a émis un communiqué dans lequel il affirmait que cet épisode s'était produit "à un moment crucial quand tout devait être fait pour soutenir la dynamique positive qui s'était initiée avec la libération unilatérale de plusieurs otages" . La signification de ces paroles est sans équivoque. D'après l'Etat français, la Colombie et Uribe auraient dû s'abstenir d'attaquer le narco-guérillero car ce qui est compte pour la France c'est la libération d'Ingrid Bétancourt.

Semblable arrogance, qui constitue une intrusion claire de la France dans les affaires internes de la Colombie, se joint à l'hypocrisie de l'Etat français qui affiche ses intentions humanitaires mais qui en réalité est parvenu à faire oublier au monde entier que les Farc détiennent des centaines de personnes, toutes également dignes, otages et humiliées depuis des années car il semble qu'une seule devrait être libérée parce qu'il s'agit d'une citoyenne française avec de l'influence dans les milieux diplomatiques parisiens.

Il est impossible de ne pas sympathiser avec les malheurs de Madame Bétancourt et la douleur de sa famille mais il est de même impossible de ne pas s'irriter de l'injustice qui consiste à la distinguer de la façon dont l'a fait l'Etat français et les activistes qui l'ont appropriée pour leur cause personnelle jusqu'à effacer de l'attention du monde ce qui est en jeu en Colombie et le sort de tant d'autres, dont les noms ne sont jamais mentionnés.

L'Etat français, outre qu'il soit arrogant et hypocrite, agit de façon irresponsable en accordant aux Farc une reconnaissance qu'ils ne méritent pas, donnant en même temps à Hugo Chavez la chance de se présenter comme un agent humanitaire quand il n'est en réalité rien d'autre qu'un allié de la narco-guérilla, et qui dans son délire pousse le Vénézuela et la Colombie vers une guerre fratricide.

Arrogance, hypocrisie et irresponsabilité font de l'actuelle politique de la France à l'égard de la Colombie un parfait exemple de ce dont sont capables les européens quand il s'agit de traiter avec des nations d'Amérique du sud qu'ils regardent de haut; les nations qui se battent pour la liberté et la démocratie leur paraissent moins intéressantes que les échecs révolutionnaires. Pour le gouvernement et les intellectuels français, le desptisme castriste est "chic", alors que la démocratie colombienne est ennuyeuse; Chavez est folklorique et amusant pendant qu'Uribe est condamné pour combattre avec succès la narco-guérilla.

Il y a une attitude semblable de la gauche nord-américaine, en particulier le parti Démocrate, occupé à entraver le Traité de libre-échange entre la Colombie et les États-Unis et à remettre en question Uribe au sujet des droits de l'homme des narco-guérilleros. Ces attitudes font beaucoup de dégâts et mettent en avant un grand aveuglement politique ainsi qu'un torpeur morale.

Est ce qu'un jour l'Etat français tiendra compte de la perversité politique du jeu de Chavez, qui utilise la réputation diplomatique de Paris
à ses propres fins ? Je ne le crois pas. L'arrogance, l'hypocrisie et l'irresponsabilité française dans cette affaire sont déjà allées trop loin. Heureusement, ces légèretés n'ont pas influencé Uribe et le peuple colombien qui sont en train de triompher dans leur guerre contre les Farc. Quant au Vénézuela, les fanfaronnades de Chavez lassent. Chavez est une grande gueule et ses menaces sont vaines.

31. Le mardi 25 mars 2008 à , par Morloch

Oula, j'ai rédigé ma traduction trop vite, il y a des étrangetés. Mais enfin, je crois qu'on comprend.

32. Le mardi 25 mars 2008 à , par Morloch

Et sinon, comme j'ai développé, je me sens obligé d'être un peu plus rigoureux et de vérifier quelques informations :

- sur Aïda Duvaltier, elle n'avait pas été enlevée par les Farc comme je l'avais écrit, mais par l'EPL, un autre groupe de guérilla révolutionnaire.
- le nom du français disparu de façon mystérieuse dans la zone des Farc est Marc Beltra, un site à son sujet ici

Il faudra peut-être que je vérifie le déroulement exact de l'opération du commando d'élite de juillet 2003, mais je suis assez près de la version des faits qui avait été divulguée à l'époque (à contrecoeur pour les autorités françaises).

33. Le mercredi 26 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Génial l'article ! Ca balance dur...

Je suis un peu rassuré que les colombiens ne prennent pas tous avec plaisir d'être les paillassons des ressortissants français. :-)

Merci, tu es une vraie mine. Je vais t'embaucher comme contremaître des lutins, si ça continue...

34. Le mercredi 26 mars 2008 à , par Morloch

Contremaître des lutins ? Horreur ! Encore que si ça consiste à s'asseoir dans un transat pendant que les lutins apportent des lait-cassis, ça peut être tentant :)

Dans l'affaire Ingrid Bétancourt, une rumeur issue d'un entrefilet dans un journal de Medellin vaguement corroborée par une rumeur issue de l'armée colombienne qui dément sans démentir vraiment (et une double rumeur mal sourcée et mal démentie c'est une information... hem... enfin...) donne à craindre que le dénouement ne soit très très proche.

35. Le jeudi 27 mars 2008 à , par Morloch

Erm...

Je sais que ça devient long, d'autant que le pauvre Poutine est laissé à l'abandon, mais il se passe plein de choses intéressantes. Je pourrais parler des paramilitaires qui sont difficiles à réinsérer et dont certains font des rechutes de leur passé "glorieux", du gouvernement vénézuélien qui, peut-être en réponse à la rumeur qui veut qu'Ingrid Bétancourt ait été vue agonisante ces derniers jours, déclare ne pas avoir de nouvelles depuis la mort de Reyes, mais c'est un article composite du quotidien El Pais de Cali que je me permets de citer.

Son intérêt est de mélanger une information aussi importante qu'une prise de position du Brésil sur les négociations avec les Farc avec un aspect documentaire comme une obscure histoire de coffre fort au Costa Rica.

http://www.elpais.com.co/HOY/INT/int01.html

et de nouveau la traduction maison ^^

El Pais de Cali :
]
Resumé d’agences – 26 mars 2008

Le gouvernement du Brésil refuse d’accorder le statut de belligérants aux Farc, s’écartant de cette manière de la position du président vénézuélien, Hugo Chavez, face à la guérilla colombienne.
C’est de cette façon que s’est exprimé le ministre des affaires étrangères du Brésil, Celso Amorim, qui a confirmé que le gouvernement de Luiz Inacio Lula da Silva n’est pas neutre dans le conflit interne colombien.

“ Le Brésil, par exemple, est en désaccord total avec la position du président du Vénézuela qui considère les Farc comme une force belligérante. Nous ne nous accordons pas sur cette idée » a déclaré Celso Amorim. Le ministre considère que les Farc ne méritent aucun statut politique « parce qu’ils pratiquent la prise d’otages et autres crimes abominables ».

Cependant, Celso Amorim a rappelé que le Brésil ne classifiait par les Farc d’une manière ou d’une autre, parce que c’est “ une chose très subtile” et que dans beaucoup de pays des groupes qui avaient été considéré comme terroristes “ participent aujourd’hui à des gouvernements et dialoguent avec des premiers ministres.”

Pendant son intervention dans l’émission Roda Viva de la chaîne TV Cultura, le ministre a exposé qu’en réponse aux différends entre entre la Colombie, le Vénézuéla et l’Equateur, la position du Brésil est de chercher “ la conciliation et le dialogue”.

De plus, il a insisté sur le fait que le Brésil condamnait l’action des Farc et que les otages “ devaient être libérés unilatéralement, sans conditions”.

Ne pas être les tanières des Farc.

Depuis San Jose de Costa Rica, le président Óscar Arias a conseillé au Brésil, au Venezuela et à l’Equateur d’éviter que leur territoires ne se transforment en “ tanières » des Farc, un groupe armé qu’il considère comme « un dinosaure qui n’a pas de raison d’exister ».
Le représentant du Costa Rica et Prix Nobel de la paix 1987 rappelle que pendant son premier gouvernement (1986-1990) il a explusé de son pays “ la contar” nicaraguienne “ pour ne pas donner de prétextes au Gouvernement du Nicaragua et au mouvement armé sandiniste pour franchir la frontière.

Arias assure que “ c’est exactement la même chose qui se passe en Equateur, où à 1.800 mêtres (à l’intérieur du territoire) il y avait un groupe des Farc”.

Le Président costaricain a déclaré que son homologue Alvaro Uribe l’avait appelé pour lui expliquer le déroulement de l’opération et a dit avoir “compris” la raison pour laquelle il avait agi de cette manière, bien qu’il ait expliqué que, à ce qui lui apparaissait, il s’agissait d’une “ violation de la souveraineté de l’Equateur”.
“ Je comprends le président Uribe parce que les Farc son un dinosaure en 2008, au 21ème siècle. Ils n’ont pas de raison d’exister. Ils avaient une raison d’exister à l’époque de la guerre froide, parce qu’il y avait une idéologie marxiste-léniniste et parce que la Colombie n’avait pas consolisé sa démocratie » a déclaré Arias.
Entre autres choses, plusieurs députés costaricains ont insisté auprès du ministre de la Sécurité, Fernando Berrocal, pour qu’il explique quels personnes politiques locales seraient liées aux Farc.
“ Le Ministres a fait des décarations très fortes qui ne peuvent être faites sans fondements” a dit le député Jorge Eduardo Sánchez, du Partido Unidad Social Cristiana, pendant que la parlementaire indépendante, Evita Arguedas, les a qualifiées de “ très délicates”.

Les parlementaires ont envisagé la création d’une commission d’enquête sur le thème du groupe illégal au Costa Rica.

La planque aux dollars

Le président costaricain Óscar Arias a fait référence hier aux 480.000 $ qui ont été découverts le 14 mars dernier dans une maison de ce pays et qui appartenaient aux Farc.

Il a expliqué que le ministre Berrocal devait donner les noms des politiques impliqués avec le groupe armé illégal colombien.

Pour le chef de l’Etat, relier aux Farc le couple propriétaire de l’habitation où le coffre fort qui contenait l’argent est une chose délicate.
« On ne peut affirmer une telle chose si on n’a pas de preuves » a-t-il ajouté.

Selon leurs souvenirs, l’espagnol naturalisé au Costa Rica, Francisco Eleuterio Gutiérrez Pérez, un professeur à la retraite, et son épouse, la costaricaine Cruz Prado Rojas, ont expliqué qu’ils avaient gardé le coffre-fort parce qu’il croyaient qu’il contenait des documents, suite à une faveur que leur avait demandé Granda en personne, qu’il ne connaissaient à cette époque que comme « Ricardo ».
Aval pour une rencontre avec les Farc

Le président Alvaro Uribe a dit que les seuls qui pourraient se réunir avec les Farc pour traiter de thèmes tels que l’accord humanitaire seraient ceux qui aurait un aval préalable du Gouvernement national.



36. Le jeudi 27 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Que d'abondance, grand Dieu !

Contremaître ou pas, je t'offre un lait cassis à ton passage à Bordeaux !


Je voulais déjà rebondir sur les précédents, il va me falloir regarder tout ça à tête reposée. :)

Merci encore ! Tu as des tas de choses passionnantes à dire, tu devrais ouvrir un carnet, tu sais. -<]:o)

37. Le vendredi 28 mars 2008 à , par Morloch

Oups, je suis désolé d'estourbir ce pauvre CSS, mais il semble se passer beaucoup de choses en Colombie, dans la lumière et dans l'ombre.

Chaque jour donne son lot de nouvelles étonnantes qui ne sont pas relayées par les médias français, lesquels continuent, imperturbablement, à donner des comptes rendus larmoyants axés sur la seule Ingrid Betancourt, sans aucune indication sur le contexte. Pendant ce temps, les procès de la "parapolitique" continuent, avec l'arrestation de nouvelles personnalités politiques importantes, la responsabilité de soldats dans certains massacres des années 2000 est mise à jour, l'autre guérilla révolutionnnaire, l'ELN, semble prête à déposer les armes à certaines conditions après avoir été mise KO par l'armée, la diplomatie brésilienne est très louvoyante, il y a quelques jours Interpol a confirmé que l'ordinateur qui lui avait été transmis est bien celui de Reyes, et que cet ordinateur contient 17.000 documents qui vont maintenant être analysés, information qui ne semble pas rassurer tout le monde.

Les journaux français ont remis Ingrid Bétancourt en première page aujourd'hui, suscitant des réactions énervées de certains qui sont las de relire la même nouvelle tous les deux jours. Ils n'ont pas tort, mais cette fois il semble bien que cela soit la fin. La seule information précise dans tout cela est que vers les derniers jours du mois de février, les Farc ont présenté Ingrid Bétancourt dans plusieurs dispensaires ruraux de la région du Guaviare. Elle était dans un état critique et souffrait d'une hépatite B et de leishmaniose (une maladie tropicale). Depuis, il ne semble plus y avoir de nouvelles, à l'exception d'habitants de la région qui ont dit l'avoir aperçu dans un état moribond dans le courant du mois de mars.

Le président Uribe a assoupli sa proposition d'accord humanitaire aujourd'hui et propose des libérations beaucoup plus larges de guérilleros détenus que ce qu'il proposait jusque là : cette fois il n'y aurait plus de conditions sur la nature des délits commis pour être libérable.

La famille, dont on comprend l'angoisse, reste silencieuse à l'exception de son ex-mari et père des enfants d'Ingrid Bétancourt, Fabrice Delloye, qui poursuit inlassablement sa tactique fondée sur un genre de syndrome de Stockholm. Mais cette fois, à qui s'adresse t'il ?

Car je me demande, dans tout cela, ce qui reste de l'organisation des Farc. On sait que sur les sept membres du "Secretariado", deux sont morts. Il semble qu'un troisième soit grièvement blessé, mais les informations sont contradictoires. Quant au grand chef et fondateur de la guérilla, Manuel Marulanda, il a 78 ans et souffre depuis plusieurs années d'un cancer de la prostate, son silence est suspect. Même s'il a au cours des quarante dernières années été plusieurs fois déclaré mort et qu'à chaque fois il est réapparu, on peut réellement se demander dans quel état il se trouve aujourd'hui.

Les Farc ne sont-ils aujourd'hui que des bandes dispersées qui courent dans la forêt en tentant d'éviter l'armée colombienne et les champs de mines qu'ils ont eux-mêmes placés ? Leur possibilités de communication sont réduites, l'armée colombienne semble avoir été dotée par l'armée US de dispositifs de détection dernier cri qui empêchent même les membres du Secretariado de se contacter pour ne pas être repérés. Ingrid Betancourt est-elle tenue en captivité par une unité de fugitifs coupés du monde et menée par un petit chef qui n'osera pas prendre la décision de la relâcher sans en référer à une hiérarchie introuvable ? Les précédents du fils de Clara Rojas perdu dans un orphelinat suite à un problème de communication et des onze députés otages exécutés par erreur (et oui, une boulette, ça arrive à tout le monde) sur l'initiative d'un petit chef local vont dans ce sens.

Enfin, tout cela pour dire que les médias semblent ressasser toujours et encore la même information sur Ingrid Betancourt, mais ce n'est qu'une illusion, car, si l'information formellement donnée par les médias français reste identique, le contexte de cette information, lui, évolue d'heure en heure. Ce que les médias français oublient de signaler.

38. Le vendredi 28 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Voilà un superbe éditorial !

Si tu ouvres ton site d'information alternative sur la Colombie, tu as déjà un lecteur assidu... :)

Nous verrons bien pour l'avenir des FARC, mais l'"inertie institutionnelle" ne doit pas être négligée : une organisation aussi fermée risque de continuer à se nourrir en boucle pendant encore pas mal de temps, avec des dommages comme ceux auxquels l'on a assisté et va manifestement assister dans les tout prochains temps.

A moins d'une faiblesse de l'exécutif, d'une lutte de succession ou d'une absence de chef compétent. La transition est toujours fragile, au moment d'un tel héritage après le fondateur historique.

Merci encore pour les nouvelles fraîches bien ordonnées et remises en perspective... (Et, non, il n'y a pas de sujet qui soit banni par principe sur CSS, c'est justement ce qu'il y a de chouette avec un drome à diaire.)

39. Le samedi 29 mars 2008 à , par Morloch

Merci des félicitations. Me voilà envoyé spécial des lutins sur le front colombien :) (Tu n'as jamais vu le début de Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil de Jean Yanne ? Quand on voit un journaliste sirotant des cocktails sur une plage des caraïbes et envoyant un communiqué audio en direct à Radio France dans lequel il se présente comme étant au milieu de la guérilla, avec des enregistrements de fusillades sur un magnétophone en bruit de fond...)

Tu as raison de dire que la guérilla ne risque pas de tomber en un jour, et qu'elle tiendra encore un moment ne serait-ce que par inertie et grâce à son trésor de guerre, sans compter l'aide et les zones de repli offertes par l'Équateur et le Vénézuela.

Je ne parviens pas à retrouver un article de El Pais espagnol décrivant les constatations éberluées dans d'un inspecteurs de l'OEA (Organisation des Etats Américains) envoyé inspecter la frontière et le campement dans lequel Reyes avait été tué : le midi à la cantine on mange avec les Farc en uniforme, les Farc portent des uniformes de l'armée équatorienne parce que c'est plus compliqué de faire venir les uniformes originaux depuis la Colombie, l'armée équatorienne offre son aide logistique pour le transport de la drogue. L'OEA a rendu un rapport policé sur la question concluant que l'Équateur avait besoin d'aide pour mieux contrôler ses frontières... Cet article-ci donne des informations semblables :

Article du Pais espagnol sur la frontière équatorienne

Il n'empêche que les Farc pourraient bien être entrés dans les processus de transition que tu évoques : il y a faiblesse de l'exécutif car il règne une certaine incertitude sur l'identité du chef, est-ce Marulanda ? était-ce Reyes ? qui serait le successeur ? Les circonstances de la mort d'Ivan Rios, membre du Secretariado, sont plus qu'étranges, tué par son garde du corps, certes, il a été dit que celui-ci avait été retourné par l'armée colombienne, dans ce cas, pourquoi est-ce que le reste de la troupe Farc qui l'accompagnait est retournée tranquillement dans la forêt sans rien dire et sans enterrer le cadavre, laissant de son côté le tueur partir à pied vers l'armée colombienne avec la main d'Ivan Rios dans une glacière, et cela deux jours après la mort. Y avait-il en réalité des instructions internes des Farc pour l'exécution d'Ivan Rios ? Cela dit, ils continuent à émettre des communiqués radotant sur leur revendications, c'est donc que tout ne doit pas aller si mal.

Et maintenant, l'actualité. On a appris que les Farc avaient demandé une messe pour le rétablissement d'Ingrid Bétancourt dans un village (voilà une guérilla marxiste qu'elle est bien), que l'escorte d'Ingrid Bétancourt quand elle s'est faite soigner est une troupe de 200 à 300 hommes, que les représenants d'environ 1.000 guérilléros emprisonnés par le gouvernement faisaient circuler une pétition pour manifester leur refus d'être libérés, que l'économie colombienne va très très bien (croissance du PIB supérieure à 7,5 %), ce qui est une croissance supérieure à celle du Brésil.

Et maintenant, l'article du jour choisi dans El Pais de Cali, des spécialistes colombiens de la Colombie qui se font un petit bistrot du commerce sur les chances qu'a la guérilla d'accepter la nouvelle proposition d'Uribe :

http://www.elpais.com.co/paisonline/notas/Marzo292008/nac03a.html

la rédaction :

Les Farc n'accepteront pas la proposition du gouvernement de suspendre la peine de guérilléros actuellement détenus dans les prisons du pays en échange le la libération d'otages, et en particulier celle d'Ingrid Bétancourt.

Trois des quatre analystes consultés par El Pais s'accordent sur cela, expliquant que la guérilla a plus de désavantages que de bénéfices à accepter la nouvelle proposition du gouvernement.

Diego Arias, expert en analyse politique, assure que les Farc, en tant que structure très hiérarchisée, ne pourraient pas arriver à un accord commun sur le sujet :

" Les structures de la guérilla sont très touchées, particulièrement dans leurs communications. Il est très compliqué pour le direction de se réunir au complet pour discuter de la question. Je pense que pour eux il est plus simple de revenir au discours sur la démilitarisation de Florida et Pradera que d'accepter cette proposition."

" En ce moment, ils ne savent pas lesquels de leurs membres sont disposés à retourner dans la forêt. Ils doivent analyser avec attention lesquels pourraient être libérés pour qu'au final le tir ne sorte pas par la culasse (NdT : ne leur salisse pas la croupe ?).Cela demande du temps de réflexion, et, à ce qu'il semble, ils n'ont pas beaucoup de temps pour cela en ce moment.", ajoute Arias.

D'un autre côté, pour Alejo Vargas, la proposition du gouvernement n'aura aucun effet sur le groupe insurgé.

" Je suis certain qu'ils ne répondront rien, parce que les Farc ont un objectif très clair : s'asseoir pour négocier avec la partie adverse. Leur principal intérêt n'est pas d'arriver à la libération de leurs collègues."

L'expert affirme que la guérilla cherche une reconnaissance politique sur la scène nationale et internationale.

" Les Farc ont une constante qui est la zone démilitarisée. Historiquement cette organisation a été plutôt ferme sur ses positions et je ne crois pas que cette fois fera exception.", ajoute Vargas.

Cette opinion est partagée par Juan Manuel Charry qui affirme en outre que la seule manière que le Gouvernement national a d'aplanir le chemin vers le dialogue est de prendre en considération la possibilité d'accorder le statut de belligérants aux Farc.

Ce qui importe, c'est qu'il n'y ait pas de mise à l'écart, la guérilla cherche a obtenir des interlocuteurs pour ensuite obtenir le statut de belligérants", affirme t'il.

Cependant, pour Alfredo Rangel le panorama n'est pas si complexe et il considère possible que les Farc acceptent, bien qu'il dise que peut-être approuveront-ils le principe pour insister sur la zone démilitarisée.

Citations

# " Les Farc répondent habituellement par des lieux communs quand il y a une proposition sérieuse du gouvernement national. C'est sans doute ce qui va se passer à nouveau." Diego Arias, analyste politique.

# " Ne cherchons pas plus d'intermédiaires, ne cherchons pas plus de processus complexes. Que les Farc donnent les coordonnées au Président Cahvez pour qu'il envoie chercher Ingrid". Ernesto Samper, ex président.

# " Ils (les Farc) peuvent accepter cette proposition. Par l'intermédiaire du Président Chavez, ils peuvent envoyer les coordonnées et faire un processus similaire à celui qui a été fait avec moi." Clara Rojas, avocate libérée.

La donnée

Dans sa proposition, le Gouvernement n'a pas pris en compte la mise en œuvre de ladite zone de rencontre, demandée autour de Florida et Pradera.

Le retrait

Après le retrait malheureux du Caguan durant le gouvernement d'Andrés Pastrana, l'Etat a refusé d'accorder de nouveaux territoires à la guérilla.

Cependant, ce groupe armé illégal affirme qu'une démilitarisation de 800 kilomètres carrés autour de Pradera et Florida, dans le Valle de Cauca, est indispensable.

L'intention des Farc est qu'une fois ces territoires dégagés, à cet endroit pourrait se négocier l'échange de 500 guérilléros prisonniers pour au moins 39 otages qui sont dans leurs mains.

40. Le samedi 29 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

(Tu n'as jamais vu le début de Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil de Jean Yanne ? Quand on voit un journaliste sirotant des cocktails sur une plage des caraïbes et envoyant un communiqué audio en direct à Radio France dans lequel il se présente comme étant au milieu de la guérilla, avec des enregistrements de fusillades sur un magnétophone en bruit de fond...)

Non, je n'ai jamais vu, mais grâce à ton aide bienveillante, je peux à présent m'en dispenser. :)


les Farc portent des uniformes de l'armée équatorienne parce que c'est plus compliqué de faire venir les uniformes originaux depuis la Colombie, l'armée équatorienne offre son aide logistique pour le transport de la drogue.

Ah oui quand même. Effectivement, ça peut piailler après sur le viol de la souveraineté... :)


Il n'empêche que les Farc pourraient bien être entrés dans les processus de transition que tu évoques : il y a faiblesse de l'exécutif car il règne une certaine incertitude sur l'identité du chef, est-ce Marulanda ? était-ce Reyes ? qui serait le successeur ? Les circonstances de la mort d'Ivan Rios,


Effectivement, ça fait un peu de ménage ces temps-ci. Si peu que leur chef aille de mal en pis et que leur otage-vitrine leur claque entre les doigts (ou doive être envoyée d'urgence dans un hôpital décent, ce qui revient sensiblement à la même chose), ça pourrait hâter, sinon leur fin, la baisse de leur pouvoir de nuisance.


Et maintenant, l'actualité. On a appris que les Farc avaient demandé une messe pour le rétablissement d'Ingrid Bétancourt dans un village (voilà une guérilla marxiste qu'elle est bien),

Ma parole, c'est Don Camillo en U.R.S.S ! +-<]:o)

Effectivement, pour leur image, l'intercession du Tout-Puissant ne serait pas de trop.

Leur traduction du Capital est peut-être mauvaise, et il pensent que les prières exhalent des narcotiques.

[Si c'est le cas, ils devraient créer des monastères dans la forêt, plutôt que de s'occuper de la coca.]


que les représenants d'environ 1.000 guérilléros emprisonnés par le gouvernement faisaient circuler une pétition pour manifester leur refus d'être libérés, que l'économie colombienne va très très bien (croissance du PIB supérieure à 7,5 %), ce qui est une croissance supérieure à celle du Brésil.

Comme quoi, si on regarde de l'autre bout de la lorgnette, ça ne va pas si mal - pour les vivants.


Cali :
Ils doivent analyser avec attention lesquels pourraient être libérés pour qu'au final le tir ne sorte pas par la culasse (NdT : ne leur salisse pas la croupe ?).

L'image me paraît assez claire. C'est une affaire de boomerang en un peu plus grave. Pour qu'au final le machin ne leur saute pas à la figure, quoi.

...

[Après lecture de l'original : mort de rire. Oui, vu comme ça !]



Merci encore pour ces patients points sur la situation. On en est toujours à cette éternelle question d'impossible démilitarisation sur un état souverain, et de surcroît avec les résultats inévitables que l'on sait.

41. Le dimanche 30 mars 2008 à , par Morloch

Tu vois que quand tu veux, tu peux aussi te référer à du cinéma haut de gamme :)

Je n'ai pas trouvé d'éditorial passionnant aujourd'hui. On a appris par la presse française qu'un Falcon médicalisé a atterri "discrètement" (sic) en Guyane pour transporter Ingrid lors de sa libération... Il semble que la France verserait 100 millions de dollars au guérilléro qui déserterait avec Ingrid sous le bras. On n'a pas vu Hugo Chavez éructer et gesticuler, ce qui n'est pas forcément bon signe dans cette histoire.

Un article au ton doux-amer de El Tiempo, sur un des villages dans lesquels a été aperçue Ingrid Betancourt. Il donne un aperçu des préoccupations des habitants dans ces régions très rurales. Il est question de la visite samedi 29 mars d'Alvaro Uribe dans la région, le Defensor del Pueblo est un médiateur entre l'Etat et la population.

Por haber visto a Ingrid Betancourt en centro de salud, campesino tuvo que huir de El Capricho

El Tiempo :
Pour avoir vu Ingrid Betancourt dans un centre de soins, un paysan a dû fuir de El Capricho

El Tiempo a recuilli le témoignage de celui qui l’a aidé à fuir du hameau du Guaviare. Il a décrit le corps de l’ex-candidate perdu dans un imperméable vert qui la couvrait complètement.

Elle était trop maigre et jaune, mais après l'avoir vue tant de fois à la télévision, il était impossible de ne pas la reconnaître.

C’est Íngrid, s’est dit en lui même le témoin involontaire tandis qu'il gardait le silence de rigueur, celui appris au sein des populations du Guaviare depuis que la guerre a commencé à leur amener des combattants blessés, de modestes paysans aussi bien que des chefs guérilleros.

Comme il l’a confié ensuite à son ami de San José du Guaviare, il a failli ne pas pouvoir contenir son angoisse quand il l'a vue marcher par le couloir étroit du poste de santé vers une des trois chambres du lieu, au milieu de deux membres des Farc qui la soutenaient pour qu'elle ne s’effondre pas.
Il lui a raconté qu’Íngrid ne parlait presque pas. Elle obtempérait « presque sans un souffle » à ce que le personnel médical lui demandait. Elle acquiesçait de la tête quand ils lui demandaient si la partie de l'estomac qu'ils touchaient était douloureuse.

Elle serait restée deux heures allongée dans une couchette, dans laquelle ils lui auraient administré du sérum et diverses injections, pendant que trois guérilléros restaient à l’extérieur du poste de santé et deux autres devant la porte.
Le grand nombre de combattants dont rendent compte d'autres témoignages n'a pas été vu dans le hameau. Les guérilléros sont restés aux alentours.

Le témoin en fuite a dit qu'ils ont demandé aux insurgés d’autoriser un transport immédiat de la patiente à l'hôpital de San José du Guaviare, mais ceux-ci ont refusé.

Ils ont insisté sur le fait que la seule chose dont ils avaient besoin était qu'elle soit stabilisée pour la porter à un lieu où ils s'occupaient des malades. Le diagnostic, selon ceux qui ont eu accès à la patiente, a été « pronostic réservé ».
Íngrid, d’après la description qui en a été faite, aurait, outre une hépatite B, une leishmaniasis et du paludisme.

Avec elle à peine réhydratée, ce 21 février, les insurgés ont pris de nouveau le chemin qui mène vers le fond de la jungle. Et c’est alors qu’a commencée la tension. A La Carpa, un autre hameau de San José du Guaviare, se sont propagés des bruits selon lesquels elle avait été vue en mauvais état.

L'angoisse présente dans El Capricho et d'autres villages a augmenté quand l'Armée est arrivée pour leur demander à tous ce que certains avaient seulement aperçu.

El Capricho est aujourd'hui militarisé, et géré par le Réseau de Services de Santé de l'État de San José du Guaviare. Il y a une plainte pour " infraction à la mission médicale" ; déposée par des " militaires armés " " et un questionnement constant du personnel auxiliaire ". En date du 17 mars, le médecin a démissionné et l'infirmière et le conducteur ont fait une demande de transfert.
Cela faisait un moment que le Guaviare se sentait sur des charbons ardents quand le Defensor del Pueblo, Vólmar Pérez, a déclaré à tout le pays que d’après divers témoignages contrastés, il pouvait dire qu’Ingrid était « dans des conditions difficiles ».

L’incertitude suivit, car alors qu’on s’attendait à ce que le Président Uribe annonce de nouveaux éléments au conseil communal de San José del Guaviare, il n’a pas abordé le sujet.

Un village qui vit avec la peur

Tous les paysans craignent des représailles des Farc. Ils demandent qu'on déclare qu'ils n'ont pas été des témoins. Un de ceux qui a bien vu l’ex-candidate et s’est enfui a donné des détails du jour où elle est arrivée " entourée d’un imperméable vert".
Une question a commencé à se propager dans les maisons voisines de l'hôpital de San José du Guaviare alors que les premières lueurs du Samedi Saint pointaient à peine : pourquoi tant de policiers à cette heure parmi les patients ?

Le premier levé qui a pu se glisser à travers l’agitation a compris alors que les agents cherchaient, chambre par chambre, Ingrid Betancourt. Sans la trouver.

C'était le premier sursaut de la capitale du Guaviare autour du cas de l'ex candidate présidentielle, mais seulement la réplique d’un séisme qui secouait depuis plusieurs jours les paysans d’El Capricho, un hameau qui recevra le 5 avril l’appellation de bureau militaire auxiliaire.
Ainsi une personne qui avait vu Íngrid et avait fait parvenir en ville l’histoire qu’elle paraissait être une âme en peine a fait pressentir aux hommes et aux femmes de ce petit peuplement que désormais planait au dessus d’eux " la menace des gens de la montagne (les Farc) " car il les a fait apparaître comme les divulgateurs d'une histoire qu'ils ne connaissaient pas.

“ Vous n’imaginez pas ce que nous ressentons quand nous entendons le Père Manuel Mancera dire à la radio que les paysans d’El Capricho ont vu Ingrid. Mon Dieu ! comment peut-on dire cela quand seulement une personne l’a vue ! » déclare depuis San José del Guaviare un homme qui est arrivée dans la soirée de vendredi avec l’espoir de participer samedi au conseil communal du Président Alvaro Uribe.

La peur d’un déplacement massif et la perte de ce qui avait était gagné dans une immense lutte de huit années pour faire pousser des espèces variées dans une terre où auparavant ils avaient fait prospérer des plants de coca, a provoqué une réunion d'urgence à 6 heures de l'après-midi de ce jour dans le hameau.

Ils ont écrit leurs soucis dans une lettre qu'ils désirent faire lire au père Mancera, au président Uribe, au Gouverneur et au maire de San José du Guaviare. Ils n'excluent pas que l'ex candidate présidentielle soit passée par ce lieu, mais s’il est vrai que quelqu'un l'a vue, on ne doit pas se référer en masse aux paysans d’El Capricho.

Ici, comme dans d'autres lieux du Guaviare où la guerre est active, voir et entendre n’est pas toujours une bénédiction mais plutôt une malédiction.

Les rares personnes qui ont vu Íngrid dans El Capricho auraient voulu être aveugles et sourdes, parce qu’à cause de la menaces le Farc et des questions insistantes de l'Armée, ils ont du prendre à marche forcée le sentier d’une heure et demie qui mène à San José, le chemin de l'exil.

42. Le dimanche 30 mars 2008 à , par Morloch

Arf, j'ai fait une grosse erreur de traduction. Et pas de :alien: en vue...

Nouvelle traduction du paragraphe sur la plainte :

El Capricho est aujourd'hui militarisé, et géré par le Réseau de Services de Santé de l'État de San José du Guaviare. Une plainte a été déposée pour " infraction à la mission médicale" ; intrusion de " militaires armés " " et un questionnement constant du personnel auxiliaire ". En date du 17 mars, le médecin a démissionné et l'infirmière et le conducteur ont fait une demande de transfert.

43. Le dimanche 30 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Tu vois que quand tu veux, tu peux aussi te référer à du cinéma haut de gamme :)

Du noir et blanc, bien filmé, bien phrasé, et avec pour générique le solo de cor de l'entrée de Jochanaan dans Salome, comment veux-tu que j'y résiste ? :)


On n'a pas vu Hugo Chavez éructer et gesticuler, ce qui n'est pas forcément bon signe dans cette histoire.

Les propositions très généreuses d'Uribe font penser au mari (colombien) d'I. Bettancourt que tout est consommé...

Aujourd'hui, je lisais Luis Eladio Pérez (ancien député capturé alors qu'on lui promettait la remise de sa fourgonnette, comme quoi être un peu nigaud n'est pas une caractéristique si dérisoire) raconter sa tentative d'évasion avec Ingrid Bettancourt, trois hameçons en poche. Un témoignage un peu plus précis que de coutume du point de vue des otages.

Lui aussi charge Uribe. Dis, Stockholm, c'est un moustique de la forêt équatoriale ?

Sinon, à propos de cet article, en effet, on voit la limite de la hauteur de vue de la guérilla, qui en l'occurrence va à court terme perdre sa seule carte maîtresse. Mieux vaudrait qu'elle ne leur claque pas dans les doigts et qu'ils négocient vite, sans quoi en plus de l'indifférence qui leur retombera inévitablement dessus sans Bettancourt, ils auront l'hostilité foncière de pays aujourd'hui conciliants (comme la France...).

L'histoire qui termine l'article, celle des gens ordinaires, a le mérite de bien remettre les choses en perspective : on sacrifie beaucoup d'anonymes pour une seule vie, alors que la moindre concession favorise ce système de terreur. Effectivement, clamer ce genre de généralisation journalistique est irresponsable pour les pauvres gens qui risquent se faire égorger en représailles et en 'exemple'.


En tout cas, ça s'active beaucoup, les diverses propositions contradictoires fusent. Qu'il soit trop tard ou pas, il semble que ça presse sérieusement et que chacun souhaite se trouver une posture confortable pour entamer la suite.

Merci encore pour tes informations quotidiennes... !

44. Le lundi 31 mars 2008 à , par Morloch


Oui, j’ai lu également cette interview au Clarin argentin, enfin je pense qu’il s’agit de cette interview de Luis Eladio Pérez dont tu parles – le personnage est énigmatique ; à peine libéré il parcourt les plateaux télévisés, les radios et la presse écrite du monde entier pour se répandre en toutes sortes de propos sur ce qu’il faut faire et ne pas faire en Colombie. A l’entendre, il connaît tous les chiffres, toutes les stratégies, toutes les évolutions, tous les objectifs et toutes les pensées de chacun, il a tout compris et il a une solution à tout. Cette somme est semble t’il le fruit de sa réflexion pendant ces années passées à crapahuter dans la jungle. Assez curieux, de son propre aveu il n’a pourtant rencontré qu’une fois pendant quelques minutes un membre du Secretariado, « Mono Jojoy », qui lui a offert un gâteau et refusé de parler politique. Le jour où Luis Eladio Pérez a rencontré Nicolas Sarkozy pendant 45 minutes à l’Elysée, il semble y avoir eu une altercation (rapportée par Le Monde) entre fonctionnaires du Quai d’Orsay et de l’Elysée au sujet la politique de la France vis-à-vis de la Colombie. L’Elysée n’a fait aucun compte-rendu de l’entretien avec Perez et la famille Betancourt a annulé à la dernière minute une conférence de presse prévue avec l’ex-otage le même jour. Cela dit, pour en revenir aux otages, tous ne sont pas aussi diserts, la plupart cherchent la discrétion et quand ils parlent ne sont pas amènes avec les Farc.

En ce qui concerne la stratégie pour libérer les otages et les dommages que feraient aux Farc la mort d’otages médiatisés, je voudrais faire une remarque. Les médias français, en partie sous l’impulsion de la famille Betancourt, se basent toujours sur le postulat suivant : les Farc se soucient de leur image, et a fortiori de leur image à l’étranger.

Je me permets de le questionner, d’autant plus que les lutins le reprennent en chœur.

Les Farc sont à la base une milice paramilitaire paysanne d’autodéfense, qui a adopté une doctrine marxiste dans les années 1960, dopée un temps par le castrisme avant de quasiment disparaître dans les années 1970, puis de faire un retour inattendu dans les années 1980, financée par l’explosion du commerce de la drogue. Son apogée a été atteinte au milieu des années 1990, quand elle attaquait l’armée à l’artillerie lourde et tenait des centaines de villes. En revanche, la communication n’a jamais été leur truc, c’est une armée très repliée sur elle-même, avec un recrutement en grande partie forcé dans des populations rurales. Leur image à l’étranger se construit sans qu’ils aient à y participer, il y aura toujours des ONG romantiques danoises et des journalistes français pour leur accorder le crédit de révolutionnaires, quel que soit le sort d’Ingrid Betancourt. L’épisode du Farcland entre 1998 et 2002 a achevé de les décrédibiliser en Colombie, il y a déjà eu par ailleurs des vagues d’émotion nationale autour des otages, l’épisode le plus marquant ayant probablement été celui du petit Andres Felipe Perez, un enfant de 12 ans mourant d’un cancer qui avait demandé à revoir son père militaire otage des Farc avant de mourir. Cette histoire avait soulevé une vague de solidarité sans précédent dans les médias colombiens, sans succès. L’erreur est peut-être d’appliquer encore aujourd’hui aux Farc des critères de communication politique auxquels ils sont totalement étrangers. En fait de politique internationale, l’aide matérielle du Venezuela et de l’Equateur leur suffit largement. De plus, leurs doctrines politiques, ou ce qu’il en reste, ainsi que leur recrutement les prédispose à un énorme ressentiment social. On oublie beaucoup, dans les médias, de rappeler qu’Ingrid Betancourt est la fille d’un ministre de la junte militaire qui a été au pouvoir en Colombie dans les années 1950, et qu’elle appartient à l’une des familles les plus riches du pays. Je serais surpris que les Farc l’aient oublié de leur côté, et encore plus qu’ils soient attendris par l’engagement politique, aussi sincère soit-il, de leur otage. Je soupçonne aussi, mais c’est pure médisance, qu’ils ont beaucoup ri s’ils ont entendu la version en espagnol de la chanson de Renaud (je dis cela, cela peut paraître déplacé, mais il existe des témoignages réels selon lesquels leur couverture médiatique leur procurerait une grande hilarité. Ils sont des stars chez les franchutes, si cela ce n’est pas une consécration).

En conclusion, je veux bien que l’on prenne comme postulat que les Farc sont sensibles à l’image qu’ils renvoient, mais je pense qu’il s’agit d’un de ces postulats qui nécessitent une démonstration.

45. Le lundi 31 mars 2008 à , par Morloch

Et puis, pfff, on continue de s’éloigner du poverino Poutine, et même du tendre Uribe qui était le prétexte de mon intervention sur ce fil. Le texte du jour sera donc un éditorial de Semana datant d’un an environ, au sujet d’Alvaro Uribe et son hécatombe.

Alvaro Uribe Velez a été élu en février 2002 à la présidence de la Colombie sous la très belle et moderne constitution de 1991, qui prévoyait qu’un Président ne pouvait exercer qu’un seul mandat. Devant un premier mandat miraculeux et les attentes des colombiens, le Parlement a modifié la constitution en 2004 pour permettre sa réélection. En 2006, Uribe a donc été réélu triomphalement, et il n’est jamais descendu sous la barre des 70 % d’opinions favorables selon les sondages, aujourd’hui il serait au dessus des 84 %. En 2010, il y aura de nouvelles élections, Uribe a annoncé qu’il ne serait pas candidat, sauf… sauf…

Uribe et l’hécatombe

Semana :

‘Réélection ou hécatombe, le nouveau dilemme d’Uribe
Habitué à faire passer ses idées par des messages codés, le président Álvaro Uribe a dit au pays qu'il n'écartait pas sa candidature à un troisième mandat. A quoi pense t’il ?
Par Élber Gutiérrez Roa
Date : 11/01/2007 –

L'hécatombe est une tragédie qui précède généralement à l'apparition des superhéros dans les bandes dessinées et les romans. Définie par l'Académie royale de la Langue comme "malheur, catastrophe ou grande mortalité de personnes" il est généralement associé au sacrifice de cent boeufs par les athéniens à certains de leurs dieux, spécialement à Apollon.

Mais dans la politique colombienne, il paraît avoir une nouvelle acception qui, bien que peu claire pour l'instant, est attachée à la possibilité d'un troisième mandat du président Álvaro Uribe. Comme il a dit lundi aux membres de son groupe parlementaire, le Président pourrait se relancer si se produisait ladite « hécatombe », mais il n'a pas clarifié si celle-ci est un séisme, une croissance inhabituelle de la violence, ou un triomphe du Pôle Démocratique dans les urnes, sujet qui semble lui être apparu bien grave ces derniers jours.

Bien que certains des collaborateurs au rendez-vous aient interprété ces paroles comme un non à une nouvelle candidature, d'autres se sont rendus compte que, pour la première fois, le Chef d'État envisage un scénario dans lequel il partirait de nouveau en campagne. Le sénateur Gustavo Petro, du Pôle Démocratique, a dit que la véritable hécatombe serait que Uribe obtienne un troisième mandat et quelques fonctionnaires du gouvernement ont indiqué à faible voix qu'il ne paraît pas opportun de chercher une nouvelle réélection alors que commence juste sa seconde période de gouvernement.

Quelque peu confuse et fataliste, la formule posée par Uribe a eu un certain impact médiatique au moment où les troupes politiques du Président ont besoin de se remettre des mauvais résultats obtenus lors des élections de dimanche. C'est une carte que tous les autres concurrents savaient en sa possession, mais qu’il préférait garder pour quand le jeu serait plus avancé, ce qui ne signifie pas qu'il ne puisse pas annoncer qu’il peut la jouer plus tard. Ni qu’il s'abstient de préparer le terrain pour quand il décidera de le faire.

Nécessaire ou non, approuvée ou non, la seule mention de l'idée a permis à Uribe d’être à nouveau le centre du débat politique malgré l’euphorie du Pôle et du Parti Libéral suite aux résultats électoraux de dimanche passé. Comme quand l'ex conseiller présidentiel Fabio Echeverri a évoqué l'idée de la réforme du « petit article » ou quand Fabio Valence a repris l'idée de passer au parlementarisme, le président a remis sur le tapis le dilemme de ce que serait le pays avec lui et sans lui. Et, vu ses attaques récentes contre le Pôle Démocratique, l'affaire n’est rien de plus que la prolongation de la compétition du gouvernement contre le Pôle, posée par Uribe pendant la dernière campagne électorale, de laquelle il est sorti perdant.

Le sujet de la seconde réélection est dans l’air depuis plusieurs mois et le chef du Parti U, Luis Guillermo Giraldo, a proposé récemment, alors qu’Uribe avait à peine terminé une première année de son second mandat, que se tienne un en referendum pour que le pays tranche la question. Le chef de l’Etat, entre-temps, ne sortait pas de son éternel "Lina (son épouse) me l’a accordé pour quatre ans et puis pour quatre ans de plus".

C’est une autre démonstration de son intelligence supérieure, dirait le conseiller présidentiel José Obdulio Gaviria, qui ce jeudi a sorti aux médias qu’ "il n’y aura pas d’hécatombe" parce que tout va très bien.

Quel est le but poursuivi par le Président ?

Quelques analystes pensent que le seul but de mettre en première ligne cette discussion au sujet d’un autre mandat est de garantir l'unité de ses troupes en prévision des prochaines élections, dans lesquelles il ne serait pas le candidat. Ou bien il postule ou bien il adoube son successeur. Mais pour le faire il doit aussi maintenir en vigueur la confrontation avec le Pôle Démocratique, qu’il considère comme son adversaire politique. Il s'ensuit que dans le même temps il se trouvera impliqué, en époque électorale, contre ce parti et contre certains de ses candidats, comme Samuel Brun, le maire élu de Bogota.
Outre le fait que l'idée n'est pas appréciée par l'opposition, il y a aussi des chefs de l'Uribisme qui rongent leur frein et que le renforcement de cette idée déplait. Le Parti Conservatismo, pour justifier peut-être de son existence en dépit de la dure absence de poids lourd prêt pour l’élection de 2010, a déjà dit qu'il n'a pas pris de décision sur le sujet. Cambio Radical a choisi son leader, Germán Vargas Lleras, pour la campagne à la Première Magistrature, et dans le Parti de l’U il y a plusieurs candidats, bien qu'ils aient encore un poids réduit électoralement parlant.
En plus de rappeler les histoires des superhéros et des tragédies, le dilemme posé par Uribe ressemble aussi dans la forme à celui exposé il y a plus de 120 ans par le conservateur Rafaël Núñez qui a entrepris d’être réélu avec comme devise « régénération ou catastrophe ». À Núñez, comme à Uribe, il paraissait que le mandat présidentiel était trop court pour consolider ses réalisations. Il a été finalement élu en 1880, 1882, 1886 et 1892.
Et en associant la destinée du pays à la présence d'un chef de l’Etat, l'idée rejoint la vague d'efforts reéleccionistes que vit le continent. Depuis l'annonce nicaraguayenne récente d’y arriver au moyen du passage au parlementarisme, jusqu’au referendum que le Vénézuéla tiendra dans un mois pour décider s'il approuve ou non la réélection indéfinie du président Hugo Chavez.
Même si Uribe a dit à la presidente du Congrès, Nancy Patricia Gutiérrez, que la seconde réélection « n'était pas possible parce qu'elle pourrait se présenter comme une tentative pour se perpétuer dans la charge », présenter celle-ci comme une nécessité pour le pays s'avère plus facile à vendre à l'intérieur et hors du pays. Selon les termes des congressistes du Pôle Démocratique cette nouvelle stratégie présidentielle n'est pas autre chose que la confirmation de l'esprit « messianique » d'Uribe. « Ainsi que Batman et Superman apparaissent chaque fois qu’il y a une hécatombe à Gotham City et Métropolis, Uribe se met en scène comme le super héros sans lequel la Colombie n'a pas sens », a dit un congressiste du Pôle.
La manière avec laquelle l’exprime le législateur semble exagérée, mais Uribe a démontré sa préoccupation constante pour l’importance qu’il occupera dans l'histoire de la Colombie. Le conseiller Gaviria a dit que « il a déjà une postérité assurée, à côté de personnages comme Rafaël Uribe Uribe ». En supposant que cette affirmation est vraie, obtiendra aussi la même nombre de victoires que Núñez ?


46. Le lundi 31 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

A l’entendre, il connaît tous les chiffres, toutes les stratégies, toutes les évolutions, tous les objectifs et toutes les pensées de chacun, il a tout compris et il a une solution à tout. Cette somme est semble t’il le fruit de sa réflexion pendant ces années passées à crapahuter dans la jungle. Assez curieux, de son propre aveu il n’a pourtant rencontré qu’une fois pendant quelques minutes un membre du Secretariado, « Mono Jojoy », qui lui a offert un gâteau et refusé de parler politique.

Oui, j'ai trouvé ça singulier aussi, mais tu négliges un point important : c'est un député... C'est gens-là sont dangereux. Il paraît qu'il en existe (au moins) 577 en liberté en France.

Caractéristiques : il savent tout sur tout sans rien avoir vu, ils dépérissent quand on éteint la lumière.


En ce qui concerne la stratégie pour libérer les otages et les dommages que feraient aux Farc la mort d’otages médiatisés, je voudrais faire une remarque. Les médias français, en partie sous l’impulsion de la famille Betancourt, se basent toujours sur le postulat suivant : les Farc se soucient de leur image, et a fortiori de leur image à l’étranger.

Je me permets de le questionner, d’autant plus que les lutins le reprennent en chœur.

Je n'ai jamais postulé qu'ils étaient sensibles à leur image. Personne n'y est pleinement indifférent, mais je parle en termes stratégiques. Si Ingrid Bettancourt finit d'agoniser chez eux, plus personne ne s'intéressera à leur cause à l'étranger au loin et ils n'auront plus la moindre chance d'être reconnus comme belligérants par des Etats un peu influents.
Ce n'est pas une question d'image à proprement parler, tout simplement de présence et de levier de pression.

Je ne crois pas non plus, en effet, que la reconnaissance et l'estime internationales soit un moteur puissant pour eux.

47. Le lundi 31 mars 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Merci pour l'article du jour !

Jolie évocation de souvenirs classiques un peu déformés en effet.

C'est bien, comme ça on pourra taper sur Uribe en le comparant à Poutine et rentrer dans le sujet de départ grâce aux médias français...

« L'homme fort du Liévano », voilà qui sonne à merveille, non ?


Ah mince, une fois Bettancourt libérée ou éteinte, on n'en parlera plus, c'est vrai. :-)

48. Le mardi 1 avril 2008 à , par Morloch

Bon, ça n'évolue pas des masses, il y a des nouvelles d'Ingrid Betancourt, elle était vivante la semaine dernière mais les nouvelles ne sont pas pour autant meilleures.

L'article du jour sera un petit dessin parce que c'est plus rapide à traduire (voilà !) et ça représente l'homme fort du Liévano :

" Palais présidentiel :
- En plus, nous ne négocions qu'avec les terroristes amis.
- Oui, bien parlé, chef adoré."
(Pannneau : recherche hécatombe, informations ici, demander Alvaro".

Et un lien vers un article d'un blog trouvé par hasard, tenu par un français expatrié en Colombie qui semble sceptique sur les négociateurs annoncés par l'Elysée :

[urlhttp://www.ikiru.ch/tonio/les-contacts-francais-en-colombie[/url]

49. Le mardi 1 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Bonjour Morloch !

Bon, ça n'évolue pas des masses, il y a des nouvelles d'Ingrid Betancourt, elle était vivante la semaine dernière mais les nouvelles ne sont pas pour autant meilleures.

En effet, c'était la deuxième information développée dans le journal de sept heures sur France Culture, ce matin. Les informations fusent, contradictoires ou identiques mais à des endroits et des dates sensiblement distincts...
Cela dit, tout le monde s'accorde à dire qu'elle semble déprimée et refuser de se nourrir, et bien sûr mal en point côté soins.


L'article du jour sera un petit dessin parce que c'est plus rapide à traduire (voilà !) et ça représente l'homme fort du Liévano :

C'est pas tendre, dis-moi, l'allusion à l'hécatombe. Ce n'est pas El Tiempo, je présume, puisqu'il est là en étendard officiel ? Et puis ce serait un peu osé, pour un journal engagé de l'autre côté...


Et un lien vers un article d'un blog trouvé par hasard, tenu par un français expatrié en Colombie qui semble sceptique sur les négociateurs annoncés par l'Elysée :

Enfin, supposés, puisque pas annoncés, manifestement.

Le même site propose un avis critique sur la presse colombienne, manifestement.

50. Le mardi 1 avril 2008 à , par Morloch

Le dessin est d'un certain Vladdo dans Semana. Je connais mal cette presse mais je trouve les avis de notre expatrié un peu dur, je suis étonné de la relative liberté de ton des éditorialistes, même dans El Tiempo. Note bien que je suis peut-être mauvais juge de ce genre de choses, je me souviens d'une époque où j'avais longuement et désespérément tenté de voir une différence éditoriale entre les journaux télévisés de TF1 et France 2 sans parvenir à le faire. Depuis, dépité, j'ai abandonné le visionnage de ce genre de choses, mais j'aimerais quand même que quelqu'un me dise un jour quelle était la bonne réponse...

D'ailleurs, je ne trouve pas que nos journaux fassent de bien amples développements sur l'actualité tchadienne, auquel je ne comprends strictement, mais alors strictement, rien sauf que notre beau pays est impliqué, sans que je sache comment et pourquoi. Après on peut toujours ricaner d'El Tiempo...

J'espère qu'Ingrid Betancourt va s'en sortir, il y a quelque chose d'horriblement malsain dans cette mise à mort. Au passage, si pour une raison x ou y je devais être pris en otage quelque part dans le monde ou en France, je fais par la présente une demande solennelle et irrévocable que sous aucun prétexte, de près ou de loin, Monsieur Fabrice Delloye n'ait accès à mon dossier ou soit chargé de quelque tâche que ce soit dans mon éventuelle campagne de libération. En réalité, je ne me fais pas trop d'inquiétude, je dois faire partie des citoyens français de catégorie 2, comme Marc Beltra ou Aïda Duvaltier, mais quand même, on ne sait jamais.

Une petite note d'espoir dans le dossier Bétancourt, Alvaro Uribe semble s'impliquer dans le processus de libération. Je me dis que ce sont les 71 % d'opinions positives d'Ingrid Betancourt qui lui ont fait changer d'avis, il se verrait bien libérateur histoire de voir si sa cote de popularité peut dépasser les 100 %. A mon avis, la moitié des conseilles du Palais du Liévano doivent plancher sur sa libération, pendant que les 50 % restants étudient le concept de maximalisation du bras d'honneur à la diplomatie française.

51. Le mardi 1 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Le dessin est d'un certain Vladdo dans Semana.

Très bien, j'ai bon alors. :)

Je connais mal cette presse mais je trouve les avis de notre expatrié un peu dur, je suis étonné de la relative liberté de ton des éditorialistes, même dans El Tiempo.

Oui, moi aussi, je les trouve assez libres, mais manifestement ils ne le sont pas sur tous les sujets - qui ne doivent pas être ceux que nous lisons...


Note bien que je suis peut-être mauvais juge de ce genre de choses, je me souviens d'une époque où j'avais longuement et désespérément tenté de voir une différence éditoriale entre les journaux télévisés de TF1 et France 2 sans parvenir à le faire. Depuis, dépité, j'ai abandonné le visionnage de ce genre de choses, mais j'aimerais quand même que quelqu'un me dise un jour quelle était la bonne réponse...

J'ai mis assez longtemps moi aussi. Parce qu'en réalité il y a surtout des préjugés journalistiques et de l'opportunisme audientiel.
Cela dit, si on regarde le traitement des sujets, il y a un poil plus de complaisance chez TF1 - mais franchement, ça reste dans la même cour (pas glorieuse).


D'ailleurs, je ne trouve pas que nos journaux fassent de bien amples développements sur l'actualité tchadienne, auquel je ne comprends strictement, mais alors strictement, rien sauf que notre beau pays est impliqué, sans que je sache comment et pourquoi. Après on peut toujours ricaner d'El Tiempo...

Il y a eu pas mal d'émissions sur France Culture, certaines sont peut-être encore réécoutables sur le site.
Qu'est-ce qui te semble si obscur ? Moi ça me paraît assez simple. Plus que le Kenya par exemple.


J'espère qu'Ingrid Betancourt va s'en sortir, il y a quelque chose d'horriblement malsain dans cette mise à mort.

Toi, tu ouvres le paraplui pour ne pas être dans le camp des méchants cyniques ! Assume ! :)
Non, bien sûr, ce serait horrible, c'est juste la couverture médiatique et les efforts qui sont disproportionnés par rapport aux autres et hiérarchisent de façon assez déplaisante le prix des vies.

Au passage, si pour une raison x ou y je devais être pris en otage quelque part dans le monde ou en France, je fais par la présente une demande solennelle et irrévocable que sous aucun prétexte, de près ou de loin, Monsieur Fabrice Delloye n'ait accès à mon dossier ou soit chargé de quelque tâche que ce soit dans mon éventuelle campagne de libération. En réalité, je ne me fais pas trop d'inquiétude, je dois faire partie des citoyens français de catégorie 2, comme Marc Beltra ou Aïda Duvaltier, mais quand même, on ne sait jamais.

Ca, tu n'en sais rien. Il suffit que la sauce prenne.


Une petite note d'espoir dans le dossier Bétancourt, Alvaro Uribe semble s'impliquer dans le processus de libération. Je me dis que ce sont les 71 % d'opinions positives d'Ingrid Betancourt qui lui ont fait changer d'avis, il se verrait bien libérateur histoire de voir si sa cote de popularité peut dépasser les 100 %. A mon avis, la moitié des conseilles du Palais du Liévano doivent plancher sur sa libération, pendant que les 50 % restants étudient le concept de maximalisation du bras d'honneur à la diplomatie française.

Il y a des tas d'hypothèses. Il fait semblant, il a peur pour sa cote internationale (avec la campagne qui suivrait de la part des comités Bettancourt), il sait que c'est déjà trop tard, etc.

52. Le mercredi 2 avril 2008 à , par Morloch

Hein, que j’ai eu le nez creux de me lancer dans le sujet Uribe, avec une actualité débordante ? alors qu’en Russie, comme chacun peut le voir, il ne se passe rien. Le manque d’à –propos des lutins est confondant.

Ce qui est bien avec la politique étrangère de Nicolas Sarkozy, c’est qu’on a l’impression de lire un vieil album des aventures de Tintin. Après avoir sauvé Chang au Tibet, on va sauver Ingrid en Amazonie, pourvu que l’infâme Rastapopoulos ne vienne pas contrarier les plans. Je peux me tromper, mais, au milieu de tout cela, un peu noyé dans le plan de communication et malgré une évidente volonté de « diversion » de l’actualité française avec scénarisation de l’activité présidentielle, je crois qu’il est sincère. C’en est presque inquiétant. En tout cas, il semble que le courant passe mieux avec Alvaro Uribe avec notre président en première ligne que quand on avait nos étranges diplomates nébuleux seuls au front. Les deux bestioles politiques doivent communiquer dans leur permanent souci d’agitation médiatique et leur volonté de se faire passer pour des hommes d’action et des personnages historiques.

Bon, revenons à nos moutons, avec aujourd’hui un sujet peu abordé jusqu’ici sur ce fil consacré à Poutine : les problèmes posés par les paramilitaires démobilisés et leur réinsertion. Les milices paramilitaires ont en grande majorité déposé les armes (le chiffre serait 85 %, même si on ne sait pas d’où il sort et que de son côté le gouvernement explique doctement qu’il n’existe plus de paramilitaires du tout), quoiqu’il en reste certaines bien actives et que pour certains démobilisés, les contacts avec leurs anciens amis ne semblent pas complètement perdus.

Un article de El Tiempo :

Expertos piden medidas contra la criminalidad organizada en Bogotá

”28 mars 2008” :

Des experts demandent des mesures contre la criminalité organisée à Bogotà

Dans une table ronde sur la question à l’initiative du projet 'Bogotá, comment allons nous ? ' ;, ils ont regretté que le Plan de Développement ne prévoie pas de mesures pour résoudre les carences de la politique de réinsertion.

Ils ont rappelé, par ailleurs, que la sécurité reste un outil pour garantir les droits des citoyens.

Les analystes ont fait ces remarques après que Clara López, secrétaire de Gouvernement du Secteur, ait assuré que la majorité des meurtres à Bogota sont le conséquence de problèmes de vie en commun et que ces facteurs ont plus d’importance quantitative que les bandes organisées.
“Plus de 60 % des homicides sont commis entre personnes qui se connaissent”, a déclaré la fonctionnaire.


Mais pour les analystes ceci n'est pas une raison pour que la proposition de l'actuel gouvernement ne prenne pas compte, par exemple, le fait que certains réinsérés "sont de la main d'oeuvre" ; pour les organisations criminelles qui les contractent pour tuer, extorquer et participer au trafic de stupéfiants, entre autres infractions.
Cette mise en garde a été faite par Fernando Patiño, qui fait une partie d'une commission sous l’égide des Nations Unies qui envisage les défis de la sécurité à Bogota, connu comme le Livre Blanc.

Pour Patiño, il est nécessaire d’incorporer dans le Plan de Développement le sujet des dynamiques associées au conflit armé du pays, parce qu’à Bogota il y a déjà des symptômes montrant que certains réinsérés sont retournés à la délinquance.

Tania Guzmán, conseillère au Programme de Développement Humain pour Bogota des Nations Unies, fait la même analyse. A son avis, il manque une coordination des autorités de district avec les moyens nationaux pour atténuer les effets du conflit armé à Bogotà, et une localisation des niches de la délinquance dans la ville pour les attaquer.

Les analystes ont fait ces critiques bien que Clara Lopez ait indiqué que parmi les sources avec lesquelles s’est élaborée le Plan de Développement, se trouvait le Livre Blanc de Sécurité et qu’une part importante du budget sera consacrée, outre à la prévention, également au contrôle des infractions commise dans la ville.

Carlos Córdoba, directeur du programme “ Bogotà, comment allons-nous ?” a indiqué que dans le Plan de Développement du District, il manque également une méthode de mesure des résultats des mesures proposées, comment on va évaluer le travail de la police et que soient spécifiées les objectifs quant au taux d’homicides de chacune des localités de l’agglomération.

Sur ce sujet, Clara López a signalé que le taux d’homicides le plus préoccupant est celui de la localité de los Mártires qui est de 66 pour 100.000 habitants, pendant que celui de la Candelaria est le plus bas avec 6,8 pour 100.000 habitants.

Jerónimo Castillo, ex-directeur du programme de sécurité de la chambre de commerce de Bogotà, a souligné la part de travail des autorités de district dans la réduction des homicides, mais a précisé qu’ils sont en peine de révéler si ces assassinats avaient fait l’objet d’enquêtes ou si en réalité l’impunité s’était réduite.

L’expert a affirmé que dans les pays développés ce type d’information est communiqué pour démontrer les résultats des plans de sécurité des gouvernements.

Castillo a dit que le contenu le plus intéressant du Plan de Développement sur le sujet de la sécurité est l’opposition qui existe entre la conception du Gouvernement National qui voit la sécurité comme une fin en soi, pendant que le District se propose de donner une valeur instrumentale à la sécurité pour garantir les droits des citoyens.
Avant cette affirmation, Carlos Córdoba a proposé une table ronde pour débattre des ces deux perspectives sur la sécurité et de voir leur intérêts respectifs pour Bogotà.



Par curiosité, j’ai jeté un œil sur quelques statistiques de taux d’homicides pour 100.000 habitants pour avoir une idée d’ordre de grandeur (stats Eurostat 2007) : Amsterdam (4,43), Ankara (4,27), Belfast (3,35), Sofia (3,32), Bruxelles (3,28), Londres (2,64), Berlin (1,92), Zagreb (1,91), Madrid (1,82), Oslo (1,79), , Paris (1,71), (1,36), Bucarest (1,31), Vienne (1,13), Rome (1,12), Athènes (1,01), Luxembourg (0,87), Lisbonne (0,60), La Valette -Malte (0,00), Vaduz - Lichtenstein (0,0), Bordeaux (862,4) – les lutins sont des monstres…

53. Le mercredi 2 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Ce qui est bien avec la politique étrangère de Nicolas Sarkozy, c’est qu’on a l’impression de lire un vieil album des aventures de Tintin. Après avoir sauvé Chang au Tibet, on va sauver Ingrid en Amazonie, pourvu que l’infâme Rastapopoulos ne vienne pas contrarier les plans. Je peux me tromper, mais, au milieu de tout cela, un peu noyé dans le plan de communication et malgré une évidente volonté de « diversion » de l’actualité française avec scénarisation de l’activité présidentielle, je crois qu’il est sincère. C’en est presque inquiétant.

Je pense que c'est sincère, il n'est que de voir sa fascination tout à fait dans l'air du temps pour les victimes - devenues plus honorables que les héros (je ne dis pas les héros militaires, n'est-ce pas, mais bien ceux qui agissent pour un résultat positif). En cela, sondageophagie ou pas, il est assurément un homme de son temps. Après, est-ce la première qualité d'un chef d'Etat, je ne sais pas.
Disons qu'il a au moins pour lui de ne pas être en décalage avec la société, à défaut d'avoir une hauteur de vue incommensurable.


Par curiosité, j’ai jeté un œil sur quelques statistiques de taux d’homicides pour 100.000 habitants pour avoir une idée d’ordre de grandeur (stats Eurostat 2007) : Amsterdam (4,43), Ankara (4,27), Belfast (3,35), Sofia (3,32), Bruxelles (3,28), Londres (2,64), Berlin (1,92), Zagreb (1,91), Madrid (1,82), Oslo (1,79), , Paris (1,71), (1,36), Bucarest (1,31), Vienne (1,13), Rome (1,12), Athènes (1,01), Luxembourg (0,87), Lisbonne (0,60), La Valette -Malte (0,00), Vaduz - Lichtenstein (0,0), Bordeaux (862,4) – les lutins sont des monstres…

Oui, pour 100000 habitants, mais sur quelle durée ? Une journée, je présume ? Amusant de constateur que La Valette, bien que débordant d'immigrés irréguliers, est extrêmement sûre de ce point de vue. (Oui, je vois un mauvais esprit, là, au fond, qui souffle à son voisin qu'à Amsterdam il y en a plein, mais de réguliers, et que donc... Non, non, n'essayez pas. Merci.)

Sinon, je sais bien que les lutins sont des monstres, je subis leurs revendications quotidiennement sur CSS - les pendards.


Merci pour l'article du jour, on sort enfin de la forêt, grâce à Dieu ! L'autre pan de l'insécurité colombienne...

Tu ne vois pas d'inconvénient si je regroupe tes contributions dans un fil tout exprès ?

Ca va me prendre un peu de temps, mais ce serait plus profitable pour les visiteurs qui pourraient profiter de toutes tes infos et traductions...

(Il ne faut pas que je traîne trop non plus, je ne voudrais pas participer, de façon involontairement opportuniste, du buzz ingridien qui s'annonce, quelle que soit sa nature...)


Merci encore !

54. Le mercredi 2 avril 2008 à , par Morloch

Argh ! Mes traductions sont pathétiques. Je ne suis pas familier de l'exercice, et cela se voit. La prochaine fois, je relis attentivement, c'est promis.

Tu crois que cela vaut la peine d'être mis à part ? Si tu veux, mais je ne veux pas être à l'origine de travail inutile.

Je n'en reviens pas non plus des développements et rebondissements de cette histoire ingridienne. Je ne veux surtout pas que CSS soit victime de la chose.

55. Le mercredi 2 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Non, non, il n'y a pas de problème, c'est juste qu'il faut que prenne le temps de remettre en forme (il y a quatre formats de saisie différents sur CSS...).
C'est dommage que ce soit perdu sous ce qui devient une digression poutinienne. :)

Pour le reste, il n'y a pas de risque, mais je serais juste fâché de me joindre aux concerts de pleurs ou d'exultations, d'avoir mine d'en parler pour faire des visites en profitant de l'air du temps. Peu importe, l'actualité la plus immédiate n'influera pas, a priori, sur les choix de CSS, quitte à ne pas être à contre-courant cette fois-ci. :)

Je ne trouve pas tes traductions lamentables du tout. L'espagnol se prête bien au travail rapide, de toute façon ; et c'est un texte qui vaut essentiellement pour son contenu informatif...

56. Le jeudi 3 avril 2008 à , par Morloch

Bonjour, en guise d'apéritif à un article du jour qui sera plus substantiel, je me permets de donner le lien de ce communiqué de l'agence Anncol, dont nos glorieux médias nationaux ne semblent pas connaître l'existence, du moins à ce qu'il me semble :

Anncol

Anncol est une agence de presse dont le siège est en Suède et qui sert régulièrement de porte-voix aux Farc.

Voici le texte :
" No llegaron las coordenadas PDF Imprimir E-Mail
miércoles, 02 de abril de 2008

ANNCOL

A donde irán los delegados del presidente francés y los voluntarios de la Cruz Roja Internacional? Donde aterrizarán los helicópteros? Quién les dará las coordenadas? Quiénes o quién los recibirá?

A que van? -a traer a Ingrid-, dicen los medios empresariales cercanos al gobierno del Uribe Vélez. Nos huele mal esta treta mediatica.

Hasta para una liberación unilateral se necesita que las partes acuerden algún mecanismo, de seguridad al menos. Extraña que el presidente, Nicolás Sarkozi, sea tan ingenuo y el CICR lo acompañe en tan peligrosa aventura.

De Uribe se puede esperar todo y de su comisionado, Restrepo, lo infinito. Mañana no nos vayan a salir con la historia de que las Farc no enviaron las coordenadas. Dense cuenta, que Uribe Vélez se burla una vez más de los que creen en sus cantinflescos discursos."

Et une traduction :

ANNCOL - Mercredi 2 avril 2008

Où vont les délégués du président français et les volontaires de la Croix Rouge Internationale ? Où vont atterrir les hélicoptères ? Qui leur donnera les coordonnées ? Qui les recevra ?

Pour quoi faire ? Pour récupérer Ingrid - disent les médias impérialistes proches du gouvernement d'Uribe Velez. Nos sentons mal cette trêve médiatique.

Pour une libération unilatérale, il est nécessaire que les parties se mettent d'accord sur un mécanisme quelconque, au minimum sur la sécurité. Il est étrange que le président Nicolas Sarkozi, soit aussi naïf et que le CICR l'accompagne dans une aventure aussi périlleuse.

D'Uribe on peut attendre tout, et de son représentant, Restrepo, l'infini. Demain ils vont nous sortir l'histoire comme quoi les Farc n'avaient pas envoyé les coordonnées. On va voir une fois de plus que Uribe Velez se moque une fois de plus de ceux qui croient ses discours absurdes.



Je ne sais pas qu'en penser, ce n'est pas présenté comme un communiqué des Farc, mais ce n'est pas très engageant.

D'ailleurs le CICR a annoncé qu'il n'accompagnerait pas la mission dans la forêt tant qu'il n'y aurait pas de prise de contact avec les Farc.

L'aventure ne s'annonce pas sous les meilleurs auspices...



57. Le jeudi 3 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Oui, effectivement, on ouvre le parapluie, et c'est étonnamment vraisemblable : Uribe promet ce qu'il n'a pas, les sauveteurs attendent... mais quoi ?

Ensuite, s'il n'y a pas discordance entre le propos de la section communication et la direction, il vaut mieux souhaiter une grande endurance à leurs victimes, parce que ça n'est pas fameusement rassurant.

Cela dit, c'est aussi leur intérêt de souffler le chaud et le froid, alors tirer des conclusions de la position d'un jour qui peut tout simplement leur servir à valoriser leur geste, sans faire mine de céder, ce n'est peut-être pas raisonnable.

Merci, nous verrons.

(La belle rhétorique marxiste semble tout de même un peu rouillée chez eux, l'humidité de la forêt équatoriale, sans doute. A part "médias impérialistes", on ne trouve pas grand-chose à se mettre sous la dent. Peccato.)

58. Le vendredi 4 avril 2008 à , par Morloch

Pfiou, je voudrais pouvoir faire preuve du même recul que les lutins, mais au milieu de l'attente Ingridienne, il y a des informations.

Un autre épisode de la gestion virtuose du dossier par la diplomatie française a été la libération en juin 2007 de Rodrigo Granda, un des membres les plus important des Farc.

Granda avait été arrêté (nota : comprendre "enlevé") au Venezuela par la police colombienne et il est le grossiste en cocaïne des Farc. Dans une interview, Le Monde diplomatique le présente comme ministre des relations extérieures, ça fait mieux. A noter dans cette interview son hilarité d'avoir été libéré à la demande de la France, son désintérêt total du cas Bétancourt qui justifiait cette libération, et ses développement rhétoriques au sujet des 11 députés otages des Farc abattus par ceux-ci le 18 juin 2007, semble t'il suite à une mauvaise coordination du commandement. Il essaie laborieusement de mettre leur mort sur le compte de l'armée colombienne qui aurait provoqué un tir croisé, les pauvres députés n'ayant pas pu être sauvés en dépit des efforts désespérés des Farc. Depuis, les corps des députés ont été livrés par les Farc et l'autopsie a montré qu'ils avaient été exécutés de sang froid. A noter la figure logique du Monde diplomatique qui explique que le fait que l'armée colombienne dise qu'elle ignore où sont les corps est bien la preuve qu'elle est responsable...

Bref, Rodrigo Granda refait parler de lui aujourd'hui.

Un mandat d'arrêt international a été lancé le 3 avril 2008 contre lui pour l'enlèvement et le meurtre de Cecilia Cubas en 2004, la fille de Raul Cubas, un ancien Président paraguaien, qui avait été retrouvée enterrée après que la famille ait payé la rançon.

Cela ne semble pas le démonter plus que cela, car il a fait une déclaration le même jour au nom des Farc pour dire que maintenant le seul moyen d'obtenir des libération d'otages sera la libération de guérilleros. Ce serait donc au gouvernement colombien de faire le premier pas, en revanche, il ne semble plus question de zone de démilitarisation.

Voilà, quelques nouvelles du jour.

59. Le vendredi 4 avril 2008 à , par Morloch

Et un texte de Semana de fin 2007 sur les procès paramilitaires, je l'ai choisi car je le trouve synthétique malgré le besoin d'actualiser.

Il faudrait quelques données sur le paramilitarisme en Colombie, mais tout est si emmêlé dans ce pays.

A l'emporte pièce, quitte à provoquer des réactions. Le paramilitarisme colombien est d'origine diverse. Réaction aux différentes vagues de violence qui ont emporté le pays, lequel à toujours eu, contrairement à d'autres pays d'Amérique du Sud, un Etat faible.

Devant cette faiblesse et pour pallier les carences de la police et de l'armée officielle , les colombiens ont mis en place des milices qui faisaient respecter l'ordre contre les narco-trafiquents et les bandes de guérilleros. Ces milices d'autodéfense étaient soit des initiatives "citoyennes" à l'échelle d'une ville ou d'un quartier, soit des initiatives de grands propriétaires et d'industriels, soit des initiatives de politiques. Le tout toujours plus ou moins officieux. Les milices se sont regroupées pour être plus puissantes et ont vite entretenu des liens avec les narcotrafiquants et même, révélation récente, avec les Farc. Ca a très vite dégénéré en bain de sang, dans un climat d'anarchie et d'impunité totale.

C'est le bilan de cette "parapolitique" des années 1990 et début 2000 qui fait aujourd'hui l'actualité du pays, de nombreux charniers ont été découverts ces deux dernières années.

L'article de Semana

60. Le vendredi 4 avril 2008 à , par Morloch

Guide pratique pour comprendre le scandale de la “parapolitique”

Semana.com présente un rapport avec tout ce que vous devez savoir sur l’avancée de ce processus juridique qui maintient le pays en haleine.

Par Élber Gutiérrez Roa
Date: 04/10/2007 –

La crise politique qui fait suite à la mise en évidence de liens de parlementaires et de membres du gouvernement avec les groupes d’auto-défense est née il y a plus d’un an, grâce à l’apparition de nouveaux témoignages et de preuves qui compromettaient de hauts fonctionnaires avec des paramilitaires de la côte Atlantique. Le sujet n’était pas nouveau pour la justice, mais ce n’est qu’à partir de ce moment qu’à commencé à fonctionner l’appareil d’Etat chargé d’enquêter, bien que certains organismes comme le Ministère public avaient en leur possession la majorité des preuves en réserve depuis plus de cinq ans.

Le premier fait concret qui a donné une impulsion aux enquêtes a été la plainte présentée par l’ex-candidate à la mairie de Bogotà, Clara Lopez, membre du Polo Democratico. Lopez a décidé de demander à la Cour qui faisait alors des investigations sur les parlementaires pour savoir si les affirmations qu’avait fait il y a des années Salvatore Mancuso étaient vraies, selon lesquelles les milices d’auto-défense contrôlaient 35 % du Parlement. Bien que la question ait été refusée par les parlementaires de tous les partis et que certains la considérèrent comme une preuve en soi dans des débats enflammés sur le contrôle politique, Lopez a été la première à demander à la justice d’enquêter sur le sujet.

La presse a également joué un rôle important avec son travail de dénonciation et par son suivi permanent de l’affaire. Semana a révélé avec des détails comment les tentacules du commandant du Bloque Norte des milices d’autodéfense, Rodrigo Tovar Pupo, « Jorge 40 », aujourd’hui démobilisé, ont réussi à pénétrer dans le DAS (services secrets) et de quelle manière s’est réalisée la fraude électorale de 2002 et 2006. Ces recherches, qui ont fait l’objet de dénégations du Président Uribe, ont été prouvées peu à peu par la justice. El Tiempo, Cambio et certaines investigations de Claudia López (également publiées par Semana.com) ont mis à jour la façon dont les paramilitaires se sont partagés les votes de la Côte Atlantique pour faire en sorte que leurs amis entrent au Parlement.

Toutes ces initiatives se sont ajoutées aux courageux efforts faits depuis le Parlement par des élus comme Gustavo Petro (celui qui a découvert l’infiltration paramilitaire dans les provinces de Sucre, Cordoba, Cesar, Magdalena, ainsi que dans le Ministère public et d’autres organes de l’Etat) et la sénatrice Piedad Córdoba, qui à l’occasion d’au moins cinq prises de paroles fit référence à l’infiltration dans le DAS et la désignation par les armes de candidats pour les mairies, les postes de gouverneur, la Chambre et le Sénat.

Comme si cela ne suffisait pas, les autorités ont confisqué au paramilitaire Edgar Ignacio Fierro, alias “Don Antonio”, un ordinateur avec des informations détaillées sur les contacts de “Jorge40” avec les politiques ; cinq parlementaires ont été rayés des listes uribistes sur ordre présidentiel pour les élections du Parlement de 2006, mais se sont ensuite retrouvés sur les listes d’autres partis, également uribistes, bien qu’il ait pesé sur eux le soupçon d’avoir fait des accords avec des milices d’autodéfense ; un paramilitaire déserteur connu comme « Pitirry » (aujourd’hui bénéficiaire de l’asile au Canada) a donné de nouveaux détails sur les massacres commis dans le Sucre, certains sénateurs, poussés par les remords, ont avoué leurs contacts avec les milices d’autodéfens ; puis Salvatore Mancuso a divulgué des documents qui mettaient en cause 28 politiques de la Côte dans un pacte avec les milices d’autodéfense pour « refonder la Patrie » à cause duquel déjà cinq parlementaires ont été convoqués pour être entendus.

Le scandale a commencé comme une affaire régionale de la Côte Atlantique, mais les études sur le sujet montrent que de telles anomalies se sont produites dans tout le pays. Ont succédé des questionnements sur ce qui s’était produit dans le Boyaca, le Tolima et les anciens territoires nationaux. Dans un contexte de nervosité de la classe dirigeante, deux cas concrets sont apparus symptomatiques. Le premier, l’annonce par Petro d’un débat sur le paramilitarisme dans la région d’Antioquia qui impliquerait des proches du président Alvaro Uribe et du sénateur Ruben Dario Quintero. Et le second, le Ministère public a lancé un ordre d’arrestation de six maires de la Casanare pour avoir passé des accords avec les milices d’autodéfense de Martin Llanos.

Avec toutes ces preuves, en plus des témoignages de divers déserteurs et de proches de victimes anonymes, la justice a commencé à instruire l’affaire. Et c’est là où nous en sommes aujourd’hui.

Les détenus

En conséquence de ces investigations, huit poids lourds de la politique colombienne sont derrière les barreaux.

Les trois premier ont été les sénateurs Alvaro Garcia et Jairo Merlano et le représentant Erick Morris, tous du département de Sucre et membres du groupe uribiste au Congrès. La Cour suprême de Justice, chargée d’enquêter sur les parlementaires, à ouvert l’instruction le 18 octobre 2006, une semaine plus tard les a mis en examen et finalement a lancé des mandats d’arrêt pour association de malfaiteurs avec des milices d’autodéfense. Garcia est accusé d’avoir participé au complot pour avoir donné l’ordre de certains des massacres de paysans commis entre 2000 et 2002.

Le 15 février de cette années (2007), après deux mois d’angoisse au sujet des conséquences possibles, la Cour a ordonné l’arrestation de trois parlementaires de plus, cette fois à cause des dénonciations de l’infiltration paramilitaire en Cesar et Magdalena. Il s’agissait de Alvaro Araujo, Mauricio Pimiento, Dieb Maloof, Luis Eduardo Vives, Alfonso Campo et Jorge Caballero, tous uribistes soupçonnés d’avoir des liens avec “Jorge40” et de bénéficier du partage électoral mis en place par les paramilitaires et révélé par l’enquête de Claudia Lopez. Alors que les cinq premiers ont été arrêtés la même nuit, le dernier est en fuite.
Maloof, Caballero y Vives ont été rayés des cadres de l’uribisme au début de 2006, pour leurs relacions avec es milices d’autodéfense mais sont ensuite revenus dans le troupeau avec la bénédiction présidentielle.

A la fin de mars, Araujo a envoyé une lettre au Sénat traitant la Cour Suprême de tous les noms et annonçant qu’il abandonnait son statut de parlementaire afin que son dossier soit transféré à la compétence du Ministère public. Merlano a pris la même décision des semaines plus tard. Le débat politique sur la question ne s’est pas fait attendre. Pendant que les parlementaires de l’opposition affirmaient qu’il s’agissait d’une manœuvre pour se moquer de la justice, d’anciens magistrats comme Eduardo Cifuentes ont demandé à la Cour qu’elle conserve sa compétence pour les ex-parlementaires. Pendant que Araujo et Merlano disaient que la Court avait violé la procédure et qu’ils préféraient que leurs dossiers soient traités par le Minsitère public (dans lequel le procès est instruit par deux instances différentes) les analystes se demandaient se qui se passerait si toutes les personnes impliquées optaient pour la même stratégie, serait-il tout de même pris en compte que c’est la Cour suprême qui avait été le point de départ de toutes les enquêtes.

Trino Luna, gouverneur de Magdalena, a été démis de ses fonctions et est toujours en détention après les révélations de la parlementaire Piedad Córdoba selon lesquelles il avait été imposé comme candidat unique par les milices d’autodéfense. Bien qu’en principe Cordoba, en qualité de présidente de la Direccion Liberal, ait avalisé la candidature de Luna sous l’étiquette libérale, après qu’elle ait dénoncé l’aide que lui avaient apporté les paramilitaires dans sa campagne.

L’homme de confiance

Le dirigeant le plus proche d’Alvaro Uribe dans la liste des personnes impliquées serait Jorge Noguera, directeur de la DAS à l’époque à laquelle les témoins affirment que s’est produite l’infiltration du service par les paramilitaires. Il a été arrêté le 22 février, après que Garcia (aujourd’hui prisonnier pour avoir dissimulé des antécédents de liens avec les narcotrafiquants et objet d’une demande d’extradition) l’ait accusé d’avoir permis ladite infiltration et d’avoir communiqué aux paramilitaires des bases de données dans le but d’altérer les résultats électoraux et des informations sur des leaders syndicaux qui furent assassinés par la suite.

Un mois après sa mise en détention, Noguera a été libéré grâce à un recours d’Habeas Corpus. Il n’a pas démenti les accusations qui lui on coûté son consulat à Milan, alors que le Ministère public a commis une erreur dans la procédure de son arrestation. Pendant la dernière semaine de mars Noguera et son ami l’ex-ministre Fernando Londoño se sont acharnés contre Andes Peñate, le nouveau directeur de la DAS, au sujet certaines informations qu’il aurait donné au Président Uribe à l’encontre de Noguera. Peñate aurait reçu des instructions présidentielles de le tenir au courant en détail des enquêtes internes pour faire éclater le scandale. Selon certains analystes, cet ordre est douteux, car Uribe s’est toujours engagé dans la défense de Noguera et a même fait valoir en sa faveur qu’une fois « il l’a fait entrer dans sa maison ».

Les fugitifs

Pour le même scandale sont en fuite l’ancien gouverneur de Sucre Salvador Arana, le représentant Jorge Luis Caballero et l’ancien parlementaire Alvaro Araujo Noguera.

Anara, très ami du Président Uribe, a été nommé diplomate au Chili, en dépit de ce que le Ministère public enquète depuis cinq ans sur ses relations avec les paramilitaires. Depuis le Congrès, le sénateur Petro a dénoncé en 2004 qu’Arana était responsable des homicides commis par le groupe du dénommé « Diego Vecino », aujourd’hui démobilisé, et l’horrible Rodrigo Mercado Peluffo, « Cadena », mystérieusement disparu à Santa Fe Ralito. Une autre preuve contre lui est le témoignage de l’ancien maire de El Roble (Sucre) Tito Diaz, qui en plein conseil communal a dénoncé devant le président Uribe que Salvador Arana cherchait à le faire tuer pour son opposition au paramilitarisme. Lamentablement, la justice n’a pas agi à temps, et Diaz, ainsi qu’il l’avait annoncé à la télévision, a été assassiné par des membres des milices d’autodéfense bien qu’il ait imploré l’aide présidentielle. Interpol a un mandat d’arrêt contre Arana.

Le cas de Caballero est différent. Les votes inhabituels obtenus lors des élections du Congrès, qui dans certaines municipalités était supérieur à 93 %, ont attiré l’attention de la Cour qui n’a pas été satisfaite de ses réponses au sujet de sa proximité avec « Chepe » Barrera, chef paramilitaire du sud de Magdalena. Caballero a, en plus, des antécédent graves. Et avait été expulsé des listes uribistes en raison de ses liens avec les milices d’autodéfense. Il y a des rumeurs selon lesquelles il serait en Allemagne ou en Espagne. Il n’a pas manifesté l’intention de revenir.

Le troisième, Araujo Noguera, ancien fonctionnaire qui fuit la justice, pourrait être au Venezuela, selon des informations du Ministère public obtenues après l’envoi d’un mandat d’arrêt contre lui pour sa participation supposée dans le complot pour la prise d’otage du dirigeant politique Victor Ochoa Daza. Selon des allégations devant la Cour dans le procès contre son fils, l’ancien sénateur Araujo Castro, le père et le fils sont impliqués, étant donné que la prise d’otage de Ochoa favorisait politiquement les Araujo et qu’une des conditions pour sa libération était de devoir renoncer à être candidat à la chambre des représentants.

Qui sont les suivants ?

Dans le Cordoba, il y a un groupe de 28 dirigeants soupçonnés d’avoir conclu un pacte ( « l’accord de Ralito ») avec Salvatore Mancuso, « Don Berna », « Jorge40 » et « Diego Vecino ». Parmi eux figurent les sénateurs Miguel de la Espriella, Reginaldo Montes, William Montes, José de los Santos Negrete, Juan Manuel López et Alfonso Campo. De la même façon sont impliqués un ancien Gouverneur, l’ex-directeur de l’Inco, Luis Carlo Ordosgoitia et l’ancienne sénatrice Eleanora Pineda. Ils sont tous soumis à des investigations et on attend que dans les prochains jours le Ministère public et la Cour décident de leur situation.

Das le Cesar il y a une enquète sur le gouverneur Hermano Molina, cousin du sénateur Araujo et de l’ex-conseillère María Consuelo Araújo. Ils sont soupçonnés d’avoir bénéficié d’accords avec « Jorge40 ».

Le processus a commencé sur la Côte Atlantique et la majorité des inculpés appartiennent à cette région. Cependant, dans les dernières semaines la Coure te le Ministère public ont mis en avant des recherches contre des parlementaires de départements comme Boyaca, Casanare et Antioquia. Le procureur général, Mario Iguaran, a envoyé à la Cour des preuves qui, selon lui, mettent en cause le représentant du Casanare Óscar Wilches de liens avec les milices d’autodéfense de Martín Llanos. Dans ce même département, six maires sont l’objet de mandat d’arrêt depuis le 4 avril pour les mêmes faits. Et dans le Boyaca, Ciro Ramirez, fameux pour ses déclarations multiples au sujet de la prolongation du mandat du Président Uribe, est déjà sous l’œil de la justice en raison d’un enregistrement dans lequel il apparaît dans des conversations compromettantes avec des narco-trafiquants.

Le contexte favorable aux enquêtes a permis que la Cour – dans le cas des membres du Congrès – et le ministère public accumulent à chaque fois une plus grande quantité de preuves sur le degré d’implication des fonctionnaires avec les groupes illégaux.

L’impact sur le Congrès

Les enquêtes soumettent les nerfs des parlementaires à rude épreuve depuis la fin de l’année passée. Et ce n’est rien de le dire. Les relations de parlementaires influents dans la bonne société de Bogota donne à penser que la Cour a saisi cette opportunité pour la difficile tâche de faire la lumière sur les évènements.

Ainsi, les sessions du Parlement sont de moins en moins courues. Et n’ont pas été suivis les appels présidentiels à des sessions extraordinaires pour discuter du TLC (Traité de Libre Echange) avec les Etats-Unis et le Plan de Développement afin qu’ils se concentrent sur ces missions. Une situation identique s’est produite pendant la période de prolongation après la période ordinaire qui a commencé le 16 mars. Comble de ces maux, Uribe se plaint du manque d’appui de son groupe parlementaire chaque fois qu’il doit faire face à une attaque de l’opposition. « On dirait qu’ils ont peur de l’opposition » a dit Uribe lors d’une interview sur une chaîne de radio.

Dans la quatrième commission de la Chambre on ne sait pas que faire parce que le Président et le Vice-Président sont en prison et dans ces conditions beaucoup croient que les décisions qui se prennent (sur des sujets aussi importants que le plan de Développement) pourraient être frappées de nullité. Dans la cinquième commission du Sénat, il n’y a plus de Président non plus depuis le jour où Araujo a été arrêté par les agents du DAS dans un des centres commerciaux les plus luxueux de Bogota.

A la démotivation ambiante s’ajoute l’expectative depuis le réquisitoire du sénateur Petro contre la famille du Président Uribe, accusée d’avoir fait la promotion du paramilitarisme en Antioquia. Il y a une paranoïa et des nerfs qui lâchent. L’humour noir devient très courant, et certains, par exemple, affirment qu’il serait plus facile d’obtenir le quorum si on tenait les assemblées dans la prison de La Picota.

L’effet sur le Gouvernement

Bien que le Président Uribe ait joué à fond depuis le premier jour pour faire en sorte que le scandale n’implique pas son administration, la réalité est que chaque fois celle-ci est un peu plus touchée. D’abord, il y a eu les dénonciations contre Noguera, qui n’était ni plus ni moins que le chef de la police secrète qui dépend directement du Président.

Ensuite est apparu le document de Ralito, qui compromettait Ordosgoitia, son ex-directeur de concessions. Et finalement, la Chancelière, dont il a du accepter la démission devant l’immense pression politique nationale et internationale. Bien qu’Uribe ait insisté pour ne pas la sacrifier, les faits ont fini par s’imposer : une personne, aussi compétente soit-elle, ne peut pas incarner l’image internationale du pays si son frère sénateur est en prison pour paramilitarisme, son père en procès pour enlèvement et homicide de chefs indiens, et son cousin est soupçonné d’avoir gagné le postye de Gouverneur du César grâce à un pacte avec les milices d’autodéfense de « Jorge40 ».

Chacune de ces trois crises dans le gouvernement a une importance particulière pour Uribe. Toutes ces personnes étaient ses amis. Il les a toutes défendues jusqu’au dernier moment. Noguera, le plus gravement mis en cause, est de ses intimes et avait dirigé sa campagne en Magdalena, un des endroits où on eu lieu des enquêtes sur des soupçons de fraude lors des récentes élections. A l’heure des comptes, le gouvernement ne tire pas très bien du scandale, même si le Président insiste sur le fait que les « découvertes » sont la conséquence de sa politique de sécurité démocratique. A dire vrai, le gouvernement fut le premier à mettre en doute les informations sur les fraudes électorales, la paramilitarisme du DAS et certaines des révélations de l’ordinateur de « Jorge40 ».

Un tournant

Des fonctionnaires comme le procureur Edgardo Maya Villazón et la ministre des Communications, María del Rosario Guerra de la Espriella, vivent un chapitre à part. Le premier doit relever le défi de démontrer son indépendance dans le processus en tant que Chef du Ministère public et comme relation de plusieurs des personnes impliquées. C’est le beau-père du gouverneur de Cesar mis en examen et oncle du sénateur démissionnaire Araujo Castro.

La ministre, pour sa part, fait partie de l’une des castes les plus influentes du Sucre, le département qui a été ensanglanté par les massacres des paramilitaires. Son grand dilemme est que le scandale a déjà touché sa famille, comme le gouvernement a destitué son cousin Victor Guerra de la charge de délégué de la Corporation Autonome du Sucre, pour avoir fait partie des signataires de « l’accord de Raito ». Bien que la ministre dise que son cas est différent de celui de l’ex Chancelier Araujo et se justifie par le fait que sa famille est très nombreuse (« j’ai 53 cousins du côté maternel et 25 du côté paternel »), l’opposition demande également sa démission.

61. Le vendredi 4 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Bonjour Morloch !

Tu avais vu juste, j'ai entendu aux informations ce matin (pas eu le temps de vérifier l'écrit) que les FARC avaient ri au nez de Sarkozy pour sa naïveté (sans blague).

Tu as toujours trois jours d'avance. :)

Le cas Granda montre bien les limites de la logique de sacrifice pour sauver des otages, où que ce soit. On risque perdre plus gros. Et en plus de donner du prix à cet otage, on justifie du même coup les prises d'otage à venir. Je sais bien que c'est épouvantable de dire cela, mais je ne suis pas sûr que l'intervention d'un Etat dans une affaire de prise d'otages (à moins d'aider discrètement une famille à payer une rançon) soit réellement un bon investissement pour l'avenir.

D'un autre côté, le fait de ne pas négocier implique parfois une montée en violence des actes des ravisseurs politiques...

Situation impossible de toute façon. Je déteste d'ailleurs les trames théâtrales qui se fondent sur la parole dictée ou la contrainte de l'otage (les deux sont présents dans Kabale und Liebe de Schiller, par exemple, qui a produit la petite Luisa Miller que tu as pu voir cette saison...).


Effectivement, article qui fait largement le tour de l'hécatombe politique... il ne reste plus grand monde debout.

Merci à toi. ;)

62. Le vendredi 4 avril 2008 à , par Morloch

Et dans Zampa, également. Oui, je devrais faire des ouvertures sur mon blog, mais cela prend du temps. D'ailleurs je ne promets pas d'article sur le Colombie ce jour, j'ai pris beaucoup de temps à la traduction de celui d'hier - je n'avais pas réalisé sa longueur.

En teaser : avec El Pais espagnol, on va retourner dans la forêt - j'ai bien noté que tu adorais cela :p - mais du côté vénézuelien cette fois, et ce n'est pas triste.

C'est difficile de suivre en temps réel l'affaire Bétancourt, on a offert aux Farc un cirque médiatique mondial, et je pense qu'ils doivent être surtout occupés à se tenir les côtes de rire.

Un blog intéressant sur la Colombie par quelqu'un qui suit cette affaire au jour le jour depuis 6 ans, spécialiste de la région avec Jacques Thomet, un ancien correspondant de l'AFP à la retraite. Le souci est qu'il me semble avoir perdu une part de son objectivité initiale depuis qu'il a été agressé verbalement par la famille Bétancourt. Il avait osé émettre quelques doutes sur la stratégie choisie et le discours complaisant vis-à-vis des Farc. Il donne l'impression de faire maintenant de cette affaire une affaire personnelle.

Mais il n'empêche que sa connaissance du dossier lui permet de mettre le doigt sur les détails qui font mal. Aujourd'hui il a vu deux choses, que, me semble-t'il, personne d'autre n'a relevé, du moins dans les médias :

- La première : Rodrigo Granda dans un verbeux communiqué à l'ANNCOL, dit le chose suivante au détour d'un paragraphe :

Granda :
Y aquí que nadie pose de inocente, porque todos quienes están como cautivos son responsables del azuzamiento de la guerra. Desde Ingrid en adelante,



Comprendre : Ingrid fait partie des responsables, comme les autres otages, de la guerre en Colombie. Cela vient malheureusement conforter ce que je disais il y a quelques jours, la perception d'Ingrid Betancourt par les Farc est éloignée de ce que l'on nous présente. Ils n'ont pas choisi de la garder par hasard. Elle n'est pas à leurs yeux l'intrépide femme qui expliquait que tout le monde en Colombie était corrompue sauf elle, comme la présentent les médias français, mais la fille d'un politique de la junte militaire des années 1950, apparemment lié également aux paramilitaires.

- La seconde : ils refusent l'émissaire envoyé par l'Elysée, Noël Saez. LA diplomatie française était tombée dans le panneau en regrettant la mort de Raul Reyes au moment où des négociations étaient en cours. Les Farc ne se font évidemment pas prier pour enchaîner et annoncer que Reyes avait été repéré à cause de Saez. Que cela soit exact ou pas est sans importance, on leur donne un bac à sable médiatique mondial, ils sautent dedans.

63. Le vendredi 4 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Tu es libre bien sûr ! :)

Et dans Zampa, également.

Mais Zampa, c'est comme pour le Vampire de Marschner, le pacte reste un moyen de tension formelle, mais il ne dicte pas véritablement d'action fondamentale. Et Wohlbrück chez Marschner ne se gêne pas pour briser le pacte, sans grandes conséquences.

(A toutes fins utiles, je rappelle à ceux qui nous suivraient la version libre de droits du Vampyr.)

En teaser : avec El Pais espagnol, on va retourner dans la forêt - j'ai bien noté que tu adorais cela :p - mais du côté vénézuelien cette fois, et ce n'est pas triste.

Oui, j'aime beaucoup chasser tranquillement dans la forêt, surtout lorsqu'il n'y a pas de loups.

Un blog intéressant sur la Colombie par quelqu'un qui suit cette affaire au jour le jour depuis 6 ans, spécialiste de la région avec Jacques Thomet, un ancien correspondant de l'AFP à la retraite. Le souci est qu'il me semble avoir perdu une part de son objectivité initiale depuis qu'il a été agressé verbalement par la famille Bétancourt. Il avait osé émettre quelques doutes sur la stratégie choisie et le discours complaisant vis-à-vis des Farc. Il donne l'impression de faire maintenant de cette affaire une affaire personnelle.

Merci, je ne connaissais pas. Le ton est un petit peu sensationnaliste à mon goût. J'y jetterai quelques coups d'oeil de temps à autre, tout de même, parce qu'en effet, tu pointes vers des articles qui donnent des détails.

64. Le vendredi 4 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

J'en profite pour signaler un reportage intéressant sur le site d'Arte, disponible jusqu'à demain, à propos des prix fixés par l'Etat vénézuélien. Où l'on voit les liens consanguins des deux économies (les producteurs survivant grâce aux exportations interdites, et la Colombie étant approvisionnée à moindre coût).

Ca permet de comprendre, aussi, certaines tensions qui ne sont jamais explicitées dans les exposés géopolitiques.

Ce par ici (le deuxième reportage de la vidéo).

65. Le dimanche 6 avril 2008 à , par Morloch

Très intéressant le reportage, et un autre point de vue sur ces tensions régionales.

L'agriculture colombienne est très riche et nourrit traditionnellement le Venezuela qui est en retard de ce point de vue - aucun des deux pays n'a fait la fameuse "réforme agraire" qui aurait été la clé des conflits en Amérique du sud ces dernières décennies. Il faut relativiser l'enjeu de cette réforme en Colombie où 75 % de la population est urbaine aujourd'hui. La réforme aurait dû avoir lieu, elle n'a pas eu lieu, faut-il revenir en arrière ?

Pour poursuivre, un article à sensation du El Pais espagnol :

Narcosanctuario

et sa traduction bricolo :

66. Le dimanche 6 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Voilà, c'est hors ligne, tu peux reprendre. ;)

67. Le dimanche 6 avril 2008 à , par Morloch

Le narco-sanctuaire des Farc
La guérilla colombienne des Farc a trouvé son sanctuaire au Venezuela de Hugo Chavez. Quatre déserteurs et diverses sources des services de renseignements et diplomatiques ont détaillé à El Pais l’étendue de la coopération systématique que les autorités vénézueliennes apportent aux Farc dans leurs opérations de trafic de drogue.

Certains désertent de la guérilla colombienne parce qu’ils se sentent trahis par leurs chefs, démotivés par l’impression que le capitalisme sauvage du trafic de drogue a supplanté l’altruisme socialiste qui les avait incité à prendre les armes. D’autres partent parce qu’ils éprouvent le besoin de retourner à une vie normale. Et d’autres par regret, car sont convaincus que s’ils ne fuient pas, ils mourront ; c’est le cas de Rafael qui a déserté en septembre après un an et demi d’opérations dans une des bases des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (Farc) sur le territoire vénézuélien.

La logique de Rafael, à première vue, est perverse. D’un côté parce que, en tant que guérillero déserteur, qui est retourné en Colombie, il sait qu’il vivra le reste de ses jours sous la menace permanente que ses ex-compagnons l’assassinent ; d’un autre côté parce que la logique dit que pour les Farc le Venezuela voisin est un refuge sûr. Les Farc partagent l’idéologie bolivarienne du président Hugo Chavez, et l’armée colombienne ne se risquerait pas à violer la loi internationale et traverser la frontière.

“ Tout ceci est vrai”, explique Rafael. 3 L’armée colombienne ne traverse pas la frontière, et la guérilla a fait un pacte de non-agression avec les militaires vénézuéliens. Le Gouvernement vénézuélien laisse les Farc opérer librement parce qu’ils partagent la même pensée bolivarienne, et aussi parce que les Farc paient des pots de vin à ses membres.

Alors, de quoi a t‘il peur ?

“D’un danger bien plus grand à ceux que j’affrontais jusque là : des combats quasi-quotidiens à l’intérieur du Venezuela avec les elenos (la guérilla de l’ELN).

Mais, est-ce que l’ELN ne partage pas les principes marxistes qui ont mené les deux organisations à la guerre depuis 40 ans ? « Ca se peut », répond Rafael, « mais ceci n’a rien à voir avec la politique. La lutte avec l’ELN a pour but les routes du trafic de cocaïne. Il y a énormément d’argent en jeu dans cette zone frontière où la drogue entre depuis la Colombie. Parce que le trajet le plus sûr pour envoyer la drogue vers l’Europe est le Venezuela. »

El Pais a parlé avec Rafael, qui a milité en tant que guérillero pendant dix ans, dont trois passés en prison, et avec trois autres déserteurs des Farc qui se sont rendus au gouvernement colombien, pris en charge par un programme de réinsertion à la vie civile; mais (El Pais) a eu également accès direct en Colombie à des diplomates et diverses sources de haut niveau des services de renseignements et de sécurité de plusieurs pays, des individus dont la mission dangereuse (pour cette raison et dans certains cas pour des raisons politiques, l’anonymat a été demandé avant de parler avec El Pais) consiste à combattre le terrorisme et le trafic de drogue international. Les deux objectifs convergent vers les Farc, plus puissant que n’importe quel cartel dans le marché global de la cocaïne et qualifiées par les USA et l’UE comme « organisation terroriste ».

Ce qu’assure un diplomate européen et diverses sources officielle auxquelles a eu accès El Pais est qu’il existe une complicité et une interpénétration importante d’éléments de L’Etat que préside Hugo Chavez avec les activités mafieuses et militaires de l’organisation de guérilla la plus ancienne au monde. La conclusion à laquelle le diplomate européen et toutes les sources consultés arrivent est que la complicité est active et constante aux niveaux opérationnels, dans les zones où se déploie l’activité militaire et le trafic de drogue, et plus passive dans les sphères plus élevées du Gouvernement vénézuélien, jusqu’à atteindre le président Chavez, lequel aucune source consultée – même dans l’anonymat le plus extrême – n’accuse de complicité directe avec le gigantesque commerce de drogue colombien. Ce que les mêmes ne peuvent pas croire en revanche c’est qu’il ne soit pas au courant du degré de collusion qui existe entre ses forces armées et les haut responsables des Farc. Ils doutent de même qu’il ne soit pas au courant du degré d’implication des Farc dans le trafic de cocaïne.

El Pais, en dépit de ses nombreuses tentatives, ,n’est pas parvenu à obtenir, jusqu’à la fin de la nuit de jeudi de cette édition, une réaction des autorités vénézueliennes aux informations rapportées dans ce reportage.

On savait déjà que, pendant plusieurs années, les Farc avaient utilisé le côté vénézuelien de la frontière colombienne comme refuge. Peu de personnes mettent en doute que, s’il n’y avait pas eu la cocaïne, le carburant qui alimente la guerre colombienne, les Farc se seraient éteints comme les autres guérillas d’Amérique latine nées durant la guerre froide. Ce qui est nouveau et que révèle les témoignages recueillis pour ce journal, c’est l’étendue systématique de la coopération du Venezuela avec la narco-guérilla quant au transport de la drogue par air, terre et mer, à la fourniture d’armes, et la protection sur le terrain reçues par des régiments des forces armées, et l’immunité légale de facto que leur accordée par des organismes de l’Etat.

Il s’agit d’un commerce illégal gigantesque. Transitent par le Venezuela 30 % des 600 tonnes de cocaïne qui circulent annuellement dans le monde. Pratiquement la totalité de la drogue colombienne qui sort par le Venezuela a pour destination l’Europe, avec l’Espagne et le Portugal comme principaux points d’entrée, et avec une valeur de marché dans les rues européennes qui dépassent les 10.000 millions d’euros par an.

L’infrastructure vénézuélienne destinée au flux de la cocaïne a cru de façon exponentielle, selon les sources de renseignements interrogées par El Pais, dans les cinq dernières années de la présidence d’Hugo Chavez, dont la décision d’expulser l’agence antidrogue nord-américaine (DEA) de son pais en 2005 a été acclamée aussi bien par les Farc que par les chefs des cartels de la drogue traditionnels. Comme l’a dit Luis Hernando Gómez Bustamante, puissant capo colombien de la drogue dans les mains de la police de son pays depuis février “ Le Venezuela est le temple du trafic de drogue”.
Un diplomate européen avec beaucoup d’années d’expérience en Amérique latine a dit une chose semblable : « Le pays bolivarien, socialiste, anti-impérialiste exemplaire que Chavez prétendait fonder est en train de se transformer en un narco-Etat, de la même façon que les Farc se sont transformés en narco-guérilla. Peut être que Chavez ne le comprend pas, mais ce phénomène ronge son pays comme un cancer.

Quant à l’aspect militaire, ou “terroriste”, des Farc, ce que les déserteurs interrogés prétendent serait que les autorités vénézueliennes, non seulement offrent une protection armée à au moins quatre campements guérilleros fixes dans le pays, mais qu’en plus ils tolèrent la belle vie à des programmes d’enseignement opérant dans les campements pour la formation à la fabrication de bombes. Rafael, grand, fibreux et d’aspect sérieux, correspondant à l’image classique du guérillero latino américain – raconte comment il fut lui-même entraîné au Venezuela pour participer à une série d’attentats à Bogota, la capitale colombienne. La collaboration s’étend prétendument à la vente d’armes pour les forces armées des Farc, à procurer aux membres de la guérilla des papiers d’identité vénézuéliens, dont de nombreux faux, et aux leaders des Farc des passeports avec lesquels ils peuvent voyager vers Cuba ou l’Europe ; et à autoriser que les Farc proposent un entraînement militaire aux Forces Bolivariennes de Libération. Les FBL aussi connues sous le nom de « boliches », forment une guérilla crée par le gouvernement de Chavez avec la fonction supposée de défendre la patrie en cas d’invasion nord-américaine.

L’expression internationale la plus visible du terrorisme des Farc a été la pratique de prise d’otage de personnes avec des fins économiques ou politiques, comme c’est le cas de l’ex-candidate à la présidence colombienne Ingrid Betancourt. Certaines sources de renseignements avec lesquelles s’est entretenue El Pais affirment qu’ils ont des informations fiables selon lesquelles les Farc la détiennent en territoire vénézuélien. Rafael, qui dit qu’il était sur le point d’être nommé à un post de commandement important juste au moment de déserter, soutient que depuis le début de l’année, et peut être encore, Betancourt s’est trouvée dans un village à la frontière vénézuelienne appelé Elorza, dans l’état d’Apure, sous la responsabilité de Germán Briceño Suárez, alias Grannobles, membre de l’état major des Farc et cher du front 10, dans lequel opérait Rafael. La raison est qu’Elorza possède une grande propriété luxueuse protégée, d’après des sources de renseignements, par la Garde Nationale et connue par les guérilleros sous le nom de Rancho Grande, est éloignée du conflit militaire, ce qui réduit les possibilités qu’elle meure lors d’un affrontement, lequel générerait un problème d’image grave pour les Farc, étant donné que Betancourt est également citoyenne française et que le président Nicolas Sarkozy s’efforce d’obtenir sa libération.

Rafael, éloquent mais pas fanfaron, reconnaît qu’il n’a pas vu lui-même Betancourt, qu’il a entendu des compagnons guérilleros en parler, et toutes les sources consultées par El Pais ne sont pas d’accord sur la théorie selon laquelle elle est au Venezuela. Là où il y a unanimité c’est pour dire que Grannobles, dont l’extradition a été demandée par les Etats-Unis pour trafic de drogue et pour l’assassinat de trois nord américains en 1999 sur le sol vénézuelien, dirige la logistique narco-guerrière au Venezuela. De même, il est en liaison avec des chefs de cartels pour des opérations conjointes, pour l’une desquelles Rafael dit avoir assisté à une réunion au Rancho Grande.

Le contact de Chavez avec les Farc, affirment les sources de renseignements, s’est établi par l’intermédiaire de l’un des sept chefs principaux des Farc, Ivan Marquez, qui a aussi une propriété au Venezuela et qui communique avec le président par des contacts élevés dans les services de renseignements vénézuéliens. Comme l’explique un déserteur des Farc qui avait occupé une charge de propagande importante de l’organisation, « Les Farc partagent trois principes bolivariens avec Chavez : l’unité latino-américaine, la lutte anti-impérialiste et la souveraineté nationale. La convergence idéologique mène à la convergence tactique ».

Les avantages tactiques qui émanent de la souveraineté bolivarienne aboutissent, selon les sources, au rendement maximum dans la relation avec l’industrie multinationale du trafic de drogue. Il existe différentes méthodes pour envoyer la cocaïne de Colombie en Europe, leur point commun est la collaboration par omission, ou par commission, des autorités vénézueliennes. Ici il y a deux options. Ou bien on envoie les petites avions le cap sur Haïti ou la République dominicaine (une source dit que les vols non autorisés « suspects » sont passés de 3 à 15 par semaine depuis 2006) ou bien la drogue est transférée sur des avions qui vont directement vers des pays d’Afrique occidentale, comme la Guinée-Bissau ou le Ghana, d’où ils poursuivent par voie maritime vers le Portugal ou la Galice, point d’entrée espagnol de l’espace européen de Schengen.

Un des guérilléros avec lequel s’est entretenu El Pais, appelons le Marcelo, a exposé le procédé pour envoyer de la drogue en petites quantités par l’intermédiaire d’individus (mulas) qui la transportent dans leurs valises dans des vols commerciaux. Marcelo a déserté en août après avoir été un an dans un campement vénézuélien des Farc à La Uvita, dans l’état d’Apure. Avec des mouvements habiles, mince et l’esprit ordonné, il n’a milité dans la guérilla de la FArc que 15 mois, mais ses chefs lui ont rapidement procuré une carte d’identité vénézuelienne, avec laquelle il a traversé la frontière et voyagé à travers le Venezuela sans problèmes.

“Une fois”, se rappelle t’il, “ j’étais à l’aéroport de Bogota pour accompagner un portoricain et l’envoyer au Venezuela. Il a passé la frontière avec moi après avoir convenu d’un prix avec les douaniers vénézuéliens. Je l’ai accompagné en voiture particulière à Caracas et de là il a voyagé vers l’Espagne en avion avec la drogue dans sa valise. Il est arrivé sans problèmes. Cela m’a été confirmé par Pizarro, un de nos officiers avec 120 hommes sous sa charge, qui avait parlé avec son contact en Espagne, qui s’appelait Dani ».

Marcelo a participé à “ huit ou neuf » missions de ce type au long de ces 12 mois « Opérer au Venezuela est le plus facile qui soit », soutint-il. « La guérilla des Farc est en nombre, la Guarde Nationale, l’Armée et d’autre vénézuéliens avec des postes officiels offrent leurs services, contre de l’argent. Il n’y a jamais d’affrontements entre la Garde ou l’armée ». Rafael assure qu’il a participé à diverses opérations dans le but était d’envoyer la drogue par voie maritime vers des portes des Caraïbes. Son rang dans les Farc était plus élevé que celui de Marcelo et il avait plus accès à des informations confidentielles.

“ La marchandise est reçue à la frontière, transportée en camions”, explique Rafael “ Quand arrive le véhicule, la Garde nationale vénézuélienne le sait d’avance, ils sont déjà payés pour qu’il traverse le Venezuela sans problèmes. De temps en temps, ils nous donnent une escorte. Alors, moi et d’autres compagnons montons dans le même camion avec le chauffeur, ou dans une voiture particulière qui suit le convoi. Nous faisons le voyage, d’environ 16 heures, jusqu’à Puerto Cabello, sur la côte à l’ouest de Caracas. Alors le camion entre dans une grande cave contrôlée par des vénézuéliens et des hommes des Farc qui se changent de la sécurité. Des officiers de l’armée vénézuélienne se chargent des contrôles de douanes et de la sortie des bateaux. Ils sont au courant de ce qui se passe et facilitent tout. »

Des sources de renseignements qui analysent les routes de sortie de Puerto Cabello disent que de là partent de petites embarcations vers Haïti ou la République dominicaine, depuis lesquelles se fait le transbordement sur des bateaux plus grands qui amènent la drogue vers l’Europe, ou bien traversent directement l’océan vers l’Europe u l’Afrique en bateaux de pêche. Une affaire connue est celle de bateau de pêche vénézuelien Zeux X, qui a été intercepté par les autorités espagnoles en septembre, à 1.050 milles de Las Palmas, avec six vénézuéliens à bord et un chargement de 3.200 kilos de cocaïne avec un prix de vente en Europe estimé à 190 millions d’euros.

Rafael dit qu’il n’a pas seulement accompagné les camions qui voyagent entre la frontière et la mer, mais qu’une fois il est resté un mois à Puerto Cabello, où il était logé dans un hôtel, faisant un travail de « sécurité ». Il y a des pertes de marchandises et des vols. Les armes parlent. Beaucoup sont tués, pour vol ou pour trahison. “ Rafael assure qu’il n’a pas eu de problèmes avec la police vénézuélienne, et encore moins quand il a fait son voyage retour, chargé d’argent apporté généralement d’Espagne, dit-il, en échange de la drogue. « J’ai porté de grandes valises pleines de billets de 500 euros, et les ai déposé chez un des responsables des Farc du front 10 du côté vénézuélien de la frontière avec la Colombie. »

La même procédure l’a amené jusqu’au port de Maracaibo, qui selon les sources consultées par El Pais est “ une espèce de paradis” pour les trafiquants de drogue, parmi lesquelles se trouve un des chefs les plus recherchés par les polices internationales, Wilber Varela, connu également sous le nom de « Jabon ». « Ils s’installent dans des maison magnifiques, achètent de grandes propriétés en faillite et se transforment en personnages importants pour l’économie locale du Venezuela », déclare une source policière. « Le Venezuela est pour ces criminels une certitude de vie ». Pour cette raison, quand la police colombienne demande à ses homologues vénézuéliens des informations sur les chefs mafieux, la réponse est toujours la même « Nous n’avons rien ».

Cette convergence tactique entre les Forces armées vénézuéliennes et les Farc s’étend sur le terrain militaire, au point que, selon une source de renseignements particulièrement bien informée avec laquelle El Pais s’est entretenu, La Garde nationale à des postes de garde autour des campements guérilleros ; Pourquoi ? « Pour les protéger, ce qui indique qu’il y a connaissance au plus haut niveau militaire vénézuélien de l’étroite collaboration qu’ont leurs soldats avec les Farc. »

Les choses n’ont pas toujours été si claires. Un autre déserteur des Farc, pseudonyme Humberto, se rappelle comment, en janvier 2004, il y avait failli y avoir une grave lutte entre la guérilla colombienne et l’armée vénézuelienne dans une région frontière appelée La Guajira. Selon Humberto, qui travaillait politiquement dans la clandestinité pour les Farc dans une ville importante colombienne pendant cinq ans avant de retourner à la guérilla comme combattant en 2005, l’incident s’est produit à la marge d’une réunion politique de révolutionnaires de divers pays latino-américains dans un campement des Farc au Venezuela. Là se trouvaient 150 guérilleros menés par l’ambassadeur des Farc au Venezuela, Ivan Marquez. « Tout à coup, nous avons entendu un bombardement aérien proche du campement et ensuite nous nous sommes aperçus qu’approchait un colonne de l’Armée vénézuélienne » raconte t’il. « La troupe est arrivée près du campement, mais quand il paraissait qu’il y allait y avoir un affrontement, les commandants des deux bords ont commencé à parler et se sont mis à boire de la vodka ensemble, pour fêter le fait que les deux étaient commandants d’armées bolivariennes. »

Humberto, un ex-universitaire qui avait brillé dans sa jeunesse pour sa ferveur révolutionnaire, a déserté en octobre de cette année en grande partie parce qu’il avait vu comment ce genre de scène festive, facilitée par l’alcool, avait fini par définir le style de vie de certains haut officiers des Farc. « Nous autres les guérilléros fantassins, les miliciens, souffrons en permanence de problème de ravitaillement. Nous marchons toute la journée et nous crevons de faim. Le problème de base était d’être militaire mais s’est transformé en survie de base. Mais ce que je ne pouvais plus supporter c’était que pendant que nous souffrions, les officiers non seulement mangeaient bien, mais qu’ils buvaient du whisky et paradaient avec de belles femmes. Ca a été une énorme déception. »

Rafael ne semble pas partager les mêmes scrupules. L’absence de jugement moral quand il décrit ses activités de trafiquent de drogue l’indique. De même il lui semblait accomplir des travaux directement liés à sa vocation originale de guérillero quand il partait à Caracas pour chercher des armements que les Farc achetaient aux forces armées vénézuéliennes. C’est une des dimensions tactiques les plus systématisées de la coopération entre le Venezuela et les Farc.

Entre autres cas similaires, Rafael raconte comment il a voyagé en voiture particulière, une Toyota Corolla, avec un capitaine de la Garde nationale appelé Pedro Mendoza, vers une grande base militaire dans les environs de Caracas appelée Fuerte Tiuna. Il est entré dans la base avec le capitaine, qui lui a donné huit fusils. Ils sont revenus à la frontière avec les fusils dans le coffre de la voiture. Selon Rafael, des éléments de la Garde nationale approvisionnement les Farc en grenades, lance-grenades et du matériel explosif de base pétrolifère C-4 utilisé pour fabriquer des bombes.

Une source des renseignements confirme que ces petits mouvements d’armes se produisent à grande échelle. « Ce qui se passe c’est que la drogue va de Colombie vers le Venezuela, et les armes du Venezuela vers la Colombie. Ce ne sont pas de grands chargements, c’est un flux faible mais constant. 5.000 balles, sic fusils… C’est très difficile de le détecter parce qu’il y a beaucoup de petits micro réseaux, très bien coordonnés par des spécialistes des Farc. »

Rafael travaillait directement avec ces spécialistes, aussi bien dans le trafic d’armes que dans le trafic de cocaïne, jusqu’à ce qu’il prenne la décision de changer de vie. La conviction que sa chance allait finir en août de cette année. « En juin et juillet j’avais reçu des cours de fabrication d’explosifs, ensemble avec des membres des milices de Chavez et des « boliches » du FBL. Nous avions appris, dans un camp au Venezuela, comment armer différents types de mines antipersonnelles, et fabriquer des bombes avec du C-4 reçu de la garde nationale. Ils nous ont également appris à amorcer des bombes de façon contrôlée en utilisant des téléphones portables ». Il était préparé, dit il, pour une mission à Bogota. « Ils nous ont donné des photos des objectifs. Nous allions opérer ensemble avec deux groupes des Farc détachés dans la capitale. Nous allions mettre des bombes. Quand la date d’est approchée nous avons commencé à réfléchir et se dire que ça ne pouvait pas continuer comme de cette façon. D’abord, à cause du danger des affrontements avec les « elenos », et aussi, à cause du risque d’être arrêté – j’avais déjà passé plusieurs années en prison pour mes activités chez les Farc – ou bien d’être tué par les forces de sécurité à Bogota. A la fin d’aout, je me suis échappé, et en septembre je me suis rendu. »

“ La vérité” explique un haut gradé de la police, “ c’est que si le Venezuela faisait un effort minimum pour collaborer avec la communauté internationale, la différence serait énorme. Nous pourrions facilement récupérer deux tonnes de cocaïne en plus par mois avec un peu de bonne volonté de ce côté. Ils ne le font pas parce qu’il y a beaucoup de corruption, mais aussi, et c’est la raison de fond, à cause de l’attitude anti-impérialiste. Si cela arrange les impérialistes », pensent-ils, « Pourquoi les aider ? « La clé est la volonté politique. Et elle n’existe pas. »
Une logique similaire s’étend, selon la source de renseignement de plus haut grade avec laquelle El Pais s’est entretenue, au thème des otages des Farc. « Si Chavez le voulait, il pourrait obliger la libération de Betancourt demain, indépendamment du fait qu’elle soit en Colombie ou au Venezuela. Il peut dire au Farc « Vous la libérez ou bien ion arrête le jeu ici au Venezuela » La dépendance que les Farc se sont créées vis-à-vis du Venezuela est d’ue importance telle qu’ils ne pourraient pas se risquer à dire non. »

68. Le dimanche 6 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Ah, une nouvelle martingale pour régler le problème... Ca paraît crédible, cela dit.

Beaucoup, beaucoup de choses dans cet article. On passerait la journée à rebondir sur tout. Ca permet notamment de remettre le politique en perspective avec l'économique et les infrasociétés qui se sont créées et tâchent de survivre...

Merci encore... Tu fais un beau travail de suivi !

69. Le dimanche 6 avril 2008 à , par Morloch

Oui, mais attention, l'article date de quelques mois. Pour le suivi, je vais passer à un article de Semana qui parlera des paramilitaires encore en activité sur le terrain. Il y sera question du fameux Wílber Alirio Varela, alias 'Jabón' (Savon) qui était décrit par El Pais comme menant la belle vie dans sa villa de luxe au Venezuela. Eh bien on apprendra qu'il a mal fini.

Les lutins sauront en tirer une morale édifiante : " bien mal acquis ne profite jamais !"

Ensuite je reviendrai sur la véritable actualité politique de Colombie avec le Parlement, la parapolitique et l'opportunité de nouvelles élections, vu les proportions prises par la crise.

70. Le lundi 7 avril 2008 à , par Morloch

Et voilà un article de Semana, une ambiance bon enfant dans certains coins du pays :

Las dos guerras :


Les deux guerres

Uraba et le Norte del Valle sont l’épicentre de vendettas sanglantes entre groupes paramilitaires et mafiosos

Date : 04/05/2008 –

Deux des zones les plus stratégiques de Colombie se sont transformées en une véritable poudrière. Dans l’Uraba, deux factions d’ex-paramilitaires s’affrontent en une guerre qui lors du seul dernier mois a fait une cinquantaine de morts chez les deux bandes. Et le nord de la Valle del Cauca est la scène d’une vague d’assassinats sélectifs, résultat d’une vendetta entre groupe mafiosos de cette région qui luttent pour s’approprier le pouvoir. Bien que dans le nord, le conflit soit entre les paramilitaires et dans le sud entre narcotrafiquants, les deux guerres ont un point commun : le trafic de drogue.

Le protagoniste principal du Golfe d’Uraba est Danial Rendon Herrera. Connu comme « Don Mario », cet homme a le contrôle d’une vaste région qui englobe des départements comme l’Antioquia et le Choco, région qui était auparavant contrôlée par deux chefs paramilitaires qui se sont démobilisés il y a plus d’un an et qui sont aujourd’hui dans la prison d’Itagui. : son frère Freddy Rendon alias « el Aleman » et Herman Hernandez, alias « HH ». Après la soumission à la loi Justice et Paix de ces deux ex-commandants des gangs appelés respectivement Elmer Cardenas et Bananera, « Don Mario » a occupé seul ces zones.

« Don Mario » s’est lié aux milices d’autodéfense par l’intermédiaire de Fidel Castaño. Sous ses ordres et ceux de Carlos Castaño, il a été chargé de l’expansion paramilitaire dans les Llanos Orientales. Là, avec Miguel Arroyave, il a créé le gang Centauros et a consolidé la présence paramilitaire dans l’est du pays. Après l’assassinat de Arroyave, en 2004, « Don Mario » se vit obligé de retourner dans l’Uraba. Quand son frère, « el Alemano », et « HH » se sont démobilisés, il a décidé de rester dans une zone qui est considérée comme « le joyau de la couronne ». En raison de son double avantage stratégique, l’Uraba est un endroit clé pour le trafic d’armes et de drogue. D’où son importance historique pour les groupes illégaux.

“Don Mario” a recruté d’anciens combattants des gangs de “el Aleman” et de “HH”. Aujourd’hui son armée compte 600 hommes, la majorité d’entre eux étant des démobilisés qui ont repris les armes. Non content de contrôler l’Uraba côté Antioquia et le Choco, « Don Mario » a entamé une expansion pour annexer d’autres zones abandonnées par les anciens chefs paramilitaires.

Entre autres, il a tenté d’entrer dans des zones qui avaient été contrôlées dans le passé par Diego Murillo, alias « Don Berna ». Les hommes de « Don Mario » ont commencé à être présents dans des secteurs comme la Communa 13, à Medellin, Eviago et Tierralta, Cordoba. Ces zones étaient restées depuis plus d’un an sous la domination de Carlos Mario Aguilar, alias « Rogelio », qui avait lui-même hérité d’une grande partie de l’empire criminel que possédait « Berna » auparavant, y compris le redouté « bureau d’ Envigado ».

“Rogelio” est la tête visible d’une organisation d’ex-paramilitaires connus comme les “Paisas”, qui a pour objet essentiel le trafic de drogue. Par le feu et le sang, « Don Mario » a essayé de s’attribuer une partie des affaires de « Rogelio » et des « Paisas ». La guerre fut inévitable. Les assassinats sélectifs à Medellin du fait des « Marios » a entraîné une violente réaction des « Paisas ». Ces derniers ont choisi d’attaquer « Don Mario » sur son propre territoire, l’Uraba. Les « Paises » ont recruté d’ex-démobilisés de divers gangs et ont commencé depuis le début de l’année une offensive dans différentes municipalités de l’Uraba de la région d’Antioquia.

Le point culminant de cette confrontation s’est déroulé pendant la Semaine Sainte. Des hommes des « Paisas » ont lancé une série d’assassinats de membres et collaborateurs des « Marios » dans des zones autour de Chigorodo et San Pedro de Uraba et d’autres villes. Selon les chiffres des organismes de renseignement, entre le 14 et le 28 mars uniquement, on a compté environ 40 morts dans ces zones. Cependant, la « campagne militaire » des « Paisas » a souffert un dur revers le Vendredi Saint, quand des hommes de « Don Mario » ont assassiné 7 membres des « Paisas » et capturé 25 autres comme otages. Le jeudi de la semaine passée, a été diffusé dans les medias une vidéo dans laquelle « Don Mario » annonçait que derrière l’attaque contre lui se dissimulaient « HH » et « Don Berna », accusation démentie par les deux ex-chefs paramilitaires dans un communiqué public.

Pour les autorités, il n’est pas évident que “Berna” et “HH” aient été derrière les “Paisas”, comme l’a affirmé “ Don Mario”. La seule chose qui soit certaine, c’est que les évènements en Uraba sont une bataille pour le contrôle de couloirs stratégiques pour le trafic de drogue. Contrôler « Don Mario » et ramener le calme dans une zone telle que l’Uraba, une des régions vitrines de la politique de sécurité démocratique, est devenu un défi immédiat pour la Force Publique. Mais ce n’est pas le seul.

Dans l’ouest du pays également se livre une guerre qui n’est pas moins intense et dont le protagoniste principal est Luis Enrique Calle Serna. Connu sous les alias de « Comba » ou « Combatiente », cet homme a approuvé la réorganisation des structures mafieuses du cartel du Norte del Valle et après une série de vendettas est devenu le nouveau responsable du trafic de drogue dans le sud-ouest de la Colombie.

Depuis l’arrestation et l’extradition de Hernando Gómez Bustamante, alias « Rasguño » et l’arrestation de Diego Montoya, alias “Don Diego” en septembre de l’année dernière, le cartel du Norte del Valle se retrouve pratiquement sous le commandement d’un seul chef : Wílber Alirio Varela, alias « Jabón ». En raison de la persécution des autorités, Varela s’était réfugié depuis plusieurs années au Venezuela et avait laissé la charge de son organisation criminelle en Colombie a celui qui avait été pendant de nombreuses années un de ses meilleurs hommes de confiance : « Comba ». Au début de février de cette année, ce dernier a décidé qu’était arrivé le moment de cesser d’être le second et a assassiné son chef, Varela. Comme il arrive dans le monde de la mafia, beaucoup des membres de l’organisation de Varela ne savaient pas ou n’étaient pas d’accord avec la décision prise par « Comba ».

A la fin de février, “Comba” ensemble avec son associé Diego Perez, alias “ Diego Rastrojo” et Daniel “el Loco” Barrera, ont fait une communication à tous les anciens membres de l’empire criminel de Varela pour leur faire savoir qu’ils étaient les nouveaux chefs de l’organisation. Il y a eu plusieurs assassinats et les corps ont été retrouvés à Bogota. D’autres, qui voulaient à échapper à la vendetta initiale, ont cherché a faire alliance avec les anciens maîtres des lieux « Don Diego » et « Rasguno » pour essayer de faire face à « Comba ». Mais ils sont aussi tombés dans les vendettas des derniers mois.

Tel est le cas d’un ex policier surnommé Cardenas, qui était chargé de tenir un des bureaux d’encaissement de Varela, avec une influence à Cali et Buenaventura. Une autre affaire à Buga, dans le centre d’el Valle, où a été tué au fusil, Jose Ignacio Bedoya un des prête-noms de confiance de « Jabon ». A la fin de février, les autorités de Pereira, Risaralda ont découvert les corps mutilés de deux hommes. Il s’agissit des frères Húber et Dagoberto González Rivas, lesquels, selon les autorités, étaient responsables du contrôle des routes de la drogue sur la côte Pacifique pour l’organisation de Varela. Dans des villes comme Tuluá, Andalucía, Cartago, Ansermanuevo, El Dovio, Versalles, Zarzal, La Unión et Bugalagrande, ont a aussi signalé des assassinats sélectifs ordonnés par “Comba”.

Les autorités savent seulement que l’homme chargé de procéder à ces assassinats est connu sous l’alias “ Cero Seis”. Selon les calculs des organismes de renseignement, dans es seuls deux derniers mois près de 35 personnes qui appartenaient au groupe de Varela sont tombés dans cette nouvelle guerre de la mafia.

71. Le mercredi 9 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Chouette, de la lecture !

Wílber Alirio Varela, alias « Jabón ».

Jabón, c'est-à-dire savon. Pourtant, il ne vend pas de "savonnettes", lui ? Plutôt des sachets de sucre en poudre, non ?

Effectivement, la leçon, c'est que lorsqu'on vit dans une société de non-droit, fût-elle codée, sans attaches morales pour une vie commune harmonieuse, on risque à tout moment ce genre de transgression intéressée. Et dans la mafia, ça se règle de façon généralement énergique.

72. Le jeudi 10 avril 2008 à , par Morloch

Il semble que les pseudonymes idiots soient dangereux pour la vie, un chef Farc tué par l'armée colombienne s'appelait El Pitufo "Le Schtroumpf".

Bon j'ai passé les divers épisodes navrants des avions français envoyés à Bogota et les quelques communiqués goguenards de l'Anncol qui ont suivi, avec des propos contradictoires de la famille Betancourt sur la santé de la pauvre Ingrid qui serait soit morte, soit en bonne santé, soit les deux dans la même phrase, sans que l'on sache bien d'après quelles sources. Malheureusement, il semble que le principal intérêt de cette affaire soit de suivre en direct depuis 6 ans un des pires cafouillages de l'histoire de la diplomatie française.

Pour revenir à la politique colombienne qui se trouve face à un cas de figure parlementaire peu commun, il faut bien le recoannaître :

El Congreso en ruinas, un article de Semana avec des solutions à la crise qui me paraissent discutables.

73. Le jeudi 10 avril 2008 à , par Morloch

Et la traduction :


Le congres en ruines

Avec 51 parlementaires mis en examen et 28 en prison, le pouvoir législatif agonise. Quelle est l’issue ?

Date : 04/05/2008 –

Le Congrès colombien peut déjà s’ajouter à la liste universelle de l’infamie. Dans l’histoire des états modernes, il ne figure aucun pays qui aurait 51 parlementaires mis en examen par la justice ( ce qui représente 20 % du Congrès) et 27 d’entre eux en prison. Les raisons de leurs détentions sont encore plus préoccupantes que l’ampleur même du scandale : accords secrets avec des groupes illégaux, financement de paramilitaires, contrainte sur l’électorat et, dans certains cas, accusation d’avoir participé à des massacres et des enlèvements.

Le semaine passée, trois parlementaires de plus ont été arrêtés. Et l’effet domino va se poursuivre. La tache noire de la parapolitique continue à s’étendre sur le territoire et touche de nouveaux parlementaires. La majorité de ces « pères de la patrie » sont impliqués dans un projet politique machiavélique construit sur la dialectique du plomb et de la tronçonneuse des paramilitaires, et avec la toile de fond de milliers de paysans qui pleurent leurs proches assassinés et de millions de paysans déplacés par la terreur.

Aujourd’hui, la peur se transfère des zones rurales vers le Congrès de la République. Du paysan terrifié par la violence rurale on passe à la classe politique terrifiée par la justice. La nervosité augmente au Congrès. Quand sonne le téléphone, quand arrive un fax, ou quand on entend une sirène. Mais ce n’est pas seulement la tension et le sentiment d’impuissance. Il y a aussi l’arrivée de suppléants inconnus et sans représentativité.

Les exemples du représentant à la Chambre Víctor Julio Vargas et du sénateur Ricardo Ariel Elcure illustrent la crise de représentativité. Vargas a reçu son mandat avec seulement 2.907 votes et Elucre avec 4.017. Ces deux chiffres sont inférieurs aux votes obtenus par des citoyens ordinaires pour être élus comme conseillers municipaux dans des arrondissements de Bogota. Et ce qui est encore plus grave, ils sont également bénéficiaires de votes supposés obtenus avec l’aide de paramilitaires : sans les 173.000 votes par Álvaro García, Miguel de la Espriella et Mario Uribe – les deux premiers emprisonnés et le troisième objet d’une enquête – leur parti, Colombie Démocratique, n’aurait pas atteint le seuil nécessaire pour obtenir le siège qu’occupe aujourd’hui Elcure.

Et la situation se répète pratiquement avec tous les parlementaires qui sont remplacés par leurs suppléants à cause du scandale. En clair, la justice fait son travail de sanction des individus, mais le Congrès fait comme si de rien n’était. Il y a deux partis, par exemple, qui se retrouvent avec plus de 50 % de leurs voix remises en cause 5Colombia Viva, 71 %, Colombia democratica, 63 %) et ont toujours le droit d’occuper tous les sièges qui ont été obtenus par les votes douteux.

A un moment, avec un nombre important de condamnations, il faudra bien s’interroger sur la légitimité de l’élection en général. Sont soumis à enquête ou derrière les barreaux des parlementaires qui représentaient 2.223.447 votes, c’est dire 11 % du total des votes. Et Si l’on ne prend en compte que le total de sénateurs et de représentants élus, le pourcentage de suffrages contaminés serait de 18 %.

Les choses sont très compliquées. La situation réelle de l’Assemblée l’a rendue fragile et manipulable. Les dernières sessions parlementaires ont brillé pour leur pachydermie. Des sujets qui doivent être débattus sont cruciaux et sont paralysés : donner à la Cour Suprême le pouvoir de déclarer une guerre illégale et priver le Ministère du travail de cette prérogative - indispensable dans le cadre du TLC avec les Etats-Unis - , ou bien une loi pour trouver une sortie aux limbes juridiques dans lesquelles se trouvent 9.000 paramilitaires. Mais il est également devenu un Congrès effrayé – l’agressivité entre les parlementaires est à fleur de peau – et manipulable – par-dessus tout avec une Présidence de la République aussi forte et un premier mandat si populaire.

Comment est-ce que le Congrès en question, auquel il reste plus de deux années de mandat, peut-il débattre de réformes fondamentales de l’Etat ?Que peut-il arriver si est déposé un projet de réforme ou de référendum qui proposerait la possibilité d’un troisième mandat ? Ce pouvoir législatif est-il illégitime ?

C’est un cadre surréaliste et dramatique qui oblige à penser ce qu’on doit faire avec ce Congrès. Parce que clairement le pire qui puisse se passer est que s’impose l’idée que le mieux est de laisser les choses en l’état, et que le Congrès continue son mandat comme une sorte d’éléphant blanc qui d’une institution finirait par se transformer en un monument à l’impunité.

La solution n’est en rien facile. Des sanctions sont prévues par les textes contre ces pratiques, applicables aux parlementaires, mais pas aux partis. Alors s’élèvent des voix pour une révocation et des élections anticipées. La sénatrice uribiste Gina Parody a demandé “ de prendre des remèdes extraordinaires pour faire face à une crise extraordinaire” et a propoisé “ une réforme constitutionnelle dans laquelle seraient soumis à de nouvelles élections les partis qui inscriraient des candidats ayant des liens avec l’illégalité. »

Le sénateur du Polo Democratico Gustavo Petro et le président du Partido Liberal, César Gaviria, se sont montrés également partisans de la révocation, de même pour toutes les élections qui sont prévues en 2010. D’autres, comme l’ex-sénateur Rafael Pardo, militent pour une réforme « structurelle » qui apure la politique. Et l’éditorialiste du Nuevo Siglo demande que soit reprise l’idée de la première campagne de Uribe de réduire le Congrès de deux à une seule chambre et le nombre de parlementaires de 266 à 150, pour lesquels les élections pourraient être avancées.

Le Président, qui il y a un an se positionnait pour les sanctions contre les partis liés aux paramilitaires, a demandé cette semaine que la Colombie ne fasse pas un saut dans le vide. Et, comme de coutume, il y a des mouvements civiques qui recueillent des signatures pour décapiter le Congrès agonisant.

Pourquoi une révocation ne serait-elle pas viable ? Bien que cela soit une hypothèse très populaire, il est aujourd’hui impossible qu’elle donne l’effet attendu. La seule collecte de signature est un processus lent et si on y ajoute les autres formalités légales, on arrive vite aux deux ans et quatre mois qui restent à ce Congrès. Et comme l’a bien suggéré le président, c’est un message inutile pour les investisseurs étrangers qui montre une perte de contrôle et des institutions sans poids qui n’ont pas la confiance du pays.

En Colombie, le Congrès a été révoqué trois fois : en 1905, pendant le mandat de Rafael Reyes, pour permettre les changements constitutionnels qui étaient gelés au Congrès à cause des oppositions entre les partis après la Guerre des Mille Jours. En 1949, le Président Mariano Ospina Pérez a voulu garder l’initiative face à un Congrès qui voulait le renverser. Et en 1991, à cause d’un septième vote rendu nécessaire par le nécessité de changements structurels du pays.

L’éventail de possibilités pour tenter de fermer les brèches qui se sont ouvertes en plein coeur de la démocratie n’est pas très étendu. La solution la plus attrayante, sans doute, est d’approuver la réforme politique qui est arrivée à mi-chemin, avec quelques retouches indispensables.

Dans cette réforme constitutionnelle, qui a déjà été approuvée dans sa première version, sont envisagées les sanctions nécessaires pour purger le Congrès actuel. Mais le problème est que jusqu’à présent elle est conçue pour être appliquée à partir du Congrès qui sera élu en 2010.

La proposition la plus viable et nécessaire serait que la seconde version du texte soit corrigée et soit établie afin que les sanctions s’appliquent de façon immédiate ce qui éviterait ainsi de continuer avec un parlement blessé à mort pendant plus de deux ans. Du point de vue juridique, certains soutiennent que la réforme ne pourrait pas être modifiée de cette façon, cependant la Cour constitutionnelle aurait le dernier mot.

Le premier point qui est envisagé par la réforme est que si un parlementaire est condamné pour des liens avec des groupes illégaux, son parti perd le siège. Cela signifie que perdraient dès aujourd’hui des sièges : Colombia Democrática (Miguel de la Espriella et Eric Morris), Colombia Viva (Dieb Maloof), Partido Conservador (Alfonso Campo) y Apertura Liberal (Jorge Luis Caballero). Et il faudrait refaire les comptes nécessaires pour faire en sorte que les partis indépendants comme Mira, ou d’opposition comme le Polo Democrático, aient un groupe plus important. Y compris la liste menée par l’ex-maire Enrique Peñalosa, qui n’a pas atteint le seuil, pourrait atteindre le Sénat.

Le second point est que les votes de chaque congressiste condamné soient retirés au parti concerné et si avec le somme du reste des votes le seuil n’est pas atteint pour constituer un groupe, ce parti perd tous ses sièges et son existence au Congrès.

Et le troisième point est que si un parti perd plus de 50 % de ses représentants ou sénateurs, il perd également sa représentation au Congrès. Dans ce cas, seraient visés des partis tels que Colombia Democrática, de Mario Uribe (avec trois prisonniers et quatre mis en examen); Colombia Viva, de Dieb Maloof (avec un détendu et quatre mis en examen); Convergencia Ciudadana, de Luis Alberto Gil (avec un détenu et cinq mis en examen), et Apertura Liberal, dans lequel milite le fils du chef d’entreprise Enilse López, la 'Gata' (avec un détenu et qutre mis en examen).

Mais est-ce si légitime qu’un Congrès aussi remis en cause se charge de réformer la constitution ¿ Il l’a déjà fait, entre autres, avec la réforme des transferts de pouvoir aux collectivités territoriales. Cependant, ce cas serait différent si était pris en compte le fait qu’il s’agit d’une réforme dans laquelle, à la manière d’un acte de contrition, les partis cherchent eux même la punition pour purifier la démocratie.

Pour cette raison, un groupe de consultants du Programme des Nations Unies pour le Développement (Pnud) propose de retirer les autres points de la réforme politique qui n’ont rien à voir avec ces sanctions : c'est-à-dire, l’augmentation du seuil d’entrée au Congrès de 2 % à 5 %, qui enlève de l’espace aux partis moyens et privilégie les grands, et l’interdiction du double militantisme. Ce genre de modifications pourrait être discuté quand on serait parvenu à opérer la purge et que le pouvoir législatif ait regagné sa légitimité.

Il n’est pas évident que les partis acceptent cette proposition. Mais il est indispensable que soit recherché un pacte politique entre les différents groupes pour que soit lancée une réforme qui rende la crédibilité à un Congrès qui va continuer à agoniser pendant deux ans.

Cette conséquence de la parapolitique mène à plusieurs réflexions. La première, l’abîme qui existe entre la réalité régionale et la réalité qui est vécue dans les grandes villes. La fragilité des institutions souvent dominées par les groupes armés ou par des clans politiques mafiosos. Cette triste réalité est suffisante pour écarter toute proposition de régime parlementaire qui de temps à autre montre sa tête.

La seconde réflexion est que l’histoire des scandales politiques colombiens est l’histoire de la mutation du trafic de drogue. Avec une circonstance aggravante, qu’avec le cours du temps la situation a empiré. Dans les années 80, Pablo Escobar et ses partisans étaient entrés au Congrès. Mais les tentacules du trafic de drogue n’atteignaient pas les 5 % des parlementaires. Dans les années 90, quand le cartel de Cali décidé d’acheter subtilement les politiques, la procédure 8.000 a conduit 26 parlementaires en prison (10 %). Aujourd’hui, l’alliance entre la mafia et les paramilitaires a causé la mise en examen de 51 parlementaires (19 %).

Mais s’il y a effondrement au Congrès, il y a une fortification de la Justice. Au milieu de la Crise ressort le travail de la Cour Suprême de Justice et du Ministère Public, malgré les difficultés. Dans quel autre pays d’Amérique Latine peut-on dire que la Justice a mis la politique à genoux ?

74. Le mercredi 30 avril 2008 à , par Morloch

Et un peu de Colombie de nouveau. J'ai un peu levé le pied, pas qu'il n'y ait pas eu d'actualité, bien au contraire. Mais cela prend du temps et il n'est pas forcément du luxe de prendre un peu de retrait : parapolitique et démission de parlementaires, la liste continue à s'allonger et semble se rapprocher d'Alvaro Uribe. Le côté étrange de tout cela pour un observateur non averti est le total non-respect de toute présomption d'innocence. Des allégations un peu crédibles avec quelques faits un peu flous à l'appui semblent suffire pour provoquer la démission d'un député. Dans le climat colombien, y a t'il des garanties pour éviter les manipulations ? Est-ce qu'à avoir voulu trop bien faire en matière d'Etat de droit, la Colombie n'a pas enclenché un processus dévastateur dangereux pour la démocratie elle-même ?

L'avenir le dira.

En attendant, un petit article sur un sujet qui n'est pas nouveau, mais qui n'est toujours pas traité par la presse française : la démilitarisation (ou "retrait", despeje dans le texte) demandée par les Farc et l'avis de personnes concernées. Mal écrit, compte rendu presque sténographique et difficile à traduire, mais passionnant par certains détails qu'il donne.

El Pais de Cali

Mais je m'aperçois que je n'ai pas toujours si mal choisi mes articles. Tu as remarqué que l'article sur l'Etat de santé d'Ingrid Betancourt évoquait la source des rumeurs sur son état de santé, et évoquait le flou de celles-ci et l'absence de sources directes ? J'ai du mal à suivre la démarche de la famille et de la diplomatie française, les Farc multiplient les communiqués narquois alors que Bernard Kouchner est encore dans la région. Je me demande ce qui va sortir de tout cela.

Et voici la traduction de l'article du Pais de Cali :

75. Le mercredi 30 avril 2008 à , par Morloch

Texte un peu confus; mais les grandes idées ressortent. En prime, il y a un bel emploi de stigmatisés, si cela ce n'est pas un bon texte ! J'ai donc choisi "retrait" plus que " démilitarisation", les termes ne sont pas neutres dans les traductions, ce que veulent les Farc c'est un retrait de toute l'administration, pas seulement des militaires. Le terme même d"accord humanitaire" est un terme Farc un peu gratiné, repris par tout le monde.

Les autorités de la Vallée de Cauca, Pradera et Florida refusent la possibilité de se retirer de ces municipalités. L’ex-otage et épouse d’une victime d’enlèvement souligne qu’il s’agit de sauver des vies humaines.

Si une chose ressort clairement de la table ronde initiée par El Pais, c’est qu’entre les autorités des zones directement affectées par un éventuel retrait des villes de la Valle de Cauca de Pradera et Florida, il existe un consensus total au sujet des inconvénients de ce retrait.

Le gouverneur de la Vallée, Juan Carlos Abadia, a réaffirmé sa position qu’il expose depuis sa campagne électorale : un non franc et massif, car il est convaincu que pour dialoguer, il n’est pas nécessaire d’évacuer un territoire.

Le général Jaime Esguerra, commandant de la IIIème brigade, appuie la position du gouverneur Abadia et fait remarquer qu’un retrait de ces municipalités constituerait un risque grave pour la sécurité de tous les habitants de la Vallée du Cauca.

Dans leur plan stratégique, les Farc avaient à l’origine comme objectif la capitale Bogota, et comme ils ont été incapables de l’atteindre, la nouvelle direction est Cali. En étant à Florida et Pradera, ils contrôlent le couloir d’accès à cette ville, Cali se retrouverait en pratique otage des Farc, dit l’officier.

Le commandant de la IIIème Brigade expose que ce retrait ne serait pas de 45 jours comme l’ont initialement demandé les Farc mais que la guérilla s’arrangerait pour maintenir pendant un temps indéfini la démilitarisation de la zone, comme il est advenu au Caguan.

Des les maires des deux municipalités de la Vallée de Cauca, le plus opposé au retrait est Salvador Rodriguez, de Florida, qui lors de la renconbtre organisée par El Pais a insisté sur le fait qu’il présidait aux destins des 80.000 habitants de Florida, lesquels, a-t-il répété, ne veulent pas de ce retrait.

Mais dans la table ronde, on a également pu entendre des voix en faveur du retrait des deux municipalités pour que le Gouvernement et les Farc puissent négocier leur accord humanitaire.

Patricia Nieto, épouse de l’ex-député Siifredo Lopez, otage dans les mains des Farc depuis 6 ans, dit qu’il s’agit de sauver des vies humaines. Elle a fait un appel au Président : il y a des colombiens qui ont besoin de rentrer à la maison et pas à la manière des onze députés otages assassinés.

Le retrait est considéré nécessaire parce que ce qui prime est la vie des otages, plus que les motivations politiques des parties.

Il s’agit de sauver des vies, Patricia Nieto, épouse de l’ex-député otage Sigifredo Lopez.

Je suis de Pradera, la municipalité n’est pas vulnérable dans ces circonstances, c’est la situation que vit le pays. Nous ne pouvons pas continuer à stigmatiser Pradera, le retrait peut être dans n’importe quelle part de Colombie, pourquoi ne pas céder sur ce point ? Parce qu’il est nécessaire que les Farc rencontrent le Gouvernement.

Il y a une loi, la 418 de 1997, qui facilite les rencontres du Gouvernement avec des groupes à la marge de la loi. Le Gouvernement à rencontré les milices d’autodéfense dans une zone neutre, il y a donc un fondement juridique qui donne les possibilités comme il a été fait avec les marxistes de l’ELN. Quand le débat s’est ouvert, la communauté indigène m’a envoyé une lettre pour que je la donne au Commissaire de la Paix, dans laquelle ils acceptent le principe du point de rencontre et de prêter leur terre. Il n’y avait pas de problème, de même avec les paysans, ici la difficulté est la partie urbaine. Les personnes des zones rurales approuvent le retrait alors qu’on leur donne des garanties de sécurité et de développement.

Cela ne sera pas un nouveau Caguan : Orlando Beltran, ex-parlementaire

Au sujet du retrait, les deux parties ont raison. Mais il faut faire une différence, on ne peut pas dire que cela va être la même chose que Saint Vincent del Caguan. Là bas, il s’agissait de 42.000 kilomêtres, ici on parle de 680 kilomètres. Il n’y avait pas de terme précis, ici on parle de 45 jours. Le pays entier réclame l’accord humanitaire, il s’agit de sauver des vies humaines et nous devons sauver des colombiens. Nous ne pouvons pas attendre qu’un autre pays vienne résoudre nos problèmes. Pour quelle raison ne faisons nous pas un grand effort. Je comprends que cela va apporter beaucoup de difficultés parce qu’il est vrai qu’il y a des difficultés, parce que c’est comme de céder un peu à la délinquance, mais comprenons le de façon humaine, sauvons ces citoyens qui sont oubliés, malades et attendent que les bras s’ouvrent. Eux (les Farc) disent qu’ils veulent Pradera et Florida, ils ne donnent pas d’autres explications, nous leur demandons de choisir d’autres zones, et nous proposons Amzonas et Vichada, ils répondent que non, qu’ils veulent cette zone précise. Comme c’est un cas humanitaire, cela vaut la peine d’être analysé.

Les garanties de sécurité : Fabio Cardozo ex –assesseur de Paix

S’il n’y a pas de retrait, il n’y a pas d’échange. Pour les Farc, le retrait est important. Je ne crois pas qu’en 45 jours, ils vont se fortifier de telle manière que cela signifie une perte dans l’équilibre stratégique des Forces de l’Etat. Je pense qu’il ne va pas y avoir de retrait parce que la guerilla ne va pas changer sa position, car cela serait donner raison au Gouvernement qui dit que la guérilla agonise. La lecture que fera l’opinion publique serait que l’acceptation par les Farc qu’il n’y ait pas de retrait préalable pour un dialogue est que la guérilla est bien finie, donc elle va maintenir cette exigence coute que coute. Ces discours vont conduire à la mort des otages. Les Farc ne bougeront qu’au moment où on les appellera à convenir des termes d’une table ronde sur les conditions du retrait préalable à la liberté des otages.Pour les gouvernements et les Farc, l’important est d’être celui qui envoie l’impulsion qui définira le cours de la guerre en Colombie. La guérilla est intéressée dans le retrait plus que dans toute autre chose, cela les intéresse de s’asseoir à une table et à partir de cette conversation d’obtenir la reconnaissance politique qu’elle cherche. Les avantages politiques sont plus importants. Florida et Pradera leur offrent la sécurité. Ils vont chercher à être dans une zone où ils se sentent forts.

Il n’appuie pas le retrait à cause du coût militaire et social qu’il implique. Les libérations déjà effectuées par les Farc démontrent que cela n’est pas nécessaire.

Pour dialoguer, il n’y a pas besoin de retrait. Juan Carlos Abadia, gouverneur de la Vallée.

Je n’appuie pas l’échange humanitaire pour la libération des otages, je suis convaincu que la paix est plus facile à obtenir par la voie négociée, mais avec des conditions claires et des compromis de part et d’autres. Les groupes à la marge de la loi demandent que nous abandonnions la Valle de Cauca, je conserve la position que j’ai toujours eu et je m’y tiens : le non franc et massif, parce que je suis convaincu que pour dialoguer, il n’y a pas besoin d’évacuer un territoire. Je ne le permettrai pas. C’est un devoir du Gouvernement. La Vallée est entrée dans un processus de réactivation économique, c’est un département qui a été ravagé par la violence, par le trafic de drogue, ces fléaux sont en train de s’éloigner, il y a une action de l’autorité publique pour restaurer l’ordre et nous nous pouvons pas démotiver toutes ces personnes qui ont risqué leur vie pour garantir le calme en réalisant maintenant un retrait. S’il se trouvait que nous devions envisager ce sujet, nous le ferons avec le Président de la République et l’unique façon qui me ferait accepter un retrait d’une zone de la Vallée du Cauca est qu’il me dise que la contrepartie est la la libération de la totalité des otages.

Le retrait serait alimenter les Farc : General Jaime Esguerra Santos, commandant de la Troisième brigade.

Quelle est la spécificité de Florida et Pradera ? Une importance géostratégique, une double situation sur la cordillère Centrale qui contrôle un couloir de mobilité depuis le Tomlima, Quindio et le Pacifique. Cette double situation est très importante pour les Farc et ils l’ont fait savoir dans leur plan stratégique qui avait pour objectif initial la capitale, Bogota. Ce premier plan n’ayant pas été accompli, le nouvel objectif est Cali. A Florida et Pradera ils contrôleraient ce couloir, Cali serait prise en otage. Les couloirs du trafic de drogue utilisent la Cordillère centrale, transportent la Marijuana qu’ils cultivent dans le nord du Cauca, toute la culture de pavot qui se produit dans la partie haute de la zone et qui passe vers Timbe, ensuite à Patio Bonito et sort par la rivière Naya vers le Pacifique. Démilitariser cette zone établirait un couloir pour approvisionner les Farc en armes et munitions comme pour sortir la drogue vers le Pacifique. Il y a sept minutes de Florida à Pradera, mais pour Cali ce sont 30 minutes ? Quand existait la zone neutre précédente, ils allaient à Neiva à six heures de route, faisaient des attentats et revenaient à Macarena, Meta.

Ce qu’il faut c’est marcher vers la liberté : Roy Barreras, parlementaire

Les Farc se sont chargées eux-mêmes de montrer qu’ils n’avaient pas besoin de zone démilitarisée pour libérer des otages, ils n’ont qu’à les laisser marcher librement vers la liberté, il n’y a besoin de rien de plus. Les Farc cherchent à obtenir avec ce retrait ce qu’ils n’ont pas pu obtenir en 40 ans de violence : la reconnaissance politique avec une autorité sur un territoire et la mise en place d’un état de transition qui n’est pas autre chose qu’un modèle de gouvernement populiste et autoritaire dans lequel s’établiraient les seules formes de gouvernement que les Farc connaissent à l’intérieur de leur organisation, et qu’ils ont offert à la Colombie. Le retrait de quelque zone que ce soit du territoire colombien est une reconnaissance politique et l’embryon d’un état de transition qui est une hypothèse qui met en risque la sécurité de 40 millions de colombiens. Le gouvernement ne peut pas faire autre chose que de continuer à défendre sa souveraineté démocratique, sans céder aux Farc qui ont désespérément besoin d’espace.

S’ils avaient quelque chose d’une conscience humaine, les Farc pourraient trouver de nombreux chemins pour une libération des otages.

Nous ne voulons pas être stigmatisés : Salvador Rodriguez, maire de Florida

Je suis totalement d’accord avec le Gouverneur, on ne peut pas démilitariser la ville. En janvier a été réalisée une consultation à Florida, 96 % de la population a dit non à la démilitarisation.

Notre municipalité est stigmatisée, les gens pensent que la guerilla est dans les murs, par conséquent le problème que nous avons est que les gens changent de perception de notre cité, évidemment nous avons comme expérience se qui se passa dans le Caguan, cela a été une situation lamentable. Notre communauté est dans l’oubli et nous tenons au progrès et au développement.

Je suis en accord total avec les paroles du gouverneur en ce que nous ne voulons pas de ce retrait, nous sommes avec les otages, nous ne nous opposons pas à l’accord humanitaire, mais nous croyons dans l’importance du développement des 80.000 habitants de Florida que nous ne voulons pas laisser stigmatiser par le Gouvernement, ni par les personnes et les gouvernements étrangers. Et je préside à la destinée de 80.000 habitants de Florida qui, je le redis, ne veulent pas du retrait.

Nous pensons que personne ne peut organiser une fête dans la maison de son voisin sans lui demander la permission.

Suivons les directives du Gouvernement, Guido Germon Caicedo, maire de Pradera.

Sur le sujet de la démilitarisation, il y a des directives envoyées par le Gouvernement de Bogota pour notre gouverneur qui a le pouvoir de décision sur le sujet.

En tant que maires, tenons en nous simplement à ces directives administratives du Gouvernement, que nous appuyons sans réserves, non sans insister sur le poids que l’éventualité d’un retrait fait peser à nos municipalités, sans avoir pris en compte les processus sociaux en cours et la stigmatisation dont nous sommes victimes.

A tel point que cette sigmatisation a provoqué aux élections de 2007 des évènements qui a la date d’aujourd’hui n’ont pas pu être clarifiés et cela reflète l’état de la communauté de Pradera qui a besoin de l’appui du gouvernement.

Je crois que sur ce sujet, il faut être prudent.

Dans la mesure où nous respectons les décisions des institutions, nous devons donner de la transparence au processus et être clairs dans nos observations, non seulement pour améliorer les conditions dudit processus mais aussi par respect pour nos citoyens.

L’expérience du Caguan pèse dans les esprits

La concession la plus importante sur le sujet de l’échange humanitaire est déjà faite : parler de la libération de seulement un groupe de personnes en otages et pas de centaines de personnes qui sont dans les mains de la guérilla.

Depuis l’expérience du Caguan, il n’est plus possible de parler de retrait. L’échange doit avoir lieu, mais pas de n’importe quelle façon ni à n’importe quel prix. Le dialogue Farc-Gouvernement, dont il est question, est une question de forme, pas de fond. On peut dialoguer dans beaucoup d’endroits y compris à l’extérieur du pays. Le retrait comprend des questions politiques et militaires, de sécurité et d’opinion publique liées au côté humanitaire de l’échange.

Une majorité de l’opinion recherche un échange et l’appuie, mais une majorité est aussi contre le retrait de Pradera et Florida.

La meilleure façon de parvenir à établir le dialogue Gouvernement-Farc, c’est dans la zone de rencontre proposée par la France, l’Espagne et la Suisse. Des missions internationales et nationales déployées de façon adéquate pourraient donner des garanties au gouvernement, aux Farc et à la société. L’experience du Caguan est dans les esprits et personne ne peut assurer que les Farc ont changé de manière de se comporter.

Citations

“ De façon à faciliter le processus, on peut discuter d’une zone de rencontre en Colombie, mais pas dans la Vallée de Cauca”. Juan Carlos Abadia, gouverneur de la Vallée de Cauca.

“ Dans ce couloir, ce que nous obtiendrons des Farc seront des mines et des attaques. Penser à se retirer de cette zone serait une erreur. » Jaime Esguerra, commandant de la Troisième brigade.

“ Il y a une priorité nationale qui est la sécurité des 40 millions de Colombiens. Le retrait implique une menace ». Roy Barreras, parlementaire.

“ Ce qui s’est passé au Caguan est lamentable, cette communauté est tombée dans l’oubli et nous nous appuyons sur le progrès ». Salvador Rodriguez, maire de Florida.

“ Nous nous accordons avec les directives des Gouvernements nationaux et départementaux. Pour cette raison, nous ne somme pas d’accord avec le retrait. » Guido Caicedo, maire de Florida.

“ Il pourrait y avoir retrait et cela ne garantira pas qu’il y ait un échange humanitaire, le sujet est de dialoguer » Diego Arias, analyste politique.

Chiffres

- Il y a 45 kilomètres de distance entre Cali et les villes de Pradera et Florida.

- 5 grandes entreprises sucrières ont des exploitations de canne dans les plaines de Pradera et Florida

- 140.000 personnes habitent dans les deux villes exigées par les Farc pour l’échange humanitaire

- 680 kilomètres de zone démilitarisée est la demande des Farc au Gouvernement pour pouvoir envisager la libération des otages échangeables.

76. Le mercredi 30 avril 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Bonjour Morloch !

Et merci...

Le côté étrange de tout cela pour un observateur non averti est le total non-respect de toute présomption d'innocence. Des allégations un peu crédibles avec quelques faits un peu flous à l'appui semblent suffire pour provoquer la démission d'un député.

C'est vrai que la présomption d'innocence est parfaitement respectée en France. :-))

Et dois-je rappeler qu'en Amérique, la présomption relativement floue d'homosexualité a conduit un homme politique à démissionner de ses fonctions, il y a moins d'un an ?

Alors, franchement... Mais ça tourne un peu à l'Italie de l'opération "mains propres", cette histoire (un député sur deux était poursuivi pour malversations diverses).


Mais je m'aperçois que je n'ai pas toujours si mal choisi mes articles. Tu as remarqué que l'article sur l'Etat de santé d'Ingrid Betancourt évoquait la source des rumeurs sur son état de santé, et évoquait le flou de celles-ci et l'absence de sources directes ?

Effectivement, parce que ça n'évolue pas beaucoup pour quelque chose d'imminent. Je suis vraiment frappé du monceau de moyens convoqués. Bien sûr le petit avionnet spécial, en touriste, mais y compris dans les médias, les médecins qui se prêtent au jeu des supputations... Ca me laisse assez perplexe.

Cela dit, on comprend bien qu'il faut d'une part agiter un peu les choses pour essayer de "faire bouger les lignes", comme on dit, d'autre part renouveler un peu le produit pour vendre du papier. C'est de bonne guerre.


Le terme même d"accord humanitaire" est un terme Farc un peu gratiné, repris par tout le monde.

Oui, toujours cette affaire d'empathie terminologique des journalistes, voilà vraiment quelque chose qui me fascine. Ca marche entre eux pour reprendre des expressions figées, comme je le disais il y a déjà longtemps à propos de Poutine, mais ça fonctionne parfaitement aussi pour les choix d'organisations extérieures, comme se renommer altermondialistes, se déclarer résistant, etc.


Les autorités de la Vallée de Cauca, Pradera et Florida refusent la possibilité de se retirer de ces municipalités. L’ex-otage et épouse d’une victime d’enlèvement souligne qu’il s’agit de sauver des vies humaines.

On en revient toujours là. Une vie humaine n'a pas de prix, c'est entendu. Mais lorsqu'il s'agit d'en sacrifier d'autres en échange ? (et pas des militaires de métier...)


Le commandant de la IIIème Brigade expose que ce retrait ne serait pas de 45 jours comme l’ont initialement demandé les Farc mais que la guérilla s’arrangerait pour maintenir pendant un temps indéfini la démilitarisation de la zone, comme il est advenu au Caguan.

Sans blague. C'est précisément le point qui n'est jamais soulevé par la presse française. A la rigueur on laisse entendre qu'un Etat souverain rechigne à bon droit, mais on n'évoque jamais les conséquences. Est-ce par pudeur pour la famille, est-ce par suivisme...


Je comprends que cela va apporter beaucoup de difficultés parce qu’il est vrai qu’il y a des difficultés, parce que c’est comme de céder un peu à la délinquance, mais comprenons le de façon humaine, sauvons ces citoyens qui sont oubliés, malades et attendent que les bras s’ouvrent. Eux (les Farc) disent qu’ils veulent Pradera et Florida, ils ne donnent pas d’autres explications, nous leur demandons de choisir d’autres zones, et nous proposons Amzonas et Vichada, ils répondent que non, qu’ils veulent cette zone précise. Comme c’est un cas humanitaire, cela vaut la peine d’être analysé.

J'avoue que j'ai du mal à comprendre comment ils ne peuvent pas avoir conscience que les terroristes continueront à enlever d'autres personnes, si les libérations leur apportent des avantages...


Démilitariser cette zone établirait un couloir pour approvisionner les Farc en armes et munitions comme pour sortir la drogue vers le Pacifique.

Les Farc cherchent à obtenir avec ce retrait ce qu’ils n’ont pas pu obtenir en 40 ans de violence : la reconnaissance politique avec une autorité sur un territoire et la mise en place d’un état de transition qui n’est pas autre chose qu’un modèle de gouvernement populiste et autoritaire dans lequel s’établiraient les seules formes de gouvernement que les Farc connaissent à l’intérieur de leur organisation, et qu’ils ont offert à la Colombie.

Ces deux témoignages laissent planer un danger encore plus importants : l'allongement de la guerre. A cela s'ajoute aussi ce que tu disais sur le recrutement dans les nouveaux territoires parcourus.


Merci, oui, c'est très nourrissant sur le débat interne à la Colombie. :-) Je n'imaginais pas qu'il puisse y avoir beaucoup de partisans sérieux de l'évacuation... ce qui est exact... dans les zones concernées !

77. Le dimanche 4 mai 2008 à , par Morloch

Article de El Tiempo

Bonsoir !

Alors que je cherche toujours en vain un article de synthèse sur les milices d'autodéfense qui permettrait de comprendre l'origine du phénomène, je fais juste un petit passage pour revenir sur le feuilleton " ordinateur de Raul Reyes". Interpol aurait fini d'analyser le contenu et rendra un rapport le 15 mai. Il semble que ce rapport alimente les pires inquiétudes pour certains et expliquerait en partie les gesticulations vénézuéliennes et équatoriennes du moment.

Beaucoup d'intox de part et d'autres, je trouve ce petit feuilleton dans le grand feuilleton très intéressant.

Traduction de l'article de El Tiempo :


Les organes de sécurité colombiens n'ont pas manipulé le contenu du PC de "Reyes"

C'est une des conclusions connues par El Tiempo du rapport que présentera le 15 mai prochain la commission internationale judiciaire d'experts en informatique mandatée par Interpol.

Cette première révélation des experts, un australien, un espagnol et un singapourien, signifie que les agences de sécurité et civiles qui ont eu l'ordinateur entre leurs mains ont respecté la prudence en tant que dépositaires.

"Le software de chaque ordinateur possède un registre visible et deux autres invisibles, et chacun d'eux possède un registre avec la date et l'heure de réception des archives, c'est une empreinte qui ne peut être changée ou altérée sans laisser de traces. " assure une source proche de l'enquête.

La commission internationale produira également un inventaire des archives de textes, photos et vidéos et d'autres types de contenu qui se trouvaient sur le PC du chef des Farc.

Enfin, ils diront si les organes de sécurité colombiens qui ont eu accès à l'ordinateur se sont conformés aux standards internationaux quand ils ont réalisé leur exploration.

L'analyse d'Interpol, que connaissent déjà quelques organismes des Etats Unis, réfutera une série de rumeurs qui ont commencé à circuler, lancées depuis des pays voisins, selon lesquelles la commission des Etats américains avait découvert des altérations dans le contenu de l'ordinateur.

La commission, constituée par demande expresse du gouvernement colombien, a terminé ce vendredi l'analyse du contenu de l'ordinateur qui fut récupéré par les forces armées après le bombardement du campement des Farc en Equateur lors duquel mourut le chef guérillero Edgar Devia, alias Raul Reyes, le 1er mars dernier.



78. Le dimanche 4 mai 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Oui, on va bientôt en savoir plus sur ces conclusions... merci ! :)

Merci aussi d'animer un peu CSS, les commentateurs habituels semblent en ermitage. :) Ou bien ils n'aiment que le lied.

79. Le vendredi 16 mai 2008 à , par Morloch

Je n'oublie pas ce fil, mais les choses se sont accélérées et compliquées de façon assez incontrôlée ces derniers jours.

La grande nouvelle est que la Colombie a extradé 14 chefs paramilitaires vers les Etats Unis, pour des raisons avouées et inavouées ? Un mélange des deux semble t'il. Ruptures dans le dépôt des armes de certains paramilitaires, volonté de collaborer avec les USA pour essayer de sauver le Traité de Libre Echange entre les deux pays, bien mal en point, mais peut-être volonté d'éloigner des témoins génants de certains aspects de la politique colombienne. Ceux qui avancent cette dernière raison prétendent que la justice américaine ne les interrogera pas sur ces points. Voire.

Tout cela ajoute au chaos ambiant de la politique colombienne dont seule reste insubmersible la figure d'Alvaro Uribe. Il est tout de même en difficulté sur certains points comme les déboires judiciaires parapolitiques de son cousin Mario Uribe, et les révélations d'une sénatrice Yidis Medina sur l'achat de son vote pour la procédure de réélection présidentielle.

Bref, j'attendais que les choses se décantent un peu pour ne pas soumettre les pauvres lutins au sensationnalisme creux.

De l'autres côté des frontières, Rafael Correa et Hugo Chavez sont très en voix. Le premier s'est baladé en France et a donnée moultes conférences vivement applaudies sur l'avenir de l'Amérique du Sud en particulier et du monde en général, le second, plus casanier, a expliqué dans ses grandes causeries télévisées qu'Angela Merkel était nazi et qu'elle pouvait aller se faire... (Angela Merkel avait déclaré que Chavez ne pouvait pas se présenter comme le porte-parole de l'Amérique du Sud) Chavez a commenté à sa façon les conclusions d'Interpol sur les ordinateurs de Reyes, " un spectacle de clowns", et regretté que le directeur actuel d'Interpol soit un "vagabond international", statut qui décrédibiliserait un tel organisme dirigé par un "vagabond" (quand il a trouvé une expression qui lui plait, Chavez tend à la répéter à l'infini).

La suite au prochain numéro, si tout cela veut bien se calmer un peu.

80. Le vendredi 16 mai 2008 à , par Morloch

Pris de remords, je ne peux tout de même laisser les lutins sans un peu de lecture :

Interpol

81. Le vendredi 16 mai 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Merci Morloch !

Oui, j'ai entendu parler de tout cela. (Il en a distribué à tout le monde : clowns, nazi, menteur, diable... il n'y qu'Ahmadinedjad qui soit épargné, en fin de compte.) Manifestement, la presse vénézuélienne dans son ensemble soutient Chávez, puisque le rapport (que je n’ai pas encore lu) valide qu’il n’y a pas eu manipulation du contenu, mais pas la concordance entre le contenu réel et les déclarations du pouvoir colombien. La prudence est de mise, donc.

Mais enfin, on sait hélas trop bien qu’à tout le moins l’aide de Chávez et la complaisance de Correa sont plus ou moins établies, ordinateur ou pas…

Ca tombe bien que tu en parles, je voulais aller récupérer, via El País, le rapport public pour y voir plus clair. On voit tellement de hâte brouillonne, dans les journaux, qu’on se méfie.

http://www.interpol.int/Public/ICPO/PressReleases/PR2008/pdfPR200817/ipPublicAbstractFR.pdf

82. Le dimanche 25 mai 2008 à , par Morloch

Ah mince. Ces colombiens sont intenables, ils profitent que j'ai décidé de parler des paramilitaires pour annoncer la mort du fondateur des Farc, Manuel Marulanda. Une semaine après la reddition de Karina, une tueuse historique du mouvement retrouvée presque morte de faim. Alvaro Uribe annonce des contacts avec les guérilla et la possible reddition de chefs importants dans les semaines à venir.

Je vais devoir reprendre un peu de service comme envoyé spécial des lutins.

83. Le lundi 26 mai 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Je m'en étais arrêté à la reddition de Karina, dont mes journaux habituels n'ont pas soufflé mot, peut-être un jour où je n'ai pas écouté ou lu la presse...

C'est bien, une petite guerre de succession chez eux, tout ce qu'il fallait pour qu'ils fichent un peu mieux la paix au pauvre monde.

Mais franchement, tu as bien raison, ils sont contrariants. C'est à présent qu'on cause d'autre chose qu'ils viennent nous casser les pieds avec leurs petits soucis de famille. D'une incorrection rare.

84. Le lundi 9 juin 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Il semblerait tout de même que la mort de Raúl Reyes, tant décriée côté français (ça allait empêcher les négociations) ait en fin de compte obligé Chávez, grâce à la récupération du fameux PC (quand on vous dit que les Mac c'est pas bien), à se retirer, au moins formellement, de sa position très ambiguë de soutien plus ou moins explicite à la guérilla.

Il est peut-être trop tard pour l'otage emblématique, mais si ça peut permettre de hâter la fin des haricots (verts) de la forêt équatoriale, ce ne serait pas un mauvais calcul.

85. Le mardi 10 juin 2008 à , par Morloch

Oui, je m'excuse de la relative absence de réaction ici, mais comme tous les malheureux observateurs de cette histoire, je ne peux que subir le flot d'informations au rythme d'au moins un coup de théâtre par semaine.

J'essaierai de faire un points pour que les lutins guyennais ne soient pas déconnectés de leurs cousins équatoriaux.

Je crois aussi que les ordinateurs de Reyes sont au centre de la grande partie qui se joue en direct.

Correa et Chavez sont obligés de mettre un bémol du côté de leur soutien implicite ou explicite, d'autant qu'ils ne sont pas toujours l'objet d'un respect infini dans les fichiers retrouvés. Il se peut aussi qu'il soit risqué dans le contexte actuel de passer trop ouvertement pour le soutien de groupes terroristes.

Difficile de faire le tri, l'armée équatorienne a eu un important accrochage avec les Farc il y a quelques jours, Correa prend la pose d'un intransigeant sans qu'on comprenne bien ce qui est joué et ce qui est vrai. Correa fait figure de second couteau dans les discussions entre Uribe et Chavez et cherche à exister, on en aurait presque de la peine pour lui.

Au Vénézuela, rien n'est clair. Un important convoi de munitions à destination des Farc a été intercepté par l'armée colombienne, un des conducteurs était officier de l'armée vénézuélienne. Le lendemain, Chavez décrit le combat des Farc comme un combat du passé voué à l'échec et demande la libération sans conditions des otages.

Par ailleurs, il y a des rumeurs d'une très importante vague de meurtres politiques en ce moment au Vénézuela. Mais pas grand chose à se mettre de concret sous la dent dans la presse sur cette question.

En Colombie, il y a toujours la suite du projet de troisième élection d'Uribe. Il est un peu plombé par les révélations de corruption qui auraient entâché la première réforme constitutionnelle permettant la réélection. Il semble pourtant que le processus soit lancé? uribe feint le détachement.

Il y a aussi la continuation de l'affaire des chefs paramilitaires extradés. Leurs auditions par la justice américaine vont commencer vendredi, me semble t'il. Vont-ils parler de la politique colombienne ou uniquement du trafic de drogue ?

Pendant ce temps, les ordinateurs de Reyes ont fait éclater une nouvelle affaire dite de la "Farcpolitique" dont la principale victime est la sénatrice Piedad Cordoba. Elle serait bien plus proche des Farc qu'elle ne l'annonçait et pas seulement une Chaveziste colombienne comme elle se présentait.

A son sujet, la révélation la plus "tragi-comique" pour les français est venue de Paris Match qui aurait eu accès à des échanges de mails entre Piedad Cordoba et les Farc ainsi qu'à des messages internes aux Farc. La sénatrice, au cours de rencontres avec des responsables guérilleros aurait eu des propos assez peu politiquement corrects.

Sur la libération des otages par les Farc : "il faut libérer quelqu’un, mais pas Ingrid ", en revanche elle n'en a rien à faire des autres otages qui peuvent être libérés. Toujours sur Bétancourt : Ingrid "est maigre, elle l’a toujours été, et elle ne va pas en mourir pour autant". C'est d'autant plus grinçant qu'elle fait partie des interlocuteurs toujours mis en avant par les comités de soutien français, présentée comme la meilleure alliée possible pour la libération d'Ingrid Bétancourt, comme étant intelligente, pondérée, ouverte au dialogue et ayant la confiance de Chavez (à propos de Chavez, elle aurait déclaré qu' " il n’a pas une profonde notion des propositions politiques des FARC". Elle avait rencontré Nicolas Sarkozy le 20 décembre 2007. D'ailleurs il en est aussi question dans les fameux ordinateurs : elle " n’en a rien à foutre de la proposition de Sarkozy". Les divers comités de soutien à Ingrid Bétancourt sont restés coi pour l'instant, peut-être frappés de stupeur.

Sur le front, la guerre continue, avec des accrochages très violents entre les Farc et l'armée colombienne. La pression militaire semble très très forte sur le nouveau chef des Farc, Alfonso Cano. Manifestement, les colombiens voudraient bien l'ajouter le plus vite possible au tableau de chasse, d'autant qu'il semble maintenant confirmé que les secrétariat des Farc ne s'est pas réuni pour sa désignation dont les modalités sont un peu mystérieuses. L'armée colombienne joue toujours la désorganisation de la guérilla.

L'ELN, l'autre guérilla d'extrême gauche en difficulté, semble vouloir profiter de la situation pour faire une OPA sur les Farc.

Voilà en gros les points qu'il faudrait développer sur l'actualité colombienne pour commencer à y comprendre quelque chose (ce qui n'est pas forcément mon cas).

86. Le vendredi 13 juin 2008 à , par Morloch

Et pour illustrer un peu, un éditorial de Rafael Guarin dans Semana.

Il est fait aux allusion des extraditions de paramilitaires. L'article est plus intéressant par l'ambiance qu'il évoque que par les solutions proposées.

Article

87. Le vendredi 13 juin 2008 à , par Morloch

Et sa traduction maison :

Revoir l’extradition

Par Rafael Guarín
Date : 05/15/2008 –

La décision d’extrader les dirigeants du paramilitarisme favorise le gouvernement, mais érode gravement l’Etat de Droit. Avec habilité, Uribe a changé le scénario et coupé l’herbe sous le pied de ceux qui disaient qu’il était incapable d’extrader les ex-chefs paramilitaires à cause de sa peur viscérale que ceux-ci dénoncent ses liens présumés avec ces organisations.

La conséquence ironique est que ces mêmes critiques disent aujourd’hui qu’il a fait procéder aux extraditions pour que les chefs paramilitaires ne parlent pas. Le gouvernement n’a jamais donné d’assurance judiciaire de non-extradition, au contraire, il a toujours conditionné l’extradition à ce que Mancuso, Jorge40, Don Berna et les autres narcotrafiquants respectent les obligations de la loi de Justice et paix. La politique de renforcement de la Sécurité Démocratique, parmi les dispositions qui combattent le retour de tels groupes, envisage d’« ôter tous les bénéfices juridiques, appliquer la loi pénale ordinaire et, quand cela s’avère opportun, extrader ».

Au début du processus à l’encontre des paramilitaires, l’extradition immédiate paraissait convenir. La supprimer ou la suspendre indéfiniment à l’occasion d’un « processus de paix », était une incitation au dépôt des armes pour de nouvelles bandes de narcotrafiquants disposées à se retirer des milices d’autodéfenses ou des guérillas en échange de faibles peines en Colombie et l’impunité à l’extérieur.

En dépit de cela, certaines choses font penser que l’extradition devait se faire après l’exécution des peines en Colombie. La première, la découverte du fameux programme de « Resocialisation des Narcotrafiquants » du Département de Justice des Etats-Unis, qui en échange de confession de délits, des circuits de la drogue et de l’argent, offrait de faibles peines et même la possibilité de maintenir une partie de la richesse illicite. C’est probablement la raison pour laquelle les extradés du jour n’ont pas révélé les voies d’exportation de la drogue et n’ont pas remis de biens à la justice colombienne. Ils préfèrent négocier avec les tribunaux des Etats-Unis au sujet des réparations à accorder aux milliers de victimes, ainsi que l’a dit le Haut Commissaire au sujet de la destination finale de ces biens.

Le jeu des paramilitaires est d’exécuter en même temps la peine qu’exigent les tribunaux des Etats-Unis pour trafic de drogue et la réparation exigée par la commission de crimes dans le cadre de la Loi Justice et Paix. Un « petit article » de ladite loi dit que « la peine peut être accomplie à l’extérieur ». La négociation est rentable pour ces délinquants : des 8 années qu’il risquent au maximum en Colombie, une partie pourra être effectuée dans les prison des Etats-Unis.

S’il s’agit d’être dur avec les délinquants (comme on se doit d’être), on devrait s’en tenir à la règle du jeu originale : prononcer les peines ordinaires qui atteindraient facilement 40 années et, ensuite, procéder à l’extradition.

Lamentablement, si rien ne se passe depuis la société civile, l’extradition finira par étouffer sous une mer de confusion et d’impuissance les victimes et ceux qui demandent la vérité sur les liens avec les politiques, les entreprises, l’armée, les magistrats, les services publics, les multinationales et les agences de renseignement nord-américaines.

Il faut exiger du gouvernement qu’il empêche que se répète le non-respect de la loi Justice et Paix pour les 3.284 cas encore en attente. Il est urgent de fixer un terme durant lequel pourraient être respectées les exigences de vérité et de réparation , sous peine d’être exclus des avantages de cette loi. C’est la seule façon de s’assurer que les adjoints, qui en réalité étaient ceux qui animaient la machine à tuer et qui maintenaient une relation permanente avec les différents niveaux de la société, révèlent la vérité.

Pour écarter toute suspicion de contribuer à l’impunité, il faut exclure les extradés des bénéfices de Justice et Paix. De cette façon, on élimine la possibilité d’accomplir sa peine à l’extérieur, en restant protégé par la justice ordinaire et en suivant les procès, dans l’attente que se confirme la peine aux Etats-Unis et requérir le rapatriement a fin qu’il y ait réparation des victimes. Finalement, que les crimes et délits soient imprescriptibles.

A ce moment, de façon simple, on doit demander au gouvernement qu’il collabore avec les organisations de la société civile avec le propos de maintenir le devoir de vérité, de justice et de réparation et que se mettent en place des mécanismes de suivi et l’observation rigoureuse des procès qui se poursuivent aux Etats-Unis.

Dans l’avenir, il est nécessaire qu’un nouveau gouvernement comprenne que le traité d’extradition est dans les deux sens et aie le courage et l’autorité d’exiger le retour des narcoparamilitaires, une fois accomplie leur peine aux Etats-Unis. De plus, on ne doit pas avoir peur de réviser le traité et ouvrir un débat indispensable pour éviter qu’un mécanisme de coopération judiciaire se dénature et que les criminels finissent à se bronzer au Soleil des plages de Miami pendant que leurs victimes affrontent en solitude leur propre disgrâce.

88. Le vendredi 27 juin 2008 à , par Morloch

Et bien, si j'avais su dans quoi je me lançais avec cet Alvaro Uribe...

Ce n'est pas fini. Il faut que je comprenne ce qui s'est passé exactement, mais il semble que la Cour suprême colombienne ait déclaré qu'elle allait vérifier la validité de la réforme constitutionnelle qui a permis la première réélection du Président colombien.

Celui-ci a lancé une riposte immédiate. Il demande que soit organisé un référendum sur la légitimité de sa réélection.

Rien n'est simple, et tout se complique...

89. Le vendredi 27 juin 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

... quelle vigie ! Et moi qui n'ai pas encore eu le temps de me plonger dans tes dernières investigations, je ne vais plus être au goût du jour. Là, je suis attendu en ville, mais je vais rebondir rapidement. :)

90. Le mardi 1 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Me revoici !

Je crois aussi que les ordinateurs de Reyes sont au centre de la grande partie qui se joue en direct.

Oui, Chávez commence à marcher sur des oeufs, ça repose.

d'autant qu'ils ne sont pas toujours l'objet d'un respect infini dans les fichiers retrouvés.

C'est-à-dire ?

Correa fait figure de second couteau dans les discussions entre Uribe et Chavez et cherche à exister, on en aurait presque de la peine pour lui.

Heureusement pour lui que les guérilleros viennent un peu faire joujou de son côté, sinon personne ne le connaîtrait hors de ses frontières.


Au Vénézuela, rien n'est clair. Un important convoi de munitions à destination des Farc a été intercepté par l'armée colombienne, un des conducteurs était officier de l'armée vénézuélienne. Le lendemain, Chavez décrit le combat des Farc comme un combat du passé voué à l'échec et demande la libération sans conditions des otages.

Il me paraît limpide au contraire que Chávez ne voudrait pas perdre ses soutiens idéologiques en s'associant explicitement à un groupe de tortionnaires.
Son image de putschiste converti à la démocratie par le populisme (dans le sens anglo-saxon) était touchante, mais à force de gaspiller ses ressources en bravades et en dons sans lendemain, de priver ses productions des standards et aides internationaux, et même de soutenir les guerres civiles environnantes, il finit par ne plus avoir rien que d'un histrion dangereux.


Par ailleurs, il y a des rumeurs d'une très importante vague de meurtres politiques en ce moment au Vénézuela.

De quel côté ?


Pendant ce temps, les ordinateurs de Reyes ont fait éclater une nouvelle affaire dite de la "Farcpolitique" dont la principale victime est la sénatrice Piedad Cordoba. Elle serait bien plus proche des Farc qu'elle ne l'annonçait et pas seulement une Chaveziste colombienne comme elle se présentait.

Sans blague, ils feraient mumuse avec des gens qui ne leur seraient pas favorables... ça fait longtemps que tout le monde le savait, non ?


Sur la libération des otages par les Farc : "il faut libérer quelqu’un, mais pas Ingrid ", en revanche elle n'en a rien à faire des autres otages qui peuvent être libérés. Toujours sur Bétancourt : Ingrid "est maigre, elle l’a toujours été, et elle ne va pas en mourir pour autant". C'est d'autant plus grinçant qu'elle fait partie des interlocuteurs toujours mis en avant par les comités de soutien français, présentée comme la meilleure alliée possible pour la libération d'Ingrid Bétancourt, comme étant intelligente, pondérée, ouverte au dialogue et ayant la confiance de Chavez (à propos de Chavez, elle aurait déclaré qu' " il n’a pas une profonde notion des propositions politiques des FARC". Elle avait rencontré Nicolas Sarkozy le 20 décembre 2007. D'ailleurs il en est aussi question dans les fameux ordinateurs : elle " n’en a rien à foutre de la proposition de Sarkozy". Les divers comités de soutien à Ingrid Bétancourt sont restés coi pour l'instant, peut-être frappés de stupeur.

Ou ils laissent passer l'orage. Ca n'a pas filtré dans la presse française.

C'est vrai que c'est un peu stupéfiant, parce qu'à ce stade, ce n'est plus seulement une alliée politique des Farc, mais une conseillère stratégique... Elle a évidemment parfaitement raison sur latout impossible à échanger que représente Bétancourt, mais on ne va pas reprendre notre conversation sur le caractère potentiellement contre-productif de ce tapage médiatique (d'un autre côté, on comprend bien que la famille ne se sent pas d'attendre en croisant les bras...).


Effectivement, dans l'édito, on voit bien l'atmosphère de pagaille généralisée (et, de pair, de calcul des malveillants de toute sorte pour passer entre les gouttes), pour le moindre événement politique...


Il demande que soit organisé un référendum sur la légitimité de sa réélection.

Il devrait faire attention, les référendums, en Europe comme en Amérique, sont glissants ces temps-ci...
Drôle de réponse qui laisse augurer qu'il n'est pas à l'aise sur le fond juridique, en tout cas.


Merci encore à toi d'éclairer la lanterne des lutins ; on a beau s'intéresser, il y a tant de choses qui nous échappent...

91. Le mardi 1 juillet 2008 à , par Morloch

Oui, difficile de suivre en ce moment, il faut s'accrocher.

ils ne sont pas toujours l'objet d'un respect infini dans les fichiers retrouvés.
C'est-à-dire ?



Il faudrait que je retrouve les extraits précis, mais ce qui me surprend le plus dans certains fichiers, c'est que les Farc voient plus Correa et Chavez comme des alliés de circonstance que l'on manipule au besoin, que comme des frères d'armes. Je ne suis pas certain que cette perspective ravisse Chavez, mais peut-être suis-je trop naïf.


Par ailleurs, il y a des rumeurs d'une très importante vague de meurtres politiques en ce moment au Vénézuela.
De quel côté ?



C'est l'information la plus sujette à caution de mon message. Il faudrait que je consacre une véritable énergie à rassembler les données. J'ai vu une mention de cette vague d'assassinats, mais en cherchant concrètement et rapidement, je n'ai trouvé d'articles précis que sur la mort de deux journalistes vénézuéliens le mois dernier, retrouvés tous deux exécutés à leur domicile. (Je ne suis pas journaliste en définitive, j'ai le droit de faire état de rumeurs non ? J'essaierai de donner des informations précises, mais cela va m'obliger à trouver des sources fiables sur le Venezuela... déjà que je n'en ai pas sur la Colombie...)

L'affaire Piedad Cordoba et ses propos sur Ingrid Betancourt a peu filtré dans les médias français, c'est vrai. Mais les comités de soutien à Ingrid Betancourt semble être entrés dans une zone de tempête. J'ai fini par apprendre qu'il y a des comités divers, certains proche des enfants et de l'ex-mari, d'autres proches de la sœur, et que tout n'était pas au beau fixe entre eux et en leur sein même. Je ne sais pas si c'est vraiment passionnant de s'y intéresser. Par contre, je me demande si du côté de l'Elysée et des journaux, les yeux n'ont pas commencé à s'ouvrir sur le bilan de ces comités.

Bref, je me trouve trop occupé de rumeurs et de suppositions. Il va falloir que je redresse la barre. Je propose ce soir un article sur l'augmentation des surfaces de coca cultivées constatée dans un rapport des Nations Unies. Au moins c'est du concret.

Et ensuite, j'essaierai de suivre cette histoire de référendum.



92. Le mardi 1 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Merci pour les précisions. :-) Non, aucune obligation de faire mieux que ce n'est déjà le cas sur le Venezuela, simple curiosité de ma part.

L'affaire Piedad Cordoba et ses propos sur Ingrid Betancourt a peu filtré dans les médias français, c'est vrai. Mais les comités de soutien à Ingrid Betancourt semble être entrés dans une zone de tempête. J'ai fini par apprendre qu'il y a des comités divers, certains proche des enfants et de l'ex-mari, d'autres proches de la sœur, et que tout n'était pas au beau fixe entre eux et en leur sein même. Je ne sais pas si c'est vraiment passionnant de s'y intéresser. Par contre, je me demande si du côté de l'Elysée et des journaux, les yeux n'ont pas commencé à s'ouvrir sur le bilan de ces comités.

Ce n'est pas trop le problème des journaux, ça : ça fait vendre du papier, l'émotion. Ensuite, que dans le contexte de crise d'une famille déjà séparée, face à une telle épreuve et à des décisions aussi lourdes de conséquence (du moins s'efforce-t-on de le croire), il existe des frictions, ça paraît assez naturel, et ils sont surtout à plaindre, quelle que soit la sympathie limitée qu'on nourrisse par ailleurs pour leurs modes d'action.


Merci encore à toi. ;)

93. Le mercredi 2 juillet 2008 à , par Morloch

Finalement, un coup génial de l'armée colombienne qui s'est fait passer pour l'état major des Farc - ça a l'air d'être bien le foutoir leur organisation -, et Ingrid Betancourt est libérée.

Je pense qu'Alvaro Uribe vient d'atteindre les 136 % d'opinions favorables, son référendum est bien risqué.

94. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Oui, à ma grande surprise : à moins que l'organisation ne s'effondre, je ne la voyais pas sortie de sitôt. Remarque, on n'en est pas loin...

On peut se féliciter ce soir d'avoir honoré Uribe de notre mansuétude, et les partisans les plus politisés dans les comités doivent manger leur chapeau : ils n'ont servi à rien, et la méthode forte qu'ils voulaient interdire a seule résolu le problème.
J'ai souri (un peu crispé tout de même) en entendant un responsable de comité : "on continue à se battre" (pour quoi ? pour la démission d'Uribe ?).


Mais c'est une excellente nouvelle qu'elle soit libérée (ainsi que d'autres otages tout de même). Et j'en suis d'autant plus ravi que ça n'a rien coûté (l'Etat français n'a pas eu à verser une rançon en armes pour enlever ou tuer des colombiens innocents, par exemple). Plus mesquin, la punition de l'inconscience de Betancourt en se promenant sur des territoires contrôlés par la guérilla trouve une plus juste punition dans son sauvetage par l'ennemi juré Uribe que par sa détention inhumaine, bien sûr.

J'attends avec gourmandise les remerciements envers Uribe par les soutiens. Certains ont dès ce soir tout fait pour esquiver. Je me trouvais dans une pièce avec la télévision, et les regards méchants jetés à Sarkozy par la fille, lorsqu'il remerciait Uribe, puis l'armée colombienne, étaient très amusants, on y lisait l'indignation politique. (Par ailleurs, elle a remercié les autorités colombiennes, autrefois tant conspuées, ce qui était une excellente surprise.)


J'espère que l'oubli dans lequel ne manquera pas de sombrer la Colombie (déjà très superficiellement traitée) ne nuira pas aux otages qui y demeurent, mais manifestement, la présence de soutiens n'a pas été d'une grande efficacité.
Sarkozy a annoncé que la proposition d'hébergement des transfuges qui libèreraient des otages se poursuit ; si ce n'est pas qu'une annonce, c'est un beau geste.


Lorsque l'écume sera dissipée, on y verra peut-être encore plus clair en lisant la presse locale. Mais comme tu le dis, Uribe, pas tant par la libération de quelques otages que par la démonstration de sa compétence, s'assure de rester indispensable, corruption ou pas.

95. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par Morloch

Le décalage est frappant entre l'otage libérée, qui sort avec un chapeau de l'armée colombienne et fait un hommage appuyé à Uribe, déclarant que sa réélection a été une très bonne chose et la famille. Heureusement, Nicolas Sarkozy a remercié le chanteur Renaud, pièce décisive dans la libération... Et un avion de plus de parti.

Au final, on pourra résumer l'activité diplomatique de la France à une sorte de promotion tous azimuts du trafic aérien entre Paris et Bogota. A peine croyable le nombre d'avions plus ou moins vides qui auront fait la navette en 6 ans. A se demander si au quai d'Orsay ils sont au courant qu'il y a des lignes régulières vers l'Amérique du sud ?

Pour changer de sujet et donner des information concrètes, comme promis, cet article du Pais de Cali du 19 juin :

En Colombia hay más coca en cultivos

La surface cultivée de coca en Colombie a augmenté de 27 % en 2007. Malgré cette augmentation, la production de la drogue reste stable.

L’an passé, les cultures de coca dans le pays ont cru de 27 %, ce qui en hectares signifie 21.000 de plus qu’en 2006. Les chiffres, communiqués hier par le Bureau des Nations Unies contre la Drogue et les Délits, Undoc (sigle en anglais), représentent une préoccupation sérieuse pour la politique d’éradication du Gouvernement, qui est appuyé par l’ONU et les Etats-Unis.

Le directeur de l’Undoc, Antonio Maria Costa, a dit que “ la croissance des cultures de coca en Colombie est une surprise et un choc : une surprise parce qu’elle arrive à un moment où le Gouvernement de Colombie s’efforce d’éradiquer la coca, et un choc du fait de l’ampleur des cultures”.

Le Gouvernement, pour sa part, à travers le ministre de la défense, Juan Manuel Santos, a déclaré avoir de sérieux doutes sur les chiffres révélés hier. « Ils comprendraient certaines zones qui n’ont jamais été détectées, et prendraient également en compte un nouveau satellite, nous avons de sérieux doutes et il y a eu une énorme discussion sur la méthodologie utilisée pour arriver à ces conclusions ».

Le rapport révèle que, alors qu’en 2006 la zone cultivée de cette plante dont on extrait l’alcaloïde était de 78.000 hectares, en 2007 elle a atteint les 99.000 hectares, ce qui en termes pratiques signifie qu’en Colombie il y a une surface plantée qui représente deux fois le district de Cali. L’étude montre de plus que presque la moitié de toute la production de cocaïne (288 tonnes) et un tiers des cultures (35.000 hectares), proviennent de seulement 10 municipalités du pays.

« Comme en Afghanistan, où la plus grande part de l’opium est cultivé dans des régions avec une forte présence des Talibans, en Colombie la plus grande partie de la coca se cultive dans des zones contrôlés par les forces rebelles », selon le rapport.

Il indique également que c’est le sud du pays qui a la plus forte densité de cultures de coca et que c’est le département du Nariño qui a le plus contribué à l’augmentation des zones plantées, passant de 15.606 hectares de coca en 2006 à 20.259 en 2007.

Production stable

Malgré l’augmentation des cultures, selon le rapport, la production de cocaïne en Colombie reste quasi inchangée, environ 600 tonnes annuelles, car les plantes cultivées sont de plus faible feuillage, dispersées et qui produisent moins à l’heure de la récolte.

Le directeur de la Police nationale, le général Óscar Naranjo, a dit lors de la présentation du rapport que dans le cas colombien la « pression » des forces de l’état sur les cultures de coca est la raison qui explique que la production reste stable. Les producteurs ne peuvent tout simplement plus procéder de la même façon qu’auparavant avec leurs cultures, a déclaré Naranjo. De plus, les cultivateurs sont en train de « s’enfermer dans la jungle profonde », où il est beaucoup plus difficile de pratiquer la chimie qui permet d’obtenir la drogue.

Le rapport andin de la coca 2007rédigé par l’Undoc a évalué la superficie totale de terres dédiées à la culture de la coca en Bolivie, Colombie et au Pérou en 2007 a été au total de 181.000 hectares, une augmentation de 16 % par rapport à 2006 et le niveau le plus haut depuis 2001.

Les cultures de coca en Bolivie a cru de 5 %, passant de 27.500 hectares en 2006 à 28.900 l’année passée. Au Pérou, l’augmentation a été de 4 %, de 51.400 hectares à 53.700 hectares sur la même période.

« En dépit de l’augmentation de la quantité de terres utilisées pour cultiver la coca, la production effective n’a quasi-pas changée depuis 2006, du faut des bas rendements des cultures. En 2007, la production mondiale a atteint 994 tonnes, pratiquement sans changement depuis les 984 tonnes mesurées en 2006 ».

Dans l’ordre, la Colombie, le Pérou et la Bolivie sont les principaux producteurs de coca dans le monde.

Chiffres

- 60 % de la cocaïne consommée dans le monde est colombienne.
- 2.198 dollars est le prix moyen d’un kilo de cocaïne
- 943 dollars est le prix d’un kilo de pâte de coca.
- 153.134 hectares de coca ont été aspergés par avion en 2007
- 66.805 hectares de coca ont été arrachés manuellement en 2007 en Colombie.
- 10.780 dollars vaut en moyenne un kilo d’héroïne
- 126.641 kilos de coca ont été confisqués l’année passée.




96. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Le décalage est frappant entre l'otage libérée, qui sort avec un chapeau de l'armée colombienne et fait un hommage appuyé à Uribe, déclarant que sa réélection a été une très bonne chose et la famille. Heureusement, Nicolas Sarkozy a remercié le chanteur Renaud, pièce décisive dans la libération... Et un avion de plus de parti.

Je suis impressionné par la quantité de couronnes désormais tressées à Uribe. Y compris par elle...

A propos de l'opération elle-même, il semblerait que plutôt qu'une infiltration, il y ait eu retournement de deux chefs militaires qui auraient convaincu leurs hommes de prendre la poudre d'escampette. Exactement le type de situation de défections que tu décrivais il y a plusieurs semaines...


- 2.198 dollars est le prix moyen d’un kilo de cocaïne

Prix de revient ?

Et après on soutiendra qu'il ne s'agit pas de narcorévolutionnaires ! Heureusement, señor Morloch nous fournit des biscuits pour la riposte.

Merci ! ;)

97. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par Morloch

Ca te paraît peu 2.200 dollars ? J'ai juste traduit l'article, peut-être qu'il y a différents prix, selon que l'on s'adresse à la centrale d'achat qui référence le produit, a à un grossiste ou un petit détaillant...

Les louanges adressées à Uribe par Ingrid Betancourt sont dans le ton général de ce que j'ai toujours entendu de la part des colombiens. Evidemment, quand on était habitué au ton de la presse française et des comités de soutien à la pauvre Ingrid, il y a de quoi être tomber des nues. Cela rejoint le décalage que j'avais constaté et qui m'avait (à l'origine) amené à me lancer dans ce fil.

Tout de même, elle était très en verve sur son tarmac :

" ...je ne serais pas là (...) si les commandants de l’armée n’avaient eu le courage de monter cette opération véritablement très courageuse.
Je pense au Président Uribe, au ministre Santos, à tous ces gens qui se sont battu pour nous, merci à eux, merci à
la Colombie, car nous sommes Colombiens et heureux et fiers de l’être, et nous y croyons à cette armée, nous pensons qu’elle va nous conduire à la paix. (...) “Ecoutez,je vais vous répondre par une réflexion que j’ai eu ces derniers temps…. “Un des coups les plus durs qui ait été porté aux Farc cela a été la réélection du Président, non seulement la réélection du président Uribe mais je dirais cette réélection qui est une expression de notre systéme démocratique …. “Pendant des années,les Farc avaient misé sur le fait qu’à chaque changement de gouvernement ils reprenaient leur souffle,ils se refaisaient militairement,et puis par cet effet de pendule lorsqu’il y avait un gouvernement qui suivait la voie dure il était suivi d’un gouvernement à la main tendue et donc à ce moment là les Farc pouvaient se refaire militairement…

Or,dès lors qu’il y a eu la réélection du Président Uribe,les Farc n’ont pas pu avoir ce souffle… ils n’ont pas réussi à le reprendre à cause de l’étau maintenu à ce moment là par le Président Uribe et je crois que sa réélection, cette réélection du Président Uribe, est une très bonne chose pour notre pays. (...) “Je suis tout à fait consciente que
la Colombie a changée entre temps, depuis mon incarcération…. “Je sais que le Président Uribe est un très bon Président (...) Il y a le Président Uribe qui est là,qui fait bien son travail et je crois que c’est un véritable capital pour chacun d’entre nous que sa présence et le travail qu’il fait notamment au plan militaire (...) Dieu seul sait ce qui se passera…mais en tous cas pour l’instant… “Je ne suis qu’un petit soldat de plus….
“Un soldat de plus…Un soldat de Colombie au service de la patrie… “Ca c’est mon plus grand bonheur,merci. (...) Les Colombiens ont élu Alvaro Uribe comme Président, ce ne sont pas les Farc qui l’ont élu et pour cette raison je pense que de même que le Président Chavez et le Président Correa ont obtenu la charge suprême dans leur pays par la voie démocratique, eh bien, il est important qu’ils respectent également ce processus démocratique et que le réglement éventuel de cette situation avec les Farc se fasse également dans le respect des régles démocratiques"



Et elle en a remis une seconde couche plus tard devant Uribe en personne pendant une seconde conférence de presse, en pleurant de joie devant lui, ce qui n'était sans doute pas non plus l'image attendue par les médias français.

Quant à la version de la reddition spontanée de chefs Farc, je m'en méfierais pour l'instant, elle semble venir exclusivement des comités de soutien français. S'il y a un recoupement, ou d'autres sources qui corroborent, il faudra peut-être la prendre plus au sérieux. La trop grande réussite de l'opération telle que décrite par l'armée colombienne peut conduire à la rendre suspecte, c'est vrai.

L'Anncol est muette pour l'instant. Il faut dire que c'est un nouveau KO pour les Farc en peu de temps, il faut un peu de temps pour mettre en place une réthorique, alors même qu'il semble confirmé qu'Alfonso Cano, le nouveau n°1 Farc est encerclé par l'armée colombienne et est incapable de communiquer.


98. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Ca te paraît peu 2.200 dollars ?

Non, ça me paraît cher pour un prix de revient. A la vente, en effet, j'imagine qu'il n'y a pas de prix fixe.

Oui, elle en a fait beaucoup dans la gratitude, c'est admirable, à se demander s'ils ne l'ont pas droguée :

mais je dirais cette réélection qui est une expression de notre systéme démocratique ….

Ou peut-être que, plus simplement, elle n'avait pas eu le temps de lire les journaux. :-)

Ce décalage, du fait du temps passé et de l'absence de contact, entre les thèses de sa famille, particulièrement sa fille, et ses déclarations toutes fraîches, laissent rêveur. Dîners de famille animés en perspective ! "Entends-moi bien, je te défends de parler d'Alvarito sur ce ton !" :-)


Quant à la version de la reddition spontanée de chefs Farc, je m'en méfierais pour l'instant, elle semble venir exclusivement des comités de soutien français.

Ma source n'était pas du tout membre des comités, c'était un documentariste qui avait approché les Farc d'assez près et conservait des relais sur place.
Il ne disait pas que c'était spontané (et puis quoi encore !), mais qu'il y avait eu corruption de responsables existants et non infiltration d'agents secrets, ce qui me paraît assez logique et semble s'imposer au fil des heures.


L'Anncol est muette pour l'instant. Il faut dire que c'est un nouveau KO pour les Farc en peu de temps, il faut un peu de temps pour mettre en place une réthorique, alors même qu'il semble confirmé qu'Alfonso Cano, le nouveau n°1 Farc est encerclé par l'armée colombienne et est incapable de communiquer.

Effectivement, ça va mal. Tout l'exécutif décapité, le territoire sans cesse rogné, les plus hauts responsables comme les simples soldats qui se font la malle, la monnaie d'échange volée au nez et à la barbe comme à des bleus...
Alors si peu qu'ils nous débarrassent à nouveau du patron, ça va forcément les occuper un peu.

99. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

N.B. : Celui qui poste le centième commentaire gagne un dîner en tête-à-tête avec le directeur suprême des comités français. :)

(Tiens, pourquoi Morloch a-t-il disparu ?)

100. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par Mareki Halter :: site

J'ai faim !!!

101. Le jeudi 3 juillet 2008 à , par Morloch

Ouf...

102. Le vendredi 4 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

La question étant : (mare)ki ha(lter) posté ?

103. Le vendredi 4 juillet 2008 à , par Kia

Perspicace ce David LeMarrec(Halter) ;-))

Mais je vous laisse reprendre vos débats géopolitiques entre gens de bonne éducation...rendez-vous pour le post n°200 pour le déjeuner avec Renaud...

104. Le vendredi 4 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Veinard.

(Oui, on se chauffe pour aller coloniser le monde comme tu as pu le voir.)

105. Le vendredi 4 juillet 2008 à , par Morloch

Bonne éducation pffff... Qu'est ce qu'il ne faut pas lire :)

A propos, un des détails les plus hilarants de cette opération est " Comment se déguiser en ONG en trois leçons, par l'armée colombienne ? "

1) Avoir l'air totalement ridicule,
2) Se balader en hélicoptère dans la jungle,
3) Porter des T-shirts du Che.

Et le drame, c'est que les responsables Farc locaux ont trouvé ça très convaincant...

106. Le vendredi 4 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Cela dit, soit que l'opération était trop parfaite et éveille les soupçons, soit que la perfection serait due à un bidonnage, il commence à être question (info Radio Suisse Romande) d'une rançon (vingt millions de dollars), ce qui serait nettement moins drôle.

Un peu étonnant, cela dit, parce ce que l'argent de la drogue coule à flots - comme tu viens de le rappeler -, et que les prétentions sont politiques. Sans quoi, ça ferait très longtemps que la France aurait versé son obole.

107. Le samedi 5 juillet 2008 à , par Morloch

A vrai dire je n'en sais rien.

Négociation, reddition, opération commando...

Il y a des arguments pour et contre chaque possibilité.

La dernière chose qui semble encore fonctionner en ce moment chez les Farc, ce sont les relais idéologiques en Europe. C'est peut-être une façon d'atténuer l'humiliation subie et de dissimuler le silence assourdissant de la hiérarchie Farc que de présenter un Uribe menteur.

Est-ce que ce dernier avait vraiment intérêt à raconter une histoire ? Il y a une enveloppe officielle de 100 millions de dollars pour les redditions, le gouvernement colombien ne cherche pas la discrétion sur ce genre de paiement, au contraire, c'est une des tactiques de pourrissement de l'organisation que de susciter des trahisons et des redditions en faisant miroiter les millions de dollars à des petits chefs exténués de crapahuter dans la jungle, avec succès. La polémique en Colombie est plus sur la moralité de ce genre d'opérations que sur leur existence.

Quant aux redditions spontanées, le gouvernement colombien est trop heureux d'en faire la publicité, pour les mêmes raisons.

L'article de la TSR parle encore de la mort de Reyes comme d'une opération dont la finalité était d'empêcher la libération d'Ingrid Bétancourt unilatéralement par les Farc, imminente le jour de la femme. Ce passage me paraît discréditer tout l'article à lui seul. Il est clair que les Farc ne voulaient pas libérer Bétancourt, et empêcher la libération de Bétancourt ne peut pas avoir été une finalité en soi pour le gouvernement colombien. C'est une vision franco-franchouillarde des choses, initiée par les comités de soutien français qui la présentaient comme le centre de gravité de la politique d'Amérique du Sud. C'est absurde. Reyes au moment de sa mort était probablement le véritable n°1 des Farc, et même si il n'était "que " le numéro 2, il était un objectif militaire important.

Les américains auraient payé la rançon ? Peut-être. Mais les trois techniciens capturés n'étaient pas (et ne sont toujours pas) médiatiques, pour cause de délit de sale gueule, et les Etats-Unis perdent régulièrement des agents de sécurité en Irak et en Afghanistan sans payer un dollar.

Maintenant l'opération paraît quasi irréelle - ce qui dans un sens pourrait aussi être un argument pour sa véracité, le vrai est souvent invraisemblable. Peut-être aussi qu'on n'imagine pas le degré de désorganisation des Farc en ce moment, et leur impossibilité totale de communiquer. Il ne faut pas oublier que l'armée colombienne a en sa possession les ordinateurs de Reyes, et donc en toute vraisemblance de nombreuses adresses, localisations, coordonnées de groupes Farc. L'armée colombienne pourrait bien être bien plus à l'aise pour communiquer avec n'importe quel groupe Farc que les Farc entre eux.

A propos de ces ordinateurs, Interpol a fait récemment un communiqué de mise au point contre les rumeurs qui disaient que le rapport concluait à la modification des fichiers par l'armée colombienne. Interpol revient sur la question et garantit l'authenticité des contenus...

Après, il y a le pour la manipulation de la libération des otages. Besoin de faire une opération de propagande à un moment délicat, apparaître comme intransigeant. C'est tout aussi possible.

108. Le samedi 5 juillet 2008 à , par Morloch

Il y a aussi des arguments pour le bidonnage.

Le plus important est le risque que représentait cette opération. Peut-on raisonnablement penser qu'Uribe a pu prendre le risque de la mort de l'otage la plus médiatique au monde, dont on n'aurait pas manqué de le rendre responsable. Une opération sure à 100 % car mise en scène est plus logique.

On verra (ou pas).

109. Le samedi 5 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

La dernière chose qui semble encore fonctionner en ce moment chez les Farc, ce sont les relais idéologiques en Europe. C'est peut-être une façon d'atténuer l'humiliation subie et de dissimuler le silence assourdissant de la hiérarchie Farc que de présenter un Uribe menteur.

C'est exactement ce que j'ai pensé.

Enfin, sans vouloir sous-entendre que Ségolène Royal est le relais idéologique de terroristes, bien entendu, elle est dans une autre logique que celle-là, je ne veux surtout pas laisser entendre ça !


Est-ce que ce dernier avait vraiment intérêt à raconter une histoire ? Il y a une enveloppe officielle de 100 millions de dollars pour les redditions, le gouvernement colombien ne cherche pas la discrétion sur ce genre de paiement, au contraire, c'est une des tactiques de pourrissement de l'organisation que de susciter des trahisons et des redditions en faisant miroiter les millions de dollars à des petits chefs exténués de crapahuter dans la jungle, avec succès. La polémique en Colombie est plus sur la moralité de ce genre d'opérations que sur leur existence.

Oui, donc ça aurait marché aussi, et mieux qu'un mensonge (maintenant, la tentation).

Il existe cependant une énorme différence entre les deux méthodes. Là, on nous parle d'une enveloppe non pas versée à ceux qui s'enfuient (qui est très tentante), mais à l'organisation, qui a surtout besoin d'hommes et de moyens de pression politiques, l'argent n'est pas la priorité. Ils ont souvent ri au nez des français qui venaient avec leur espèces.


L'article de la TSR parle encore de la mort de Reyes comme d'une opération dont la finalité était d'empêcher la libération d'Ingrid Bétancourt unilatéralement par les Farc, imminente le jour de la femme. Ce passage me paraît discréditer tout l'article à lui seul. Il est clair que les Farc ne voulaient pas libérer Bétancourt, et empêcher la libération de Bétancourt ne peut pas avoir été une finalité en soi pour le gouvernement colombien. C'est une vision franco-franchouillarde des choses, initiée par les comités de soutien français qui la présentaient comme le centre de gravité de la politique d'Amérique du Sud.

Tout à fait d'accord. C'était le moment où les comités étaient le plus radicalisés idéologiquement. Ca me les a rendus franchement agaçants, au bas mot, voire suspects.

Et au lieu de se féliciter de l'affaiblissement des terroristes (mais ceux-là ne mettront pas de bombes à Paris, alors ils sont attachants comme tout...), la presse française (je n'ai pas tout lu cela dit, il y a peut-être eu des voix discordantes) présente l'événement comme une catastrophe, sous prétexte que les Farc se seraient précisément décidés, à ce moment, de relâcher - avec leur mansuétude bien connue - la poule aux oeufs d'or.

Non seulement c'était idiot de de le croire, mais de surcroît, c'était assez abject de regretter l'affaiblissement d'une guérilla qui asservit des populations entières, tout ça parce que ça trouble les petites affaires de notre épopée médiatique.

D'autant que cet affaiblissement a été une vraie chance pour les otages, on l'a vu...

J'étais vraiment pas content que les médias fassent si peu leur métier. Il y a des moments où le comportement moutonnier enfreint même la loi sans la moindre protestation... tant ils se voient investis d'une mission au-dessus de la déontologie. Parce qu'il y a eu pire ces dernières années. :-\


Maintenant l'opération paraît quasi irréelle - ce qui dans un sens pourrait aussi être un argument pour sa véracité, le vrai est souvent invraisemblable. Peut-être aussi qu'on n'imagine pas le degré de désorganisation des Farc en ce moment, et leur impossibilité totale de communiquer. Il ne faut pas oublier que l'armée colombienne a en sa possession les ordinateurs de Reyes, et donc en toute vraisemblance de nombreuses adresses, localisations, coordonnées de groupes Farc. L'armée colombienne pourrait bien être bien plus à l'aise pour communiquer avec n'importe quel groupe Farc que les Farc entre eux.

J'abonde. :) De surcroît, l'explication du retournement rend très crédible l'affaire : il suffit de se souvenir de la fin misérable d'Ivan Rios, et du départ paisible "la main dans le sac" de son ex-garde du corps. Il y a beaucoup de monde qui a envie de se carapater, et on les comprend.


A propos de ces ordinateurs, Interpol a fait récemment un communiqué de mise au point contre les rumeurs qui disaient que le rapport concluait à la modification des fichiers par l'armée colombienne. Interpol revient sur la question et garantit l'authenticité des contenus...

La polémique a aussi été plus subtile : les fichiers n'ont pas été modifiés, mais Uribe aurait raconté n'importe quoi sur leur contenu (ce qui est tout à fait possible d'ailleurs).


Après, il y a le pour la manipulation de la libération des otages. Besoin de faire une opération de propagande à un moment délicat, apparaître comme intransigeant. C'est tout aussi possible.

Certes, mais je vois mal comment l'argent aurait pu être une solution, sinon la France serait passée à la caisse depuis des années, d'autant qu'on a un agent admirable en la personne de Hamad ben Khalifa Al Thani...
Bien sûr qu'une opération comme celle-ci fait rêver n'importe quel gouvernement (les français s'y sont essayés, comme tu le racontais ici même...), mais s'il était facile de trouver une solution, panache ou pas, elle aurait été appliquée depuis longtemps, surtout si simplement financière (et je l'aurais déploré, parce que des armes aux Farc, ça fait plus d'un mort innocent, même s'ils ne sont pas francophones...).


En revanche, je crois que j'ai compris cet engouement. J'ai été extrêmement impressionné par la maîtrise, la chaleur, l'habileté de Betancourt. Capable de hiérarchiser très finement ses remerciements, de dire au public, sans se dédire, ce qu'il a envie d'entendre (moi le premier...), de le faire avec un enthousiasme qui ne me paraît pas feint. Avec un charisme assez hors du commun, et en plus de cela une patience infinie (à sa conférence de presse, hier, elle répondait complètement à chaque question, même identique).

Je ne suis pas étonné, du coup, que tant de gens aient tenu à tout prix à la sauver, elle a quelque chose de très vite attachant, j'ai vraiment été cueilli. Et lorsqu'on a un être cher en jeu, évidemment, on est prêt à prendre tous les risques sur les autres pour le sauver.

Ca me paraît finalement un ressort psychologique assez naturel et pas forcément odieux, qui permet de relativiser certaines positions très dérangeantes des comités - que j'imaginais moins proches d'elle, donc jouant aux zorros, alors qu'il est très aisé de se croire son ami... Ca explique de façon positive certains débordements.

110. Le samedi 5 juillet 2008 à , par Morloch

Il y avait une autre polémique sur les ordinateurs de Reyes du fait de la rédaction du rapport d'Interpol. Le rapport distinguait les fichiers système des fichiers utilisateur. Des fichiers système avaient été modifiés après la capture des ordinateurs par l'armée colombienne, du seul fait d'avoir allumé les ordinateurs et d'avoir lu leur contenu.

Les fichiers utilisateur n'avaient pas été modifés. Et Interpol est catégorique sur ce point. Tous les sceptiques ont cependant utilisé le texte d'Interpol pour lui faire dire que l'armée colombienne avait modifié le contenu des ordinateurs de Reyes.

D'où une nouvelle mise au point d'Interpol.

Ensuite, en effet, on ne sait pas si ce que communique le gouvernement colombien se trouvait vraiment sur ces fichus ordinateurs ou bien s'il y a un peu de broderie. Très peu à filtré au final.

Du peu qui a filtré, il y a peut-être du vrai. Par exemple, on n'a pas vu Piedad Cordoba la grande amie d'Ingrid qui a tant œuvré pour sa libération, tomber dans ses bras sur le tarmac de Bogota. C'est curieux.

111. Le samedi 5 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Ta façon d'envisager la théorie du complot est beaucoup plus compatible avec la mienne que celles que je lis quotidiennement, je dois dire. :-)

112. Le mardi 8 juillet 2008 à , par Morloch

Partons donc dans les complots :p

Et voilà une vidéo amusante !

113. Le mardi 8 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Rien ne s'affiche chez moi. Mais rien que le titre est drôle en soi.

114. Le mardi 8 juillet 2008 à , par Morloch

Arf zut, le lien ne marche plus. C'était un article basé sur une information qui a filtré (pourquoi aujourd'hui ? Le gouvernement colombien serait-il facétieux ?) : un mail de Raul Reyes envoyé au négociateur français Noel Saez en août 2003 (l'affaire de l'avion français de Manaus est de juillet 2003).

Le texte serait le suivant : " Il est inexplicable que vous ayez remis l'argent pour la liberté de madame Ingrid Betancourt sans avoir auparavant confirmé l'identité et obtenu des garanties de ceux qui vous ont reçus et qui se sont joués de vos bonnes intentions humanitaires."

115. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Si c'est vrai, c'est assez drôle et ajoute opportunément à ton délicieux tableau en début de page. :-)

116. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par Morloch

Si c'est vrai, on ne sait pas le montant.

Contrairement aux apparebnces, l'affaire Bétancourt n'en est peut-être qu'à ses prémisses...

117. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Manifestement, de toute façon, on n'est pas près de la voir hors du paysage... donc notre spécialité locale de polémiquette aura toute latitude pour s'exprimer dans toute l'étendue de son artistique brio.

118. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par Morloch

Oui, y compris s'il s'agit d'une pomémiquette à 500 millions de dollars.

119. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Tout le monde était d'accord pour envoyer un porte-avions pour la chercher, 500 millions de dollars, ce ne serait pas si méchant.

Il va falloir arrêter de jouer les cyniques de maternelle, on n'est pas crédibles.

120. Le mercredi 9 juillet 2008 à , par Morloch

Pffff pas crédible, pas crédible. Moi qui était si heureux de me lancer dans la théorie du complot.

Je vais en être réduit à revenir à des articles à contenu informatif... Une misère...

121. Le jeudi 10 juillet 2008 à , par DavidLeMarrec :: site

Tu n'y connais rien en théories du complot, c'est tout, tu es un sale rationaliste raisonnable.

Dieu merci, les démocraties ne sont pas peuplées de tristes sires comme toi, et on a de quoi s'amuser avec des [strike]pantalonnades[/strike] loufoqueries abondantes.

122. Le jeudi 7 août 2008 à , par DavidLeMarrec

Comme prévu, les otages et les populations victimes des Farc sont bel et bien oubliés.

CSS, à sa mesure, fait dans la résistance symbolique (et entretient son espagnol au passage).

Dans le fil déjà amplement fourni par les glorieuses traductions de l'infatigable Morloch, j'ajoute ma pierre par une traduction d'une tribune de Juan Carlos Palou dans Semana, le 5 août dernier.

http://www.semana.com/wf_InfoArticulo.aspx?idArt=114248

Voici :


**********


« Le noyau dur des FARC »

Lorsque quelqu'un se sent héritier d'un héritage révolutionnaire, dans le cas présent le "marulandisme", il perd toute latitude de manoeuvre puisque les décisions ont été prises par celui qui n'est plus et que le moindre changement peut être considéré comme une trahison au défunt révéré.

Certains secteurs de l'opinion considèrent qu'il existe aujourd'hui une probabilité majeure pour le commencement d'un processus de paix avec les Farc, non seulement en raison des revers militaires subis par l'organisation, mais de surcroît liées au caractère "politique" de la nouvelle direction. L'hypothèse suggérait que l'idéologie et le discours politique apportent un certain bon sens [ndddlm : ne cognez pas, ce n'est pas moi qui le dis...] qui faciliterait la solution négociée du conflit. La question porte donc sur le contenu concret de cette idéologie des Farc, de ce discours politique ? Un document pourrait nous fournir quelques pistes sur le sujet : le communiqué de Rodrigo Granda et Jesús Santrich, membres du Bloc Caraïbes des Farc, daté du 20 juillet. Il n'est pas inutile d'analyser son contenu intégral.

A qui s'adresse le communiqué de Granda ? Il s'agit manifestement d'un message dirigé vers l'intérieur, aux membres abasourdis de l'organisation. Et c'est également un message adressé à l'extérieur, limité à ceux qui sont leurs sympathisants, à ceux qui possèdent une "foi absolue" dans les Farc. Ils citent quelques noms d'intellectuels de stature internationale qui leur ont signifié leurs condoléances pour la mort de Marulanda [ndddlm : malheureusement, l'article ne précise pas qui...] ou offert un appui politique décisif en cette période difficile. Ils assurent accepter les critiques mais rejettent la "pondération mensongère" de ceux qui leur proposent de déposer les armes. Il rééditent donc la division entre amis et ennemis, sur le fondement de l'appui ou de l'opposition au principe de la lutte arme. Cela se comprend en ce que les critiques les plus notables qu'ils aient reçues ces derniers mois provenaient de personnalités de gauche - c'est-à-dire de leaders ou d'intellectuels qui sans renoncer aux objectifs de changement politique et de justice sociale, considère que la lutte armée des Farc est anachronique, stérile et cruelle.

Comment justifient-ils, alors, la nécessité de la lutte armée ? Sur le fondement d'une vaste citation de Lénine, dans laquelle celui-ci critique le pacifisme et l'antimilitarisme absolus comme indignes d'un véritable socialiste. Un autre argument est avancé : les causes qui furent à l'origine du mouvement armé n'ont pas disparu, ni en Colombie, ni dans la "Grande Patrie latinoaméricaine".

Au moins trois longs paragraphes du communiqués sont dédiés à la liste des noms des martyrs de toutes époques et de toutes causes populaires ou libertaires qui se sont déployées en Amérique Latine. Un véritable exercice d'adoration des martyrs. A la fin de ces paragraphes funéraires, on trouve l'affirmation suivante : "Nous ne serons pas en vérité, NON et mille fois non, ceux qui baisseront les armes de Marulanda, les armes du peuple, qui se sont levées pour l'émancipation." Cette révérence envers les morts devrait diminuer l'optimisme quant à une prochaine négociation de paix, pour diverses raisons.

Lorsque quelqu'un se sent héritier d'un héritage révolutionnaire, dans le cas présent le "marulandisme", il perd toute latitude de manoeuvre puisque les décisions ont été prises par celui qui n'est plus et que le moindre changement peut être considéré comme une trahison au défunt révéré. Il ne fait pas de doute que le legs de Marulanda tient dans l'immobilisme politique. Iván Márquez, dans un entretien accordé à Telesur quelques jours après le communiqué de Granda, s'est empressé d'assurer que la nomination d'Alfonso Cano impliquait de "poursuivre le chemin tracé par l'illustre Commandant en Chef Manuel Marulanda Vélez". D'un autre côté, dans la doctrine propre aux Farc, la mort violente ne constitue pas en elle-même un revers, un indice d'erreur ou d'impuissance, mais plutôt la trace de l'authenticité de la lutte. Cette idée se trouve clairement exprimée dans la parole du Che dont ils font mention : "dans une révolution, on triomphe ou on meurt, si elle est véritable". Un bon argument pour encaisser les défaites militaires : chaque nouveau mort confirme le chemin.

Ce discours radical est probablement le patrimoine exclusif du noyau dur des Farc, et pas de la troupe ou de quelques directoires intermédiaires qui peuvent être un peu plus pressés de sortir du bois. [nddlm : L'espagnol dit plaisamment : "sortir de la montagne".] Mais pour une négociation de paix sans interruption, il faudraittout d'abord en finir avec ce noyau dur - et le discours actuel semble laisse peu d'espace pour une avancée dans cette direction. Pour abandonner le fardeau de la tradition, la nouvelle direction devrait procéder à "la révolution dans la révolution", et c'est sans doute une tâche qui dépasse les capacités d'Alfonso Cano, appelé chez les Farc "Commandant de seconde catégorie".

On pourrait aussi penser que le communiqué est une tentative de restaurer leur image décatie d'acteur politique, doté d'une idéologie et de principes, pour mieux se positionner en vue d'un hypothétique processus de négociation pour la paix. Voilà qui serait une interprétation positive, mais où seraient alors le courage du pragmatisme et le désir de négociation ? Ils se seraient dans ce cas sentis obligés de faire de la politique, à dépoussiérer la batterie dialectique - alors que le présent communiqué représente une triste collection de phrases toutes faites.

Le discours politique des Farc semble comme congelé, incapable de la moindre lueur de réalisme. Par exemple, les marches citadines répétées et massives en faveur de la paix ne sont pas mentionnées dans le communiqué. A moins que, dans le langage sinueux de la "nouvelle génération" de commandants des Farc, lesdites marches ne soient prises en compte lorsqu'ils affirment qu'ils n'ont "rien à craindre si le peuple nous aime". Le désir d'une négociation intégrale du conflit doit donc peut-être être remplacé par l'acception du long processus, progressif et douloureux, de dissolution de l'organisation.

123. Le vendredi 8 août 2008 à , par Morloch

C'est intéressant comme article, je n'osais plus trop en proposer de peur d'avoir lassé tout le monde. Et le matraquage médiatique massif a dû ajouter à la lassitude. Mais en effet, les médias mondiaux vont braquer leurs regards ailleurs.

Et puis quelle leçon de traduction ! J'ai honte de mes trucs mal ficelés maintenant :snirf:

Je continue à suivre, mais la situation me semble très confuse, je ne vois pas bien le sens des évolutions en cours.

Quant à savoir si les populations civiles sont abandonnées, c'est difficile à dire. Il y a une autre facette actuelle de la situation colombienne peu développée, outre sa posture "d'homme fort du Lietano" :) , Alvaro Uribe est aussi celui qui conquiert le territoire colombien au profit d'un état de droit plus fort, processus lent et délicat, mais inédit. Un pari étonnant dans ce pays dont seule une très petite proportion du territoire est mis en valeur, et qui explique aussi sans doute l'image d'Uribe dans son pays Et tout n'est peut-être pas fait avec poésie. Rien ne peut être simple dans les relations avec les indiens des zones rurales et leurs 98 idiomes, leur champs de coca entourés de mines et leur patrimoine écologique unique au monde.

Et pendant ce temps, la Bolivie explose -

124. Le vendredi 8 août 2008 à , par DavidLeMarrec

C'est intéressant comme article, je n'osais plus trop en proposer de peur d'avoir lassé tout le monde. Et le matraquage médiatique massif a dû ajouter à la lassitude.

Ca a plutôt aiguisé mon appétit, personnellement. :-)

Et puis quelle leçon de traduction ! J'ai honte de mes trucs mal ficelés maintenant :snirf:

Pas de flagornerie s'il te plaît, c'est traduit à la volée...


Je continue à suivre, mais la situation me semble très confuse, je ne vois pas bien le sens des évolutions en cours.

Quant à savoir si les populations civiles sont abandonnées, c'est difficile à dire. Il y a une autre facette actuelle de la situation colombienne peu développée, outre sa posture "d'homme fort du Lietano" :) , Alvaro Uribe est aussi celui qui conquiert le territoire colombien au profit d'un état de droit plus fort, processus lent et délicat, mais inédit. Un pari étonnant dans ce pays dont seule une très petite proportion du territoire est mis en valeur, et qui explique aussi sans doute l'image d'Uribe dans son pays Et tout n'est peut-être pas fait avec poésie. Rien ne peut être simple dans les relations avec les indiens des zones rurales et leurs 98 idiomes, leur champs de coca entourés de mines et leur patrimoine écologique unique au monde.

Effectivement...

Pour l'évolution, ça va clairement pas très bien du côté des Farc, mais de là à savoir si cela annonce la fin, et surtout à quel rythme, manifestement personne ne peut le pronostiquer avec fiabilité.


Et pendant ce temps, la Bolivie explose -

Oui, c'est beaucoup plus amusant de ce côté-là, mais on va forcément en entendre parler dans les médias un minimum complets.

Il y a des trucs rigolos en Mauritanie aussi, avec les gentils militaires bisounours qui font tous les ans de gentils coups d'Etat en carton-pâte...

125. Le mercredi 27 août 2008 à , par DavidLeMarrec

Sans changer du tout mon constat sur 'le meilleur régime jamais eu en Russie' (pour les Russes) ni les remarques sur les clichés journalistiques autour du caractère autoritaire du pouvoir en place, je commence à regretter sérieusement d'avoir plaisanté de ça, parce que voilà quelque temps que les gains de ce régime sur le tsarisme fondent comme de la neige moscovite au soleil de la Mer Noire - et si des sanctions économiques conséquentes surviennent, on ne pourra peut-être même plus mettre le développement d'une classe moyenne à son crédit.

Parce que du côté de la monocratie, des libertés individuelles et de l'attitude territoriale, les nuances s'estompent sérieusement avec le passé...

126. Le mardi 14 octobre 2008 à , par DavidLeMarrec

Des nouvelles de la Colombie, qui épargnent pour une fois l'effort de la traduction :

http://publicsenat.fr/cms/video-a-la-demande/vod.html?idE=57903 .

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