La culture dans la presse quotidienne
Par DavidLeMarrec, samedi 9 juillet 2005 à :: Vaste monde et gentils :: #52 :: rss
Le milieu de l'édition regarde avec inquiétude les tirages baisser. Pourquoi cet engrenage incoercible ? On se le demande, tiens.
Evidemment, il y a la concurrence des médias plus "faciles d'accès", avec son, image et tout et tout. L'effort inhérent au format est un frein à sa consommation rapide et délassante. Et puis la présence d'équivalents - par le format uniquement, mais cela a son importance - gratuits. Cela, on le sait depuis longtemps.
La désaffection des journaux vient aussi de ce que, si on fait l'effort de les lire, on les trouve cependant bien trop consensuels - et, lorsqu'ils s'engagent, aveuglément partisans (reste à savoir qui s'égare). Et leur colonnes exigeantes tendent à s'ouvrir aux témoignages personnels, excitant le sentiment d'injustice, mais sans perspective, et qui plus est sans le souffle du journalisme narratif assumé.
Outre la plus grande difficulté de ce support et la diversité d'attentes vis-à -vis de lui, on rencontre récurremment le problème de la pertinence de l'information, surtout pour un support aussi coûteux et exclusif - difficile de faire autre chose pendant la lecture prolongée de l'objet en question. Maître Eolas se plaint récurremment des négligences du Monde en matière juridique, depuis la dissolution de son service idoine ; les journalistes concernés tendent ainsi à utiliser indiféremment les termes "acquittement" et "relaxe", ce qui atteste d'une relation au droit plutôt lointaine.
Tout récemment, un article de Marie-Aude Roux a fait les gorges chaudes des fora lyriques, postulant que la Klytämnestra de Felicity Palmer (dans Elektra) avait un timbre d'ammoniaque qui corrode le souffle. La perplexité naît de ce qu'en termes de technique vocale, c'est le souffle qui fonde la voix et peut, le cas échéant, modifier le timbre - encore que le timbre soit plutôt lié aux résonateurs qu'au souffle lui-même. Provenant d'une journaliste initialement formée en musicologie, l'approximation a de quoi laisser dubitatif. Après, reste à déterminer ce que représentent un timbre d'ammoniaque et la corrosion d'un souffle, mais c'est plus là une affaire de goût sur la pertinence des choix métaphoriques de Marie-Aude.
Le pompon est toutefois tenu par Eric Dahan, apte aux meilleurs billets comme aux pires, qui déclare, toujours à propos de ces représentations :
Voilà qui laisse pantois : Elektra est en effet un drame en un acte, et le mérite n'en revient nullement à Gérard Mortier ! Eric Dahan est sans nul doute une belle vitrine de l'éclectisme dont se flatte le journal, et ce n'est pas blâmable en soi, mais certaines affirmations montrent une logique méconnaissance de pans d'un répertoire aussi vaste. Cela dit, on ne fait pas toujours mieux au Monde, avec plusieurs critiques, dont certains dotés d'une formation musicologique poussée.
Pourtant, quelqu'un savait, à Libération et, qui sait, peut-être E.Dahan lui-même :
En tout cas, ça ne fait pas très sérieux.
On comprend mieux pourquoi un média au coût, à l'effort, au temps d'incorporation supérieurs à ses concurrents ne séduit pas, s'il offre des approximations aussi lourdes (un journaliste n'est pas tenu à la pertinence sans faille de spécialistes) à ses lecteurs. Notant le degré d'à -peu-près dans les domaines où la compétence est contrôlable, on frémit en pensant à des sujets plus complexes, moins aisément vérifiables et dotés de conséquences lourdes, comme l'information et l'analyse géopolitiques.
David - grelottant
Commentaires
1. Le vendredi 26 mai 2006 à , par kfigaro :: site
2. Le vendredi 26 mai 2006 à , par DavidLeMarrec
3. Le mercredi 8 juillet 2009 à , par KidAmnesiac
4. Le mercredi 8 juillet 2009 à , par DavidLeMarrec
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